AOUT / 2019
MASTER 2 DROIT INTERNATIONAL ET COMPARÉ DE
L'ENVIRONNEMENT Formation à distance, Campus Numérique «
ENVIDROIT »
L'ACCES A LA JUSTICE
ENVIRONNEMENTALE EN DROIT
INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT
Mémoire présenté par Yves-Ricky
MUKALA NSENDULA, Sous la direction de M. le Professeur KOFFI
AHADZI-NOUNOU
AOUT / 2019
MASTER 2 DROIT INTERNATIONAL ET COMPARÉ DE
L'ENVIRONNEMENT Formation à distance, Campus Numérique «
ENVIDROIT »
L'ACCES A LA JUSTICE
ENVIRONNEMENTALE EN DROIT
INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT
Mémoire présenté par Yves-Ricky
MUKALA NSENDULA, Sous la direction de M. le Professeur KOFFI
AHADZI-NOUNOU
i
Sommaire
Introduction 1
1ère Partie : Les fondements juridiques de
l'accès à l'environnement en droit international de
l'environnement 4
Chapitre 1. La consécration du droit d'accès
à la justice au niveau international 4
Chapitre 2. L'accès à la justice au niveau des
régions 22
2ème Partie : L'exercice du droit d'accès
à la justice en droit international de
l'environnement 40
Chapitre 1. Le droit d'accès à la justice en
matière d'environnement devant le juge
international 40
Chapitre 2. Des obstacles à l'effectivité du
droit d'accès à la justice en droit international de
l'environnement 57
Conclusion 71
Bibliographie 73
Table des matières 78
ii
Dédicace
A mes parents Liévin NSENDULA MBUYI et
Hélène NGALULA KALELA pour votre amour et votre
soutien inconditionnel dans ma formation.
A mes frères Michael KAZADI NSENDULA ;
Christian KAMANGA NSENDULA ; Elie BALOS NSENDULA
; Daniel NSENDULA MBUYI et David LUMBALA
NSENDULA. A mes soeurs : Justicia KALELA NSENDULA et
Ruth BAMBI.
Que ce travail soit une motivation pour vous, pour aller plus
loin dans vos études.
Yves-Ricky MUKALA NSENDULA
Yves-Ricky MUKALA NSENDULA
iii
Remerciements
Il est un devoir agréable que celui de remercier tous
ceux qui ont contribuer à la réalisation et à la
matérialisation de ce travail de mémoire qui marque un moment
important dans notre cursus universitaire. L'oeuvre de l'esprit de
manière générale n'est que très rarement l'oeuvre
exclusif d'une seule personne, elle rencontre tout au long de sa conception la
contribution de personnes divers qui sans l'attention m'accorder, ce travail ne
verrait peut-être pas le jour.
Je rends grâce au Seigneur Dieu Tout-Puissant,
maître de toutes circonstances pour m' avoir permis de réaliser ce
travail. Que louage, adoration lui revienne pour des siècles de
siècles.
Je remercie tout particulièrement le Professeur
KOFFI AHADZI-NOUNOU, Professeur de Droit et Juge à la Cour
Constitutionnelle du Togo, pour avoir pris le temps de me lire et de m'orienter
dans la réalisation de ce travail d'esprit malgré ses multiples
occupations. Je tiens également à remercier toute l'équipe
du M2DICE et de l'Université de Limoges pour la formation et leur
disponibilité, je pense ainsi à M. François PELLISON qui
n'a cessé de me rappeler le timing m'impartie pour finir dans le temps
cette formation qui a été riche à tout point de vue et qui
a su être tolérant.
Je remercie le Professeur Jean-Désiré INGANGE WA
INGANGE pour ses conseils et ses encouragements tout au long de cette
formation. Je pense également aux personnes ci-après pour leur
contribution scientifique : aux Chefs de travaux Jean-Pierre MUNZONGO MUNYAMA,
Fidèle BONGIMA et Delly TSHOMA ; aux Assistants Hericka KANANGILA
TSHIMBOMBO, Baron DZAKON, Yves Nsilulu et Jeancy NDJATA ; à Christian
IKOMA NKOLE, Serge LIONDJO MBO, Didier DITU KALALA, Shita KAMUENA MULANGA,
Laurianne MABELENGE MWELA et Dorcas MUKEBU. Je ne saurais oublier tous les
camarades de la promotion 2018-2019 de ce Master en droit international et
comparé de l'environnement, avec qui nous formons maintenant une
très grande famille.
Je ne saurais passer sous silence le soutien tant affectif que
moral de ma tendre et ravissante L'or MUANGA, grand merci à toi ma
Bubanji. A tous ceux qui m'ont apporté leur contribution, d'une
manière ou d'une autre, dans la réalisation de ce travail
trouvent dans ces lignes ma profonde reconnaissance et gratitude.
iv
Liste des abréviations et sigles
Aff. : Affaire
AG : Assemblée Générale
AGNU : Assemblée Générale de
Nations-Unies
Al. : Alinéa
Art. : Article
CADHP : Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples
CDI : Commission du droit international
CE : Conseil de l'Europe
CEDEAO : Communauté économique des Etats de
l'Afrique de l'ouest
CEDH : Convention européenne des droits de l'homme
CEEAC : Communauté économique des Etats de
l'Afrique centrale
CEMAC : Communauté économique et
monétaire de l'Afrique centrale
CEPAL : Commission économique pour l'Amérique
latine
Chron. : Chronique
CIJ : Cour Internationale de Justice
CNUDM : Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer
D.I. : Droit international
DE : Droit de l'environnement
DICE : Droit international et comparé de
l'environnement
v
DIE : Droit international de l'environnement
Dir. : Sous la direction de ou dirigé par
Doc. : Document
Ed. : Edition
EDICEF : Editions classiques d'expression française
IDDI : Institut du développement durable et des
relations internationales
NU : Nations Unies
OCDE : Organisation de Coopération et de
développement économique
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
OUA : Organisation de l'unité africaine
p. : Page
Par. : Paragraphe
PNUE : Programme des Nations Unies sur l'Environnement
R.D.U.S. : Revue de droit de l'Université Sherbrooke
RDC : République démocratique du Congo
Rés. : Résolution
UA : Union Africaine
UE : Union Européenne
UNITAR : United Nations Institute for Training and Research
1
INTRODUCTION
L'accès à la justice en matière
d'environnement demeure un sujet d'actualité, comme en témoignent
les objectifs de développement durable de l'Organisation des Nations
Unies qui vise « à promouvoir l'état de droit dans l'ordre
interne et internationale, et garantir à tous un égal
accès à la justice »1. L'effectivité des
droits, voire leur nature profonde, ne s'éprouve réellement que
dans la lutte judiciaire ; il est probable que sans celle-ci la notion de droit
même au sens subjectif n'existerait pas. Ainsi, l'accès au droit
permet à toute personne de pouvoir obtenir la reconnaissance et
l'exécution de ses droits. Sans cet accès à la justice,
les droits consacrés par divers instruments juridiques que ce soit au
niveau national, régional ou mondial seraient purement
théoriques. La protection juridique effective dépend donc de
l'accès à la justice2. Et la Cour européenne
des droits de l'homme relie expressément son exécution au
fonctionnement démocratique d'une société3.
La notion d'accès à la justice suppose, de
manière générale, que soit reconnu à chaque
individu le droit de saisir les juridictions nationales compétentes en
cas de préjudice subi peu importe que la demande du requérant
soit recevable ou non, régulière ou bien fondée. Il
suppose aussi le droit de se faire représenter et celui d'être
jugés dans des délais raisonnables4. Ainsi,
l'accès à la justice permet à toute personne qui a un
intérêt légitime dans une affaire, et qui présente
la qualité éventuellement requise d'accéder à une
juridiction pour que celle-ci statue sur sa prétention. C'est une notion
qui implique mais dépasse largement le droit à un recours
effectif, le droit d'accès aux tribunaux sur un pied
d'égalité, le droit à un procès équitable ou
le droit d'aide judiciaire octroyée aux justiciables qui ne disposent
pas de ressources suffisantes. Elle ne renvoie pas seulement au stade initial
de l'engagement d'une action en justice pour obtenir réparation de la
violation d'un droit, mais c'est l'ensemble de la procédure5.
De plus, l'accès à la justice doit être
considéré d'une manière plus large que la simple
approche
1 Rés. AG 70/1, Doc off AG NU,
70ème session, Doc NU A/Res/70/1 de 2015.
2 Marie-Anne Frison-Roche, « Le droit
d'accès à la justice et au droit », in Libertés
et droits fondamentaux, pp. 521 - 539.
3 Cour EDH, 5ème sect., 21 janv.
2010, n°10271/02, R.P. c. France, Procédures, mars 2010, p. 15,
note N. Fricero, l'arrêt faisant suite à un
précédent de 2005 visant expressément le « droit au
juge ».
4 Fatima Dia (dir.), « Pas à pas vers
une justice environnementale », in Liaison Energie-Francophonie,
n° 98, 3ème trimestre 2014, IFDD, p. 110.
5 Lire Viorel Riceard Badea,
L'égalité et la non-discrimination dans l'accès
à la justice, Rapport du 31 mars 2015, Conseil de l'Europe, Doc.
13740.
2
procédurale, en mettent davantage l'accent sur la
garantie que les résultats de l'examen judiciaire soient eux-mêmes
justes et équitables6 .
Or, accéder à la justice au nom de la protection
de l'environnement n'est pas chose aisée. D'abord, la nature, pas plus
que ses éléments, ne peut défendre elle-même ses
intérêts en justice7. Il est évident que les
arbres ou les grenouilles ne parlent pas, n'écrivent pas, et, plus
largement, sont incapables de communiquer avec les institutions
judiciaires8. Il faut ensuite ajouter que la protection de
l'environnement constitue un intérêt collectif. Or, ce
caractère collectif s'accommode mal des voies traditionnelles de recours
dans lesquelles le caractère personnel de l'intérêt est
souvent exigé9. Cette particularité justifie de
façon générale la nécessité d'une
étude sur l'accès à la justice en matière
environnementale.
S'il y a encore quelques années, les
préoccupations environnementales paraissaient comme un
phénomène de mode, voire l'expression d'un obstacle au
progrès économique. Aujourd'hui, les questions environnementales
ont fini par s'imposer à la conscience universelle comme une
nécessité accordant ainsi, aux problèmes environnementaux
un caractère collectif. Ce qui conduira à associer la notion
d'accès à la justice, perçu initialement comme un droit
fondamental de l'homme, à la protection de l'environnement. Dans ce
contexte l'accès à la justice environnementale est
étroitement liée, comme les doigts d'une même main, au
droit à l'information et le droit de participer à la prise de
décision qui pourrait endommager l'environnement. Ces droits
environnementaux, à la fois procéduraux et substantiels, sont
susceptibles d'influencer de manière significative les politiques
environnementales.
Quoique la question sur l'accès à la justice
soit un sujet à la fois actuel et fondamentale, on constate qu'il est
diversement assuré selon les Etats10. L'accès le plus
large est assuré par l'actio popularis11 d'un
côté, et à l'autre extrême du spectre seules
personnes pouvant se
6 Lire Viorel Riceard Badea, Op. Cit.
7 Estelle Brosset et Eve Truilhé-Marengo,
« L'accès au juge dans le domaine de l'environnement : le hiatus du
droit de l'Union européenne », RDLF, 2018, chron., n°
07.
8 Certains auteurs ont développé des
théories attribuant à la nature ou à ses
éléments le droit d'ester en justice, tel que Christopher Stone
à travers son célèbre article : « Should trees have
standing ? » (Les arbres peuvent-ils agir en justice ?)
9 Bétaille, Julien (dir.), Le droit
d'accès à la justice en matière d'environnement,
Nouvelle édition Toulouse, Presses de l'Université Toulouse 1
Capitole, 2016. Disponible sur
http://books.openedition.org/putc/996
10 La Commission européenne s'était
déjà penchée sur cette question. Ainsi, le Conseil
européen du droit de l'environnement en collaboration, avec
l'Association européenne de droit de l'environnement, avait
procédé à une étude comparée sur le droit
d'applicable dans les quinze Etats membre d'alors. Voir à ce propos
Pirotte Charles, « L'accès à la justice en matière
d'environnement en Europe : état des lieux et perspectives d'avenir
», in Revue Juridique de l'Environnement, numéro
spécial, 2009, pp. 25-29.
11 Au Portugal, par exemple, la Constitution de
1976 amandée consacre une telle action en son article 52, paragraphe
3.
3
prévaloir d'une atteinte à un droit subjectif,
à savoir la lésion d'une norme adoptée pour
protéger spécifiquement l'intérêt
lésé. Et enfin, sous l'empire d'une troisième approche, un
recours sera déclaré recevable si le requérant justifie
d'un intérêt « suffisant » à agir, ce qui en soi
ne règle pas encore définitivement la question, dès lors
que l'intérêt du demandeur doit, dans certains ordres juridiques,
être strictement « direct et personnel », alors que, dans
d'autres, une interprétation plus libérale prévaut,
pouvant aller jusqu'à la prise en compte de l'intérêt
collectif poursuivi statutairement par une association.
Face à cette diversité d'approche au niveau
national, l'outil principal d'harmonisation, d'uniformisation ou même de
rapprochement des règles appliquées par les différentes
nations est le droit international de l'environnement, qui se traduit par
l'élaboration et l'adoption de traités internationaux et de
textes non obligatoires. De ce fait, le droit international influence
considérablement les législations nationales car de nombreux
principes fondamentaux tels que la prévention, le principe de
précaution12 et des concepts comme le développement
durable ont d'abord été formulés au niveau international
ensuite adoptés par les Etats. Ainsi, on trouve davantage de soutien en
faveur du droit d'accès à la justice dans les instruments
régionaux africains, américains et européens.
De lors l'étude de l'accès à la justice
en matière environnementale soulève un certain nombre de
question, à savoir : quel sont les fondements juridiques de
l'accès à la justice en matière d'environnement en droit
international de l'environnement ? Ce droit est-il effectif en droit
international de l'environnement ? Pour mener à bien notre
réflexion nous allons dans une première parties analyser les
fondements juridiques de l'accès à la justice en droit
international de l'environnement (Première Partie) ensuite nous analyser
l'exercice de ce droit en droit international de l'environnement
(Deuxième Partie).
12 Lire à ce propos Nicolas Sadeleer, Le
principe de précaution dans le monde, Paris, éd. Fondapol et
Fondation Jean-Jaurès, Mars 2011.
4
1ère PARTIE : LES FONDEMENTS JURIDIQUES DE
L'ACCES A LA JUSTICE EN DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT
L'accès à la justice est une condition sine qua
non à l'effectivité de la règle de droit. Il permet, comme
nous l'avions dit, à toute personne de pouvoir obtenir la reconnaissance
et l'exécution de ses droits. C'est ainsi que dans cette partie, nous
allons étudier les fondements juridiques de l'accès à la
justice en droit international de l'environnement.
L'étude des fondements juridiques de l'accès
à la justice en DIE, va nous conduire à analyser les
différents textes consacrant l'accès à la justice au
niveau international (Chapitre 1) et au niveau des régions (Chapitre
2).
CHAPITRE 1. LA CONSECRATION DU DROIT D'ACCES A LA
JUSTICE AU
NIVEAU INTERNATIONAL
La prise de conscience de questions environnementales comme
une nécessité universelle remonte à la fin des
années 1960 avec le mouvement écologique13 et les
conventions internationales de l'époque ne visaient la protection que
des certaines composantes de l'environnement, comme les oiseaux ou le poissons.
De même que pour les questions d'environnement, la consécration du
droit d'accès à la justice a fait l'objet d'une évolution
récente.
Parler de consécration du droit d'accès à
la justice, renvoie d'une part à parler des institutions qui
créent les règles juridiques, telles que les parlements
nationaux, qui adoptent les lois, ou les gouvernements, qui représentent
les Etats au niveau international et peuvent conclure des traités
internationaux. D'autre part, l'expression renvoie aux textes ou instruments
dans lesquels on peut trouver les règles juridiques, tels que les lois
et les ordonnances au niveau interne et les traités, les principes
généraux de droit au niveau international.
Si au niveau interne, la liste de source du droit peut
être énoncée par la Constitution, au niveau international,
c'est le Statut de la CIJ qui énumère les « sources du droit
» en droit
13 Ce mouvement d'opinion était un mouvement
de fond, ayant pris naissance au niveau international. Il avait un fort contenu
philosophique correspondant à une nouvelle conception du monde, incluant
de nouvelles valeurs sociales et rejetant les idéologies
considérées comme matérialistes. Voir Alexandre Kiss,
Introduction au droit international de l'environnement, Genève,
Suisse, UNITAR, 2ème éd., 2006, p. 23.
14 Allusions faites ici au Jus cogens, aux actes
unilatéraux des Etats et des Organisations inter-gouvernementales.
15 Alexandre Kiss, Op. Cit., p. 43.
5
international. Quoique cette liste ne reprend pas toutes les
sources14. Loin de nous de faire une étude
générale de sources du droit international, nous limiterons
à analyser les instruments normatifs (Section 1) et les
mécanismes de garantie et de protection du droit d'accès à
la justice (Section2).
Section 1. Instruments normatifs internationaux
Quand, au-delà des différences de cultures et de
traditions, les Etats s'accordent sur des règles communes, ils peuvent
les formaliser par un instrument juridique international : un accord ou une
convention internationale ayant une force contraignante à l'égard
des Etats l'ayant ratifiés ou adoptés, d'une part ; une
recommandation ou déclaration dépourvue du caractère
obligatoire, d'autre part. Dès lors, parler des instruments juridiques
internationaux renvoie au source du droit et en l'espèce du droit
international de l'environnement. Pris dans son sens formelle le terme
désigne, ainsi donc, les textes dans lesquels on peut trouver les
règles juridiques en matière du droit international de
l'environnement.
Sans chercher à vouloir opérer une étude
détaillée des sources du DIE, nous nous limiterons à ce
niveau aux textes consacrant l'accès à la justice en
matière environnementale. Et cette étude passe par l'analyse des
résolutions et déclarations internationales (§1) faisant
partie de la catégorie de soft law, qui quoique dépourvu d'une
force contraignante a une influence considérable sur la vie
internationale, et ensuite par l'examen des traits internationaux (§2).
§1. Résolutions et déclarations
internationales : premier pas vers une consécration
universelle
Les institutions internationales ont produit de nombreux
textes, directement ou indirectement, en convoquant des conférences
internationales telles que celles de Stockholm ou de Rio. De ces
conférences des textes sont adoptés qui ne lient
généralement pas les Etats, ce sont des déclarations, de
voeux en d'autres termes il s'agit de ce que l'on appelle le soft law.
Dépourvu du caractère obligatoire, il peut avoir une influence
considérable dans la vie internationale car les Etats peuvent accepter
de l'appliquer, considérant qu'il exprime un consensus sur les normes
qui devraient guider leur comportement15. Les recommandations et
6
les déclarations émanant de ces
conférences ont revêtu une grande importance pour
l'évolution du droit international de l'environnement.
Les résolutions émanant d'organisations
internationales et les déclarations de conférences
internationales peuvent être considérées comme constituant
une nouvelle source du droit non prévue par le Statut de la Cour
International de Justice. Les premières peuvent être obligatoires
: elles créent un hard law pour les Etats membres de l'organisation
concernée. Si elles ne le sont pas16, elles sont
généralement appelées recommandations et constituent des
principes de soft law. Les déclarations de conférences
internationales entrent dans la seconde catégorie. Cependant, elles
contribuent également au développement du droit coutumier
international de l'environnement17. A ce jour, le nombre
d'institutions internationales disposant d'un pouvoir d'adopter des
résolutions obligatoires en matière de protection de
l'environnement à l'égard de ses Etats membres est
extrêmement limités. On peut citer le Conseil de
sécurité de l'ONU, l'OCDE et la Communauté
européenne.
Mais dans l'évolution du droit international de
l'environnement deux conférences internationales marquent un tournant
décisif dans la prise de conscience de problème environnementaux,
dans la réglementation du droit international et dans la
consécration d'un droit d'accès à la justice. Il s'agit de
la conférence de Stockholm et celle de Rio tenue respectivement du 5 au
16 juin 1972 et du 3 au 14 juin 1992.
A. De Stockholm à Rio
La Conférence de Stockholm a eu l'immense mérite
de poser au niveau mondial le problème de la protection de
l'environnement et de poser des méthodes pour l'assurer. Cette vision a
caractérisé l'évolution qui a suivi. Au point de vue
institutionnel, les organes créés au sein des Nations Unies, le
Programme des Nations Unies pour l'environnement et le Fonds pour
l'environnement qui devait alimenter les opérations du PNUE, ont
joué un rôle de moteur et de coordinateur des activités
d'autres institutions internationales, celles de la famille des Nations Unies,
mais aussi celles à caractère régional18. La
Conférence de Stockholm a réuni plus de 6000 personnes,
rassemblant 113 délégations nationales, des représentants
de chaque
16 Les résolutions non obligatoires
émanant des conférences ou d'organisations internationales
peuvent être classées selon leur contenu en trois contenus :
recommandations-directives, programmes d'action et déclarations de
principes, voir Alexandre Kiss et Jean-Pierre Beurier, Droit international
de l'environnement, Paris, 3ème édition, éd. A.
Pedone, 2004, pp. 63-67; Alexandre Kiss, Op. Cit., pp. 55-57.
17 Alexandre Kiss, Op. Cit., p. 54.
18 Alexandre Kiss et Jean-Pierre Beurier, Op.
Cit., p. 34.
7
organisation intergouvernementale ou presque et 700
observateurs dépêchés par quelque 400 ONG. Elle a
adopté la Déclaration sur l'environnement,
énonçant les principes qui ont guidé toute action dans ce
domaine pendant deux décennies19.
Pour la première fois une conférence
interétatique met en avant la nécessité d'adopter une
réglementation internationale relative à la protection de la
nature, c'est une sorte de premier cri d'alarme au niveau des Etats qui va se
traduire par une Déclaration de principes, un plan d'action et la
création d'une institution, le Programme des Nations Unies pour
l'environnement,
PNUE20.
La Déclaration sur l'environnement de Stockholm
comprend 26 principes qui ont joué un rôle majeur dans le
développement du droit international de l'environnement. Elle n'a pas de
valeur juridique contraignante, il s'agit de principes déclaratoires,
simplement incitatifs. Cependant ce texte sans valeur juridique directe a une
portée morale, politique et opérationnelle importante et il
contribuer à consacrer certains principes comme règles
coutumières21. Mais en ce qui concerne la proclamation d'un
droit d'accès à la justice en matière d'environnement, il
faudra encore attendre quelques années soit une décennie
après la Conférence pour voir une première proclamation du
droit d'accès à la juge ou mieux à la justice en
matière d'environnement et c'est avec la Charte mondiale de la
nature22. La Charte vient réaffirmer et affermir les
fondements philosophiques de la protection de l'environnement tels que
déjà exprimés dans la Déclaration de Stockholm.
Elle comprend un préambule et vingt-quatre articles. Le préambule
expose les concepts fondamentaux qui doivent régir les relations entre
humains et la nature : la nécessité de maintenir les processus
écologiques essentiels et les systèmes essentiels à la
subsistance ainsi que la diversité des formes organiques.
La Charte prévoit des applications concrètes de
ces concepts par, l'intégration de la protection de la nature dans la
planification et l'exécution des activités sociales et
économiques, des règles de mise en oeuvre qui prévoient
l'incorporation des normes ainsi énoncées dans la
législation et la pratique des Etats. Ainsi, un point très
important est énoncé dans la Charte : le droit pour toute
personne d'avoir la possibilité de participer à
l'élaboration des décisions qui concernent directement son
environnement et, au cas où celui-ci subirait des dommages ou des
dégradations, elle doit avoir accès à des moyens de
recours pour obtenir réparation. Cette norme
19 Alexandre Kiss, Op. Cit., p. 24.
20 Jean-Marc Lavieille, Droit international de
l'environnement, Paris, éd. Ellipses, 2010, p. 48.
21 Idem., p. 49.
22 Adopté et solennellement proclamé le
28 octobre 1982 par l'AGNU, A/RES/37/7.
8
ne fait aucune distinction entre les résidents
nationaux de l'Etat où ont lieu les activités venant en ligne de
compte et les non-résidents, elle confirme donc le principe de
l'égalité d'accès aux procédures administratives et
aux tribunaux23.
Tout ceci va apporter d'importants développement tant
sur le plan mondial que dans le cadre des régions. Qu'il s'agit de la
réglementation visant les relations bilatérales,
multilatérales ou encore dans les principaux secteurs de l'environnement
: mers, eaux, atmosphère, espace cosmique, protection de faune et de la
flore sauvage. Mais il faudra encore attendre quelques années pour que
la question du droit d'accès à la justice en matière
d'environnement refasse surface.
Vingt ans après la Conférence de Stockholm, une
autre conférence internationale aura un impact important dans le
développement du droit international de l'environnement et dans la
consécration du droit d'accès à la justice en
matière d'environnement, il s'agira de la Conférence de Rio de
1992. Les origines de la Conférence de Rio remontent au rapport de la
Commission mondiale pour l'environnement et le développement, il s'agit
de la Commission Brundland24. La conférence réunit 172
Etats représentés par près de 10000 participants dont 116
Chefs d'Etat ou de gouvernements, 1400 ONG ainsi que 9000
journalistes25. Si la Conférence de Stockholm a
été caractérisée par une méfiance du
continent africain, celle de Rio marque une prise de conscience des
problèmes environnementaux. Cette prise de conscience comme le dirait le
professeur Maurice Kamto « ne s'est opérée
instantanément (...). Elle a suivi une progression due à divers
facteurs et a trouvé son expression dans des formes variées
»26.
De cette conférence27, deux conventions de
portée universelle ont été ouvertes à la signature
: la Convention des Nations Unies sur les changements
climatiques28 et la Convention sur la diversité
biologique29. Et trois instruments non obligatoires ont
été adoptés : la Déclaration de principes, non
juridiquement contraignante mais faisant autorité, pour un consensus
mondial sur la gestion, la conservation et l'exploitation écologiquement
viable de
23 Lire à ce sujet Alexandre Kiss et
Jean-Pierre Beurier, Op. Cit., p. 36.
24 En 1983, l'AGNU avait chargé Mme Harlem
Brundland, plusieurs fois ministre norvégien de l'environnement, de
mettre sur pied une commission indépendante afin d'examiner
l'état de l'environnement et du développement dans le monde et de
proposer une stratégie à long terme pour l'an 2000.
25 Alexandre Kiss, Op. Cit., p. 34.
26 Maurice Kamto, Droit international de
l'environnement en Afrique, Paris, éd. EDICEF, 1996, p. 33.
27 Celle de Rio de 1992.
28 Adoptée le 9 mai 1992 à New York t
entrée en vigueur le 21 mars 1994.
29 Adoptée le 5juin 1992 à Rio de
Janeiro et entrée en vigueur le 29 décembre 1993
9
tous les types de forêts ; la
Déclaration sur l'environnement et le développement et
un programme d'action dit Agenda 21.
La Déclaration de Rio a une portée
générale et dénote d'une influence certaines des pays en
développement. Elle réaffirme les principes de la
Déclaration de Stockholm de 1972 mais son approche et sa philosophie
restent très différentes. Le concept central est le
développement durable, qui signifie l'intégration du
développement et de la protection de l'environnement telles que
définies par la Commission mondiale pour l'environnement et le
développement. La Déclaration se caractérise
également par une approche anthropocentrique, très
différente de celle de la Déclaration de Stockholm et de la
Charte mondiale de la nature. C'est ainsi que le Principe 1 de la
Déclaration proclame que les êtres humains sont au centre des
préoccupations relatives au développement durable. Ils ont droit
à une vie saine et productive en harmonie avec la nature.
La Déclaration de Rio constitue, dans sa
réaffirmation de principes de la Déclaration de Stockholm et dans
la formulation des nouveaux principes, une pierre précieuse dans
l'évolution du droit international de l'environnement mais aussi dans la
proclamation et la reconnaissance du droit d'accès à la justice
en matière d'environnement. Cette reconnaissance s'est faite en de
termes généraux. C'est ainsi que le Principe 10 de la
Déclaration de Rio énonce qu': « Un accès
effectif à des actions judiciaires et administratives, notamment des
réparations et des recours doit être assuré ».
Le Sommet de Rio est une véritable avancée en
termes de prise en considération juridique de la protection de
l'environnement et du développement durable. Après Rio, le droit
international connaitra un franc succès mais dont les résultats
restent nuancés.
B. Après Rio
La Conférence a été un
événement marquant dans l'évolution du droit international
de l'environnement. L'après Rio a été déterminant
dans le développement du DIE et même dans la reconnaissance du
droit d'accès à la justice en matière d'environnement.
Cette période a été caractérisé, par entre
autre, une reconnaissance de l'importance, mieux de la nécessité,
de la protection de l'environnement. Désormais, toutes les conventions
internationales ayant une portée générale, en particulier
celles qui ont trait à différentes formes de coopération
économique ne cessent d'affirmer que la protection de l'environnement
fait partie de ses objectifs. En outre, les instruments adoptés à
Rio ont eu une influence directe dans le droit
10
conventionnel de l'environnement qu'il s'agisse des
traités internationaux ou régionaux, sectoriels ou
transversaux.
Depuis la Conférence de Rio, l'environnement et le
droit de l'environnement ont quitté les feux de la rampe et ont perdu en
importance dans les relations et les institutions internationales. La
santé publique et l'équité sociale retiennent plis
l'attention, certes, mais aussi les instruments économiques du
développement, tels que les droits de pollution négociables, les
analyses de risques ou la tarifications des ressources naturelles30.
Les intérêts se sont diversifiés, les partenaires se sont
multipliés et les approches environnementales elles-mêmes se sont
renouvelées, entrainant de nouveaux acteurs aux côtés des
ONG, des multinationales, des collectivités locales et autres grands
groupes31. Toutefois, les espoirs suscités par le Sommet de
Rio ne se réaliseront pas au Sommet de Johannesburg.
La Déclaration de Johannesburg sur le
développement durable ne reconnaitra pas officiellement le lien entre la
protection de l'environnement et les droits fondamentaux, elle ne fera non plus
mention d'un droit à l'environnement. quant au plan de mise en oeuvre,
le projet de texte élaboré au cours de la quatrième
réunion préparatoire consacrait deux articles au droit
fondamental à l'environnement, soit l'art. 151 et 15232.
Texte dont la portée sera sensiblement réduite. L'art. 151
proposait aux Etats d'élaborer, avec la participation de la
société civile, des lignes directrices multilatérales et
globales pour promouvoir et assurer l'accès à l'information, la
participation publique au processus décisionnel et l'accès
à la justice, à partir de l'expérience existante, incluant
les initiatives régionales33. Au cours des
négociations du plan de mise en oeuvre, l'article sera
entièrement supprimé34.
§2. Traités internationaux
Les traités internationaux constituent une des sources
les plus importantes et les plus utilisées en droit international. Ils
offrent plus de précision que la coutume internationale et a un
caractère contraint qui échappe principalement aux simples
déclarations faites soit par les Etats lors d'une conférence
internationale soit par les organisations intergouvernementales. Il est triste
de constater qu'à ce jour qu'il n'y a pas l'équivalent des
Déclarations de Rio et de
30 Maryse Grandbois et Marie-Hélène
Bérard, « La reconnaissance internationale des droits de
l'environnements : le droit de l'environnement en quête
d'effectivité », in Les cahiers de droit, Volume 44,
n° 3, 2003, p. 454.
31 Maryse Grandbois et Marie-Hélène
Bérard, Op. Cit., p. 455.
32 Idem
33 Ibidem
34 Ibidem
11
Stockholm au niveau conventionnel. « Une telle convention
globale, sans être un remède miracle donnerait plus de force
contraignante à un certain nombre de principes essentiels
»35.
Du point de vue du contenu des conventions relatives à
l'environnement, le Professeur Lavieille distingue quatre grandes
catégories : d'abord les conventions entièrement
consacrées à la protection de l'environnement ; puis les
traités qui réglementent un espace ou une activité mais
qui contient quelques dispositions spécifiques relatives à
l'environnement (les traités sur l'Antarctique, l'espace
atmosphérique, la convention sur le droit de la mer). Ensuite, les
conventions qui bien que non rattachées directement à la
protection de l'environnement ont une influence sur celle-ci : par exemple un
traité de désarmement. Enfin, il y a les conventions qui peuvent
avoir des effets destructeurs sur l'environnement telles que les conventions de
commerce sans clause écologiques.
Sans remettre en cause cette classification, sans
procéder à l'étude de processus l'élaboration et
sans vouloir faire une étude détaille de chacune de ces
conventions, nous allons opérer une autre classification des conventions
internationales. Celle-ci aura comme élément de critère la
consécration du droit d'accès à la justice en droit
international. Ainsi, nous analyserons cette consécration au niveau des
conventions internationales relatives aux droits de l'homme et celles relatives
à la protection de l'environnement. Ce qui nous permettra de mieux
comprendre la consécration de ce droit au niveau international.
A. Les conventions internationales sur les droits de
l'homme
Durant des années, la paix et le respect des droits de
l'homme ont constitués de valeurs du DI. Constituant ce que l'on
pourrait qualifier aujourd'hui d'intérêt général de
l'humanité. Cet intérêt constitue la racine du droit
international actuel. Au fil des ans, la nécessité de
protéger l'environnement a rejoint cet ensemble et comprend le devoir de
tous de maintenir la paix, de respecter les droits de l'homme, de
protéger l'environnement et d'aider les pays pauvres36. De ce
fait, il est évident que le droit international de l'environnement et le
droit international des droits de l'homme entretiennent des relations
très étroites.
La dimension juridique de l'accès à la justice
n'est apparue que progressivement et tardivement grâce au triomphe de
l'idéologie des droits de l'homme. Initialement, aucune des
35 Jean-Marc Lavieille, Op. Cit., p. 90.
36 Lire Alexandre Kiss, Introduction
générale du droit de l'environnement : illustration par la
forêt, notes de cours, Master 2 DICE, Université de Limoges,
pp. 2-5.
12
déclarations des droits de l'homme au
XVIIIème siècle ne mentionne explicitement un droit
d'accès à la justice37. Ces textes se
préoccupent de la liberté individuelle et de la
sûreté ainsi que de droits civils et politiques38.
L'accès à la justice est classiquement
aperçu comme un droit fondamental de l'homme, il garantit
l'effectivité de tous les autres droits reconnus à la personne
humaine. « De manière générale, il est entendu le
plus souvent comme signifiant l'accès aux tribunaux. En
arrière-plan de cette conception se trouve l'idée que tous les
citoyens puissent avoir un accès égal aux institutions
judiciaires qui sont chargées d'appliquer la loi et d'en sanctionner les
manquements »39. Il s'agit là d'un droit fondamental
consacré par divers instruments juridiques internationaux des droits de
l'homme. Encore faut-il préciser que ces textes utilisent moins
l'expression droit d'accès à la justice que le droit au recours
effectif ou de droit au procès équitable. Et certains auteurs
préfèrent l'expression droit au juge
naturel40.
Ainsi, la Déclaration universelle des droits de l'homme
de 1948 qui se présente dans son domaine comme l'idéal à
atteindre par les peuples, énonce en article 8 ce qui suit : «
Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions
nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux
qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi. ». Et
l'article 10 renchérit en ces termes : « Toute personne a
droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue
équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et
impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du
bien-fondé de toute accusation en matière pénale
dirigée contre elle. ». L'accès à la justice est
aussi un concept central pour toutes les questions touchant à la justice
en ce qu'il est un indicateur de la bonne qualité du fonctionnement des
institutions judiciaires. En règle générale, il exprime la
possibilité de porter une affaire devant une juridiction pour faire
valoir ses droits ou demander réparation lorsque ces derniers ont
été bafoués. L'accès à la justice a un
caractère transversal puisqu'il renvoie à la thématique
générale de promotion de la bonne gouvernance.
37 Lire Bétaille, Julien (dir.), Le
droit d'accès à la justice en matière
d'environnement, Nouvelle édition Toulouse, Presses de
l'Université Toulouse 1 Capitole, 2016. Disponible sur
http://books.openedition.org/putc/996
38 Idem
39 Anne-Marie Santorineos, « L'accès
à la justice en matière de droits de la personne : le difficile
accès au tribunal des droits de la personne », in
R.D.U.S., 2012, p. 51.
40 Thierry Renoux, « Le droit au juge naturel,
droit fondamentaux », in RTD. Civ., 1993, p. 33.
13
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques
proclame en son article 14.1 que : « Toute personne a droit à
ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un
tribunal compétent, impartial, établi par la loi (...).
».
En droit international des droits de l'homme, le droit
d'accès à la justice comprend plusieurs facettes à savoir
: le droit à un procès équitable, le droit au recours
effectif, le droit au juge ou le droit à un tribunal, le droit à
une décision de justice et le droit à l'exécution de
celle-ci41. On constate ainsi que le droit d'accès à
la justice est à la base de plusieurs droits procéduraux et sans
lui, la proclamation des droits de l'homme ou tout simplement de tout droit
serait utopique. Le droit d'accès à la justice se présente
donc comme une garantie de droits humains. Ce qui pousse Thierry Renoux a le
qualifié de « bouclier et de fer de lance des droits de l'homme.
»42. Il apparaît ainsi que le droit d'accès
à la justice est un outil de protection des droits à la
dispositions des justiciables43.
Le droit d'accès à la justice, sous le prisme du
droit à un procès équitable renvoie à l'idée
d'égalité des armes devant le juge. Elle requiert ainsi que
chaque partie se voit offrir une possibilité raisonnable de
présenter sa cause dans les conditions qui ne la placent pas dans une
situation de net désavantage par rapport à son adversaire. Il
implique, donc, le principe du contradictoire en dehors de celui de
l'égalité des armes44. Ce dernier, se veut « un
véritable principe de droit naturel en droit processuel en raison du
lien indissociable entre égalité, justice et Etat de de droit
»45.
L'accès à la justice, mieux le droit
d'accès à la justice, n'est pas seulement proclamé ou
énoncé par les instruments relatifs aux droits de l'homme de
portée mondiale mais aussi par des instruments de portée mondiale
en matière d'environnement qu'il s'agisse instruments contraignants ou
pas.
B. Les conventions internationales relative à
l'environnement
L'accès à la justice en matière
d'environnement est perçu comme le troisième pilier des droits
procéduraux découlant du droit fondamental à la protection
d'un environnement sain. Il garantit l'effectivité des deux autres
droits procéduraux traditionnellement reconnus, à savoir
41 J. Dutheil de la Rochère, « Droit au
juge, accès à la justice européenne », in
Pouvoirs, n°96, 2001, p. 123.
42 Lire Bétaille, Julien (dir.), Op.
Cit.
43 Idem
44 Jean-Désiré Ingange wa Ingange,
Droits Humains : Droits de l'homme et libertés publiques, notes
de cours, Université Libre de Kinshasa, 2014, p. 66.
45 Bruno Oppetit, Philosophie du droit,
Paris, éd. Dalloz, 1999, p. 117.
14
le droit à l'information et le droit de participer au
processus décisionnel dans ce domaine46. Ces relations sont
formulées dans le principe 10 de la Déclaration de Rio de 1992
sur l'environnement et le développement, en ces termes : « La
meilleure façon de traiter les questions d'environnement est d'assurer
la participation de tous les citoyens concernés, au niveau qui convient.
Au niveau national, chaque individu doit avoir dûment accès aux
informations relatives à l'environnement que détiennent les
autorités publiques, y compris aux informations relatives aux substances
et activités dangereuses dans leur collectivité, et avoir la
possibilité de participer aux processus de prise de décision. Les
Etats doivent faciliter et encourager la sensibilisation et la participation du
public en mettant les informations à la disposition de celui-ci. Un
accès effectif à des actions judiciaires et administratives,
notamment des réparations et des recours, doit être assuré.
».
Ces droits ne concernent pas seulement le droit positif des
Etats mais aussi le droit international. Pour certains questions
environnementales, l'accès à la justice ne peut pas être
effectif sans des procédures internationales, supranationales ou
transnationales en plus de procédures nationales. Ainsi,
l'efficacité de l'accès à la justice dépend du fait
que cet accès soit fourni au niveau national ainsi qu'au niveau
international ou supranational (devant les cours ou institutions ayant pour
fonction d'examiner le respect de règles en matière
d'environnement). cela implique une sorte d'accès multi-niveaux à
la justice47. En plus de la Déclaration de Rio sur
l'environnement et le développement de 1992, il y a le Projet d'articles
sur la prévention des dommages transfrontières
élaboré en 2001 par la CDI ; le Plan d'action du Sommet mondial
pour le développement durable de Johannesburg de 2002 ; la Directive du
PNUE pour l'élaboration d'une législation nationale sur
l'accès à l'information, la participation du public et
l'accès à la justice dans le domaine de l'environnement de Bali
de 2010 et la Déclaration de Rio de Janeiro, Rio + 2048.
Le Projet d'articles sur la prévention des dommages
transfrontières énonce en son art. 15 qu': « (...), un
Etat ne fait pas de discrimination fondée sur la nationalité, le
lieu de résidence ou le lieu où le préjudice pourrait
survenir dans l'octroi aux dites personnes, conformément à son
système juridique, de l'accès à des procédures
judiciaires ou autres pour demander protection ou d'autres recours
appropriés.». Cet article est fondé sur l'article 32 de
la
46 Charles-Hubert Born, « L'accès
à la justice en matière d'environnement en Belgique : la
révolution d'Aarhus enfin en marche ? », in
https://www.researchgate.net/publication/291349875
47 Lire Bétaille, Julien (dir.), Op.
Cit.
48 Idem
15
Convention sur le droit relatif aux utilisations des cours
d'eau internationaux à des fins autres que la navigation49 et
énonce le principe fondamental selon lequel l'Etat d'origine doit donner
accès à ses procédures judiciaires et autres sans
discriminations fondée sur la nationalité, le lieu de
résidence ou le lieu où survient le préjudice. Le
comité de rédaction a estimé que, puisque l'art. 32 de la
Convention avait fait l'objet de débats approfondis tant à la CDI
qu'à la sixième commission, aucune modification substantielle ne
s'imposait : seule une modification rédactionnelle mineure a
été apportée50.
Le Plan d'action du Sommet mondial pour le
développement durable de Johannesburg de 2002 tire son fondement sur les
progrès accomplis depuis Rio et vise à faciliter la
réalisation des objectifs restants. Ainsi, les parties présente
à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le
développement durable se sont engagées à prendre des
mesures concrètes à tous les niveaux et à accroitre la
coopération internationale en tenant compte des principes de
Rio51. Et dans le cadre de mise en oeuvre de moyens
d'exécution, les Parties s'engagent à : « Assurer,
à l'échelon national, l'accès aux informations relatives
à l'environnement et à des actions judiciaires et administratives
touchant les questions d'environnement, et la participation du public à
la prise des décisions pour promouvoir l'application du principe 10 de
Rio sur l'environnement et le développement (...) ».
La Directive du PNUE pour l'élaboration d'une
législation nationale sur l'accès à l'information, la
participation du public et l'accès à la justice dans le domaine
de l'environnement et la Déclaration de Rio + 20 contribuent
également au développement d'un droit d'accès aux
juridictions nationales et à l'exercice de ce droit au niveau mondial.
Outre les instruments énumérés ci-haut, l'Agenda 21
appelle les gouvernements et les législateurs à établir
des procédures administratives et judiciaires en vue de contrôler
la légalité des décisions prises et de recours pour des
actions affectant l'environnement qui peuvent être illégales ou
49 L'art. 32 de la Convention dispose : «
A moins que les Etats du cours d'eau intéressés n'en
conviennent autrement pour protéger les intérêts des
personnes, physiques ou morales, qui ont subi un dommages
transfrontières significatif résultant d'activités
liées à un cours d'eau international ou qui se trouvent
sérieusement menacées d'un tel dommage, un Etat du cours ne fait
pas discrimination fondée sur la nationalité, le lieu de
résidence ou le lieu où le préjudice a été
subi dans l'octroi auxdites personnes, conformément à son droit
interne, de l'accès aux procédures juridictionnelles et autres ou
bien d'un droit à indemnisation ou autre forme de réparation au
titre d'un dommage significatif causé par de telles activités
menées sur son territoire. » ; il faut également noter
que cette Convention adoptée à New York le 21 mai 1997, n'est pas
encore entrée en vigueur, lire Michel Prieur (dir.), Recueil
francophone des traités et textes internationaux en droit de
l'environnement, Bruxelles, éd. Bruylant, 2011, p. 81.
50 Nations Unies, Annuaire de la Commission du
droit international, 2001, Volume 1, p. 66.
51 Nations Unies, Rapport du Sommet mondial
pour le développement durable, Johannesburg, 26 août - 4
septembre 2002, p. 8.
16
enfreindre des droits protégés par la loi. Elle
les encourage également à donner accès à la justice
aux individus, aux groupes et aux organisations ayant un intérêt
légal reconnu. La CNUDM prévoit également que les Etats
s'assureront qu'il existe un recours permettant une compensation rapide et
adéquate ou une autre solution aux dommages provoqués par la
pollution à l'environnement marin par des personnes physiques ou morales
appartenant à leur juridiction52.
Le droit d'accès à la justice occupe une place
important voire essentiel dans le renforcement du droit de l'environnement que
ce soit au niveau national, régional ou même mondial, d'où
la simple proclamation du droit d'accès à la justice ne suffit
pas pour garantir son exécution, il faudrait encore que soit
établie de mécanismes de suivi et contrôle pour veiller
à une exécution effective et à l'établissement des
rapports réguliers sur l'état d'exécution de
différents, instruments contraignants ou pas, proclamant ce droit. Ce
qui rendrait effectif le principe 10 de la Déclaration de Rio de 1992
sur l'environnement et le développement.
Section 2. Mécanismes de garantie et de
protection
On n'aurait rien fait, si l'on s'était contenté
de déclarer, de proclamer des droits. C'est évidemment leur
réalisation qui importe et celle-ci suppose la mise en place de
mécanismes de garantie qui soient effectivement au service et à
la disposition des titulaires de ces droits53. Et pour s'assurer du
respect de leurs obligations par les Etats, ces différents instruments
s'emploient à mettre en place des instances de contrôle, qui
pourront être saisies selon divers modalités et qui seront
dotées de pouvoirs plus ou moins contraignants.
Au cours des années du développement du droit
international de l'environnement, la nécessité est devenue de
plus en plus évidente de créer des mécanismes (...) de
caractère permanent entre les Etats parties aux traités relatifs
à l'environnement54. La grande majorité des
traités concernant la conservation de l'environnement contient des
dispositions institutionnelles, attribuant des compétences plus ou moins
étendues à des organismes internationaux55. Ces
attributions peuvent se résumées en trois catégories de
tâches : gérer la
52 Guy Canivet, Luc Lavrysen et Dominique Guihal,
Manuel de droit de l'environnement, Nairobi, PNUE, 2006, p. 73.
53 Jean-Désiré Ingange wa Ingange,
Op. Cit., p. 84.
54 Alexandre Kiss et Jean-Pierre Beurier, Op.
Cit., p. 53.
55 Idem
17
convention, rassembler et, le cas échéant,
rediffuser des informations, suivre l'application des dispositions comportant
des engagements de la part des Etats56.
A ce jour, il n'existe aucune convention internationale qui
consacre au niveau mondial un droit d'accès à la justice en
matière d'environnement. Ainsi, au lieu de chercher à analyser
les mécanismes d'un droit qui n'ont pas encore fait l'objet d'une
convention contraignante au niveau universelle, nous allons procéder
à une étude mécanismes de garantie et de protection de
l'environnement au niveau mondial. Ainsi, dans cette section, on opposera les
garanties internationales d'origine non conventionnelle (§1) et celles
procédant d'une convention spécifique (§2).
§1. Les garanties d'origine non
conventionnelles
Les Etats ont très tôt mis en place des garanties
non conventionnelles dédiées à la protection de
l'environnement57. Il en résulte une grande quantité
et grande diversité de mécanismes de garantie dans le domaine de
l'environnement58. Elles peuvent procéder de l'apparition
d'une coutume internationale imposant la protection de l'environnement ou de
l'action menée par des organisations internationales ou institutions
internationales.
A. Garanties liées à l'existence d'une coutume
internationale
Parler de règles de droit coutumier international dans
un domaine aussi nouveau que celui du droit international de l'environnement
peut sembler surprenant car le développement d'un tel
élément prend souvent des décennies, voire des
siècles59. Car, la règle coutumière est
déduite de la répétition de précédents,
accompagnée de la conviction qu'ils correspondent au droit60.
Cependant, à l'acceptation par les Etats peut se substituer la pratique
générale qui consiste en une série de comportements
uniformes. La réponse à cette question a été
très rapidement donnée sur le plan du droit international
général.
Les décisions judiciaires ont joué un rôle
important dans le développement des règles de droit coutumier. Le
principe fondamental dans les relations bilatérales en matière
d'environnement a pour origine la sentence arbitrale de 1941 rendue dans
l'affaire de la
56 Alexandre Kiss et Jean-Pierre Beurier, Op.
Cit., p. 53.
57 Jean-Frédéric Morin et Amandine
Orsini, Politique internationale de l'environnement, Paris, éd.
Presses de Sciences Po, 2015, p.
58 Idem
59 Alexandre Kiss, Op. Cit., p. 52.
60 Jean-Désiré Ingange wa Ingange,
Op. Cit., p. 92.
18
Fonderie du Trail. La sentence consacrera un droit qui sera
par la suite repris par divers instruments contraignants et non-contraignants
(Déclaration de Rio de 1992 sur l'environnement et le
développent, l'Avis consultatif de la Cour internationale de Justice,
etc.) , à savoir le devoir de faire en sorte que les activités
exercées dans les limites de juridiction d'un Etat ou sous son
contrôle ne causent pas de dommages à l'environnement dans
d'autres Etats ou dans les régions ne relevant d'aucune juridiction
nationale. Le droit coutumier du droit international de l'environnement est
essentiellement composé de principes sur le fondement de concepts qui
sous-tendent toute la matière.
B. Garanties procurées par l'action des
organisations et institutions internationales
Il n'est guère nécessaire d'insister encore de
nos jours sur l'importance que revêt pour l'avenir la protection de
l'environnement, ni sur le fait que l'environnement étant indivisible,
la lutte pour la sauvegarder doit être nécessairement
internationale61. Ainsi, la coopération a un rôle
particulièrement important à jouer dans la protection de
l'environnement au niveau international. Cependant la plupart des organisations
intergouvernementales européennes ont été
créées, principalement, en vue d'une coopération
économique, ce qui fait que leur façon d'aborder le
problème de la protection de l'environnement est souvent
conditionnée par des objectifs économiques62. En
Afrique, également la mise en oeuvre du DE pâtit de de la
faiblesse des politiques environnementales des organisations
d'intégration économique africaines63. Il faut
cependant noter que les facteurs économiques ont aussi joués un
rôle dans la protection de l'environnement64. Et c'est
à partie de 1972 que la protection est devenue une politique
communautaire au sein de la communauté européenne.
Le continent africain a également mené des
actions dans le cadre de ses différentes organisations
sous-régionales pour garantir la protection de l'environnement, faisant
ainsi de la protection de l'environnement une composante essentielle droit
communautaire africain. L'Acte constitutif de l'UA, élaboré
à une période où les questions environnementales
étaient déjà encrées dans la conscience
universelle, avait pris en compte les préoccupations
environnementales. Cependant, l'indigence des politiques
environnementales des
61 Alexandre-Charles Kiss, « La protection de
l'environnement et les organisations européennes », in Annuaire
français de droit international, 1973, p. 895.
62 Idem
63 Maurice Kamto, « La mise en oeuvre du droit
de l'environnement : forces et faiblesses des cadres institutionnels », in
Revue africaine de droit de l'environnement, n° 01, 2014, pp. 29
- 36.
64 Alexandre Kiss, Introduction au droit
international de l'environnement, Op. Cit., 11.
19
organisations africaines d'intégration
économique est assez frappante. On trouve ça et là les
documents de politiques environnementales communautaires qui s'en tiennent
à des généralités et à des formulations
souvent vagues, et qui, en tout état de cause, ont rarement une force
contraignante.
En ce qui concerne l'action des organisations communautaire
africaines, elles ne sont pas au même niveau. La CEDEAO fait à cet
égard des efforts non négligeables comparé à la
CEMAC et plus encore à la CEEAC, même si ces efforts restent
embryonnaires65. Ce qui fait dire à certains penseurs
qu'« il n'existe pas de véritable droit communautaire africain dans
la plupart des organisations communautaires africaines »66.
Cependant cette absence est compensée dans une certaine mesure par une
multiplicité des institutions d'intégration ou de
coopération en matière de gestion des ressources naturelles
partagées67.
§2. Les garanties mises en place par les conventions
internationales
L'existence de mécanismes conventionnels de
contrôle et de sanction efficaces est une condition indispensable de
l'effectivité de la protection de l'environnement. Il existe de par le
monde des dizaines de commissions internationales ou institutions
internationales créées dans le cadre des traités
internationaux qu'il s'agisse de traités relatifs aux droits de l'homme
ou concernant la protection de l'environnement qui veillent à la
protection de l'environnement.
A. Conventions internationales des droits de l'homme
En matière de droits de l'homme, ces garanties peuvent
procéder des mécanismes classiques du droit international
(coutume, protection diplomatique, ...) ou des systèmes institutionnels
que connaît la société internationale au niveau universel
et au niveau de régions. Mais l'originalité de la protection
internationale des droits de l'homme réside essentiellement dans la mise
en place de mécanismes conventionnels spécifiques.
Un juge de la CIJ avait déjà reconnu en 1997
l'interdépendance entre les droits fondamentaux et la protection de
l'environnement dans l'affaire Gabcikovo-Nagymaros. Les organes de surveillance
des droits et libertés fondamentales ont aussi soulignés cette
interdépendance dans plusieurs décisions. Les différents
comités ont non seulement mis en
65 Maurice Kamto, « La mise en oeuvre du droit
de l'environnement : forces et faiblesses des cadres institutionnels »,
Op. Cit., p. 34.
66 Idem
67 Ibidem
20
lumière les conséquences de la
dégradation de l'environnement sur la jouissance des droits
fondamentaux, mais leurs rapports et décisions ont souvent
été suivi de modifications législatives ou de
procès en droit interne68. Au cours des années,
plusieurs décisions et rapports des organes de surveillance des
conventions sur les droits fondamentaux ont assimilé les atteintes
graves à l'environnement à des atteintes aux droits et
libertés fondamentaux69. Lorsque les dommages
environnementaux induisent des conséquences graves pour la santé
des populations locales ou menacent l'exercice d'autres droits
protégés, ces comités des surveillances n'hésitent
pas à reconnaitre qu'il y a violations des droits
fondamentaux70.
B. Conventions internationales relatives à
l'environnement
Parmi les conventions relatives à la protection de
l'environnement instituant de commissions ou institutions internationales pour
assurer une coopération permanente en vue de protéger
l'environnement, nous pouvons citer : la convention concernant la pollution des
eaux douces (la commission internationale pour la protection du Rhin contre la
pollution), la pollution de la mer (art. 12 de la Convention d'Helsinki du 22
mars 1974 sur la protection de l'environnement marin dans la mer Baltique) ou
la protection de la vie sauvage (art. 7 à 13 de la Convention de
Canberra du 20 mai 1980 sur la conservation de la faune et la flore marines de
l'Antarctique)71.
Le droit international de l'environnement est constitué
aujourd'hui en règles établies sous formes de traités. De
nombreux traités, estimé à plus de 700, formulent de
règles générales. Au moins 250 d'entre eux sont
entièrement consacrés à la protection de l'environnement,
alors que d'autres ne contiennent que quelques dispositions relatives à
l'environnement. néanmoins, elles sont importantes72. Un
grand nombre de traités relatifs aux eaux frontalières
(traités pour la plupart bilatéraux ou adoptés par les
Etats qui partagent une rivière ou un bassin fluvial) ne contiennent
qu'une ou quelques dispositions relatives à
l'environnement73.
De manière générale, ces conventions ont
des structures comprenant une conférence des Parties, un
Secrétariat et un Conseil scientifique chargé de les conseiller.
Toutefois, dans certains cas, notamment pour des structures de
coopération sous-régionale et bilatérale, il n'y a
68 Maryse Grandbois et Marie-Hélène
Bérard, Op. Cit., p. 458.
69 Idem., p. 459.
70 Ibidem
71 Alexandre Kiss et Jean-Pierre Beurier, Op.
Cit., p. 53.
72 Alexandre Kiss, Op. Cit., p. 47.
73 Idem
21
même pas de secrétariat permanent74.
Les mécanismes de coopération peuvent aussi intervenir dans le
règlement de différends qui pourrait surgir entre les Etats
Parties à la convention. Ainsi, l'art. 18 al. 1 de la Convention de
Berne du 19 septembre 1979 prévoit que le comité permanent
institué par cette convention « faciliter autant que de besoin le
règlement amiable de toute difficulté à laquelle
l'exécution de la convention donnerait lieu ». En cas
d'échec, l'affaire doit être soumise à
l'arbitrage75. Cette procédure revient souvent dans les
traités visant la conservation de l'environnement mais, bien entendu,
avec des variantes : le mécanisme de coopération prévu par
la convention fait d'abord une tentative pour résoudre le
différend et s'il n'y parvient pas, la question est soumise à une
mode de règlement, notamment l'arbitrage ou le recours à la CIJ,
les Parties gardant toujours une large liberté de choix76.
74 Alexandre Kiss et Jean-Pierre Beurier, Op.
Cit., p. 54.
75 Idem
76 Ibidem
22
CHAPITRE 2. L'ACCES A LA JUSTICE ENVIRONNEMENTALE AU
NIVEAU
DES REGIONS
L'accès à la justice est étroitement
lié au droit d'accès à l'information et le droit à
la participation du public au processus décisionnel. Il constitue un
moyen de contrôler l'administration publique et d'assurer que les droits
d'accès à l'information et à la participation peuvent
être réalisés77. En l'absence d'une convention
mondiale consacra un tel droit, l'accès à la justice en
matière d'environnement est plus proclamé par des conventions
régionales. Et chaque région a une approche différente sur
la notion du droit d'accès à la justice78.
C'est ainsi que nous examinerons, dans une première
partie, l'accès à la justice environnementale au sein de l'Union
européenne (Section 1) et dans une seconde partie au sein de l'Union
européenne et de l'Organisation des Etats d'Amérique
(Section2).
Section 1. Au sein de l'Union européenne
Le droit de l'environnement de l'Union européenne est
dense, cumulant instruments sectoriels et instruments de nature transversale
mais pendant longtemps la question de l'accès au juge en matière
d'environnement n'avait quasiment jamais été abordée en
droit de l'Union européenne, si ce n'est, très succinctement par
la directive 90/313 concernant la liberté d'accès à
l'information en matière d'environnement79. Aujourd'hui, la
question est régie par plusieurs directives (§1) et deux convention
qui contribuent directement à la reconnaissance et à la
consécration de ce droit (§2).
§1. Directives de l'UE et du CE
La consécration d'un d'accès au juge au sein de
l'UE au travers de ces directives est demeurée faiblement
développée. La question relative à l'accès à
la justice en matière d'environnement au sein de l'UE est au
régie par plusieurs directives : la directive 2003/4 concernant
l'accès au public à l'information en matière
d'environnement ; la directive 2003/35 prévoyant la participation du
public lors de l'élaboration de certains plans et programmes relatifs
à l'environnement80 ; la directive 2004/35 sur la
responsabilité environnementale ; la
77 Lire Bétaille, Julien (dir.), Op.
Cit
78 Idem
79 Estelle Brosset et Eve Truilhé-Marengo,
Op. Cit.
80 Cette directive modifie la directive 85/337
concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et
privés sur l'environnement et la directive 96/61 relative à la
prévention et à la réduction intégrées de la
pollution.
23
directive2010/75 relative aux émissions industrielles ;
la directive 2011/92 relative à l'évaluation des incidences sur
l'environnement et la directive 2012/18 concernant la maîtrise des
dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances
dangereuses, modifiant puis abrogeant la directive 96/82/CE.
A l'évocation de cette liste, on constate que le droit
d'accès à la justice est envisagé uniquement dans des
textes sectoriels imposant d'autres obligations environnementales81.
C'est donc uniquement au sein de textes non spécifiques et épars
qu'il est possible de trouver quelques dispositions relatives à
l'accès aux juges nationaux et aux conditions qui l'entourent. En outre,
on peut constater que les obligations y sont définies de manière
minimale82.
La directive 2003/35 prévoyant la participation du
public lors de l'élaboration de certains plans et programmes relatifs
à l'environnement constitue une illustration très claire d'un tel
minimalisme. La directive 85/337 prévoyait la possibilité de
recours devant les instances judiciaires ou administratives en cas de refus de
communication abusif et se contentait de souligner que ce recours serait
conforme à l'ordre juridique national83. Pour assurer la mise
ne conformité du droit de l'Union à la Convention d'Aarhus, la
directive 2003/35 révise ladite directive et insère un article 10
bis, à première vue plus développé,
rédigé d'ailleurs en termes très proches de ceux
utilisés dans la Convention84. Toutefois, les obligations
prévues dans l'article sont, au final, moins générales
puisqu'il est prévu que les membres garantissent que les membres du
public ayant un intérêt suffisant pour agir ou faisant valoir une
atteinte à un droit puissent former un recours devant une instance
juridictionnelle ou un autre organe indépendant et impartial
établi par la loi pour contester la légalité des
décisions, des actes ou omissions relevant des dispositions de la
directive85.
L'article 25 de la directive 2010/75 relative aux
émissions industrielles, tout comme l'article 11 de la directive 2011/92
relative à l'évaluation des incidences sur l'environnements sont
régies en des termes identiques à la directive 2003/35. L'art. 23
de la directive 2012/18 est rédigé encore plus succinctement
puisqu'il prévoit une possibilité de réexamen des actes ou
omissions d'une autorité compétente en lien avec une demande
d'information et opère un renvoi à la directive 2011/92
s'agissant de l'accès à la justice86. La directive
2003/4 concernant l'accès
81 Estelle Brosset et Eve Truilhé-Marengo,
Op. Cit.
82 Idem
83 Ibidem
84 Ibidem
85 Ibidem
86 Ibidem
24
du public à l'information en matière
d'environnement prévoit, sans plus de précision, une
possibilité de réexamen et un recours devant un organe
indépendant et impartial établi par la loi. L'art. 13 de la
directive 2004/35 sur la responsabilité environnementale, qui a
notamment pour objectif d'encourager les personnes physiques et morales
à jouer un rôle actif pour aider les autorités
compétentes à remédier aux dommages environnementaux,
prévoit enfin le principe d'un droit au recours tout en précisant
qu'elle ne porte pas atteinte aux dispositions nationales éventuelles
réglementant l'accès à la justice87.
§2. Les Conventions régionales
européennes consacrant l'accès à la justice
environnementale
L'accès à la justice est le moyen concret de
faire valoir le droit de chacun au respect de l'environnement et constitue de
ce fait l'élément essentiel de l'application de celles-ci. La
protection de l'environnement est par nature collectif alors que dans nombre de
systèmes juridiques, un intérêt personnel et direct est
requis pour prétendre agir en justice. Un aménagement des
règles procédurales est donc généralement
nécessaire pour que soit assuré le droit d'accès à
la justice environnementale. C'est ainsi dans le but de garantir de droit dans
son espace l'Union européenne va procéder par l'adoption de
plusieurs textes proclamant le droit d'accès à la justice en
matière d'environnement pour assurer l'effectivité de ce droit et
la possibilité pour ses juridictions communautaires d'être saisies
pour violation de ce droit. Face à la panoplie des textes existants,
deux retiendront notre attention.
Deux conventions consacrent l'accès à la justice
dans l'espace européen : la Convention européenne des droits de
l'homme (A) et la convention d'Aarhus (B).
A. La Convention européenne des droits de l'homme,
CEDH
La Convention européennes des droits de
l'homme88 consacre deux droits de l'homme de nature
procédurale en lien avec l'accès à la justice, à
savoir : le droit à un procès équitable (art. 6 par. 1) et
le droit au recours effectif (art.13). La Cour européenne,
chargée de faire appliquer cette convention, a déduit de ces
dispositions certaines obligations des Etats parties en termes d'accès
à la justice environnementale89.
87 Estelle Brosset et Eve Truilhé-Marengo,
Op. Cit.
88 Vocable habituellement utilisé par la
France et la Belgique qui renvoie à de la Convention de sauvegarde des
droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à
Rome le 4 novembre 1950.
89 Charles-Hubert Born, Op. Cit., p. 285.
25
L'art. 6 par. 1 dispose que : « Toute personne a
droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement
et dans délai raisonnable, par un tribunal indépendant et
impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des
contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du
bien-fondé de toute accusation en matière pénale
dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement,
mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la
presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès
dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la
sécurité nationale dans une société
démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la
protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou
dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal,
lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de
nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.
»
Et l'art. 13 poursuit en ces termes : « Toute
personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente
convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un
recours effectif devant une instance nationale, alors même que la
violation aurait été commises par des personnes agissant dans
l'exercice de leurs fonctions officielles. ».
Plusieurs dispositions de la CEDH garantissent les recours
judiciaires ou administratifs aux individus pour assurer le respect de leurs
droits. L'art. 6 garantit le droit à un procès équitable
qui d'après la Cour européenne, comprend le droit d'accès
à un tribunal et l'art. 13 garantit à toute personne ayant un
grief défendable relatif à une violation de ses droits et
libertés reconnus dans la CEDH, le droit à un recours effectif
devant une instance nationale. L'objet de cet article est de fournir un moyen
au travers duquel les justiciables puissent obtenir, au niveau national, le
redressement des violations de leurs droits garantis par la Convention, avant
d'avoir à mettre en oeuvre les mécanismes international de
plainte devant la Cour90. Il faut relever que l'art. 13 de la CEDH
doit se lire à la lumière de l'art. 35 de la même
convention qui exige l'épuisement des voies de recours interne avant de
pouvoir saisir la Cour européenne.
90 Charles-Hubert Born, Op. Cit., p. 287.
26
De plus, la Cour européenne déduit de certaines
dispositions de la CEDH, comme les art. 291 et 892 et
l'art. 1 du Protocole n° 1 qui consacre le droit au respect des biens, des
exigences de nature procédurale et substantielle permettant d'assurer
par ricochet l'accès à la justice. Toutes ces dispositions ont
vocation à s'appliquer dans les affaires environnementales mettant en
cause les droits de l'homme.
L'art. 6 de la CEDH est l'une des dispositions donnant lieu au
plus grand nombre de litiges devant la Cour et la jurisprudence a
développé un certain nombre d'obligations supplémentaires
liées à l'équité, dont l'égalité des
armes, qui implique que les deux parties aient la possibilité de
présenter leurs arguments et leurs preuves dans des conditions qui
n'avantagent aucun de deux, et que chacun ait la possibilité de
répondre aux arguments ou aux preuves avancés par la partie
adverse. D'autres impératifs découlent aussi de la jurisprudence
portant sur le principe de procès équitable, par exemple la
possibilité pour les parties de ne se présenter en personne
devant les tribunaux et de participer effectivement au procès, et le
devoir qu'ont les tribunaux de rendre des décisions
motivées93. Il faut noter en revanche que l'art. 6 de la CEDH
n'est pas applicable lorsque le droit invoqué par le requérant
n'est qu'un droit procédural relavant du droit administratif et ne
visant pas à protéger un droit matériel dont le
requérant peut se prévaloir en droit interne94.
L'application de l'art. 6 n'est pas toujours aisée dans
les affaires relatives à la protection de l'environnement, tout
particulièrement dans les chefs des ONG de protection de
l'environnement. Ainsi, selon la Cour, l'art. 6 ne permet pas à une
association de revendiquer l'application de cette disposition à une
contestation se rapportant à la défense de l'intérêt
général comme la protection de l'environnement en
général car elle porte sur un droit de caractère
civile95. Mais cet article peut s»appliquer à l'action
des associations environnementales au contentieux objectif lorsque l'acte
attaqué implique la violation d 'un
91 L'art. 2 de la CEDH consacre le droit à
la vie. Cet article ne concerne pas exclusivement les cas de
décès résultant directement d'actes des agents d'un Etat,
mais implique aussi l'obligation positive pour les Etats de prendre toutes les
mesures nécessaires à la protection de la vie des personnes
relevant de leur juridiction. La Cour a estimé cette obligation pouvait
s'appliquer dans le contexte d'activités dangereuses telles que les
essais nucléaires, l'exploitation des déchets toxiques, etc. Elle
a également exigé aux Etats de s'acquitter de cette obligation
même dans les cas de catastrophes naturelles qui échappent
totalement au contrôle de l'homme (Aff. LCB c. Royaume-Uni du 9 juin 1998
; aff. ONERYILDIZ c. Turquie du 18 juin 2002).
92 L'art. 8 de la CEDH consacre le droit au respect
de la vie privée et familiale. Ce droit implique le respect de la
qualité de la vie privée et de la jouissance des agréments
du domicile. La Cour a estimé que cette obligation pouvait s'appliquer
dans le cas de nuisances sonores ainsi dans l'aff. POWELL et RAYNER, la Cour
avait affirmer que les bruits d'avions de l'aéroport de Heathrow avaient
diminué la qualité de la vie privée que celui du
domicile.
93 Manuel sur les droits de l'homme et
l'environnement, éd. du Conseil de l'Europe, p. 97.
94 Aff. Ünver c. Turquie, décision du 26
septembre 2000, §2.
95 Charles-Hubert Born, Op. Cit., p. 286.
27
droit dont elle peut peuvent se dire titulaires, comme le
droit d'accès à l'information ou celui de participer au processus
décisionnel, que la Convention d'Aarhus consacre spécifiquement
dans le chef des associations de protection de l'environnement96.
Il faut noter cependant que si la CEDH offre un certain nombre
de leviers pour améliorer l'accès à la justice en
matière d'environnement, elle ne reconnait pas une protection
générale de l'environnement encore moins un droit à un
environnement de qualité, paisible et sain. Néanmoins,
grâce au travail de la Cour européenne dans sa tâche
d'interpréter et de garantir le droit d'accès à la justice
environnementale confirme que « le droit international des droits de
l'homme offre un potentiel considérable en matière de protection
de l'environnement et des animaux »97. Il faudra, cependant,
attendre la Convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la
participation du public au processus décisionnel et l'accès
à la justice en matière d'environnement pour constater une nette
amélioration sur les questions d'un droit à d'accès
à la justice environnementale au niveau européen.
B. La Convention d'Aarhus : un instrument ambitieux et
de démocratie environnementales
Conclue sous l'égide de la Commission économique
des Nations-Unies pour l'Europe, la Convention d'Aarhus98
représente un progrès considérable en ce qu'elle impose
à ses Parties d'organiser un accès étendu à la
justice en matière d'environnement. Elle dispose d'un Comité
d'examen qui veille au respect des dispositions de la convention,
particulièrement sur l'accès à la justice, pour lui donner
une plus grande effectivité. C'est qui la diffère des autres
conventions internationales relatives à l'environnement. Le
Comité est composé de neuf membres élus par la
Réunion des Parties. Le Comité n'est pas une cour ou une
institution judiciaire, il ne connait pas recours en réparation ou en
contestations des décisions nationales. Elle n'émet que des
conclusions sur le non-respect de la Convention. Son objectif principal n'est
pas de résoudre des conflits entre les Parties à la Convention
mais promouvoir et améliorer le respect de la Convention.
96 Charles-Hubert Born, Op. Cit., p. 286.
97 Opinion séparée du Juge Pinto de
Albuquerque sous l'arrêt rendu en grande chambre Hermann c. Allemagne, le
27 juin 2012.
98 Adoptée le 25 juin 1998 à Aarhus
au Danemark et entrée en vigueur le 30 octobre 2001, après le
16ème instrument de ratification. Elle sera amendée le
27 mai 2005 par la deuxième Réunion des Parties de la Convention,
tenue à Almaty au Kazakhstan, du 25 au 27 mai 2005.
28
La Convention d'Aarhus est un nouveau type d'accord sur
l'environnement. Elle établit un lien entre les droits en matière
d'environnement et les droits de l'homme, reconnait que nous avons une
obligation envers les générations futures et établit que
le développement durable ne peut être atteint que grâce
à la participation de toutes les parties prenantes. Elle établit
un lien entre la responsabilité des pouvoirs publics et la protection de
l'environnement. Elle met l'accent sur les interactions entre le public dans un
cadre démocratique et elle établit un nouveau processus de
participation du public à la négociation et à
l'application des accords internationaux99. Alors que la plupart des
accords multilatéraux sur l'environnement énoncent les
obligations que les Parties ont les uns envers les autres, la Convention
énonce celles que les Etats ont vis-à-vis du public. Elle va plus
loin que tout autre convention sur l'environnement en imposant aux Parties et
aux autorités publiques des obligations claires vis-à-vis du
public en ce qui concerne l'accès à l'information, la
participation du public et l'accès à la justice100.
La Convention d'Aarhus établit les conditions de la
mise en oeuvre de ses trois piliers fondateurs : le droit d'accès
à l'information sur l'environnement, la participation du public au
processus décisionnel et l'accès à la justice en
matière d'environnement. Elle a pour objectif de contribuer à
protéger le droit de chacun, dans les générations
présentes et futures, de vivre dans un environnement propre à
assurer sa santé et son bien-être101.
Les art. 9.1 à 9.3 de la Convention prescrivent
l'obligation pour les Etats parties d'organiser trois types de recours : un
recours ouvert à toute personne « devant une instance judiciaire ou
un autre organe indépendant et impartial établi par la loi »
contre les décisions faisant suite à sa demande d'accès
à l'information en matière d'environnement ; un recours ouvert
à tout membre du public concerné pour contester, devant une
instance judiciaire et/ou un autre organe indépendant et impartial
établi par la loi, la légalité des décisions, actes
ou omissions des autorités publiques susceptibles d'avoir des effets
importants sur l'environnement et soumises à ce titre à la
participation du public ; et à titre subsidiaire et résiduel, un
recours administratif ou judiciaire des membres du public qui répondent
aux critères éventuels prévus par le droit interne pour
contester les actes ou omissions de particuliers
99 Jonas Ebbesson, Helut Gaugitsch et alii, La
Convention d'Aarhus : Guide d'application, 2ème
éd., Nations-Unies, 2014, p. 15.
100 Idem
101 Maryse Grandbois et Marie-Hélène Bérard,
Op. Cit., p. 446.
29
ou d'autorité publiques, allant à l'encontre des
dispositions du droit national de l'environnement de manière
générale102.
Elle est le pilier même de la démocratie
environnementale. Elle introduit la démocratie participative des
citoyens dans le processus de décision publique où les citoyens
deviennent acteurs et participent à la vie administrative contrairement
à la démocratie traditionnelle qui ne connait que des citoyens
électeurs et passifs. Elle est également un élément
important de la mise en oeuvre du programme Action 21, de l'harmonisation des
législations environnementales et du renforcement du processus de
démocratisation en matière environnement en Europe et pour le
reste du monde103. C'est une percée de la démocratie
participative. Elle est l'initiative la plus ambitieuse jamais prise en
matière de démocratie environnementale sous les auspices Nations
Unies. Elle est le seul instrument juridique contraignant qui accord des droits
généraux et concrets à l'accès à la justice
en matière d'environnement.
L'Europe n'est pas la seule région qui consacre un
droit d'accès à la justice environnementale, d'autres
régions comme l'Afrique et l'Amérique du Sud lui emboitent le pas
allant parfois au-delà des avancées enregistres par les
instruments adoptés dans le cadre européen.
Section 2. Au sein de l'Union africaine et de
l'Organisation Interaméricaine
L'Afrique et l'Amérique sont les deux poumons de
l'humanité. Ils constituent également les zones les plus
touchées par la dégradation de l'environnement : incendies de
l'Amazonie, progression de la désertification en Afrique, exploitation
non durable des bois de l'Amazonie et du bassin du Congo, etc. sont là
autant de facteur de la détérioration de l'environnement,
à cela s'ajoute la pauvreté de ces deux continents à
répondre adéquatement aux problèmes environnementaux.
102 Charles-Hubert Born, Op. Cit., pp. 288 - 290.
103 La Convention est également « ouverte
à la signature des Etats membres de la Commission économique pour
l'Europe ainsi que les Etats dotés du statut consultatif auprès
de la Commission économique pour l'Europe en vertu des par. 8 et 11 de
la Résolution 36 (IV) du Conseil économique et sociale du 28 mars
1947, et des organisations d'intégration économique
régionale constituées par des Etats souverains, membres de la
Commission économique pour l'Europe, qui leur ont
transféré compétence pour des matières dont traite
la présente Convention, y compris la compétence pour conclure des
traités sur ces matières, à Aarhus (Danemark) le 25 juin
1998, puis au siège de l'ONU à New York jusqu'au 21
décembre 1998. » (Art. 17 de la Convention d'Aarhus) ; «
Tout Etat, autre que ceux visés au paragraphe 2 ci-dessus, qui est
membre de l'Organisation des Nations Unies, peut adhérer à la
Convention avec l'accord de la Réunion des Parties ». (Art.
19.3 de la Convention d'Aarhus).
30
Toutefois, ni l'Afrique ni l'Amérique du Sud ne sont
pas restées en marge d'une consécration régionale d'un
droit d'accès à la justice en matière environnementale. Se
servant des réalisations faites au niveau européen pour pouvoir
les adaptées à leurs réalités. Ainsi, nous
analyserons la consécration du droit d'accès à la justice
environnementale au niveau Union africaine (§1) et de l'Organisation des
Etats d'Amérique (§2).
§1. Au niveau de l'Union africaine
En Afrique, la prise de conscience des préoccupations
environnementales est perceptible dès l'accession de la plupart des
États du continent à l'indépendance. Elle se manifeste
soit par l'adhésion des États en question à des
conventions antérieures en matière de protection de
l'environnement, soit par l'adoption de nouvelles conventions en la
matière104. L'Afrique a joué de pionnière en
matière environnementale. Elle est la première à adopter,
déjà en 1968, une des premières grandes conventions sur la
conservation de la nature et des ressources naturelles ; et à consacrer
juridiquement par un instrument contraignant le droit de l'homme à
l'environnement au travers de la Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples. C'est aussi d'Afrique plus précisément de la RDC que fut
lancée en 1975 l'initiative d'une charte mondiale de la nature
approuvée par l'AGNU, le 28 octobre 1982.
Ainsi, le droit à l'environnement de même que le
droit d'accès à la justice sont consacrés par : la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples (A) et la Convention africaine
sur la conservation de la nature et des ressources naturelles (B).
A. La Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples
Adoptée par l'OUA en juin 1981 et entrée en
vigueur en octobre 1986, la Charte africaine105 est l'instrument
principal des droits de l'homme en Afrique. Elle reconnait les droits des
individus et des peuples, les droits et obligations, et certains droits
socio-économiques ainsi que les droits civils et politiques. Elle est le
premier à consacrer en son art. 24106, le Principe 1 de la
Déclaration de Stockholm de 1972 selon lequel « l'homme a un droit
fondamental à la liberté, à l'égalité et
à des conditions de vie satisfaisante, dans un environnement dont la
qualité
104 Maurice Kamto, Op. Cit., p. 15.
105 Egalement appelée Charte de Banjul.
106 Art. 24 de la Charte africaine des droits de l'homme et
des peuples : « Tous les peuples ont droit à un environnement
satisfaisant et global, propice à leur développement
».
31
lui permette de vivre dans la dignité et le
bien-être. Il a le devoir solennel de protéger et
d'améliorer l'environnement pour les générations
présentes et futures ».
L'originalité de la Charte réside autant dans la
consécration de certains concepts, anciens ou nouveaux, que dans
l'association dynamique de ces mêmes concepts dans un instrument unique.
Cet instrument consiste en effet, d'une part, au niveau matériel en une
triple juxtaposition : droits civils et politiques, droits économiques,
sociaux et culturels, droits de l'individu et des droits des peuples et enfin
droits et devoirs de l'individu. D'autres part, pour contrôler la mise en
oeuvre de son contenu normatif, la Charte africaine a prévu un
système de sauvegarde dont le fonctionnement n'est pas moins singulier
bien qu'il rappelle celui de certains mécanismes institués au
niveau universel ou régional107.
La Charte consacre également le Principe 10 de la
Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, non
pas de manière expresse mais sous le prise des droits de l'homme. A cet
égard, on peut distinguer une approche différente de la
définition du droit d'accès à la justice. La Charte de
Banjul reconnait un droit d'intenter une action devant les juridictions
nationales pour contester une décision prise par les autorités
publiques violant un droit garantir par la Charte ou d'autres instruments de
droits de l'homme dont sont membres les Parties à Charte108.
La Charte de Banjul prévoit en son article 7 le droit à ce que sa
cause soit entendue. Et ce droit comprend : le droit de saisir les juridictions
nationales compétentes de tout acte violant les droits fondamentaux qui
lui sont reconnus et garantis par les conventions, les lois, règlements
et coutumes en vigueur ; le droit à la présomption d'innocence,
jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie par une
juridiction compétente ; le droit à la défense, y compris
celui de se faire assister par un défenseur de son choix et enfin le
droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une
juridiction impartiale.
La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples,
institution établie par la Charte de Banjul, reconnaissant la
nécessité de formuler et de poser des principes et
règles
107 Fatsah Ouguergouz, La Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples : une approche juridique des droits de l'homme entre
tradition et modernité, Nouvelle édition, Genève :
Graduate Institute, 1993. Disponible in
http://books.openedition.org/iheid/2184
108 Art. 60 : « La Commission s'inspire du droit
international relatif aux droits de l'homme et des peuples, notamment des
dispositions des divers instruments africains relatifs aux droits de l'homme et
des peuples, des dispositions de la Charte des Nations Unies, de la Charte de
l'Organisation de l'Unité Africaine, de la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme, des dispositions des autres instruments
adoptés par les Nations Unies et par les pays africains dans le domaine
des droits de l'homme et des peuples ainsi que des dispositions de divers
instruments adoptés au sein d'institutions spécialisées
des Nations Unies dont sont membres les parties à la présente
Charte ».
32
susceptibles de renforcer davantage et compléter les
dispositions relatives au procès équitable dans la Charte et de
respecter les normes internationales adopta en 2003 les Directives et Principes
sur le droit à un procès équitable et à
l'assistance judiciaire en Afrique109 qui entend par le droit
à être entendu équitablement le respect du principe de
l'égalité des armes des parties que ce soit en matière
administrative, civile, pénale ou militaire ; de l'égalité
de toutes les personnes devant les instances juridictionnelles ; de
l'égalité d'accès aux instances juridictions et
l'égalité devant la loi, etc. La Résolution exhorte les
Etats à veiller, en ce qui concerne l'accès aux services
judiciaires, que les instances judiciaires soient accessibles à tous
ceux qui vivent sur leur territoire et sont soumis à leur juridiction
sans aucune discrimination de quelques sortes et que cet accès ne soit
pas entravés par la distance à parcourir jusqu'au lieu
d'implantation des instances judiciaires, l'absence d'informations au sujet du
système judiciaire, l'imposition de frais de justice trop
élevés ou excessifs et l'absence d'assistance pour comprendre les
procédures et accomplir les formalités requises.
La Charte de Banjul n'est pas le seul instrument proclamant et
consacrant le droit d'accès à la justice en Afrique, d'autres
instruments sous-régionaux que régionaux lui emboitent le pas.
Mais dans le cadre du droit d'accès à la justice en
matière environnementale, la Convention africaine sur la conservation de
la nature et des ressources naturelles est un élément important
dans la proclamation et la consécration de ce droit dans la
région.
B. La Convention africaine sur la conservation de la
nature et des ressources naturelles
Adoptée en septembre 1968 par l'OUA, la Convention
d'Alger sur la conservation de la nature et des ressources naturelles est
entrée en vigueur une année après soit en juin 1969. Elle
sera 35 ans plus tard révisée110 à Maputo au
Mozambique, par l'Union africaine, à la faveur d'une réforme en
profondeur qui a notablement étoffé et actualisé son
contenu normatif du fait de l'intégration des concepts nouveaux tels que
le développement durable et des mécanismes les plus innovants,
notamment institutionnels et de contrôle. Quoique les modifications
apportées sont substantiellement importantes, il ne s'agit pas d'une
nouvelle convention mais bien entendu de la révision de la Convention
d'Alger de 1968. Ce qui fait de la Convention de Maputo, un instrument
important de la protection de l'environnement et même du DIE. Il
faudra
109 La Commission a adopté ces Principes et Directives
suite à la nomination d'un Groupe de travail sur le droit à un
procès équitable aux termes de sa Résolution de 1999.
110 Plus précisément le 11 juillet 2003.
33
attendre encore 13 ans pour qu'elle entre en vigueur, le 10
juillet 2016, après 15 instruments de ratification.
L'adoption de la nouvelle convention représente un vrai
défi, celui d'une Afrique qui ne peut continuer de rester tourner vers
son passé dont les éléments naturels doivent être
conservés. Un tel défi a d'ailleurs pour effet de ramener
l'Afrique dans l'actualité, en faisant d'elle un laboratoire
d'expérimentation d'une nouvelle façon d'envisager la protection
de la nature dans un contexte où le développement durable traduit
la nécessité de concilier développement économique
et la protection de l'environnement111. La nécessité
d'une révision de la Convention d'Alger était devenue
indispensable, du fait d'une adaptation quasi définitive à
l'évolution scientifique, technique et juridique112. La
Convention de Maputo traduit parfaitement la nécessité de cette
révision. Cette révision place à nouveau le système
africain au avant-poste de la conservation de la nature et de l'utilisation
durable des ressources naturelles.
L'actualisation du contenu de la Convention d'Alger de 1968
apparait sous un double aspect : celui de l'amélioration des
dispositions existantes et de l'ajout de dispositions nouvelles plus conforme
à l'état général de la protection de la
nature113. S'agissant de l'amélioration des dispositions
existantes, le préambule de la convention est enrichi passant de sept
points à treize points beaucoup plus profond. Il en est ainsi de la
réitégration du devoir de mettre les diverses ressources
naturelles et humaines au service du progrès des peuples africains ; de
la conscience de l'importance des ressources naturelles d'un point de vue qui
devient plus simplement économique, social, culturel et environnemental
; de l'utilisation rationnelle des ressources pour le bien-être
présent et futur de l'humanité qui devient une utilisation
durable114. Quant à l'ajout de dispositions, il constitue un
apport incontestable, particulièrement dans la consécration des
droits procéduraux.
Ainsi, l'art. 16 de la Convention de Maputo dispose :
« 1. Les Parties contractantes adoptent les mesures
législatives et réglementaires nécessaires pour assurer
à temps et de manière appropriée :
a) La diffusion d'information sur l'environnement ;
111 Stéphane Doumbé-Billé, « La
nouvelle Convention africaine de Maputo sur la conservation de la nature et des
ressources naturelles », in Revue juridique de l'environnement,
n°1, 2005, p. 7.
112 Stéphane Doumbé-Billé, Op.
Cit., p. 8.
113 Idem, p. 11.
114 Ibidem .
34
b) L'accès du public aux informations sur
l'environnement ;
c) La participation du public à la prise des
décisions pouvant avoir un impact important sur l'environnement
;
d) L'accès à la justice en ce qui concerne
les questions liées à la protection de l'environnement et des
ressources naturelles.
2. Toute Partie contractante à l'origine d'un
dommage environnemental transfrontière, veille à ce que les
personnes affectées par un tel dommage dans une Partie contractante
aient un droit d'accès à ses procédures administratives et
judiciaires, égal à celui accordé à ses nationaux
ou résidents en cas dommage à l'environnement dans les limites de
ses frontières ».
De même que pour les autres conventions
régionales, la Convention de Maputo reconnait et consacre
l'étroite relation entre droit à l'information environnementale,
participation du public au décision pouvant avoir un impact sur
l'environnement et accès à la justice comme pour des questions
liées à la protection de l'environnement. Cet accès
concerne à la fois les matières administratives et judiciaires
(civils, pénales et militaires) et aussi d'une réparation en
matière d'environnement.
La Convention de Maputo n'est pas la seule convention
africaine qui porte sur la protection de l'environnement, il y a aussi la
Convention de Bamako sur l'interdiction des importations en Afrique, le
contrôle des mouvements transfrontières et sur la gestion des
déchets dangereux en Afrique adoptée en 1991. Mais elle demeure
la seul à consacrer de manière explicite le droit d'accès
à la justice en matière environnementale du reste, la tâche
de veiller à une application effective de la convention et de ce droit
demeure l'action de la Conférence des Parties institue à l'art.
26 de la Convention comme organe de décision. La première
réunion de la Conférence des Parties est convoquée par le
Président de l'UA, un an au plus tard après l'entrée en
vigueur de la Convention. Fort malheureusement, plus de trois ans depuis
l'entrée de la Convention et toujours aucune réunion inaugurale.
Ce qui pousse Mohamed Ali Mekouar a plaidé pour la convocation urgente
de la première Conférence de Parties afin de permettre
l'opérationnalité de la Convention et assurer une application
effective115.
115 Mohamed Ali Mekouar, « La Convention africaine sur la
Conservation de la nature en vigueur mais non
opérationnelle : l'urgence de convoquer la première
Conférence des Parties », in
https://www.iucn.org/commissions/world-commission-environmental-law/resources/wcel-country-and-region-reports
35
§2. Au niveau de l'Organisation
interaméricaine
Institue le 30 avril 1948 par les Etats qui participaient
à la IXème Conférence panaméricaine
réunie à Bogota, l'Organisation des Etats américains
regroupe l'ensemble des Etats souverains de l'Amérique. Sa Charte
constitutive lui donne pour objectifs d'oeuvrer au renforcement de la paix et
de la sécurité sur le continent, d'assurer le règlement
pacifique des différends entre les Etats, de défendre la pleine
souveraineté de chacun d'eux, de favoriser enfin la coopération
économique, sociale et culturelle sur le continent. L'Organisation
atteint ses buts au moyens des organes suivant : l'Assemblée
générale, la Réunion de consultation des ministres des
relations extérieures ; le Conseil permanent ; le Comité
juridique interaméricaine ; la Commission interaméricaine des
droits de l'homme ; le Secrétariat général ; les
conférences spécialisées ; les organismes
spécialisés et d'autres entités créées par
l'Assemblée générale.
L'Organisation soutient les efforts que déploient ses
Etats membres dans le but de réduire la pauvreté et d'assurer le
développement économique. Elle contribue au renforcement de la
démocratie et de la gouvernance dans le continent, oeuvre pour faire
face aux menaces à la sécurité continentale et
coopère à la protection des droits des citoyens de la
région. Elle appuie les Etats membres dans l'élaboration et la
mise en oeuvre des politiques et de projets concernant entre autre les
priorités environnementales (biodiversité, renforcer le droit de
l'environnement, gérer ressources en eau, sensibiliser le public au
changement climatique, etc.).
Et dans le cadre du droit d'accès à la justice
en matière d'environnement deux instruments s'avèrent d'une
importance remarquable, il s'agit de la Convention américaine des droits
de l'homme (A) et de l'Accord régional sur l'information, la
participation du public et l'accès à la justice en matière
d'environnement en Amérique du Sud et aux Caraïbes (B) qui feront
l'objet du développement suivant.
A. La Convention américaines des droits de
l'homme
Adoptée le 22 novembre 1969 au Costa Rica, le Pacte de
San José, entré en vigueur le 18 juillet 1978. Il est le
principal instrument de protection des droits de l'homme dans la région,
complétée par ses protocoles additionnels, notamment le Protocole
sur les droits économiques, sociaux et culturels116. La
Convention crée la structure du système interaméricain des
droits de
116 Connu comme le Protocole de San Salvador, adopté en
1988.
36
l'homme, formée par deux organismes chargés de
surveiller l'exécution des obligations assumées par les Etats.
Les liens entre l'environnement et les droits de l'homme dans
le système interaméricain peuvent se concrétiser par deux
moyens différents : l'application directe du droit à
l'environnement reconnu à l'art. 11 du Protocole de San Salvador par la
reconnaissance de sa justiciabilité et la construction d'une dimension
environnementale des droits de l'homme reconnus par la Convention
américaine des droits de l'homme, y compris leur interprétation
à partir du droit à l'environnement prévu à
l'article 11 du Protocole de San Salvador dans le cadre d'une
interprétation progressive et extensive de la Convention117.
La première voie reste encore à développer,
considérant que l'art. 11 du Protocole de San Salvador ne peut pas
être directement invoqué lors d'une requête de violation des
droits de l'homme, le droit à l'environnement dans le système
interaméricain est un droit reconnu mais qui manque de
concrétisation parce qu'il n'est pas justiciable118. En
conséquence, la Cour interaméricaine a choisi la voie de la
protection de l'environnement par ricochet et commence à
développer une dimension environnementale de certains droits de l'homme
consacrés par la Convention119.
Il faut noter que les rédacteurs de la Convention
américaine ont en grande partie l'organisation originelle de la Cour et
sa relation avec la Commission sur la structure du système
européen de protection des droits de l'homme, tel qu'il existait dans
les années 1960. Néanmoins, depuis ses tout débuts, le
Tribunal de San José a développé une jurisprudence ainsi
que des pratiques institutionnelles la séparant nettement de son
homologue européen. Ces différences se trouvent
particulièrement à cinq niveaux120. En premier lieu,
il convient de rappeler que la Cour Européenne fut créée
pour superviser un groupe de pays démocratiques où l'Etat de
droit était une valeur acquise. En revanche la Cour
interaméricaine vit le jour au coeur d'une situation différente,
dans laquelle plusieurs Etats parrainaient eux-mêmes des crimes, ce qui
permit au Tribunal de développer une doctrine fournie en matière
de disparition forcée121. Le deuxième point a trait
à l'évolution de la jurisprudence de la Cour
interaméricaine en matière de réparations. Contrairement
à celle de Strasbourg qui se contente généralement
117 Fernanda de Salles Cavedon-Capdeville, «
L'écologisation du système interaméricaine des droits de
l'homme : commentaire de la jurisprudence récente 2010-2013 », in
Revue juridique de l'environnement, Volume 39, n° 3, 2014, p.
490.
118 Idem
119 Ibidem
120 Éric Tardif, « Le système
interaméricain de protection des droits de l'homme :
particularités, percées et défis », in La Revue
des droits de l'homme, n° 6, 2014 disponible sur
http://journals.openedition.org/revdh/962
121 Idem
37
d'identifier les violations à la Convention
européenne, et permettant à l'Etat fautif de remédier
à la situation au moyen de compensation monétaire, la Cour
interaméricaine émet régulièrement de longues
listes d'actions que l'Etat doit entreprendre pour réparer les
violations dont il est l'auteur122.
Un autre aspect distingue les deux Cours régionales, il
s'agit de la supervision de l'exécution des arrêts. Dans le cadre
européen, une fois émise, la Cour de Strasbourg est dessaisie du
dossier, cédant sa place au Comité des ministres, un organe
politique chargé de superviser la mise en oeuvre par l'Etat de la
décision de la Cour. Par contre, en Amérique, c'est la Cour qui
est chargé de superviser l'exécution de ses décisions en
matière de réparation, et celle-ci émet une ordonnance
enjoignant à l'Etat de faire rapport périodiquement de ses
avancées à ce titre123. Enfin, il est à noter
que dans les arrêts qu'elle émet, la Cour interaméricaine
effectue une analyse approfondie de la preuve lui ayant été
soumise, notamment pour pallier aux déficiences qui peuvent se
présenter s'agissant de certains tribunaux nationaux124.
S'il est vrai que la Cour interaméricaine fait un
travail de qualité dans la reconnaissance du droit d'accès
à la justice en matière environnementale de manière
particulière et du droit de l'environnement de manière
générale, il faut cependant noter que la grande innovation en
terme de proclamation et de reconnaissance du droit d'accès à la
justice environnementale viens d'une convention régional qui s'inspirant
des acquis de la Convention d'Aarhus et innove en allant au-delà de ce
que sa devancière a déjà fait en termes de ce droit.
B. L'Accord régional sur l'information, la
participation du public et l'accès à la justice en matière
d'environnement en Amérique du Sud et aux Caraïbes
Réunis à Rio de Janeiro, dix gouvernements de
l'Amérique latine et des Caraïbes avaient émis le voeu de
mettre en application le Principe 10 de la Déclaration de Rio sur
l'environnement et le développement. Réaffirmant leur engagement
sur l'accès à l'information, la participation du public et la
justice en matière d'environnement125. Ils
démontraient ainsi leur volonté de travailler sur un instrument
régional de mise en oeuvre126 et c'est avec l'aide de la
CEPL, comme secrétariat technique à la rédaction d'un tel
engagement que commença la
122 Ibidem
123 Éric Tardif, Op. Cit.
124 Idem
125 Lire Bétaille, Julien (dir.), Op. Cit.
126 Idem
38
confection du texte appelé à être un
instrument régional de protection de l'environnement. Il s'agit du
premier traité sur les questions environnementales dans la
région.
Adopté le 4 mars 2018 à Escazù au Costa
Rica, ce traité127 vise avant tout à combattre
l'inégalité et la discrimination et à garantir le droit de
toute personne à un environnement sain et à un
développement durable, en portant une attention particulière aux
individus et aux groupes vulnérables et en plaçant
l'égalité au coeur du développement durable. Il s'agit
d'un accord visionnaire et sans précédent, conclu par et pour
l'Amérique latine et les Caraïbes, qui reflète les attentes,
les priorités et particularité de la région. Il aborde des
aspects essentiels de la gestion et de la protection de l'environnement dans
une optique régionale et réglemente les droits d'accès
à l'information, la participation publique et la justice dans des
domaines aussi importants que l'utilisation durable des ressources naturelles,
la conservation de la biodiversité, la lutte contre la
dégradation des sols et le changement climatique, et le renforcement de
la résilience face aux catastrophes128.
Dans le cadre d'une approche fondée sur les droits, cet
accord reconnait les principes démocratiques fondamentaux et cherche
à relever l'un des défis les plus importants que connait la
région : le fléau de l'inégalité et une culture du
privilège profondément enracinée. Par le biais de la
transparence, de l'ouverture et de la participation, l'Accord contribue
à la transition vers un nouveau modèle de développement et
s'attaque à la culture inefficace et insoutenable des
intérêts limité et fragmentés qui prévaut
dans la région129. Il constitue une avancée en faveur
du renforcement de la démocratie environnementale au sein de la
région.
A première vue, l'Accord semble contenir des
dispositions identiques à celles de la Convention d'Aarhus qui
prévoit le droit d'accès à l'information, de participation
aux processus décisionnels en matière d'environnement ainsi que
celui d'exiger réparation si ces droits ne sont pas respectés.
Toutefois, le texte d'Escazù contient plusieurs dispositions
spécifiques à la région, par exemple sur la protection des
défenseurs des droits de l'homme en matière d'environnement, et
des personnes et groupes en situation de
vulnérabilité130. Une autre
127 Non encore en vigueur, l'art. 22 par. 1 prévoit que
l'Accord entrera en vigueur le quatre-vingt-dixième jour après le
dépôt du onzième instrument de ratification, d'acceptation,
d'approbation ou d'adhésion. A ce jour, seule la Guyane à
déposer son instrument de ratification en date du 18 avril 2019.
128 Alicia Barena, Accord régional sur
l'accès à l'information, la participation publique et
l'accès à la justice à propos des questions
environnementales en Amériques latines et dans les Caraïbes,
Santiago, Nations Unies, 2018, p. 8.
129 Alicia Barena, Op. Cit., p.8.
130 Damien Barchiche, Elisabeth Hege et Andrés Napoli,
« L'accord d'Escazù : un exemple ambitieux de traité
multilatéral en faveur du droit de l'environnement », Iddi,
Décryptage, n° 03/19, p. 2.
39
spécificité du texte d'Escazù par rapport
à la Convention d'Aarhus, concerne les garanties de l'accès
à la justice qui n'est prévue que pour les violations des droits
directement liés à l'objet de la Convention à savoir
l'accès à l'information ou la participation ; dans l'Accord
d'Escazù, ce pouvoir est beaucoup plus complet, puisqu'il garantit non
seulement l'accès à la justice pour déni d'information ou
impossibilité de participer au processus décisionnel, mais aussi
pour « toute décision, action ou omission qui affecte ou pourra
affecter de manière défavorable l'environnement ou contrevenir
aux normes juridiques liées à l'environnement » (art.
8.2c)131.
L'Accord d'Escazù va plus loin sur plusieurs autres
aspects, cependant dans certains domaines, il est moins précis, voire
flou. Et laisse plus de marge de manoeuvre aux Etats que la Convention
d'Aarhus, en particulier pour les catégories d'informations pour
lesquelles un refus d'accès peut se justifier entrainant ainsi une
variété des définitions sur ces catégories au
niveau de chaque Etat.
L'Accord d'Escazù associe la protection de
l'environnement à l'égalité et place cette dernière
notion dans son préambule, au coeur du développement durable. Il
s'inscrit pleinement dans l'esprit de l'Agenda 2030 pour le
développement durable, adopté en 2015. Il est également un
traité sur les droits de l'homme. Il est le premier dans le monde
à inclure des dispositions sur les défenseurs des droits de
l'homme en matière d'environnement. Cette première est loin
d'être anodine dans une des régions du monde les plus
touchées par les conflits sociaux-environnementaux et présentant
un risque accru pour la vie et la sécurité des personnes et des
groupes de personnes agissant en tant que défenseurs des droits de
l'homme en matière d'environnement132.
131 Damien Barchiche, Elisabeth Hege et Andrés Napoli,
Op. Cit., p. 2.
132 Idem, p. 3.
40
2ème PARTIE : L'EXERCICE DU DROIT D'ACCES A LA
JUSTICE EN DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT
Le simple fait de se contenter de déclarer, de
proclamer des droits ne suffit malheureusement pas. C'est évidemment
leur réalisation, leur exercice ou leur mise en oeuvre qui importe et
cette dernière tâche demeure ardue. Le droit de l'environnement et
le droit d'accès à la justice en matière d'environnement
sont fréquemment proclamés et font l'objet, dans certains, d'un
très large consensus, toutefois leur mise en oeuvre demeure dans biens
de cas difficile.
D'où la nécessité d'analyser dans cette
deuxième partie l'exercice du droit d'accès à la justice
en droit international de l'environnement. Notre réflexion sera
axée tour à tour sur l'exercice de ce droit devant le juge
international (Chapitre 1) et sur les obstacles liés à
l'effectivité de ce droit consacré par plusieurs instruments
juridiques (Chapitre 2).
CHAPITRE 1. LE DROIT D'ACCES A LA JUSTICE EN
MATIERE
D'ENVIRONNEMENT DEVANT LE JUGE INTERNATIONAL
Le juge joue un rôle fondamental dans le
développement du droit international général et du droit
international de l'environnement. Ces décisions sont souvent
considérées comme des moyens auxiliaires de détermination
de la règle de droit lorsque la norme est imprécise ou vague. Et
par son action, il permet un renforcement de la norme en droit international.
Le juge joue, par conséquent, un rôle important dans
l'éclaircissement des normes du droit international de l'environnement
et d'en dégager des obligations à la charge de l'Etat.
Le droit d'accès à la justice est un droit
fondamental, qui s'avère primordial en ce qu'il constitue la condition
sine qua non de l'effectivité des droits. Quoiqu'affirmé par
plusieurs instruments régions de droits de l'homme ou du droit
international de l'environnement, l'exercice de ce droit devant le juge est
soumis à certains exigences, à savoir les conditions de
recevabilité de requête par les juge internationales (Section 1)
et une fois passée cette étape une question importante se pose :
celles du comportement du juge dans la protection de l'environnement (Section
2).
41
Section 1. Conditions de recevabilité de
requête devant le juge international
Il serait à ce niveau réducteur, après
avoir analysé les différentes consécrations du droit
d'accès à la justice environnementale au niveau de chaque
région, de se limiter seulement, d'une part, aux conditions de
recevabilité des requêtes portant sur ce droit dans une seule
région puisque les conditions de recevabilité son presque
identique, et d'autre part aux seules affaires portant sur les conventions
consacrant le droit d'accès à la justice. Ainsi, dans le cadre de
cette section sur les conditions de recevabilité nous ferons un
parallélisme entre les conditions retenues au niveau des juridictions de
chaque région (Afrique, Amérique et Europe, pas forcément
dans cet ordre), avec une certaine préférence au système
européen et africain qui offrent une jurisprudence aussi riche que
varié et facile d'accès.
De façon générale, l'action en justice
est soumise au principe du libre accès au prétoire. Mais ce
principe n'est pas absolu, à cela s'ajoute d'autres conditions que le
requérant devra remplir. Le requérant qui veut soumettre ses
prétentions devant le juge international doit remplir un certain nombres
conditions. Parmi lesquelles avoir qualité et intérêt dans
la cause (§1) et du respect de la procédure devant le juge
(§2).
§1. Qualité d'agir et
intérêt
La recevabilité d'une requête par une juridiction
est soumise au respect d'un certain nombre d'élément de
procédure tel que la qualité (A) et l'intérêt
à agir (B). Ces deux éléments constituent le socle
même de toute action en justice que ce soit au niveau national ou
international. S'il est vrai que ces éléments ne posent pas trop
de problème dans la revendication des droits civils et politiques, il
n'en est pas de même pour ce qui concerne la protection de
l'environnement car comme le disait Christopher Stone, la nature, pas plus que
ses éléments, ne peut communiquer avec les instances
judiciaires.
A. Qualité d'agir
En règle générale, la qualité
à agir s'entend comme le pouvoir d'agir en justice appartenant à
toute personne intéressé qui a un intérêt direct et
personnel à la reconnaissance du bien-fondé de sa
prétention133.
133 Serge Guinchard, Lexique des termes juridiques,
Paris, éd. Dalloz, 19ème édition, 2012, p.
706.
42
Quoique la question sur l'accès à la justice
soit un sujet à la fois actuel et fondamentale, on constate qu'il est
diversement assuré selon les Etats134. L'accès le plus
large est assuré par l'actio popularis135 d'un
côté, et à l'autre extrême du spectre seules
personnes pouvant se prévaloir d'une atteinte à un droit
subjectif, à savoir la lésion d'une norme adoptée pour
protéger spécifiquement l'intérêt
lésé. Et enfin, sous l'empire d'une troisième approche, un
recours sera déclaré recevable si le requérant justifie
d'un intérêt « suffisant » à agir, ce qui en soi
ne règle pas encore définitivement la question, dès lors
que l'intérêt du demandeur doit, dans certains ordres juridiques,
être strictement « direct et personnel », alors que, dans
d'autres, une interprétation plus libérale prévaut,
pouvant aller jusqu'à la prise en compte de l'intérêt
collectif poursuivi statutairement par une association.
Face à cette diversité d'approche au niveau
national, l'outil principal d'harmonisation, d'uniformisation ou même de
rapprochement des règles appliquées par les différentes
nations est le droit international de l'environnement, qui se traduit par
l'élaboration et l'adoption de traités internationaux et de
textes non obligatoires.
Ainsi, l'art. 34 de la CEDH dispose que : « La Cour
peut être saisie d'une requête par toute personne physique, toute
organisation non gouvernementale ou tout autre groupe de particuliers qui se
prétend victime d'une violation par l'une des Hautes Parties
contractantes des droits reconnus dans la Convention ou ses Protocoles ».
Alors que le Protocole de la Cour africaine des droits de l'homme et des
peuples, en son article 5, se limite à énumérer les
personnes ayant qualité parmi lesquelles figurent les individus et les
ONG dotées du statut d'observateur auprès de la Commission
africaine des droits de l'homme et des peuples mais seulement contre les Etats
ayant fait la déclaration acceptant la compétence de la Cour au
regard de l'art. 34. 6 du Protocole de la Cour. Et l'art. 6 du Protocole de la
Cour poursuivant en conditionnant la recevabilité de requêtes au
respect de l'art. 56 de la CADHP qui énumère entre autre
condition la compatibilité de la requête avec la Charte, l'absence
de termes outrageant et ne pas se limiter à rassembler exclusivement des
nouvelles diffusées par des moyens de communication de masse.
134 La Commission européenne s'était
déjà penchée sur cette question. Ainsi, le Conseil
européen du droit de l'environnement en collaboration, avec
l'Association européenne de droit de l'environnement, avait
procédé à une étude comparée sur le droit
d'applicable dans les quinze Etats membre d'alors. Voir à ce propos
Pirotte Charles, « L'accès à la justice en matière
d'environnement en Europe : état des lieux et perspectives d'avenir
», in Revue Juridique de l'Environnement, numéro
spécial, 2009, pp. 25-29.
135 Au Portugal, par exemple, la Constitution de 1976
amandée consacre une telle action en son article 52, paragraphe 3.
43
En matière de protection de l'environnement, le
rôle des associations est primordial en ce qu'elles sont à
l'origine d'une part importante du contentieux environnementale. C'est pourquoi
la Cour européenne se livre à une interprétation
plutôt souple de l'art. 34 de la CEDH quand il s'agit de l'appliquer
à ces associations136. Ces interprétations se situent
dans la droite ligne du Statut particulier que la Cour reconnait aux
organisations non gouvernementales qui attirent l'attention de l'opinion sur
des sujets d'intérêt public, exerçant un rôle de
chien de garde public semblable par son importance à celui joué
par la presse. A noter également que ces associations peuvent intervenir
également devant la Cour européenne au regard de l'art. 36. 2 de
la CEDH qui prévoit la possibilité pour le président de la
Cour d'inviter toute personne intéressée autre que le
requérant à présenter des observations écrites ou
à prendre part aux audiences.
Seul la qualité pour agir devant une juridiction
qu'elle soit nationale ou internationale ne suffit pas pour pouvoir soumettre
ses prétentions de droits devant le juge, il faut encore à cela
faire montre d'un intérêt à agir pour voir sa requête
être déclarée recevable par le juge.
B. Intérêt à agir
« Pas d'intérêt, pas d'action »,
dit-on. L'intérêt se présente comme l'avantage
matériel ou moral auquel peut prétendre celui qui prend
l'initiative d'engager une action judiciaire. La recevabilité de toute
action en justice est subordonnée à la preuve de l'existence d'un
intérêt qui doit être personnel, direct, né et
actuel. Cette exigence s'explique par la volonté d'éviter les
recours populaires destinés à rétablir la
légalité, sans que le requérant soit concerné par
le préjudice. Il s'agit aussi de prévenir des éventuels
surcharge des juridictions.
Or, comme nous le savons il n'est pas toujours facile de
prouver son intérêt devant les juridictions
nationales137 en ce qui concerne la protection de l'environnement.
La Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Vermeulen contre
la Belgique, du 17 juillet 2018, sanctionnait le Conseil d'Etat Belge pour
violation de l'art. 6 de la CEDH pour une interprétation stricte de
l'intérêt à agir. Elle exigeait que l'intérêt
à agir dans une affaire devait
136 Lire Bétaille, Julien (dir.), Op. Cit.
137 L'Equateur a récemment fait un pas de significatif
en matière de protection de l'environnement en devenant le seul Etat
à inclure dans sa constitution la reconnaissance expresse de la nature
comme sujet de droits et celle concrète des droits fondamentaux de la
nature. Dans ce cadre, il a été reconnu un intérêt
à agir très large pour accéder au juge et défendre
ces droits, lire à ce sujet Edgar Fernandez Fernandez, « Les
controverses autour de l'intérêt à agir pour l'accès
au juge constitutionnel : de la défense du droit à
l'environnement (Costa Rica) à la défense des droits de la nature
(Equateur) », VertigO-la revue électronique en sciences de
l'environnement, Hors-série 22, Septembre 2015 disponible sur
http://journals.openedition.org/vertigo/16214
44
exister non seulement au moment ou lors de l'introduction de
l'action mais devait encore subsister pendant toute la durée de la
procédure.
Si l'intérêt à agir en droit interne des
Etats est une condition importante de recevabilité de requêtes, il
n'en est pas de même au niveau international où
intérêt à agir équivaut à la qualité
de victime. Ainsi, la Cour européenne des droits de l'homme de
même que la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples
considèrent comme intérêt à agir la
prétention d'une violation d'un droit garanti. La Cour européenne
va plus loin en admettant les cas de victimes indirectes et potentiels devant
elle. Cependant la Cour européenne restreint l'intérêt
à agir, au seules personnes qui sont « directement victimes d'une
pollution ou d'une nuisance »138 en matière de dommages
environnementaux.
Ainsi, une association de défense de l'environnement ne
peut pas saisir la Cour, au titre de l'intérêt
général, d'un recours qui lui permettrait de dénoncer des
atteintes à l'environnement. Comme l'explique la Cour dans l'arrêt
du 22 mai 2003 dans l'affaire Kyrtatos
c. Grèce, « l'élément
crucial qui permet de déterminer si, dans les circonstances d'une
affaire, des atteintes à l'environnement ont emporté violation de
l'un des droits sauvegardés par le paragraphe 1 de l'article 8 est
l'existence d'un effet néfaste sur la sphère privée ou
familiale d'une personne, et non simplement la dégradation
générale de l'environnement ». Ainsi, en
l'espèce, la Cour juge que « les requérants n'ont
présenté aucun argument convaincant démontrant que le tort
qui aurait été causé aux oiseaux et autres espèces
protégées vivant dans le marais était de nature à
porter directement atteinte à leurs propres droits garantis par
l'article 8 § 1 de la Convention » et conclut qu'elle «
ne saurait admettre que l'ingérence dans les conditions de la vie
animale dans le marais nuit à la vie privée ou familiale des
requérants ». Et la Cour d'ajouter que, si les dommages
à l'environnement dénoncés avaient occasionné la
destruction d'une zone forestière à proximité de la maison
des requérants, cela aurait pu affecter plus directement leur propre
bien-être et leur conférer, partant, la qualité de
victime139.
138 Jean-Christophe Martin et Sandrine Maljean-Dubois, «
La Cour européenne des droits de l'homme et le droit à un
environnement sain. Prévention des risques et responsabilité
environnementales », UNITAR, 2011, 37-53pp, disponible sur
https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00734256
139 Idem
45
§2. Procédure devant le juge
international
La procédure, pris dans son étroit, est
considérée comme étant l'ensemble des formalités
qui doivent être suivies pour parvenir à une solution
juridictionnelle de nature civile, pénale ou
administrative140. Et les juridictions internationales, de
manière générale, connaissent deux types de
procédure : les procédures contentieuses141 lorsque le
différend né de l'inobservation ou de la violation des
règles établies et librement consentis par un Etat et les
procédures consultatives lorsque un Etat ou une organisation
internationale (par le biais de ses organes) demande à l'instance
établit au fin de veiller au respect d'une convention internationale de
donner un avis juridique sur une question juridique qui se pose dans le cadre
de leurs activités.
Contrairement aux arrêts qui, rendus dans le cadre d'une
procédure contentieuse, sont contraignants, les avis consultatifs ne
sont pas exécutoires. Elles contiennent cependant certain dispositif
mais qui s'analyse comme une simple recommandation. Il faut toutefois noter que
dans certains cas l'avis consultatif a une forte autorité sur le
développement du droit international, tel est le cas des avis rendus par
la Cour Internationale de Justice.
Eu égard au principe de subsidiarité et au fait
que le juge international ne constitue qu'un ultime recours face au violation
des droits garanties, le requérant doit avoir épuisé
toutes les voies de recours internes et respecter un certain délai avant
de pouvoir porter son affaire devant une juridiction internationale.
A. Epuisement des voies de recours
Depuis la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme
de nombreux textes élaborés par la communauté
internationale reconnaissent et protègent d'une manière plus ou
moins efficace les droits fondamentaux, alors que certaines conventions
internationales n'envisagent aucun mécanisme de contrôle et de
sanction d'autres prévoient de tel mécanisme. Les
compétences de ces institutions internationales sont plus ou moins
étendues selon ce qui est prévu par le texte. Et dans certains de
ces textes l'épuisement de voies recours internes est une
140 Serge Guinchard (dir.), Lexique des termes
juridiques, Paris, éd. Dalloz, 25ème
édition, 2017-2018, p. 893.
141 Lire art. 96 de la Charte des Nations Unies ; art. 65-68
du Statut de la Cour International de Justice ; art. 102109 du règlement
de la CIJ ; art. 45 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples
; art. 4 du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples portant création d'une Cou africaine des droits
de l'homme et des peuples ; Protocole n° 16 de la Convention
européenne des droits de l'homme ; art.2 du Statut de la Cour
interaméricaine des droits de l'homme.
46
règle réaffirmée à maintes
reprises, règle qui joue un rôle important dans le domaine de la
justice internationale.
En règle générale, les juridictions
internationales sont saisies en dernière instance, après avoir
vidé les voies de recours internes. Cette règle se fonde sur
l'hypothèse selon laquelle l'ordre interne offre un recours effectif
quant à la violation alléguée. Elle permet
également à l'Etat mis en cause de s'amender avant que l'affaire
ne soit portée devant les instances internationales. L'article 56.4 de
la CADHP fait de l'épuisement des voies de recours internes une
condition de recevabilité des communications142. Cette
règle est l'une des conditions la plus importantes de la
recevabilité des communications et c'est pour cela que dans presque tous
les cas, la première question que se pose aussi bien l'Etat visé
que la Commission est relative à l'épuisement des recours
internes. La justification de cette règle par plusieurs instruments
internationaux est de s'assurer qu'avant que le cas ne soit examiné par
un organe international, l'Etat visé ait eu l'opportunité de
remédier à la situation par son tribunal de première
instance, mais plutôt celui d'un organe de dernier
recours143.
Pour la Cour européenne, la disposition relative
à l'épuisement des voies de recours internes (art. 35 par. 1)
doit s'appliquer avec une certaine souplesse et sans formalisme excessif car la
règle de l'épuisement des voies de recours internes ne
s'accommode pas d'une application automatique et ne revêt pas un
caractère absolu144. Lorsqu'elle en contrôle le
respect, la Cour européenne tient compte des circonstances de la cause
mais également du contexte juridique dans lequel on se situe ainsi que
de la situation personnelle du requérant. Elle recherche si, au regard
de l'ensemble des circonstances, l'intéressé peut passer pour
avoir fait tout ce que l'on pouvait raisonnement attendre de lui pour
épuiser les voies de recours internes145. Il faut noter
cependant que l'interprétation souple par la Cour européenne ne
conduit pas systématiquement à reconnaitre que le
requérant a épuisé les voies de recours internes.
Le rédacteur de la CADHP de même que la
Commission africaine des droits de l'homme et des peuples vont dans le
même sens. C'est ainsi que les articles 50 et 56 par. 5 de la CADHP
conditionne l'épuisement des voies de recours internes à son
existence et à l'absence d'une procédure dont le recours se
prolonge de façon anormale. La Commission africaine des droits
142 La Commissions africaines des droits de l'homme est saisie
par voie de communication adressée au Président de la Commission,
voir les articles 47, 50 et 56. 4.
143 Voir Communication 25/89 Free Legal Assistance Group et
Autre c. Zaïre ; 74/92 Commission Nationale des Droits de l'homme et des
libertés c. Tchad et 83/92 Degli et Autre c. Togo.
144 Lire Bétaille, Julien (dir.), Op. Cit.
145 Idem
146 Communication 60/91 Constitutional Rights Project c.
Nigeria ; Communications 87/93, 101/93 et 129/94 Civil Liberties Organisation
c. Nigeria.
47
de l'homme dans sa mission de promouvoir et d'assurer la
protection a eu à maintenant reprise à considérer que
l'exercice de voies de recours n'était pas effective et
disponible146.
Comme nous le disions précédemment,
l'épuisement des voies de recours internes ne suffit pas à lui
seul pour pouvoir prétendre avoir emplis toutes les formalités
à l'examen du fond du litiges soumis à la juridiction
international, il faut encore pour cela que le requérant respect un
certain délai pour ne pas voir son action rejetée pour
forclusion. D'où l'importance de l'examen du point suivant.
B. Délai
L'accomplissement de certaines formalités juridiques ou
procédurales nécessite le respect d'un certain temps, le
délai. L'inobservation de ces délais entraine des
conséquences de gravité variable (prescription, forclusion,
déchéance, caducité, etc.). Il en est de même au
niveau international plus particulièrement la justice internationale.
La Convention européenne des droits de l'homme et la
Charte africaine des droits de l'homme et des peuples posent également
cette condition dans le cadre des requêtes qui pourraient être
soumises aux institutions internationales chargées de veiller au respect
de leur disposition. Ainsi, la CADHP en son article 56 par. 6 énonce que
pour qu'une communication soit reçues par la Commission africaine des
droits de l'homme et des peuples, elle doit : « être introduites
dans un délai raisonnable courant depuis l'épuisement des voies
de recours internes ou depuis la date retenue par la Commission comme faisant
commencer à courir le délai de sa propre saisine ». Et
la CEDH en son article 35 par. 1 dispose : « La Cour ne peut
être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours
internes, tel qu'il est entendu selon les principes de droit international
général reconnus, et dans un délai de six mois à
partir de la décision interne définitive ». Comme on
peut le constater alors que la CADHP se limite à poser le principe, sa
soeur va plus loin en déterminant le délai en question avec
précision.
La règle de six mois a pour finalité de servir
la sécurité juridique et de veiller à ce que les affaires
soulevant des questions au regard de la convention soient examinées dans
un délai raisonnable, tout en évitant aux autorités et
autres personnes concernées d'être pendant longtemps dans
l'incertitude. En outre, cette règle fournit au requérant
potentiel l'opportunité d'introduire une requête et, le cas
échéant, de déterminer les griefs et arguments
précis à
48
présenter, et elle facilite l'établissement des
faits dans une affaire car, avec le temps, il devient problématique
d'examiner de manière équitable les questions
soulevées147. Elle marque la limite temporelle du
contrôle effectué par la Cour et indique aux particuliers comme
aux autorités la période au-delà de laquelle ce
contrôle ne s'exerce plus. Cette règle de six mois ne peut exiger
qu'un requérant saisisse la Cour de son grief avant que la situation
relative à la question en jeu n'ait fait l'objet d'une décision
définitive au niveau interne148. Ce délai court
à compter de la décision définitive dans le cadre de
l'épuisement des voies de recours internes. L'intéressé
doit avoir fait un usage normal des recours internes vraisemblablement
efficaces et suffisants afin de porter remède à ses griefs.
Au niveau de la Commission africaine des droits de l'homme et
des peuples la question de sa saisine dans un délai raisonnable, la
précision, a été posée dans l'affaire Majuru c.
Zimbabwe149. La Commission dans sa mission d'interpréter les
dispositions de la Charte africaine va se référer à ce que
la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés
fondamentales et la Convention interaméricaine des droits de l'homme
font dans pareil situation, car il faut le signaler que les trois conventions
sont presque similaires. C'est ainsi que comme les autres mécanismes
régions, la Commission retiendra le délai de six mois pour
être saisie d'une communication après l'épuisement des
voies de recours internes.
Après avoir réussi à passer
l'étape du filtrage des requêtes, en réunissant toutes les
conditions relatives à la recevabilité de requêtes, la
question que l'on pourrait se poser est celle de l'attitude du juge dans sa
mission à dire le droit en matière de protection de
l'environnement d'une part, et sa contribution dans le développement du
droit international de l'environnement, d'autre part.
Section 2. L'action du juge international dans la
protection de l'environnement et la sauvegarde de ses droits
Dans la protection de l'environnement deux juridictions
internationales doivent être présenter pour leur l'action dans la
protection et la sauvegarde des droits environnementaux, il s'agit de la Cour
international de justice et de la Cour européenne des droits de l'homme.
La contribution de la CIJ dans la protection de l'environnement peut
s'illustrer par la création, en 1993, en son sein d'une chambre
spéciale pour les questions environnementales. La création de
147 Voir Guide pratique sur la recevabilité,
Conseil de l'Europe, décembre 2010, pp. 21-22.
148 Idem
149 Communication 308/2005 (2008).
49
cette chambre a été une réponse de la
Cour internationale aux questions touchant à l'environnement et au
développement durable. Cependant, triste est de constater que depuis sa
création les Etats n'ont jamais porté une seule affaire devant
cette chambre faisant de cette dernière, une chambre «
désespérément vide de tout litige environnemental
»150 . La CIJ, notamment la Chambre spéciale pour les
questions environnementales, ne disposant pas du pouvoir de s'auto-saisir et ne
permettant pas aux particuliers de la saisir pour de telles question ne pouvait
connaitre d'aucune affaire en matière environnementale tant qu'elle
n'aura pas été saisi par un Etat. Ce qui conduisit, en 2006, la
CIJ à ne pas renouveler le mandat des membres de la Chambre
spéciale. Alors qu'en matière d'environnement, l'action des
individus, ONG et groupes d'individus en la matière n'est plus à
démontrer.
C'est à ce niveau que la Cour européenne des
droits de l'homme s'est montrée et continue à se montrer plus
disposer à veiller au respect et à la sauvegarde des droits
environnementaux par l'action des ONG, individus et groupes d'individus qui
portent devant elle différente affaire en matière de protection
de l'environnement. Si la Cour européenne a un fort taux d'affaires
environnementales, il faut noter néanmoins qu'il s'emploie à
« construire, déconstruire et reconstruire ce qu'elle a
nommé (...) les droits environnementaux de l'homme151.
L'action du juge dans son rôle de protéger et de
sauvegarder l'environnement passe par l'examen de son attitude face aux
questions environnementales lui soumises (§1) d'une part, et l'examen des
mesures prise afin de réparer les dommages environnementaux
(§2).
§1. Attitude du juge
Les questions relatives à la protection de
l'environnement relèvent aujourd'hui de la conscience universelle de
l'humanité ce qui, il y a encore quelques années n'était
pas le cas. Ainsi, le droit international de l'environnement se trouve au
carrefour de plusieurs disciplines scientifiques faisant appel à une
approche interdisciplinaire, nécessaire au progrès et du droit
international et du droit international de l'environnement. Le
développement de la CIJ et de la Cour européenne a une connu un
début hésitant (A) et par la suite les réalisations
enregistrées quoiqu'important demeure néanmoins insuffisante
(B).
150 Stéphane Doumbe-Bille et alii, Droit international
de l'environnement, Paris, éd. Larcier, 2013, p. 77.
151 Voir Sévérine Nadaud et Jean-Pierre
Marguénaud, « Chronique des arrêts de la Cour
européenne des droits de l'homme 2010-2011 », Revue juridique
de l'environnement, 2011, n° 4, p. 563.
50
A. Une jurisprudence aux débuts hésitants
Ces juridictions et les différentes conventions
internationales dont elles assurent la protection et la sauvegarde ont
était à un moment où les préoccupations
environnementales ne concernaient que le droit interne des Etats. Sa
reconnaissance et sa consécration comme nous l'avons est l'objet d'une
évolution, faisant passer les questions environnementales devant ces
instances d'un désintéressement à une prise de conscience
de l'importance du droit international dans la protection de l'environnement.
Comme le dit Alexandre Kiss : « N'importe quel impact significatif sur
l'environnement peut produire des effets au-delà des frontières
nationales (...) et ne peuvent être compris et combattus qu'au niveau
international, voire global »152.
La CIJ a dans ses débuts connu plusieurs litiges de
divers ordres sans pourtant qu'ils aient rapport à la protection de
l'environnement. Ils portaient sur des questions relatives à l'exercice
par les Etats de leur compétence personnelle à l'égard de
leurs ressortissants, le droit de passage de navires étrangers dans un
canal, ainsi qu'à l'égalité et à la liberté
de navigation qui était et est encore lié au principe de
liberté commerciale. Il convient en réalité d'admettre
qu'au moment du remplacement de la CPJI par la CIJ au lendemain de la seconde
guerre mondiale, les litiges qui opposaient les Etats et qui étaient
portés devant la nouvelle cour n'étaient pas à
caractère environnementale153.
En effet, le monde venait de sortir de cette atroce guerre
très destructrice et qui avait laissé aux nations de graves
séquelles qu'il fallait désormais s'évertuer à
enrayer. L'Organisation des Nations Unies nouvellement créée
visait en premier lieu à instaurer une coexistence pacifique au sein de
la société internationale. Les Etats eux-mêmes avaient
d'autres préoccupations que de prendre en considération les
questions d'ordre environnemental qui pouvaient les opposer les uns aux autres.
Au plan interne, ils étaient notamment animés par la ferme
volonté de se reconstruire tout en veillant à réparer les
brisures de la guerre. Au plan international, les Etats se devaient surtout
d'oeuvrer de telle manière qu'un tel événement ne se
reproduise plus au sein de la communauté internationale. Aussi ces
derniers se devaient-ils d'oeuvrer dans le sens de bâtir une
société internationale animée par la volonté de
promouvoir la paix, la stabilité politique et la coopération
entre les nations154.
152 Alexandre Kiss, Op. Cit., pp. 10 - 11.
153 Alida Assemboni-Ogunjimi, « La Cour internationale de
justice et le droit international de l'environnement », in Afrilex,
Revue d'étude et de recherche sur le droit et l'administration dans les
pays d'Afrique, Université Montesquieu-Bordeaux IV, Janvier 2016,
p. 7.
154 Idem
51
Il s'écoulera plusieurs années avant qu'une
affaire portée devant la CIJ ne puisse renfermer les germes de
préoccupations environnementales.
Dans le litige ayant opposé l'Albanie à la
Grande Bretagne dans l'affaire du détroit de Corfou, le déminage
dont il était question aurait déjà pu soulever une
préoccupation d'ordre écologique. Cela s'explique par le fait que
la présence dans ces eaux de matières explosives à ce
moment précis de l'histoire, était déjà
excessivement nocive pour l'écosystème marin. Pourtant, dans le
cadre de ce litige, le déminage en cause ne fut motivé que par le
fait que la Grande Bretagne avait subi un dommage considérable. Pour les
autorités britanniques, il ne s'agissait que de manifester une
réaction aux pertes en vies humaines et aussi d'ordre matériel
qu'elles avaient essuyé. Les autorités albanaises de leur
côté n'avaient ni l'intérêt, ni l'intention de se
préoccuper des pertes d'ordre écologique du fait de la
présence de ces mines dans leurs eaux territoriales, pour les y avoir
elles-mêmes posées. Au regard du droit international, on peut
estimer que la Grande Bretagne a effectivement violé la
souveraineté territoriale de l'Albanie. Telle fut d'ailleurs la solution
retenue par la Cour155.
De manière générale, en dépit de
la multiplicité des gestes de bonne volonté, la Cour est
restée avare en termes de décisions environnementales. C'est
d'ailleurs ce qui amène à affirmer que sa jurisprudence en
matière environnementale est demeurée insuffisante.
B. Une jurisprudence demeurée insuffisante
Depuis que le fait environnemental a officiellement
été consacré par les Nations Unies en 1992, plusieurs de
ses institutions en ont fait leur cheval de bataille. Tel est le cas du
Programme des Nations Unies sur l'Environnement. Si la position adoptée
par la CIJ est fort discutable, elle n'est pas entièrement à
dénoncer dans la mesure où les parties en litige sont
censées orienter leurs requêtes dans le sens où le juge
pourra effectivement se prononcer sur une question environnementale. Or
généralement, tel n'en est pas le cas156.
La décennie 1990 a été pour la CIJ, une
période au cours de laquelle elle a connu des bouleversements
relativement importants. Pour la première fois, elle fut appelée
à statuer sur des questions d'ordre environnemental qui lui
étaient posées. La première occasion a été
sous une forme consultative notamment sur la licéité de
l'utilisation, de la menace ou de l'emploi
155 Alida Assemboni-Ogunjimi, Op. Cit., p. 8.
156 Idem, pp. 17 -18.
52
d'armes nucléaires. Quant à la seconde, elle a
été sous forme contentieuse où la Cour devait connaitre
d'un litige dont le caractère environnemental était assez
clairement prononcé157.
Il ne fait pas l'ombre d'un doute que des critiques soient
adressées à l'égard de la CIJ en ce qui concerne son
véritable intérêt pour le droit international de
l'environnement. Toutefois, ces critiques doivent être
atténuées par le fait que la Cour ne s'est pas toujours
montrée hermétique pour se prononcer sur des questions
environnementales. Dans certains cas elle s'est même montrée
flexible et a effectivement statué, même si c'est de
manière éphémère. Dans d'autres cas, elle s'est
carrément défilée, préférant renvoyer la
question posée à son expéditeur. Ainsi, les limites dont
fait preuve la Cour sont d'une part inhérente à elle-même,
autrement dit endogènes (du fait de l'attitude désinvolte
adoptée par la Cour face à des questions et litiges
environnementaux est motivé par le fait qu'elle donne l'impression de se
prononcer uniquement lorsqu'elle est dans l'impasse ou alors dans
l'impossibilité de se dérober auxdites
questions.)158.
Elles sont d'autre part exogènes à la Cour,
compte tenu de la spécificité des litiges environnementaux (par
le fait que plusieurs facteurs négatifs constituent des limites externes
à la contribution de la CIJ au droit international de l'environnement.
Ils vont du refus des Etats eux-mêmes de lui soumettre automatiquement
des litiges environnementaux qui surviennent entre eux du fait de
l'exécution de traités environnementaux, à
l'incapacité d'auto-saisine de la Cour lorsque surviennent de tels
différends. Tous ces facteurs sont sans doute influencés par le
caractère spécifique des litiges
environnementaux.)159.
§2. L'action du juge dans la réparation des
atteintes à l'environnement
)160.
En fonction de la gravité d'une atteinte à
l'environnement, certains dommages peuvent être réparés
plus ou moins convenablement tandis que d'autres malheureusement sont
profondément irréparable. Mais il convient de les réparer
avec les outils adéquats qui restent à inventer. La
responsabilité civile n'est, en effet, probablement pas l'instrument qui
permettra une réparation efficace des atteintes à
l'environnement. Les raisons en sont multiples (établissement du lien de
causalité, gravité de l'atteinte, modes de la réparation,
etc.
Une fois la responsabilité pour atteintes à
l'environnement établie, il importe de savoir comment réparer le
dommage. Pour cela, il faudra d'abord évaluer le dommage,
opération très
157 Alida Assemboni-Ogunjimi, Op. Cit., p. 18.
158 Idem
159 Ibidem
160 Lire Bétaille Julien, Op. Cit.
53
complexe en raison de la nature du dommage mais aussi de
l'absence de lignes directrices internationales et ensuite du dommage qui devra
être réparé ce qui soulève la question du principe
la réparation.
A. Dommages à l'environnement
En tant que biens atypiques, les actifs environnementaux sont
associés à de nombreuses valeurs dont l'évaluation est
difficile. Pourtant, l'enjeu de leur évaluation est de permettre la
réparation du dommage à l'environnement et l'internalisation des
effets externes négatifs liés à ces dommages. Obtenir une
évaluation des actifs environnementaux présentes trois
intérêt : premièrement permettre des analyses,
deuxièmement améliorer les méthodes dans le cadre de
l'évaluation du dommage environnemental. Cette démarche est
indispensable pour évaluer les pertes environnementaux et
économiques pour justifier les demandes d'indemnisations. Et enfin,
l'évaluation des actifs de l'environnement joue un rôle croissant
dans la gestion des ressources naturelles161.
Les méthodes d'évaluation sont nombreuses et
diverses. D'un point de vue économique, l'ensemble de ces
méthodes peut être divisé en deux catégories selon
l'objet du calcul : la valorisation environnementale qui a pour objet de
déterminer la valeur qu'attache le public à ses ressources et
d'en déterminer la compensation monétaire nécessaire ; la
méthode d'équivalence, pour sa part, estime combien coûte
la provision de ressources pour compenser les pertes et laisser le public
indifférent. Dans ce dernier cas, le public est compensé en
ressources ou services et non pécuniairement. Ainsi, la première
méthode s'attache plus à ce que demande le public en termes de
ressources tandis que la seconde concerne les services fournis qui doit
être proportionnels à valeur attribuée par le public. Il
faut noter que la valeur de l'impact peut être très
différente des coûts de remplacement162. C'est
notamment le cas lors que la disparition d'espèces rares, dont la courbe
de demande est plus pentue et la demande, inélastique. Face à ces
deux types de méthodes, le juge devra opérer un choix si ce
dernier n'est pas déjà imposé. Il existe toutefois
d'autres méthodes.
Les méthodes d'évaluation monétaire
reposent toutes sur des fondements utilitaires. Comme l'affirme François
Bonnieux et Brigitte Desaigues « malgré l'absence de prix, toute
augmentation ou diminution de la qualité d'un actif environnemental
affecte l'utilité (le bien-
161 Anouchka Didier, Le dommage écologique pur en
droit international, Nouvelle édition, Genève, Graduate
Institute Publications, 2013 disponible sur
http://books.openedition.org/iheid/667
162 Idem
54
être) des individus. Cette simple constatation conduit
les économistes à rechercher les moyens de faire
révéler les modifications d'utilité des individus
»163. Il faut cependant citer deux autres méthodes qui
permettent de déterminer les valeurs accordées à un actif
environnemental, à savoir : les méthodes de
préférences révélées et les méthodes
préférences déclarées164.
Les méthodes de préférences
révélées appréhendent les biens non marchands
à travers des marchés qui leur sont reliés. Les deux
méthodes principales sont : la méthode des coûts de
transport qui évalue le consentement à payer des individus pour
un site naturel en fonction de l'ensemble des dépenses que ces individus
engagent afin de s'y rendre. L'avantage de cette méthode est la
fiabilité et l'attribution d'un prix à cette activité non
marchande. La seconde méthode est celle des prix, elle repose sur
l'hypothèse qu'il existe un lien entre d'une part le prix d'un bien et,
d'autre part ses différentes caractéristiques. Pour être
valable, elle suppose toutefois deux conditions difficiles, voire impossible,
à obtenir : la perfection du marché observé et la parfaite
information des agents quant à la qualité de
l'environnement165.
Les méthodes de préférences
déclarées sont, quant à elle, des méthodes
d'évaluation contingente. Celles-ci consistent à enquêter
directement auprès des individus concernés afin de
déterminer le prix de l'actif environnemental. Dans ce cas, aucun
détour par le marché n'est nécessaire : on enquête
directement auprès des individus en leur présentant des scenarios
relatifs à un actif environnemental. Cette méthode a un avantage
certain, elle permet d'inclure dans l'évaluation une estimation de la
valeur au-delà de la seule valeur d'usage. Elle a été
utilisée, par exemple, pour évaluer l'ensemble des dommages
consécutifs à la marée noire provoquée par l'Exxon
Valdez sur les côtes de l'Alaska166.
Il existe ainsi plusieurs méthodes, aussi
variées que complexes, pour procéder à l'évaluation
du dommage environnemental mais que cela ne soit un obstacle à leur
réparation. Il faut noter cependant qu'il n'est pas aisé de
réparer un dommage à l'environnement sans passer par une
monétarisation du dommage à travers la référence
aux utilités économiques, tout en sachant que les valeurs
économiques ne suffissent pas à exprimer toute la valeur de
l'atteinte. Après avoir évaluer le dommage à
l'environnement, reste à savoir comment procéder pour le
réparer.
163 Bonnieux, Desaigues, Economies et politiques de
l'environnement, cité par Anouchka Didier, Op. Cit.
164 Anouchka Didier, Op. Cit.
165 Idem
166 Ibidem
55
B. La réparation des atteintes à
l'environnement
Il est acquis en droit international que la personne
responsable du dommage doive le réparer. Pour diverses raisons, la
réparation en matière environnementale vient en limiter
l'efficacité. Comme en droit commun de la responsabilité, la
réparation peut être en nature ou pécuniaire (une
troisième option existe toutefois en droit international, la
satisfaction). Cependant, au-delà de considérations
générales, les spécificités du dommage
écologiques exigent d'appliquer des règles dérogatoires
spécifiques. Si les deux réparations existent en droit
international, ils n'ont pas la même importance quant à leur
application. La réparation en nature est aussi largement majoritaire,
devant une réparation pécuniaire peu usitée. Le constat
final est que l'on peut tout de même établir que la
réparation en nature peut être assimilée à une forme
cachée de réparation pécuniaire. En raison, de la
spécificité du dommage environnementale, notamment concernant la
fragilité des écosystèmes, la réparation en nature
devrait être privilégiée d'autant plus que la
réparation pécuniaire ne garantit pas l'allocation des fonds
à la restauration du milieu167.
La directive européenne du 21 avril 2004 est encore
plus novatrice car elle n'envisage la réparation qu'en nature et
prévoit successivement trois modes de réparation. Les mesures de
remise en état sont constituées de toute action y compris des
mesures d'atténuation ou des mesures transitoires visant à
restaurer, réhabiliter ou remplacer les ressources naturelles endommages
ou les services détériorés ou à fournir une
alternative équivalente à ces ressources ou
services168. La réparation prend alors trois formes : la
réparation primaire désignant toute mesure de réparation
par laquelle les ressources naturelles endommages ou les services
détourées retournent à leur état initial ou s'en
rapprochent ; la réparation complémentaire, constituée par
toute les mesures de réparation entreprise à l'égard des
ressources naturelles ou des services afin de compenser le fait que la
réparation primaire n'aboutit pas à la restauration
complète des ressources naturelles ou des services ; finalement, la
réparation compensatoire visant toute action entreprise afin de
compenser les pertes intermédiaires de ressources naturelles ou des
services qui surviennent entre la date de survenance d'un dommage et le moment
où la réparation primaire a pleinement produit son
effet169.
167 Anouchka Didier, Op. Cit.
168 Idem
169 Ibidem
56
Cependant, la réparation en nature au sens strict est
rarement retenue en pratique. Cela s'explique pour des raisons techniques
à la fois d'évaluation du dommage et de défaut de
compétences ou des moyens nécessaires à la personne
responsable pour réparer elle-même le dommage. Par
conséquent, la réparation est souvent compensée du
remboursement des coûts de mesures de restauration. Outre les mesures de
restauration, certains textes prévoient également le
remboursement des frais relatifs aux mesures de sauvegarde. Les mesures de
sauvegarde sont prises après la survenance d'un événement
pour réduire autant que possible les conséquences d'une atteinte
au milieu naturel170.
Une question se pose toutefois lorsque la réparation en
nature est impossible pour des raisons juridiques ou des coûts excessifs,
en raison d'un dommage irréversible. Dans pareil situation, le recours
à la réparation pécuniaire peut être
privilégié. Celui-ci n'est envisagée que pour
réparer des dommages dits traditionnels, c'est-à-dire pour les
dommages individuels, économiques et moraux des victimes. La
responsabilité des Etats pour fait internationalement illicite
répond globalement aux mêmes solutions quant à la
réparation en nature. Il faut cependant signaler que si le principe en
matière de responsabilité civile est celui de la
réparation intégrale, par la personne responsable du dommage, les
textes reconnaissant la réparation du dommage environnementale
conditionnent la réparation en nature à des
éléments pratiques qui remettent en cause cette réparation
intégrale. Parmi les conditions retenues, il y a la condition de
proportionnalité entre les coûts engagés et les
bénéfices escomptes des mesures.
170 Anouchka Didier, Op. Cit.
171 Nasser Abdoul, « L'environnement, la justice en
Afrique : Radioscopie d'un difficile accès à la justice en
matière environnementale », in Revue africaine et malgache de
recherche scientifique, n° spécial avril, 2019, p. 4.
57
CHAPITRE 2. DES OBSTACLES A L'EFFECTIVITE DU DROIT D'ACCES A LA
JUSTICE EN DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT AUX PERSPECTIVES D'AVENIR
L'environnement est en soi-même un problème, en
raison notamment de sa complexité qui l'enveloppe de bout en bout.
Insaisissable et parfois même incompréhensible du point de vue de
son acceptation, cette notion est vague et dans une certaine mesure
fuyante171.
L'effectivité et l'exercice concret du droit
d'accès à la justice de manière générale et
plus particulièrement en matière en environnementale est une
exigence qui incombe aux Etats. Ils ont l'obligation de lever tout obstacle
pouvant entraver un exercice effectif de ce droit. Rappelons, par ailleurs, que
l'exercice de ce droit devant le juge international n'est que
complémentaire voire subsidiaire à ce que le droit positif des
Etats prévoient. Par conséquent, les Etats doivent
expressément consacrer ce droit dans leur arsenal juridique.
Les obstacles au droit d'accès à la justice en
matière environnementale en droit international de l'environnement sont
variés et nombreux, ils peuvent venir des textes eux-mêmes, des
lenteurs de procédure judiciaire, du coût du procès ou
même de la méconnaissance du droit. Cependant, ils doivent
être surmonter si l'on veut préserver la nature dans
l'intérêt des générations présentes et
futures. De ce fait le présent chapitre abordera les obstacles à
l'effectivité du droit d'accès à la justice (Section 1) et
proposera des solutions pour une meilleure mise en oeuvre de ce droit (Section
2).
Section 1. Obstacles à l'effectivité du droit
d'accès à la justice
L'accès à la justice est un aspect
inhérent de l'Etat de droit et une exigence fondamentale de toute
société démocratique. Toutefois, malgré son
rôle pour la jouissance effective de leurs droits par les individus, le
droit d'accès à la justice est trop souvent entravé par
des obstacles d'ordre pratique et juridique. Le manque d'informations, le
manque de confiance dans les autorités et les effets de la crise
économique sur l'aide judiciaire contribuent à la persistance des
obstacles à l'effectivité du droit d'accès à la
justice plus particulièrement en matière environnementale.
58
Les obstacles à l'effectivité du droit
d'accès à la justice peuvent être de plusieurs ordre, comme
nous l'avons dit plus haut, que nous regroupons en deux : les obstacles
juridiques (§1) et les obstacles procéduraux (§2).
§1. Obstacles juridiques
La complexité des procédures que ce soit au
niveau national ou international peut constituer un obstacle
méconnaissant le droit d'accès au juge172. Il en est
de même de l'incapacité à ester en justice en
matière environnementale du fait de la législation d'un Etat ou
encore de l'absence en droit interne d'un accès direct à un
tribunal pour des questions liées à la protection de
l'environnement. Le droit international de l'environnement a donné
naissance à de nombreuses procédures d'examen période
relatif à l'appréciation, mieux, à l'évaluation de
la mise en oeuvre des conventions relatives à l'environnement par les
Etats, premier destinataire de ces règles.
S'il existe aujourd'hui, une multiplicité des accords
bilatéraux et multilatéraux sur l'environnement de même
qu'institutionnelle, il n'en va pas sans que cela ne comporte des obstacles
dans l'effectivité de règle du droit international de
l'environnement et même du droit international de l'environnement. Ces
obstacles sont liés d'une part, par l'absence d'une convention-cadre
générale de l'environnement et d'autre part à cette
multiplicité de texte sur la protection de l'environnement.
A. Absence d'une convention universelle sur
l'environnement
C'est véritablement dans la seconde moitié du
20ème siècle, et particulièrement depuis la fin
des années 1970, que les réglementations visant la protection de
l'environnement connaissent une croissance rapide, de façon concomitante
dans la plupart des Etats à la suite de la prise de conscience que notre
planète est menacée par l'explosion démographique et ses
conséquences, par l'impact d'une technologie toujours plus envahissante
et par la multiplication désordonnée des activités
humaines173. Face à cette menace grandissante, les
gouvernements des Etats trouvent dans les instruments juridiques une solution
contre la détérioration de l'environnement, multipliant ainsi,
les conventions internationales à tous les niveaux et dans
172 Antoine Steff, « La protection de l'accès au
juge judiciaire par les normes fondamentales », in Les annales de
droit, 11, 2017 disponible sur
http://journals.openedition.org/add/561
173 Sandrine Maljean-Dubois, La mise en oeuvre du droit
international de l'environnement, Paris, éd. Iddri, 2003, pp. 9.
59
tous les domaines. C'est dire à quel point
l'humanité prit conscient de la nécessité de
protéger la biosphère qu'est notre planète.
Cependant, ce foisonnement conventionnel, loin d'être
une solution appropriée et suffisante, présente un risque majeur
dans la mise en oeuvre effective du droit international de l'environnement. La
multiplication des conventions entraine dans le chef des Etats une
multiplication d'engagement institutionnels et financiers qui par la suite pose
des problèmes de cohérence. De ce fait, le droit international de
l'environnement souffre, donc, « d'une relative fragmentation
»174 dans son effectivité. A ce foisonnement
conventionnel, il convient d'y ajouter, la profusion institutionnelle dans le
domaine de l'environnement qui qui ne va pas sans poser de difficulté
pratique.
Ainsi, l'accroissement de la complexité et du
morcellement de la gouvernance internationale en matière d'environnement
tient en partie à l'augmentation du nombre des acteurs, tant
gouvernementaux que non gouvernementaux, dans le domaine de l'environnement. En
outre, la prolifération des organes des Nations Unies et d'autres
organismes internationaux qui s'occupent des questions d'environnement ne fait
que s'ajouter à cette complexité175. La
multiplicité des institutions, des problèmes et des accords
relatifs à l'environnement met les systèmes actuels et notre
aptitude à les gérer à rude épreuve.
L'accroissement continuel du nombre des organes internationaux
compétents en matière d'environnement comporte le risque d'une
diminution de la participation des Etats du fait que leurs capacités
sont limitées alors que la charge de travail augmente, et rend
nécessaire l'instauration ou le renforcement des synergies entre tous
ces organes176.
D'où la nécessité d'adopter une
convention-cadre générale de l'environnement. La
réglementation internationale, actuelle, en matière
d'environnement ne se préoccupe que des aspects sectoriels voire
transsectoriels sans envisager une réglementation beaucoup plus globale
des problèmes environnementaux. De plus dans ces différents
instruments juridiques, les Parties sont rares les mêmes d'où un
réel problème d'harmonisation de vues et d'obligations.
174 Sandrine Maljean-Dubois, Op. Cit., p.10.
175 Idem , p. 18.
176 Ibidem
177 Steinar Andresen, « Le rôle des cours et
tribunaux internationaux dans la gouvernance mondiale de l'environnement
», in ASPJ Afrique et francophonie, 3ème
trimestre, 2016, 71-85 pp.
60
B. Multiplicité de texte sur l'environnement
Les AME constituent l'épine dorsale de la gouvernance
mondiale de l'environnement. Depuis les années 1960, période
d'apparition des premiers accords, les AME se sont multipliés puis ont
connu leur apogée trois décennies plus tard. Après un
léger recul, on dénombre aujourd'hui plusieurs centaines
d'accords sur l'environnement, régionaux et bilatéraux pour la
plupart. Ils ont pour point de départ un traité ou une
convention-cadre que de nouvelles règles plus précises viendront
compléter par la suite, par le biais d'un ou plusieurs protocoles. Pour
être légalement contraignant, le traité doit être
ratifié par le nombre minimal requis de pays. Les AME reposent
généralement sur un secrétariat permanent pour les
activités d'organisation et de préparation du processus de
négociations. Organe décisionnel suprême, la
conférence des parties, c'est-à-dire l'assemblée des
états signataires, a lieu une ou deux fois par an.
Les conventions mondiales de l'environnement s'appuient
également sur des organes subsidiaires spécialisés dont le
rôle est de fournir des avis scientifiques, de mise en oeuvre ou de
conformité. Bon nombre d'AME opèrent en lien étroit avec
le Programme des Nations Unies pour le développement, qui fournit
assistance et conseils aux parties sous des formes variées. Soutenant
majoritairement les pays en développement signataires des principaux AME
dans la mise en oeuvre de leurs engagements, le Fonds pour l'environnement
mondial joue un rôle crucial. Quelques AME disposent également
d'un fonds dédié à la mise en place des initiatives dans
les pays du Sud. Enfin, pour compléter le paysage juridique de la
gouvernance mondiale, des partenariats et des instruments non contraignants
procédant du soft law (le droit mou) ont également vu le
jour. En somme, les organes multilatéraux en faveur de l'environnement
se sont appuyés sur un cadre institutionnel sophistiqué et
élaboré qui n'a eu de cesse d'évoluer. Que les
institutions oeuvrent en silo ou en interaction, l'objectif global de ce «
complexe de régimes environnementaux » est de protéger
l'environnement, par des initiatives locales ou mondiales177.
D'aucuns reprochent à ce complexe d'être trop
fragmenté, d'où son manque d'effectivité, et prônent
la création d'une Organisation mondiale de l'environnement (OME).
Nombreux sont les partisans du rattachement d'une CIE à l'OME. Or, face
à la profusion institutionnelle, la nécessité d'une ou
plusieurs cours spécialisées ne va pas de soi. Mais l'argument
principal en faveur d'une CIE réside dans l'ineffectivité du
système existant. De
61
fait, les juristes mesurent l'effectivité sur le seul
critère des procédures de règlement des différends.
Les régimes internationaux de l'environnement présentent des
mécanismes de règlement des différends plus ou moins
effectifs. Dans les années 1970, les auteurs des traités se sont
contentés de s'accorder sur l'existence d'un problème et d'y
remédier par l'instauration d'un AME, sans autre
considération178.
Dans la décennie suivante, des objectifs et des
échéanciers ont été fixés afin de mesurer
les avancées éventuelles. Dans les années 1990, des
obligations différentielles et des considérations sur le rapport
coût performance ont été introduites ; depuis, certains
régimes s'appuient sur des mécanismes de marché. Avec
l'expansion démographique et la croissance de l'activité
économique de ces trente dernières années, nous pouvons
sans hésiter formuler l'argument contrefactuel selon lequel sans ces
AME, la situation de l'environnement serait bien pire. Pourtant, aucun
défi environnemental majeur n'a été complètement
résolu par ces régimes et rares sont les exemples de
réussite179.
De façon générale, les mécanismes
de suivi et de contrôle de l'application des AME sont mous, les
règles souvent imprécises et les sanctions rarement
appliquées. Le régime sur la couche d'ozone, le Protocole de
Kyoto et la Convention Aarhus font figure d'exceptions. Souvent, le niveau de
conformité n'est pas lié à l'effectivité ou la
capacité d'un AME à résoudre un différend, car les
règles ne sont en général pas assez contraignantes pour
apporter une solution au problème180.
§2. Obstacles procéduraux
« La justice est gratuite mais onéreuse »
dit-on. Ce principe longtemps consacrer par les droits interne des Etats peut
également constitue un obstacle à l'effectivité du droit
d'accès à la justice du fait que le frais de justice joue un
rôle non négligeable dans le déroulement d'un procès
de manière générale et encore plus en matière de
protection de l'environnement. Ainsi, le manque de moyen peut impacter le sort
du procès. Il en est de même de la durée des
procédures. Les instruments universels que régionaux ne cessent
de rappeler au juge la nécessité de respecter un délai
raisonnable dans le traitement des dossiers.
178 Steinar Andresen, Op. Cit.
179 Idem 180Ibidem
62
Cependant, nous ne retiendrons à ce niveau que deux
obstacles procéduraux à l'effectivité du droit
international de l'environnement et du droit d'accès la justice
environnement : l'inexistence d'une juridiction internationale de
l'environnement qui connaitrait des atteintes à l'environnement dans le
chef des Etats et des individus, d'une part ; les coûts de
procédure en matière environnementale.
A. Inexistence d'une Cour Internationale de
l'Environnement, CIE
L'inexistence d'une Cour Internationale de l'Environnement
fait partie des raisons de l'ineffectivité du droit international de
l'environnement de manière générale et du droit
d'accès à la justice en matière d'environnement en DIE.
Cependant, il faut noter que ces dernières décennies, des
progrès considérables ont été accomplis en
politique et en droit international de l'environnement. Dans de nombreux
domaines, l'effectivité des institutions internationales de
l'environnement s'est largement améliorée au regard du
règlement des différends. Il existe toutefois un décalage
entre les efforts non négligeables entrepris et les résultats
constatés sur le terrain181.
L'idée d'une Cour internationale de l'environnement
n'est pas nouvelle. Elle remonte aux années 1980, époque au cours
de laquelle l'environnement occupait une place prépondérante sur
l'agenda politique internationale. Dans l'esprit de « l'enthousiasme
environnemental » de l'époque, les pays reconnaissent la
nécessité de créer une « nouvelle autorité
institutionnelle » dans le cadre des Nations Unies. Chargé de
lutter contre le réchauffement climatique, cet organe devait être
doté de mécanismes de décision et d'exécution. Les
négociations aboutirent à l'impasse et les Nations Unies
abandonnèrent
l'idée182.
En Italie, le mouvement suscita un intérêt plus
vif : un comité réuni à Rome en 1988 proposa pour la
première fois la création d'une cour internationale de
l'environnement. Puis, en 1989, l'Académie nationale des Lynx organisa
à Rome, également un Congrès international sur le droit de
l'environnement pour une mise en oeuvre plus efficace des règles,
prévoyant notamment la création d'une cour internationale de
l'environnement au sein des Nations Unies.
181 Steinar Andresen, Op. Cit.
182 Idem
63
L'Académie instaura la Fondation pour une cour
internationale de l'environnement (ICEF), organisme à but non lucratif
reconnu à Rome en 1992183.
Accréditée auprès du Conseil
économique et social des Nations Unies et d'autres organisations
internationales, la fondation n'exerça aucune influence dans la pratique
et, qui plus est, ne fut reconnue par aucun état. Depuis 1992, l'ICEF
mit sur pied plusieurs conférences afin de poursuivre
l'élaboration d'une cour internationale de l'environnement, processus
auxquels se joignirent des avocats de plusieurs pays. Ses représentants
siégèrent à la Conférence des Nations Unies sur
l'environnement et le développement en 1992 puis au sommet mondial de
Johannesburg en 2002. La dernière conférence internationale de
l'ICEF eut lieu à Rome en mai 2010184.
Nouvelle initiative lancée en 2008 au Royaume-Uni
pendant les préparatifs de la Convention-cadre des Nations-Unies sur les
changements climatiques (15e conférence des parties) qui allait se tenir
à Copenhague en 2009, le projet « ICE Coalition » vise la
création d'une cour internationale de l'environnement. La juridiction
envisagée se base sur des principes qui sont, pour l'essentiel,
identiques aux précédentes tentatives185.
Par ailleurs, l'Université des Nations Unies (UNU) est
allée de l'avant en rédigeant un rapport sur la gouvernance
mondiale du développement durable (Report on International
Sustainable Development Governance), en vue du sommet de Johannesburg.
Plus récemment, l'Association internationale du barreau s'est aussi
engagée sur cette voie186. Si aucun acteur politique influent
n'a pris position, l'ancien secrétaire général de l'OMC
fait figure d'exception notable : il appuya l'idée d'une CIE
dotée des mêmes procédures de règlement des
différends que l'OMC. À ce jour, aucun Etat n'a soutenu
officiellement la mise en place d'une CIE, exception faite de M. Børge
Brende, ministre norvégien de l'Environnement187.
Si la création d'une CIE tarde à voir le jour,
la Cour Pénale internationale a pris le devant pour « venir au
secours de l'environnement »188. Le 15 septembre 2016, la
procureure de la CPI publiait un document de politique générale
où elle faisait part de son intention de poursuivre
183 Steinar Andresen, Op. Cit., 71-85 pp.
184 Ibidem
185 Ibidem
186 Ibidem
187 Ibidem
188 Maud Sarliève, « Le droit pénal
international peut-il venir au secours de l'environnement ? », in
Justiceinfo.net, Octobre,
2018 disponible sur :
https://www.justiceinfo.net/fr/le-debats-justiceinfo/opinions/39171-le-droit-penal-international-peut-il-venir-au-secours-de-l-environnement.html
64
des crimes graves de destruction de l'environnement. Ce
document précisait que son bureau s'intéressait
particulièrement aux crimes impliquant ou entrainant, entre autres, des
ravages écologiques, l'exploitation illicite de ressources naturelles,
ou l'expropriation illicite de terrains.
Aux termes, de ce même document, les Etats qui en
manifesteraient le souhait se voyaient proposer l'assistance du bureau du
procureur « au sujet de comportements constituant des crimes graves au
regard de la législation nationale, à l'instar de l'exploitation
illicite de ressources naturelles, du trafic d'armes, de la traite
d'êtres humains, du terrorisme, de la criminalité
financière, de l'appropriation illicite de terres ou de la destruction
de l'environnement »189. Cependant deux années se sont
écoulées depuis cette déclaration d'intention et les
choses ne semblent pas bouger.
Quoique l'inexistence d'une CIE constitue un obstacle à
l'effectivité du DIE et du droit d'accès à la justice,
l'apparition des juridictions spécialisées en matière
d'environnent permet toutefois d'atténuer cette situation. L'autre
difficulté à l'effectivité du droit d'accès
à la justice environnementale réside dans le coût de
procédure de ces juridictions qu'elles soient internationales ou
nationales.
B. Coût des procédures
Le coût d'un procès (frais de procédure,
dépens, honoraires des avocats) varie en fonction de la
complexité de l'affaire, de la fortune de la partie au procès et
même de la juridiction de céans. Au niveau interne, chaque Etat
fixe les frais de justice librement. Mais il est de leur devoir de garantir
l'effectivité du droit d'accès à la justice pour permettre
aux individus et ONG de contester devant une juridictions les atteintes
à l'environnement.
Un coût élevé des frais de
procédure consisterait à une entrave à
l'effectivité du droit d'accès à la justice et par
ricochet une atteinte à l'environnement. Bien que les
législations nationales tendent à réduire sensiblement des
frais de justice par le biais de l'aide judiciaire, il faut noter qu'elle n'est
pas encore pleinement satisfaisante. Contrairement à l'assistance
qu'accorde les juridictions internationales pour garantir l'accès au
droit et veiller au respect des obligations conventionnelles librement
consentis par les Etats.
189 Maud Sarliève, Op. Cit.
65
Section 2. Perspectives d'avenir
Dans cette dernière partie, nous faire quelques
propositions afin de permettre une mise en oeuvre effective du droit
international de l'environnement de manière générale et
plus particulièrement du droit d'accès à la justice en
matière environnementale, et cela à deux niveaux : au niveau du
droit interne des Etats (§1) et au niveau du droit international
(§2).
§1. Au niveau du droit interne des Etats
En ratifiant librement les conventions internationales, les
Etats prennent l'engagement d'exécuter de bonne foi leur engagement et
de prendre toutes les mesures nécessaires afin que les engagements
librement consentis sur le plan international soient appliqués à
leur arsenal juridique.
A. Invocabilité des conventions internationales
L'accès au juge renvoie à la question des
modalités d'accès de celui-ci et donc à la manière
dont un ordre juridique régit l'accès à l'organe du
contrôle de la régularité. La question est vaste et
technique. S'il n'existe pas de théorie formelle de la justice en
général, il existe cependant des éléments dont la
réflexion peut se nourrir dans certaines théories des droits
fondamentaux. Sous cet angle, il est possible de penser une théorie de
l'accès à la justice en matière des droits fondamentaux en
se concentrant sur les choix auxquels peut procéder l'auteur de la norme
relative à un droit fondamental qui influent sur son
invocabilité190.
Il est traditionnellement admis que chaque Etat est libre de
déterminer la manière dont il entend s'acquitter de ses
obligations internationales. Il lui appartient, à ce titre, de fixer le
statut des normes de droit international au regard de son droit interne.
L'opposition est classique entre le dualisme, système dans lequel droit
international et droit interne constituent deux univers juridiques sans
communication l'un avec l'autre, ce qui implique l'intervention d'une norme
interne pour donner efficacité à la Convention dans l'ordre
juridique interne, et le monisme qui intègre les normes internationales
dans l'ordre juridique interne, à un niveau et à des conditions
qu'il faut ensuite déterminer. Mais il faut se garder de donner à
cette opposition une portée excessive191.
190 Lire Bétaille, Julien (dir.), Op. Cit.
191 Jean-Désiré Ingange wa Ingange, Droits
Humains : Droits de l'homme et libertés publiques, notes de cours,
Université Libre de Kinshasa, 2017, p. 123.
192 Au Portugal, par exemple, la Constitution de 1976
amandée consacre une telle action en son article 52, paragraphe 3.
66
Quoi qu'il en soit, les solutions nationales se
caractérisent par leur extrême diversité et
révèlent une adaptation très lente des systèmes
juridiques et des juristes à l'internationalisation massive des
matières depuis 1945. Mais l'application des traités
internationaux par les juridictions internes suppose un préalable, que
les normes qui y sont contenues soient déclarées
d'applicabilité directe, ce qui permet aux justiciables de les
invoquer.
B. Facilité l'accès aux juridictions
nationales aux individus et ONG en matière d'environnement
Comme nous l'avons vu plus haut, le droit d'accès
à la justice en matière d'environnement est largement
consacré par des instruments régionaux contraignants, cependant
il est différemment exercé par le droit interne des Etats.
L'accès le plus large est assuré par l'actio
popularis192 d'un côté, et à l'autre
extrême du spectre seules personnes pouvant se prévaloir d'une
atteinte à un droit subjectif, à savoir la lésion d'une
norme adoptée pour protéger spécifiquement
l'intérêt lésé. Et enfin, sous l'empire d'une
troisième approche, un recours sera déclaré recevable si
le requérant justifie d'un intérêt « suffisant »
à agir, ce qui en soi ne règle pas encore définitivement
la question, dès lors que l'intérêt du demandeur doit, dans
certains ordres juridiques, être strictement « direct et personnel
», alors que, dans d'autres, une interprétation plus
libérale prévaut, pouvant aller jusqu'à la prise en compte
de l'intérêt collectif poursuivi statutairement par une
association.
Face à une telle situation, non sans contraindre les
Etats, qui sont appelés à prendre toutes les mesures qu'ils
trouveront indispensable dans la mise en oeuvre des engagements librement
consentis par eux, les gouvernements et le pouvoir législatif des Etats
devraient procéder par l'adoption de texte garantissant un plus
l'accès à la justice en matière d'environnement aux
individus et ONG car ils constituent force dans la dynamique du
développement du droit international de l'environnement. Et ainsi par
l'action des ONG, les citoyens et les décideurs sont informés des
enjeux écologiques de l'heure afin de permettre un exercice efficace du
droit d'accès à la justice environnementale et du droit de
l'environnement.
Cette accessibilité ne saurait se limiter qu'au niveau
de l'intérêt à agir mais aussi dans la réduction des
coûts des procédures devant les juridictions nationales. Ce qui
serait comme nous l'avons développé un obstacle à
l'effectivité du droit.
67
§2. Au niveau du droit international
Le droit international demeure le cadre idéal pour
réponde efficacement aux problèmes environnementaux car comme
nous le savons l'environnement ne connait pas les limites géopolitiques
de nos Etats respectifs, ainsi donc un dommage environnemental né sur le
territoire d'un Etat pourrait avoir de conséquence sur le territoire
d'un autre Etat. Comme ce fut le cas de nombreux Etats ayant souffert des
conséquences de l'accident nucléaire de Tchernobyl ou le
phénomène des plus acides qui lacs et forêts dans des pays
lointains. Une autre raison de l'importance du droit international est que les
problèmes environnementaux exigent la coopération des Etats et
d'adoption de normes communes.
Ces deux dernières décennies ont l'adoption et
la création de plusieurs centaines d'instruments et de mécanismes
visant par la protection de l'environnement, et si cela peut constituer une
avancée du droit international de l'environnement, le résultat
est loin d'être satisfaisant. D'où la nécessité de
repenser l'action du droit international pour une meilleure protection de
l'environnement qui devrait passer par l'adoption d'une convention
générale universelle de l'environnement et par la création
d'une juridiction internationale qui connaitrait des atteintes à
l'environnement.
A. Adoption d'une convention universelle sur
l'environnement
Face aux problèmes de plus en plus grandissant de
détérioration de l'environnement, l'heure est à l'adoption
des mesures innovantes pour répondre de manière plus efficace au
problèmes environnementaux. Les mécanismes actuels et la
réglementation internationale de l'environnement, actuellement, ne
prennent en compte que de manière sectoriel ou transsectoriel la
dégradation de l'environnement, alors que ce dernier nécessite
une approche plus global et intégral de sa prise en charge par la
communauté internationale. L'adoption d'une convention-cadre
générale de l'environnement permettrait d'une part, de
réunir toute la communauté internationale autour d'une même
convention universelle prenant en compte l'environnement et ses
problèmes dans sa globalité et d'autre part serait un moyen plus
efficace de contrôler sa mise en oeuvre voire de sanctionner les Parties
à ladite convention qui n'honoreraient leur engagement librement, au nom
du principe pacta sunt servanda.
La Convention ne se limiterait pas seulement à
consacrer la seule responsabilité des Etats dans la dégradation
de l'environnement, elle pourrait aller encore plus loin en y intégrant
celle des individus qui porterait atteinte à l'environnement, consacrant
ainsi un lot des crimes
68
internationaux à l'environnement. Une telle
démarche nécessite un engagement renouvelé pour apporter
des solutions concrètes et rapides aux problèmes majeurs de la
protection de l'environnement et confédérer les forces et les
avancées déjà réaliser en la matière. Il
faut cependant noter que l'idée d'une convention universelle sur
l'environnement n'est pas nouvelle.
Parmi les initiatives militant en faveur une convention
universelle de l'environnement figure le Projet d'un Pacte mondial pour
l'environnement porté par la communauté internationale des
juristes193. Projet qui s'inscrit dans le cadre de la
continuité de nombreux précédents internationaux dont elle
s'est inspirée, depuis la Déclaration de Rio jusqu'au projet de
l'UICN, en passant par la Charte mondiale de nature de 1982. Ce Projet d'une
Convention international à caractère général a pour
vocation de constituer une référence majeure de la gouvernance
mondiale de l'environnement194. Il est le fruit d'un processus de
maturation qui accompagne la croissance et le développement du droit
international de l'environnement195. Et a pour objectif de pallier
les lacunes du droit international de l'environnement et de contribuer à
l'émergence d'un cadre juridique mondial plus protecteur des
équilibres naturels.
Ce Projet vise à consacrer les grands principes qui
doivent guider l'action environnementale. C'est une idée qui va plus
loin que les différentes conventions déjà adoptées
qui ne visent que de secteur particulier de l'environnement (climat,
atmosphère, faune, flore). Cependant, si l'initiative est louable, il en
reste pas moins qu'elle n'est toujours pas suivie par les Etats, sujets
primaires du droit international. Toutefois, il ne faut pas laisser place eu
pessimisme et conduit à espère à un revers de la situation
qui conduirait à l'adopter d'une convention pareille et dans la vole
d'une cour internationale de l'environnement qui mettrait à la fois les
Etats et les individus face leur responsabilité environnementale.
B. Création d'une Cour internationale de
l'environnement
Ces dernières décennies, les juridictions
chargées de questions de relations internationales se sont
multipliées ; des tribunaux internationaux spécialisés ont
vu le jour dans des domaines variés. Pour l'heure, aucune cour
internationale de l'environnement n'a été créée,
mais des juridictions ont jugé des affaires comportant un volet
environnemental.
193 Voir Livre blanc-Vers un Pacte mondiale pour
l'environnement, Le club des juristes, Septembre 2017.
194 Idem, p.16.
195 Ibidem, p. 22.
69
Les arguments à l'appui d'une Cour Internationale de
l'Environnement repose en bonne partie sur l'ineffectivité des
régimes internationaux actuels et sur la mollesse des procédures
de règlement des différends environnementaux. Parmi les arguments
en faveur de la création d'une Cour Internationale de l'Environnement,
il y a le rapport de l'UNU qui suggère que les Etats seraient plus
enclins à accepter la juridiction obligatoire d'une cour
spécialisée que d'une cour universelle. En outre, une CIE
jouirait d'une légitimité supérieure si elle avait le
statut d'organe judiciaire d'une nouvelle Organisation mondiale de
l'environnement (OME), à l'instar de la configuration institutionnelle
de l'OMC. L'organe politique de l'OME aurait un droit de regard direct sur la
CIE, au même titre que l'Organe de règlement des différends
de l'OMC à l'égard des groupes spéciaux et de l'organe
d'appel de l'OMC196. Selon une autre proposition, la CIE pourrait
dépendre d'une autre structure coordonnant les AME existants41. Le
rapport de l'UNU plaide en faveur de l'instauration d'un mécanisme de
filtrage permettant d'écarter les affaires superficielles,
portées à des fins de publicité ou motivées par des
enjeux politiques197.
Les auteurs suggèrent la création d'un organe
judiciaire du droit international de l'environnement, en complément des
systèmes de contrôle existants, en envisageant deux façons
possibles de contrôler l'application du droit : la première
consiste à élargir les procédures existantes de
conformité en instaurant un deuxième niveau de contrôle
exercé par une partie tierce ; la seconde prévoit la mise en
place d'une procédure de règlement judiciaire qui serait
appliquée quand, lors du règlement d'un différend, les
procédures de conformité achoppent198.
Les partisans à la création d'une CIE optent
pour l'accès des acteurs non étatiques et des personnes
privées, des délais plus courts de règlement des
différends, des coûts de litiges moindres, une application plus
systématique des traités environnementaux, des procédures
scientifiques idoines, des clauses contre la recherche du tribunal le plus
favorable, une juridiction obligatoire, ainsi qu'un langage clair et
exécutoire.
En un mot, les partisans d'une nouvelle cour invoquent la
nécessité d'une juridiction internationale dotée des
moyens de faire appliquer uniformément la réglementation relative
à l'environnement, au niveau national et international. Certains
réclament également l'application totale du Principe 10 de la
Déclaration de Rio et insistent sur l'importance
196 Steinar Andresen, Op. Cit., 71-85 pp.
197 Idem
198 Ibidem
70
d'implanter la CIE en dehors des villes où
siègent habituellement les tribunaux internationaux, comme
Genève, La Haye et New York199.
199 Steinar Andresen, Op. Cit., 71-85 pp.
71
CONCLUSION
La question de la consécration et de la mise en oeuvre
d'un droit d'accès à la justice environnementale en droit
international de l'environnement est une problématique à la fois
ancienne et toujours d'actualité. Elle n'a jamais cessé
d'être soulevée depuis sa proclamation par la Déclaration
de Rio de 1992 sur l'environnement et développement ou même depuis
le célèbre article de Christopher Stone, « Should trees have
standing ? » (Les arbres peuvent-ils agir en justice ?). La notion
d'accès à la justice suppose, de manière
générale, que soit reconnu à chaque individu le droit de
saisir les juridictions nationales compétentes en cas de
préjudice subi peu importe que la demande du requérant soit
recevable ou non, régulière ou bien fondée. Il suppose
aussi le droit de se faire représenter et celui d'être
jugés dans des délais raisonnables. Elle va plus loin que la
simple notion de droit à un recours effectif, du droit d'accès
aux tribunaux sur un pied d'égalité, du droit à un
procès équitable ou du droit d'aide judiciaire octroyée
aux justiciables qui ne disposent pas de ressources suffisantes.
Elle ne renvoie pas seulement au stade initial de l'engagement
d'une action en justice pour obtenir réparation de la violation d'un
droit, mais met davantage l'accent sur la garantie que les résultats de
l'examen judiciaire soient en eux-mêmes justes et équitables.
L'exercice du droit d'accès à la justice au nom de la protection
de l'environnement n'est pas chose aisée. D'abord, la nature, ne peut
défendre elle-même ses intérêts en justice ou
communiquer avec les institutions judiciaires établies. A cela s'ajouter
le fait que la protection de l'environnement constitue un intérêt
collectif. Or, ce caractère collectif s'accommode mal des voies
traditionnelles de recours dans lesquelles le caractère personnel de
l'intérêt est exigé. D'où la nécessité
de connaitre les fondements de sa consécration et les
réalités de son exercice.
L'accès à la justice environnementale a tout
d'abord était proclamé par la Déclaration de Rio de sur
l'environnement et le développement de 1992 sans que par la suite un
texte contraignant ne le consacre au niveau mondial. Face à la menace
grandissante de la détérioration de l'environnement et de la
nécessite de protéger l'environnement, la protection de
l'environnement sera considérée sous l'angle de droits de l'homme
ainsi, par exemple, la Cour européenne des droits de l'homme dans sa
mission de dire le droit et de veiller au respect de la Convention
européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales va
consacrer dans sa jurisprudence la protection de l'environnement et
l'accès à la justice environnementale à travers la
violation du droit à un recours effectif ou même du droit à
un procès équitable.
72
La Convention d'Aarhus de 1998 sera un formidable catalyseur
d'une véritable consécration du droit d'accès à la
justice environnementale conduisant à l'élargissement des notions
de recevabilité et d'intérêt à agir en
matière d'environnement. L'espace européen ne sera pas la seule
région à procéder à une consécration de ce
droit à travers un instrument contraignant. L'Union africaine va lui
emboiter le pas à travers la Charte africaine des droits de l'homme et
des peuples qui est le tout premier instrument contraignant à
reconnaitre un droit à l'environnement, ensuite par la Convention
africain sur la protection de la nature et des ressources naturelles.
L'Organisation des Etats d'Amérique en fera de même d'abord, avec
la Convention interaméricaine et ensuite plus clairement avec l'Accord
d'Escazù.
De manière générale, l'accès
à la justice est consacré principalement, et j'aimerais dire
unique, au niveau des régions. Un accord universel le consacrant tarde
encore à voir le jour même si plusieurs initiatives ont eu lieu
tendant à élaborer un pacte international sur l'environnement.
Cet absence d'une convention générale sur l'environnement
constitue un obstacle à l'effectivité du droit d'accès
à la justice environnementale et du droit international de
l'environnement. De même que l'inexistence d'une cour internationale de
l'environnement.
La création d'une Cour International de
l'Environnement, l'élaboration et l'entrée en vigueur d'une
Convention international général sur le droit de l'environnement
permettraient une application plus effective du droit international de
l'environnement et du droit d'accès à la justice en
matière environnementale. Et même la responsabilité des
personnes en matière des crimes écologiques internationaux. Les
questions de protection et de conservation de l'environnement sont devenues une
préoccupation de la communauté internationale de ce fait il est
urgent et nécessaire de mettre une Cour internationale de
l'environnement pour l'environnement compétente en matière de
conflits et crimes internationaux.
73
BIBLIOGRAPHIE
I. Ouvrages
- Alexandre Kiss et Jean-Pierre Beurier, Droit international
de l'environnement, Paris, 3ème édition, éd. A.
Pedone, 2004 ;
- Alexandre Kiss, Introduction au droit international de
l'environnement, Genève, Suisse, UNITAR, 2ème
éd., 2006 ;
- Alicia Barena, Accord régional sur l'accès
à l'information, la participation publique et l'accès à la
justice à propos des questions environnementales en Amériques
latines et dans les Caraïbes, Santiago, Nations Unies, 2018 ;
- Anouchka Didier, Le dommage écologique pur en droit
international, Nouvelle édition, Genève, Graduate Institute
Publications, 2013 ;
- Bétaille, Julien (dir.), Le droit d'accès
à la justice en matière d'environnement, Nouvelle
édition Toulouse, Presses de l'Université Toulouse 1 Capitole,
2016 ; - Bruno Oppetit, Philosophie de droit, Paris, éd.
Dalloz, 1999 ;
- Centre for Human Rights de l'Université de Pretoria,
Recueil de documents clés de l'Union africaine relatifs aux droits
de l'homme, Pretoria, éd. Pretoria University Law Press, 2013 ;
- Fatsah Ouguergouz, La Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples : une approche juridique des droits de l'homme entre
tradition et modernité, Nouvelle édition, Genève :
Graduate Institute, 1993 ;
- Guide pratique sur la recevabilité, Conseil de
l'Europe, décembre 2010 ;
- Guy Canivet, Luc Lavrysen et Dominique Guihal, Manuel de
droit de l'environnement, Nairobi, PNUE, 2006 ;
- Jean-Frédéric Morin et Amandine Orsini,
Politique internationale de l'environnement, Paris, éd. Presses
de Sciences Po, 2015 ;
- Jean-Marc Lavieille, Droit international de
l'environnement, Paris, éd. Ellipses, 2010 - Jonas Ebbesson, Helut
Gaugitsch et alii, La Convention d'Aarhus : Guide d'application,
2ème éd., Nations-Unies, 2014 ;
- Livre blanc : Vers un pacte mondial pour
l'environnement, Le club des juristes, Septembre 2017 ;
- Manuel sur les droits de l'homme et l'environnement,
éd. du Conseil de l'Europe, sd ; - Maurice Kamto, Droit
international de l'environnement en Afrique, Paris, éd. EDICEF,
1996 ;
74
- Michel Prieur (dir.), Recueil francophone des
traités et textes internationaux en droit de l'environnement,
Bruxelles, éd. Bruylant, 2011 ;
- Nations Unies, Annuaire de la Commission du droit
international, 2001, Volume 1 ;
- Nicolas Sadeleer, Le principe de précaution dans
le monde, Paris, éd. Fondapol et Fondation Jean-Jaurès, Mars
2011 ;
- Oswald Ndeshyo Rurihose (dir.), Manuel de droit
communautaire africain, Tome 1, Kinshasa, éd. Etat et
Société, 2011 ;
- Sandrine Maljean-Dubois et Vanessa Richard,
Mécanismes internationaux de suivi et de mise en oeuvre des
conventions internationales de protection de l'environnement, Paris,
éd. Institut du développement durable et des relations
internationales, Novembre 2004 ;
- Sandrine Maljean-Dubois, La mise en oeuvre du droit
international de l'environnement, Paris, Iddri, 2003 ;
- Serge Guinchard (dir.), Lexique des termes
juridiques, Paris, éd. Dalloz, 25ème
édition, 2017-2018 ;
- Serge Guinchard (dir.), Lexique des termes
juridiques, Paris, éd. Dalloz, 19ème
édition, 2012 ;
- Stéphane Doumbe-Bille et alii, Droit
international de l'environnement, Paris, éd. Larcier, 2013 ;
II. Articles de revues scientifiques
- Alexandre-Charles Kiss, « La protection de
l'environnement et les organisations européennes », in Annuaire
français de droit international, 1973 ;
- Alida Assemboni-Ogunjimi, « La Cour internationale de
justice et le droit international de l'environnement », in Afrilex,
Revue d'étude et de recherche sur le droit et l'administration dans les
pays d'Afrique, Université Montesquieu-Bordeaux IV, Janvier 2016
;
- Anne-Marie Santorineos, « L'accès à la
justice en matière de droits de la personne : le difficile accès
au tribunal des droits de la personne », in R.D.U.S., 2012 ;
- Antoine Steff, « La protection de l'accès au
juge judiciaire par les normes fondamentales », in Les annales de
droit, n° 11, 2017 ;
75
- Charles-Hubert Born, « L'accès à la
justice en matière d'environnement en Belgique :
la révolution d'Aarhus enfin en marche ? », in
https://www.researchgate.net/publication/291349875
;
- Damien Barchiche, Elisabeth Hege et Andrés Napoli,
« L'accord d'Escazù : un exemple ambitieux de traité
multilatéral en faveur du droit de l'environnement », Iddi,
Décryptage, n° 03/19 ;
- Edgar Fernandez Fernandez, « Les controverses autour de
l'intérêt à agir pour l'accès au juge
constitutionnel : de la défense du droit à l'environnement (Costa
Rica) à la défense des droits de la nature (Equateur) »,
VertigO-la revue électronique en sciences de l'environnement,
Hors-série 22, Septembre 2015 ;
- Éric Tardif, « Le système
interaméricain de protection des droits de l'homme :
particularités, percées et défis », in La Revue
des droits de l'homme, n° 6, 2014 ;
- Estelle Brosset et Eve Truilhé-Marengo, «
L'accès au juge dans le domaine de l'environnement : le hiatus du droit
de l'Union européenne », RDLF, 2018, chron., n° 07
;
- Fatima Dia (dir.), « Pas à pas vers une justice
environnementale », in Liaison Energie-Francophonie, n° 98,
3ème trimestre 2014, IFDD ;
- Fernanda de Salles Cavedon-Capdeville, «
L'écologisation du système interaméricaine des droits de
l'homme : commentaire de la jurisprudence récente 2010-2013 », in
Revue juridique de l'environnement, Volume 39, n° 3, 2014 ;
- J. Dutheil de la Rochère, « Droit au juge,
accès à la justice européenne », in
Pouvoirs, n°96, 2001 ;
- Jean-Christophe Martin et Sandrine Maljean-Dubois, « La
Cour européenne des droits de l'homme et le droit à un
environnement sain. Prévention des risques et responsabilité
environnementale », UNITAR, 2011 ;
- Marie-Anne Frison-Roche, « Le droit d'accès
à la justice et au droit », in Libertés et droits
fondamentaux ,
- Maryse Grandbois et Marie-Hélène
Bérard, « La reconnaissance internationale des droits de
l'environnements : le droit de l'environnement en quête
d'effectivité », in Les cahiers de droit, Volume 44,
n° 3, 2003 ;
- Maud Sarliève, « Le droit pénal
international peut-il venir au secours de l'environnement ? », in
Journalinfo.net
,
- Jean-Désiré Ingange wa Ingange, Droits
Humains : Droits de l'homme et libertés publiques, notes de cours,
Université Libre de Kinshasa, 2014 ;
76
- Maurice Kamto, « La mise en oeuvre du droit de
l'environnement : forces et faiblesses des cadres institutionnels », in
Revue africaine de droit de l'environnement, n° 01, 2014 ;
- Mohamed Ali Mekouar, « La Convention africaine sur la
Conservation de la nature en vigueur mais non opérationnelle : l'urgence
de convoquer la première Conférence des Parties », in
https://www.iucn.org/commissions/world-commission-environmental-law/resources/wcel-country-and-region-reports
;
- Nasser Abdoul, « L'environnement, la justice en Afrique
: Radioscopie d'un difficile accès à la justice en matière
environnementale », in Revue africaine et malgache de recherche
scientifique, n° spécial avril, 2019 ;
- Pirotte Charles, « L'accès à la justice
en matière d'environnement en Europe : état des lieux et
perspectives d'avenir », in Revue Juridique de l'Environnement,
numéro spécial, 2009 ;
- Pirotte Charles, « L'accès à la justice
en matière d'environnement en Europe : état des lieux et
perspectives d'avenir », in Revue juridique de l'environnement,
numéro spécial, 2009 ;
- Sévérine Nadaud et Jean-Pierre
Marguénaud, « Chronique des arrêts de la Cour
européenne des droits de l'homme 2010-2011 », Revue juridique
de l'environnement, 2011, n° 4 ;
- Steinar Andrsen, « Le rôle des cours et tribunaux
internationaux dans la gouvernance
mondiale de l'environnement », in ASPJ Afrique et
Francophonie, 3ème trimestre, 2016 ; - Stéphane
Doumbé-Billé, « La nouvelle Convention africaine de Maputo
sur la
conservation de la nature et des ressources naturelles »,
in Revue juridique de
l'environnement, n°1, 2005 ;
- Thierry Renoux, « Le droit au juge naturel, droit
fondamentaux », in RTD. Civ., 1993 ;
III. Notes de cours
- Alexandre Kiss, Introduction générale du
droit de l'environnement : illustration par la forêt, notes de
cours, Master 2 DICE, Université de Limoges ;
77
- Jean-Désiré Ingange wa Ingange, Droits
Humains : Droits de l'homme et libertés publiques, notes de cours,
Université Libre de Kinshasa, 2017 ;
IV. Rapports
- Nations Unies, Rapport du Sommet mondial pour le
développement durable, Johannesburg, 26 août - 4 septembre
2002 ;
- PNUE, Rapport sur la mise en oeuvre du quatrième
Programme pour le développement et l'examen périodique du droit
de l'environnement (Programme de Montevideo IV) pour la période
2010-2014, Montevideo, 7 - 11 septembre 2015 ;
- Viorel Riceard Badea, L'égalité et la
non-discrimination dans l'accès à la justice, Rapport du 31
mars 2005, Conseil de l'Europe, Doc. 13740 ;
V. Sites internet
-
http://books.openedition.org
- http://journals.openedition.org/
- https://www.iucn.org/
-
https://www.justiceinfo.net
- https://www.researchgate.net/
Section 1. Au sein de l'Union européenne 22
78
TABLE DES MATIERES
Sommaire i
Dédicace ii
Remerciements iii
Liste des abréviations et sigles iv
INTRODUCTION 1
1ère PARTIE : LES FONDEMENTS JURIDIQUES DE L'ACCES A LA
JUSTICE EN DROIT
INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT 4
CHAPITRE 1. LA CONSECRATION DU DROIT D'ACCES A LA JUSTICE AU
NIVEAU
INTERNATIONAL 4
Section 1. Instruments normatifs internationaux 5
§1. Résolutions et déclarations
internationales : premier pas vers une consécration
universelle 5
A. De Stockholm à Rio 6
B. Après Rio 9
§2. Traités internationaux 10
A. Les conventions internationales sur les droits de l'homme
11
B. Les conventions internationales relative à
l'environnement 13
Section 2. Mécanismes de garantie et de protection 16
§1. Les garanties d'origine non conventionnelles 17
A. Garanties liées à l'existence d'une coutume
internationale 17
B. Garanties procurées par l'action des organisations et
institutions internationales 18
§2. Les garanties mises en place par les conventions
internationales 19
A. Conventions internationales des droits de l'homme 19
B. Conventions internationales relatives à
l'environnement 20
CHAPITRE 2. L'ACCES A LA JUSTICE ENVIRONNEMENTALE AU
NIVEAU DES
REGIONS 22
79
§1. Directives de l'UE et du CE 22
§2. Les Conventions régionales européennes
consacrant l'accès à la justice
environnementale 24
A. La Convention européenne des droits de l'homme, CEDH
24
B. La Convention d'Aarhus : un instrument ambitieux et de
démocratie
environnementales 27
Section 2. Au sein de l'Union africaine et de l'Organisation
Interaméricaine 29
§1. Au niveau de l'Union africaine 30
A. La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples
30
B. La Convention africaine sur la conservation de la nature et
des ressources naturelles
32
§2. Au niveau de l'Organisation interaméricaine 35
A. La Convention américaines des droits de l'homme 35
B. L'Accord régional sur l'information, la participation
du public et l'accès à la justice
en matière d'environnement en Amérique du Sud et
aux Caraïbes 37
2ème PARTIE : L'EXERCICE DU DROIT D'ACCES A LA JUSTICE EN
DROIT
INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT 40
CHAPITRE 1. LE DROIT D'ACCES A LA JUSTICE EN MATIERE
D'ENVIRONNEMENT
DEVANT LE JUGE INTERNATIONAL 40
Section 1. Conditions de recevabilité de requête
devant le juge international 41
§1. Qualité d'agir et intérêt 41
A. Qualité d'agir 41
B. Intérêt à agir 43
§2. Procédure devant le juge international 45
A. Epuisement des voies de recours 45
B. Délai 47
Section 2. L'action du juge international dans la protection de
l'environnement et la
sauvegarde de ses droits 48
§1. Attitude du juge 49
80
A. Une jurisprudence aux débuts hésitants 50
B. Une jurisprudence demeurée insuffisante 51
§2. L'action du juge dans la réparation des atteintes
à l'environnement 52
A. Dommages à l'environnement 53
B. La réparation des atteintes à l'environnement
55
CHAPITRE 2. DES OBSTACLES A L'EFFECTIVITE DU DROIT D'ACCES A LA
JUSTICE EN DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT AUX
PERSPECTIVES D'AVENIR 57
Section 1. Obstacles à l'effectivité du droit
d'accès à la justice 57
§1. Obstacles juridiques 58
A. Absence d'une convention universelle sur l'environnement
58
B. Multiplicité de texte sur l'environnement 60
§2. Obstacles procéduraux 61
A. Inexistence d'une Cour Internationale de l'Environnement, CIE
62
B. Coût des procédures 64
Section 2. Perspectives d'avenir 65
§1. Au niveau du droit interne des Etats 65
A. Invocabilité des conventions internationales 65
B. Facilité l'accès aux juridictions nationales
aux individus et ONG en matière
d'environnement 66
§2. Au niveau du droit international 67
A. Adoption d'une convention universelle sur l'environnement
67
B. Création d'une Cour internationale de l'environnement
68
CONCLUSION 71
BIBLIOGRAPHIE 73
I. Ouvrages 73
II. Articles de revues scientifiques 74
III. Notes de cours 76
81
IV. Rapports 77
V. Sites internet 77
TABLE DES MATIERES 78