4.3. Organisation des élections
4.3.1. Prélude
En Janvier et février 1960 à la table ronde de
Bruxelles, les hommes politiques congolais ont fixé l'organisation des
élections locales en Mars et celles nationales en Mai 1960. Mais une des
fautes des acteurs politiques congolais soucieux d'obtenir
l'indépendance furent de ne pas donner des délais
nécessaires pour que ces élections s'organisent dans les
meilleures conditions mentales et matérielles.59 Ces
élections avaient pour objectif de rendre effective la nouvelle
structure du Congo organisée par la loi fondamentale, laquelle
prévoyait un parlement bicaméral : une chambre des
représentants de 117 membres élus au suffrage universel et un
sénat de 87 membres élus par les assemblées provinciales
à raison de 14 par province ; un président de la
République élu au second degré par le sénat.
En outre, la même loi prévoyait au niveau
provincial un gouvernement et une assemblée élue. La grande
caractéristique de ces élections, souligne TSHIBANGU C., "est la
trivialité : rivalités politiciennes, campagne démagogique
du type : après l'indépendance, (moi au pouvoir) vous ne payerez
plus l'impôt, vous ne travaillez plus dans les champs, vous serez comme
les blancs"60, elles sont marquées par des impératifs
tribaux, ethniques ou régionaux. En effet, au Katanga les BALUBAKAT sont
unis à une cause d'exclusivité ethnique, le MNC/L et UNC se
regroupent face au MNC/K principalement composé des BALUBA du
Kasaï, l'ABAKO est foncièrement dominée par les BAKONGO, le
CEREA s'appuie sur les ethnies du KIVU, le PUNA sur celles de l'Equateur.
A l'issue des élections législatives nationales,
le MNC/L remporte la majorité des sièges avec 36
députés, suivi de l'ABAKO avec 12 députés et le
reste des sièges sont éparpillés entre les autres
formations politiques. Et, c'est sur base de ces résultats que le
premier gouvernement fut formé le 21 juin 1960 par le premier Ministre
EMERY Patrice LUMUMBA. Quant aux élections présidentielles, KASA
VUBU en sort vainqueur, élu au second degré par le sénat
avec 159 voix, suivi de BOLIKANGO avec 44 voix, sans compter les 11 votes
nuls.61
Sorti de l'exil, Moïse TSHOMBE organise les
élections de 1965. Il avait entre autres chargés de terminer la
crise et de pacifier le pays. La mission principale de TSHOMBE étant
d'assurer la tenue des échéances électorales, l'occasion
devient favorable au regroupement des forces politiques dispersées ou
anéanties par les rebellions, les sécessions ou l'exil. TSHOMBE
créa alors la CONACO (Convention Nationale des Congolais) regroupant 49
partis et associations à bases tribales. Les nationalistes dont le MNC/L
dispersés à cause de la rébellion et l'exil, se regroupent
et se réorganisent.
Pour des raisons de sécurité et de
communication, ces élections vont se tenir du 20 février au 01
avril 1965. La CONACO en sort victorieuse avec 122 députés sur
les 167 sièges à pourvoir au parlement. Suite aux nombreuses
irrégularités signalées dans le KWILU, le
59 CRAWFORD YOUNG, Introduction à la
politique congolaise, éd. Universitaire du Congo, Lubumbashi, 1965,
p.79.
60 TSHIBANGU C.,art.cit., p.27
61 MAUREL A., Le Congo de la Colonisation belge
à l'indépendance, éd. Harmattan, paris, 1992,
p.124.
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KIVU oriental, à GOMA, RUTSHURU, FIZI, Maniema, et dans
la cuvette centrale, zones jadis troublées par des rébellions, la
cour d'appel de Kinshasa annulera les élections dans ces régions
par manque d'urnes et pressions sur les électeurs. "La période
postélectorale fut caractérisée par des contestations et
des réclamations jusqu'à perturber la vie politique du
pays.62
KASA VUBU et TSHOMBE furent opposés par la fin de leurs
mandats respectifs. En effet, KASA VUBU estime que le gouvernement de
transition de TSHOMBE devra démissionner dès que les
résultats définitifs des élections seront connus et que le
parlement sera convoqué. TSHOMBE, par contre estime qu'il lui est
préférable de rester en fonction jusqu'à l'annonce des
résultats définitifs de l'élection présidentielle
prévue pour décembre 1965.
Le 13 Octobre, le président KASA VUBU démet le
canine TSHOMBE devant le parlement convoqué en session extraordinaire,
et confie le gouvernement à Evariste KIMBA, qui recevra 134 votes
négatifs sur 262 votes. En dépit de la défiance du
parlement, KASA VUBU va encore confirmer la nomination de KIMBA comme formateur
du gouvernement. C'est dans cette confusion mêlée à tant
d'autres tensions que le coup d'Etat va intervenir le 24 novembre 1965.
Ainsi, les forces armées interviennent le 24 avril
1965, en écartant les politiciens de la scène politique et
proposant 5 ans de pouvoir au général MUBUTU. De ce fait, toutes
les activités politiques sont suspendues, les formations politiques
dissoutes au profit d'un seul parti, le mouvement populaire de la
révolution, créé en 1967.
En 1970, des élections présidentielles et
parlementaires seront organisées dans le cadre du parti. MOBUTU est
présenté comme le candidat unique à la présidence.
"Il sera élu pour 7 ans à partir du 4 décembre 1970, avec
10.131.669 voix".63
Pour ce qui est des élections parlementaires, elles
eurent lieu du 14 au 15 novembre 1970. Les candidats sont
présentés sur la liste MPR. Le déroulement de ces
élections, note le professeur ISANGO IDI WANZILA, "Etait
contrôlé par le parti de telle sorte que les élus
étaient non seulement des militants disciplinés du parti, mais
aussi des personnes acquises à la perpétuation du
pouvoir".64
Depuis ces élections de 1970, la vie politique
générale évoluera vers une radicalisation du parti unique
devenant successivement à la seule institution du pays et le
parti-Etat.
En 1982, suite à la pression occidentale, aux
différentes incursions des rebelles dans le Katanga, à
l'opposition déclarée des 13 parlementaires, l'ordonnance loi
n°82/006 du 25 Février 1982 est promulguée, portant sur
l'organisation politique, administrative et territoriale du pays. La
conséquence logique directe de cette loi fut l'organisation des
62 CRAWFORD YOUNG, op.cit. p.82.
63 NDAYWELL E NZIEM I, op.cit., p.631.
64 ISANGO IDI WANZILA cité par TASUKA ANEPEMBI
M., notes de cours déjà citées.
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élections des commissaires des zones, des conseillers,
des commissaires du peuple selon la nouvelle configuration des
circonscriptions.
Les candidats sont sélectionnés sur la liste du
parti-Etat. A cette procédure, il faut adjoindre celle de la nomination
après la proclamation des résultats. De ce fait, il ne suffit
plus d'avoir le plus de voix, mais aussi de prouver son militantisme et sa
fidélité au président MOBUTU à défaut de
quoi le candidat élu peut se voir enlever son mandat. En 1984, "Une
vaste campagne de recensement scientifique de la population eut lieu, suivi de
l'élection présidentielle du candidat unique, élu avec 98%
de voix.65
Enfin, en 1987 le régime MOBUTU organisa les
élections du conseil législatif, des Assemblées
Provinciales, des collectivités rurales et zones urbaines.
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