SECTION 2 : Revue de la littérature
Cette section comprend quatre parties. La première
partie aborde l'historique et l'évolution de la production du maïs
et de ses dérivés au Bénin, la deuxième fait une
clarification conceptuelle de la demande, ensuite la troisième partie
présente les facteurs déterminants la demande et enfin la
dernière partie remémore quelques études empiriques
menées par les chercheurs.
2.1.Historique et évolution de la production du
maïs et de ses dérivés au Bénin
Son nom vernaculaire le plus commun est maïs. Ce terme
vient de l'espagnol maíz, emprunté lui-même à la
langue des Taínos de Haïti qui le cultivaient. De nombreux autres
noms vernaculaires ont été appliqués à cette
céréale, notamment blé indien, blé de Turquie et
blé de Barbarie. Désuets pour la plupart, ces noms
témoignent de la confusion qui a longtemps régné en Europe
sur l'origine de la plante. Le maïs occupe une place de choix dans
l'alimentation des populations du Bénin; cela explique le niveau
élevé de la production du maïs dans le pays.
Après son introduction au Bénin au XVIe
siècle par les Portugais, la culture du produit s'est d'abord
développée dans la partie méridionale avant de
s'étendre depuis une vingtaine d'années à la zone
septentrionale. Néanmoins, plus de 80 % de la production sont encore
assurés par la zone sud, dont environ 40 % des surfaces emblavées
sont consacrés à la culture du maïs (Nago, 1986).
Malgré le caractère rudimentaire des techniques
culturales, la production nationale a enregistré une hausse importante
au cours des dix dernières années, passant de 750.447 tonnes en
2000-2001 à 1.205.200 tonnes en 2009-2010. Cet accroissement
résulte principalement de la croissance démographique, de la
capacité de cette céréale à s'adapter à des
zones agro-écologiques diverses, de l'évolution des choix
d'emballement et de l'importance du maïs dans les transactions
commerciales et l'alimentation des populations dans l'ensemble du pays.
Les variétés cultivées se distinguent par
plusieurs caractéristiques: la durée du cycle de culture, le
rendement, la couleur, la forme et la dureté du grain. Bien qu'elles
aient des rendements peu élevés (750 kg/ha en moyenne contre plus
de 3.500 kg/ha pour les variétés sélectionnées),
les variétés locales sont les plus cultivées et les plus
consommées dans le pays car elles sont moins exigeantes pendant la phase
culturale, se conservent mieux durant le stockage et leurs
caractéristiques physico-chimiques (grains blancs et tendres en
général, teneur en amidon élevée...) et
répondent mieux aux exigences des préparations alimentaires,
domestiques et artisanales (DPP/MAEP 2010)..
Le maïs est en effet, parmi les produits vivriers
du pays, celui qui fait l'objet du plus grand nombre de transformations
alimentaires: une quarantaine de produits en dérivent (figure 1 :
principaux produits dérivés du maïs ; source :
Production et valorisation du maïs à l'échelon villageois en
Afrique de l'Ouest, archive de la FAO). Bon nombre de ces
produits sont préparés aussi bien par les ménages que par
le secteur artisanal.
La plupart des technologies de transformation du maïs
utilisées dans le secteur artisanal proviennent du patrimoine culturel
local. Il s'agit, en effet, de techniques domestiques, transmises et
pérennisées à travers l'éducation familiale, qui
furent progressivement intégrées et utilisées à
plus grande échelle dans des activités marchandes. Les
événements socio-économiques ayant favorisé cette
évolution technologique sont nombreux mais interdépendants: exode
rural, explosion urbaine, chômage, difficultés économiques,
etc.
Les procédés utilisés sont
généralement longs et complexes. Les trois quarts des produits
élaborés sont de nature fermentée. A l'origine, certains
de ces aliments étaient préparés et consommés
exclusivement par quelques groupes ethniques. Mais le brassage des populations
et le développement de l'artisanat alimentaire ont favorisé la
diffusion des produits et des procédés de fabrication,
particulièrement dans les centres urbains comme Cotonou.
Parmi les produits commercialisés par le secteur
artisanal, deux grandes catégories peuvent être
distinguées: Les produits prêts à cuire (produits
semi-finis), qui sont achetés essentiellement par les ménages
urbains pour gagner du temps dans la préparation de certains aliments;
les produits prêts à consommer, qui comprennent les plats
cuisinés, les snacks et les boissons.
ü LES PRODUITS SEMI-FINIS: DESCRIPTION ET
FABRICATION
Les produits semi-finis dérivés du maïs
sont constitués par les farines et les pâtes fermentées
(mawè et ogui). Les farines ordinaires et torréfiées sont
des produits de première transformation obtenus après mouture des
grains secs (teneur en eau: 10 à15 %) avec ou sans torréfaction
préalable.
- Le mawè est un produit consistant, de couleur blanche
et de saveur acide qui est la base de départ pour la préparation
de nombreux aliments. Pour son élaboration, le maïs est
concassé, tamisé avant d'être finement moulu. Après
addition d'eau et pétrissage, le produit est mis à fermenter
pendant 2 à 7 jours. C'est un produit riche en eau et en amidon, mais
pauvre en protéines. Les opérations pénibles
identifiées dans cette préparation sont le lavage du gritz, le
tamisage et le pétrissage.
- L'ogui est une pâte fermentée moins
consistante, moins blanche, mais plus humide que le mawè (teneur en eau:
80-85 %). Il est obtenu selon un procédé différent qui
comporte, préalablement à la mouture et à la fermentation,
des étapes de précuisson et de trempage des grains. Son pH et ses
teneurs en amidon et en protéines sont proches de ceux du mawè.
Les opérations jugées pénibles par les transformatrices
sont les mêmes que celles relevées dans la technologie du
mawè. L'ogui est également utilisé pour la
préparation de divers aliments.
ü LES PRODUITS FINIS: DESCRIPTION ET
FABRICATION
Les pâtes cuites sont obtenues par cuisson à
l'eau bouillante des produits crus précédents. Le malaxage, le
pétrissage, la cuisson et l'emballage sont généralement
les opérations technologiques jugées les plus pénibles
pour leur préparation.
Ces pâtes cuites sont de plusieurs types:
- La pâte ordinaire (owo) faite à partir de la
farine entière ;
- La pâte au jus de poulet (amiwo): pâte
aromatisée obtenue par cuisson de la farine de maïs dans le jus de
poulet additionné d'huile et de divers condiments ;
- L'akassa: pâte acide, visqueuse et consistante,
obtenue par cuisson de l'ogui ou du mawè. Avant sa commercialisation, le
produit est généralement façonné en boule et
emballé dans des feuilles végétales ;
- Le lio: pâte acide d'origine fon obtenue par double
cuisson de l'ogui: une première cuisson (partielle) du produit cru et
une seconde cuisson (à la vapeur) du produit semi-cuit après
façonnage en boule et emballage dans des feuilles
végétales. Ces produits sont, de ce fait, nettement plus stables
que les autres pâtes cuites ;
- L'ablô: pâte légèrement
salée et sucrée d'origine mina qui est préparée
à partir du mawè additionné de farine de blé et de
divers ingrédients (levure, sel, sucre). L'ensemble est
homogénéisé, pétri et façonné en
boulettes qui sont cuites à la vapeur ;
- Les autres pâtes fermentées cuites: le
gowé (préparé à partir du maïs entier), le
côme (produit de texture grossière d'origine ghanéenne) et
l'akpan (pâte semi-cuite obtenue à partir du mawè ou de
l'ogui et consommée après dilution dans de l'eau glacée).
Ces pâtes sont commercialisées sous forme de boules
emballées dans des feuilles végétales.
- Le couscous de maïs
(yèkè-yèkè) est un produit traditionnel,
consommé surtout lors des cérémonies coutumières
organisées par le groupe ethnique Mina. Il est obtenu par granulation
(routage) puis par pré-cuisson à la vapeur du mawè. Sa
production artisanale a fortement diminué au cours des trente
dernières années en raison de la pénibilité du
travail de préparation et de la concurrence du riz et du couscous de
blé (produits importés). Les bouillies sont
préparées à partir de pâtes fermentées et
présentent donc une saveur légèrement acide. Elles
diffèrent l'une de l'autre par leur densité, leur texture et leur
couleur plus ou moins blanche. Elles sont consommées après
addition de sucre, parfois accompagnées d'arachides grillées. On
distingue principalement deux types:
- L'aklui: le mawè est malaxé puis
granulé avant d'être cuit dans l'eau jusqu'à l'obtention
d'une bouillie semi-liquide parsemée de grumeaux mous dont on provoque
la formation au cours de la cuisson du mawè à l'aide d'une
palette en bois;
- Le kokoest une bouillie légère,
préparée indifféremment à partir du mawè ou
de l'ogui. Elle ne comporte ni granules ni grumeaux et est surtout
destinée aux enfants en période de sevrage.
- Les beignets sont élaborés soit à
partir des pâtes fermentées crues, soit à partir des
farines (ordinaires ou torréfiées). Les pâtons,
préparés, assaisonnés de condiments divers (sucre, sel,
piment) et façonnés sous différentes formes, sont frits
dans l'huile (arachide, coco ou palmiste). On obtient ainsi plusieurs types de
beignets: klè-klè (beignet sucré en boulette ou en
rondelles), klaklu (beignet en brindilles obtenu à partir de la farine
torréfiée), avounmi (produit en boulettes), massa (boulettes
préparées à partir du mawè additionné de
farine de blé, de sucre, et de levure), etc. Les beignets sont
consommés soit seuls soit avec l'arachide grillée ou l'amande de
coco.
- Les produits en épi ou en grain. Le maïs frais,
sec ou à peine mûr, en épi ou en grain, est grillé
ou cuit à l'eau et consommé avec des arachides (grillées
ou bouillies) ou de l'amande de coco. Divers types de mélange sont ainsi
produits (maïs et arachides grillés, maïs et arachides cuits,
maïs cuit et arachide grillée), qui portent tous la
dénomination bokoun.
- Les boissons sont de deux types: le chakpalo: une
bière locale légèrement sucrée et de couleur brune
dont la préparation s'effectue en plusieurs étapes - maltage du
maïs (trempage + germination + séchage pendant 6 ou 7 jours),
concassage, brassage (humectage + pétrissage + délayage dans
l'eau et cuisson de la farine), filtration du mélange et fermentation du
filtrat. Cette boisson est très appréciée des
consommateurs, particulièrement pendant les périodes chaudes.
Elle est vendue après addition de glace;
- Le sodabi: une eau-de-vie qui est originellement obtenue par
distillation du vin de palme fermenté. Du fait de la chute de la
production de ce vin, d'autres types de moût fermenté tels que
celui à base de maïs sont actuellement utilisés pour la
préparation du sodabi.
Figure1 : Principaux produits
dérivés du maïs ; source : Production et valorisation du
maïs à l'échelon villageois en Afrique de l'Ouest, archive
de la FAO
Source : Agro bénin (2011)
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