Economie experimentale et théorie des jeux.par Adil FERTAH Université Cadi Ayad - Diplôme des études supérieures approfondies en sciences économiques 2003 |
1 - 4 - Champ d'applicationPlusieurs raisons justifient le recours à la méthode expérimentale ( voir section II) que ce soit en économie ( notamment en microéconomie des risques et de la décision individuelle dans un environnement incertain, en théorie des jeux et en microéconomie de l'organisation industrielle ou la théorie des marchés) ou en sciences de gestion ( notamment en marketing, en finance, en assurance, en théorie de l'organisation et en commerce électronique). L'utilisation de l'expérimentation dans ces différents domaines est considérée comme un moyen de production de données naturelles et de connaissance, qui est complémentaire aux méthodes statistiques de tout ordre, aux enquêtes et aux simulations. Dans le domaine économique qui nous intéresse ici, nous pouvons distinguer, comme l'a fait ROTH2(*)2, entre trois branches essentielles dans lesquelles l'expérimentation a attiré plus d'attention. Il s'agit en premier lieu des théories du choix individuel, deuxièmement les théories des organisations industrielles et en troisième lieu les théories des interactions comportementales. Il faut noter ici que l'avènement des expériences dans ces différents domaines a été fortement influencé par la publication en 1944 du célèbre ouvrage de Von Neuman et Morgenstern, « Theory of Game and Economic Behavior »2(*)3. 1-4-1 Les théories du choix individuelJusqu'à présent, l'expérience2(*)4 de THURSTONE2(*)5 en 1931 (examen de la vraisemblance de la théorie de l'utilité ordinaire), celle de MOSTELLER et NOGEE en 1951 et celle de ALLAIS2(*)6 en 1953 ( qui établit quelques violations dans la théorie classique du choix individuel2(*)7) restent les références les plus importantes dans ce domaine. En outre DAY2(*)8 affirme qu'il faut, tout d'abord, associer à ce champ, qui s'intéresse à la décision en incertitude, la conférence dont le thème était « la conception des expériences sur les processus de décision » déroulant en 1952 au « RAND Corporation » à Santa Monica aux Etats Unis mettant ainsi en contact des mathématiciens, des psychologues, des économistes et des sociologues. En général, ce genre d'expérience a pour objectif : premièrement de faire des tests des prédictions de la théorie du comportement rationnel et deuxièmement essayer d'expliquer et de faire des investigations concernant les régularités non prédites. Mais, il y a différentes formulations du comportement rationnel qui influencent à leur tour la conception des expériences. Parmi ces différentes formulations de la rationalité on peut citer : le comportement maximisateur, la maximisation de l'utilité ordinaire, la maximisation de l'utilité espérée et la maximisation de l'utilité espérée subjective. Il faut noter ici que dans ce domaine, les expériences sont dans la plupart des cas simples. Souvent, il s'agit, seulement de poser des questions sur certains choix hypothétiques2(*)9. Mais l'interprétation de ces choix observés ont des implications économiques très importantes. Parfois, et surtout pour les théories du choix basées sur les préférences, on essaye d'étudier les effets de présentation des décisions, puisque le choix entre deux alternatives peut dépendre de la façon avec laquelle la décision est présentée ou formulée ( ce genre d'études sont faites actuellement d'une manière importante dans des domaines tels que la communication des décisions publiques, le marketing). Pour bien montrer ce point prenons, l'exemple de deux expériences développées par KAHNEMAN et TVERSKY (1979). Les décisions à prendre dans les deux expériences sont les mêmes, mais la façon avec laquelle elles sont présentées sont différentes. Expérience 1 : Imaginez que vous avez décidé de voir un spectacle pour lequel le prix d'entrée est de 10 Dh. En entrant au théâtre vous découvrez la perte du billet à 10 Dh. Etes-vous prêt à payer 10 Dh pour le ticket du spectacle. * 22 - ROTH A E. (1993), op. cit, p. 184. * 23 - NEUMANN J.V., MORGENSTERN O. (1944). op.cit. * 24 - Dans son expérience, THURSTONE a été intéressé par le problème de la détermination ( de manière expérimentale ) de la courbe d'indifférence individuelle. Il a proposé une expérience dans laquelle chaque sujet a été demandé de faire plusieurs choix possibles entre des paquets de différents produits. Ces paquets peuvent contenir soit des chapeaux et des manteaux, soit des chapeaux et des chaussures soit des chaussures et des manteaux. En reportant des données détaillées sur un seul sujet, il a conclu que ces dernières peuvent adéquatement être représentées par des courbes d'indifférence ( hyperboliques). * 25 - THURSTONE L.L. (1931), op. cit * 26 - ALLAIS M. (1953). op. cit. * 27 - ALLAIS s'est inspiré dans son expérience de l'article de MOSTELLER et NOGEE ( MOSTELLER F., NOGEE P. (1951), « An experimental measurement of utility », Journal of Political Economy, 59, p 371 - 404.) dans lequel ils ont conclu que malgré la possibilité de construction, de manière expérimentale, des fonctions d'utilité, les prédictions dérivées de celles-ci ne sont pas assez bonnes comme elles devraient. En effet, dans son expérience, ALLAIS a essayé de prouver expérimentalement que des violations systématiques da la théorie de l'utilité espérée peuvent être observées. * 28 - DAY R.H. (1993), « On the origins of experimentation in economics », dans DAY R.H., SMITH V.L, « Experiments in decision, organisation and exchange », Amsterdam, North-Holland, cité par DELOCHE Régis. (1995). op. cit, p. 952. * 29 - Nous pouvons donner l'exemple suivant : laquelle des options suivantes préférez-vous ? gagner surement 30 Dh ; [ 78% ] Les résultats de l'expérience avoir 80% de chance de gagner 45 Dh [ 22% ]
l'expérience est due à KAHNEMAN et TVERSKY. ( KAHNEMAN D., TVERSKY A. (1979), op. cit. Cité dans THALER R. ( 1987), « The psychology of choice and the assumptions of Economics », dans ROTH A. E. « Laboratory Experimentation in Economics : six points of view », Cambridge University Press. |
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