0.2. PROBLEMATIQUE
Dans plusieurs pays africains et du monde, la pleine
participation des jeunes à la vie familiale et aux tâches de
développement économique, social et culturel est de plus en plus
hypothéquée par le chômage et le sous-emploi dont les
effets pervers suscitent des inquiétudes et des bouleversements
sociopolitiques.
En effet, les diplômés sans emploi restent
pendant une grande période à la charge de leur famille. Le
passage de la vie scolaire ou universitaire à la vie active demeure pour
la plupart un cauchemar, alors que les trente glorieuses avaient assuré
le plein emploi. Dans l'ensemble de pays développés le
ralentissement de la croissance à partir de 1975, avait engendré
un déséquilibre croissant sur le marché.
Les réflexions sur le chômage ont pendant
longtemps animé les écrits et les diverses contributions en vue
d'améliorer les conditions de vie des jeunes. L'emploi demeure en
réalité l'une des questions les plus irrésistibles de la
vie en société et recoupe aussi bien une dimension individuelle
que globale. La dimension « Individuelle » s'explique par le fait que
tout individu, en un moment ou à un autre de sa vie, aspire à un
emploi décent ; celle « globale » se justifie par le fait que
les questions de l'emploi et du chômage font partie des priorités
majeures pour les gouvernements et représentent surtout un facteur de
cohésion sociale.
En science économique, depuis Adam Smith au
18ème siècle avec sa théorie de la main
invisible conduisant au plein-emploi, à John M. Keynes avec son
célèbre ouvrage « Théorie Générale de
l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie » en 1936 jusqu'aux
récents prix Nobel de 2010 récompensés pour leurs travaux
sur le marché de l'emploi5, la problématique de
l'emploi a toujours été l'une des principales
préoccupations des économistes. Dans le fameux carré
magique théorisé par l'économiste britannique Nicholas
Kaldor qui définit les quatre grands objectifs de la politique
économique, la lutte contre le chômage occupe toute sa place
à côté de la croissance, de la maîtrise de
l'inflation et de l'équilibre extérieur. Aujourd'hui plus que
jamais, le niveau de l'insertion des jeunes d'un pays est sûrement l'une
des variables macroéconomiques les plus suivies, en raison de son impact
sur le bien-être de la société. Au-delà de son
aspect purement lié à la politique macroéconomique, un
emploi décent permet à l'homme de satisfaire ses besoins de base
et de lutter contre la pauvreté mais aussi procure une
5 Banque mondiale, le développement et la
nouvelle génération, Nouveaux Horizons, Ed. Saint martin,
2007, p. 120
4
estime de soi, une dignité et une meilleure
intégration sociale. Dans son ouvrage « Macroéconomie
», G. N. Mankiw souligne : « Le chômage est le
phénomène macroéconomique qui affecte le plus directement
et le plus gravement les individus.
Pour la plupart des gens, la perte d'un emploi signifie
réduction du niveau de vie et détresse psychologique ». En
2017, les jeunes représenteraient plus de 35% de la population au
chômage dans le monde. Si le taux mondial du chômage des jeunes
s'était stabilisé à 13,0 % en 2016, il devrait
légèrement augmenter à 13,1% cette
année6. S'établissant à 70,9 millions en 2017,
le nombre des jeunes chômeurs est en net progrès par rapport au
chiffre record de 76,7 millions atteint pendant la crise, en 2009, mais ce
nombre devrait augmenter de 200 000 chômeurs supplémentaires en
2018, pour atteindre un total de 71,1 millions. A l'échelle mondiale, la
hausse marquée des taux de chômage des jeunes observées
entre 2010 et 2016 en Afrique du Nord, dans les Etats arabes, en
Amérique latine et dans les Caraïbes a été
compensée par les progrès enregistrés pour les jeunes sur
les marchés du travail en Europe, en Amérique du Nord et en
Afrique subsaharienne. La croissance économique globale reste
déconnectée de la croissance de l'emploi et l'instabilité
économique menace de compromettre les gains constatés en termes
d'insertion des jeunes dans le secteur public. Le ratio entre le chômage
des jeunes et celui des adultes a peu évolué au cours des dix
dernières années, mesurant combien les jeunes sont
profondément et durablement désavantagés dans le secteur
public. Le rapport met aussi en évidence la vulnérabilité
constante des jeunes femmes dans le secteur public. En 2017, le taux mondial
d'activité des jeunes femmes est de 16,6% inférieur à
celui des jeunes hommes. Les taux de chômage des jeunes femmes sont aussi
nettement plus élevés que ceux des jeunes hommes et les
écarts entre les sexes pour les jeunes NEET (qui ne travaillent pas ni
ne suivent d'études ou de formation) sont encore plus grands. A
l'échelle mondiale, le taux de NEET chez les jeunes femmes est de 34,4 %
contre 9,8 % chez les jeunes hommes.
En 2017, 39 % des jeunes travailleurs des pays
émergents et en développement 160,8 millions de jeunes vivent
dans la pauvreté ou l'extrême pauvreté, c'est-à-dire
avec moins de
3,10$ par jour. Plus de deux jeunes actifs sur cinq sont
actuellement au chômage ou sont des
travailleurs pauvres, une réalité frappante qui
a une incidence sur les sociétés à travers le monde. Pour
bon nombre d'entre eux, leur présent et leur avenir se trouvent dans
l'économie
informelle. A l'échelle mondiale, trois jeunes hommes
et femmes sur quatre sont employés dans le secteur informel, contre
trois sur cinq chez les adultes. Dans les pays en développement,
6 le rapport de l'OIT sur Les
tendances mondiales de l'emploi des jeunes, 2017
5
ce ratio s'élève à 19 sur 20 pour les
jeunes, hommes et femmes. Le défi de l'emploi des jeunes ne concerne
donc pas seulement la création d'emploi mais aussi et même
davantage la qualité du travail et les emplois décents pour les
jeunes. «Il est vital de s'attaquer aux défis sociaux et de
marché du travail que doivent affronter constamment les jeunes hommes et
femmes, non seulement pour parvenir à une croissance durable et
partagée mais aussi pour l'avenir du travail et la cohésion
sociale»7. La Banque africaine de développement (BAD)
finance certains de ces programmes qui visent à l'auto-emploi des jeunes
et des femmes.
Selon la Banque mondiale, les jeunes représentent 60 %
de l'ensemble des chômeurs africains. En Afrique du Nord, le taux de
chômage des jeunes est de 25 %, mais ce taux est encore plus
élevé au Botswana, en République du Congo, au
Sénégal et en Afrique du Sud, entre autres pays. Avec 200
millions d'habitants âgés de 15 à 24 ans, l'Afrique compte
le plus de jeunes au monde.8
Dans la plupart des pays africains, le chômage des
jeunes « est au moins deux fois supérieur à celui des
adultes », souligne la BAD.
Les jeunes femmes sont plus durement touchées. La BAD a
constaté que dans la plupart des pays d'Afrique subsaharienne et dans
tous ceux de l'Afrique du Nord, il est plus facile pour les hommes que pour les
femmes d'obtenir un emploi, même si celles-ci possèdent le
même niveau d'expérience et de compétences. Les
statistiques du chômage en Afrique ne tiennent pas compte des emplois
précaires ni du sous-emploi dans le secteur informel. Selon un rapport
de la Brookings Institution, un groupe de réflexion basé à
Washington, « Les jeunes africains trouvent du travail, mais celui-ci est
souvent mal rémunéré et ne leur permet pas de
perfectionner leurs compétences ni de jouir d'une certaine
sécurité de l'emploi ». La Brookings Institution
considère le sous-emploi comme un grave problème, qui masque la
réalité dans les pays qui affichent un faible taux de
chômage. Plus de 70 % des jeunes de la « République du Congo,
de la République démocratique du Congo, de l'Éthiopie, du
Ghana, du Malawi, du Mali, du Rwanda, du Sénégal et de l'Ouganda
sont à leur compte ou contribuent au travail familial
»9.
7 Deborah Greenfield, Directrice
générale adjointe rapport de l'OIT pour les politiques,
2017.
8 Rapport de la Banque mondiale 2018
9 Rapport de la Brookings Institution
6
En effet, au niveau du pays à cette occasion, le
Gouvernement a présenté à l'opinion nationale et
internationale, comme ci-après, les statistiques sur l'emploi et le
chômage dans notre pays : « Il se crée en RDC depuis 2012,
100.000 emplois en moyenne chaque année et le taux de chômage en
2014 est de 43% tandis qu'en 2000, il a été de 67% ».
Ainsi, soucieux de garantir la cohérence entre les
performances macroéconomiques, le niveau de la croissance
économique et l'amélioration du vécu quotidien des
populations congolaises, le Gouvernement s'est donc félicité de
l'évolution du niveau de l'emploi qui s'est traduite par la
réduction du taux de chômage et l'inversion de sa courbe.
Tandis que dans la ville de Goma, près de 80 % des
Congolais âgés entre 15 et 40 ans sont au chômage, selon les
estimations des spécialistes comme AUGUSTIN MATATA MPONYO et cie. Dans
cette partie du pays, des milliers de diplômés se retrouvent sans
emploi après leurs études. Ils vivent de la débrouille.
Conséquence : certains jeunes diplômés rejoignent les
mouvements rebelles qui pullulent à l'est du pays.
Une fois passé un long moment dans la file d'attente,
ils mettent en place plusieurs stratégies pouvant les faciliter à
s'insérer. Ainsi, le canal d'insertion qui s'avère pour eux le
plus efficace est celui des relations ou connaissances10.
Il est par ailleurs normal de supposer que l'emploi des jeunes
est plus sensible que celui des autres catégories au rythme des
licenciements, l'ancienneté des jeunes étant faible par
définition. De même, le ralentissement de la création
d'emplois qui va de pair avec celui de la conjoncture les touche de plein
marteau ; un premier emploi correspond rarement aux souhaits et au profil de
l'individu employé et le chômage frictionnel des jeunes est
important.
D'où le chômage des jeunes devient persistant et
leur insertion dans le secteur public devient longue, difficile et
préoccupante. La République Démocratique du Congo, le Nord
Kivu en particulier se trouvent frappé par ce phénomène ;
pas de politique de lutte contre le chômage des jeunes, pas
d'indemnisation de chômage, Bref pas des solutions à ce
phénomène.
Au Nord Kivu, on constate une multiplication des organisations
non gouvernementales (ONG) qui, d'une manière ou d'une autre
réduise le chômage à court terme mais qui s'accentue encore
une fois à long terme : c'est-à-dire qu'à long terme le
chômage risquerait de s'aggraver.
10 Emmanuel SHUKURU, op cit
7
Si ces dernières mettaient fin à leurs projets ;
aussi en grande partie ces emplois créés ne profitent pas aux
jeunes.
Si les Universités déversent un grand nombre des
diplômés et que ceux-ci n'ont aucune assurance de trouver un
emploi, il faut dire que les responsabilités sont partagées.
Ainsi, dans ce travail nous présentons la situation des jeunes de 15
à 40 ans, gradués et licenciés qui sont
insérés dans le secteur public.
Après cela, nous nous sommes posé les questions
selon lesquelles :
? Quel temps moyen d'attente qu'un jeune de Goma de niveau
supérieur peut passer dans la file d'attente après le
système éducatif avant de s'établir dans un emploi public
à Goma ?
? Quels sont les facteurs qui déterminent l'insertion
des jeunes dans le secteur public à Goma ?
Avec comme hypothèses :
Le temps moyen d'attente qu'un jeune de Goma peut passer dans
la file d'attente avant de s'établir dans un emploi serait de 16 mois
(1,4 année).
Il existerait une relation significative avec un effet de
petite taille entre les relations ou connaissances et l'insertion dans le
secteur du travail (secteur public).
0.3. OBJECTIF DU TRAVAIL
0.3.1. Objectif général
? Connaitre ce qui détermine l'insertion des jeunes dans
le secteur public à Goma. 0.3.2. Objectifs
spécifiques
Nous allons :
- Préciser certains concepts tels que chômage,
jeune, chômeur, etc.
- Déterminer la durée moyenne qu'un jeune peut
passer dans la file d'attente avant d'être
inséré dans le secteur public ;
- Présenter les déterminants d'insertion des jeunes
dans le secteur public ;
- Proposer une série de recommandations d'une part pour
le pouvoir public et pour les
jeunes de l'autre part.
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