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Dette extérieure et performance économique en Afrique subsaharienne.


par Landry Arnold YOUBI POUEPI
Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences économiques option Macroéconomie ouverte 2019
  

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I.1.2. Les effets du service de la dette extérieure et croissance économique

Le financement de l'investissement fait le plus souvent l'objet de vifs débats au sein de la communauté scientifique, surtout lorsqu'il s'agit de l'Etat. On distingue deux principales sources de financement : la mobilisation de l'épargne intérieure et celle de l'épargne extérieure. Généralement, l'Etat fait recours au deuxième mode de financement lorsqu'il est impossible pour lui de lever tous les fonds nécessaires à la réalisation de ses projets par la seule épargne intérieure. En ce sens, la dette extérieure contribue à la croissance économique : telle est la conception des keynésiens.

Cependant, plusieurs auteurs ont montré que la dette extérieure est néfaste à la fois pour les investissements (privés et publics) et pour la croissance. En effet, s'endetter aujourd'hui implique un remboursement demain. Dès lors, l'Etat devra consacrer une partie plus ou moins importante de ses ressources pour éponger le service et/ou le principal de sa dette. Toutefois, il peut arriver que ce dernier soit dans l'incapacité d'honorer à ses engagements : Krugman (1988) parle de « Debt overhang » qui correspond à la situation pour laquelle la capacité de remboursement de la dette extérieure tombe en deçà de la valeur contractuelle de la dette. Selon Cohen (1993), la relation entre la valeur faciale de la dette et la croissance économique peut être représentée comme une sorte de « courbe de Laffer » : il existe un seuil en deçà duquel toute augmentation de la dette est bénéfique pour l'économie et une fois ce seuil dépassé, à mesure que la dette augmente, les capacités de remboursement de ladite dette diminuent fortement, ce qui limite le volume des investissements futurs.

a) Structure des dépenses publiques externes et croissance économiques

Le débat sur la relation entre les dépenses publiques externes et la croissance économique n'est pas nouveau. Il a été au centre des préoccupations des économistes classiques qui voyaient l'intervention de l'Etat dans l'économie par le biais des dépenses publiques comme une source

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de déséquilibre du marché. Pour eux, l'Etat doit se cantonner à ses fonctions régaliennes de défense, de justice et de diplomatie et prendre en charge la fourniture des services publics indispensables à la communauté et qui ne pourraient pas être fournis par les opérateurs privés.

Cette vision restrictive de l'Etat est aux antipodes de la pensée keynésienne. Les keynésiens accordent à l'Etat un rôle prépondérant dans le processus de la croissance économique par le moyen des dépenses publiques. Ils insistent sur les effets multiplicateurs associés à l'augmentation des dépenses publiques ou à la réduction du taux d'imposition. Ainsi, lorsque le revenu national baisse et que les dépenses privées diminuent, l'Etat doit soutenir l'économie en augmentant les dépenses publiques. Cette augmentation va booster la demande effective, ce qui impacte le niveau de production et donc de l'emploi. Par contre, lorsque l'Économie est en surchauffe, l'Etat doit réduire la pression en limitant ses dépenses.

Les nouvelles théories de la croissance sont nées avec les travaux précurseurs de Romer (1986) qui insistent sur le fait que l'accumulation du capital physique dans une entreprise provoque des effets positifs sur les autres firmes. Par la suite, Romer (1990) va mettre en évidence l'importance de la recherche et développement qui provoque des externalités positives sur le reste de l'économie. Les travaux de Lucas (1988) permettent de soutenir le rôle de l'investissement en capital humain dans le processus de croissance économique. À cet égard, l'Etat doit financer les dépenses d'éducation quand « la productivité sociale est supérieure à la productivité privée d'une dépense d'éducation ». En outre, l'Etat doit financer les infrastructures publiques (Barro et Sala, 1990).

Ces nouvelles théories intègrent désormais une analyse explicite des déterminants à long terme de l'augmentation de la productivité qui était jusque-là ignorée par le modèle de base de Solow (1956). La gamme des facteurs de production traditionnels prise en compte dans la formalisation a été élargie à l'effet d'apprentissage, du capital humain, aux infrastructures publiques ... Les conditions techniques d'obtention d'une croissance véritablement endogène n'ont pas été sous-estimées4 ainsi que les effets externes positifs liés à l'investissement dans les facteurs de production et le rôle de la connaissance dans la croissance de la productivité. Ainsi, les modèles de croissance endogène intègrent les externalités positives ou négatives liées à l'accumulation des connaissances ou de l'innovation (Helpman, 1992).

Par ailleurs, Sala-i-Martin, X et Barro (1995) distinguent les dépenses publiques productives (défense, éducation, santé, transports et communication) des dépenses

4 Lorsque les rendements constants sur les facteurs de production sont acumulables.

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improductives (sécurité sociale, loisirs, services économiques). À cet égard, beaucoup de travaux sont faits de nos jours pour comprendre si la composition des dépenses publiques pourrait alimenter la croissance

b) Défauts de solvabilité de la dette extérieure et croissance économique.

Un défaut partiel ou total de remboursement de la dette publique externe, qu'il soit explicite (refus de rembourser les obligations et réduction subséquente de l'encours de la dette) ou implicite (par le biais de taux d'inflation élevés, voire d'une hyperinflation qui diminue sensiblement la valeur de la dette publique réelle) est un événement extrême influencé également par la situation financière et politique générale ainsi que par les comportements et attentes des agents. La défaillance peut être inattendue, anticipée ou même autogénérée par les créanciers ; chaque cas a son propre impact spécifique sur l'économie.

Le défaut de paiement est un choix politique du gouvernement qui concilie les coûts du défaut avec ceux de la solvabilité (Gros, 2012 ; Buiter et Rahbari, 2013). Les conséquences économiques d'un défaut de paiement peuvent être graves, mais concentrées dans le temps, alors que les avantages de libérer l'économie du fardeau de la dette peuvent se faire sentir avec le temps. Les aspects comportementaux peuvent jouer un rôle en termes de croyance des agents à l'égard de l'efficience passée de la dette, de leurs attentes quant à la viabilité actuelle et de leur niveau de confiance quant aux remboursements futurs de la dette, bien qu'ils ne soient pas toujours considérés comme fondés. En particulier, ils peuvent s'autoréaliser, ce qui conduit à la défaillance réelle qui aurait pu être évitée autrement.

Ainsi, la relation entre le niveau (ou le taux de croissance) de la dette publique externe, l'augmentation des primes de risque et les attaques spéculatives est de nature douteuse. Certains chercheurs ont souligné que la véritable variable explicative est le montant de la dette extérieure générée par les déficits importants et persistants de la balance courante (Gros, 2012). La dette extérieure est souvent considérée comme l'élément le plus pertinent, car elle implique un transfert réel du débiteur vers le pays créancier. Selon Karagol (2002), la dette extérieure agit comme une taxe lorsque la situation de la dette est telle qu'une amélioration de la performance économique du pays endetté a pour effet secondaire un remboursement plus élevé de la dette, ainsi le service de la dette extérieure a un impact négatif à court terme sur la croissance économique.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard