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Dette extérieure et performance économique en Afrique subsaharienne.


par Landry Arnold YOUBI POUEPI
Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences économiques option Macroéconomie ouverte 2019
  

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INTRODUCTION

La stabilité économique est aujourd'hui l'un des points marquants de l'élaboration des politiques économiques. Compte tenu des nombreux effets néfastes associés à la stabilité économique interne (notamment en ce qui concerne l'inflation et le chômage) et la stabilité économique externe (balance commerciale et compte d'ajustement), tous les pays montrent aujourd'hui un intérêt prononcé pour la maîtrise de l'inflation, l'atténuation du chômage et de la balance des paiements. Tout comme les autres grands déséquilibres économiques, l'inflation, le chômage et la balance des paiements résultent de l'écart entre l'offre et la demande. Beaucoup de travaux ont été menés pour identifier les déterminants de l'inflation du chômage et de la balance des paiements. Si ces derniers se sont en majorité focalisés sur les déterminants macroéconomiques (monétaires et réels), nous assistons depuis les années 90 à la prise en compte des facteurs monétaires internationaux relatifs à la dette extérieure.

Que l'on parle des déterminants macroéconomiques, l'inflation, le chômage et de la balance des paiements dans le monde résultent toujours de l'incohérence des politiques économiques. À cet effet, la théorie quantitative de la monnaie établit un lien direct entre la masse monétaire et le niveau général des prix. Selon cette approche, une stimulation monétaire n'a pas d'effets bénéfiques durables sur l'économie, elle ne génère que de l'inflation. Toutefois, cette approche ne fait pas l'unanimité chez les économistes et a été contestée par les keynésiens. Pour Keynes (1936), une hausse de la quantité de monnaie peut avoir un effet direct sur l'économie et le volume de la production. En effet, si les agents économiques ont plus d'argent en leur possession, ils vont le dépenser ou l'investir, ce qui entraine une hausse de la production (c'est-à-dire du PIB) et une baisse du chômage. De plus, les agents économiques peuvent être victimes d'une « illusion nominale », ce qui signifie qu'ils perçoivent mal les effets de l'inflation sur leur pouvoir d'achat (Keynes, 1936).

Il existe deux grandes approches au sujet de l'explication du phénomène du chômage. La première approche est d'essence libérale et stipule que le chômage est « volontaire » et il résulte des défaillances du marché du travail. En d'autres termes, s'il y a chômage, c'est parce que l'offre et la demande de travail ne sont pas équilibrées. Cette théorie s'appuie en effet sur le postulat d'efficience du marché du travail qui postule que le marché s'autorégule automatiquement. La deuxième approche quant à elle, est d'orientation keynésienne qui pense que le chômage est « involontaire » étant donné que le marché du travail est lié aux autres marchés. Selon cette approche, il est possible d'avoir des équilibres de sous-emploi, puisque le

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niveau de l'emploi ne découle pas du seul marché du travail et de la confrontation entre l'offre et la demande de travail, mais des équilibres qui existent également sur le marché des biens et des services. Dans ce cas, seule l'intervention de l'Etat peut remédier au problème par une politique de relance de la demande (Snowdon et Vane, 2005). Parler de la stabilité des prix et du plein emploi revient donc à se focaliser sur les causes de l'inflation et du chômage.

La balance des paiements est un état statistique qui résume systématiquement, pour une période donnée, les transactions économiques d'une économie avec le reste du monde (Krueger, 1969). Depuis quelques décennies, la question de savoir si la balance des paiements est un phénomène monétaire est une question qui se pose dans la littérature économique monétaire et internationale. Les perspectives sur la question ont été influencées, d'une part, par l'évolution de la théorie monétaire et, d'autre part, par les interprétations de l'histoire monétaire. Bien qu'il existe d'autres théories des ajustements de la balance des paiements, à savoir les élasticités et les approches d'absorption (associées à la théorie keynésienne).

La prise en compte des déterminants monétaires dans l'explication des différences économiques entre les Etats ne cesse de retenir l'attention des économistes depuis les travaux de Krugman (1988). Dans le présent chapitre, nous adoptons cette approche en nous focalisant sur le rôle de la dette extérieure sur la stabilité économique. En particulier, nous nous intéresserons aux dimensions solvabilité et soutenabilité de la dette extérieure. À cet effet, ce chapitre sera organisé autour de deux sections : la première section analysera l'influence théorique de la dette extérieure sur la stabilité économique interne ; la deuxième section quant à elle, sera consacrée à la présentation de l'influence théorique de la dette extérieure sur la stabilité économique externe.

SECTION I : ANALYSE THEORIQUE DE LA RELATION DETTE EXTERIEURE ET STABILITE ECONOMIQUE INTERNE

La stabilité économique interne (stabilité des prix et plein emploi) a longtemps monopolisé l'attention des économistes et des hommes politiques, depuis les écrits majeurs de Kaldor (1934)12 et Philips (1958)13. Dès lors, l'inflation et le chômage sont considérés comme les indices de premier plan qui permettent d'apprécier l'état de santé d'une économie. À cet

12 Nicola Kaldor a élaboré les conditions nécessaires à la détermination de l'équilibre économique, connues sous le nom de « carré magique ». Le carré magique est une représentation graphique des quatre grands objectifs de la politique économique conjoncturelle d'un pays que sont : la croissance économique, la stabilité des prix, le plein emploi des facteurs de production et l'équilibre extérieur.

13 Alban William Phillips a été l'un des premiers économistes à présenter des preuves convaincantes de la relation inverse entre le chômage et l'inflation salariale. En effet, Phillips (1958) a étudié la relation entre le chômage et le taux de variation des salaires au Royaume-Uni sur une période de près d'un siècle (1861-1957).

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effet, dans cette première section, nous commencerons par analyser les effets de la dette extérieure sur l'inflation et par la suite, nous présenterons son influence sur le chômage.

I.1/ Influence théorique de la dette extérieure sur l'inflation

La dette extérieure est un facteur de maîtrise de l'inflation. Sa bonne gestion vise à créer un environnement macroéconomique propice à l'élaboration des politiques économiques cohérentes (CEA, 2017). Dans cette sous-section : en premier lieu, nous examineront les effets de la solvabilité de la dette extérieure sur la dynamique des prix et en second lieu, nous analyserons l'influence de la soutenabilité de la dette extérieure et volatilité de l'inflation.

I.1.1. Impact de la solvabilité de la dette extérieure sur la dynamique des prix

Réduire les coûts inhérents à l'inflation dépend fortement de la politique économique qui prévaut dans une économie. Autrement dit, plus la politique économique d'un pays est mauvaise, plus l'inflation est élevée, et à l'opposé, plus cette politique est bonne, plus l'inflation sera maîtrisée (Ali et Sassi, 2016). Dans le présent volet, nous discuterons des effets du stock de la dette extérieure, ainsi que de l'influence du service de la dette extérieure sur l'inflation.

a) Stock de la dette extérieure et inflation

L'encours de dette élevés sont associés à une inflation élevée et volatile. À cet égard, le niveau élevé de l'encours de la dette accroît les risques de défaillance, de rééchelonnement et la volatilité des entrées futures de capitaux (Mweni, Njuguna et Oketch, 2016). Pour Presbitero et Arnone (2006), l'encours de la dette a un effet sur la performance économique via l'incertitude associée à son effet sur l'inflation. En effet, la dette extérieure crée un problème aigu de surendettement parce que les pays en développement disposent d'une gamme beaucoup plus restreinte d'outils de réduction de la dette (Reinhart, Reinhart et Rogoff, 2012). Ainsi, le surendettement est lié à l'incertitude et à l'instabilité économiques et oblige les gouvernements à adopter des politiques financièrement répressives pour maîtriser l'inflation afin de répondre aux besoins financiers par seigneuriage, et réduire les dépenses publiques en intérêts payés sur la dette publique (Atique et Malik, 2012 ; Assibey-Yeboah et Mohsin, 2014).

En outre, les pays en proie à l'instabilité politique ont probablement de grandes activités clandestines qui augmentent la taxe sur l'inflation optimale, ce qui implique un niveau d'inflation élevé et instable (Barugahara, 2015). La présence d'une grande économie souterraine peut être inflationniste en raison de l'incitation à utiliser l'impôt sur l'inflation pour répondre

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aux besoins budgétaires lorsque de larges pans de l'économie ne sont pas enregistrés et donc non imposés (Canzoneri et Rogers, 1990). De même, une grande économie informelle menace non seulement l'assiette fiscale, mais a également des implications pour la politique de stabilisation. Dans ces circonstances, un gouvernement qui n'est pas certain de son assiette fiscale est plus susceptible d'adopter des mesures à court terme au détriment de la cohérence des politiques (Mazhar et Jafri, 2017). Ainsi, l'économie souterraine influe sur les résultats de la politique monétaire parce qu'elle est associée à une demande accrue de monnaie, et sur les résultats de la politique budgétaire en raison de son incidence sur l'importance des recettes fiscales (Martinez-Vazquez et al., 2015).

b) Service de la dette extérieure et inflation

La relation entre l'endettement extérieure et l'inflation a été très préoccupante au cours des dernières décennies et a suscité beaucoup d'attention ces derniers temps. Plusieurs auteurs ont observé que l'existence d'obligations importantes en matière de service de la dette extérieure se traduit généralement par une instabilité des prix due à la surévaluation de la monnaie et les déficits budgétaires importants (Dornbusch, 1993).

Le lien entre le service de la dette extérieure et la dynamique des prix a été largement débattu dans le paradigme économique selon lequel un service de dette extérieure importante réduit la souplesse de la politique budgétaire. En effet, Comme il est presque impossible de réduire les paiements du service de la dette, en particulier dans les situations où on procède à une correction du taux de change, l'ajustement a un impact plus sérieux sur les dépenses intérieures, y compris celles effectuées pour les biens non échangeables ; ce qui provoque le chômage (Reinhart, Reinhart et Rogoff, 2012). Compte tenu des difficultés inhérentes à la mobilisation des recettes et à la réduction des salaires, les corrections prendront vraisemblablement la forme d'un gel des salaires, d'une hausse de la dette intérieure, ou d'une activation de la planche à billets, nuisant ainsi sérieusement à la compétitivité nécessaire pour améliorer l'aptitude à assurer le service de la dette. La contradiction entre l'amélioration de la compétitivité et le maintien d'un budget équilibré est plus sérieuse en conditions d'endettement public élevé (Dornbusch, 1993).

Ainsi, pour corriger ces effets que la théorie s'est préoccupée du lien étroit qui existe entre endettement et performances économiques. En ce sens que, le paiement du service de la dette (dans le présent comme dans le futur) peut réduire l'investissement (courant et futur) et par la suite la croissance économique. Dans la mesure où, la croissance est tronquée dans le

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présent, si le fardeau de la dette affecte le flux courant de ressources disponibles pour le pays ; dans le futur un taux élevé de ressources destinées au paiement du service de la dette décourage l'investissement (Rajan, 2007). De plus, le fardeau de la dette comme paiement son service ainsi que son rééchelonnement peut affecter l'environnement politique en vigueur et pervertir les politiques économiques.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand