B- Assistance Militaire Technique française au Gabon
(AMT)
La mission d'assistance militaire (M.A.T) naît le 12
février 1961 après l'élection du président
Léon Mba à la magistrature suprême et à sa demande.
Dans une lettre de ce dernier, adressée au Premier ministre
français, il précise que « Conforment aux dispositions de
l'accord de défense, j'ai l'honneur de vous demander de bien vouloir
autoriser la création au Gabon d'une mission d'aide militaire.
Par la suite, la France devrait exercer ses missions
auprès des forces gabonaises en mettant à sa disposition son
personnel (les assistances militaires), en formant le personnel militaire
gabonais et en exerçant l'aide financière et l'équipement.
Ainsi, le 1er octobre 1961 le « groupe d'assistance technique
» qui était chargé de l'administration de la gendarmerie
gabonaise fut dissous, et c'est seulement le 31 décembre qu'il devint la
section de la gendarmerie de la mission militaire du Gabon. A partir de ce
moment, l'assistance militaire technique a pour mission à la formation,
l'entrainement et à l'équipement des forces armées
gabonaises selon les termes des accords de défense de coopération
militaire signé avec la France. Charles Hernu précisa que
Les pays africains ont droit à leur
sécurité. Et si pour assurer cette sécurité, ils
ont parfois besoin de l'assistance militaire de notre pays, je ne vois pas
pourquoi nous ne le ferons pas dans la mesure où, justement, nous ne
posons pas de conditions politiques.
Selon les dispositions juridiques militaires entre l'ancienne
métropole et son ancienne colonie, la France pourvoit continuellement le
Gabon en sous-officiers pour instruire et former les militaires gabonais. Au
départ les assistants militaires exerçaient tous types de
fonctions et d'emplois dans l'armée gabonaise. Ils pouvaient occuper les
postes de chefs
6 Accord de défense entre la France et le Gabon.
30
d'Etats-majors des forces armées gabonaises ou de
commandements en chef. Depuis 1986, ils ne tiennent plus que des fonctions
secondaires derrières des nationaux, des responsables gabonais. Ils sont
par exemple conseillers, gestionnaires, spécialistes de haut niveau dans
les armées dites techniciennes (armée de l'air, marine),
formateurs. Les assistants militaires français soumis au régime
des forces dans lesquelles ils servent et dont ils portent également
l'uniforme et s'inscrivent dans la hiérarchie militaire gabonaise. C'est
à ce propos qu'ils sont autorisés à être
présent et à participer aux réunions militaires
gabonaises. Ce qui explique qu'ils prêtent serment au même titre
que les officiers gabonais. Les militaires français sont bien
intégrés dans les forces armées et de
sécurité gabonaises. Ce qui a fait dire au président Bongo
que « Quand un officier français sert dans les rangs de
l'armée gabonaise, sous l'uniforme gabonais, il est
gabonais7». Il ajoute que « Ils ont accès à
tous, ils sont informés de tout8 ». La gestion des
assistances militaires technique reste de la responsabilité du colonel,
chef de la mission. Dans chaque armée, l'officier le plus ancien tient
le poste de chef de détachement d'assistance militaire technique
(A.M.T). Ainsi donc, les A.M.T dépendent du chef de la mission
près de l'Ambassade de France au Gabon. Depuis l'indépendance, le
niveau gabonais en cadre et personnel militaire a permis un niveau relativement
élevé d'A.M.T. Ce qui fait que la mission de 1981 est l'une des
plus importantes d'Afrique. Elle représentait 15 % des personnels mis
à la disposition des 18 Etats et Malgache bénéficiaires de
l'assistance militaire technique française. La répartition des
coopérants français dans les différentes forces marque une
nette préférence pour la gendarmerie 35,17 %, l'armée de
l'air 27,89 %, l'armée de terre 24,82 %, le service de santé
militaire et la marine restent loin derrière avec respectivement 8,27 %
et 4,82 %.
Tableau 2 : Répartition des A.M.T dans
les forces armées.
Forces armées
|
Officiers
|
Sous-officiers
|
Total
|
%
|
Gendarmerie
|
8
|
43
|
51
|
35,17
|
Armée de terre
|
15
|
21
|
36
|
24,82
|
Armée de l'air
|
11
|
28
|
39
|
26,89
|
Marine
|
2
|
10
|
12
|
8,27
|
Santé militaire
|
6
|
1
|
7
|
4,82
|
Total
|
42
|
103
|
145
|
100
|
Source : Ecole militaire de Paris, Dossier n° 7 Gabon, 1981,
cité par Mireille Flore Mengue Moto (2017, p. 45).
7 Confidence d'un entretien avec un officier supérieur des
forces de défense.
8 Idem
31
L'effectif des assistances militaires techniques a
évolué entre 1967 à 1981. En effet de 1967 à 1971,
les effectifs des A.M.T tendent à décroître. Puis une
année après, en 1972, l'augmentation redécolle mais le
nombre des A.M.T évolue en diminuant jusqu'en 1978 où il revient
au même nombre qu'en 1972 c'est-à-dire à 144.
Tableau 3 : Évolution des personnels de
l'A.M.T et coûts (million de FF) entre 1967 et 1981.
Années
|
Nombre d'A.M.T
|
Coûts
|
1967
|
130
|
6
|
1968
|
98
|
6
|
1969
|
94
|
6
|
1970
|
91
|
7,56
|
1971
|
102
|
9,3
|
1972
|
144
|
10,5
|
1973
|
125
|
12,8
|
1974
|
126
|
14,78
|
1975
|
111
|
18,78
|
1976
|
128
|
20,29
|
1977
|
143
|
22,246
|
1978
|
144
|
25,1
|
1979
|
132
|
32,58
|
1980
|
132
|
NC
|
1981
|
145
|
NC
|
Source : Ecole militaire de Paris, Dossier n°7, Gabon,
1981, cité par Mireille Flore Mengue (2017, p. 45).
La prise en charge dans les grandes Ecoles militaires
françaises, les élèves et les stagiaires gabonais,
étaient dans les mêmes conditions que les nationaux
français. L'attaché de défense nous fessait ce
témoignage : « la majorité des hauts officiers
supérieurs gabonais qui sont à la tête de l'armée
gabonaise ont suivi le même cursus académique que les
Français en France, dans les mêmes écoles à savoir,
l'Ecole d'Etat-major et l'Ecole de guerre9».
Les accords de défense représentent une
technique juridique et politique à laquelle les deux Etats ont de plus
en plus recours. Cela s'exprime par des phénomènes
politico-diplomatiques (stratégies globales, ruptures, armements et
dépenses militaires, négociations, traités) important et
originaux (G. Bouthoul, R. Carrerer, 1740-1970).
Concernant l'aide financière et l'équipement de
l'armée gabonaise. L'assistance militaire technique entre la France et
le Gabon dans le cadre d'un commun accord, la France s'est engagée
à approvisionner son ancienne colonie en équipement
nécessaire pour son armée. Le Gabon dans l'optique d'assurer la
standardisation de l'armée, s'est engagée à son tour
à ne
9 E.O. N° 1. Attaché de Défense de l'Ambassade
de France, Libreville, le Jeudi, 27 juin à 11h à l'Ambassade de
France.
32
faire appel à la France pour l'entretien et le
renouvellement de ce matériel. La contrepartie de la dotation de
l'armée gabonaise en équipement français fut donc de
convenir, dans le cadre d'assistance militaire technique de
l'opportunité d'une standardisation d'armements. Ce qui explique la
présence, dans les accords signés entre les deux pays, de
clauses.
Il convient tout de même d'examiner un
élément important qui est celui de la maintenance des
matériels. En effet au Gabon, le matériel est soumis à
rude épreuve en raison de l'absence des infrastructures
routières. Leur entretien nécessite d'importantes pièces
détachées dont le coût est exorbitant par rapport au
matériel assemblé. Une nécessaire standardisation de
matériels permet de réduire les coûts des pièces
détachées. En termes de stratégie économique, on
peut reconnaitre que la France au point une véritable politique de
ventes d'armes et de services après-ventes selon les besoins de
l'armée gabonaise. Charles Hernu10 déclare à
cet effet :
Je veux être... l'artisan de la mise en route d'une
stratégie internationale de coopération. Tous les pays amis
veulent approfondir une relation globale avec une France qui ne souhaite pas
des armements sophistiqués pour seulement en retirer un
bénéfice commercial mais pour promouvoir, dans le cadre d'une
véritable et ample politique d'assistance technique et de
coopération militaire, leur émancipation vis-à-vis des
deux blocs.
Tableau 4 : Répartition de l'aide
directe des forces de défense Gabonaises (million de FCFA)
(1986-1988).
Années
Administration
|
1986
|
1987
|
1988
|
Ministère de la défense
|
30
|
18
|
25
|
D.G du service de santé militaire
|
15
|
9
|
10
|
Sécurité mobile
|
40
|
24
|
22
|
Gendarmerie
|
100
|
60
|
60
|
Forces armée
|
200
|
120
|
120
|
Garde présidentielle
|
55
|
33
|
30
|
Total
|
500
|
300
|
300
|
Source : Ministère de la défense, Libreville,
Lettre n°2241/ GAB/M.A.M, du 26/11/1987.
10 Ancien ministre de la Défense
française.
33
34
Tableau 5 : Aide militaire de la France au Gabon
(franc CFA), 1983-1987.
|
1983
|
1984
|
1985
|
1987
|
Total Assistance Technique
|
227.739.22
|
234.864.507
|
278.682.997
|
267.286.638
|
Accueil stagiaires
|
17.300.000
|
24.000.000
|
12.100.000
|
13.800.000
|
Dons en matériels (véhicules)
|
12.700.000
|
9.500.000
|
8.000.000
|
6.000.000
|
Fonctionnement du bureau de la coopération militaire
|
900.000
|
900.000
|
1.859.735
|
1.894.200
|
Intervention publique de Fonctionnement
|
254.154.774.98
|
241.574.874
|
|
|
Rémunération
Assistance technique
|
55.200.000
|
57.700.000
|
72.600.000
|
68.400.000
|
Total
|
567.994.505.20
|
568.539.381
|
373.242.732
|
357.380.838
|
Source : Ambassade de France au Gabon. Bilan de l'aide publique
française au Gabon en 1987 Notons que le nombre d'AMT était de :
137 (1983), 127 (1984), 121 (1985) et 114
(1987).
|