III. L'ART AFRICAIN
Revenons à l'Homme, centre actif de l'univers. Sa
fonction essentielle est de capter toutes les forces éparses qui
sous-tendent la matière, plus exactement, tous les aspects, les formes
et couleurs, odeurs et mouvements, sons et bruits de l'univers. Il lui
appartient de les animer au sens étymologique du mot, de
renforcer leur vie en renforçant leur force. Voilà
lâché le mot, Vie, qui, en dernière analyse,
explique la philosophie africaine, mais aussi la religion. C'est donc dans le
cadre de sa religion, l'Animisme, que l'Africain exerce sa fonction
d'animateur, de créateur de vie, car son art n'a pas d'autre fonction.
C'est dans le rituel des cérémonies religieuses, depuis la simple
prière jusqu'à l'initiation, que l'art africain s'accomplit en
accomplissant sa mission, en renforçant la force de Dieu, en
recréant Dieu. D'où l'adage selon lequel « Dieu a besoin des
hommes ».
Nous ne retiendrons, ici, pour ne pas être trop long,
que les principaux arts de l'Afrique : la poésie, la musique et la
sculpture, qui, souvent, vivent en symbiose pour former un art
intégral. Il est vrai que tous les arts sur notre continent, du
poème au théâtre, participent peu ou prou à cette
intégralité, sans oublier la sculpture. Ils expriment
1443 La Pensée et le Mouvant, P.U.F., p. 216.
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la même esthétique, qui procède de la
philosophie que voilà et que j'ai définie : « une image ou
un ensemble d'images analogiques, mélodieuses et rythmées
».
Nous commencerons par la poésie, qui, dans
presque toutes les civilisations, est l'art majeur. Majeur surtout en Afrique
parce qu'elle capte les forces de l'univers et les exprime sous leur forme la
plus active, la plus créatrice, qui est la parole humide, comme l'a
montré Madame Calame-Griaule. Les Peuls du Sénégal
définissent le poème : « Des paroles plaisantes au coeur et
à l'oreille ». Et, de fait, nul art n'exprime mieux
l'esthétique que voilà. C'est ici que la distinction entre
Afrique du Nord et Afrique subsaharienne est le moins justifiée, si, du
moins, on remonte à l'Ur-Afrika, pour parler comme Leo
Frobenius. Je l'ai montré dans un texte sur la poésie africaine,
intitulé « Négritude et Berbéritude ».
Il y a, d'abord, que, dans le poème africain,
l'idée-sentiment se présente toujours sous la forme d'une image,
d'images analogiques, symboliques, comme dans les deux kim njom ou
chants gymniques -- mot à mot, « chants de lutte » -- de mon
village natal, que je vais vous dire. Il s'agit de courts poèmes de deux
à quatre vers, à la manière des haïkus
japonais.
Voici le premier, où une jeune fille chante
l'athlète son fiancé, Lang Saar, qui, « noir
élancé », exprime l'idéal de la beauté
sénégalaise :
Lang Saar a lipwa pay'baal
O fes o genox nan fo soorom,
« Lang Saar s'est drapé dans un pagne noir : Un
jeune homme s'est levé, tel un filao ».
Le filao est un conifère au feuillage sombre.
Dans le deuxième poème, une autre jeune fille,
qui a vu triompher son « champion » aux luttes, qui ont lieu le soir,
après le dîner, dit sa joie dans une belle métaphore :
`Daankim, ngel né m'feeka ;
Lam la mi caala a yuube,
« Je ne dormirai point, sur la place je veillerai ;
« Le tam-tam de moi est paré d'un collier blanc ».
Après les images analogiques, car tout est analogie
dans l'univers, voici l'harmonie, plus précisément, la
mélodie. Je précise qu'un gim njom -- c'est le
singulier -- peut être récité, psalmodié. Le
poète emploie l'assonance et, plus encore, l'allitération pour
faire ses vers « plaisants à l'oreille ». Plus subtilement, la
poétesse, dans le premier vers du premier poème et dans le second
du dernier, joue sur les voyelles des syllabes qui portent l'accent
d'intensité, et que j'ai soulignées en ne les soulignant pas. Je
signalerai, pour en terminer avec la mélodie, que la même voyelle
a exprime, là, la peau noire et, ici, la blancheur du
collier.
Le troisième élément de la beauté
poétique est le rythme. Je parle d'un rythme vivant, qui rompt
l'équilibre, la monotonie apparente du poème africain. Si le
rythme, qui techniquement définit la poésie, est indiqué
par le nombre des mètres comme dans les anciennes poésies grecque
et latine, il ne l'est pas, comme dans la poésie classique
française, par le nombre des syllabes, mais par celui des accents
d'intensité, c'est-à-dire des syllabes accentuées, qui,
ici, sont trois dans chaque vers. Je les ai notés, encore une fois, en
ne les soulignant pas. Mais le poème africain est souvent plus complexe,
avec des contretemps et des syncopes, que nous retrouverons dans le chant :
dans la musique.
Il reste que le rythme du poème en Afrique n'est pas
seulement dans la succession, ordonnée, des syllabes accentuées
et atones ; il est aussi dans la répétition qui ne se
répète pas de certaines expressions, de certains mots, voire
de certaines syllabes ou voyelles. C'est le cas d'un
poème-défi, composé par un champion wolof,
Pahté Diop, pour provoquer à la lutte ses adversaires. J'en
extrais ce vers, qui est un tétramètre :
Kuluxum lu jigeen aukë jur 1 --
Dëgë lë
« Béni soit ce que femme à genoux met au
monde ! -- C'est vrai. »
Les trois premières syllabes accentuées de ce
vers ont une voyelle u, qui revient dans d'autres syllabes.
Du poème psalmodié, nous passons au chant :
à la musique. En effet, si les poèmes peuvent être
récités, ils sont, le plus souvent, chantés. En
sérère, c'est le même mot, gim, « chant
», qui désigne le chant et le poème. Comme l'a écrit
André Gide, le chant en Afrique est traditionnellement polyphonique. Je
précise : avec accompagnement à la tierce, à la quinte ou
à l'octave.
Autrefois, ce chant polyphonique couvrait, non seulement le
« continent noir », mais encore tout le Bassin
méditerranéen. Un ami sarde et un ami corse m'ont signalé
cette polyphonie dans l'une et l'autre de leurs îles. Et le dernier le
fait venir d'Afrique : du Maghreb berbère, où les poèmes
sont chantés comme en Afrique noire (1444). Et j'ai entendu,
pendant ces vacances, des chants berbères polyphoniques, dont une sorte
de plain-chant, également polyphonique. Avant d'aller plus loin, je
souligne que cette musique est, comme la poésie, plus complexe qu'on ne
le croyait. Au lieu de la gamme européenne à sept tons ou
demi-tons, il y a, en Afrique, des modes plus subtils avec des tons, demi-tons
et quarts de ton.
Mais, plongeons au-dessous du chant, dans la musique
instrumentale, avant de revenir au gim. Écoutez, au Maroc, en
Algérie ou en Tunisie, ce qu'on appelle « de la musique andalouse
». Écoutez le rythme de base donné par une sorte de tam-tam
: 1234, 1234, 1234. Au-dessus de ce rythme monotone, despotique, vous
entendrez, s'appuyant sur lui, un autre plus léger, marqué par un
autre instrument à percussion et se livrant, comme librement, à
des contretemps et syncopes. C'est cette polyrythme,
singulièrement ces contretemps et syncopes qui constituent la
seconde caractéristique de la musique africaine. Il reste qu'il y a
encore, au-dessus de ces instruments à
1444 Cf. Jean Amrouche : Chants berbères de
Kabylie, Éditions Charlot, Paris, 1974.
509
percussion, des instruments à cordes ou à vent.
Sans parler des voix humaines qui chantent, et qui, elles aussi, soutenues par
le rythme profond de l'Afrique-Mère, peuvent se livrer, plus librement
encore, à leurs fantaisies créatrices : aux vibratos et autres
glissements expressifs.
On me demandera : « Où sont, dans tout cela, les
images analogiques ? » Je répondrai qu'elles sont dans les
éléments caractéristiques de cette musique : dans la
mélodie et le rythme ; plus précisément, dans la
polyphonie, les contretemps et syncopes. Elles sont surtout, outre le mode
employé, dans les altérations aussi bien des voix que des
instruments, qui expriment, qui suggèrent les images-sentiments
inspirent les oreilles, et le coeur avec : l'âme.
Si, maintenant, nous retournons à la poésie
psalmodiée, nous découvrirons qu'elle est, elle aussi, comme le
chant et la musique instrumentale, animée par des contretemps et
syncopes. Surtout quand elle est à plusieurs voix ou entrecoupée
de silences.
Nous finirons par les arts plastiques en nous arrêtant
sur la sculpture. Je prendrai, ici, comme exemples, deux sculptures en bois qui
ornent mon bureau.
Ce sont, au premier abord, des images analogiques. L'une
représente la tête d'un bovidé avec ses cornes ; l'autre,
un oiseau, une sorte de calao. Mais c'est moins simple. Nous voyons, d'une
part, alignés au milieu du front et des naseaux du bovidé, un
léopard, un oiseau et un petit ruminant ; d'autre part, sur les ailes
déployées du calao, deux tortues. Il y a là,
exprimée par une imagerie complexe, toute une philosophie, une
théologie. Traditionnellement, en effet, le calao et le bovidé
sont des images-symboles de la fécondité et de la force ; de la
Vie. Et celle-ci est, une fois de plus, animée aussi bien par la
mélodie des formes et des couleurs que par les mouvements du rythme.
La tête du bovidé est un masque dont la
mélodie des couleurs tient au fait que celles-ci sont
complémentaires : du jaune et de l'orange sur fond noir. Quant au calao,
dressé sur ses pattes et les ailes ouvertes, il est peint d'une couleur
d'ébène claire, uniforme en apparence, mais que le temps a
patinée, non sans nuances.
Le plus expressif, c'est, de nouveau, comme toujours en
Afrique, le rythme. Sur la tête du bovidé, il y a deux plans qui
se coupent. À l'horizontale se présentent des courbes
allongées : une corne, une joue, puis une corne, une joue. À la
verticale, ce sont successivement, de haut en bas : une pointe noire,
triangulaire, un léopard jaune, tacheté de noir, un oiseau noir,
jaune et orange, enfin, un ruminant jaune. Bref, des répétitions
qui ne répètent pas, et que nous allons retrouver sur la
sculpture du calao, mais sous les apparences, premières, de la
monotonie. Ici aussi, nous avons, d'abord, le plan horizontal des ailes,
déployées en carrés, que coupe un plan vertical,
formé de courbes, qui sont : l'excroissance cornée de la
tête, le bec, présenté comme en double, et le ventre. Il y
a mieux : sur chaque aile est sculptée une tortue, surmontée d'un
oiseau de paradis, les ailes également déployées et ayant,
pour ainsi dire, la même tête que la tortue. Qu'on y regarde plus
attentivement, et l'on verra, bientôt, qu'il s'agit d'une fausse
monotonie parce que d'une fausse symétrie. Le calao, de grande taille,
de plus d'un mètre, se présente avec un léger
déhanchement. C'est le coup de reins du contretemps, que l'on trouve,
ici, sur toutes les parties du corps : sur la tête, le bec, les pattes,
comme aux ailes, sur les deux tortues et les deux oiseaux de paradis.
Il est temps que je m'achemine vers ma conclusion.
*
* *
LA RÉVOLUTION DE 1889
C'est Pierre Teilhard de Chardin, qui, au milieu de ce
siècle, fut l'un des premiers paléontologues, après
Darwin, à conseiller de rechercher les origines de l'Homme en Afrique.
Il fut surtout, je le rappelle, le premier à annoncer, pour l'aube du
deuxième millénaire, « la Civilisation de l'Universel
». C'est que, comme il avait pu le constater lui-même, depuis ce que
j'appelle « la Révolution de 1889 », les emprunts des cultures
les unes aux autres et, partant, leur fécondation réciproque
avaient commencé.
1889, c'est une grande date, et double. C'est, en effet, cette
année-là qu'Henri Bergson a publié l'Essai sur les
Données immédiates de la Conscience. C'est cette même
année que Paul Claudel a écrit sa première pièce de
théâtre, Tête d'Or. Cette révolution, que je
vais définir, avait été préparée, sinon
annoncée, par La Saison en Enfer d'Arthur Rimbaud. Mais
revenons à Bergson et à Claudel, que nous expliquerons par
Rimbaud.
La philosophie d'Henri Bergson se présente,
essentiellement, comme « un retour conscient et réfléchi aux
données de l'intuition », dont nous avons fait la vertu majeure de
la philosophie négro-africaine. Quant à Paul Claudel, il avait
noté, pour la représentation de Tête d'Or sur
scène : « avec accompagnement de tambours ou de tam-tams ».
Mais c'est Arthur Rimbaud qui, pour ainsi dire, annoncera la couleur. En effet,
dans Une saison en Enfer, il n'hésite pas à se
présenter comme « un nègre ». Il fait mieux en
présentant une esthétique, que nous avons découverte quand
nous avons lancé le mouvement, comme l'esthétique même de
la Négritude. En effet, il préconise l'usage d'un «
verbe poétique accessible... à tous les sens ». Et cela,
grâce à un « dérèglement de tous les sens
», c'est-à-dire toutes barrières renversées, à
leur communication analogique, symbolique.
C'est donc sous l'influence de la révolution culturelle
de 1889 que ce qu'on appelle l'Art nègre, qui est, plus
véritablement, l'art africain, a commencé d'influencer l'art
français, mais aussi l'art américain, et, par ces deux voies,
l'art mondial.
Je partirai des arts plastiques, qui ont le plus fait parler
d'eux grâce à l'École de Paris. Quand, jeune
professeur, je fréquentais les peintres, Picasso m'a dit, un jour, en me
reconduisant à la porte de son atelier : « Il nous fait rester des
sauvages ». Ce n'était pas hasard. D'autre part et s'agissant de
littérature, singulièrement du Surréalisme,
510
je vous signale la thèse de doctorat de Jean-Claude
Blachère, un enseignant français de Dakar, sur le
Surréalisme, intitulée « Le Modèle nègre
» (1445). Enfin, last but not least, il y a
l'influence de la musique négro-américaine, héritée
de l'Afrique et qui s'étend de plus en plus sur le monde, comme en
témoigne la place qu'occupe le jazz dans les festivals organisés
en Europe pendant l'été.
Depuis la civilisation aurignacienne, la première du
Paléolithique supérieur, l'Afrique n'a cessé de jouer un
grand rôle dans la civilisation humaine. L'interruption, pendant deux
mille ans, de son influence -- depuis l'épanouissement de la
civilisation grecque, au Ve siècle avant J.-C.,
jusqu'à la Renaissance -- ne l'a pas fait disparaître pour autant.
C'est pourquoi je conclurai par la réflexion que m'a faite Pierre
Soulages, le grand peintre français, après avoir lu mon article
intitulé « L'Esthétique négro-africaine
»(6) : « C'est l'esthétique même du
XXe siècle ».
OBSERVATIONS présentées à la suite
de la communication de M. le président Léopold Sédar
Senghor
M. Jean CAZENEUVE dit d'abord son adhésion à la
communication de M. Léopold Sédar Senghor, notamment sur les
rapports de la philosophie africaine avec la philosophie grecque. Il rappelle
ensuite l'importance des ouvrages de Placide Tempels, tel que La
Philosophie bantoue, et de ceux de Pierre-Maxime Schuhl sur la
pensée grecque. Cependant c'est surtout chez Platon, que l'on peut
observer des analogies avec les traditions originaires de l'Afrique Noire dont
les conceptions philosophiques ont cheminé par l'Égypte et la
Crète, gagnant la Grèce naissante. N'y aurait-il donc pas lieu de
mettre la philosophie africaine en relation avec la philosophie platonicienne
plutôt qu'avec la philosophie aristotélicienne ?
*
* *
M. Jean STOETZEL, après s'être
félicité de l'audience recueillie par l'ouvrage d'Alassane Ndaw
qu'il a encouragé dans ses travaux, aimerait que le président
Senghor, de confession catholique et qui fut le président d'un pays
essentiellement musulman, lui explique pour quelles raisons le christianisme a,
semble-t-il, moins d'emprise que l'Islam dans les pays d'Afrique Noire. C'est
un problème qui lui paraît essentiel pour mieux appréhender
la nature profonde de la culture africaine.
*
* *
M. Pierre CHAUNU constate avec les préhistoriens
sondant les lointains obscurs de l'hominisation que de -- 2 millions
d'années à -- 10 000 ans la moitié des objets, des traces
relevées, des signes perçus... viennent du continent africain,
berceau de l'humanité.
Le premier biface lointain archétype d'un
outil et d'une arme, ancêtre donc du micro-ordinateur et de la
fusée thermonucléaire à têtes multiples, vient de la
vallée de l'Omo, de la Rift Valley en Afrique
orientale (peut-être hasard heureux, cadeau de la tectonique -- je
l'accorde).
D'autre part, depuis quinze ans, alors que la
fécondité des autres Tiers Mondes a reflué massivement
(d'un tiers en moyenne, de près de moitié en Chine), la
fécondité africaine s'est maintenue. Il s'en suit qu'après
une parenthèse de 10 millénaires à peine la part de
l'Afrique, sa part biologique, sera beaucoup plus considérable au
début du 3e millénaire, c'est une absolue certitude, le
coup est parti.
Un bien modeste verre d'eau à ce puissant fleuve
en simple témoignage de grande et respectueuse admiration. *
* *
M. Maurice LE LANNOU demande, au cas où l'on devrait
comparer négritude et celticité, s'il ne serait
pas préférable de choisir le terme de celtitude. Une analyse
affinée montre qu'il faut prêter à la désinence
udo une valeur exprimant l'intuition plus que l'analyse, tandis que le
suffixe itas serait plutôt abstrait. Dire celticité,
c'est donc attribuer au groupe celte des qualités rationalistes,
discursives, analytiques, opposées à l'intelligence africaine,
alors qu'on pouvait penser le contraire. Qu'en est-il de l'interposition de
l'humanisme rationaliste gréco-latin avec la berbéritude
et la négritude d'une part, et l'ensemble celte d'autre
part ? Cette celticité apparaît-elle très
différente des structures mentales africaines et des approches du
réel qui les caractérisent ?
*
* *
M. Jean FOURASTIÉ demande à M. le
président Senghor s'il estime que la poésie occitane populaire
présente une similitude avec la poésie sénégalaise
dans le domaine de la prosodie ? celle-ci est-elle par ailleurs
spécifique au Sénégal ou répandue dans toute
l'Afrique ? M. Fourastié serait également heureux si le
président Senghor donnait quelques indications sur la genèse des
langues africaines.
*
* *
1445 Les Nouvelles Éditions africaines, Dakar,
1981. 6 Revue Diogène, octobre 1956.
511
Le général Fernand GAMBIEZ tient à faire
part à M. le président Senghor de l'admiration qu'il avait
éprouvée lors d'un séjour au Sénégal, en
1963, organisé par le général de Gaulle, à
l'égard des structures sociales et économiques de ce pays.
L'image de la France y était toujours vivante et le
Sénégal était un modèle africain envié de
ses voisins. Mais quel contraste avec les autres pays d'expression
française ! Les chefs d'État vivaient dans
l'insécurité, dans l'angoisse d'un changement politique imminent,
favorisé par la prolifération des ethnies. La philosophie leur
a-t-elle apporté la sagesse ou le Sénégal demeure-t-il un
cas isolé ?
*
* *
M. François LHERMITTE tient à présenter
une remarque, à poser une question et à exprimer une conviction.
La remarque est la suivante : biologie et culture font ensemble l'individu, la
communauté, le peuple, le continent, l'humanité. Elles sont tout
à fait inséparables et l'on ne pourra jamais isoler le facteur
culturel du facteur biologique, aussi bien chez l'homme que chez les animaux.
Limiter les phénomènes biologiques à quelques pourcentages
de groupe sanguin est trop simple. Nous avons en nous-mêmes des centaines
de milliers de gènes différents les uns des autres : au regard de
cette diversité, celle des groupes sanguins est une mince affaire. La
question : les analogies mythiques et esthétiques que l'on constate
entre différentes cultures s'expliquent-elles seulement par des
migrations ou n'ont-elles pas plutôt pour origine l'évolution
normale de tout homme et de toute collectivité de la naissance à
la maturité ? L'analogie est, en effet, un concept très dangereux
si l'on oublie de prendre en compte la réalité indiscutable des
différents stades de maturation et de structures psychologiques dans
l'évolution des groupes. Le président Senghor peut-il donner
quelques indications sur le poids respectif de ces deux facteurs : les
migrations d'une part, l'évolution de la collectivité africaine
d'autre part ? M. Lhermitte exprime enfin sa conviction qu'à
l'idéalisme du président Senghor, il convient malheureusement
d'opposer le poids des idéologies qui commandent les comportements
humains et qui relèguent loin derrière elles les comportements de
raison.
*
* *
Réponse de M. le président
Senghor
M. le président Léopold Sédar Senghor
admet avec M. Jean Cazeneuve que la philosophie platonicienne est plus proche
de la philosophie africaine que celle d'Aristote. En effet, même si
Aristote accorde la primauté à l'intuition, il symbolise l'esprit
européen d'organisation et de méthode, opposé à
l'esprit africain, intuitif et créatif, que l'on découvre chez
Platon. Les Européens font preuve de rationalité alors que les
Africains privilégient la sensibilité. Mais le plus important
n'est-il pas ce fond commun qui existe dans toute civilisation possédant
les quatre facultés primordiales, à savoir la sensation, la
raison discursive, la raison intuitive et la volonté ?
En réponse à la question de M. Jean Stoetzel, M.
le président Senghor précise que les musulmans et les
chrétiens sont en nombre sensiblement égal en Afrique, les
musulmans étant plus nombreux en Afrique du Nord et
soudan-sahélienne, alors que les chrétiens sont majoritaires en
Afrique tropicale et équatoriale. Toutefois il est évident que le
Christianisme et l'Islam africains sont également inspirés par
l'Animisme. Aussi, dans cette perspective, ne s'agit-il pas
d'interpréter le dogme chrétien mais de le vivre en Africain.
C'est ainsi qu'aujourd'hui, au Sénégal, des chants polyphoniques
et grégoriens s'élèvent pendant la messe.
M. le président Senghor s'accorde avec MM. Pierre
Chaunu et François Lhermitte, pour constater que le facteur culturel
l'emporte sur le facteur biologique. Le message de l'Afrique est, en effet,
fondé sur le sens de la vie et l'art, donnant naissance à une
esthétique de la vie, réconciliant religion, philosophie et
même politique. Il est évident que l'influence de la civilisation
française a été déterminante pour concilier
religion et culture.
Répondant à M. Maurice Le Lannou, M. le
président Senghor fait observer que l'existence d'un fond irrationnel
chez les Celtes ne crée pas d'opposition entre celtitude et
celticité : il y a une celtitude au sein même de la
celticité. C'est une erreur de croire que la langue anglo-saxonne est
vouée à la rationalité et à la
scientificité. On pourrait en trouver une preuve dans la
sensibilité des poètes celtes, le métissage faisant la
richesse de la celticité. Si l'on considère les tableaux
numériques des groupes sanguins, le groupe A est le plus
représenté en Europe occidentale. Cependant deux exceptions
apparaissent : en Grèce et en Angleterre. Chez les Grecs le
métissage fut méthodique avec le Proche-Orient et
l'Égypte, et les Celtes se sont métissés avec des
négroïdes méditerranéens refoulés dans les
îles britanniques. Ce métissage biologique et culturel fait la
richesse des Celtes.
M. le président Senghor, répondant à M.
Jean Fourastié, rappelle l'importance de Paul Rivet, fondateur de
l'anthropologie française, qui a mis en évidence la
Méditerranée comme terre privilégiée de
métissage. En effet, les populations méditerranéennes sont
parmi les plus métissées, et, à ces latitudes, de grands
foyers de civilisations se sont développés. Les
ethnocaractérologues mettent dans l'ethnotype du Fluctuant les
Méditerranéens, les Africains et les Japonais. Aussi bien
faudra-t-il distinguer plusieurs types de langues : d'une part, les langues
à flexions indo-européennes et sémitiques, d'autre part,
les langues agglutinantes de l'Afrique et du Sud de l'Asie, enfin, les langues
à tons des Chinois et les langues à clics des Khoïsans. Les
écritures des grandes civilisations noires sont l'égyptien
ancien, le sumérien et le dravidien de la vallée de l'Indus
(déchiffré récemment par Asko Parpola).
512
L'Afrique est le berceau des grandes civilisations depuis deux
millions sept-centmille ans jusqu'à l'Homo Sapiens.
Après la découverte de l'écriture par les
Égyptiens, les langues agglutinantes se sont répandues en
Afrique. Mais qu'est-ce qu'une langue agglutinante ? Le français est une
langue analytique, de logicien, présentant une syntaxe de subordination,
alors que le sénégalais est une langue fondée sur
l'intuition, la juxtaposition ou la coordination.
En français, nous dirions : « Comme j'allais
puiser à la fontaine, un jeune homme, m'ayant atteinte, me dit « je
t'aime ».
En sénégalais, on dira : « J'allais
à la fontaine, un jeune homme me suivit, il m'atteignit, il me dit
« je t'aime ».
Voilà un exemple de syntaxe de juxtaposition.
M. le président Senghor tient à rappeler que le
Sénégal a été la plus ancienne colonie
française et qu'elle s'est imprégnée, alors, des apports
de la métropole. C'est pourquoi l'enseignement, la justice, la
politique, avec le pluripartisme, n'ont pas échappé aux vertus du
métissage. Si la récente réforme scolaire a
privilégié les mathématiques et les langues classiques,
elle a, cependant, introduit l'enseignement de six langues nationales
sénégalaises, mais la civilisation sénégalaise
n'est pas figée dans le passé. Depuis l'indépendance, elle
s'est tournée résolument vers l'avenir, créant une
nouvelle littérature métisse de langue française, un
nouvel art plastique, une chorégraphie et une architecture basée
en particulier sur les parallélismes asymétriques. Le pouvoir
créateur du métissage serait-il encore à démontrer
?
En réponse à M. François Lhermitte, M. le
président Senghor cite l'exemple des Bantous, qui sont allés
jusqu'en Afrique du Sud au moment de la désertification. Au cours de
cette migration, ils se sont mêlés aux Pygmées et aux
Khoïsans. À cela s'ajoute le phénomène culturel : le
milieu de la forêt tropicale a produit d'autres mythes et d'autres
habitudes, alors que pourtant les Bantous conservaient leur langue, venue du
Nord, la migration facilite le métissage. Qu'on se rappelle la formule
de Paul Rivet « Quand deux peuples se rencontrent, ils se combattent
souvent, ils se métissent toujours ». Reste qu'à la longue,
c'est le métissage culturel qui est déterminant.
Séance du lundi 26 septembre 1983.
M. Léopold Sédar Senghor, premier
agrégé africain de l'Université, fut de 1939 à 1945
professeur de lettres à Tours puis à Paris. Après la
Libération, il est professeur à l'École nationale de la
France d'Outre-mer. Député du Sénégal en 1945,
Secrétaire d'État à la présidence du Conseil en
1955, plusieurs fois délégué de la France à
l'UNESCO et à l'O.N.U., député à l'Assemblée
législative du Sénégal, puis ministre et enfin de 1960
à 1980 premier président de la République du
Sénégal. Léopold Sédar Senghor est docteur
honoris causa des Universités de Paris, Strasbourg, Ibadan,
Louvain, Fordham, Howard, Laval, Beyrouth, Le Caire, Alger, Bordeaux, membre
associé étranger de l'Académie des Sciences morales et
politiques (1969) et membre titulaire de l'Académie française
(1983). Il est l'auteur de nombreux poèmes, d'une Anthologie de la
Nouvelle poésie nègre et malgache (P.U.F., 1948,
préface de J.-P. Sartre) et d'essais (Libertés I,
Négritude et humanisme, Seuil, 1961 ; Libertés II :
Nation et voie africaine au socialisme, Seuil, 1971).
513
Léopold Sédar
SENGHOR
Allocution de Monsieur le Président Léopold
Sédar Senghor lors de l'inauguration de l'Espace culturel qui porte
son nom
"Chers Amis,
Il y a 18 mois, lors de la pose de la première pierre
de ce magnifique ensemble, je vous disais combien ma femme et moi-même
ressentions, avec fierté, l'honneur qui m'était fait en
dénommant ce lieu : ESPACE LEOPOLD SEDAR SENGHOR.
En ce 18 mars 1995, c'est un Versonnais qui partage, avec
vous, cet événement qui fera date dans la vie de notre
cité.
En effet, dans ma retraite normande, le poète
sérère, qui chantait jadis son sine natal aux verts bolongs, vit
pleinement sa "normandité" aux verts pâturages.
Je serai bref. Je voudrais non pas faire un discours, mais
simplement délivrer deux messages à l'attention des jeunes qui
vont fréquenter cet Espace.
Le premier est celui de la Culture que votre
Municipalité a voulu matérialiser ici même. "La Culture,
c'est une certaine façon, propre à chaque peuple, de sentir et de
penser, de s'exprimer et d'agir. C'est un langage commun, qui rapproche et unit
les hommes, une prise de conscience et une expression de la complexité
du réel : elle est un style, une manière d'éclaircir les
choses et les évènements".
A travers ces définitions, vous percevrez, je n'en
doute pas, toute l'importance de la Culture, tout son poids, pour
véhiculer les idées, révéler les talents, unir les
hommes les uns aux autres.
La Culture est, en un mot, l'âme même de la
société. Et vous comprendrez peut-être mieux si je vous
explique qu'elle s'étend d'un auteur classique qui m'est familier,
Hérodote, jusqu'à un artiste que les jeunes connaîtront
mieux : M.C. Solar.
Pour ma part, j'ai essayé d'être le porte-parole
de la culture négro-africaine, que j'ai appelé la
Négritude, et de son expression dans la Poésie et dans les
Arts.
Je me veux également le chantre de la Langue et de la
Culture française. Je crois, pour l'avenir, à la Francophonie,
plus exactement à la Francité, intégrée dans un
grand ensemble, et par-delà, dans une civilisation de l'Universel.
La civilisation de l'Universel, voilà le second message
que je vous livre.
Aujourd'hui, les hommes se communiquent leurs idées,
leurs sentiments, leurs techniques, d'un bout à l'autre du monde, par
des moyens qui ignorent les distances.
Pour se développer, les civilisations doivent se
respecter, s'enrichir de leurs différences pour converger vers
l'Universel que Teilhard de Chardin annonçait à l'aube du
troisième millénaire.
Cependant, nous devons reconnaître qu'actuellement, pour
une grande partie de l'humanité, l'échelle des valeurs a perdu
toute signification. Il vous appartient, à vous les jeunes,
d'élaborer cette Civilisation de l'Universel, qui sera faite des valeurs
complémentaires de tous les continents et de tous les peuples. Gardez
à l'esprit qu'il n'y a pas de civilisation sans culture car l'effort
culturel est lui-même la principale valeur de la civilisation.
Je souhaite que cet Espace Léopold Sédar Senghor
(puisque c'est ainsi qu'il faut l'appeler à présent) soit un lieu
de rencontres, d'échanges, qui vous permette de trouver le bonheur
culturel et de vous ouvrir aux autres civilisations.
Je voudrais, en terminant, vous remercier sincèrement,
Monsieur le Maire, ainsi que tout votre Conseil Municipal du plaisir que vous
m'avez apporté aujourd'hui."
Léopold Sédar Senghor, 18 mars
1995.
514
LA FRANCOPHONIE COMME CULTURE Léopold
Sédar Senghor
Qu'est-ce que la Francophonie ? Ce n'est pas, comme d'aucuns
le croient, une «machine de guerre montée par l'Impérialisme
français». Nous n'y aurions pas souscrit, nous
Sénégalais, qui avons été parmi les
premières nations africaines à proclamer et pratiquer, nous ne
disons pas le «neutralisme positif», mais le non-alignement
coopératif. Voilà exactement 20 ans, qu'en 1946, je proclamais,
en France, notre volonté d'indépendance, au besoin «par la
force», mais, en même temps, notre volonté d'entrer dans une
communauté de langue française. Si nous avons pris l'initiative
de la Francophonie, ce n'était pas non plus pour des motifs
économiques ou financiers. Si nous étions à acheter, il y
aurait, sans doute, plus d'un plus offrant que la France. Et si nous avons
besoin de plus d'assistants techniques francophones de haute qualification,
c'est qu'avant tout, pour nous, la Francophonie est culture. C'est un mode de
pensée et d'action : une certaine manière de poser les
problèmes et d'en chercher les solutions. Encore une fois, c'est une
communauté spirituelle: une noosphère autour de la terre. Bref,
la Francophonie, c'est, par-delà la langue, la civilisation
française; plus précisément, l'esprit de cette
civilisation, c'est-à-dire la Culture française. Que j'appellerai
la francité. Je le rappelle avant d'aller plus avant, la Francophonie ne
s'oppose pas; elle se pose, pour coopérer. Nous avons été,
parmi les nations francophones d'Afrique noire, la première
république unitaire à rendre /'anglais obligatoire, dans
l'enseignement du second degré et dans les écoles techniques.
Comme langue et civilisation de complémentarité -- et pour ne pas
parler franglais. Pour en revenir à la Francophonie, le seul principe
incontestable sur lequel elle repose est l'usage de la langue française.
Vous le devinez, cependant, notre attachement à la langue ne serait pas
si tenace s'il ne signifiait pas attachement à la culture
française. Voilà les deux points que je me propose de traiter.
Attachement à la Langue française, pourquoi?
C'est, tout d'abord, pour deux raisons historiques : de fait.
La première est que, ne voulant pas nous renier, nous ne voulons rien I
renier de notre histoire, fût-elle «coloniale)), qui est devenue un
I élément de notre personnalité nationale. Si je prends
l'exemple de I mon pays, la présence française y date de plus de
300 ans. Pour I notre malheur, mais encore plus, en définitive, pour
notre bonheur I parce que pour notre efficacité dans l'action. Les
épreuves nous I ont trempés. Et puis, il y a le français,
qui est une langue inter- S nationale de communication. C'est notre
deuxième raison de fait. Il y a d'autres raisons, plus profondes, qui
tiennent aux qualités même de la langue. Qu'il s'agisse de
morphologie ou de syntaxe, le français nous offre, à la fois,
clarté et richesse, précision et nuance. Clarté du
vocabulaire, qui tient à la clarté des procédés de
dérivation et de composition, des procédés de
dérivation en particulier, à partir des mots grecs et latins. Ce
qui n'empêche pas des procédés plus populaires et, partant,
plus spontanés et vivants. Ce qui provoque, surtout, une prodigieuse
richesse de mots. Pour prendre un S exemple, on a discuté sur le point
de savoir si nous étions des I francophones ou des franco-lingues. On
s'est même disputé. Le peuple aurait pu nous mettre d'accord en
faisant, de nous, des parlant-français. On eût crié au
franglais. Mais le Dictionnaire Robert avait déjà consacré
l'usage en optant pour « francophone ». Parfois deux mots synonymes
nous restent, voire trois. Ce qui fait la richesse de la langue. D'où
vient sa précision et ses nuances. On a donc discuté, gravement,
sur la propriété du mot « francophone)); on ne risquait pas
de se blesser grièvement. Car les francophones --je ne dis pas les
« français » --, qui ont l'habitude de ces discussions
grammaticales, les poussent rarement jusqu'à la dispute, et jamais
jusqu'aux coups.
Les mots français sont clairs et précis. C'est
qu'ils ont tendance à /'abstraction, qui en fait un merveilleux outil du
raisonnement. Et il n'est pas vrai que l'abstraction ignore le réel;
elle le réduit à son squelette, à son réseau de
relations, qui est son essence. Du moins pour l'homme d'action. Il est temps de
revenir à Descartes. Car le concret et les détails dans lesquels
on nous noie, maintenant, trop souvent, s'ils nous font sentir la vie, nous
empêchent de la penser ; de seulement voir la forêt. À cause
des feuilles et des branches ...
Des formes du français, de la morphologie proprement
dite, je ne retiendrai que les formes verbales. M. Robert Le Bidois
écrit, dans le journal le Monde du 24 octobre 1962: «/.a gamme des
temps français est d'une étonnante richesse. Quand il s'agit
d'exprimer le passé, notre langue dispose, pour le seul mode indicatif,
de cinq temps principaux : imparfait, passé simple, passé
composé, passé antérieur et plus-que-parfait; à
quoi if faut ajouter trois < temps surcomposés > ». Nous
retrouvons, ici, associée à la richesse des formes, la même
tendance à l'abstraction : à la clarté plus qu'à la
précision. Il y a, en wolof -- une des langues du
Sénégal--, une vingtaine de formes correspondant à
l'indicatif imparfait du français. C'est dire que cette langue ne manque
pas de précision. Mais c'est une précision vécue. Le wolof
insiste, en le précisant, sur /'aspect ; la manière
concrète dont se fait l'action. D'où, parmi d'autres
singularités, l'existence de cinq sous-modes de l'indicatif. Tandis que
le français, lui, insiste sur fa notion abstraite de temps. //
s'intéresse moins à la manière dont se fait l'acte qu'au
moment exact où il s'accomplit, en s'insérant dans le
déroulement de /'action.
515
La syntaxe du français est, comme celle de la plupart,
mais plus que celle de la plupart des langues européennes, une syntaxe
de subordination; de logique. Grâce à ses nombreux mots-outils,
comme
disait mon maître Ferdinand Brunot, aux mots-gonds que
sont les conjonctions, le français lie les
propositions entre elles ou les subordonne l'une à
l'autre. Les propositions et, partant, les idées. C'est ainsi que la
phrase française présente un ensemble synthétique,
où nul élément n'est isolé, mais où les
conjonctions de coordination et de subordination, qui sont
signes de relation entre les idées, facilitent /'analyse. C'est ainsi
que, se faisant analyse et synthèse à la fois, elle se
présente comme l'instrument efficace du raisonnement. « On ne
raisonne justement qu'avec une syntaxe rigoureuse et un vocabulaire exact
», affirme Anatole France dans le Génie latin. «Je crois que
le premier peuple du monde est celui qui a la meilleure syntaxe. »
J'ai parlé de la phrase classique : de la
période. Depuis Descartes, la langue française s'est enrichie par
les procédés indiqués plus haut. Et elle s'est assouplie
jusqu'à faire jaillir la subordination d'une
simple juxtaposition. À la syntaxe de la subordination
et du continu, tend à se substituer une syntaxe de la coordination et de
la juxtaposition du discontinu, dont ont usé et abusé les
surréalistes. Cette évolution s'est réalisée
grâce au large clavier, à la souplesse que nous offre, à
côté des relatives circonstancielles, les phrases nominales,
surtout le jeu subtil des participes et des appositions ou celui des modes et
des temps. En voici un exemple, qui n'embrasse pas, j'en conviens, tous les
tours :
«En toi mouvante, nous mouvant, nous te disons Mer
Innommable: muable et meuble dans ses mues, immuable et même dans sa
masse; diversité dans le principe et parité de l'Être,
véracité dans le mensonge et trahison dans le message; toute
présence et toute absence, toute patience et tout refus -- absence,
présence; ordre et démence -- licence ! ...»
C'est un poète, me direz-vous. Mais voici le texte d'un
philosophe : «De notre libre choix? Qu'allons-nous donc choisir? Il y a
quatre attitudes possibles, nous dit le Père. La première, c'est
celle du
pessimisme. Tout est mauvais, l'être même est
mauvais, if faut résistera la vie, il faut résister à
l'évolution, maintenant précisément que
nous en comprenons la duperie. Comment le Père va-t-il juger les tenants
de cette opinion, ces traîtres à la vie? Laissons-les, dit-il.
Ceci est caractéristique -- et j'y
reviendrai tout à l'heure -- de l'attitude du
Père Teilhard. Ce n'est pas un discoureur, il ne va pas essayer
de démontrer, il veut faire prendre des attitudes, il
veut nous inviter à voir les choses dans une certaine perspective, et je
le redirai quand je montrerai la place que tient l'attitude
phénoménologique dans la
pensée de Teilhard de Chardin. Ces traîtres
à l'existence, ces hommes fatigués, qui sont infidèles
à la
vie et qui se détournent d'elle avec lassitude, il n'y
a qu'à les laisser, à prendre les autres et à
continuer». C'est entre ces extrêmes que se meut, actuellement, la
phrase française avec une extrême liberté. La
langue se plie à toutes les exigences de la
pensée et au sentiment, voire de la sensation, passant de la rigueur du
diamant aux troubles fulgurances de la tornade, du mouvement large et lent de
la mer à la brièveté soudaine du coup de poignard.
Je vous ai cité, tout à l'heure, le verset d'un
poète : il s'agit de Saint-John Perse. Et le paragraphe d'un philosophe
: il s'agit de Gaston Berger. Ce n'est pas hasard. Saint-John Perse est le plus
grand des
poètes français vivants, et Gaston Berger, mort
il y a quatre ans, a été Directeur de l'Enseignement
supérieur en France. Ce n'est pas hasard puisqu'ils sont tous les deux
d'outremer: le créole guadeloupéen et le métis
franco-sénégalais.
C'est dire que nous voilà au-delà de la
grammaire: dans la stylistique de la langue française. Née du
développement de la linguistique, la stylistique étudie, comme
vous le savez, d'une part, les rapports
de la pensée avec sa traduction, ceux de l'individu
avec son expression d'autre part. C'est un problème
de stylistique que pose Rivarol, à propos de la
clarté, dans son fameux Discours de l'universalité de la langue
française. Cette clarté de la langue, selon lui, servirait le
philosophe et le diplomate, mais
gênerait le poète et le musicien. Je ne le crois
pas, et je l'ai dit ailleurs. Relisez donc les poètes du XVIe
siècle : de la langue française encore dans la jeunesse de sa
maturation avant quelle n'eût atteint sa maturité. Les grands
poètes d'alors, ils sont tous musiciens: Maurice Scève et Louise
Labé, Joachim du Bellay et Pierre de Ronsard, Agrippa d'Aubigné
comme François de Malherbe. Est-il rien de plus musical que les vers que
voici:
Toute ma Muse, ma Charité Ma toute où mon
penser habite,
Toute mon coeur, toute mon rien,
Toute ma maistresse Marie, Toute ma douce
tromperie,
Toute mon mal, toute mon bien.
On dirait d'Aragon à moins que d'Éluard; ces
vers sont de Ronsard. Comment expliquer la beauté de la prose,
singulièrement de la poésie française quand nous n'avons
découvert, dans la langue, malgré sa richesse, que rigueur et
abstraction, clarté et précision. Certes sa beauté est
dans ses qualités
516
intellectuelles; je dis : encore plus dans ses qualités
sensibles, voire sensuel/es. Je me le rappelle, quand je découvris le
français, à sept ans, c'était, pour moi, musique et
charme. La beauté du français, sa poésie, ne vient pas du
pouvoir imaginant des mots, qui se sont dépouillés du concret de
leurs racines; elle vient de la musique des mots et des phrases, des vers et
des versets : de leur rythme et de leur mélodie.
Je le sais, la netteté des consonnes françaises,
si elle donne, aux mots, une mélodie plastique, provoquerait vite une
impression de pauvreté. Mais il y a le rythme des mots. Et le jeu
harmonieux des voyelles, nombreuses et nuancées: voyelles longues ou
brèves, orales ou nasales, ouvertes ou fermées ou moyennes, sans
parler des semi-voyelles, des diphtongues ni des triphtongues. Mais je parlerai
du jeu des e muets, qui achève de donner, au mot, à la phrase, au
vers, avec ses nuances, fa palpitation même de la vie.
Puissance d'expression de la musique parce que puissance de
suggestion. Originalité merveilleuse de l'ouïe. C'est le plus
abstrait des sens après la vue. Mais elle plonge encore dans le
sensible, bien qu'émergée du sensuel. Ce qui fait que la musique
n'exprime pas une pensée, comme certains l'ont affirmé à
tort, mais traduit des sentiments en évoquant des images. On a
parlé du «stupéfiant image » aux beaux temps du
Surréalisme. C'est le charme musique qui fait la beauté de la
langue, en tout cas de la poésie française. L'apport des
poètes ultramarins, dans ce domaine, a été remarquable:
d'Évariste-Désiré de Parny à Saint-John Perse. Plus
près des forces cosmiques, c'est par la puissance musicale de leurs vers
qu'ils font lever les images. Comme des colombes, comme des sauterelles, comme
d'ardentes laves. C'est la voix d'Aimé Césaire :
à même le fleuve de sang de terre à
même le sang de soleil brisé à même le sang d'un cent
de clous de soleil à même le sang du suicide des bêtes
à feu à même le sang de cendre le sang de sol le sang des
sangs d'amour, à même le sang d'incendie d'oiseau feu ...
Ce long arrêt à la Poésie. Pour dire que
la langue française est culture, c'est-à-dire esprit de
civilisation, fondement d'un humanisme qui ne fut jamais plus actuel
qu'aujourd'hui. Ce sera la seconde partie de mon propos.
Or donc, comme je le disais en commençant, la
Francophonie -- plus précisément, la francité --, c'est
une façon rationnelle de poser les problèmes et d'en rechercher
les solutions, mais toujours, par référence à l'Homme.
Comme j'aime à le dire à mes compatriotes, tout ce que j'ai
appris en France, au Quartier latin, c'est la méthode.
« Toujours votre rationalisme français, si
abstrait », m'a lancé un ami africain. «Nous, nous nous en
tenons au pragmatisme, qui est une méthode d'action ». Charmant ami
I... Comme si ce n'était pas le fondateur du rationalisme moderne qui
avait écrit le Discours de la Méthode.
Abstrait, le rationalisme cartésien ? Sans doute et
nous le soulignerons bientôt. Mais s'il n'est pas essentiellement, il
est, d'abord, enracinement dans le réel, du moins dans la vie. On
oublie, trop souvent, qu'avant de faire métier de la philosophie, Des
cartes s'était engagé dans l'armée et à
l'étranger. Au demeurant, le Discours commence par une
autobiographie.
Pas pratique, le rationalisme cartésien ? Mais
Descartes fait, de la physique, le fondement de sa métaphysique, qui,
retournant à ses origines, est bien l'au-delà de la physique, non
sa négation. Et puis les mathématiques ne sont-elfes pas, dans le
monde technocrate et pratique d'aujourd'hui, la base de la science et, partant,
de la puissance matérielle ? Or Descartes se signala, pour la
première fois, en découvrant les lois de la mathématique
universelle.
Ce souci de la pratique s'exprime dans l'objectif que
Descartes assigne à ses recherches philosophiques : « procurer, de
la sorte, le bien de ses semblables». Et voilà que
transparaît, en même temps, le souci éthique: le souci de
l'Homme.
Mais tout cela, j'en conviens, ne fait pas l'essence du
Cartésianisme. Celle-ci est, comme le dit Gaston Berger, dans la
recherche d'une «science absolue», fondée sur une
«certitude inébranlable ». Elle est dans la rigueur d'une
méthode de recherche, qui commence par douter de tout, qui n'accepte que
l'évidence et qui, d'évidence en évidence, aboutit
à la seule évidence incontestable: celle du cogito, qui voit,
«dans la subjectivité transcendantale, l'origine de
l'objectivité elle-même'* ». Il est donc vrai que Descartes
ne fonde la réalité ou, plus exactement, la vérité
que dans la raison discursive. Dans la logique, c'est-à-dire la
cohérence qui relie les évidences l'une à l'autre, comme
une chaîne de relations, mieux: les unes aux autres, comme un
réseau, une toile d'araignée, dont le centre est le cogito.
Démodé, le rationalisme cartésien ? Je le
crois plus actuel que jamais. C'est Gaston Berger, le philosophe de l'action,
l'inventeur de la Prospective, qui préconisait le retour à
Descartes. C'est Edmund Husserl, le créateur de la
Phénoménologie, qui disait, à celui-là, tout ce
qu'il devait à Descartes, comme en témoignent les
Méditations cartésiennes du philosophe allemand. Le Rationalisme
nous paraîtra encore plus actuel si nous l'étudions en relation
avec /'empirisme des uns et /'intuitionnisme des autres.
517
Empirisme ou pragmatisme, les tenants de cette philosophie se
sont toujours basés sur /'expérience. Mais, c'est
l'évidence, pour que l'action y soit possible, il faut que le monde de
l'expérience soit rationnel : il faut que la raison discursive y
découvre les structures des objets d'expérience,
c'est-à-dire leurs relations réelles. Il n'y a pas d'action sans
méthode: sans logique. Dans un article intéressant,
intitulé Idéologie et Expérience, Arthur Schlesinger
écrit: «Les abstractions ne sont pas nécessairement à
écarter. En fait, nous ne pourrions pas raisonner sans elles. » Et
comment agir d'une façon efficace sans raisonner ?
Quant aux relations du rationalisme et de /'intuitionnisme, ce
sera l'occasion, pour moi, d'essayer de montrer comment le rationalisme
cartésien s'est enrichi de la pensée de Pascal, qui est, en
réalité, une double symbiose de la théorie et de
l'expérience, de la raison discursive et de la raison intuitive. Et
cette symbiose est éminemment française, qui s'exprime,
aujourd'hui, dans l'oeuvre de Pierre Teilhard de Chardin.
Pascal est, incontestablement, un rationaliste. Qu'il s'agisse
des Provinciales ou des Pensées, ce qui frappe d'abord, c'est la force
parce que la rigueur du raisonnement. S'agissant des Provinciales, leur
originalité est, précisément, que, pour la première
fois en Europe, dans une oeuvre destinée à un large public, on ne
fasse appel qu'à la raison la plus commune: le bon sens. Quant à
l'Apologie de la Religion chrétienne, elle est d'une logique
serrée qui tend à démontrer que non seulement la religion
n'est pas contraire, mais qu'elle est conforme à la raison : qu'elle est
vraie.
Pourtant, l'originalité de Pascal n'est pas là.
Elle est dans ceci, qu'il ne se contente pas de la théorie et de
l'argument; il étaye son raisonnement par des faits. // ne se contente
pas de l'expérience ; expérimente. Comme Descartes il commence
par une oeuvre scientifique: non par la mathématique, qui fait
comprendre l'univers, mais par la physique, qui le démontre par les
faits. Dans les Pensées, les faits d'expérience, ce sont les
faits historiques: les faits sociaux, comme nous disons aujourd'hui. Cependant
Pascal est, également, /'homme de foi qui a, le plus vigoureusement au
siècle de Descartes, assigné des limites à la raison
discursive et fait appel à la foi, c'est-à-dire au coeur,
à /'intuition ; « c'est le coeur qui sent Dieu, non la raison
». Je souligne le mot. Sentir, c'est le mot clef de
l'épistémologie des peuples noirs : des peuples de raison
intuitive. Sautons trois siècles d'histoire de France, trois
siècles pendant lesquels les Français restent, malgré bien
des brassages, métissages et influences, des rationalistes
impénitents, qui défendront romantisme, symbolisme,
surréalisme, en définitive /'intuition, à coups de
raisonnement. Comme en témoignent les Manifestes d'André Breton,
tout de passion, mais de passion lucide. Partant donc de Pascal, sautons trois
siècles pour nous arrêter à Pierre Teilhard de Chardin. La
comparaison n'est pas hasardeuse, elle est nécessaire. Ce sont
même race celtique, même esprit scientifique, même foi
ardente, même style. Mais de Pascal à Teilhard, le rationalisme
français s'est élargi et approfondi grâce au progrès
de la science, au développement subséquent de la technique et de
l'industrie, à la multiplication des relations interraciales et
inter-continentales. La synthèse s'est faite symbiose entre
théorie et pratique, argumentation et expérimentation, raison
discursive et raison intuitive ; bref, la logique analytique est devenue
logique dialectique.
L'oeuvre de Pierre Teilhard de Chardin, qui marquera, de son
sceau, le XXe siècle, est le signe le plus manifeste de cette
révolution si nous partons de Descartes. Je préfère parler
d'évolution en partant de Pascal. La juxtaposition de l'argument et de
l'expérience, de la raison et du coeur chez Pascal est devenu, chez
Teilhard, pour résumer, conjonction de la raison discursive et de la
raison intuitive par-delà la dialectique marxiste. Mais distinguons le
dialogue de la raison discursive avec elle-même de cet autre dialogue
où elle s'est engagée avec la raison intuitive depuis la fin du
XIXe siècle.
Au niveau de la seule rationalité, l'oeuvre de Teilhard
repose sur les deux seuls critères irrécusables de la
vérité: la cohérence théorique et la
fécondité pratique. C'est une dialectique véritable parce
que non trahie par le dogmatisme qui n'est qu'un retour à la
linéarité de la logique classique. Toujours à ce niveau,
cette logique dialectique s'appuie sur une science totale, en quoi elle
achève d'être dialectique. Teilhard s'appuie non seulement sur les
mathématiques comme Descartes, sur la physique comme Pascal, mais aussi
sur les sciences naturelles et sociales comme Marx et Engels. Il fait encore
mieux, qui intègre, dans sa recherche, la chimie et la biologie, voire
la paléontologie et la préhistoire, qui sont,
précisément, ses spécialités. Car Teilhard, comme
Descartes et Pascal, est un savant avant que d'être un philosophe. Il le
précise dans son ouvrage le plus important, le Phénomène
humain, qu'il présente comme «un mémoire scientifique».
«Rien que le Phénomène. Mais aussi tout le
Phénomène », précise-t-il.
C'est ici que le rationalisme français se fait,
à la fois, intégral et universel. Teilhard part, en effet, de
«tout le phénomène»: d'une manière
matérielle, et non métaphysique, d'une «manière
totale», dont toutes les propriétés sensibles -- physiques
et chimiques, mécaniques et biologiques -- sont examinées et
mesurées avec les derniers instruments d'analyse scientifique. Eh bien,
c'est au cours de cette analyse que le savant perçoit les traces de
/'esprit. C'est alors que, dans une intuition géniale,
518
Teilhard, faisant un retournement dialectique audacieux,
introduit l'esprit comme hypothèse, non plus au bout, mais au
début, au centre même de la matière, animant la
matière d'une vie en expansion -- éternellement. L'intuition
avait permis la synthèse scientifique, qui est d'une
fécondité incommensurable puisqu'elle nous donne, au
XXe siècle, la seule vision du monde qui nous permette de
tout comprendre. Mais surtout de tout oser pour agir.
Découvrir l'esprit, c'est découvrir /'Homme
sinon Dieu. Le titre du Phénomène humain est significatif. En
Francophonie, il s'agit toujours de l'Homme : à sauver et à
perfectionner, intellectuellement avec Descartes, moralement avec Pascal,
intégralement avec Teilhard.
On m'objectera, à propos de ce dernier: il s'agit
toujours d'un théoricien. Je réponds: il s'agit d'un savant.
Doublé d'un philosophe, qui a révolutionné jusqu'à
l'économie. On ne se moque plus de l'économie française;
on parle du miracle du Plan français. Pourtant la planification
française répugne à /'économétrie pour
intégrer I'humanisme. Économie et Humanisme, c'est le mouvement
économique français du regretté Père Lebret, qui a
pour ambition de réaliser, non seulement par la «croissance
économique», mais par le développement intégral, le
plus-être que Pierre Teilhard de Chardin assigne à l'Homme comme
fin.
Je vais conclure. Encore une fois, si comme complément
et accomplissement de Descartes, j'ai choisi Pascal et Teilhard de Chardin, I
ce n'est pas hasard. J'ai choisi deux Auvergnats, qui ont gardé, Il
sinon le sang, du moins le tempérament des Celtes. J'ai défini,
il j y a quelques années, la culture française comme la greffe du
génie I latin sur le génie celtique; de la clarté
méditerranéenne sur la I passion alpine. J'ai été
frappé, l'autre année, en visitant /'Exposition d'Art gaulois,
des affinités de cet art et de l'Art nègre. Comment expliquer S
cette ressemblance si ce n'est par le substrat passionnel de la raison
intuitive ? J'ai fait ce jour-là deux découvertes. La
première S est que, si les Gaulois ne sont pas nos « ancêtres
», à nous, les S Nègres, ils sont nos cousins. La
deuxième est que, comme eux, I nous pouvons, au «rendez-vous du
donner et du recevoir» que I constitue la Francophonie, rendre, au
génie méditerranéen, une partie au moins de ce qu'il nous
a donné.
La Francophonie ne sera pas, ne sera plus enfermée dans
les limites de l'Hexagone. Car nous ne sommes plus des « colonies » ;
des filles mineures qui réclament une part de l'Héritage. Nous
sommes devenus des États indépendants, des personnes majeures,
qui exigent leur part de responsabilités : pour fortifier la
Communauté en l'agrandissant.
Je n'entrerai pas dans les détails de l'organisation de
la Francophonie. Les États membres en décideront dans une libre
confrontation. L'essentiel est que la France accepte de décoloniser
culturellement et qu'ensemble nous travaillions à la Défense et
expansion de la langue française comme nous avons travaillé
à son illustration. Et elle l'accepte si elle n'en a pas pris
l'initiative. Je sais combien cet éloge est au-dessous de son objet. Mon
excuse est que notre attachement à la langue et à la culture
française est au-dessus de tout éloge.
LÉOPOLD SÉDAR SENGHOR Pour un
humanisme de la francophonie
Les difficultés avec lesquelles sont confrontés
les gouvernements et leurs peuples -- je l'ai souvent dit, ces dernières
années, en sentant
venir la crise actuelle -- sont moins d'ordre
économique que politique, et moins d'ordre politique que culturel. Il
s'agit d'une crise de civilisation. Et ce n'est pas hasard si, le 15 novembre
dernier, l'éditorialiste du Monde, parlant du succès de
M. Yasser Arafat à l'ONU, commençait ainsi : «
L'événement montre à quel point les différends
tenant à la race, aux nationalités et aux religions transcendent,
en quelque sorte, les querelles politiques. » J'aurais
entièrement souscrit à ces lignes si l'on avait terminé
l'énumération par la culture, en y mettant l'accent.
Qu'est-ce donc que la francophonie ?
Nombre d'esprits distingués ont trouvé le mot
laid. S'il s'est maintenu, c'est qu'il s'était imposé par sa
nécessité.
Il a été, d'abord, très
régulièrement formé, avec le suffixe -ie, pour
désigner une collection : l'ensemble des pays où l'on parle
français, c'est-à-dire une des grandes
réalités du monde contemporain, à côté des
mondes anglophone, russophone, sinophone, lusophone, hispanophone.
Examinons de plus près cette réalité, en
partant de l'extérieur. À l'ONU, par exemple, cette année,
c'est quelque trente délégations, sur cent trente-huit, qui
s'expriment en français. Et l'accession à l'indépendance
des anciennes colonies portugaises, comme des Comores et des îles
Seychelles, va en
519
augmenter le nombre. L'ambassadeur d'une démocratie
populaire m'en faisait la remarque, le phénomène n'a pas
été sans aider au maintien, voire à la diffusion du
français dans le monde.
Mais que représentent, réellement, ces chiffres
si l'on descend des gouvernements et des élites aux peuples qui sont
concernés ? Je parle des pays qui composent la francophonie. En Europe
ils sont quatre, vingt-six en Afrique, cinq en Amérique, sept en Asie.
Si l'on y comprend les peuples de la péninsule indochinoise, le
français est, aujourd'hui, la langue d'avenir de quelque 231 millions de
francophones en puissance, répandus sur les cinq continents.
Mais que signifient « francophones en puissance » et
« langue d'avenir » ? Cela signifie qu'actuellement seuls quelque 75
millions d'hommes ont le français, ou un patois français, comme
langue maternelle. Cela signifie surtout que, pour la majorité des
autres, le français est une langue officielle, une langue d'usage ou une
langue de communication internationale, je veux dire une langue de travail.
L'enjeu est de faire de cette dernière langue, de scientifique qu'elle
est, une langue d'expression : une
langue du coeur, mais aussi une langue littéraire, qui
exprime l'âme intégralement. Du moins, pour les 231 millions de
francophones en puissance.
La francophonie ainsi présentée dans ses
dimensions géographiques et humaines, nous devons évoquer le lien
qui unit ces quarante-deux pays : la langue française. Mais il est moins
question de cette langue que de la civilisation dont elle est le
véhicule, plus exactement de son
esprit : de la culture française. Cependant,
s'il n'était question que de cela, comment pourrions-nous l'accepter
sans renoncer à notre identité, nous Négro-Africains, nous
Arabo-Berbères, Indochinois, Papous et Polynésiens, voire nous
Belges, Suisses, Canadiens ? Si nous acceptons comme objectif majeur de la
francophonie la défense et réalisation de la francité,
c'est qu'elle est liée, dans notre esprit, comme dans la
réalité historique, à la défense et
réalisation de nos cultures respectives.
Il nous faut nous arrêter à ces cultures
diverses, mais complémentaires, avant d'examiner par quels moyens nous
devrons les défendre et les réaliser. Et d'abord la
francité. Je m'étonne que le mot soit, aujourd'hui,
moins employé que celui de francophonie. En effet, comme l'a dit Maurice
Piron dans une communication de 1970 intitulée Francophonie et
francité, le dernier mot daterait de 1943 tandis que le premier
serait de 1962. C'est encore très régulièrement que le mot
francité a été forgé avec le suffixe -
ité, qui provient du latin -itas. Comme le note une
étude de l'université de Strasbourg que m'a envoyée, en
son temps, le professeur Robert Schilling, le suffixe, qui est très
productif, « sert à former des substantifs exprimant une
qualité désignée par l'adjectif de base ». Je
préciserai : « une qualité » ou « des
qualités ». La francité, c'est donc
l'ensemble des qualités exprimées par la langue et, d'une
façon plus générale, par la culture française.
On aurait pu tout aussi bien dire « francitude », comme nous
disons négritude ; mais, précisait Robert Schilling, le
suffixe -itude introduit une nuance moins abstraite. Et cela justifie
le choix d'Aimé Césaire, qui, en forgeant le mot,
préféra « négritude» à «
négrité ».
Dans une conférence intitulée Anglophonie et
Francophonie, que j'ai prononcée, le 26 octobre 1973 à
l'université d'Oxford, j'ai essayé de définir, face
à l'anglais, les vertus de la langue et de la culture françaises.
Je me contenterai de résumer mes propos d'alors. Si tous --
Français, francophones, étrangers -- sont d'accord pour
reconnaître dans la clarté la principale vertu de la
langue française, ils divergent sur les causes de cette clarté.
D'aucuns, à commencer par Rivarol, invoquent le style direct »,
d'autres la « précision » du vocabulaire, d'autres encore la
« ponctuation ». Souvent les mêmes personnes avancent les
mêmes arguments. Et ils n'ont pas tort. À Oxford, j'ai
développé cette idée que la clarté du
français, langue intelligente s'il en fut, lui venait, essentiellement,
de son abstraction. Rappelons, avant d'aller plus avant, la
définition que le Robert donne du mot : « Fait de
considérer à part un élément (qualité ou
relation) d'une représentation ou d'une notion, en portant
spécialement l'attention sur lui et en négligeant les autres.
» On ne saurait mieux dire, sauf qu'on peut abstraire non pas une
seule qualité, mais quelques qualités, en nombre toujours
limité. La première preuve de l'abstraction du français
est non pas précisément la pauvreté, mais la richesse
tempérée de son vocabulaire, qui est d'environ 93 000 mots en
face des 347 720 mots de l'anglais. C'est ainsi que le français est
l'une des plus pauvres des langues romanes : parce qu'issu du latin, qui
était pauvre, il a reçu moins d'apports exotiques que ses
voisines ibériques.
Il est, cependant, l'une des langues les plus précises
qui soient. C'est d'abord que l'abstrait, étant plus pauvre en
qualités, est plus intelligible que le concret. C'est aussi que le
français, grâce à l'abondance de ces gonds de la
pensée que sont les conjonctions de subordination, insiste sur les
relations des êtres et des choses plus que sur leurs qualités
sensibles. C'est encore que le français est pourvu d'une grande
variété de préfixes et de suffixes, qui lui permet de
former des familles de mots parfois très étendues, mais surtout
que ces affixes, parce que venus, pour la plupart, du latin ou du grec, sont,
par là, plus intelligibles, même aux non-francophones pourvu
qu'ils aient une culture générale. C'est, enfin, que le
français, peu sensible aux aspects de l'action verbale qui
soulignent ses
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modalités concrètes, a
préféré multiplier les temps, qui marquent les
relations temporelles, donc de causalité et, partant,
d'intelligibilité.
Je pourrais continuer l'énumération. Je m'en
tiendrai là pour en tirer une première conclusion. Langue
d'intelligence grâce à sa clarté et à
l'équilibre de sa phrase qui met toute chose à sa place, le
français est une langue tonique. C'est ce que je disais,
à Oxford, en ces termes : « Et pourtant, au risque de
paraître paradoxal, j'avancerai que ce qui me frappe, dans le
français, c'est moins la clarté que l'équilibre de la
langue. Je ne l'ai jamais autant senti que pendant ma captivité. Fait
prisonnier de guerre le 20 juin 1940, je vous laisse à deviner quel
devait être mon moral pendant ce sinistre été. Eh bien, mon
plus grand réconfort, je l'ai trouvé dans la lecture des
prosateurs français -- pas des poètes. Je parle de Bossuet et
Pascal, Stendhal et Flaubert, Gide et Colette. Cela me remettait dans mon
assiette.
»
Le français est aussi, quoi qu'on en ait dit, une
langue poétique. Bien sûr, il n'a pas les ressources
phonologiques de l'allemand ni surtout de l'anglais, mais l'absence des
laryngales, la richesse moyenne du vocalisme, la présence dans celui-ci
de Vu, de Ye muet et des nasales, en font une langue
harmonieuse. C'est cela surtout qui me frappait, à sept ans, quand j'ai
commencé de l'apprendre, et le mangeais, délicieusement, comme
une confiture.
En combinant toutes ces ressources dans une symbiose du
concret et de l'abstrait, du populaire et du précieux, en mêlant
l'inversion et la rupture de construction, la simple nomination et l'image,
l'assonance et l'allitération, les grands poètes français
du xx° siècle -- un Claudel, un Péguy, un Saint-John Perse
-- ont porté la poésie française au niveau des plus
grandes poésies du monde et des temps, sans lui faire perdre son
équilibre.
C'est cet équilibre qui résume les vertus de la
francité : entre la chair et l'intelligence, le coeur et l'esprit.
Descartes le disait déjà, notre raison, qui est la
marque propre de l'homme, se compose du « penser », du « vouloir
» et du « sentir ». Au moment que les passions, mais surtout les
appétits collectifs, se déchaînent, que les sciences et les
techniques se mettent à leur service au lieu de les freiner, risquant,
par là même, de nous conduire à la catastrophe finale,
jamais ces vertus que voilà de la francité n'ont
été si nécessaires au monde.
Mais aussi les vertus des autres civilisations
différentes : pour réaliser, au niveau de l'universel, un
équilibre supérieur. D'autres pourraient parler avec pertinence
des apports arabes, indiens, indochinois à la civilisation de
l'universel. Je pourrais moi-même décrire longuement les
apports de la civilisation négro-africaine, puisque je suis
négro-africain et que l'Afrique noire francophone comprend quelque 80
millions d'âmes. Je me résumerai, ici encore, en renvoyant aux
travaux des africanistes, des « négrologues » comme disent nos
jeunes gens, que furent, en France, Maurice Delafosse, Marcel Griaule et Lilias
Homburger, que sont, aujourd'hui, des professeurs comme Georges Balandier,
Louis-Vincent Thomas, Dominique Zahan et une cohorte de chercheurs, pour ne pas
les citer tous. Que, depuis cent ans, les Négro-Africains aient beaucoup
apporté à la civilisation humaine, c'est l'évidence, comme
l'ont montré, outre les négrologues, les écrivains, mais
surtout les artistes et critiques de l'Ecole de Paris. Parmi les
apports culturels, ceux de l'art nègre sont les plus connus. La
« révolution nègre », pour parler comme Emmanuel Berl,
n'a pas exercé son influence seulement sur les arts plastiques, mais
encore sur la musique, le chant et la danse, voire sur les moeurs. Hermann von
Keyserling le faisait remarquer, les Américains chantent et dansent,
marchent et rient maintenant comme les Nègres. Et le monde est en train
de s'américaniser. Pour son mal et son bien en même temps.
En attendant, les apports nègres à l'art
universel se sont révélés fécondants, en
développant chez l'artiste et l'écrivain le sens de l'image
analogique et d'un rythme dynamique parce que vital, fondé qu'il est sur
des parallélismes asymétriques. Cependant, si la contribution
négro-africaine est telle -- souvent, au demeurant, par le détour
des Amériques -- c'est que, derrière ces apports artistiques et
littéraires, il y a avec une philosophie tout un art de vivre.
C'est cette philosophie et cet art de vivre que nos jeunes chercheurs sont en
train de définir en coopération avec les négrologues
français. On peut dès maintenant en tracer les valeurs, qui se
résument dans l'unité des contraires. C'est l'opposition
et en même temps la complémentarité par symbiose du monde
visible et du monde invisible, de l'un et du multiple, de la matière et
de l'esprit, de la vie et de la mort, comme du mâle et de la femelle.
D'un mot, la pensée négro-africaine est dialectique comme la
réalité avec laquelle elle se confronte.
Ce qui explique son art de vivre dans une
société où l'individu s'intègre dans la
communauté, l'art dans la religion, la religion dans
l'appréhension d'un Dieu saisi aux dimensions de l'univers,
c'est-à-dire dans l'intégration de l'homme à Dieu. Et
réciproquement, car, pour prendre ce dernier exemple, Dieu dépend
aussi de nous, qui le faisons plus Dieu en l'humanisant. D'où une
société où la vérité est dans le dialogue,
la prospérité dans le travail communautaire, la beauté
dans les formes accordées.
J'évoque une négritude, comme je l'ai
fait de la francité, ramenée à ses valeurs
essentielles. Bien sûr, je n'ai pas la naïveté de croire que
ces deux cultures sont parfaites : l'une et l'autre ont leurs défauts et
leurs lacunes. Il en serait ainsi si, restant dans la francophonie, l'on avait
parlé de l'arabité ou de
521
Yindo-sinité. À la réflexion,
toute culture contient l'ensemble des valeurs humaines, mais chacune n'a mis
l'accent que sur telles valeurs, en négligeant les autres. D'où,
à la longue, une distorsion du visage humain sur chaque faciès de
la civilisation humaine. D'où encore la nécessité, pour
chaque culture, de se ré-humaniser en empruntant tel trait,
presque effacé chez elle, du visage humain. D'où, enfin, la
nécessité d'élaborer, s'étendant sur les cinq
continents, une symbiose culturelle comme celle de la francophonie,
qui est d'autant plus humaine, parce que d'autant plus riche, qu'elle unit les
valeurs les plus opposées.
La francophonie s'incarne donc dans l'ensemble des pays qui
ont la langue française comme instrument de communication et
d'échanges non seulement économiques, mais surtout
socio-culturels. Et c'est un fait que, dans ces échanges, les cultures
du tiers monde ne viennent pas les mains vides. Il reste que cette francophonie
ne serait pas réelle si elle n'était pas subjectivement
sentie comme telle. Or elle l'est, et plus longtemps et plus vigoureusement
qu'on ne le croit. Déjà, le 15 avril 1789, dans les
Très humbles Doléances et Remontrances des habitons
(sic) du Sénégal aux citoyens français tenant les
états généraux, des Négro-Africains se
proclamaient, sans complexe, « Nègres » et «
Français ». Nous disons aujourd'hui francophones. L'idée est
la même : au-delà d'un possible métissage biologique -- qui
était réel à Gorée et Saint-Louis du
Sénégal, mais là n'est pas l'important --, il est question
essentiellement d'un métissage culturel. C'est ce sentiment
communautaire qui prévaut dans toutes les rencontres francophones --
congrès, conférences, colloques, séminaires, biennales --,
et qui a tout simplement explosé cette année à la «
Superfrancofête » des jeunes à Québec.
Il y a aujourd'hui toute une littérature sur la
francophonie, dont je ne citerai ici que trois ouvrages parmi ceux qui m'ont
paru les plus importants-: la Francophonie par M. Auguste Viatte,
la Francophonie en marche par M. H. de Montera et la Francophonie
en péril par M. Gérard Tougas. Il y a surtout de nombreuses
associations, dont l'objet est de réunir, sur les cinq continents, les
francophones d'une même profession -- parlementaires, médecins,
juristes, etc. --, mais le but réel de défendre, avec la langue,
la culture française. Les plus actives et les plus significatives de ces
associations sont la Fédération du français universel, qui
groupe une quinzaine d'organismes, et le Conseil international de la langue
française. Je voudrais m'arrêter à celui-ci, non parce que
j'en suis membre, mais qu'il me permettra de poser, par-delà la
défense de la langue française, le problème de l'humanisme
contemporain. Le Conseil international de la langue française,
fondé en 1967 à l'initiative du président Georges
Pompidou, alors premier ministre, « a pour but la sauvegarde et
l'unité de la langue française dans le monde. Il rassemble,
à cet effet! des linguistes, des grammairiens, des chroniqueurs de
langage et, d'une manière générale, les défenseurs
du français, à l'oeuvre dans les divers Etats où le
français est langue nationale, officielle, de culture, de travail ou
d'usage ». Ainsi parle l'article premier des statuts du C.I.L.F. C'est
dire ses ambitions, mais aussi ses limites, car il ne s'agit, ici, que de la
seule langue française. Ces limites, le Conseil les a senties, qui
envisage d'organiser, en 1976, un colloque sur les « Relations entre la
langue française et les langues africaines ». Anticipons donc sur
ce futur colloque pour poser le problème globalement.
On a mis l'accent sur le renouvellement et
l'enrichissement de la langue. A juste titre. C'est une
singularité de ce temps, si fertile en paradoxes, que la langue la plus
claire et la plus précise, la plus scientifique, ait pu sembler
incapable de traduire la science moderne. Faute d'un vocabulaire
approprié. Un chef d'État africain me disait, l'autre
année, la consternation de chercheurs de son pays découvrant,
dans un laboratoire du C.N.R.S., que la liste des mots scientifiques
appropriés était dressée en anglais. Je donne
l'information pour ce qu'elle vaut, avec cette précision qu'en Afrique
les mots ont un pouvoir.
C'est encore dans le domaine du vocabulaire que la
Fédération, le Conseil, et l'Académie, avec qui il nous
faut compter, ont fait le travail le plus efficace. Je voudrais seulement
insister sur cette idée, chère au regretté Robert Le
Bidois, que les pires ennemis du français ne sont pas forcément
les mots venus de l'anglais, mais ceux-là, quelle que soit leur origine,
dont la forme ne permet pas de créer, au moyen d'affixes, une famille de
mots aux sonorités françaises parce que familières. Cette
dernière exigence ne doit pas s'appliquer seulement aux mots
scientifiques et techniques, notamment à ceux traduits de l'anglais.
Nous, les francophones d'au-delà l'Hexagone, nous devons être tout
aussi sévères pour les néologismes que nous sommes
amenés à inventer. À l'intérieur des limites ainsi
tracées, notre liberté doit être réelle, car nos
besoins sont réels, de forger, quand la nécessité s'en
fait sentir, des mots nouveaux, voire des expressions nouvelles, pour exprimer
des faits et des réalités nouvelles. C'est ainsi qu'au
Sénégal nous avons, pour les besoins de notre administration,
créé des mots comme primature, primatorial, gouvernance,
et qu'à côté des harpistes, guitaristes et pianistes
de France, nous avons nos koristes, khalamistes et balafongistes.
Cependant toute la grammaire ne se réduit pas à la
lexicologie, loin de là, surtout dans l'enseignement des premier et
second degrés, qui doivent en priorité retenir notre attention si
nous voulons édifier, sur des bases solides, un humanisme de la
francophonie. Dans le laxisme général qui sévit
actuellement, les enseignants ont tendance à sacrifier l'étude
raisonnée de la grammaire à la méthode audio-visuelle, qui
favorise intuition et spontanéité. Le mal s'est répandu
en
522
larges flots au delà de l'Hexagone, où les
commissions de réforme nous ont proposé 1'« essai
littéraire » de préférence à l'analyse de
texte et à la dissertation d'autrefois. Et il a inondé jusqu'aux
ministères et aux palais présidentiels. Il m'arrive souvent de
relire une page d'un rapport pour en comprendre le sens.
Le grave n'est pas, en effet, dans les fautes de syntaxe,
surtout si elles n'obscurcissent pas le sens de la phrase ; il est dans cette
fausse élégance où l'on abuse des clichés à
la mode, souvent formés de manière irrationnelle. Les Anglais
eux-mêmes la dénoncent sous le nom de genteelism. Comme
le français n'est pas notre langue maternelle et que, partant, nous n'en
avons pas l'intuition, l'on en arrive parfois, en Afrique et en Asie, à
dire le contraire de ce qu'on voudrait.
Que l'Europe, après deux mille ans de corset
rationaliste, s'ouvre à la spontanéité, sinon au
spontanéisme, rien de plus naturel, voire de plus nécessaire.
Mais nous, qui vivons sur la terre de l'intuition, de l'émotion, si nous
voulons éduquer nos enfants au sens étymologique du mot,
il nous faut chercher une autre voie. Il nous faut, après les moiteurs
et torpeurs de l'hivernage, les ouvrir à la fraîcheur des
alizés : à la règle et au compas, à l'esprit
d'organisation et de méthode. Je suis d'autant plus libre de
l'écrire qu'avec les philosophes grecs, qui ont fondé le
rationalisme européen, je crois la raison intuitive supérieure
à la raison discursive. Or donc au Sénégal -- ce n'est
qu'un exemple parmi d'autres --, nous avons réagi : des instructions ont
été données et une commission ministérielle
travaille, en ce moment même, à amender, avec les manuels, les
programmes du français pour l'enseignement du second degré. La
très grande majorité de nos enfants étant destinés
à exercer non pas des carrières littéraires ou
artistiques, mats des activités de recherche ou de production, on
commencera par favoriser l'étude de la grammaire. Dans cette
perspective, on mettra l'accent dans le premier cycle sur la lexicologie, la
morphologie et la syntaxe, tandis que dans le second on le fera sur la syntaxe
de nouveau et sur la stylistique. Encore une fois, dans ce monde livré
aux appétits collectifs, et qui vacille sur la faiblesse de ses jambes,
ce dont ont besoin les générations futures, c'est de savoir
penser réellement, en intégrant la logique dans la
dialectique de la vie ; c'est aussi de savoir s'exprimer clairement,
en mettant tout fait et toute idée à sa place : en
équilibre. Alors elles pourront vouloir refaire le monde. Pour l'homme.
Mais elles ne le pourront pas dans les limites étroites de l'Europe.
Pour élaborer un « humanisme intégral
», tel que le voulait Jacques Maritain, il faut comprendre toute notre
planète, avec ses cinq continents, ses ethnies et ses civilisations
différentes. C'est une chance qu'après les soldats, les colons,
les missionnaires, l'Université française ait, à son tour,
exploré les continents et les civilisations pour en extraire les «
substantifiques moelles ». C'est avec toutes celles-ci, rassemblées
et harmonieusement mêlées, que nous pourrons élaborer un
humanisme intégral. À quoi doit tendre le grand dessein de la
francophonie. Notre chance, c'est que l'Université, du moins la
pensée française, ait commencé l'entreprise depuis le XVII
e siècle : depuis Montesquieu et l'abbé
Grégoire. Et l'on compte, au XX e siècle, nombre de
Français parmi les plus grands spécialistes des civilisations non
européennes. J'ai cité quelques négrologues. Pour
continuer d'employer le même vocabulaire, je citerai maintenant, parmi
les arabologues, Massignon, Blachère, Pérès, Laoust,
Berque et Monteil ; parmi les sinologues et indianologues, Maspero et Granet,
Grousset, Renou et Lévi. Naturellement, j'en passe, et
d'éminents. Ce sont ces humanistes, puisqu'il faut les appeler par leur
nom, qui nous ont aidés à mieux connaître nos langues et
civilisations différentes. Je ne dirai jamais assez, par exemple, ce que
je dois à Lilias Homburger, qui enseignait à l'Ecole pratique des
hautes études. C'est grâce à elle que nous nous sommes,
aujourd'hui, engagés dans l'étude comparée des langues
négro-africaines et dravidiennes, qui se révèle
particulièrement féconde. Cependant, il ne faut pas se le cacher,
l'ethnologie et, plus généralement, la science française
des civilisations sont menacées. Après les indépendances
africaines de 1960, l'opinion publique française s'est, peu ou prou,
désintéressée des autres, et surtout de
l'Afrique. On s'est replié sur l'Europe ou, au mieux, sur
l'Euramérique, tandis que l'Amérique, elle, s'intéressait
de plus en plus à l'Afrique. Presque toutes les grandes
universités américaines ont chacune son African Studies
Center, où l'on enseigne la négritude dans ses
versions française et anglaise aussi bien qu'africaine. J'ai
interrogé le conservateur en chef des Archives nationales du
Sénégal. Il m'a répondu que la moitié des
chercheurs qui venaient y travailler étaient américains. Et de
fait, chaque année, les ouvrages sur l'Afrique publiés par les
universités américaines sont de plus en plus nombreux et
meilleurs.
Évidemment, nous nous en réjouissons tout en
regrettant la baisse des études africaines, asiatiques,
amérindiennes et océaniennes en France. J'ai, en son temps, saisi
les autorités françaises du problème, qui m'ont
écouté, je le reconnais, avec intérêt. Il s'agit
essentiellement dans le cadre de la francophonie de développer, en
France même, les études que voilà. Ce n'est pas seulement
une question budgétaire, encore que celle-ci soit primordiale ; c'est
aussi une question d'organisation et de coordination de toutes ces
études. Pourquoi n'organiserait-on pas, par exemple, des
séminaires et colloques sur les langues et civilisations ultramarines,
comme en a organisé le Centre d'études francophones de
l'université de
523
Paris-Nord sur les littératures nègres
d'expression française ? C'est une question de volonté politique.
Pas au sens de la politique politicienne, bien sûr, mais de la
politique culturelle.
Nous sommes en pleine crise mondiale. Je l'ai souvent dit
depuis un an, et même avant, derrière la crise économique
il y a une crise morale. En effet, dans la crise économique qui menace
de nous entraîner, tous ensemble, vers une troisième guerre
mondiale, ce qui est en question, ce ne sont pas des techniques, ni même
des théories économiques, mais un problème de justice
sociale, c'est-à-dire un problème de civilisation et, partant, de
culture. Il s'ensuit qu'en définitive les solutions ne peuvent
être que culturelles.
Vouloir la justice pour les autres, c'est,
auparavant, penser dans les pensées des autres pour
s'identifier aux autres. Ce qui est un moyen efficace de connaissance
réciproque. Ce sont les guerres de culture qui provoquent les guerres
économiques, qui, à leur tour, provoquent les guerres
d'autodestruction humaine.
Un humanisme comme celui de la francophonie est encore le
meilleur moyen de combattre celles-ci en s'enrichissant mutuellement. Dans
notre cas, il s'agit d'enrichir un humanisme déjà riche et qui
provient lui-même d'une «greffe», comme l'écrivait Paul
Valéry dans Images de la France.
Il n'y a rien de moins aristocratique que cet idéal
d'homme complet, puisque au fond il est celui de toutes les civilisations des
hautes époques, parvenues à la conscience de leur rôle. Et
d'abord de la Grèce ancienne, à laquelle il faut toujours
revenir. Comme on le sait, beaucoup des héros mythiques qui
fondèrent ses cités venaient, significativement, d'Afrique ou
d'Asie, comme Danaos et Cadmos. C'est Herbert Morrison, alors ministre des
Affaires étrangères, qui proclamait, à l'Assemblée
consultative du Conseil de l'Europe, que la civilisation britannique
était une civilisation de métissage. Et encore plus,
ajouterai-je, celle du Commonwealth. C'est pourquoi je ne vois pas une
ennemie dans l'anglophonie, mais une culture complémentaire de la
francophonie. Il s'agit, ici et là, dans une même
émulation, comme je l'ai dit à Oxford, de proposer un
idéal d'homme à la civilisation de l'universel. Nous pensons,
simplement, que le nôtre est plus complet.
Dans le dernier chapitre de son livre, chapitre
intitulé They know how to live, Gérard Tougas parle de
« cette alliance du goût, de la sensibilité et de
l'intelligence qui résume les manifestations les plus hautes de l'art
français ». Il s'agit, dans la nouvelle entreprise de la
francophonie, d'allier le goût à la force, la sensibilité
à l'émotion, l'intelligence à l'intuition. Pour
être, encore une fois, un homme ultra-humain parce
qu'intégralement humain.
LÉOPOLD SÉDAR SENGHOR
de l'Institut
Contributions de Léopold Sédar Senghor
à la revue DE LA FRANCOPHONIE Léopold Sédar
Senghor Éthiopiques. Spécial centenaire. Contributions de
Léopold Sédar Senghor à la revue 1er semestre
2006
DE LA FRANCOPHONIE [1]
Je suis heureux de me retrouver, une fois de plus, au
Québec. Et j'ai la chance d'avoir été invité, de
nouveau, par l'Université Laval et pour vous parler de la Francophonie.
J'en suis, d'autant plus heureux que, Vice-président du Haut Conseil de
la Francophonie, c'est également l'occasion, pour moi, de participer,
comme conseiller, au Second Sommet des Chefs d'Etat et de Gouvernement. Last
but not least, comme disent vos compatriotes anglophones, j'arrive de
Normandie, où j'ai laissé ma femme, une Normande de vieille
souche. Et à vous entendre, avec vos noms et votre accent normands, j'ai
un peu l'impression d'être chez moi.
Or donc, je vais vous entretenir de la Francophonie, mais
surtout, de la Francité. Et pourtant, c'était l'objet de mon
discours quand, le 22 septembre 1966, vous m'avez fait Docteur honoris causa de
votre Université. C'est qu'avec le Second Sommet, nous sommes non
seulement au coeur du problème, mais encore à la dernière
étape, majeure, où il faut réussir ou renoncer. Et vous
savez bien que renoncer en succombant n'est pas français, non plus que
québécois. Et vous l'avez prouvé. C'est l'occasion, pour
moi, de rendre l'hommage qu'ils méritent aux premiers
québécois, singulièrement à René Levesque et
Pierre Eliott Trudeau, avec lesquels j'ai discuté, en son temps, du
problème. Je n'oublierai pas Jean Lesage ni Jean-Marc Léger, non
plus que Jean Drapeau, qui fut maire de Montréal, sans oublier le
524
Premier Ministre actuel Brian Mulroney. C'est que nous avons
reçu celui-ci à l'Académie française. En sa
présence, nous avons introduit, dans le Dictionnaire, le mot canadien
« foresterie », que j'ai défini. Et le Premier Ministre
canadien, qui est d'origine celtique, vous le savez, comme « nos
Ancêtres les Gaulois », a créé le « Grand Prix de
la Francophonie ».
Cela dit en manière d'introduction j'aborderai le
problème de la Francophonie en faisant, pas trop longuement, son
historique ou, plus précisément, sa préhistoire.
Ce n'est pas hasard, si nous avons été les deux
premiers, un Canadien et le Sénégalais que je suis, à
lancer le néologisme de francité. Il est vrai que, depuis quelque
100 ans, Onésime Reclus, un géographe français, avait
inventé les deux mots de « francophone » et «
francophonie ».
* *
*
On a souvent contesté, et la formation, et la
signification des deux derniers mots. A tort. En effet, comme le disait mon
maître Ferdinand Brunot, l'un des fondateurs de la Grammaire moderne, la
loi fondamentale de la Grammaire n'est pas la rationalité
cartésienne, mais l'analogie. D'où il résulte
qu'aujourd'hui, et pour les lecteurs francophones, la Francophonie peut
signifier :
- l'ensemble des Etats, des pays et des régions qui
emploient le français comme langue nationale, langue de communication
internationale, langue de travail ou langue de culture ;
- l'ensemble des personnes qui emploient le français dans
les différentes fonctions que voilà ;
- la communauté d'esprit qui résulte de ces
différents emplois.
Quant à la francité, on peut la définir
comme l'ensemble des valeurs de la langue et de la culture, partant, de la
civilisation française. Nous y reviendrons quand nous la comparerons
à la négritude. Mais pourquoi, me demandera-t-on, dire «
francité », comme « latinité », «
germanité », « arabité » et non pas «
francitude » comme « négritude », «
berbéritude », « slavitude », « sinitude ».
Qu'on se rassure. Ce n'est pas une question de supériorité ni
d'infériorité, mais de civilisation différente. Ce n'est
surtout pas un auto-mépris culturel chez les militants de la
Négritude que nous étions dans les années 1930, que nous
sommes toujours, Aimé Césaire et moi. C'est simplement que les
mots en-itude ont un sens plus concret ou, ad libitum, moins abstrait que les
mots en -ité, comme l'a prouvé un mémoire de diplôme
d'études supérieures soutenu à l'Université de
Strasbourg.
Je ne voudrais pas faire, ici, encore une fois, tout
l'historique de la Francophonie. Vous le trouverez dans l'ouvrage, remarquable,
du professeur Michel Tétu, intitulé « La Francophonie »
et que je viens précisément de préfacer. Je voudrais
rappeler, simplement, que nous avons été trois Africains, Habib
Bourguiba, Hamani Diori et moi, à lancer, plus que le mot, l'idée
de Francophonie. On oublie, trop souvent, le rôle, majeur, que joua le
Général de Gaulle dans la naissance et l'organisation de la
Francophonie. Il est vrai qu'homme de culture et de courtoisie, homme de pudeur
par excellence, Charles de Gaulle voulut, toujours, laisser les Africains
prendre les initiatives, après Brazzaville.
Or donc, après l'échec de Dakar, où le
Gouverneur général Boisson avait refusé de le suivre dans
la Résistance, en septembre 1940, le Général de Gaulle fut
plus heureux, quatre ans après, à la Conférence de
Brazzaville, en janvier 1944, où il prononça son fameux discours,
dont voici l'essentiel :
« Mais en Afrique française comme dans tous les
autres territoires où des hommes vivent sous notre drapeau, il n'y
aurait aucun progrès si les hommes, sur leur terre natale, n'en
profitaient pas moralement et matériellement, s'ils ne pouvaient
s'élever, peu à peu, jusqu'au niveau où ils seront
capables de participer, chez eux, à la gestion de leurs propres
affaires. C'est le devoir de la France de faire en sorte qu'il en soit ainsi
».
C'est clair. C'est donc en janvier 1944, et par la
volonté de Charles de Gaulle, que survint non seulement l'idée,
mais surtout la volonté, de la Francophonie. Qu'on relise seulement la
fameuse phrase. De Gaulle aurait pu dire : « Où ils seraient
capables ». Il a préféré employer le futur de
l'indicatif pour bien marquer la possibilité, mieux, la certitude de la
Francophonie. C'est ainsi du moins que nous l'avions compris, Bourguiba, Diori
et moi. Et nous avons agi dans ce sens.
Après de Gaulle, j'arriverai à Hamani Diori,
l'ancien Président de la République du Niger, dont on ne parle
pas assez dans l'historique de la Francophonie, comme je l'ai dit au professeur
Tétu. Pour mieux faire comprendre son rôle, récapitulons
les étapes qui, depuis le Discours de Brazzaville, marquent la marche,
avec la France, des anciens peuples colonisés vers la Francophonie. Ce
fut, d'abord, l'Union française, en 1946, à laquelle
succède la Communauté, en 1958. Puis, au début de la
décennie des indépendances, en 1961, fut créée,
entre États africains, l'Union africaine et malgache (UAM), à
laquelle succéda l'Organisation commune africaine et malgache (OCAM).
525
C'est ici que, parmi d'autres étapes, vers la
Francophonie, se distingua tout particulièrement Hamani Diori.
C'était en mars 1968. C'est alors que l'OCAM, sous la Présidence
d'Hamani Diori, conçut le projet d'une Agence de Coopération
culturelle et technique, qui réunirait « les États utilisant
la langue française ». Il s'agissait, grâce à cette
agence, de « compléter et diversifier la coopération
existante et non pas de la remettre en cause ». C'est pourquoi Hamani
Diori adressa, entre autres, au Premier Ministre du Québec, Jean Jacques
Bertrand, une invitation, qui suggérait l'envoi, à Niamey, du
Ministre de l'Éducation nationale du Québec. L'initiative
d'Hamani Diori est d'autant plus importante que la culture reste le
problème essentiel de la Francophonie, comme nous allons le voir.
Quant au Président Habib Bourguiba, homme de culture
à la tête du pays maghrébin le plus moderne, le plus
francophone, il était tout désigné pour jouer un
rôle de premier plan dans la naissance de la Francophonie, comme
auparavant, dans le mouvement des indépendances. Il restera, avec le Roi
Hassan II, le chef d'État arabe qui a le mieux compris la valeur du
métissage culturel que la Francophonie nous permettrait de
réaliser. C'est ainsi que, pèlerin de la Francophonie, il
déclarait, en 1968, à Montréal : « Nous avons
conscience, non seulement d'avoir enrichi notre culture nationale, mais de
l'avoir orientée, de lui avoir conféré une marque
spécifique que rien ne pourra plus effacer. Nous avons conscience
d'avoir pu forger une mentalité moderne ».
On s'étonnera, sans doute, que le militant de la
Négritude, que j'ai été au Quartier latin, soit
tombé, par la suite, dans la Francophonie. Pourtant, j'ai souvent
signalé le fait. En même temps que certains militants, comme
Césaire et moi, suivaient des cours de français, latin et grec
à la Sorbonne, Léon Damas et encore moi nous intéressions
à ce que nous appelions « les Humanités
négro-africaines ». C'est que nous étions,
déjà, pour le métissage culturel, l'essentiel étant
qu'il fallait, d'abord, s'enraciner dans les vertus de la Négritude
avant de s'ouvrir aux apports fécondants des autres civilisations,
singulièrement de la civilisation française. Lecteurs assidus des
écrivains et théoriciens négro-américains, sans
oublier les Antillais, nous rappelions, souvent, cette phrase du poète
Claude Mac Kay : « Plonger jusqu'aux racines de notre race et bâtir
sur notre propre fonds, ce n'est pas retourner à l'état sauvage.
C'est la culture même ».
C'est cette fidélité à la
Négritude qui explique la double action que j'ai menée, pendant
les 35 ans - de 1945 à 1980 - où j'ai été, en
même temps ou successivement, professeur de Négritude à
l'École nationale de la France d'Outre-Mer et député du
Sénégal au Parlement français. Par « Négritude
», j'entends, ici, les langues et civilisations négro-africaines.
Je n'y reviendrai pas, mais sur la Francophonie.
Or donc, si, en 1945, « je suis tombé dans la
politique », comme j'aime à le dire, ce fut malgré moi. En
effet, le Parti socialiste du Sénégal cherchait un second
candidat, à côté du doyen Lamine Guèye, pour sa
liste aux élections à la Première Assemblée
nationale constituante. Et il porta son choix sur moi, alors que je ne briguais
aucune fonction politique. Je finis par accepter à la condition qu'on me
laissât poursuivre, en même temps, ma double oeuvre de professeur
et de poète. C'est ainsi que, pendant les quinze années de mon
mandat, renouvelé, j'ai continué à me battre, et pour la
Négritude, et pour la Francophonie.
Comme député du Sénégal, j'ai
appartenu aux deux commissions qui, en 1946 et en 1958, ont
préparé des constitutions pour la France. C'est ainsi, entre
autres, que mon amendement au texte qui allait devenir la Constitution de 1958
fut rejeté. Il proposait, pour les peuples colonisés, « le
droit à l'autodétermination », c'est-à-dire à
l'indépendance. Et c'est le Général de Gaulle qui, passant
outre à l'avis de la Commission de la Constitution, reprit l'amendement
dans le texte qui fut approuvé par référendum.
Après que le projet de Constitution eut été
approuvé par le Peuple de France et les peuples des Départements
et Territoires d'Outre-Mer, je fus le premier à demander, au
Général de Gaulle, l'indépendance de mon pays, le
Sénégal. Fait remarquable, l'entretien n'avait pas duré
une demi-heure quand le Président de la République, qui m'avait
écouté sans m'interrompre - c'était son habitude -, me
donna son accord.
Précisément, parce qu'il en avait
été ainsi et que je gardais intacte, au fond de mon âme, ma
passion pour la Négritude, j'apportai une nouvelle ardeur, avec de
nouveaux arguments, à l'autre combat, pour la Francophonie. C'est le
moment de rappeler que, depuis la Constitution de 1946, qui avait
créé « l'Union française », on avait beaucoup
avancé, et rapidement. Entre autres États, le Vietnam
était devenu indépendant en 1949, le Maroc et la Tunisie en 1956.
Enfin, la « Communauté », « rénovée »,
était créée en 1960. Et pendant toute cette
décennie, les différents peuples d'outremer, sauf les Antillais
et les Océaniens du Pacifique, avaient, à tour de rôle,
obtenu, chacun, son indépendance. C'est dans ce contexte d'espoir et,
partant, de coopération, que mourut Charles de Gaulle.
Quand Pompidou fut élu Président de la
République, le 15 juin 1969, un nouvel espoir, mêlé,
c'est-à-dire plus riche, se leva en moi. C'est que, depuis les bancs de
la « Première supérieure » du Lycée
Louis-le-Grand, dans les années 1920, jusqu'à sa mort, en 1974,
Pompidou fut toujours mon meilleur
526
ami en France, et le plus fidèle. Je lui dois
l'essentiel, non pas de mon éducation, mais de ma culture
française. Le jeudi ou le Dimanche, il m'emmenait souvent avec lui, non
pas à Montmartre, mais au théâtre ou aux expositions d'art,
plus rarement au cinéma. Surtout, nous lisions beaucoup, nous discutions
beaucoup, et sur tous les problèmes : depuis la poésie grecque
jusqu'à « l'Art nègre ».
Dès lors, on ne s'étonnera pas que, disciple
politique du « Grand Charles » et homme de culture, Pompidou se soit
intéressé à la Francophonie et, pour ainsi dire, de
l'intérieur, sous tous ses aspects. C'est ainsi qu'il créa une
nouvelle institution, si je puis m'exprimer ainsi : les «
Conférences franco-africaines ». Dans le cadre d'une Francophonie
de fait, celles-ci furent, en réalité, les premiers «
Sommets ». En effet, ces conférences réunissaient les chefs
d'État francophones ou leurs représentants. À la mort de
Pompidou, Monsieur Valéry Giscard d'Estaing, le nouveau Président
de la République française, eut le mérite de continuer la
Francophonie de fait que Pompidou avait créée.
Plus exactement, avec le Président Giscard d'Estaing,
on essaya, conférence après conférence, de cerner le
problème. C'est ainsi qu'en deux sessions, en 1979, puis 1980, je
parvins, comme rapporteur, à faire adopter un projet de Francophonie. Il
ne restait plus qu'à réunir un sommet de tous les chefs
d'État avec, si possible, chacun en personne. C'est alors que je fus
chargé de recevoir, à Dakar, en novembre 1980, une
Conférence des Ministres des Affaires étrangères, qui
préparerait le Premier sommet des Chefs d'État, par lequel serait
créée, officiellement, la Francophonie. Il était entendu
que le Président de la République française
réglerait, avec les gouvernements d'Ottawa et du Québec,
l'affaire dite « du Québec ». Mais voilà qu'en octobre,
je lus un communiqué du ministère français des Affaires
étrangères annonçant que la France ne serait pas
représentée à la Conférence de Dakar. Aux
journalistes qui se précipitèrent pour m'interroger, je
répondis simplement : « C'est une querelle entre Grands Blancs. _
Quand ils se seront mis d'accord, on tiendra le Sommet ».
Enfin, les « Grands Blancs » se sont mis d'accord,
après six ans de pourparlers, non seulement entre Paris et le
Québec, sans oublier Ottawa, mais aussi entre Paris et les anciens
territoires ou protectorats d'Outre-Mer, devenus États
indépendants. C'est dans ces conditions que fut réuni à
Paris, en février 1986, le Premier Sommet francophone des Chefs
d'État ou de Gouvernement. Ce Premier Sommet, ce n'est pas
étonnant, n'a pas beaucoup fait avancer le problème, les
problèmes. On s'est perdu dans les détails en parlant surtout
Économie, Finances et Techniques, sans oublier les ordinateurs ni les
minitels, alors qu'il fallait traiter des problèmes politiques, mais,
d'abord discuter le problème culturel majeur : la Francophonie, mais
sous son aspect culturel de francité. J'entends par là
l'enseignement et l'usage de la langue française dans tous les pays -
plus de 40 - qui feraient partie de la Francophonie.
Ne nous le cachons pas, le problème de fond, ce sont
les valeurs culturelles de la langue française, y compris leurs aspects
scientifiques et techniques. Il faut commencer par rappeler certains faits et,
pour cela, remonter au Moyen Age. Or donc, c'est au début du Moyen Age,
à la chute de l'Empire romain, mais surtout, avec Charlemagne, à
la création de l'Empire d'Occident, au début du IXe siècle
de notre ère. C'est alors que le français commence d'être
parlé dans toute l'Europe, hors des frontières françaises.
Ce fut, plus exactement, dans les cours et parmi la bourgeoisie.
Arrêtons-nous un moment sur ce fait pour en dire les raisons, qui
tiennent essentiellement à la francité.
Il y a, d'abord, que le français parlé, à
côté du latin, dans les universités, était une
langue savante, au vocabulaire riche et précis en même temps :
technique. C'est ainsi qu'au XIIIe siècle, sur 3.000 mots du
français élémentaire, 25 %, c'est-à-dire le quart,
étaient des mots savants, tirés du latin ou, mieux, du grec. Si
le français, depuis l'Empire d'Occident, mais surtout les XIIIe-XIVe
siècles est devenu, en Europe, la langue des cours, de la bourgeoisie et
de la diplomatie, c'est, bien sûr, pour les raisons politiques que
voilà. Elle l'est devenue surtout pour ses qualités propres, qui
tiennent au latin, mais surtout au grec. C'est la raison pour laquelle il a
fallu huit siècles ainsi que la puissance économique et spatiale,
financière et technique des États-Unis d'Amérique pour que
l'anglais remplaçât le français comme langue de
communication internationale, après la fin de la Seconde Guerre
mondiale. Last but not least, ce sont les mêmes États-Unis
d'Amérique, qui, après avoir redécouvert le latin, mais
surtout le grec, après la Deuxième Guerre mondiale, l'ont fait du
français depuis quelques années, depuis,
précisément qu'on parle de la Francophonie.
Il n'est que temps d'arriver aux valeurs de la
Francité, et d'abord de la langue française. Comme j'ai
l'habitude de le dire, le français est « le grec des temps modernes
». J'ai développé cette idée ici même, lorsque,
encore une fois, le 22 septembre 1966, j'ai été fait Docteur
honoris causa de l'Université Laval. Je la résumerai
aujourd'hui.
Bien sûr, la langue française est née de
la langue latine : du latin vulgaire ou, plus précisément, de
celui de la vulgate. Il reste que, depuis la Renaissance et l'enseignement des
Humanités gréco-latines en France, la langue de Descartes s'est
enrichie de nouveaux mots : de mots savants, empruntés au latin, mais
surtout au grec. Je vous renvoie à un document significatif du «
Ministère français de la Recherche et de l'Enseignement
supérieur », qui est intitulé : « Listes
terminologiques, relatives au vocabulaire de la
télédétection aérospatiale ». Ce qui frappe
d'abord, c'est que presque tous ces mots, scientifiques ou
527
techniques, sont formés sur des racines ou des mots
latins, mais, le plus souvent, grecs. Il est vrai que le latin avait,
lui-même, beaucoup emprunté à la langue d'Aristote.
Le premier avantage de ces nouveaux mots, outre leur
précision, est que l'homme de culture, qui a fait ses humanités
gréco-latines, les comprend sans peine. Il y a surtout qu'une fois qu'on
les lui a traduits, il n'en oublie plus les diverses significations. Quand j'ai
lu pour la première fois, dans un journal, le mot « Mirapolis
», j'ai compris : « Cité des merveilles ». En effet, la
racine mir signifie, en grec, « ville, cité ». De même,
quand l'autre mois, on m'a présenté une « orthophoniste
», j'ai, tout de suite distingué les trois éléments
grecs du mot : orthos, qui signifie « droit », phonè, «
langue », et - istos, qui est un suffixe indiquant le caractère ou
la fonction. Ce sont ces emprunts du français scientifique ou technique
qui expliquent, en partie, le retour en force des humanités
gréco-latines, non seulement en France, mais encore dans les autres pays
de la Francophonie, singulièrement en Afrique noire.
Il reste que le phénomène culturel va beaucoup
plus loin. Il dépasse le simple emprunt ou fabrication de mots savants :
scientifiques ou techniques. Au demeurant, comme on le sait, les deux tiers au
moins des mots de l'anglais, y compris l'anglo-américain des U.S.A.,
viennent du français, du latin ou du grec. Si paradoxal que cela puisse
être, l'apport majeur de la civilisation latine, mais surtout grecque
à la francité, on le trouve, non pas dans le vocabulaire, mais
dans la syntaxe et, par-delà, dans la stylistique de la prose
française. D'un mot, dans la littérature gréco-latine,
prose et poésie. Pourquoi je n'ai pas été
étonné en lisant, dans le Figaro du 14 août 1987, un
article intitulé « Le latin revient en force ». Et, de joie,
j'ai chanté l'introït du 15 août : « Gaudeamus, omnes in
Domino ». Je m'en suis d'autant plus réjoui que le
phénomène s'étend aux deux langues, car le sous-titre de
l'article précise : « Les effectifs des latinistes et des
hellénistes progressent chaque année ».
Mais pourquoi ce retour en France ? C'est, d'un mot, que les
vertus du latin, mais surtout du grec, dépassent le vocabulaire pour
s'étendre à la phrase et, par-delà, au paragraphe, au
poème, à toute l'oeuvre écrite. Ce qui mérite
explication. Quand, pour parler de ce que j'ai étudié et
enseigné, je compare les langues agglutinantes d'Afrique aux langues
à flexion d'Europe, ce qui me frappe le plus, c'est moins leurs
vocabulaires, voire leurs morphologies, que leurs syntaxes. A la syntaxe de
coordination ou de juxtaposition des langues africaines, si propre à la
poésie, s'oppose la syntaxe de la subordination des langues
européennes. C'est dire que celles-ci sont essentiellement des langues
scientifiques parce que de raisonnement - je ne dis pas de philosophie.
* *
*
Données ces précisions et à partir de mes
rapports faits aux conférences franco-africaines de 1979 et 1980, je
voudrais vous dire ce que pourraient être les structures politiques et la
vie de la Communauté organique de la Francophonie. Il est entendu que ce
dernier titre, que j'avais proposé en 1980, peut être
modifié sans inconvénient, et surtout les structures, mais pas
l'esprit de la Francophonie, c'est-à-dire la francité, pour les
raisons que je viens d'exposer. C'est dire que nous allons, maintenant, entrer
en politique, mais au sens le plus élevé.
La Francophonie couvrira donc les cinq continents. Mais
pourquoi faire exactement ? Je répondrai : « Pour réaliser
l'oeuvre que font les communautés culturelles que l'on désigne,
aujourd'hui, sous les noms d'Hispanophonie et de Lusophonie.
Précisément, il n'est pas indifférent qu'on n'ait pas pris
l'habitude d'appeler le « Commonwealth » « Anglophonie».
À cause des États-Unis d'Amérique, bien sûr, mais
surtout parce que le wealth, l'économie, caractérisé le
Commonwealth. Cela ne signifie pas que, dans la Communauté organique de
la Francophonie, les problèmes économiques ou financiers seront
négligés. Que non pas ! Cela veut dire qu'ils seront, non
même pas subordonnés à, mais conditionnés par la
solution humaniste des problèmes culturels. Cependant, ce ne sera pas
dans le sens de l'impérialisme, encore moins du colonialisme
culturel.
En effet, depuis le professeur Paul Rivet, qui était
à la fois un biologiste et un linguiste, c'est-à-dire un homme de
haute culture, l'option de la symbiose biologique et culturelle, pour ne pas
parler de « métissage », s'est confirmée en France et
dans les pays francophones. C'est ce que prouve, entre autres et sous le
Général de Gaulle, le fameux Rapport Jeanneney du 19 juillet 1963
sur « La Politique de Coopération avec les pays en Voie de
Développement ». Je n'en citerai que ces lignes :
« La France peut aussi attendre de sa coopération
des avantages économiques indirects et un enrichissement culturel... Que
la France imprègne d'autres pays de ses modes de pensées, elle
tisse des liens dont l'intimité les incitera à lui apporter,
à leur tour, le meilleur d'eux-mêmes. La culture française
s'est épanouie, au cours des siècles, grâce à des
apports étrangers constamment renouvelés. Si les pays qui auront
reçu d'elle une initiation à l'esprit scientifique lui font
connaître des modes
528
nouveaux d'expression artistiques ou des conceptions
philosophiques, sociales ou politiques originales, notre civilisation s'en
trouvera enrichie ».
Ce texte est essentiel. Il est d'autant plus important que,
même parmi les pays latins, il est rare d'entendre, non pas des
professeurs ou des écrivains, mais des hommes politiques ou officiels
tenir de tels propos. Sauf au Portugal, où j'ai présidé
précisément, en 1980, un « Colloque sur le Métissage
» à l'Université d'Evora.
Vous aurez noté : « Notre civilisation s'en
trouvera enrichie ». A la page précédente, le Rapport
Jeanneney avait présenté la culture française comme «
prétendant à l'universalité ». C'est là une
idée empruntée à Pierre Teilhard de Chardin, qui, dans une
vision globale et prophétique du monde, nous présentait les
différentes civilisations humaines multipliant leurs échanges
dans un dialogue réciproquement fécondant, pour aboutir à
« la Civilisation de l'Universel ». C'est dire qu'au «
rendezvous du donner et du recevoir » que constitue la Francophonie, pour
parler comme Aimé Césaire, les peuples des quatre autres
continents, non européens, ne viendront pas les mains vides. Ceux qui,
avec Césaire, ont, dans les années 1930, lancé le
mouvement de la Négritude ont beaucoup insisté sur ce dernier
point : il s'agit, pour chaque continent, pour chaque peuple, de s'enraciner
profondément dans les valeurs de sa civilisation propre pour s'ouvrir
aux valeurs fécondantes de la civilisation française, mais aussi
des autres civilisations, complémentaires, de la Francophonie. Ce que la
France nous a apporté d'essentiel, d'irremplaçable, plus qu'aucun
autre pays d'Europe, c'est « l'esprit de méthode et d'organisation
», comme j'aime à le dire, ou, pour parler comme le Rapport
Jeanneney, « un mode d'expression et une méthode de pensée
». Pour m'en tenir à l'Afrique, celle-ci a, depuis le début
du siècle, beaucoup apporté, singulièrement dans les
domaines des Arts plastiques, de la Musique et de la Poésie, sans
oublier la Danse, qu'a renouvelée Maurice Béjart, dont le
père, Gaston Berger, créateur de la Prospective, était un
métis franco-sénégalais.
C'est dire que, comme les pays du Maghreb, qui, dans ce
domaine, sont exemplaires, les pays d'Afrique noire, d'Asie et d'Océanie
commenceront par choisir, chacun, une ou plusieurs langues « originaires
» ou continentales pour en faire des « langues nationales ». Il
n'est pas question d'écarter le français, pas même d'en
faire une « langue étrangère », mais bien une «
langue officielle » ou de « communication internationale ».
C'est le cas au Sénégal. C'est dire qu'ici, les langues d'origine
authentiquement africaine y sont étudiées selon les
méthodes scientifiques les plus modernes, soit à l'Institut
Fondamental d'Afrique noire, qui est un vieil Institut de recherche, soit au
Centre de Linguistique appliquée de Dakar.
Ainsi justifiée la Francophonie, comme « un projet
de civilisation humaine » -, dixit le Rapport Jeanneney -, il est temps
d'en venir à sa réalisation au plein sens du mot, mais d'abord
à son organisation structurelle, politique.
Il nous faut partir de la « Conférence franco
africaine » tenue à Nice, du 8 au 10 mai 1980. Un projet
cohérent en était sorti, qui était une synthèse des
propositions du rapporteur que j'avais été, des apports des
experts et des amendements des chefs d'État ou de gouvernement. Il
s'agissait de créer une « Communauté organique de la
Francophonie ». Il reste que le titre importe peu. Ce qui compte, c'est le
nom, mais surtout la notion de Francophonie.
Tout en nous inspirant, parmi d'autres communautés, des
structures et du fonctionnement du Commonwealth nous entendions faire oeuvre
neuve, à la française. Il s'agissait, il s'agit toujours, en ce
dernier quart du XXe siècle, de préparer, pour notre ensemble
francophone, voire latinophone, nous allons le voir, une communauté de
peuples différents, mais solidairement complémentaires. Et
partant, une communauté solide pour la réalisation de la
Civilisation de l'Universel, qui sera celle du troisième
millénaire. Bref, une communauté créatrice parce que de
droit écrit, rationnellement organisée, à la
française, je le répète.
Voici ce que pourraient être les organismes de la
Francophonie :
- la Conférence des Chefs d'État ou de
Gouvernement,
- le Secrétariat général,
- les Conférences ministérielles,
- la Fondation internationale pour les Échanges
culturels.
Que tous ces organismes doivent avoir, chacun, leur
siège à Paris, cela va de soi. Parce que le modèle de la
langue française est celle parlée à Paris par les hommes
de culture, et non plus « par la bourgeoisie », comme on nous
l'enseignait en Sorbonne. Mais surtout pour cette raison majeure, que l'Europe
est devenue le centre de la civilisation humaine depuis 2.500 ans que l'Afrique
lui a passé le flambeau. Depuis lors, elle continue de s'enrichir des
apports de l'Asie et de l'Océanie à l'Est, des deux
529
Amériques à l'Ouest. Et voici, de nouveau, que
l'Afrique, en ce XXe siècle, est rentrée dans le jeu, et souvent
par le détour des deux Amériques.
La Conférence des Chefs d'Etat ou de Gouvernement sera
la plus haute instance. Elle se réunira à intervalles
réguliers, tous les deux ans par exemple, étant entendu qu'il y
aura, à l'occasion, des réunions extraordinaires. Il est entendu
également que ce sera, autant que possible, soit à Paris, soit,
à tour de rôle, dans une autre capitale. Ces réunions au
sommet seront toujours précédées, préparées
par une conférence des ministres des Affaires étrangères.
Il reste que la plus grande liberté les caractérisera, qu'en
particulier, au début de la Conférence, tout chef d'Etat ou de
gouvernement pourra la saisir de tout problème qu'il lui paraîtra
opportun de soulever. Il s'agira, en effet, pour faire de la Francophonie le
modèle et le moteur de la Civilisation de l'Universel, de favoriser les
échanges d'idées en respectant la personnalité originaire,
mais surtout originale de chaque nation.
Le Secrétariat général, comme l'indique
son nom, assurera des fonctions d'étude, de préparation
d'exécution, mais aussi de coordination. Encore que situé
à Paris, comme les autres organismes, son titulaire pourra ne pas
être français. Enfin, le Secrétariat général
sera chargé d'animer les divers organismes de la Francophonie.
Les Conférences ministérielles seront
générales, techniques ou régionales. Les ministres des
Affaires étrangères, qui auront un rôle
prépondérant, se réuniront au moins une fois par an. Ils
commenceront par un tour d'horizon des problèmes mondiaux, puis ils
examineront les rapports qui leur auront été soumis par les
ministres spécialisés, pour en retenir ce qui devra être
présenté aux chefs d'État ou de gouvernement.
Quant aux conférences des ministres
spécialisés, et d'abord des ministres de l'Éducation, de
la Culture, de la Jeunesse et des Sports, elles seraient ouvertes à tous
les États membres. Cependant, en dehors des ministres chargés de
l'Éducation ou de la Culture, la participation ne serait pas
obligatoire. Ainsi serait laissé plus de souplesse et, partant,
d'efficacité au système.
S'agissant, enfin, de la Fondation internationale pour les
Échanges culturels, elle commencera par absorber l'actuelle Agence de
Coopération culturelle et technique. C'est dire que les problèmes
scientifiques et techniques ne seront pas négligés, tout au
contraire. Ni les problèmes artistiques. La Fondation aura pour objectif
majeur de réaliser l'oeuvre culturelle de compréhension et
d'enrichissement réciproques qui est le but ultime de la Francophonie.
C'est ainsi que la Fondation aurait trois départements :
_- un Conseil des Langues et Cultures,
- une Agence de Coopération culturelle et technique, - un
Centre d'Information.
Le Conseil des Langues et Cultures aura pour tâche
essentielle l'identification, la protection, le développement et la
diffusion des différentes expressions culturelles de nos nations
respectives, voire des régions au sein d'une nation. Il serait utile d'y
créer diverses sections, dont :
- un section des Langues de Communication internationale (je
songe au français et à l'arabe entre
autres),
- une section du latin et du grec,
- une section des Langues africaines,
- une section des Langues asiatiques.
L'Agence de Coopération culturelle et technique existe
déjà. Elle serait élargie aux dimensions de la
Francophonie. Elle aura surtout, non pas un rôle d'études, comme
le Conseil scientifique, dont je propose la création, mais un rôle
concret d'exécution pour les initiatives et projets de
coopération culturelle.
Quant au Centre d'Information, sa fonction sera de favoriser,
voire, auparavant, d'organiser les communications entre les nations de la
Francophonie. C'est dire qu'il aura d'abord, un rôle d'information sur la
vie de la Francophonie. Il aura aussi à faire connaître les
travaux des différents organismes de la Communauté organique,
sans oublier les nombreuses associations francophones qui existent depuis
plusieurs années. Le centre, en outre, aidera à réaliser,
entre les pays intéressés :
_- la libre circulation des oeuvres des créateurs :
écrivains, artistes, professeurs, savants et techniciens
;
- les traductions ou reproductions d'oeuvres littéraires
ou artistiques, scientifiques ou techniques ;
- les échanges des expériences les plus
significatives en matière culturelle, scientifique et technique ;
530
- la participation francophone, enfin, à la vaste et
profonde révolution culturelle qui, en ce dernier quart du XXe
siècle, prépare la Civilisation de l'Universel.
Où en est-on aujourd'hui, me demanderez-vous, dans
l'édification de la Francophonie ? Comme je vous l'ai dit, un incident
juridique entre « Grands Blancs », entre les gouvernements canadien,
québécois et français, a fait renvoyer sine die la
conférence des ministres des Affaires étrangères que je
devais réunir à Dakar, en novembre 1980, pour préparer la
« Conférence des Chefs d'État ou de Gouvernement »,
qui, elle, aurait définitivement arrêté la charte de la
Francophonie. _Ce retard n'aura pas été inutile. Outre que,
depuis lors, le nombre des membres de l'A.C.C.T. s'est accru, le
Président François Mitterrand a prouvé, mieux
réalisé le mouvement en marchant. Il a, en effet,
créé, l'autre année, un Haut Conseil de la Francophonie,
qui est composé de 27 membres, « représentatifs des grandes
composantes de la Francophonie ». Il s'y est ajouté un Commissariat
général de la Langue française auprès du Premier
Ministre et un Comité consultatif de la Langue française, qui
remplace l'ancien « Haut Comité de la Langue française
». _Il y a surtout que le Président de la République
française a réuni, l'an dernier, du 17 au 19 février, le
Premier Sommet francophone des chefs d'État et de gouvernement
francophones. Pour une fois et par souci d'efficacité, on a
procédé à l'anglaise. Ce furent, en effet, des discussions
ouvertes où tous les problèmes ont été
abordés, mais surtout des problèmes économique et
financiers. Dès lors, n'est-il pas temps, aujourd'hui, d'aborder les
problèmes essentiels de la Francophonie, les problèmes culturels
? C'est d'autant plus nécessaire, et naturel, que, nommé Premier
Ministre après les élections du 16 mars 1986, Monsieur Jacques
Chirac a nommé, non seulement un Ministre de la Coopération en la
personne de Monsieur Michel Aurillac, un spécialiste des
problèmes africains, mais encore un Secrétaire d'État
à la Francophonie, Madame Lucette Michaux-Chevry, originaire des
Antilles.
Nous avons profité de ce sommet, Monsieur Stélio
Farandjis, le Secrétaire Général du Haut Conseil de la
Francophonie, et moi, le Vice-président, pour tenir une
conférence de presse au Grand Palais, dans le cadre d'Expolangue.
C'était, pour moi, l'occasion de proposer, pour la Francophonie, des
langues classiques à enseigner dans les collèges, lycées
ou facultés. Je proposai donc cinq langues : le latin, le grec, l'arabe
classique, l'égyptien ancien et le chinois. Le latin et le grec, langues
indo-européennes, pour le rôle qu'ils jouent encore dans
l'enseignement du français, comme nous l'avons vu tout à l'heure
; l'arabe classique parce que plus de la moitié des Arabes vont entrer
dans la Francophonie, l'égyptien ancien parce que c'est une langue
agglutinante et que, près de la moitié des langues africaines
sont construites sur son modèle : le chinois, enfin, parce qu'à
son tour, c'est le modèle des langues à tons d'Asie, comme le
vietnamien. _C'est l'occasion de vous parler de la Latinophonie. Il s'agirait
d'insérer la Francophonie dans un ensemble plus vaste, qui comprendrait
toutes les nations qui ont vocation à se servir d'une langue
néo-latine ou du grec comme langue nationale, langue classique ou langue
de communication internationale. Toutes ces nations réunies
représenteraient près d'un milliard d'hommes.
Il s'agirait donc, une fois réalisée la
Francophonie, de l'insérer, à son tour, dans une association des
pays ou groupes de pays de langue néo-latine. Je songe à
l'Espagne, à l'Italie, au Portugal et aux 22 pays d'Amérique
latine, sans oublier, naturellement, la Belgique, ni le Luxembourg, la Suisse
gardant... son isolement. Ce n'est pas hasard si, au « Premier
Congrès des Orthopédistes de Langue française », que
j'ai ouvert, à Monaco, le 26 mars 1986, on compta des
orthopédistes espagnols, italiens, voire latino-américains.
En vous exposant le projet de Francophonie version 1987, j'ai
presque toujours employé l'indicatif. J'aurais dû toujours
employer le présent du conditionnel, car le projet de 1980 sera
amélioré. Ce que je souhaite du moins.
*
* * _
Il reste qu'avant de conclure, il me faut répondre
à une question majeure, qu'on nous pose souvent. « C'est une belle
idée, et grandiose, votre projet de Francophonie, entendons-nous souvent
dire à l'étranger, parfois même en France. Mais pourquoi ne
pas adopter, simplement, l'anglais comme langue de communication
internationale, puisqu'il est, aujourd'hui, la langue la plus répandue
à travers tous les continents et dans tous les domaines ? Et puis, c'est
tellement plus facile à apprendre ! » Ce sont là, en effet,
deux faits que l'on ne peut nier. Cependant le problème est mal
posé. Celui-ci, en effet, est de savoir si, aujourd'hui que nous sommes,
nolentes volentes, poussés vers la Civilisation de l'Universel,
l'intérêt de l'humanité se trouve dans le choix du
français ou de l'anglais. Pour être plus précis, si, en
1986, deux ans après l'année où nous avons
fêté le bicentenaire du Discours sur l'Universalité de la
Langue française, les arguments de Rivarol, mais aussi du Professeur
Schwab, l'Allemand, sont toujours valables.
531
Le premier argument contre l'anglais est que, si, au
début du XXe siècle, après la Première Guerre
mondiale, il est devenu la première langue de communication
internationale, il ne le doit ni à l'étendue, ni au rôle du
Commonwealth sur notre planète, mais bien à la superpuissance
économique, militaire et politique des États-Unis
d'Amérique. C'est d'autant plus vrai qu'à côté de la
morphologie et de la syntaxe, qui sont simples, trop simples, la langue de
Shakespeare nous présente une orthographe et une prononciation qui ne le
sont pas. Je dis « trop simples », car le problème est de
choisir moins une langue de facilité que de ressources. Je parle d'une
langue qui soit la plus belle, tout en nous permettant de mieux exprimer toutes
les richesses, et de l'univers, et de la sensibilité comme de l'esprit
humain. C'était là le sens du concours organisé par
l'Académie de Berlin sous la forme des trois questions que voici :
- qu'est-ce qui a rendu la langue française universelle ?
_- pourquoi mérite-t-elle cette prérogative ? - est-il à
présumer qu'elle la conserve ?
Ainsi partait-on d'un jugement de fait pour aboutir à
un jugement de valeur, étant entendu que c'est ce dernier qui est le
fond du problème. C'est lui que nous allons examiner brièvement
avant de dire comment se présente, aujourd'hui, à nous
Francophones, le problème, non plus précisément de
l'universalité de la langue française, mais de la Francophonie.
Le professeur Schwab, dans son discours, nous a fait remarquer que, de toutes
les langues vivantes, la langue française était la plus
répandue, au Moyen Age, parmi les nations de l'Europe. Elle le fut,
comme je l'ai dit, dès le XIIIe siècle, et elle le resta
jusqu'à la Deuxième Guerre mondiale. Il s'y ajoute, argument
majeur, que les qualités qui l'imposèrent à l'Europe
subsistent encore aujourd'hui.
Je ne reprendrai pas, ici, tous les arguments de Rivarol
contre les plus grandes langues européennes qu'étaient, que sont
encore, l'allemand, l'espagnol et l'italien. Tout en reconnaissant, à
chacun, ses mérites et il fait, en passant, l'éloge du
métissage biologique et culturel -ce que Rivarol leur reproche, c'est,
à l'allemand, sa « prononciation gutturale », à
l'espagnol, « l'enflure » du style et, à l'italien, « la
préciosité ». Naturellement, il a laissé l'anglais
pour la fin.
Pour l'anglais, plus qu'il ne l'a fait
précédemment, il note, avec les invasions, les emprunts culturels
faits aux Français et, par eux, aux Latins et aux Grecs. Encore que la
langue anglaise ait été ainsi adoucie et enrichie, précise
Rivarol, elle a gardé, dans sa prononciation, les rudesses de l'allemand
et, dans sa littérature, le désordre du génie germanique.
Il ne lui restait plus, il ne nous reste plus qu'à rappeler les vertus
de la langue et de la littérature : du « génie »
français. Je l'ai fait ici et je n'y reviendrai pas.
*
* * _
C'est pourquoi je voudrais m'acheminer vers ma conclusion en
vous disant quels me paraissent être nos devoirs pour la défense
et illustration de la langue française parce que de la francité
et, partant, de la Francophonie. Je vous renvoie, à ce propos, au volume
2, numéro 1 de Perspectives universitaires, la nouvelle revue de
l'Association des Universités partiellement ou entièrement de
Langue française. Ce numéro est significativement intitulé
Le français, langue internationale de la Communication scientifique et
technique. _Il s'agit de savoir comment, tout ensemble, les États de la
Francophonie, bien sûr, mais aussi les universitaires en
général, singulièrement les savants et chercheurs,
ingénieurs et techniciens, écrivains et artistes, nous
enrichirons la langue française. Ce qui est encore le meilleur moyen de
la défendre et de l'étendre sur toute notre planète Terre.
Aux suggestions que j'ai faites tout au long de cet exposé,
singulièrement pour le maintien ou la création d'une section des
langues classiques dans l'enseignement du second degré, j'ajouterai des
propositions pratiques.
Tout d'abord, dans les conférences internationales, en
commençant par l'ONU et ses organismes spécialisés, il
nous faut parler en français. Pour le moment, ce sont surtout les
francophones d'Outre-Mer qui respectent cette règle. Comme le souligne
l'incident que m'a raconté, l'autre année, le président de
l'Association des Professeurs africains de Mathématiques. Il rentrait
d'un congrès mondial de mathématiciens tenu à New York.
Présidant une séance, il s'était exprimé,
naturellement, en français. Et voilà que des Américains,
furieux, se répandaient dans les couloirs en vitupérant : «
Il a du culot, ce Nègre ! Présider en français quand les
Français eux-mêmes interviennent en anglais ! ».
La deuxième règle sera toujours dans les
conférences internationales, d'exiger, et la traduction
simultanée, et les documents, ronéotypés ou
imprimés, dans les langues officielles, dont le français. Ce que
font, au demeurant, les délégations francophones d'Afrique. La
troisième règle sera, au niveau des organisations internationales
francophones, dont l'AUPELF et l'ACCT, mais aussi au niveau de chaque
État ou région francophone, de faire porter notre effort sur la
publication en français d'ouvrages fondamentaux dans les domaines des
sciences et des techniques.
La quatrième, enfin, sera, dans la rédaction des
articles comme des ouvrages scientifiques et techniques en français, de
faire un autre effort. Celui-ci consistera à cultiver les vertus
majeures du
532
génie français, qui sont l'ordre logique dans la
clarté et la précision dans la nuance. C'est la raison pour
laquelle, dans la réforme de l'enseignement en Afrique francophone, nous
avons mis l'accent sur les deux disciplines traditionnelles de l'École
française : l'explication de texte et la dissertation.
Un mot d'espoir pour finir, car rien n'est perdu. L'Agence de
Coopération culturelle et technique de la Francophonie réunit,
aujourd'hui, quelque 40 États, et l'Association internationale des
Parlementaires de Langue française, autant de délégations.
Sans oublier qu'à l'Assemblée générale de
l'Organisation des Nations-Unies, 33 délégations soit plus de 20
%, s'expriment en français. Sans oublier surtout le nombre
d'États qui, aujourd'hui, participent dans la ville de Québec au
Second Sommet de la Francophonie. Non, rien n'est perdu. Tout dépend de
notre courage, mieux de notre esprit de méthode et d'organisation : de
notre Francité.
[1] Ethiopiques. Revue de culture négro-africaine,
n°50-51. Conférence prononcée à l'Université
Laval de Québec, le 2 septembre 1987.
533
534
L. S. SENGHOR
Comment expliquer cette faveur, cette ferveur,
singulièrement cette dissociation de la politique et de la culture
françaises ? C'est l'objet de mon propos.
Je ferai une première remarque. Cette dissociation
est plus apparente que réelle. La décolonisation, poursuivie avec
constance par le Général de Gaulle, achevée avec
éclat en Algérie, n'a pas été pour rien dans cette
faveur. En Afrique, l'esprit ne succombe pas à la dichotomie. On n'y
sépare pas, comme en Europe, la culture de la politique. Le conflit de
Bizerte a failli chasser le français des écoles
tunisiennes.
Donc, si on introduit ou maintient l'enseignement du
français en Afrique, si on l'y renforce, c'est, d'abord, pour des
raisons politiques. En Afrique anglophone plus qu'ailleurs. A la raison que
voilà, s'ajoute celle que voici : la majorité des Etats africains
sont francophones et, à l'O.N.U., le tiers des délégations
s'exprime en français. En 1960, après l'entrée massive de
nouveaux Etats africains dans l'Organisation internationale, Habib Bourguiba en
tira la conclusion Iogique : il faut renforcer l'enseignement du
français en Tunisie. Dans les faits, Hassan II n'a pas appliqué
une autre politique. Le Maroc, à lui seul, compte huit mille
enseignants français : plus de la moitié de ceux qui servent
à l'étranger.
04111.0
Cependant, la principale raison de l'expansion du
français hors de l'hexagone, de la naissance d'une Francophonie est
d'ordre culturel. C'est le lieu de répondre à la question que m'a
posée, personnellement, Esprit : a Que représente, pour
un écrivain noir, l'usage du français ? ». Bien
sûr, je ne manquerai pas d'y répondre plus loin. On me permettra
seulement d'élargir le débat : de répondre au nom de
toutes les élites noires, des politiques comme des écrivains. Ce
faisant, je suis convaincu qu'une partie de nos
838
535
LANGUE DE CULTURE
raisons vaudra, également, pour les
Maghrébins -- je songe, en particulier, au regretté Jean Amrouche
-- encore que ceux-ci soient mieux qualifiés que moi pour parler en leur
nom propre.
Il y a, d'abord, une raison de fait. Beaucoup,
parmi les élites, pensant en français, parlent mieux le
français que leur langue maternelle, farcie, au demeurant, de
francismes, du moins dans les villes. Pour choisir un exemple
national, â Radio-Dakar, les émissions en français sont
d'une langue plus pure que les émissions en langue vernaculaire. Il y
a mieux : il n'est pas toujours facile, pour le non initié, d'y
distinguer les voix des Sénégalais de celles des
Français.
Deuxième raison : la richesse du vocabulaire
français. On y trouve, avec l'a série des doublets --
d'origine populaire ou savante --, la multiplicité des synonymes. Je le
sais bien, contrairement à ce que croit le Français moyen, les
langues négro-africaines sont d'une richesse et d'une plasticité
remarquables. Là oit le Français emploie un mot latin pour
désigner un arbre, une périphrase pour désigner
une action, le Négro-africain emploie un seul nom ou un seul verbe
populaire. Comme l'écrit André Davesne, dans Croquis de
Brousse, on compte en wolof sept mots pour désigner la femme de
mauvaise vie quand e chercher se traduit par onze mots et
chanter par vingt D. Ainsi la version wolof
de l'Imitation de Jésus-Christ est plus nuancée, plus
belle, parce que plus rythmée, que la version française. Mais ce
qui, à première approximation, fait la force des langues
négro-africaines fait, en même temps, leur faiblesse. Ce sont des
langues poétiques. Les mots, presque toujours concrets, sont
enceints d'images, l'ordonnance des mots dans la proposition, des propositions
dans la phrase y obéit à la sensibilité plus qu'a
l'intelligibilité : aux raisons du coeur plus qu'aux raisons de la
raison. Ce qui, en définitive, fait la supériorité du
français dans le domaine considéré, c'est de nous
présenter, en outre, un vocabulaire technique et scientifique d'une
richesse non dépassée. Enfin, une profusion de ces mots
abstraits, dont nos langues manquent.
Troisième raison : la syntaxe. Parce que
pourvu d'un vocabulaire abondant, grâce, en partie, aux réserves
du latin et du grec, le français est une langue concise. Par le
même fait, c'est une langue précise et nuancée,
donc
839
536
L. S. SENGHOR
claire. Il est, partant, une langue discursive, qui place
chaque fait, chaque argument à sa place, sans en oublier un. Langue
d'analyse, le français n'est pas moins langue de synthèse. On
n'analyse pas sans synthétiser, on ne dénombre pas sans
rassembler, on ne fait pas éclater la contradiction sans la
dépasser. Si, du latin, le français n'a pas conservé toute
la rigueur technique, il a hérité toute une série de
mots-pierre d'angle, de mots-ciment, de mots-gonds. Mots-outils, les
conjonctions et locutions conjonctives lient une proposition à l'autre,
une idée à l'autre, les subordonnant l'une à l'autre.
Elles indiquent les étapes nécessaires de la pensée active
: du raisonnement. A preuve que les intellectuels noirs ont dû emprunter
ces outils au français pour vertébrer les langues vernaculaires.
A la syntaxe de juxtaposition des langues négro-africaines, s'oppose la
syntaxe de subordination du français ; à la syntaxe du concret
vécu, celle de l'abstrait pensé : pour tout dire, la syntaxe de
la raison à celle de l'émotion.
Quatrième raison : la stylistique française.
Le style français pourrait être défini comme une symbiose
de la subtilité grecque et de la rigueur latine, symbiose animée
par la passion celtique. Il est, plus qu'ordonnance, ordination. Son
génie est de puiser dans le vaste dictionnaire de l'univers pour, des
matériaux ainsi rassemblés .--- faits, émotions,
idées --, construire un monde nouveau : celui de l'Homme. Un monde
idéal et réel en même temps, parce que de l'Homme,
où toutes les choses, placées, chacune, à son rang,
convergent vers le même but, qu'elles manifestent solidairement.
C'est ainsi que la prose française -- et le
poème jusqu'aux Surréalistes -- nous a appris à nous
appuyer sur des faits et des idées pour élucider l'univers ;
mieux, pour exprimer le monde intérieur par dé-structuration
cohérente de l'univers.
Cinquième raison : l'humanisme
français. C'est, précisément, dans cette
élucidation, dans cette re-création, que consiste l'humanisme
français. Car il a l'homme comme objet de son activité. Qu'il
s'agisse du droit, de la littérature, de l'art, voire de la science, le
sceau du génie français demeure ce souci de l'Homme. Il exprime
toujours une
840
537
LANGUE DE CULTURE
morale. D'où son caractère
d'universalité, qui corrige son goût de l'individualisme.
Je sais le reproche que l'on fait à cet humanisme
de l' honnête homme : c'est un système fermé et
statique, qui se fonde sur l'équilibre. Il y a quelques années,
j'ai donné une conférence intitulée L'Humanisme de
l'Union française. Mon propos était de montrer comment, au
contact des réalités « coloniales »,
c'est-à-dire des civilisations ultra-marines, l'humanisme
français s'était enrichi, s'approfondissant en
s'élargissant, pour intégrer les valeurs de ces civilisations.
Comment il était passé de l'assimilation à la
coopération : à la symbiose. De la morale statistique
à la morale de mouvement, chère à Pierre Teilhard
de Chardin. Comme le notait Jean Daniel, à propos de l'Algérie,
dans l'Express du 28 juin 1962, colonisateurs et colonisés se
sont, en réalité, colonisés réciproquement : «
Il (le pays de France) s'est imprégné si fort des civilisations
qu'il a entendu dominer, que les colonisés lui font, aujourd'hui, un
sort à part, voyant, dans ce bourreau, une victime en puissance, dans
cet aliénateur, un aliéné, dans cet ennemi, un complice
D. Je ne veux retenir, ici, que l'apport positif de
la colonisation, qui apparaît à l'aube de l'indépendance.
L'ennemi d'hier est un complice, qui nous a enrichis en s'enrichissant à
notre contact.
gilbro
Mais il me faut, avant de finir, répondre à
la question qui m'a été, personnellement, posée. Car les
raisons que voilà sont, tout aussi bien, celles des politiques, qui
veulent mener de front le développement économique et le
développement culturel de leurs peuples respectifs pour, au-delà
du bien-être, leur assurer le plus-être.
Que représente pour moi, écrivain noir,
l'usage du français? La question mérite d'autant plus
réponse qu'on s'adresse, ici, au Poète et que j'ai défini
les langues négro-africaines « des langues poétiques
».
En répondant, je reprendrai l'argument de fait. Je
pense en français ; je m'exprime mieux en français que dans ma
langue maternelle.
841
538
L. S. SENGHOR
Il y a aussi le fait que n'importe quel enfant,
placé assez jeune dans un pays étranger, en apprend aussi
facilement la langue que les autochtones. C'est dire la placidité de
l'esprit humain et que chaque langue peut exprimer toute l'âme humaine.
Elle met seulement l'accent sur tel ou tel aspect de cette âme en la
traduisant, de surcroît, à sa manière.
Or il se trouve que le français est, contrairement
à ce qu'on a dit, une langue éminemment poétique. Non par
sa clarté, mais par sa richesse. Certes, il fut, jusqu'au XIXe
siècle, une langue de moralistes, de juristes et de diplomates : a une
langue de gentillesse et d'honnêteté ». Mais c'est alors que
Victor Hugo vint, qui, bouleversant la noble et austère ordonnance de
Malherbe, mit « ...un bonnet rouge au vieux dictionnaire ». Il
libéra, du même coup, une foule de mots-tabous :
pêle-mêle, mots concrets et mots abstraits, mots savants et mots
techniques, mots populaires et mots exotiques. Et puis vinrent, un
siècle plus tard, les Surréalistes, qui ne se contentèrent
pas de mettre à sac le jardin à la française du
poème-discours. Ils firent sauter tous les mots-gonds, pour nous livrer
des poèmes nus, haletant du rythme même de l'âme. Ils
avaient retrouvé la syntaxe nègre de la juxtaposition, où
les mots, télescopés, jaillissent en flammes de métaphores
: de symboles. Le terrain, comme on le voit, était
préparé pour une poésie nègre de langue f
rançaise.
Bien sûr, me dira-t-on, mais quel était
l'avantage du français pour ceux qui avaient la maîtrise d'une
langue négro-africaine. L'avantage, c'était, essentiellement, la
richesse du vocabulaire et le fait que le français est une langue d'une
audience internationale. Nous laisserons de côté ce dernier fait,
qui est assez patent pour ne pas mériter explication.
L'avantage du français était, est de nous offrir un
choix : « Le Noir, écrit André Davesne dans Croquis de
Brousse, est ainsi préparé, par ses traditions
verbales, à distinguer, dans les mots que lui présente la langue
française, deux valeurs : l'une abstraite et intellectuelle, la
signification ; l'autre concrète et sensuelle, la musicalité. Si
donc il aborde, sans précaution, l'apprentissage de notre langue, il y
puisera une double collection de mots : les uns, qui désignent quelque
chose de tangible, un objet, par exemple, et qui ne peuvent être
détournés de leur sens ;
842
539
LANGUE DE CULTURE
les autres d'un usage moins constant, dont la
signification est trop mystérieuse ou trop a intellectuelle
» pour devenir déterminante dans l'emploi qu'on en doit faire, mais
qui méritent d'être utilisés à cause de leur
tonalité et de leur résonance ».
De ce qui est instinctif chez les illettrés, nous
avons pu faire une polesis, une méthode délibérée
de création. Le problème, au demeurant, est plus complexe que ne
le dit Davesne, Ce sont tous les mots français qui, par viol et
retournement, peuvent allumer la flamme de la métaphore. Les mots les
plus a intellectuels », il suffit de les déraciner, en creusant
leur étymologie, pour les livrer au soleil du symbole.
Comme nous l'avons vu, le vocabulaire n'épuise pas
les vertus du français. La stylistique, en particulier, est occasion de
pêches miraculeuses. Pour en revenir à la musique des mots, le
français offre une variété de timbres dont on peut tirer
tous les effets : de la douceur des Alizés, la nuit, sur les hautes
palmes, à la violence fulgurante de la foudre sur les têtes des
baobabs. Il n'y a pas jusqu'aux rythmes du français qui n'offrent des
ressources insoupçonnées. Au demeurant, le rythme binaire du vers
classique peut rendre le halètement despotique du tamtam. Il suffit de
le bousculer légèrement pour faire surgir, au-dessus du ryhme de
base, contre-temps et syncopes.
.a.
Que conclure, de tout cela, sinon que nous, politiques
noirs, nous, écrivains noirs, nous sentons, pour le moins, aussi libres
à l'intérieur du français que de nos langues maternelles.
Plus libres, en vérité, puisque la liberté se mesure
à la puissance de l'outil : à la force de
création.
Il n'est pas question de renier les langues africaines.
Pendant des siècles, peut-être des millénaires, elles
seront encore parlées, exprimant les immensités abyssales de la
Négritude. Nous continuerons d'y pêcher les
images-archétypes : les poissons des grandes profondeurs. Il est
question d'exprimer notre authenticité de métis culturels,
d'hommes
843
540
L. S. SENGHOR
du XXe siècle. Au moment que, par
totalisation et socialisation, se constriut la Civilisation de l'Universel,
il est, d'un mot, question de nous servir de ce merveilleux outil,
trouvé dans les décombres du Régime colonial. De cet outil
qu'est la langue française.
La Francophonie, c'est cet Humanisme intégral, qui
se tisse autour de la terre : cette symbiose des « énergies
dormantes » de tous les continents, de toutes les races, qui se
réveillent à leur chaleur complémentaire. «
La France, me disait un délégué du F.L.N., c'est vous,
c'est moi : c'est la Culture française D.
Renversons la proposition pour être complets : la
Négritude, l'Arabisme, c'est aussi vous, Français de l'Hexagone.
Nos valeurs font battre, maintenant, les Iivres que vous lisez, la langue que
vous parlez : le français, Soleil qui brille hors de l'Hexagone.
Léopold Sédar SENGHOR.
XI- Annexe 11
LES AFRICANISMES DANS LA POÉSIE DE
SENGHOR
Pour le lexique (la signification des mots), nous vous prions
de vous référer au « Lexique de Senghor » donné
à la fin de son oeuvre poétique. À l'instar de ce lexique,
vous pouvez également consulter l'article de Jean-René Bourrel
(Lexique de L.S. Senghor : Chants d'ombre, Hosties noires, Éthiopiques,
Nocturnes, in : L'information Grammaticale, N.33, 1987, pp. 27-34) ou le
glossaire proposé par Sylvia Washington Bâ dans son travail sur
The concept of Negritude in the poetry of Léopold Sédar
Senghor.
Albiziazygia
Almadie
Almamy
Arfang de Siga
Askias (du Songhoï)
Atar
Bakel
Balangar
Balafong(s)
Bambara
Banakh
Bandafassy
Baobab(s)
Baol
Baoulé
Belborg
Beleup de Kaymôr
Bengali
Berre
Biram-Dénegn-ô
Biram Déguen
Bir Mougrein
Bobo
Bolong
Boundou
Bouré
Bour-Sine Salmonn
Cactées
Cafre
Caïcedrat (kaïcedrat)
Canas
Cassia(s)
Cauris
Cayor
Chaka
Chéchias
541
Combassou
Congo
Couscous
Dan(s)
Dang
Darbouka
Dargui
Demba-Dupont
Dêti
Diakhâw (Djakhâw)
Diombeutt Mbodj
Diogoye (Dyogoye)
Dior
Djenné
Dyâli
Dyallo
Dyêri
Dyilôr
Dyôbène
Dyônewâr
Dyong
Dyouf-le-Tutoyé
Dyoung-dyoung
Draa
Élé-yâye
Eléyâi bisimlâi
Eléyâye bisimlâye
Elissa
Fadyoutt
Fall
Fân
Fa'oye
Ferlo
Fimla
Fôn
Fongolimbi
Fouta
Fouta-Danga
Fouta-Djallong
Gâbou
Galam
Gandyol
Glasgow
Gongo
Gongo-Moussa
Gonolek
Gorong
Grand-Dyarâf
Gretas
Grimaldi
Griot(s)
Guélowâr
Guelwars (Guelwârs)
Guimm
Harmattan
Hivernage
Issanoussi
Joal
Kabyle
Kaïcedrat (Caïcedrat)
Kam-Dyamé
Kâna Mâyâi féla-x-am
Kaolack
Kaso faé nyapógma dyèganum
Katamague
Kaya-Magan
Kaymôr
Keïta
Khakhams
Khalams
Khasonkee
Kilimandjaro
Kintar
Kôba
Kola
Koli Ngom
Komenjahs
Kôra(s)
Kori
Kôriste
Kor Sanou
Kor Siga
Kotye-Barma
Koufountine
Koumba
Koumba-Betty
Koumba N'Dofène
542
Koumba Ndofène Diouf
Koumba Tam
Kouss
Koyaté
Kraals
Ksour
Lamarque
Lêlés
Lilanga
Mâbo
Mahé-kor
Malinké
Mamanguedj
Mamelles
Mandiago
Mângi
Maska
Maure
Mayâï
Mbalakhs
Mbaye Dyôb
Mbarodi
Mbissel
Mbogou
Méhari
Ming
Mithkals
Mogador
Mogho-Naba
Moundé
Moussoro
Mûsê-mbûban
Naï
Nânio
Ndeïsane
N'deissane
N'deïssane
Ndeundeus
Ndedâ'k tamâ'k sabar-ê
Ndessé
Ndialakhar
Ndiongolor
Ndyaga-bâss
Ndyaga-rîtî
Ndyâye
Ndyûlê mômé
Ngâ
Ngâbou
Ngal
Ngalam
Ngas-o-bil
Ngasobil
Ngom
Niombato
Niger
Nolivé
Nyaoutt Mbodye
Nydyulê mômé
Nyominka
Oud
Ouzougou
Paragnessés
Peul
Pobéguin
Poèré
Pongwé
Poto-poto (potopoto)
Poullo
Pulel hokku soko haraani
Quanoun
Rebabs
Rip
Rîti
Rokhaya
Saba
Sabars
Saïte
Sall
Saloum
Samba Dyouma
Saras
Satang
Saudades
Séco
Sérères
Sèvre-Babylone
Siga Diouf Guignane
Signares
Simal
Simoun
Sine
Siny
Sîra-Badral
Sitôr
Shiva
Somali
Soni Ali
543
Sopè
Sorong
Soyan
Tabalas
Taga
Tagant
Tâgu-gûtut
Taj Mahal
Talbé
Talmbatts
Tama(s)
Tamsir
Tamtam (tam-tam)s
Tanns
Tata(s)
Tar
Teddungal
Tening-Ndyaré
Tokor
Tokô'Waly
Tondibi
Toubab
Toubab-Djalaw
Toutankhamon
Trarza
Tyagoum-Ndyaré
Tyâné
Tyaroye
Tyédo
Viguelwar de Kolnodick
Waï
Wâlo
Wa-wa-wâ
Warf
Woi
Woï
Wôi
Wolof
Woy
Yâram bi
Yêlas
Yokohama
Zambèze
Zoulou
544
INDEX DES THÈMES
|
|
|
322, 337, 338, 342, 349, 362, 383, 384,
|
385,
|
A
|
|
|
386, 459
|
|
Accueil · 11, 16, 17, 157, 356,
|
456
|
|
|
|
C
|
|
|
|
|
Acculturation · 215, 219, 355,
|
356,
|
366,
|
|
|
367, 372, 374, 392, 454, 460
|
|
|
Civilisation 16, 17, 18, 24, 25, 26, 29,
|
40,
|
Acculturée · 29, 116, 330, 356, 365, 366,
367, 368, 371, 372, 373, 374, 375, 376, 455, 460
Africanité · 86, 184, 299, 306, 463 Assimilation 42,
43, 47, 48, 50, 64, 65, 80,
|
41, 48, 61, 62, 67, 69, 70, 74, 76, 77, 78, 84, 87, 88, 89, 90,
91, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 104, 105, 108, 109, 111, 113, 114, 115, 116,
117, 122, 125, 130, 131, 132, 133, 136, 139, 140, 142, 143, 146, 147,
|
81, 87, 101, 109, 113, 1185, 129,
|
135,
|
163,
|
149,
|
157,
|
160,
|
164,
|
166,
|
167,
|
168,
|
172,
|
164, 169,
|
205,
|
213,
|
256,
|
259, 262,
|
283,
|
300,
|
173,
|
184,
|
186,
|
188,
|
189,
|
198,
|
199,
|
200,
|
316, 318,
|
319,
|
320,
|
355,
|
356, 366,
|
367,
|
369,
|
201,
|
202,
|
204,
|
208,
|
209,
|
212,
|
219,
|
221,
|
370, 371,
|
372,
|
374,
|
415,
|
425, 426,
|
427,
|
458
|
229,
|
230,
|
241
|
243,
|
244,
|
251,
|
254,
|
255,
|
Assimilé 43,
|
115,
|
120,
|
134, 161,
|
164,
|
176,
|
256,
|
257,
|
258,
|
259,
|
260,
|
261,
|
262,
|
263,
|
261, 297,
|
346,
|
356,
|
371,
|
372, 374,
|
375,
|
400,
|
264,
|
265,
|
266,
|
272,
|
277,
|
279,
|
283,
|
284,
|
416, 460
|
|
|
|
|
|
|
285,
|
287,
|
288,
|
294,
|
295,
|
296,
|
297,
|
299,
|
|
|
|
|
|
|
|
300,
|
301,
|
302,
|
303,
|
304,
|
305,
|
306,
|
310,
|
B
|
|
|
|
|
|
|
311,
|
312,
|
313,
|
314,
|
315,
|
316,
|
317,
|
318,
|
|
|
|
|
|
|
|
319,
|
320,
|
321,
|
322,
|
334,
|
341,
|
342,
|
343,
|
Barrière 126,
|
245,
|
311,
|
312, 313,
|
317,
|
321,
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
354,
|
373,
|
392,
|
393,
|
409,
|
412,
|
415,
|
418,
|
375
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
420,
|
421,
|
422,
|
427,
|
429,
|
432,
|
435,
|
436,
|
Blanc 43, 47, 60,
|
68,
|
95, 102,
|
104,
|
132,
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
437,
|
450,
|
451,
|
455,
|
458,
|
459,
|
460,
|
461,
|
150, 153,
|
156,
|
160,
|
161,
|
162, 163,
|
164,
|
165,
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
462,
|
463,
|
464,
|
465
|
|
|
|
|
166, 168,
|
172,
|
173,
|
178,
|
180, 181,
|
183,
|
185,
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Civilisation de l'Universel ·
|
17, 18, 24,
|
186, 189,
|
191,
|
192,
|
200,
|
201, 203,
|
204,
|
210,
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
25, 26, 26, 29,
|
41,
|
61, 67, 69,
|
70, 76, 77,
|
212, 214,
|
215,
|
216,
|
221,
|
222, 244,
|
257,
|
262,
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
78, 89, 91, 94,
|
95,
|
96, 97, 98,
|
99,
|
109, 114,
|
280, 289,
|
304,
|
306,
|
308,
|
309, 310,
|
313,
|
318,
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
115, 116, 122,
|
125, 130, 131,
|
132, 136,
|
139, 140, 142, 143, 146, 147, 149, 168, 188, 189,200, 201,
202, 204, 221, 229, 230, 241, 243, 244, 245, 251, 254, 256, 257, 258, 259, 260,
263, 264, 266, 272, 277, 283, 284, 285, 287, 288, 295, 297, 300, 301, 302, 304,
305, 306, 310, 311, 312, 313, 314, 315, 316, 317, 319, 320, 321, 322, 341, 342,
343, 354, 393, 409, 412, 420 432, 450, 455, 458, 459, 460, 462, 463, 464
Civilisation universelle · 24, 131, 279, 287,
296, 299, 303, 312, 313, 314, 316, 317, 320
Civilisé · 44, 128, 135, 161, 163, 303, 346, 368,
369
Colonisation · 13, 16, 17, 24, 28, 42, 51, 59, 61, 78,
79, 113, 117, 118, 127, 150, 151, 153, 154, 155, 156, 157, 158, 159, 164, 165,
166, 167, 168, 169, 184, 198, 203, 205, 206, 210, 214, 223, 227, 245, 256, 257,
259, 262, 315, 318, 319, 333, 339, 354, 366, 369, 407, 409
Colonisé · 48, 49, 54, 59, 60, 61, 62, 69, 71, 77,
78, 79, 80, 84, 86, 101, 127, 132, 153, 163, 164, 285, 346, 369, 373, 426,
427
Communauté · 11, 12, 14, 27, 28, 33, 35, 36, 39, 40,
41, 47, 48, 50, 52, 55, 56, 57, 58, 60, 62, 63, 64, 65, 66, 68, 70, 71, 76, 79,
80, 82, 83, 84, 85, 86, 88, 98, 98, 100, 111, 114, 133, 135, 138, 139, 148,
169, 175, 180, 184, 185, 186, 200, 203, 210, 221, 224, 225, 249, 258, 261, 266,
269, 270, 284, 287, 298, 299, 305, 309, 310,
545
311, 312, 314, 316, 317, 318, 319, 321, 325, 328, 329, 332, 342,
365, 390, 410, 455, 458, 459, 462, 463, 465 Complémentaire · 89,
92, 121, 122, 145, 200, 208, 231, 256, 304, 305, 357, 432, 448, 458, 459, 460,
463
Complémentarité · 40, 56, 62, 66, 75, 86, 89,
99, 111, 188, 202, 264, 279, 281, 300, 305, 313, 316, 321, 375, 442, 443, 457,
461
Concept · 9, 10, 11, 13, 14, 15, 17, 18, 19, 22, 23, 27, 30,
31, 34, 35, 36, 37, 39, 40, 50, 51, 58, 63, 66, 68, 69, 70, 72, 74, 75, 76, 78,
80, 101,107, 110, 113, 114, 117, 119, 120, 122, 123, 131, 135, 136, 139, 142,
146, 149, 150, 151, 168, 169, 172, 178, 185, 188, 200, 204, 207, 223, 227, 237,
245, 255, 261, 285, 300, 311, 313, 316, 321, 332, 333, 342, 343, 354, 358, 374,
379, 404, 407, 409, 410, 412, 425, 429, 439, 433, 452, 454, 457, 458, 462, 463,
464, 465
Conception · 10,11, 16, 19, 26, 27, 28, 35, 54, 66, 71, 72,
74, 84, 86, 87, 88, 90, 97, 98, 107, 109, 115, 116, 118, 127, 130, 131, 133,
134, 135, 136, 138, 148, 152, 167, 169, 180, 187, 188, 197, 204, 207, 213, 221,
222, 236, 242, 259, 260, 261, 263, 264, 266, 267, 269, 270, 271, 285, 287, 288,
303, 328, 329, 333, 345, 410, 413, 417, 431, 433, 434, 435, 447, 454, 455, 457,
461, 462
Culture · 11, 14, 16, 17, 18, 19, 24, 25, 26,
27, 28, 29, 33, 35, 39, 49, 54, 55, 56, 57,
546
58, 59, 60, 61,
72, 73, 74, 75,
90, 91, 92, 95,
|
62, 64, 65, 67,
76, 77, 84, 85,
96, 97, 98, 99,
|
68, 69, 70,
86, 88, 89,
100, 101,
|
Culture d'origine · 17, 28, 109,
139, 366, 367, 368, 371, 372, Culture française
· 51, 54, 55,
|
112, 121, 376, 402
56, 70, 76,
|
102,
|
103,
|
104,
|
105,
|
106,
|
107,
|
108,
|
109,
|
101, 104, 106,
|
109, 113, 115,
|
122, 124,
|
110,
|
111,
|
112,
|
113,
|
114,
|
115,
|
116,
|
117,
|
125, 138, 148,
|
164, 202, 203,
|
238, 322,
|
118,
|
119,
|
120,
|
121,
|
122,
|
123,
|
124,
|
125,
|
328, 369, 371,
|
373, 392, 404,
|
415, 419,
|
126,
|
127,
|
128,
|
129,
|
130,
|
131,
|
132,
|
133,
|
422, 423, 425,
|
426, 429, 452
|
|
134,
|
135,
|
136,
|
137,
|
138,
|
139,
|
140,
|
142,
|
Culturelle · 9,
|
10, 11, 16, 27,
|
29, 37, 40,
|
|
143,
|
146,
|
147,
|
148,
|
149,
|
153,
|
159,
|
160,
|
53, 56, 57, 58,
|
59, 61, 63, 64,
|
65, 67, 68,
|
161,
|
163,
|
164,
|
166,
|
168,
|
177,
|
180,
|
185,
|
69, 72, 73, 75,
|
77, 78, 79, 83,
|
84, 85, 86,
|
186,
|
187,
|
189,
|
199,
|
200,
|
202,
|
203,
|
204,
|
87, 88, 89, 90,
|
91, 92, 93, 94,
|
95, 96, 97,
|
207,
|
208,
|
209,
|
212,
|
218,
|
219,
|
221,
|
226,
|
98, 99, 100, 101, 102, 103, 105, 106, 108,
|
227,
|
228,
|
229,
|
230,
|
236,
|
238,
|
239,
|
240,
|
111, 112, 113,
|
114, 117, 118,
|
119, 120,
|
241,
|
245,
|
250,
|
251,
|
254,
|
255,
|
256,
|
257,
|
121, 122, 124,
|
125, 126, 127,
|
129, 132,
|
258,
|
259,
|
260,
|
261,
|
262,
|
263,
|
264,
|
265,
|
133, 134, 135,
|
136, 137, 138,
|
139, 140,
|
266,
|
267,
|
269,
|
270,
|
271,
|
272,
|
273,
|
275,
|
142, 143, 146,
|
147, 148, 149,
|
150, 164,
|
276,
|
279,
|
280,
|
281,
|
282,
|
283,
|
284,
|
285,
|
166, 167, 168,
|
172, 185, 186,
|
202, 205,
|
286,
|
287,
|
288,
|
289,
|
294,
|
295,
|
296,
|
297,
|
208, 209, 210,
|
220, 221, 222,
|
227, 230,
|
298,
|
299,
|
300,
|
301,
|
303,
|
304,
|
305,
|
307,
|
236, 240, 241,
|
245, 251, 254,
|
255, 256,
|
311,
|
312,
|
313,
|
314,
|
315,
|
316,
|
317,
|
319,
|
257, 258, 259,
|
262, 264, 266,
|
272, 281,
|
320,
|
321,
|
322,
|
325,
|
328,
|
329,
|
339,
|
353,
|
283 284, 286,
|
287, 288, 289,
|
294, 295,
|
355,
|
356,
|
361,
|
364,
|
366,
|
367,
|
369,
|
370,
|
296, 297, 298,
|
299, 300, 302,
|
305, 311,
|
371,
|
372,
|
373,
|
374,
|
375,
|
376,
|
380,
|
389,
|
312, 313, 314,
|
315, 316, 317,
|
318, 320,
|
391,
|
392,
|
393,
|
399,
|
402,
|
403,
|
404,
|
411,
|
321, 325, 327,
|
328, 330, 341,
|
345, 355,
|
412,
|
415,
|
419,
|
422,
|
423,
|
425,
|
426,
|
428,
|
354, 355, 356,
|
357, 358, 363,
|
367, 370,
|
429,
|
451,
|
452,
|
454,
|
455,
|
456,
|
458,
|
459,
|
371, 373, 374,
|
375, 376, 379,
|
380, 390,
|
460,
|
461,
|
462,
|
463,
|
464,
|
465
|
|
|
391, 392, 393,
|
399, 400, 402,
|
403, 405,
|
Culture africaine · 17, 24, 25, 29, 85, 1047,
|
406, 408, 415,
|
416, 418, 420,
|
425, 426,
|
115,
|
117,
|
118,
|
122,
|
131,
|
132,
|
138,
|
138,
|
427, 428, 431,
|
450, 454, 455,
|
458, 459,
|
147,
|
202,
|
227,
|
228,
|
238,
|
259,
|
260,
|
262,
|
460, 461, 462,
|
465
|
|
263,
|
264,
|
265,
|
266,
|
267,
|
269,
|
270,
|
272,
|
|
|
|
273,
|
275,
|
276,
|
279,
|
280,
|
281,
|
282,
|
285,
|
|
|
|
315,
|
320,
|
322,
|
339,
|
373,
|
374,
|
375,
|
422,
|
|
|
|
454
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
D
Décolonisation · 9,33, 34, 37, 80, 129, 138,
154, 163, 245, 407, 131, 462
Déculturation · 150, 215, 219, 355, 373, 375
Déculturé · 150, 164, 165, 223, 228, 375
Déraciné 113, 150, 228, 230, 272, 275, 355
E
Énonciation · 28, 144, 145, 152, 209, 214,
227, 246, 250 264, 330
Enraciné · 112, 116, 270, 271, 332, 335, 371, 399,
424, 456
Enracinement · 26,
98, 104, 105, 106, 107,
|
27, 35, 50, 91, 92, 97,
109, 110, 111, 112,
|
113,
|
114,
|
117,
|
119,
|
120,
|
121,
|
122,
|
123,
|
129,
|
139,
|
146,
|
281,
|
282,
|
283,
|
284,
|
285,
|
286,
|
294,
|
301,
|
305,
|
320,
|
321,
|
322,
|
333,
|
371,
|
423,
|
424,
|
426,
|
457,
|
458
|
|
|
Ethnie · 263, 269, 301,
|
332,
|
345,
|
350,
|
352,
|
389, 424, 455
|
|
|
|
|
Exil · 57, 58, 176, 177,
|
214,
|
215,
|
267,
|
331,
|
353, 367
|
|
|
|
|
F
|
|
|
|
|
Françafrique 467, 468
|
|
|
|
|
Français africanisé · 28,
|
29,
|
147,
|
224,
|
225,
|
226,
|
227,
|
230,
|
231,
|
232,
|
235,
|
236,
|
238,
|
239,
|
240,
|
241,
|
258,
|
259,
|
319,
|
321,
|
322,
|
377,
|
432
|
|
|
|
|
|
|
Francité · 18, 27, 34, 40, 69, 70, 74, 75, 77,
85, 86, 87, 89, 91, 93, 94, 95, 96, 98, 99,
109,
|
114,
|
115,
|
119,
|
129,
|
132,
|
136,
|
138,
|
139,
|
143,
|
146,
|
149,
|
299,
|
306,
|
328,
|
390,
|
392,
|
415,
|
423,
|
424,
|
425,
|
426,
|
427,
|
429,
|
430,
|
432,
|
435,
|
452,
|
455,
|
458,
|
459,
|
460,
|
461,
|
463
|
|
|
|
|
|
|
Francophone · 9, 10, 18, 29, 30, 32, 33, 36,
38, 39, 40, 43, 49, 50, 51, 53, 54, 57, 59,
61, 63, 64, 65, 66, 68, 73, 76, 78, 85, 90,
95, 105, 106, 107, 113, 115, 119, 121, 122,
|
123,
|
125,
|
126,
|
127,
|
129,
|
133,
|
134,
|
135,
|
136,
|
138,
|
148,
|
160,
|
169,
|
207,
|
208,
|
224,
|
230,
|
236,
|
239,
|
240,
|
242,
|
259,
|
263,
|
264,
|
299,
|
301,
|
312,
|
313,
|
314,
|
315,
|
316,
|
317,
|
318,
|
319,
|
320,
|
321,
|
322,
|
324,
|
326,
|
327,
|
328,
|
329,
|
330,
|
331,
|
342,
|
343,
|
350,
|
351,
|
352,
|
353,
|
355,
|
356,
|
358,
|
360,
|
361,
|
370,
|
371,
|
372,
|
373,
|
374,
|
375,
|
376,
|
377,
|
378,
|
379,
|
380,
|
387,
|
388,
|
389,
|
390,
|
392,
|
393,
|
400,
|
401,
|
402,
|
403,
|
404,
|
405,
|
406,
|
407,
|
408,
|
409,
|
410,
|
411,
|
412,
|
413,
|
414,
|
415,
|
416,
|
417,
|
418,
|
419,
|
420,
|
421,
|
422,
|
423,
|
424,
|
425,
|
427,
|
429,
|
430,
|
431,
|
432,
|
433
|
434,
|
435,
|
436,
|
437,
|
438,
|
439,
|
441,
|
442,
|
443,
|
444,
|
446,
|
447,
|
449,
|
450,
|
451,
|
452,
|
453,
|
454,
|
455,
|
456,
|
457,
|
459,
|
460,
|
461,
|
462,
|
463
|
|
|
|
|
|
|
|
Francophonie · 9,
|
10,
|
11,
|
12,
|
13,
|
14,
|
15,
|
16,
|
17,
|
18,
|
19,
|
22,
|
23,
|
26,
|
27,
|
28,
|
29,
|
30,
|
31,
|
32,
|
33,
|
34,
|
35,
|
36,
|
37,
|
38,
|
39,
|
40,
|
41,
|
42,
|
43,
|
47,
|
48,
|
49,
|
50,
|
51,
|
52,
|
53,
|
54,
|
55,
|
56,
|
57,
|
58,
|
59,
|
60,
|
61,
|
62,
|
63,
|
64,
|
65,
|
66,
|
67,
|
68,
|
69,
|
70,
|
71,
|
72,
|
73,
|
74,
|
75,
|
76,
|
77,
|
78,
|
79,
|
80,
|
82,
|
83,
|
84,
|
85,
|
86,
|
87,
|
88,
|
89,
|
90,
|
91,
|
92,
|
93,
|
94,
|
95,
|
96,
|
97,
|
98,
|
99,
|
100,
|
547
101,
|
102,
|
103,
|
104,
|
105,
|
106,
|
107,
|
108,
|
109,
|
110,
|
111,
|
112,
|
113,
|
114,
|
115,
|
116,
|
117,
|
118,
|
119,
|
120,
|
121,
|
122,
|
123,
|
124,
|
125,
|
126,
|
127,
|
128,
|
129,
|
130,
|
131,
|
132,
|
133,
|
134,
|
135,
|
136,
|
137,
|
138,
|
139,
|
140,
|
141,
|
142,
|
143,
|
144,
|
146,
|
147,
|
148,
|
149,
|
150,
|
151,
|
152,
|
153,
|
154,
|
155,
|
156,
|
157,
|
158,
|
159,
|
160,
|
161,
|
162,
|
163,
|
164,
|
165,
|
166,
|
167,
|
168,
|
169,
|
170,
|
171,
|
172,
|
173,
|
174,
|
175,
|
176,
|
177,
|
178,
|
179,
|
180,
|
181,
|
182,
|
183,
|
184,
|
185,
|
186,
|
187,
|
188,
|
196,
|
198,
|
199,
|
200,
|
201,
|
202,
|
203,
|
204,
|
205,
|
206,
|
207,
|
208,
|
209,
|
211,
|
212,
|
215,
|
216,
|
217,
|
218,
|
219,
|
220,
|
221,
|
222,
|
223,
|
224,
|
225,
|
226,
|
228,
|
229,
|
230,
|
235,
|
236,
|
237,
|
238,
|
239,
|
240,
|
241,
|
242,
|
244,
|
250,
|
252,
|
253,
|
254,
|
255,
|
256,
|
257,
|
258,
|
259,
|
260,
|
261,
|
262,
|
263,
|
265,
|
266,
|
276,
|
280,
|
282,
|
283,
|
285,
|
286,
|
287,
|
294,
|
295,
|
296,
|
297,
|
298,
|
299,
|
300,
|
303,
|
304,
|
310,
|
311,
|
312,
|
313,
|
314,
|
315,
|
316,
|
317,
|
318,
|
319,
|
320,
|
321,
|
322,
|
325,
|
326,
|
327,
|
328,
|
331,
|
340,
|
341,
|
342,
|
349,
|
350,
|
351,
|
352,
|
353,
|
372,
|
373,
|
376,
|
378,
|
379,
|
380,
|
381,
|
384,
|
386,
|
387,
|
388,
|
389,
|
391,
|
392,
|
401,
|
402,
|
403,
|
405,
|
406,
|
407,
|
408,
|
409,
|
410,
|
411,
|
424,
|
425,
|
426,
|
430,
|
433,
|
453,
|
454,
|
456,
|
457,
|
458,
|
459,
|
460,
|
461,
|
463,
|
464,
|
465
|
|
Fraternel · 68,
|
94, 149, 165, 166, 168,
|
170,
|
174,
|
177,
|
194,
|
195,
|
196,
|
220,
|
248,
|
304,
|
307,
|
309,
|
382,
|
402,
|
457
|
|
|
|
Fraternelle · 11, 28, 68,
|
168,
|
175,
|
180,
|
184,
|
185,
|
193,
|
195,
|
220,
|
276,
|
277,
|
281,
|
305,
|
306,
|
309,
|
312,
|
313,
|
320,
|
461
|
|
Fraternité · 24, 30,
95, 148, 149, 153, 164,
|
49, 61, 68, 69,
169, 173,
|
75, 86,
175, 179,
|
180,
|
182,
|
183,
|
184,
|
185,
|
186,
|
187,
|
189,
|
190,
|
191,
|
192,
|
194,
|
196,
|
200,
|
201,
|
203,
|
205,
|
216,
|
221,
|
260,
|
278,
|
289,
|
299,
|
303,
|
305,
|
307,
|
310,
|
316,
|
318,
|
320,
|
321,
|
327,
|
383,
|
384,
|
385,
|
387,
|
388,
|
389,
|
390,
|
411,
|
463
|
|
|
|
|
|
|
|
Frontière · 62, 105,
|
126,
|
299,
|
306
|
310,
|
312,
|
313,
|
314,
|
317,
|
321,
|
327,
|
403,
|
411,
|
459,
|
461,
|
463,
|
464
|
|
|
|
|
H
|
|
|
|
|
|
|
|
Humanisme · 29, 40, 56, 73, 74, 75, 76,
77, 78, 79, 84,
|
86, 88, 89, 90,
|
91, 92, 93,
|
94, 95, 97, 99,
|
101,
|
129,
|
130,
|
133,
|
139,
|
159,
|
186,
|
187,
|
199,
|
200,
|
204,
|
209,
|
212,
|
213,
|
216,
|
219,
|
221,
|
255,
|
257,
|
258,
|
259,
|
261,
|
263,
|
267,
|
270,
|
273,
|
276,
|
279,
|
281,
|
283,
|
284,
|
286,
|
287,
|
297,
|
298,
|
305,
|
306,
|
313,
|
314,
|
315,
|
316,
|
317,
|
319,
|
320,
|
321,
|
322,
|
329,
|
241,
|
342,
|
379,
|
382,
|
385,
|
386,
|
388,
|
389,
|
390,
|
392,
|
402,
|
420,
|
438,
|
455,
|
460,
|
461
|
|
|
|
|
|
|
Humaniste · 9, 79,
|
85, 90, 98,
|
99,
|
100,
|
111,
|
125,
|
133,
|
146,
|
164,
|
174,
|
222,
|
223,
|
256,
|
257,
|
258,
|
272,
|
285,
|
288,
|
301,
|
313,
|
316,
|
319,
|
320,
|
330,
|
379,
|
380,
|
381,
|
382,
|
383,
|
384,
|
385,
|
386,
|
387,
|
388,
|
389,
|
390,
|
402,
|
403,
|
421,
|
451,
|
455,
|
456,
|
459,
|
460,
|
462
|
|
|
|
|
|
|
|
548
I
Identité · 12, 16, 24, 29,
88, 90, 92, 94, 96, 101, 102,
|
30, 45, 59, 61, 79,
103, 105, 106,
|
108,
|
109,
|
113,
|
115,
|
116,
|
119,
|
120,
|
121,
|
136,
|
138,
|
139,
|
149,
|
160,
|
163,
|
165,
|
167,
|
168,
|
199,
|
202,
|
205,
|
206,
|
207,
|
225,
|
230,
|
231,
|
240,
|
242,
|
256,
|
259,
|
262,
|
283,
|
284,
|
286,
|
294,
|
295,
|
299,
|
304,
|
313,
|
314,
|
315,
|
316,
|
317,
|
320,
|
322,
|
324,
|
325,
|
326,
|
327,
|
328,
|
329,
|
330,
|
331,
|
332,
|
333,
|
334,
|
335,
|
336,
|
340,
|
341,
|
342,
|
343,
|
344,
|
345,
|
346,
|
347,
|
348,
|
349,
|
350,
|
351,
|
352,
|
353,
|
354,
|
355,
|
356,
|
357,
|
358,
|
359,
|
360,
|
361,
|
362,
|
363,
|
364,
|
365,
|
366,
|
367,
|
368,
|
371,
|
372,
|
373,
|
374,
|
375,
|
376,
|
377,
|
378,
|
379,
|
380,
|
381,
|
382,
|
383,
|
386,
|
387,
|
388,
|
389,
|
390,
|
391,
|
392,
|
393,
|
399,
|
400,
|
402,
|
403,
|
404,
|
405,
|
406,
|
409,
|
428,
|
454,
|
455,
|
456,
|
458,
|
460,
|
462
|
|
|
|
|
|
|
Identité acculturée · 29, 330, 356, 365,
366, 367, 368, 371, 372, 373, 374, 375, 376, 455, 460
Identité constituée · 29, 353, 363, 375, 460
Identité culturelle · 27, 79, 90, 94, 106, 113, 119, 120, 121, 230,
240, 256, 262, 283, 294, 295, 299, 316, 317, 320, 328, 355, 356, 373, 374, 375,
379, 380, 390, 391, 392, 393, 399, 400, 402, 403, 405,
406, 455, 456
Identité francophone · 29, 30, 242, 259, 322, 326,
327, 328, 329, 330, 342, 343, 350, 351, 356, 358, 371, 372, 373, 374, 375, 376,
377, 378, 379, 380, 387, 390,
400, 402, 403, 404, 405,
|
454,
|
455,
|
456,
|
460, 462
|
|
|
|
Identité humaniste · 380,
|
381,
|
382,
|
383,
|
386, 387, 388, 389, 402,
|
403,
|
455
|
|
Identité rhizomique · 29, 329,
|
331,
|
332,
|
333, 334, 340, 341, 343,
|
344,
|
345,
|
346,
|
349, 350, 351, 352, 454,
|
460
|
|
|
L
|
|
|
|
Langue · 9,
|
10,
|
111, 14, 15, 16, 18, 24, 27,
|
28,
|
30,
|
32,
|
33,
|
35,
|
36,
|
37,
|
38,
|
39,
|
40,
|
41,
|
42,
|
43,
|
44,
|
45,
|
46,
|
47,
|
48,
|
49,
|
50,
|
51,
|
52,
|
53,
|
54,
|
56,
|
57,
|
58,
|
59,
|
60,
|
61,
|
63,
|
64,
|
65,
|
69,
|
72,
|
73,
|
74,
|
76,
|
77,
|
78,
|
79,
|
83,
|
84,
|
85,
|
86,
|
89,
|
90,
|
91,
|
92,
|
93,
|
95,
|
96,
|
97,
|
98,
|
99,
|
100,
|
101,
|
102,
|
103,
|
104,
|
105,
|
106,
|
107,
|
109,
|
110,
|
111,
|
112,
|
113,
|
114,
|
115,
|
117,
|
|
119,
|
120,
|
121,
|
122,
|
124,
|
125,
|
126,
|
127,
|
128,
|
129,
|
130,
|
132,
|
133,
|
134,
|
135,
|
136,
|
138,
|
140,
|
142,
|
145,
|
146,
|
147,
|
148,
|
149,
|
150,
|
153,
|
158,
|
160,
|
161,
|
163,
|
165,
|
168,
|
185,
|
203,
|
205,
|
206,
|
207,
|
208,
|
209,
|
210,
|
212,
|
213,
|
214,
|
215,
|
216,
|
217,
|
218,
|
219,
|
220,
|
221,
|
222,
|
223,
|
224,
|
225,
|
226,
|
227,
|
228,
|
229,
|
230,
|
231,
|
232,
|
233,
|
234,
|
235,
|
236,
|
237,
|
238,
|
239,
|
240,
|
241,
|
245,
|
246,
|
249,
|
258,
|
259,
|
260,
|
264,
|
274,
|
287,
|
297,
|
307,
|
311,
|
312,
|
314,
|
319,
|
321,
|
322,
|
326,
|
327,
|
328,
|
329,
|
349,
|
351,
|
353,
|
369,
|
370,
|
375,
|
377,
|
378,
|
379,
|
392,
|
395,
|
398,
|
399,
|
400,
|
402,
|
406,
|
407,
|
408,
|
409,
|
410,
|
411,
|
412,
|
414,
|
415,
|
416,
|
418,
|
419,
|
420,
|
421,
|
422,
|
424,
|
425,
|
426,
|
427,
|
429,
|
430,
|
431,
|
549
432, 433, 434, 453, 455, 456, 464, 465
|
441, 442, 446,
458, 459, 461,
|
451,
462,
|
452,
463,
|
Langue française · 10,
|
14,
|
16,
|
18,
|
24,
|
27,
|
28,
|
33,
|
35,
|
38,
|
39,
|
40,
|
41,
|
42,
|
43,
|
44,
|
45,
|
46,
|
47,
|
48,
|
49,
|
50,
|
51,
|
53,
|
54,
|
56,
|
57,
|
58,
|
59,
|
60,
|
61,
|
63,
|
64,
|
65,
|
69,
|
72,
|
73,
|
74,
|
76,
|
77,
|
78,
|
79,
|
84,
|
85,
|
86,
|
88,
|
89,
|
90,
|
91,
|
92,
|
93,
|
96,
|
97,
|
98,
|
99,
|
101, 102, 103,
|
104, 105,
|
106,
|
110,
|
112,
|
113,
|
115,
|
119,
|
120,
|
121,
|
122,
|
124,
|
125,
|
126,
|
128,
|
129,
|
130,
|
132,
|
133,
|
134,
|
135,
|
136,
|
138,
|
142,
|
146,
|
147,
|
148,
|
149,
|
153,
|
185,
|
203,
|
205,
|
206,
|
207,
|
208,
|
209,
|
210,
|
212,
|
213,
|
215,
|
217,
|
218,
|
219,
|
220,
|
221,
|
222,
|
223,
|
224,
|
225,
|
236,
|
237,
|
239,
|
241,
|
245,
|
246,
|
258,
|
264,
|
312,
|
319,
|
321,
|
327,
|
328,
|
351,
|
369,
|
370,
|
377,
|
378,
|
379,
|
399,
|
402,
|
406,
|
407,
|
408,
|
409,
|
411,
|
412,
|
414,
|
415,
|
416,
|
419,
|
420,
|
421,
|
422,
|
424,
|
425,
|
427,
|
429,
|
430,
|
431,
|
432,
|
433,
|
434,
|
441,
|
451,
|
452,
|
453,
|
455,
|
456,
|
|
458,
|
459,
|
461,
|
462,
|
464,
|
465
|
|
|
Langue maternelle · 9, 73, 78,
|
79,
|
103,
|
122,
|
207,
|
208,
|
215,
|
216,
|
219,
|
223,
|
224,
|
227,
|
228,
|
230,
|
430
|
|
|
|
|
Langues africaines · 28, 61, 89, 91, 98, 99,
102,
|
104,
|
106,
|
115,
|
117,
|
121,
|
136,
|
205,
|
207,
|
208,
|
209,
|
210,
|
217,
|
226,
|
228,
|
229,
|
230,
|
231,
|
232,
|
236,
|
240,
|
241,
|
319,
|
426
|
M
|
|
|
|
|
|
|
|
Métis · 29, 40, 72, 105, 219, 220, 222, 239,
240, 241, 245, 257, 330, 334, 335, 339,
340,
|
341,
|
342,
|
343,
|
347,
|
348,
|
349,
|
351,
|
352,
|
371,
|
373,
|
374,
|
375,
|
376,
|
378,
|
423,
|
454,
|
455,
|
460
|
|
|
|
|
|
Métissage · 14, 30,
|
76, 88, 92, 93,
|
100,
|
107,
|
131,
|
133,
|
142,
|
149,
|
160,
|
172,
|
173,
|
186,
|
203,
|
241,
|
298,
|
300,
|
301,
|
305,
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|
326,
|
329,
|
330,
|
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|
338,
|
339,
|
341,
|
342,
|
343,
|
344,
|
346,
|
349,
|
350,
|
351,
|
352,
|
356,
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372,
|
373,
|
374,
|
378,
|
421,
|
427,
|
428,
|
430,
|
458,
|
459,
|
463,
|
464
|
|
|
|
|
Musique · 73,
|
116,
|
117,
|
131,
|
163,
|
206,
|
212,
|
214,
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218,
|
219,
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223,
|
226,
|
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|
263,
|
273,
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275,
|
276,
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277,
|
278,
|
395,
|
397,
|
398,
|
399,
|
401,
|
403,
|
404,
|
428,
|
436,
|
441,
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443,
|
444,
|
446,
|
448,
|
450,
|
453,
|
464
|
|
|
Mythe · 21, 22, 30, 116,
|
117,
|
142,
|
144,
|
150,
|
282,
|
330,
|
400,
|
436,
|
446,
|
447,
|
448,
|
449,
|
450,
|
451
|
452,
|
453,
|
455,
|
463,
|
464
|
Mythe personnel · 21,
|
22,
|
30,
|
144,
|
330,
|
400, 455, 463, 464
|
|
|
|
|
|
N
|
|
|
|
|
Négritude · 11, 12, 13,
|
17,
|
18,
|
27,
|
35, 63,
|
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92, 93, 94, 95,
|
84, 85, 86, 87,
96, 97, 98, 99,
|
88, 90, 91,
102, 104,
|
105,
|
106,
|
109,
|
114,
|
115,
|
119,
|
120,
|
129,
|
130,
|
132,
|
133,
|
135,
|
136,
|
138,
|
139,140,
|
142,
|
143,
|
146,
|
149,
|
160,
|
172,
|
173,
|
174,
|
184,
|
186,
|
190,
|
191,
|
199,
|
204,
|
213,
|
226,
|
251,
|
254,
|
255,
|
256,
|
279,
|
280,
|
284,
|
288,
|
299,
|
306,
|
318,
|
338,
|
348,
|
354,
|
359,
|
387,
|
390,
|
393,
|
397,
|
407,
|
409,
|
415,
|
416,
|
417,
|
423,
|
424,
|
426,
|
427,
|
428,
|
429,
|
430,
|
432,
|
550
551
433,
459, Noir
|
435,
460,
13,
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461, 462, 463, 464
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|
90, 93, 94, 96,
|
115,
|
129,
|
130,
|
132,
|
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|
147,
|
151,
|
153,
|
154,
|
160,
|
163,
|
164,
|
165,
|
166,
|
167,
|
168,
|
169,
|
171,
|
174,
|
175,
|
177,
|
178,
|
179,
|
180,
|
181,
|
182,
|
183,
|
184,
|
185,
|
186,
|
187,
|
189,
|
190,
|
191,
|
193,
|
195,
|
196,
|
197,
|
198,
|
199,
|
200,
|
201,
|
202,
|
203,
|
204,
|
205,
|
208,
|
209,
|
210,
|
211,
|
219,
|
221,
|
222,
|
237,
|
241,
|
242,
|
243,
|
244,
|
245,
|
246,
|
247,
|
248,
|
249,
|
250,
|
253,
|
254,
|
255,
|
256,
|
258,
|
259,
|
262,
|
263,
|
264,
|
304,
|
306,
|
308,
|
309,
|
310,
|
313,
|
314,
|
318,
|
319,
|
320,
|
322,
|
338,
|
342,
|
349,
|
359,
|
362,
|
369,
|
373,
|
385,
|
396,
|
420,
|
426,
|
442,
|
459,
|
466
|
|
|
|
Noosphère · 40, 76,
|
221,
|
304,
|
305,
|
313,
|
|
314
O
Ontologique · 255, 261, 273, 330, 378,
401, 403, 433, 436, 438, 441, 450, 451, 452, 453, 456, 461
Ouverture · 11, 24, 26, 27, 29, 35, 40, 49,
50, 55, 92, 97, 98, 99, 101, 104, 105, 107, P
109,
|
110,
|
112,
|
113,
|
114,
|
117,
|
119,
|
120,
|
121,
|
122,
|
123,
|
130,
|
139,
|
140,
|
146,
|
147,
|
168,
|
201,
|
205,
|
210,
|
248,
|
260,
|
261,
|
264,
|
283,
|
284,
|
286,
|
287,
|
288,
|
289,
|
294,
|
295,
|
296,
|
297,
|
298,
|
299,
|
300,
|
301,
|
305,
|
315,
|
316,
|
320,
|
321,
|
322,
|
326,
|
329,
|
341,
|
351,
|
356,
|
371,
|
423,
|
424,
|
458
|
|
|
|
|
Paix · 173, 180, 186, 189, 191, 192, 193,
194,
|
195,
|
196,
|
197,
|
235,
|
268,
|
289,
|
306,
|
308,
|
310,
|
318,
|
381,
|
383,
|
387,
|
389,
|
395,
|
397,
|
398
|
|
|
|
|
|
|
|
Panafricanisme 468
Pardon 142, 146, 149, 151, 187,
191, 192, 195, 196, 197, 198, 201,
204, 318, 379, 387
Poésie · 14, 15, 16, 17, 18, 19, 22,
|
189, 190,
202, 203,
23, 26,
|
28, 29, 30, 44,
|
68, 88, 93, 94,
|
117,
|
121,
|
140,
|
141,
|
142,
|
143,
|
145,
|
146,
|
148,
|
149,
|
150,
|
151,
|
189,
|
195,
|
197,
|
208,
|
209,
|
212,
|
|
214,
|
224,
|
226,
|
231,
|
232,
|
239,
|
242,
|
244,
|
246,
|
258,
|
266,
|
267,
|
286,
|
288,
|
294,
|
295,
|
296,
|
299,
|
301,
|
306,
|
312,
|
313,
|
315,
|
321,
|
322,
|
326,
|
329,
|
330,
|
331,
|
332,
|
334,
|
342,
|
343,
|
346,
|
352,
|
364,
|
365,
|
367,
|
379,
|
380,
|
387,
|
390,
|
393,
|
396,
|
398,
|
399,
|
400,
|
401,
|
402,
|
403,
|
404,
|
405,
|
406,
|
412,
|
413,
|
414,
|
415,
|
416,
|
417,
|
418,
|
419,
|
420,
|
421,
|
422,
|
423,
|
424,
|
425,
|
426,
|
427,
|
429,
|
430,
|
431,
|
432,
|
433,
|
435,
|
436,
|
437,
|
438,
|
439,
|
440,
|
441,
|
442,
|
443,
|
444,
|
446,
|
447,
|
448,
|
449,
|
450,
|
451,
|
452,
|
453,
|
454,
|
456,
|
457,
|
458,
|
460,
|
461,
|
462,
|
463,
|
464,
|
466
|
|
|
|
Poésie africaine 421, 423, 456
Poésie française · 415, 416, 417, 418,
419,
420, 421, 422, 423, 426, 446, 452, 456,
461, 462
Poésie francophone · 18, 29, 30, 148, 330,
400,
|
402,
|
403,
|
404,
|
405,
|
406,
|
412,
|
413,
|
414,
|
415,
|
416,
|
417,
|
418,
|
419,
|
420,
|
421,
|
552
422,
|
423,
|
424,
|
425,
|
429,
|
430,
|
431,
|
432,
|
433,
|
434,
|
435,
|
436,
|
437,
|
438,
|
439,
|
442,
|
443,
|
444,
|
446,
|
447,
|
450,
|
451,
|
452,
|
453,
|
454,
|
456,
|
457,
|
460,
|
461,
|
462,
|
463
|
|
Poésie humaine · 435, 450
Poésie mystique 453
Poésie mythopoétique 436, 450
Poésie négro-africaine · 433, 446
Poésie rythmique...450
Poésie senghorienne · 16, 17, 18, 19, 28,
29, 88, 140, 143, 149, 150, 151, 224, 226,
239,
|
266,
|
267,
|
286,
|
294,
|
296
|
(297), 299,
|
301,
|
306,
|
315,
|
333,
|
344,
|
346,
|
379, 390,
|
400,
|
401,
|
439,
|
450,
|
457,
|
458,
|
461, 463,
|
466
|
|
|
|
|
|
|
|
Poésie symbolique · 435,
|
450
|
|
|
Poète · 10, 15, 18, 19, 20,
|
24,
|
25,
|
28, 33,
|
43, 44, 45, 68, 77, 82, 93,
|
95,
|
99,
|
100, 142,
|
144,
|
145,
|
148,
|
150,
|
158,
|
168,
|
169,
|
171,
|
176,
|
177,
|
178,
|
185,
|
186,
|
189,
|
191,
|
200,
|
207,
|
210,
|
215,
|
218,
|
220,
|
222,
|
233,
|
234,
|
247,
|
249,
|
250,
|
251,
|
252,
|
255,
|
271,
|
279,
|
280,
|
294,
|
295,
|
296,
|
298,
|
307,
|
312,
|
330,
|
331,
|
348,
|
349,
|
368,
|
379,
|
385,
|
390,
|
392,
|
393,
|
394,
|
395,
|
396,
|
397,
|
398,
|
399,
|
400,
|
401,
|
402,
|
403,
|
404,
|
406,
|
407,
|
413,
|
414,
|
|
416,
|
417,
|
418,
|
419,
|
420,
|
421,
|
423,
|
424,
|
425,
|
426,
|
427,
|
432,
|
433,
|
436,
|
437,
|
438,
|
444,
|
447,
|
448,
|
449,
|
450,
|
451,
|
452,
|
453,
|
455,
|
456,
|
461,
|
464
|
|
|
|
|
Psychocritique · 19, 20,
|
21, 22, 23,
|
28,
|
144,
|
145,
|
146,
|
150,
|
151,
|
186,
|
209,
|
246,
|
264,
|
330,
|
334,
|
346,
|
358,
|
359,
|
380,
|
386,
|
461,
|
464
|
|
|
|
|
|
|
R
Rythme · 26, 44, 73, 91,
|
93, 94, 107, 130,
|
194,
|
198,
|
200,
|
212,
|
214,
|
217,
|
218,
|
225,
|
226,
|
229,
|
234,
|
237,
|
241,
|
250,
|
251,
|
255,
|
256,
|
259,
|
275,
|
276,
|
277,
|
278,
|
279,
|
290,
|
299,
|
394,
|
395,
|
397,
|
398,
|
399,
|
408,
|
412,
|
414,
|
415,
|
416,
|
418,
|
419,
|
420,
|
421,
|
436,
|
437,
|
439,
|
441,
|
442,
|
443,
|
444,
|
446,
|
450,
|
451,
|
452,
|
453,
|
459,
|
464
|
|
|
|
Rythmique · 158, 253, 274, 276, 277, 446,
450,
|
451, 456, 461
|
S
|
|
|
|
Sang · 29, 151,
|
171, 172, 173, 174, 175,
|
179,
|
180,
|
181,
|
182, 183, 184, 186, 190,
|
191,
|
193,
|
194,
|
196, 210, 216, 217, 228,
|
229,
|
244,
|
269,
|
274, 275, 279, 288, 291,
|
304,
|
306,
|
308,
|
330, 332, 334, 335, 337,
|
338,
|
339,
|
341,
|
342, 343, 344, 345, 346,
|
347,
|
348,
|
349,
|
350, 351, 352, 358, 362,
|
374,
|
384,
|
393,
|
396, 420, 439, 442, 445,
|
446,
|
453,
|
454,
|
460
|
Stratégie · 11,
|
12, 13, 237,
|
255, 371, 372,
|
373, 374, 424,
|
465
|
|
|
|
|
|
Symbiose · 12,
|
13, 16,
|
18,
|
26,
|
40,
|
56,
|
69,
|
75, 77, 86, 89,
|
93, 94,
|
95,
|
98,
|
99,
|
114,
|
115,
|
129,
|
132,
|
142,
|
146,
|
187,
|
219,
|
221,
|
256,
|
263,
|
269,
|
270,
|
273,
|
278,
|
287,
|
298,
|
311,
|
314,
|
317,
|
320,
|
348,
|
355,
|
363,
|
402,
|
411,
|
421,
|
423,
|
424,
|
425,
|
432,
|
446,
|
450,
|
452,
|
458,
|
459,
|
463,
|
464
|
|
|
|
|
Symbiose culturelle · 69, 89, 93, 98, 142, 146, 314, 425,
459
Symbole · 16, 30, 74, 103, 245, 273, 328, 344, 369, 416,
418, 419, 436, 438, 439, 440, 441, 446, 448, 450, 452, 453 Symbolique ·
21, 83, 145, 205, 265, 324, 435, 439, 447, 448, 449, 450, 451, 452, 453, 456,
461
Unité · 26, 29, 38, 50, 62, 79, 93, 98, 103,
108, 127, 131, 132, 142, 150, 179, 180,
185,
|
190,
|
216,
|
224,
|
261,
|
284,
|
304,
|
310,
|
311,
|
315,
|
316,
|
317,
|
318,
|
320,
|
321,
|
325,
|
329,
|
348,
|
351,
|
362,
|
375,
|
378,
|
386,
|
387,
|
388,
|
389,
|
423,
|
434,
|
433,
|
435,
|
452,
|
453,
|
456,
|
459,
|
462,
|
463
|
|
|
|
|
V
|
|
|
|
|
|
|
|
Voyage · 282,
|
290,
|
294,
|
295,
|
296,
|
299,
|
353, 354, 463
U
553
INDEX DES AUTEURS
A
A. Kibédi Varga 439
Abdillahi Aouled 9, 32, 39, 46, 47, 49
Abdoul Diouf -- 11, 64, 100, 222, 252, 253, 254, 389, 436
Abdoulaye Diawara 26, 304, 305, 317
Abib Sene 342
Adama Ndao 24, 25, 171
Adama Ouane 199, 405
Adama Samaké 387
Adou Bouatenin - 13, 14, 16, 18, 22, 27, 61,
69, 88, 118, 142, 185, 187, 207, 239, 270,
295, 381, 387, 402, 404
Ahmadou Kourouma 93, 225, 269
Ahmed Sékou Touré 60, 61
Aimé Adopo Achi 227
Aimé Césaire -- 87, 88, 119, 157, 165, 169, 171,
185, 208, 243, 297, 390, 406, 417, 419, 422, 425, 428, 429, 430, 438, 453,
454
Aïssata Soumana Kindo - 6, 12, 90, 93, 207
Alain Juppé 64, 240 Alain Mabanckou --- 36, 100, 329,
412, 413
Alain Ménil 430, 432
Alain Vaillant 415
Alassane Ndwa 108
554
Albert Christiane 326 Albert Tevoedjré 118
Alexandra Aizier 12, 126
Alexis Kagamé 108
Alexis Vassilis 111
Alice Goheneix -- 27, 39, 41, 42, 47, 48, 52, 54, 79, 213,
214
Alioune Mbaye 226, 227, 232
Alioune Sall 163
Alioune Sène 91
Alpha Condé 169
Alpha Ibrahim Sow 108, 109, 117, 121
Amadou Hampâté Bâ 283, 284
Amadou Koné 62, 244, 245
Ambroise Kom 12, 69
Amilcar Cabral 285
Amin Maalouf 324, 363, 365, 411, 412
Amina Meziani 205, 324
André Malraux 263, 425
André Maurois 301
Anne Hamidou 198
Anne Judge 68, 160
Anne-Rosine Delbart ---- 53, 115, 229, 406, 409
Anne-Lisse Gallay 24, 25
Annette Boudreau 377, 378
Antionette Liechti 340
Antoine Rivarol 222
Antoine Saint-Exupéry 284, 314
Armand Guibert 209, 355, 356
Arnaud Bernadet 19
Arthur Rimbaud -- 417, 418, 419, 421, 425, 427, 436, 452, 461
Assa Syntyche Assa 324
Assane Seck 391, 393
Atsain François N'cho 233
Aude Béliveau 129
Aurélien Yannic 75, 134, 328
B
Babacar M'baye 172
Babacar Ndiaye 125
Babacar Sédikh Diouf 217
Bara Diouf 220
Béatrice Majza 33
Béatrice Turpin 9, 10, 34
Bégong-Bodoli Betina -- 12, 35, 36, 37, 70, 71, 78, 79,
133, 207
Bena Djangrang Nimrod 327
Bénézet Bujo 262, 265
Bernard Magnier 335, 360
Bernard Pöll 68
Bernard Wallon 36,39, 212, 236
Bernard Zadi Zaourou 206, 207
Bi Trazié Serge Bli 15
Birago Diop 269
Blaidy Dioum 96
Bruno Bourg-Broc --- 10, 55, 134, 189, 301
C
Camille Bourniquel - 34, 52, 53, 57, 59, 60, 63
Carmen S. Stoean 145
Catherine Coquery-Vidrovitch 154
Catherine Kerbrat-Orecchioni - 23, 28, 144,
145, 207, 210, 214, 227, 330, 384, 461
Cécile B. Vigouroux 35, 36
|
Cecile Dolisane-Ebosse
|
|
270
|
Cecile Thomas
|
|
|
164
|
Celina Scheinowitz
|
|
18,
|
263
|
Charles Baudelaire ----
|
-417, 418,
|
419,
|
421,
|
437, 441, 461
|
|
|
|
Charles Bonn
|
406, 408,
|
411,
|
412
|
Charles Mauron ---- 19,
|
20, 21, 22,
|
28,
|
143,
|
144, 146, 152, 330, 386, 400, 461
|
|
|
Charles Taylor
|
|
|
340
|
Cheikh Hamidou Kane
|
166,
|
215,
|
290
|
Christian Philip
|
|
110,
|
126
|
Christian Vandendorpe
|
|
|
410
|
Christophe Premat
|
|
|
11
|
Claire Riffard 112,
|
405, 406,
|
407,
|
408,
|
409, 412
|
|
|
|
Claire Tréan 13,
|
34, 40, 41,
|
153,
|
160
|
Claude Caitucoli
|
|
225,
|
412
|
Claude Morin
|
|
|
85
|
Claudia Moisei
|
|
10, 11, 14
|
Clément Mbom
|
|
|
62
|
D
|
|
|
|
Daniel Garrot
|
202, 260,
|
277,
|
447
|
Daniel Maximin
|
68, 148,
|
326,
|
327
|
Daniel Pasquier
|
|
|
366
|
D'Arcy Hayman -- 331,
|
435, 436,
|
437,
|
438,
|
439
|
|
|
|
David Adamou Dongo
|
|
|
144
|
|
|
|
555
|
David Gakunzi 223, 285, 371
Deli Zra 262, 285
Didier Lamaison 144
Djian Jean Michel 346
Djibril Tamsir Niane 176
Dominique Combe 103, 375, 405
Dominique Wolton 59, 101, 165, 328,
351, 402
Driss Khrouz 125
E
Ébénézer Njoh-Mouelle 41, 149
Edema Atibakwa-Boboya 100
Edgar Faure 80, 311, 421
Edmond-Marc Lipiansky 325, 372
Édouard Glissant 325, 332, 333, 349,
352, 427, 428, 429, 430, 431
Edward Tylor 261 Emmanuel Macron ---- --39, 135, 159, 166,
198, 229, 230,
Emmanuel Mounier 342, 373
Étienne Smith 370
Eugène Tavares 11, 12, 354
F
Félix Guattari 332, 333
Félix Houphouët Boigny - 62, 82, 167, 464
Fernando Lambert 18, 143
Fétigué Coulibaly 231
Florent Parmentier 133, 134
François Crouzet 345
François de Closets 303
556
François Hollande 125 François Fillon 166
François Pire 144
François Provenzano 10, 74, 127, 405
François-Xavier Verschave 464
Françoise Argod-Dutard 230
Fulgence Manirambona 342
G
Gabriel Calaya 436
Gabriel de Broglie 132, 212
Gaston Bachelard 294, 413, 453
Gaston Berger 266, 294, 305
Genevière Vinsonneau 331, 349
Georges Balandier 266, 302, 303
Georges Bastide 302
Gérard Dessons 19
Gilles Vigneault 105
Goly Mathias Irié Bi 235
Gustave Lanson 4
Guy Allix 288, 301
H
Hamidou Dia 304, 330
Henri Lopès 26, 105, 326, 349, 385
I
Ibrahim Baba Kake 261, 263
Ibrahim Diop-- --14, 16, 17, 34, 41, 67, 69,
90, 114, 132, 142, 207, 220, 221, 242, 287, 288, 311
Ingse Skattum 10
Irène Gayraud 448
Irina Bokava 381
Isabelle Constan 431
Issa Sangaré Yeresso 119
J
J. et M. J. Derive 119
J. Tshisunguwa Tshisungu -- 13, 15, 34, 72,
73, 77, 78, 89, 98, 132, 404, 405
Jacqueline Sorel 390
Jacques Barrat 10, 11, 14
Jacques Chevrier --- 49, 74, 77, 88, 92, 130, 155, 213, 265,
295
Jacques Dufresne 382
Jacques Godbou 410
Jacques Maquet 266, 302, 303
Jacques Rabemananjara - 96, 163, 187, 206, 207
Janet G. Vaillant 17, 67, 215, 251
Jean Bernabé 429, 430
Jean Bernard Kouadio 240, 241
Jean Foucault 224, 236, 327
Jean Lacouture 62
Jean Maisonneuve 149
Jean Michaëlle ---- -55, 101, 102, 103, 110, 124, 241
Jean Pruvost 45
Jean Tardif 324, 327
Jean-François Dortier 287
Jean-Georges Prosper 195
Jean-Jacques Konadjé 32, 103
Jean-Jacques Rousseau 382
Jean-Louis Joubert 377, 448
557
Jean-Louis Bédouin 433 Jean-Marc Léger-- -- 34, 36,
37, 53, 54, 55, 61, 62, 64, 69, 85
Jean-Marie Adiaffi 350
Jean-Marie Borzeix 36, 134
Jean-Marie Domenach -- 34, 52, 53, 57, 59, 60, 63
Jean-Marie Guyau 442 Jean-Nicolas de Surmont -- 36, 89, 90,
129, 133, 164, 379
Jean-Paul Pougala 272 Jean-Paul Sartre -- 185, 207, 209,
211, 414, 428
Jean-Paul Warnier 369 Jean-Pierre Asselin de Beauville 312,
313, 324, 326
Jean-Pierre Biondi 355
Jean-Pierre Hoss 36
Jean-Pierre Makouta-Mboukou 225
Jean-René Bourrel 87, 90, 91, 149
Joël Clerget 15, 16, 145, 150
Joëlle Farchy 324
John Kristian Sanaker 10
John W. Berry ---- 355, 356, 366, 367, 371, 372, 374
José Fontaine 69
Josefina Bueno Alonso 327, 351
Joseph Roger de Benoist 189
K
Kahiudi C. Mabana 256
Kameni Alain Cyr Pangop 357
Karim Holter 10
Karim Traoré 12
Katia Haddah
Ken Bugul
Kouamé Kouamé
Koutchoukalo Tchassim
114, 116, 129, 131
|
|
105,
|
49, 239 327 385 106, 113,
|
L
|
|
|
|
L. Duponchel
|
|
|
121
|
Laurence Arrighi
|
|
|
377, 378
|
Laurent Gbagbo
|
|
80, 84, 105
|
Laurier Turjeon
|
|
339
|
Léandre Sahiri
|
|
20
|
Léo Férré
|
|
444
|
Léon Nadjo
|
|
92
|
Léon-Gontran Damas
|
87,
|
348, 423, 426
|
Léopold Sédar Senghor ---
|
9,
|
10,
|
12, 13, 14,
|
15, 16, 17, 18, 19, 22, 23,
|
24,
|
25,
|
26, 27,
|
28, 29, 30, 32, 33, 34, 35,
|
37,
|
40,
|
41, 51,
|
53, 54, 55, 56, 59, 61, 62,
|
63,
|
64,
|
65, 66,
|
67, 68, 69, 70, 71, 72, 73,
|
74,
|
75,
|
76, 77,
|
78, 79, 80, 81, 82, 83, 84,
|
85,
|
86,
|
87, 88,
|
89, 90, 91, 92, 93, 94, 95,
|
96,
|
97,
|
98, 99,
|
100,
|
101,
|
102,
|
104,
|
106,
|
108,
|
109,
|
111,
|
113,
|
114,
|
115,
|
116,
|
117,
|
119,
|
119,
|
120,
|
121,
|
122,
|
126,
|
129,
|
130,
|
131,
|
132,
|
135,
|
136,
|
138,
|
139,
|
140,
|
141,
|
142,
|
143,
|
146,
|
147,
|
148,
|
149,
|
150,
|
151,
|
152,
|
153,
|
154,
|
155,
|
156,
|
157,
|
158,
|
159,
|
161,
|
164,
|
165,
|
166,
|
167,
|
168,
|
169,
|
170,
|
171,
|
172,
|
173,
|
174,
|
176,
|
177,
|
178,
|
180,
|
182,
|
184,
|
185,
|
186,
|
187,
|
189,
|
190,
|
191,
|
195,
|
197,
|
198,
|
199,
|
200,
|
201,
|
202,
|
203,
|
204,
|
205,
|
206,
|
207,
|
208,
|
209,
|
210,
|
212,
|
213,
|
214,
|
215,
|
558
216, 217, 218, 219, 220, 221, 222, 223, 224, 226, 227, 231,
233, 234, 236, 237, 238, 239, 240, 241, 243, 244, 245, 251, 253, 254, 255, 256,
258, 260, 262, 263, 264, 265, 267, 270, 272, 273, 276, 277, 278, 279, 280, 281,
283, 284, 286, 287, 289, 293, 297, 298, 299, 300, 301, 304, 305, 310, 311, 312,
313, 314, 315, 316, 317, 318, 319, 320, 321, 322, 323, 326, 329, 330, 331, 333,
335, 336, 338, 339, 340, 341, 342, 343, 347, 349, 350, 351, 352, 353, 354, 356,
358, 359, 363, 364, 365, 366, 367, 368, 370, 371, 372, 373, 374, 375, 376, 377,
378, 379, 380, 382, 384, 385, 387, 388, 390, 392, 393, 399, 400, 401, 402, 403,
404, 405, 406, 407, 409, 412, 413, 414, 415, 416, 417, 418, 419, 420, 421, 422,
423, 424, 426, 427, 429, 433, 435, 436, 437, 438, 439, 441, 442, 443, 446, 447,
449, 450, 451, 454, 455, 457, 459, 460, 461, 463, 464, 466, 468, 469
Liano Petroni 226
Liliane Fo°alãu 331, 349, 350
Lilyan Kesteloot ---- 18, 102, 208, 225, 226, 236, 237
Linton Ralph 366, 367
Lise Gauvin 154, 410
Loïc Depecker 16
Louis de Broglie 240
Louis Martin-Chauffer 224
Luc pinhas ---- -32, 33, 40, 42, 43, 48, 126, 128, 160
Lucien Febvre 345
Lucy Baugret
|
|
325
|
M
|
|
|
Magloire Somé
|
|
265
|
Makhily Gassama
|
93, 414,
|
415
|
Mamadou Bani Diallo 7,
|
17, 37, 67,
|
95,
|
142
Mamadou Cisse
|
|
208
|
Mamadou Cissé
|
369,
|
370
|
Mangoné Seck --- 91, 92, 93,
|
106, 107,
|
115,
|
116, 117
|
|
|
Marc Edmond
|
|
325
|
Marc Gontard
|
11, 12,
|
160
|
Marcien Towa ---- 167, 174,
|
176, 177,
|
197,
|
305, 349
|
|
|
Mariana Ionescu
|
|
358
|
Marie-Claire Gousseau
|
|
261
|
Mariétou Diongue
|
|
263
|
Maurice Druon
Méo Guy Di
|
38, 39,
|
167
356
|
Michael Hammer
|
|
345
|
Michel Beniamino 154,
|
225, 405,
|
407
|
Michel Dupouey
|
|
56
|
Michel Guillou 11,
|
124, 135,
|
136
|
Michel Hausser
|
88,
|
426
|
Michel Tétu
|
|
68
|
Mihaela-Alexandra Acatrinei
|
|
408
|
Moussa Fall
|
|
227
|
Moustapha Samb
|
|
298
|
Moustapha Tambadou
|
153,
|
256
|
Muriel Placet-Kouassi
|
|
330
|
Myriam Louviot
|
325,
|
366
|
N
|
|
|
|
Nadia Yala Kisudiki
|
|
142,
|
288
|
Nelson Mandela
|
|
|
5
|
Ngalasso Mwatha Musanji
|
|
|
15
|
Nicolas Sarkozy
|
|
16,
|
135
|
Niels Planels
|
|
407,
|
431
|
Nsame Mbongo
|
|
276,
|
280
|
O
|
|
|
|
Odile Hardy
|
381,
|
382,
|
388
|
Olga Balogun
|
|
116,
|
287
|
Onésime Reclus -- 9, 10, 14,
|
17, 27, 32,
|
33,
|
34, 35, 37, 38, 39, 41, 42, 43,
|
44,
|
45, 46,
|
47, 48, 49, 50, 51, 54, 58, 63,
|
65,
|
72, 99,
|
100, 101, 103, 106, 112, 113,
|
121,
|
122,
|
|
126, 127, 128, 129, 133, 135,
|
136,
|
138,
|
|
139, 140, 223, 245, 345, 410,
|
412,
|
425,
|
|
457, 458, 463
|
|
|
|
Oumar sankhare
|
|
|
251
|
P
|
|
|
|
Pabé Mongo
|
|
207,
|
224
|
Paola Puccini - 9, 15, 41, 52,
|
53, 56, 63, 75
|
Papa Gueye N'diaye
|
|
|
279
|
Papa Samba Diop --- 24, 25,
|
158,
|
171,
|
191,
|
359
|
|
|
|
Pape François
|
|
|
389
|
Passou Lundula
|
|
|
12
|
Pathé Diagne
|
|
113,
|
287
|
Patrick Chamoiseau
|
|
|
429
|
Patrick Charaudeau
|
|
|
391
|
Patrick Sultan
|
|
26, 37
|
|
|
559
|
Paul Claudel - 399, 404, 412, 421, 433, 443
Paul Drezet 407, 408
Paul Dumont 10, 11, 39, 89, 111, 226
Paul Friedrich 413, 446, 448, 449
Paul Ricoeur 303, 315, 316, 325
Paul Sabourin 84, 91
Paul Verlaine 443
Paulin Hounsounon-Tolin --- 106, 107, 108
Petr Vurm 36, 130, 143, 226 Philipe Lavodrama --- 7, 17, 34,
67, 68, 69, 142
Pierre Renauld 449
Pierre Soubias 217
R
Raphaël Confiant 429
Rebecca Ursula Brønnum Scavenius 101
Redfield Robert 366, 367
René de Lacharrière 81, 82, 83
René Despestre
|
|
|
|
333
|
René Gnaléga
|
-12,
|
18, 34, 67,
|
83,
|
131,
|
132, 171, 191, 207,
|
226,
|
238, 273,
|
276,
|
|
277, 278, 279, 280,
|
285,
|
298, 300,
|
317,
|
|
326, 329, 330, 332,
|
341,
|
344, 351,
|
354
|
|
René Makounkolo
|
|
|
|
366
|
Robert Chaudenson
|
|
|
|
7
|
Robert Sabatier
|
|
44, 46,
|
425,
|
433
|
S
|
|
|
|
|
Saïda Belouali
|
102,
|
208, 224,
|
229,
|
400
|
Salman Rushidie
|
|
|
|
325
|
Samba Diakité
|
|
|
|
286
|
Samira Boubakour
Samuel Huntington
|
205,
|
326
316
|
Sana Camara 26,
|
171,
|
390
|
Sandra Glatigny
|
448,
|
449
|
Serge Arnaud
|
|
11
|
Seydou Badian
|
|
272
|
Sigmund Freud
|
|
20
|
Slimane Benaïsa
|
230,
|
231
|
Snauwaert Maïte
|
|
145
|
Sophie Croiset 53, 115, 229,
|
406,
|
409
|
Stanislas Adotevi
|
132,
|
185
|
Stella M. A. Johnson
Stélio Farandjis 11, 13, 37,
|
13,
299,
|
129
301
|
Stéphane Mallarmé
|
418,
|
419
|
Sylvia Washington Bâ
|
|
416
|
Sylvie Coly 283, 285,
|
286,
|
287
|
T
|
|
|
Tahar Ben Jelloun
|
327,
|
453
|
Tanella Boni 10, 26, 36,
|
130
|
Thérèse Djilane Diob 93,
Thi Hoai Trang Phan 9, 101, 103,
|
295,
126,
|
296
127,
|
134, 149
|
|
|
Toader Saulea 273,
Toba Misuzu --- 79, 80, 101, 104,
|
294,
105,
|
330
131,
|
298
|
|
|
V
|
|
|
Véronique Gély
|
|
449
|
Véronique le Marchand
|
|
34
|
Véronique Porra 409,
|
411,
|
431
|
Véronique Tadjo
|
326,
|
390
|
Vihelmina Vitkauskienè
|
|
33
|
|
|
560
|
561
Victor Hugo
|
418,
|
419, 421, 436,
|
443
|
Virgilio Elizondo
|
|
341, 357,
|
364
|
Virginie Marie
|
|
33, 68, 128,
|
189
|
Voltaire
|
|
44,
|
385
|
X
|
|
|
|
Xavier Deniau
|
11,
|
12, 14, 33, 58,
|
106
|
Xavier Garnier 406, 408, 411, 412
Y
Yao Assogba 76, 86
Yves Benot 197
562
|
|