![](Les-sens-lessence-de-toutes-interactions1.png)
Domaine de Compétence 2.2
Conception et conduite du projet éducatif
spécialisé Mémoire professionnel
Les sens : L'essence de toutes interactions
![](Les-sens-lessence-de-toutes-interactions2.png)
Dossier écrit en vue de l'obtention du Diplôme
d'Etat d'Educateur Spécialisé
Session 2020
![](Les-sens-lessence-de-toutes-interactions3.png)
Remerciements
Je remercie Murielle pour son temps, son soutien
inépuisable et son intérêt pour les sujets abordés,
Merlin pour ses conseils et sa très grande disponibilité,
Emmanuelle, pour son temps, les jeunes des Didgé pour leur joie de vivre
et leurs sourires inoubliables, Alexandra pour sa simplicité et son
honnêteté, Anne-Laure pour sa sympathie, sa bonne humeur, ses
connaissances, sa bienveillance pour les jeunes et son travail auprès
d'eux, Dominique Depenne pour sa compréhension fine qui m'a permis
d'être reconnue, entendue et éclairée, et Anastasia pour
ses observations bienveillantes.
![](Les-sens-lessence-de-toutes-interactions4.png)
Sommaire
Introduction
1
I. L'Établissement Pour Enfants et
Adolescents Polyhandicapés
4
1. Son contexte historique et juridique
4
a. Son contexte historique
4
b. Son cadre légal et son financement
5
2. Ses missions et le public accueilli
6
3. Son équipe et ses partenaires
7
4. Son organisation
8
a. Ses réunions
8
b. Ses modalités d'admission
9
c. Sa structure
10
d. L'organisation des journées
10
II. Deux jeunes en recherche d'interactions sociales
avec leur environnement
11
1. Angel
11
2. Zadkiel
13
III. Les besoins spécifiques d'Angel et de
Zadkiel
16
1. Questionnements initiaux
16
2. Toutes les occasions sont bonnes pour entrer en
relation
16
3. A la recherche d'objets de stimulations et de
dynamisme
17
4. Le besoin de stimulations sensorielles, s'ajoutant aux
cinq besoins de base
18
5. Le besoin de participation, soit le besoin
d'humanité
19
6. Pistes de réponses
21
IV. Les contes sensoriels
22
1. Naissance du projet, pour qui et...
22
2. ...Pourquoi ?
23
3. Annonce du projet à l'équipe
26
4. Objectifs visés
26
5. Cadre de l'activité
28
a. Nombre de participants
28
b. Moyens matériels
29
c. L'annonce de l'activité aux jeunes
30
d. L'histoire choisie
30
6. Déroulement des séances
31
a. Première séance
31
b. Deuxième séance
32
c. Troisième séance
32
d. Quatrième séance
33
e. Cinquième séance
34
f. Des participants attentifs et réactifs lors des
séances
34
g. L'atterrissage après le voyage par les sens
35
V. Evaluation des
séances
37
1. Ajustements opérés
37
2. Qu'en est-il des objectifs ?
38
3. Le sentiment continu d'exister
42
VI La suite au prochain épisode
?
43
Auto-évaluation
44
Conclusion
46
Introduction
Lors de mes trois expériences professionnelles, j'ai
été amenée à m'interroger sur la participation des
usagers et sur leurs capacités à tirer parti des activités
et de l'accompagnement proposé.
Lors de mon premier stage auprès d'adultes en situation
de handicap mental, j'ai diminué mes consignes pour laisser aux usagers
la possibilité d'agir, de proposer ou de choisir. A titre d'exemple,
à travers une activité créative, j'accompagnais la
personne à réaliser un projet de création en
l'encourageant à trouver des idées à partir de ses envies.
En fonction des capacités du résident, l'oeuvre pouvait prendre
la forme d'une peinture, d'un dessin, d'un bracelet ou de toute autre
création. J'ai travaillé sur l'expression de leurs désirs
afin de les éveiller au plaisir de s'investir dans une activité
mais également pour stimuler leurs capacités cognitives. J'ai pu
constater une certaine attente ou dépendance envers les consignes de
l'éducateur. Or, je pense qu'il est nécessaire de veiller
à ne pas décider à la place de la personne mais de les
accompagner, et les stimuler afin que ceux-ci restent des sujets pensants et
désirants, et non des objets. La participation permet donc de
reconnaître le statut des personnes accompagnées.
Par la suite, j'ai effectué mon deuxième stage
auprès de jeunes adultes au service de l'Aide Sociale à
l'Enfance. Lors de suivis dans le cadre de contrats jeunes majeurs1(*), j'ai noté qu'un manque
de complicité entre moi et «l'usager» pouvait entraver son
implication. C'est pourquoi, au long de mon troisième stage à
responsabilités au sein d'un Établissement pour Enfants et
Adolescents Polyhandicapés (EEAP), j'ai veillé à
développer un lien de confiance avec les jeunes accueillis, notamment
lors des soins. De plus, au quotidien j'ai pu encourager et rechercher les
moindres réactions, ou tentatives de participation lors des douches,
d'activités ou lors des choix de vêture ou de nourriture. Ainsi,
mon travail effectué sur la participation m'a amené à
valoriser et intensifier les tentatives d'actions et d'interactions de la
personne accompagnée.
La participation des personnes accompagnées s'envisage
tant dans le quotidien de leur prise en charge ou accompagnement, que pour
favoriser l'évolution des pratiques et des structures comme l'inscrit
durablement la Loi 2002-2 rénovant l'Action Sociale et
Médico-sociale. Ainsi la participation de « l'usager »
est un droit qui est garant de sa dignité en tant que sujet et doit donc
rester un axe de travail central et essentiel.
Ainsi, tout au long de mon stage j'ai pu repérer le
besoin des jeunes de participer à une conversation, une activité
ou en d'autres termes à participer à la vie de leur
environnement, afin de se mettre en lien avec ces mouvements de vie et de
dynamisme. La problématique de mon mémoire s'inscrit donc de la
façon suivante, elle interroge ma place auprès de deux
résidents : je me suis interrogée sur ce que devrait
être la meilleure réponse à apporter dans leurs divers
besoins d'interactions sociales et de stimulations sensorielles. En premier
lieu, les questions à aborder sont les suivantes : quels sont les
besoins des résidents polyhandicapés ? Est-ce que l'équipe
de professionnels y répond déjà dans le quotidien ? A
partir de mes observations, comment vais-je pouvoir m'inscrire dans une
démarche éducative avec ces deux résidents, tout en
veillant à répondre à leurs besoins respectifs, dans le
respect de chacun ?
Mon stage s'est déroulé en deux temps. D'une
part, je me suis attachée à accompagner les jeunes au quotidien
à travers les soins et les activités de loisirs. Puis, d'autre
part, j'ai pu me montrer présente au sein de l'unité
d'enseignement auprès de l'enseignante spécialisée deux
jours par semaine. Cette unité prend en charge une quinzaine de jeunes.
L'EEAP a fait le choix d'un partenariat avec le personnel éducatif,
c'est-à-dire les salariés et les stagiaires, afin de permettre un
accompagnement individuel, et de répondre aux spécificités
liées aux apprentissages et à la diversité des jeunes.
Ceux-ci y travaillent la capacité à se repérer dans le
temps (date, météo, évènements), à
reconnaître les chiffres et certains mots, et à réaliser
des travaux manuels. L'expérience au sein de l'unité
d'accompagnement éducatif m'a permis de connaître les
potentialités cognitives et manuelles de certains jeunes. En outre, j'ai
pu soutenir les jeunes dans leur travaux, bien que leur participation
s'envisageait sous forme de petites tâches car tel que le spécifie
Danièle WOLF«Toute activité, du moment qu'elle est
minutieusement décomposée, peut présenter des segments
auxquels une personne polyhandicapée peut être associée
activement. Cela peut être partiellement, brièvement, et si
l'accomplissement de la tâche le requiert, en guidance»2(*).
Je vous propose donc d'aborder mon mémoire comme suit.
Tout d'abord, je présenterai l'établissement qui a en charge les
deux jeunes résidents. Puis, je vous les présenterai et
j'exposerai un diagnostic de leurs besoins. Ensuite, je tâcherai de
détailler l'activité, s'intitulant «contes
sensoriels» que j'ai eu l'opportunité de mettre en place en
réponse aux besoins repérés. J'évaluerai cette
activité en reprenant les objectifs initiaux. Enfin, j'analyserai le
déroulement des séances afin de conclure sur des
préconisations quant au futur de l'accompagnement des résidents.
Les prénoms des sujets figurant dans ce dossier ont
été modifiés pour conserver l'anonymat de chacun.
I. L'Établissement Pour
Enfants et Adolescents Polyhandicapés
1. Son contexte historique et
juridique
a. Son contexte historique
L'EEAP est un établissement médico-social
créé en 1994 et géré par La Croix-Rouge
Française. Il est situé à l'endroit d'un ancien sanatorium
où étaient hébergées et soignées, dans les
années 50, des personnes atteintes de la tuberculose et plus tard des
enfants hémophiles. Aujourd'hui, les professionnels de
l'établissement accueillent des enfants et adolescents
polyhandicapés et porte son nom en mémoire d'un
déporté, mort en 1943 dont la famille a légué le
terrain à la Croix Rouge pour la construction d'un lieu de soins.
La Croix-Rouge Française est une association
humanitaire d'action médico-sociale. Le 24 juin 1859, Henry Dunant
organise des secours aux victimes de la bataille de Solférino. L'aide
humaniste apportée aux soldats des deux camps sans discrimination est
l'acte fondateur de la Croix-Rouge. En
1863, le
Comité
international
de la Croix-Rouge pour le droit international humanitaire est signé
par seize nations. La Croix-Rouge Française prend naissance le 25 mai
1864. En août 1940 les trois sociétés : la
Société Française de Secours aux Blessés
Militaires, l'Association des Dames de France et l'Union des Femmes de France
se sont réunies sous la dénomination Croix-Rouge
Française. Puis, l'ordonnance du 27 avril 1945 confirme la nouvelle
organisation de la Croix-Rouge Française ainsi que sa reconnaissance
d'utilité publique. Enfin, en mai 1946, la Croix-Rouge Française
est nommée à l'Ordre de la légion d'honneur, et s'est vue
attribuée la croix de guerre avec palme pour ses actes.
La Croix-Rouge Française est régie par la loi du
1er juillet 1901 relative au contrat d'association, reconnue d'utilité
publique par décret du 7 août 1940 et validée par
l'ordonnance du 27 avril 1945.
Son action humanitaire s'articule autour de trois axes :
- secourir
- développer les solidarités
- soulager, prévenir et apaiser les souffrances.
Son action sanitaire et médico-sociale consiste
à soigner et éduquer.
L'EEAP s'inscrit dans ce dispositif et se réfère
aux sept principes de la Croix-Rouge Française :
- humanité : «ce principe tend
à protéger la vie et la santé ainsi qu'à faire
respecter la personne humaine. Il favorise la compréhension mutuelle,
l'amitié, la coopération et une paix durable entre tous les
peuples ;»
- impartialité : «il ne fait
aucune distinction de nationalité, de race, de religion, de condition
sociale et d'appartenance politique» 3(*) ;
- neutralité : «le mouvement
s'abstient de prendre part aux hostilités et, en tout temps, aux
controverses d'ordre politique, racial, religieux et
idéologique»4(*)
;
- indépendance : «le mouvement
est indépendant » ;
- volontariat : «il est un mouvement de
secours volontaire et désintéressé» ;
- unité : «il ne peut y avoir
qu'une seule société de la Croix-Rouge. Elle doit être
ouverte à tous et étendre son action humanitaire au territoire
entier» ;
- universalité : «le Mouvement
international de la Croix-Rouge est universel».
Le siège de la Croix-Rouge, situé à PARIS
(14ème arrondissement), se décline de
manière déconcentrée sur le territoire national par le
biais des directions régionales et des pôles de services
régionaux.
b. Son cadre légal et son
financement
L'EEAP validé par arrêté
préfectoral en date du 16 avril 1994 est reconnu conforme aux
annexes XXIV du décret n°89-798 du 27 octobre 1989, fixant
les conditions techniques d'agrément des établissements
privés de cure et de prévention pour les soins aux assurés
sociaux.
L'accueil, la prise en charge thérapeutique et
éducative des jeunes résidents de l'EEAP s'inscrivent dans un
dispositif législatif qui définit la population accueillie et
délimite son action ; il s'inscrit dans le décret
du 2 avril 2009 article 5. Celui-ci
précise que l'établissement met en place un projet
individualisé d'accompagnement prévoyant un enseignement
adapté conformément au contenu du projet personnalisé de
scolarisation. Le décret autorise donc la mise en place d'une
unité d'enseignement, créée par convention, pour dispenser
les apprentissages permettant la réalisation d'acquisitions dans le
champ scolaire, le développement de la personnalité et la
socialisation des enfants et adolescents accueillis. Le décret souligne
l'élaboration d'un projet d'établissement à visée
pédagogique, éducative et thérapeutique précisant
les objectifs et les moyens mis en oeuvre pour assurer cet accompagnement.
L'article met en évidence l'implication de la famille, associée
à l'élaboration du projet individualisé d'accompagnement,
à sa mise en oeuvre, à son suivi régulier et à son
évaluation. Enfin, il est précisé que
l'établissement doit permettre d'accompagner l'enfant ou l'adolescent
dans sa globalité et de manière continue. Pour ce faire,
l'établissement maintient auprès du public, le personnel
nécessaire pour encadrer les jeunes accueillis.
L'établissement est rattaché pour sa
gouvernance à une délégation territoriale de la
Croix-Rouge. Le pôle de services régionaux d'Île-de-France
assure le suivi budgétaire et comptable et élabore les payes.
L'établissement reçoit une dotation pour son fonctionnement.
Cette dotation est fixée par un Contrat Pluriannuel d'Objectifs et de
Moyens (CPOM), pour une période de 5 ans. Cette dotation est
réévaluée chaque année par application d'un taux
directeur fixé par les pouvoirs publics. Ce CPOM englobe deux autres
établissements de la Croix-Rouge Française.
Enfin, le dispositif législatif «amendement
CRETON» permet à l'EEAP d'héberger les jeunes qui ne
trouvent pas de place dans des établissements pour adultes
au-delà de 20 ans.
2. Ses missions et le public
accueilli
Le public accueilli au sein de l'EEAP comprend les enfants ou
adolescents de 6 ans à 18 ans, en situation de polyhandicap. Le
polyhandicap correspond à des déficiences graves et durables dues
à des causes variées, le plus souvent pré et
périnatales ; la déficience mentale est associée
à des troubles moteurs et à d'autres déficiences,
entraînant une restriction extrême de leur autonomie,
nécessitant un accompagnement permanent.
Les missions générales de l'EEAP sont les
suivantes : accueillir des enfants ou adolescents en situation de
polyhandicap, leur assurer un accompagnement éducatif,
pédagogique et thérapeutique de qualité, qui
réponde à leurs besoins évolutifs et spécifiques.
Ses fonctions sont d'apporter aux familles des jeunes le soutien
nécessaire dans leur vécu du handicap souvent ressenti comme
difficile. Il s'agit aussi d'inscrire cet accompagnement dans un projet de vie
qui intègre toutes les étapes de la vie des jeunes,
jusqu'à l'âge adulte ainsi que leur orientation vers un autre
établissement. De plus, l'accompagnement doit aider au
développement ou au maintien des capacités cognitives,
sensorielles, affectives et motrices. Puis, il doit soutenir le
développement de l'autonomie (aider à faire seul ou à
participer aux différents gestes de la vie quotidienne, à
exprimer des choix, etc.). Enfin, les missions visent à stimuler le
développement de la communication et des relations sociales (aider
à exprimer ses besoins, désirs et émotions, et à
développer la capacité de vie en groupe). Le travail
éducatif s'opère tout au long de la vie quotidienne, au travers
d'ateliers éducatifs et de déplacements à
l'extérieur.
Chaque membre de l'équipe éducative est
référent de deux jeunes au sein de son unité. La famille
sollicite davantage le professionnel référent en revanche, le
projet individuel et la synthèse sont élaborés par le
responsable socio-éducatif qui veille à prendre appui sur les
décisions et les réflexions émises en réunion.
3. Son équipe et ses
partenaires
Les missions de l'établissement sont
réalisées par une équipe pluridisciplinaire
organisée en différents services : l'encadrement
regroupant un directeur, un directeur adjoint et une cheffe de service, le
service médical et soin représenté par un
médecin généraliste, un médecin de
rééducation physique et fonctionnelle, une psychologue, des
kinésithérapeutes, des ergothérapeutes, des
psychomotriciens, une orthophoniste, des infirmiers et infirmiers
coordonnateurs, le service éducatif qui accueille un responsable
socio-éducatif c'est-à-dire un éducateur
spécialisé, des moniteurs-éducateurs, des accompagnants
éducatifs et sociaux et des aides-soignants, avec lesquels je travaille
quotidiennement. Tous assurent la prise en charge des jeunes dans les actes de
la vie quotidienne (toilettes, repas, lever, coucher etc.) et les
différentes activités proposées au sein de
l'établissement. Enfin, l'établissement dispose d'un service
administratif et d'un service général pour la
maintenance de l'établissement
L'EEAP dispose d'une unité d'enseignement
spécialisé. En effet, l'Education Nationale met à
disposition un enseignant spécialisé à temps plein qui a
pour mission de prendre en charge 15 enfants. Cette unité d'enseignement
a été créée par convention conformément aux
dispositions du troisième alinéa de l'article D.
312-10-6, et qui est missionnée pour dispenser les apprentissages
permettent la réalisation d'acquisitions dans le champ scolaire, le
développement de la personnalité et la socialisation des enfants
et adolescents accueillis.
L'établissement s'appuie également sur des
partenaires extérieurs pour construire son action : le centre
hospitalier régional, des professionnels libéraux (dentistes,
kinésithérapeutes).
4. Son organisation
a. Ses réunions
Plusieurs
réunions ont lieu au sein de l'établissement :
? la réunion de coordination se déroule
tous les lundis matins, se nomme la réunion de coordination. Elle permet
l'échange d'informations concernant le fonctionnement institutionnel
hebdomadaire. Les participants sont : le chef de service, les responsables des
équipes éducatives, et la secrétaire médicale.
Cette dernière fait un compte-rendu de la réunion et le remet
à l'ensemble des professionnels qui interviennent dans les services ;
? la réunion interdisciplinaire se
déroule au moins quatre fois par an. Elle est l'instance où
l'ensemble de l'équipe paramédicale, le médecin, le chef
de service éducatif et les responsables des équipes
éducatives traitent les différentes questions de fonctionnement
quant à la coopération et la coordination entre les services
éducatifs et paramédicaux ;
? la réunion de synthèse a lieu une fois
par an pour chaque jeune. Elle regroupe les professionnels des équipes
éducatives et les différents personnels paramédicaux
concernés ainsi que le directeur, le chef de service, le médecin,
l'assistante sociale et la psychologue. Ils se réunissent autour du
bilan et du projet d'accompagnement dont la finalité est d'analyser
l'évolution des jeunes quant à leurs besoins et leurs
capacités, afin d'élaborer un nouveau projet d'accompagnement
pour l'année suivante ;
? la réunion projet permet la rencontre entre
les familles et l'institution. Celle-ci y est représentée par le
directeur et/ou le chef de service éducatif, le responsable du groupe
éducatif, le référent du projet ainsi que les
professionnels paramédicaux concernés. L'objectif de cette
réunion consiste à trouver un accord sur l'analyse des besoins
des jeunes et la mise en place d'un partenariat autour du projet
d'accompagnement individualisé. Elle se déroule au minimum une
fois par an pour chaque jeune accueilli dans l'établissement ;
? la réunion institutionnelle se déroule
une fois toutes les deux semaines et convie l'ensemble du personnel à y
participer alternativement. Elle est assurée par le psychiatre et a
comme objectif de permettre d'aborder les différentes
problématiques professionnelles ;
? la réunion d'équipe éducative se
déroule une fois par semaine et rassemble les membres du groupe
éducatif avec son responsable autour des sujets qui concernent
l'accompagnement des jeunes, autant dans l'organisation à mettre en
place que dans les stratégies éducatives à adopter. Les
différents projets de sortie sont également abordés lors
de ces réunions ;
? la réunion paramédicale permet la
discussion paramédicale et médicale autour des différentes
problématiques du moment. Elle réunit l'équipe
paramédicale et médicale et l'équipe éducative.
L'équipe éducative partage ses observations et ses
questionnements avec l'équipe médicale qui en retour donne des
avis, des conseils et certaines informations médicales sur les jeunes
;
? la réunion d'équipe de suivi de
scolarisation (ESS) réunie l'enseignante, l'évaluatrice du
suivi de scolarisation, le cheffe de service, le responsable d'unité,
les jeunes, les parents et la responsable de l'activité
«éveil» dans le cadre de la circulaire 2006-126 du 17
août 2006 relative à la mise en oeuvre et au suivi du projet
personnalisé de scolarisation.
Les jeunes peuvent participer à la réunion
projet et d'ESS s'ils le désirent.
b. Ses modalités
d'admission
L'admission se construit à partir d'une notification
envoyée par la Commission Départementale pour l'Autonomie des
Personnes Handicapées (CDAPH). Dans un premier temps,
l'établissement accueille la famille seule afin de prendre le temps de
présenter la structure. Dans un deuxième temps, si la famille est
favorable à l'admission, l'EEAP organise une rencontre avec la famille,
l'enfant et les professionnels. Le troisième temps de l'admission est
celui de l'échange entre l'équipe d'accueil et la famille
concernant les besoins, les intérêts et les capacités du
jeune. Ensuite, s'en suit une période d'évaluation de trois
semaines afin d'estimer si toutes les conditions sont réunies pour que
l'institution puisse accueillir le jeune et pour qu'il puisse s'y
épanouir. Un bilan effectué par le responsable
socio-éducatif de l'unité du jeune est réalisé
à l'issue de cette période. Si le bilan est favorable, un contrat
de séjour est proposé. Un premier projet d'accompagnement
individualisé est proposé trois mois après le bilan,
réajusté six mois plus tard et enfin,
réévalué tous les ans.
c. Sa structure
L'établissement dispose de 42
places en internat de semaine et de sept places en accueil de week-end. Ces
places sont réparties dans six unités de vies mixtes,
composées chacune de sept jeunes. Les enfants sont répartis en
fonction de leur âge, afin de marquer les étapes de la vie par un
rite de passage que constitue le changement d'unité. Les trois
unités de vie du premier étage sont composées des enfants
les plus jeunes (de 6 à 14 ans environ). Les trois unités de vie
du deuxième étage accueillent les adolescents et les jeunes
adultes. L'unité des jeunes les plus âgés est plus
particulièrement destinée aux jeunes en attente d'une place dans
un établissement pour adultes.
Les locaux sont répartis sur trois niveaux, avec
à l'arrière un parc et une aire de jeux adaptée. Les
bureaux des personnels administratifs et des responsables sont au
rez-de-chaussée, de même que la salle de classe, la salle
SNOEZELEN5(*),
l'atelier cuisine, l'atelier d'éveil6(*), la
balnéothérapie7(*) et la salle polyvalente. L'infirmerie et
les salles pour les prises en charge paramédicales sont dans les
étages. Concernant les unités de vie, tous les groupes disposent
d'une salle commune considérée comme un lieu d'accueil, de
rencontres et de partage où se tiennent les repas et les
différentes activités éducatives. Chaque unité de
vie dispose également d'une petite cuisine, d'une salle-de-bain et d'une
salle-de-douche, d'un cabinet de toilette adapté et de quatre
chambres.
d. L'organisation des
journées
Concernant
l'organisation de la journée, la matinée commence à 7h00.
Le lever, le petit-déjeuner, les soins d'hygiène ainsi que la
toilette se déroulent en fonction du rythme et du désir de
chacun, ainsi qu'en fonction des prescriptions ou des nécessités
de soins paramédicaux. Les infirmiers s'informent de l'état de
santé de chacun et distribuent les médicaments en
général pendant les repas. Le déjeuner est servi à
11h30. Il est suivi d'un moment de détente précédant les
soins paramédicaux mis en place à 13h et par des activités
de groupe à 14h. A 15h, tout le monde se retrouve dans la salle commune
pour la préparation du goûter, mais aussi pour partager des
moments tels que les jeux, les travaux manuels et la musique. Une intervention
thérapeutique peut être nécessaire à tout moment de
la journée, pour répondre à des besoins d'installation, de
déglutition, d'autonomie. Le dîner est servi à 18h30 et
suivi par les soins d'hygiène et le coucher. La journée se
termine à 21h où l'équipe de nuit prend le relais.
II. Deux jeunes en recherche
d'interactions sociales avec leur environnement
1. Angel
Angel est une
jeune femme de 27 ans. Elle est arrivée à l'EEAP en 2003. Elle
est la dernière d'une fratrie de cinq. Elle rentre chez elle le week-end
ainsi qu'en période de fermeture de l'EEAP.
Angel a l'usage de ses membres supérieurs uniquement et
se déplace donc en fauteuil. La jeune a besoin d'une tierce personne
dans de nombreux actes de la vie quotidienne. Elle a une carrure assez
imposante du fait de son poids et de ses jambes écartées,
liées à des déformations orthopédiques. Angel est
née prématurément à 35 semaines, ce qui a
provoqué une détresse respiratoire et une infection à la
naissance. Son diagnostic médical révèle une
hémorragie cérébrale ancienne. Son état de
santé natal et prénatal pourrait expliquer son polyhandicap.
Angel doit prendre des médicaments liés à son syndrome de
Lennox Gastaut, une forme d'épilepsie sévère,
caractéristique du polyhandicap. La jeune femme a également des
troubles digestifs, qui peuvent être sources de douleur. L'équipe
se doit de rester vigilante malgré la difficulté d'Angel à
s'exprimer sur sa douleur et sa localisation.
En 2006, la jeune femme a subi une intervention chirurgicale
de diminution des hanches (ténotomie). En 2008, elle a
bénéficié d'une arthrodèse pour redresser sa
colonne vertébrale. «C'est (l'arthrodèse) un passage
quasi obligé pour les enfants polyhandicapés car leurs troubles
du tonus déforment peu à peu leur corps et notamment le tronc, et
ce malgré tous les appareillages contraignants qu'on leur fait porter
quotidiennement»8(*)
Angel est suivie par une kinésithérapeute, une
fois par semaine, et ponctuellement par une ergothérapeute et ce, depuis
son enfance. La jeune n'a pas de suivi quotidien par l'orthophoniste, cependant
celle-ci effectue un bilan de communication à chaque synthèse.
Elle porte des lunettes pour corriger une myopie. Elle utilise
tous ses sens, réagit à des stimulations tactiles variées,
à différentes odeurs. Selon l'orthophoniste, elle présente
une bonne compréhension des faits simples en relation avec sa vie
quotidienne. En effet, elle comprend mes consignes.
Angel est une jeune femme qui utilise le langage verbal de
façon adapté mais à minima. Le plus souvent, il est
nécessaire que je la stimule par exemple pour qu'elle fasse le
récit de son week-end. Lorsqu'elle ne sait pas répondre à
une question, elle reste silencieuse. Je reformule mes phrases ou lui demande
si elle ne sait pas. Elle est en recherche de contacts avec ceux dont les
possibilités motrices et/ou verbales peuvent lui apporter du plaisir et
un échange. Angel est très observatrice aux faits et gestes des
personnes qui l'entourent. Elle n'hésite pas à interpeller les
professionnels, quant à ce que peuvent faire ses camarades. Angel
m'interpelle fréquemment en me demandant ce que je fais. Si je me trouve
dans la cuisine, je l'invite à se rapprocher pour être en ma
compagnie.
J'ai pu constater qu'il peut être intéressant
d'encourager Angel à effectuer une activité malgré un
refus initial. Notamment, lorsque je lui ai proposé de se rendre
à l'activité ballon dans le couloir, cette dernière m'a
fait part de ne pas vouloir y participer. Je n'ai pas insisté pour
qu'elle s'y rende. Cependant, ma collègue a insisté, au final
Angel a semblé apprécier l'activité. En effet, j'ai
constaté que celle-ci préfère rester avec des personnes
qu'elle connaît bien en revanche une fois présente lors
d'activités proposées, elle s'y complaît. Elle constate
qu'elle y rencontre des personnes qu'elle connaît. Ainsi, lorsqu'une
activité est proposée, je l'encourage à me suivre et
à y participer avec moi.
D'autre part, j'ai constaté qu'Angel a besoin de temps
pour se mettre à la tâche, cependant, elle est fière de me
montrer ce dont elle est capable. Ainsi, il m'arrive de stimuler et encourager
Angel a réaliser une tâche (se déplacer, fermer les
bouchons des feutres, etc.). Pour ce faire, j'utilise de manière
régulière l'humour. A titre d'exemple, si elle doit se
déplacer jusqu'aux toilettes, j'ai pour habitude de faire une course
avec elle en la défiant de me dépasser.
Angel est inscrite à l'atelier «groupe
communication,» dans lequel sont abordés divers sujets
d'actualité, la réalisation d'une gazette avec le bilan des
activités et sorties réalisées au sein de l'EEAP. Elle y
participe avec enthousiasme. De temps à autre, elle prend part à
l'activité «tous en forme» (sport adapté) animée
par des encadrants de l'institution.
Il m'arrive de défier Angel au bras de fer. Angel a
beaucoup de force et je la complimente lorsqu'elle gagne dans le but de forger
son estime d'elle-même. Sur l'espace de vie, je propose de temps à
autre à Angel des ateliers tels que la manucure. Je lui fais choisir la
couleur et un motif pour ongles. Je pense qu'il est important de saisir toute
les occasions de participation. L'atelier manucure est particulièrement
intéressant puisque Angel choisit son look. Cette activité donne
l'opportunité de la valoriser dans son statut de jeune femme. Enfin,
Angel feuillette quasi quotidiennement son cahier de communication,
illustré par des photos de sa famille. Elle apprécie beaucoup de
me parler de cette dernière. Je pense que la famille est une partie
importante de notre identité, et qu'il est donc d'un grand
intérêt de reconnaître la jeune dans son statut de soeur, de
fille ou de nièce.
2. Zadkiel
Zadkiel est un jeune homme, âgé de 21 ans. Il est
arrivé à l'EEAP en 2008. Il est l'aîné d'une fratrie
de deux enfants. Il rentre le week-end chez ses parents mais il lui arrive
quelque fois dans l'année de rester à l'EEAP, le week-end. Il
rentre chez lui lors de périodes de fermeture de l'EEAP.
Le jeune est installé en fauteuil dans un siège
moulé. Ce dernier ne peut se déplacer seul en raison d'un
handicap moteur global. Cependant, il est capable de pointer du doigt. C'est un
jeune qui est né prématurément à 38 semaines,
présentant une microcéphalie avec cerveau lisse, maladie qui
désigne un aspect inhabituel du cortex cérébral. Ce
diagnostic médical me fait comprendre d'où provient son handicap
et notamment son niveau mental et ce qui fait qu'il ne peut pas avoir
accès au langage. Ceci me fait écho au passage de Saulus,
cité dans un livre: "Le polyhandicap n'est pas un accident qui
affecte un individu par ailleurs indemne. Par la précocité et la
massivité des liaisons responsables, des déficiences et des
incapacités directement induites, le polyhandicap engendre
véritablement une manière d'être au monde, une et
originale. L'être humain polyhandicapé est, pourrait-on dire, tout
entier handicapé ; non pas pour insister de manière
péjorative sur la gravité de son état, mais pour nous
engager résolument sur la voie de la reconnaissance de son droit
à une existence originale.»9(*) Je pense qu'au long des accompagnements avec des
personnes polyhandicapées, il est important de se souvenir du diagnostic
médical afin de rester réaliste et ainsi être le plus
proche possible de la réalité de la personne. De plus, par sa
condition hors norme, il n'est pas exclu d'envisager un accompagnement qui soit
pareillement hors norme.
Zadkiel est épileptique et doit prendre des
médicaments. Le jeune a également des troubles digestifs, qui
peuvent générer des douleurs. L'équipe doit rester
attentive à tout changement de comportement, qui pourrait
révéler une douleur ou un problème de santé. Enfin,
son audition et sa vue sont normales.
Zadkiel a subi de nombreuses opérations chirurgicales
pour des raisons orthopédiques au niveau des hanches, des pieds et du
dos (2003 à 2014) Nous sommes particulièrement interpellés
par l'équipe médicale pour être très vigilants lors
des transferts avec le lève-personne.
Zadkiel est suivi deux fois par semaine par une
ergothérapeute et une kinésithérapeute. Le jeune participe
à deux séances d'orthophonie hebdomadaire, pour des
séances de commande oculaire. Il s'agit d'une technologie permettant de
capter le regard dont le but est d'effectuer des exercices sous forme de jeux
afin d'entraîner le jeune au suivi du regard, au comptage ainsi
qu'à la relation de cause à effet.
Zadkiel présente une compréhension simple des
situations et actes de la vie quotidienne. Il est très sensible aux
intonations du message verbal. C'est pourquoi, j'accentue l'intonation de ma
voix lorsque je lui adresse la parole. Ceci permet de l'aider à la
compréhension du message, ce qui le fait beaucoup rire.
Le jeune utilise une communication non verbale, il
apprécie et recherche l'interaction avec l'adulte, il aime plaisanter et
se moquer. Il est très observateur et curieux de tout ce qui l'entoure.
Zadkiel exprime son ressenti par des regards, qui sont très expressifs,
des mouvements de bras ainsi que par des vocalises. Ainsi, il m'interpelle
fréquemment de cette manière, lorsqu'il ressent le besoin
d'interagir avec moi. Zadkiel étant en capacité de pointer du
doigt, il semble éprouver beaucoup de plaisir à étendre
son bras pour toucher un objet. En effet, il s'agit de son principal moyen
d'action sur son environnement. Ainsi, je n'hésite pas à lui
faire toucher des matières, par exemple, des plantes lorsque nous sommes
sur le balcon de l'unité ou à l'extérieur.
Zadkiel est en capacité d'utiliser des
pictogrammes,10(*) que
nous utilisons pour l'aider à choisir ou pour renforcer la
compréhension du message verbal lui permettant d'anticiper une prise en
charge ou un atelier. Il n'est parfois pas aisé de comprendre ce dont il
souhaite parler car le oui/non n'est pas toujours fiable, les réponses
diffèrent en fonction de son interlocuteur. C'est pourquoi, je me
focalise sur l'expression de son visage pour connaître son avis sur
quelque chose. De plus, il peut refuser catégoriquement d'utiliser les
pictogrammes en fonction de l'interlocuteur,et cela semble l'amuser. Il
m'arrive alors de devoir choisir à sa place lorsqu'il refuse de me
donner une réponse. Je l'informe par conséquent que je choisis
pour lui. Je lui explique alors que l'absence de réponse entraîne
en conséquence la décision d'une tierce personne.
Zadkiel est toujours très enjoué de se rendre
aux divers ateliers proposés par l'EEAP tels que l'atelier peinture et
les sorties en extérieur. Le jeune participe au «groupe
communication» avec Angel tous les mardis. Enfin, Zadkiel se rend deux
fois par semaine en classe adaptée, il travaille entre autre le
repérage dans le temps, la date, la météo et est
amené à réaliser des travaux manuels (collages,
découpages etc.). Ce dernier apprécie se rendre en classe et
notamment retrouver sa camarade de classe. Pour soutenir ses liens
d'amitié, l'enseignante et moi rapprochons les sièges, les deux
jeunes peuvent alors se toucher les mains.
III. Les besoins
spécifiques d'Angel et de Zadkiel
1. Questionnements initiaux
Au cours de mes accompagnements avec les
jeunes, j'ai pu repérer leurs recherches constantes d'interactions et de
stimulations Ainsi, dans la partie qui suit, j'expliciterai mes questionnements
concernant les différents besoins en termes d'interactions et de
stimulations de ces deux résidents : De quelle manière les deux
jeunes manifestent ces besoins ? Est-ce que l'équipe et moi y
répondons déjà au quotidien ? Mais avant tout, quels sont
les besoins des personnes polyhandicapées ? Enfin, comment vais-je
intervenir dans ce cadre et m'inscrire dans une démarche
éducative avec ces deux résidents tout en veillant à
répondre à leurs besoins respectifs dans le respect de chacun
?
2. Toutes les occasions sont bonnes
pour entrer en relation
J'ai pu constater qu'Angel recherche
constamment l'interaction avec l'adulte. En outre, elle aime être en
relation avec différents interlocuteurs, et apprécie
écouter les conversations autour d'elle et être informée
des activités de chacun. Je me demande si Angel réclame
fréquemment aux professionnels des services dans le but de provoquer un
échange. En effet, la jeune peut me demander quelque chose si notre
conversation se termine. Ou bien, Angel peut me demander un verre d'eau, peu de
temps après avoir pris son petit déjeuner. J'ai entendu à
plusieurs reprises les professionnels lui demander si elle avait
réellement soif. Cependant, les professionnels ne peuvent pas lui
répondre de manière systématique. A titre d'exemple, il
est arrivé qu'Angel se vexe et sorte de la salle de vie de
l'unité lorsqu'une de mes collègues argumentait sur le fait que
je n'étais pas disponible pour communiquer avec elle C'est pourquoi, je
pense qu'il est important pour Angel d'avoir des relations harmonieuses et
d'avoir de nombreux temps d'échanges avec les professionnels. Si
j'explique à Angel que je suis occupée ou que je lui fais part de
mes difficultés, la jeune femme est en capacité de patienter.
Ainsi, une forme de connivence s'opère entre la jeune et moi. Cependant,
je dois prendre le temps de lui expliquer.
Zadkiel quant à lui, émet fréquemment des
vocalises pour nous interpeller et plaisanter avec nous et lorsque que je le
remarque, il se met à rire. Zadkiel réagit beaucoup lorsque je
prononce des mots farfelus, lorsque je reproduis un son entendu à la
télévision, lorsque moi-même ou l'équipe sifflons ou
bien lorsque j'exagère mon étonnement. Par exemple, j'ai pour
habitude de chanter «allo, allo, allo, allo»
lorsque je vois Zadkiel, puisqu'il s'agit d'une mélodie qu'il
connaît et qu'il l'amuse. En effet, si je le prononce doucement sans
forcément lui adresser la parole, il réagit vivement au son.
En conséquence, je pense qu'Angel et Zadkiel ont un
grand besoin d'interactions, d'être en relation avec l'équipe. En
effet, du fait de leurs conditions, ils ne peuvent pas se rendre
eux-mêmes vers l'objet ou débuter une conversation dans le cas de
Zadkiel. Ils sont alors dans une attente passive que l'objet vienne à
eux. «Par ses mouvements expressifs et différenciés,
l'enfant initie et dirige les premières interactions auxquelles les
parents réagissent et répondent. Ici encore l'enfant au corps
malhabile ou passif n'arrive pas à provoquer ces interrelations de
manière satisfaisante : ses mouvements mal coordonnés et son
inertie alertent, angoissent et, isolent. Corps douloureux ou transformé
en objet, fréquentes séparations affectives expliquent en partie
la passivité, l'apathie, le manque d'intérêt à de
nouveaux objets ou à des offres de stimulations.»11(*) Effectivement, il existe une
certaine inertie chez Angel, lorsque celle-ci refuse par exemple de se rendre
dans le couloir avec les autres jeunes pour jouer au ballon, mais qui,
après de nombreuses sollicitations, le fait et y prend plaisir. De
même, pour les tâches du quotidien, traverser le couloir pour se
rendre aux toilettes lui requiert beaucoup d'efforts et de motivation.
D'ailleurs, lors des repas d'Angel, celle-ci semble dans l'attente et nous
devons la stimuler pour que la jeune finisse son repas. Quant à Zadkiel,
son manque de coopération lors des moments de soin est peut-être
dû à une fatigabilité, une tension des muscles
difficilement contrôlable, du fait de sa pathologie (hypertonie).
3. A la recherche d'objets de
stimulations et de dynamisme
En revanche, malgré l'inertie qui peut
apparaître, je pense que, par ces demandes d'interactions, les deux
jeunes sont, malgré tout, à la recherche d'objets de stimulations
Par ces objets de stimulations, j'entends notamment tout ce qui est de l'ordre
du nouveau, les événements, les mouvements en somme... Les jeunes
souhaitent capter ces mouvements, symboles de vie. «La vie est
mouvement : la marche mais aussi la respiration, la circulation des fluides
corporels, le mouvement des yeux, des mains. Ces mouvements, petits ou grands,
nous donnent des informations sur notre corps et sur le monde qui nous entoure
[...] Nous savons tous que le développement des enfants, cognitif et
émotionnel, est fondé sur les échanges avec
l'environnement par le mouvement et les sens. Ce mode de connaissance propre
aux jeunes enfants reste d'ailleurs prépondérant chez la personne
polyhandicapée, tout au long de sa vie. La diminution ou l'absence de
mouvements, absence de leur perception sont sources de monotonie et
d'isolement, peut même conduire à la folie. [...] Les troubles
moteurs limitent considérablement les mouvements spontanés de
l'enfant polyhandicapé et donc la possibilité d'explorer son
corps et de l'utiliser comme un moyen de relation avec le monde qui
l'entoure.»12(*)
Il est vrai que les deux jeunes réagissent fréquemment avec
beaucoup d'enthousiasme, lorsqu'un professionnel les emmène vers un lieu
différent dans le but de participer à une activité ou un
soin. D'ailleurs, dès lors qu'un professionnel se met à danser,
ne serait-ce que brièvement, cela ne passe jamais inaperçu, les
jeunes répondent et réagissent vigoureusement.
En outre, l'équipe et moi donnons de l'importance
à entrer quotidiennement en relation avec les jeunes et, à
créer un environnement dynamique. Il nous arrive fréquemment de
mettre de la musique au sein de l'unité, de danser avec les jeunes. Les
moments de soin sont également des moments où nous pouvons
créer une relation puisqu'il s'agit d'un moment
privilégié, durant lesquels nous sommes seuls avec le jeune. Il
est important de créer une ambiance joyeuse et propice lors de ces
moments, afin que celui-ci soit d'une manière ou d'une autre,
encouragé, porté à participer ou à coopérer
avec le professionnel. Il me semble donc que ce besoin de dynamisme est
déjà investi par les professionnels.
4. Le besoin de stimulations
sensorielles, s'ajoutant aux cinq besoins de base
Lors de mon stage j'ai pu discuter avec les professionnels de
l'institution sur leur métier auprès des jeunes
polyhandicapés. Je me suis entretenue notamment avec la psychologue au
sujet des besoins des jeunes polyhandicapés. Je lui ai fait part de mon
questionnement sur la place du domaine éducatif dans le quotidien des
jeunes accueillis. En effet, notre travail a tendance à être
centré sur les moments de soins, de repas, de changes. Néanmoins,
d'après Abraham MASLOW, psychologue, cinq types de besoins sont
hiérarchisés, les besoins : physiologique, de
sécurité, d'appartenance, d'estime et d'accomplissement. Bien que
l'accompagnement quotidien tourne essentiellement autour du besoin
physiologique, il ne faut pas oublier que les personnes polyhandicapées
ont les mêmes besoins que toute autre personne. Je pense qu'il faut
toujours se souvenir de cette pyramide de hiérarchisation des besoins,
peu importe le public abordé. La psychologue a pu me préciser que
le besoin d'estime trouve sa place dans la valorisation par eux-mêmes,
à titre d'exemple « tu te trouves beau ? » ; cette
formulation sollicitera alors le jeune à envisager sa propre
valorisation pour ensuite l'intérioriser. Par ailleurs, le besoin
d'estime de soi peut être reconnu simplement par des félicitations
ou des valorisations telles que «tu as fait un dessin, c'est
génial». Lors de cet entretien, j'ai pu apprendre que les
personnes porteuses de polyhandicap ont un besoin de stimulations sensorielles
car ces dernières vivent à travers leur sensorialité.
N'ayant pas la représentation mentale de ce qui se passe dans leur
environnement, elles ont recours au sens pour l'appréhender et le
comprendre. Pour nous représenter le monde, notre vue nous donne des
informations sur l'espace, notre ouïe nous aide à être averti
d'une agitation dans notre espace etc. Les personnes polyhandicapées ont
besoin d'un environnement stimulant. Ainsi, à leur contact, il ne faut
pas faire l'économie de mots. Celles-ci ont besoin de baigner dans un
monde de langage et de sensations afin d'être en immersion dans un monde
vivant. Ce besoin de stimulations sensorielles est dû au fait que, par
leur handicap, les personnes atteintes de polyhandicap n'ont que peu de moyen
d'explorer leur environnement. «Cela (les troubles moteurs) limite
également les expériences sensorielles avec comme résultat
le ralentissement du développement cognitif de la personne,
privée des apprentissages nécessaires. Chaque enfant, quand il
apprend à se déplacer (ramper, marcher) s'individualise, devient
autonome par rapport à sa mère, il explore son environnement. Il
expérimente son corps, agit sur son environnement et développe
ainsi de nouvelles conduites, mais aussi des schèmes
cognitifs.»13(*)Ainsi, mon interrogation est la suivante : Puis-je
aider la personne à explorer son environnement dans le but de lui
permettre de répondre à ses besoins de stimulations sensorielles
?
5. Le besoin de participation, soit
le besoin d'humanité
Tout d'abord, concernant les initiatives des jeunes à
entrer en relation, Danièle WOLF explique : «En outre combien
de fois par jour lorsque c'est la personne polyhandicapée, qui prend
à sa manière des initiatives, que ce soit pour agir ou pour
entrer en relation, ne s'entend-t-elle priée...d'attendre ? Or, il y a
déjà longtemps que les béhavioristes ont
démontré que l'absence de renforcement du comportement est la
meilleure manière de l'éliminer. Aussi, à force de tomber
dans le vide, la personne polyhandicapée risque-t-elle, au fil du temps,
de renoncer» ? 14(*) Effectivement, il est très important de
prendre en compte ses initiatives afin de les valoriser. Cependant, il ne faut
pas oublier les contraintes du quotidien, il arrivera un jour où le
professionnel ne pourra prendre le temps d'engager une conversation avec le
jeune ; en revanche il est crucial de le lui expliquer et de lui
réserver un moment ultérieur. Une réponse négative
est toujours une réponse. Le besoin ici, certes évident mais
inéluctable, est le besoin de l'autre, du regard de l'autre, de
l'attention de l'autre, de l'écoute de l'autre, c'est le besoin
d'humanité. Selon moi, auprès d'un public de personnes
polyhandicapées, il s'agit de maintenir et surtout de garantir leur
place de sujet, c'est-à-dire d'être humain pensant et
désirant. D'autant plus, que les personnes présentant ce type de
handicap vivent à travers l'autre, en d'autres termes l'autre est le
moteur de la journée, celui-lui qui guide. En effet, malgré la
bonne volonté des professionnels quant aux choix du jeune au quotidien
(concernant ses habits, son dessert etc.), la réalité
institutionnelle et le manque de temps résultent que très
fréquemment, c'est le professionnel qui décide ; par exemple,
quant à l'heure de la douche, de boire ou d'aller en activité. De
même, leur corps n'est pour la majorité du temps que source de
souffrances, et manipulé du lever jusqu'au coucher. Ils n'ont pas pu
développer ce sentiment de sujet séparé et acteur. En
effet, en reprenant les mots de Philip VANMAEKELBERGH : «le nourrisson
atteint de polyhandicap arrive bien souvent avec un déficit
d'expériences de bases fondamentales durant la vie intra-utérine.
Or, rappelons-le, les expériences sensorielles dans l'utérus
durant la grossesse apportent déjà à l'ensemble des
informations fondamentales sur lui-même. De telles informations
somatiques (le toucher), vestibulaire (sensation de mouvement) et vibratoire
(sensation qui passe par les os), concernant tout le corps, représentent
pour l'enfant le point de départ pour son propre moi-même en
délimitation du monde extérieur.» 15(*) Il est donc important de
valoriser les moments d'échanges et de participation.
6. Pistes de réponses
Pour répondre à mes premiers questionnements,
cités plus haut, j'ai pu repérer plusieurs besoins. Tout d'abord,
nous avons vu que les besoins des personnes polyhandicapées
coïncident avec les besoins découverts par MASLOW. Ces besoins sont
satisfaits par l'équipe dans la mesure du possible. Les besoins
physiologiques sont pris en compte par l'équipe avec les changes, les
soins quotidiens etc. Ensuite, le besoin d'appartenance est pris en compte
puisque l'unité est décorée de manière à
mettre en avant les jeunes qui y vivent, par exemple à l'aide de photos
disposées sur les murs au sein des unités ou bien, lors des
fêtes de l'établissement, les professionnels proposent des jeux
compétitifs, les unités constituent des équipes et
créent un hymne d'équipe. Puis, le besoin d'estime s'opère
par les compliments des professionnels envers les jeunes. Enfin, le besoin de
s'accomplir peut être pris en compte lors des réalisations
artistiques ou scolaires.
Au cours de mon analyse, j'ai dégagé le besoin
de dynamisme qui est mis en pratique lors des douches. Cependant, j'ajouterais
qu'il est peu investi tout au long de la journée, notamment en milieu de
matinée et en milieu d'après-midi. Il s'agit de temps
dédiés aux séances paramédicales ou aux ateliers.
Ensuite, nous avons vu que le consentement de la personne et les choix sont
favorisés autant que possible au quotidien, correspondant au besoin de
participation. Les activités permettent également de
considérer l'importance de la participation, à titre d'exemple,
si le jeune n'a pas usage de ses mains, le professionnel invite le jeune
à rouler avec son fauteuil sur le papier pour créer des lignes,
qui apparaîtront par la suite sur la feuille. Ainsi, chaque contribution
est envisagée pour participer à un projet. Ce besoin de
participation est corrélé au besoin d'humanité ou besoin
d'attention et le besoin d'échanges. Ceux-ci ne sont pas toujours
satisfaits, faute de temps. Par ailleurs, les jeunes envisagent leur
environnement par les sens et comprennent les mots quand ceux-ci sont inclus
dans un contexte. J'en conclus que pour faciliter l'interaction, il est
nécessaire de passer par les sens. Ainsi, j'ai repéré le
besoin de stimulations sensorielles. Mis à part en sortie en
extérieur, le besoin de toucher, de sentir les matières... est
rarement pris en charge au quotidien. En effet, je ne pense pas que
l'équipe soit au fait de ce besoin particulier, par faute de temps
l'équipe se concentre sur les besoins primaires, qui demeurent
chronophages. En outre, lorsque les besoins primaires sont satisfaits,
l'équipe a davantage l'opportunité de proposer des sensations aux
jeunes, notamment à l'aide d'objets tels que des appareils de massage ou
des éléments de la nature.
IV. Les contes sensoriels
1. Naissance du projet, pour qui
et...
Après avoir échangé avec l'équipe
sur les besoins de stimulations sensorielles, ma référente et un
accompagnant éducatif et social m'ont fait part de leur formation sur le
thème des contes sensoriels. Ces derniers ont effectués la
formation à l'extérieur et, avait été
proposée par l'établissement. Un conte sensoriel est un conte
simplifié dans lequel des éléments de l'histoire sont
amenés de manière sensorielle aux spectateurs qui deviennent
ainsi, acteurs de l'histoire. Ces derniers le deviennent par ce qu'ils
expérimentent grâce aux informations sensorielles et, par des
actions induites par les personnages de l'histoire.
J'ai alors envisagé de proposer à Angel et
Zadkiel une activité «contes sensoriels» En effet,
après avoir réalisé un réel travail d'observation
de ces deux résidents, j'ai longuement mûri ma réflexion
sur la mise en oeuvre de cette activité. Cette hypothèse
s'inscrit dans un cheminement dans lequel j'ai pu apprendre à
connaître Angel, avec qui j'ai construit des liens étroits, et ce
notamment lors d'activités que je lui ai proposé durant
l'activité en espace de vie (manucure, jeux de société
etc.). En ce qui concerne Zadkiel, grâce à ses recherches
constantes d'interactions, je l'amène à saisir différentes
stimulations sensorielles qui l'amusent beaucoup. Ainsi, la relation que j'ai
tissé avec ces deux jeunes et ma présence au sein de leur
unité m'a conduite à proposer une activité qui puisse
susciter leur intérêt et répondre aux besoins de
stimulations sensorielles, d'interactions sociales et de participation.
D'autant que ces derniers présentent plusieurs traits
communs. J'ai pu ainsi observer qu'ils sont en recherche d'interactions avec
les personnes de leur environnement, et demandeurs d'activités, ils sont
aussi très observateurs. A l'affût, ils réagissent avec
beaucoup d'enthousiasme au moindre événement nouveau s'inscrivant
dans leur quotidien. Chaque nouvelle activité ou déplacement
semble être vécu de manière festive. Aussi, ils sont tous
deux blagueurs et taquins, ayant besoin d'être constamment en relation
avec un professionnel. J'ai pu également noter que leur niveau de
compréhension, d'acuité visuelle et auditive étaient
correctes et plutôt similaires. Sachant d'une part, qu'ils sont tous deux
dépendants pour tous les actes de la vie quotidienne, et que leur besoin
de découverte de leur environnement se fait grâce à un
tiers et qu'ils appartiennent à la même unité, ainsi que le
même «groupe communication »et que d'autre part, ils se
connaissent, j'ai pensé que mon projet leur permettrait de renforcer
leurs liens et leur permettre de faire partie d'un nouveau groupe. Je suis
persuadée qu'il est important de proposer des activités
encourageant l'interaction avec d'autres jeunes. Comme le soulignent
Cécile VISSCHER et Pere TORAS, «l'objectif principal est
d'offrir à l'enfant un espace ludique lui permettant de découvrir
son corps comme objet de relation à l'autre, comme média pour
explorer avec plaisir, toujours en relation avec d'autres enfants et
éducateurs.»16(*) D'autre part, l'équipe et moi pensons que les
jeunes ont peu d'expériences du monde extérieur. Au vu du cahier
de liaison entre l'établissement et la famille dans lequel sont inscrits
les récits des week-ends et du cahier de communication comportant des
photos, il semblerait que peu d'activités leur soient proposées
à l'extérieur. Puis, comme nous l'avons vu plus haut, les deux
jeunes ont des besoins similaires. Enfin, ils sont en attente d'admission pour
un établissement adulte l'un comme l'autre et se retrouvent donc en
position d'attente. Au vu de ces facteurs, je pense que la participation aux
«contes sensoriels» pourrait leur être
bénéfique.
2. ...Pourquoi ?
Premièrement, tels que vu plus haut, et selon
Cécile VISSCHER et Père TORAS, la personne atteinte de
polyhandicap arrive au monde avec un manque d'expériences sensorielles
durant la vie-utérine ce qui a provoqué une difficulté
à développer une idée du corps propre, la peau
étant l'organe de contact et de délimitation. Ainsi,
d'après ces auteurs, l'enfant a tendance à renoncer à
«utiliser son corps comme moyen d'exploration, de recherche et de
satisfaction de sa curiosité, mais aussi comme moyen d'approche et de
communication.»17(*) J'en déduis qu'il est nécessaire
d'apporter ces objets de stimulations à la personne porteuse de
polyhandicap afin de l'aider à explorer avec son corps, lui permettant
d'entrer en relation avec l'objet ou l'environnement. Ainsi, les
éléments sensoriels de l'histoire pourraient créer
l'opportunité de découverte et d'ouverture vers l'environnement
extérieur.
Par ailleurs, comme le soulignent Messieurs Dalla Piazza et
GODFROID «pour une personne polyhandicapée, les moyens de
communication concernent surtout la modification des rythmes de la vie
quotidienne, l'amplitude respiratoire, des émissions vocales diverses,
des mouvements, le toucher. Nous sommes au niveau de l'émission de
comportements de base issus des premières étapes du
développement. Le premier outil pour communiquer, pour créer
une relation est le corps.»18(*) Or, nous utilisons principalement une communication
verbale. De même, pour beaucoup les mots simples sont très
complexes à aborder et à comprendre. Il faut alors les aider
à appréhender les mots en passant par l'éveil des sens,
c'est-à-dire en adaptant le ton au contexte, en utilisant des mots
qu'ils connaissent et qui leur font écho. En suivant cette logique, il
est alors question de leur faire vivre les phrases dans leur corps lorsqu'elles
sont prononcées. Il s'agit de traduire les mots afin qu'ils deviennent
plus accessibles. Il se peut que certains mots ne fassent pas sens pour
certains jeunes. Ainsi, théâtraliser est important lorsque l'on
souhaite raconter une histoire ou faire passer un message. C'est pourquoi, je
pense qu'il est nécessaire de jouer les phrases, au contact des
personnes porteuses de polyhandicap qui appréhendent leur environnement
à travers leurs sens. Pour ce faire, l'histoire choisie devra être
jouée, voire de manière exagérée,
théâtralisée et amenée de façon à
permettre un vécu par le jeune.
Je peux porter mon attention sur le verbe interagir c'est
à dire «agir, jouer un rôle dans quelque
chose»19(*)
ainsi, je comprends que l'interaction va de pair avec la participation puisque
participer c'est «prendre part à une action, à un
sentiment, etc.»20(*) Et que prendre part correspond au «fait
d'intervenir ou de participer à quelque chose qui est en train de se
passer.»21(*)
Interagir c'est participer. A ce propos, FELCE et MANSELL ont
développé une approche : l'Active Support. Cette approche
encourage la participation de la personne par des offres de soutien
appropriées dans l'intention de garantir l'accomplissement de la
tâche. «Mieux vaut un engagement, même partiel ou de
courte durée, [...], qu'une participation plus longue et moins
étayée mais susceptible de s'achever sur un échec ou un
abandon».22(*)
Cette méthode met en avant l'importance des participations au quotidien,
même si elles sont de courtes durées ou nécessitant une
guidance. Par ses participations, le jeune va pouvoir
«expérimenter son emprise sur
l'environnement.»23(*). Puis, selon Félicie AFFOLTER, psychologue,
l'enfant se construit avec le toucher et le mouvement ; ce que la personne
polyhandicapée dans son enfance, n'a pas pu expérimenter. C'est
pourquoi, «solliciter le toucher et l'accompagner dans ses mouvements
servent à enrichir ses expériences sensorielles et lui permettent
d'agir sur son environnement.»24(*) Il faut donc apporter un aspect participatif et
tactile afin que le jeune prenne part aux stimulations de l'activité
proposée.
L'humain est un être social et «les fortes
limitations de relation et de communication entre la personne et son entourage
[...] freinent son développement personnel et les apprentissages,
limitent considérablement toute action possible de la personne sur son
environnement, compromettant ainsi son épanouissement personnel et sa
place de sujet.»25(*)
Ainsi, limité dans sa communication, il va s'adapter et
compenser sa condition d'une manière ou d'une autre. En outre, les
personnes en situation de polyhandicap communiquent sans cesse, avec leur
propre mode de communication. En effet, les personnes en situation de
polyhandicap «expriment surtout leurs désirs et leurs ressentis
dans le cadre d'une communication pré ou proto symbolique, comme les
expressions faciales, les mouvements, les bruits, la posture, la tension
musculaire.»26(*)
Alors, malgré de grandes difficultés pour la personne
polyhandicapée à se faire comprendre, le professionnel peut
intercepter les tentatives de la personne, soit devenir facilitateur de la
parole de l'autre, en veillant «à ne pas appliquer ses propres
schémas de pensée mais de trouver le bon rythme, être
attentif à tous les modes de communication - regard, langage, toucher,
odorat, mouvements, mimiques, silence, attitudes, rythmes.»27(*) Il est donc nécessaire
de connaître les modes de communication et les habitudes
réactionnelles de la personne pour pouvoir comprendre et intercepter les
signaux, ce qui permettra à la personne d'être encouragée
à entrer en communication et, d'être reconnue comme une personne
qui agit sur son environnement. Je repère donc l'importance de
connaître les modes de communication des personnes qui participent
à la séance. C'est pourquoi, les personnes qui collaboreront avec
moi lors des séances devront connaître suffisamment les jeunes,
afin d'être attentifs à leurs réactions durant la
séance. Cette attention portée aux réactions des jeunes
permettra d'une part, l'évaluation de l'activité, mais
également d'échanger avec les jeunes. De plus, mentionner
auprès des jeunes leurs réactions, à l'issue de la
séance leur permettra de donner corps à cet
événement vécu comme particulier.
3. Annonce du projet à
l'équipe
L'annonce du projet à l'équipe a
constitué la première étape du projet, et a pu être
abordée lors d'un temps de pause. Mes collègues me faire des
suggestions sur le déroulement de l'activité. Ma
référente m'a proposé de soumettre un projet à la
cheffe de service, précisant le montant des frais financiers à
engager, les moyens matériels et humains ainsi que le cadre temporel
à envisager. Par la suite, j'ai proposé à l'équipe
une lecture fine de mon projet qui a demandé des lectures successives.
Mes collègues m'ont indiqué des éléments à
ajouter afin de le rendre précis et fluide. D'autre part, ma
référente et moi avons pris rendez-vous avec la cheffe de service
afin de lui présenter. Lors de cet échange, mon projet a fait
l'objet d'une validation de ma cheffe de service qui a proposé que ma
référente puisse se joindre à moi lors du
déroulement des séances. Après concertation auprès
de ma référente, nous avons décidé qu'elle
réaliserait la lecture et que mes missions consisteraient à
choisir les contes, jouer l'histoire et utiliser les éléments
sensoriels afin de permettre aux jeunes de les toucher, les sentir, les voir de
plus près (parfums, tissus, matières diverses....). Dans le cas
où ma référente ne soit pas présente, nous avons
convenu que je demanderai à un autre professionnel de la remplacer pour
l'atelier.
4. Objectifs visés
Les objectifs de l'activité «contes
sensoriels» visés sont les suivants :
? permettre aux jeunes l'accès aux
histoires
J'espère faciliter l'accès des histoires aux
jeunes grâce aux stimulations sensorielles favorisant la réception
des informations ;
? apporter un moment d'interaction
L'activité est destinée aux jeunes, nous nous
adressons à eux. Une interaction s'opère à deux. Ainsi,
pour aider à la participation des jeunes, je les inclus dans l'histoire.
Je les invite à effectuer des actions de l'histoire. Je prononce leurs
prénoms. Les personnages de l'histoire font appel aux jeunes afin de
favoriser l'implication de chacun ;
? vivre et découvrir le nom des
émotions, des sensations, des sentiments et idées...
Après chaque séance, nous discutons sur les
émotions que chaque jeune a pu ressentir. Nous évoquons
également certains éléments de l'histoire pour les aider
à la contempler, la comprendre et à l'appréhender ;
? s'habituer au contact corporel et entrer en relation
avec l'autre
Les jeunes sont amenés à entrer en relation avec
les personnages qui s'adressent directement à eux et leur apportent le
matériel de l'histoire qu'ils expérimentent à travers
leurs capteurs réceptifs ;
? utiliser son corps comme moyen d'exploration
grâce aux stimulations sensorielles
J'aspire à ce que les jeunes répondent aux
stimulations sensorielles, en d'autres termes, qu'ils acceptent les
sollicitations conduites par l'équipement représentant l'histoire
afin de leur donner l'opportunité d'utiliser leurs corps comme moyen
d'exploration ;
? percevoir et découvrir son propre corps et
son environnement, ainsi que ses possibilités de participation
Par les stimulations sensorielles, j'espère que les
jeunes découvrent une expérience nouvelle de leur corps et de
leur environnement. En outre, ceci permettra d'éveiller leur
curiosité et donc leur intérêt, encourageant ainsi les
jeunes à interagir avec les personnages ;
? éveiller la curiosité
Mon souhait est de faire découvrir aux jeunes de
nouvelles sensations et/ou éveiller leurs capteurs sensoriels. Ainsi,
une façon d'évaluer l'impact de leur découverte consiste
en l'observation de leur curiosité en éveil. Il est à
souligner que, la curiosité est également un
élément qui détermine l'intérêt de la
personne pour l'activité. Par ailleurs, je pense que pour soutenir
l'attention des jeunes il est nécessaire de varier ce que l'on propose
en termes d'activité. En effet, la nouveauté rend curieux. Cela
permet également à l'intervenant d'observer les jeunes dans un
autre cadre,et donc de conserver sa capacité d'observation et de
réajustement En effet, tels que l'affirment Philippe CAMBERLEIN et
Gérard PONSOT «la routine, sécurisante dans une certaine
mesure, [...] peut enfermer dans des pratiques [...]
L'évolution même de la personne polyhandicapée que les
intervenants ont connue enfant peut échapper à leur
observation.»28(*);
? prendre du plaisir
La notion de plaisir est importante dans le secteur du
polyhandicap. En effet, l'évolution des capacités d'autonomie de
la personne est stimulée par les professionnels lorsque cela est
possible mais reste néanmoins restreinte ; la question du corps et du
plaisir est alors centrale. De plus, observer le goût du plaisir ou
m'assurer que la personne en éprouve me permet d'évaluer son
consentement quant au déroulement de l'activité. Ce consentement
m'indique la direction à suivre. Par exemple, si le jeune refuse de se
rendre à l'activité, ou bien, lorsque nous évoquons cette
dernière, le jeune n'est pas intéressé ou fuit du regard,
j'en conclus qu'il est nécessaire de proposer une activité
différente ou de l'améliorer.
5. Cadre de l'activité
a. Nombre de participants
Pour des raisons techniques et de concentration, j'ai
évalué que deux participants aux «contes sensoriels»
était le nombre idéal. En effet, le temps consacré
à l'acte d'amener les éléments sensoriels à la
portée des jeunes est très long, le risque étant que
ceux-ci perdent le fil de l'histoire. De plus, être deux permet
l'individuation puisque pour s'individuer, il faut se différencier. En
soi, le groupe apporte une opportunité de découvrir ses
possibilités comme objet de relation à l'autre. En effet,
«dans la prise en charge des enfants polyhandicapés, et vu la
multiplicité de ses troubles, on donne souvent priorité à
la prise en charge individuelle, tout en oubliant l'importance des
activités favorisant les interactions avec d'autres
enfants.»29(*)
b. Moyens matériels
L'activité a lieu dans la salle «audio».
Cette salle est consacrée à l'activité, c'est une salle
peu investie par l'établissement ; «l'extraction du milieu de
vie habituelle apporte le calme nécessaire pour favoriser
l'attention»30(*) et permet aux jeunes de se repérer dans
l'espace-temps. J'ai estimé que 25 minutes est la durée maximum
dédiée à l'activité afin de permettre aux jeunes de
soutenir leur attention. Chaque atelier se déroule une fois par semaine,
le mercredi à 10h40, il s'agit d'un temps où les jeunes sont
disponibles tous les deux. Après chaque séance, un journal de
bord accompagné d'un questionnaire est tenu à jour, sa
finalité est de suivre l'évolution des séances afin
d'adapter ou de réajuster au mieux l'activité lors de la
séance suivante. Mon binôme durant l'activité reste en fin
de séance pour qu'ensemble nous réalisions une évaluation.
Les supports utilisés sont les suivants :
- une vieille valise achetée à la brocante et
qui a un vécu, dans laquelle je transporte tout mon matériel. Mon
choix s'est porté sur ce type de bagage dans le but de poser un cadre
théâtral à l'activité. Cette valise a suscité
des questions de la part d'Angel, qui me parlera de cette valise à
plusieurs reprises lorsqu'elle commentera l'activité. Elle accentue la
part mystérieuse de l'histoire (cette drôle de valise marron sent
une odeur forte, âcre....)
- des boîtes dans lesquelles j'ai placé des
odeurs naturelles (cannelle, clous de girofle, menthe etc.). Celles-ci sont
utilisées pour éveiller l'odorat ;
- un masque de monstre avec des poils, une boule rose
très molle en caoutchouc (son aspect est déroutant car flasque),
des éléments de la nature (feuilles, bâtons, pierres,
plantes etc.). Ces matériaux sont utilisés pour le sens du
toucher ;
- une perruque blonde, une corde, une cape, une tête de
cheval, une couronne, une paire de lunettes à verres de couleur rose.
Ces éléments sont utilisés pour le sens de la vue et
l'aide à la compréhension de l'histoire ;
- une enceinte, afin de stimuler l'audition. J'ai choisi de
diffuser des mélodies représentant l'atmosphère des
différentes scènes de l'histoire. Je me suis inspirée ici
de la musicothérapie, thérapie qui utilise des
éléments de la musique ou de la musique en tant que telle afin
d'ouvrir des canaux de communication. Je pense qu'associer l'histoire à
certaines musiques favorise la compréhension de l'histoire puisqu'elle
ajoute un élément d'information supplémentaire et favorise
la mémorisation. En effet, «elle mobilise l'attention, engage
la mémoire corporelle et sensorielle et le traitement séquentiel
des informations.»31(*)
c. L'annonce de
l'activité aux jeunes
Pour proposer l'activité aux jeunes, j'ai
sollicité leur participation. Angel m'a répondu qu'elle
souhaitait y participer. Quant à Zadkiel, j'ai expliqué l'atelier
en mimant et puis j'ai observé ses expressions qui étaient
positives. Enfin, j'ai pris la décision de venir les chercher avec la
tête cheval, étant de grande taille, elle représente
l'activité et permet aux jeunes de se repérer et de comprendre
que l'activité est sur le point de débuter. Tels que l'explique
Danièle WOLF, annoncer l'activité permet à la personne
d'être davantage disponible car «cette sollicitation (inviter
à partager une activité) survient fréquemment sans signes
annonciateurs de la part de l'intervenant qui souvent présume que son
interlocuteur sera d'emblée réceptif. »32(*)
d. L'histoire choisie
Concernant le choix de l'histoire, je me suis longuement
interrogée sur le fait de privilégier une histoire correspondant
à leur âge actuel, 20 et 27 ans, ou bien l'âge de leur
développement cognitif. Pour Andreas FROLICH «le niveau
développemental de ces enfants ne dépasse pas six
mois.»33(*) J'ai
d'abord envisagé la première solution en m'attardant sur les
contes classiques. J'ai eu beaucoup de difficultés à les
simplifier, à y apporter des éléments sensoriels et de
participation. Je me suis ensuite tournée vers des livres très
simples qui cependant étaient destinés aux moins de trois ans.
J'ai veillé à ne pas infantiliser les jeunes. En effet, je suis
d'avis de prendre en compte, si cela est envisageable, l'âge actuel des
jeunes en réadaptant mon approche car, comme le dit justement Dominique
JUZEAU, les jeunes découvriront leur statut d'adulte «au
travers d'expériences que la famille et les équipes
éducatives sauront amener avec la modification de ses apprentissages, de
ses tenues vestimentaires, du soin porté à sa personne, des
activités proposées (on quitte les comptines par
exemple).»34(*)
Ainsi, ma référente et moi avons pris du temps pour
préparer et organiser l'activité. Puis j'ai pris la
décision d'écrire une histoire. Je me suis inspirée d'une
histoire pour enfants que je ne considérais pas pour autant
infantilisante. C'est-à-dire, bien que le sujet35(*) choisit soit de type
fantastique, l'histoire pouvait intéresser les enfants et les adultes.
Ainsi, j'ai pu prendre en compte leurs capacités cognitives en proposant
une histoire simple, tout en tenant compte de leur âge actuel en adaptant
le scénario.
6. Déroulement des
séances
A ce jour, nous avons effectué cinq séances,
à raison d'une séance par semaine, lors de ma présence
à l'établissement. Les séances ont été
réalisées en binôme, la plupart du temps avec ma
référente, certaines fois avec des accompagnants éducatifs
et sociaux, et une fois avec l'aide de l'enseignante spécialisée.
La personne qui m'accompagnait lisait l'histoire, prenait en charge la musique
et se chargeait lors d'une scène de faire trembler les fauteuils. Quant
à moi, je jouais les personnages et j'amenais les stimuli sensoriels
à la portée des jeunes. A la fin de chaque séance, je
réalisais une évaluation en collaboration avec mon binôme
sous la forme d'un journal de bord, en précisant les
éléments à modifier.
a. Première
séance
Lorsque j'ai convié les deux jeunes à participer
à la première séance, ils semblaient enthousiastes et
souriaient. Lors de la séance, les jeunes étaient très
surpris, parfois ils se montraient effrayés par les personnages. Les
jeunes ont ri à certains moments. Angel observait souvent ma
référente lors de la lecture. Lorsque cette dernière
utilisait une voix rauque pour l'un des personnages, Zadkiel semblait
impressionné. Peut-être que celui-ci associait ce ton de voix aux
réprimandes ? A l'issue de la séance, les jeunes sont
restés bouche bée. Angel, qui d'habitude est très loquace
est restée muette. Nous sommes restés dans la salle à la
fin de la séance pour demander aux jeunes ce qu'ils en avaient
pensé. Nous n'avons pas obtenu de réponse immédiate de
leurs part puis, Angel nous a partagé avoir aimé la
séance. Pour Zadkiel, en revanche nous avons pu confirmer sa
satisfaction grâce à l'expression de son visage. Ensuite, j'ai
demandé à Angel ce que j'avais fait, elle m'a répondu
« des bêtises ». Puis lorsque j'ai demandé ce
que l'un des personnages faisait, celle-ci n'a pas répondu. Je pense que
les jeunes ne s'attendaient pas à participer à une
activité telle que celle-ci. En effet, ils n'avaient pas de
représentation de ce que pouvait être un conte sensoriel.
b. Deuxième
séance
Angel n'était pas présente en raison d'un stage
dans une structure pour adulte. Lorsque je suis venue chercher Zadkiel, une
professionnelle m'a confié que celui-ci était tendu au niveau des
bras durant sa séance de kinésithérapie. Je suis venue le
chercher avec le cheval, il nous a fait un très large sourire et
lorsque nous avons pris l'ascenseur, Zadkiel riait déjà. Il
semblait donc avoir reconnu le cheval, et s'attendait à
vraisemblablement participer de nouveau à l'activité. Celui-ci a
émis des vocalises lorsque nous avons eu accès à la salle,
ce qui est une manière pour lui de montrer son excitation pour
l'activité. Mon binôme et moi avons décidé de filmer
l'activité pour qu'il puisse partager son expérience avec sa
famille. Plus tard, j'ai profité de la vidéo pour observer les
réactions du jeune homme. Lors de la séance, il s'est
montré attentif et rieur, il a parfois eu des fous rires. Il a
regardé à plusieurs reprises la seconde personne qui faisait
office de binôme, je dois ajouter que le jeune était
principalement concentré sur ma prestation. A l'issue de la
séance, il a semblé ravi mais également songeur. Je lui ai
demandé s'il avait apprécié l'histoire, il m'a fixé
et sourit. In fine, le jeune semblait moins surpris mais plus pensif. Davantage
préparé à participer à l'activité, ce
dernier m'a semblé plus pensif car comme nous le verrons
ultérieurement, il a très certainement pu intégrer
d'avantages d'éléments de l'histoire comparé à la
fois précédente.
c. Troisième
séance
Lorsque je me suis présentée aux jeunes, ils ont
reconnu le cheval et étaient enthousiastes de se rendre à
l'activité. Angel semblait particulièrement fière de tenir
le cheval jusqu'à la salle. Pendant l'activité, les jeunes
étaient souriants, attentifs et ont bien participé aux commandes
des personnages (par exemple, l'un des personnages demande à Angel de
tirer une corde). En fin de séance, j'ai demandé à Angel
si celle-ci a été effrayée lors de l'activité,
celle-ci a acquiescé. Je lui ai ensuite demandé si elle avait
été surprise, en revanche je n'ai pas obtenu de réponse.
Ma référente n'a également pas obtenu de réponse de
la part de cette dernière.
d. Quatrième
séance
Cette séance a été
particulièrement intéressante car elle a été
effectuée avec l'assistance de l'enseignante spécialisée.
Lorsque nous sommes allées à la rencontre des jeunes, Zadkiel a
reconnu le cheval, en effet, il a souri dès qu'il l'a aperçu.
Quant à Angel, elle s'est montrée fortement excitée (cris,
sourires et agitations) de se rendre à l'activité, avant
même d'avoir repéré le cheval. Puis, les jeunes ont
présenté sensiblement les mêmes comportements que les fois
précédentes, c'est-à-dire que durant la séance, ils
ont été attentifs, aidants et participatifs. Puis une fois que
l'activité est arrivée à son terme, ils sont restés
pensifs, d'ailleurs, Angel est restée muette. Nous sommes restés
dans la salle pour échanger autour de l'activité. Ainsi nous
avons interrogé Zadkiel afin qu'il nous montre s'il avait ressenti de la
crainte, à cette demande il n'a eu aucune réaction notable. Puis,
lorsque nous lui avons demandé s'il s'était diverti, il a souri
largement et a vocalisé. Enfin, nous avons interrogé Angel,
celle-ci a confirmé qu'elle avait trouvé l'activité
amusante par son acquiescement. Concernant les stimuli, nous nous sommes
assuré qu'Angel sentait bien les odeurs, mais nous n'avons pas eu de
commentaires de sa part. Quant à Zadkiel, j'ai remarqué qu'il
s'était montré attentif lorsque je lui présentais les
éléments sensoriels.
Suite à un retour d'expériences auprès de
l'enseignante spécialisée, j'ai décidé d'utiliser
la même histoire pour les séances suivantes. En effet,
l'enseignante m'a partagé l'intérêt de la
répétition auprès de ce public. Ainsi, avec la
répétition se construit la mémoire. La mémorisation
aide à la compréhension de l'histoire, les jeunes peuvent se
concentrer sur de nouveaux éléments du conte à chaque
nouvelle séance, à mesure que la compréhension s'acquiert.
Les jeunes peuvent se concentrer sur des éléments qu'ils
n'avaient pas assimilés lors des séances
précédentes. La compréhension leur permettra
d'apprécier davantage l'histoire. De plus, la répétition
permet de travailler la représentation mentale, en d'autres termes
l'anticipation. Grâce à leurs représentations mentales de
plus en plus claires, ils seront amenés à se construire une
idée des événements de l'histoire et ils seront ensuite de
plus en plus en mesure de la recevoir ; tout comme le cheval qui est devenu une
représentation mentale de l'activité pour les jeunes.
e. Cinquième
séance
Lors de la cinquième séance, Angel n'a pas pu
être présente. Celle-ci a quitté l'établissement et
est retournée à son domicile. Zadkiel a
bénéficié de l'activité en présence de deux
camarades plus jeunes que lui. En effet, ma référente a
changé d'unité durant ma période de stage, ainsi j'ai
été invitée à poursuivre mon stage au sein de cette
unité de jeunes âgés de 8 à 14 ans. Pour des raisons
pratiques, je poursuivrai le mémoire en me focalisant uniquement sur
Zadkiel mais je reviendrai sur la question du futur de l'activité lors
de la partie «perspectives éducatives».
Zadkiel a réagi immédiatement à la vue du
cheval avec un grand sourire lorsque je me suis rendue à son
unité. Je l'ai invité à le porter jusqu'à la salle,
je l'ai déposé sur la tablette de son fauteuil roulant afin
d'initier sa participation. J'ai prévenu ensuite le jeune de la
présence de deux nouvelles camarades et, j'ai rappelé qu'Angel
était partie du fait de son âge. Je n'ai pas senti le jeune
perturbé par ces changements, il semblait concentré sur ce qui
allait se dérouler. Cependant, pour ma part, j'ai eu plus de mal
à circuler dans la pièce trop étroite pour accueillir
trois résidents. Pour cette cinquième séance, Zadkiel n'a
pas été ébahi contrairement aux séances
précédentes. Le jeune s'est exprimé dès la fin de
la séance grâce à des vocalises.
En effet, il n'a pas eu besoin de temps pour
réfléchir, dès que nous avons initié la discussion
post-narration, il a initié le «dialogue». A ce stade, je
pense que le jeune est plus confortable face à l'histoire et qu'il
commence à l'intégrer.
J'ai effectué cette séance avec une
accompagnante éducative et sociale. Par son regard sur
l'activité, celle-ci m'a permis de me questionner sur le volume de la
musique de fond qui semblait élevé. En effet, il peut être
préférable de séparer les stimuli pour favoriser
l'assimilation des informations. Ainsi, lors des séances suivantes je
privilégierai de diffuser la musique en début et en fin de
séance afin de bien différencier chaque stimulus.
f. Des participants attentifs et
réactifs lors des séances
Lors des séances et des bilans j'ai pu observer
plusieurs faits. D'une part, les réactions des jeunes semblaient
adaptées à l'histoire car celles-ci sont en corrélation
avec la scène, par exemple, j'ai pu noter que les jeunes étaient
surpris lors de scènes où un changement inattendu prenait place.
Puis d'autre part, j'ai remarqué que Zadkiel restait
muet durant les séances, mais une fois l'activité terminée
il semblait vouloir initier la discussion. Durant le spectacle son silence
semblait traduire sa concentration.
Lors de l'évaluation, je prenais en compte les
remarques de mes binômes, qui connaissaient bien les jeunes et leurs
réactions. Ensemble nous nous accordions à dire que par leur
enthousiasme de se rendre à l'activité et leur attention, les
jeunes semblaient éprouver un réel intérêt aux
séances.
g. L'atterrissage après
le voyage par les sens
Les jeunes se sont montrés très attentifs,
curieux et captivés, ils me suivaient du regard. Cependant, la
séance terminée ils semblaient déconcertés ;
Zadkiel ne vocalisait pas et Angel ne commentait pas la séance. Ils
semblaient dans l'expectative. J'ai noté qu'ils paraissaient
imprégnés par l'histoire. A la fin de la séance, ils
semblent donc dans l'attente, peut-être se demandent-ils si l'histoire a
pris fin ? Effectivement, ils font partie intégrante des personnages,
ils sont englobés dans le conte, ils la vivent. Ainsi, ils ne savent
plus comment réagir après coup, puisque ceux-ci sont encore dans
l'histoire, impliqués et imprégnés par celle-ci. Je pense
alors qu'ils ont reçu de «plein fouet» toutes les stimulations
qui leur ont été amenées, ils se sont
entraînés à les recevoir, c'est pourquoi ils demeurent dans
l'expectative.
Ayant changé d'unité au cours de mon stage, j'ai
pris pour habitude de me rendre à l'unité pour rencontrer les
jeunes les jours suivant la séance, dans le but de discuter de
l'activité et de prendre de leurs nouvelles. Durant ces moments
d'échanges, j'en profite pour noter chacune de leurs réactions,
et les comparer aux réactions initiales repérées le jour
des «contes sensoriels.» De cette manière, en évoquant
l'activité à Zadkiel, j'ai pu constater qu'il vocalisait
davantage qu'en fin de séance. Quant à Angel, en confrontant avec
les échanges d'après séance, je comprends qu'elle
répond plus aisément. J'en conclus que les jeunes ont besoin de
temps pour assimiler l'activité et pour se remettre de leurs
émotions.
Faut-il adoucir l'histoire pour que les jeunes soient moins
déstabilisés ? Je ne pense pas qu'être
déstabilisé soit contraire à l'épanouissement des
jeunes puisque dans chaque conte se trouve un personnage incarnant le
méchant et un héros qui rencontre des difficultés, du
moins au début de l'histoire. Bruno BETTELHEIM cite à ce propos
«la majorité des parents croient que l'enfant doit être
mis à l'abri de ce qui le trouble le plus : ses angoisses informes et
sans nom, ses fantasmes chaotiques, colériques et même violents.
[...] Mais ce régime à sens unique ne peut nourrir l'esprit
qu'à sens unique, et la vie réelle n'est pas que
soleil...»36(*)
De plus, la personne séduite par le personnage, s'identifie à lui
et ce dernier lui apporte un message qui lui apprend ou lui rappelle
«que la lutte contre les graves difficultés de la vie est
inévitable [...] mais si au lieu de se dérober, on affronte
fermement les épreuves [...], on finit par remporter la
victoire.»37(*)Même si dans son livre Bruno BETTELHEIM
écrit au sujet des enfants, je pense que cela peut s'appliquer aux
adultes également. En effet, selon moi l'enfant intérieur peut
être touché lors de l'écoute d'une histoire, en d'autres
termes, je pense que pour tout individu les histoires ou le visionnage de films
peuvent être une source de stimulations et aide à la gestion des
émotions, narrées par l'histoire. Je pense donc que les adultes
peuvent également apprécier une histoire qui ne soit pas adoucie
mais qui reprend les difficultés de la vie.
En revanche, il se peut que le sujet de l'histoire ne soit pas
à l'origine de ce qui provoque l'étonnement des jeunes, cela peut
concerner un autre aspect. Il peut s'agir de l'activité dans sa
globalité, l'histoire et l'éveil des sens. En effet, au regard de
leur réactions, j'ai pu conclure qu'il y avait, pour les jeunes, une
nécessité de procéder à un
«atterrissage». Je pense que l'histoire a stimulé une
circulation de l'esprit. Elle a peut-être permis de ré-ouvrir des
possibles et solliciter l'imaginaire. L'imaginaire les a amené à
expérimenter un voyage dans l'histoire. Après la séance,
il faut donc amortir «l'atterrissage.» Mon but n'était pas de
les illusionner. C'est pourquoi après les séances, nous prenions
le temps de ralentir, ce moment de pause nous permettait d'échanger.
V. Evaluation des
séances
1. Ajustements
opérés
D'autre part, mon binôme et moi avons eu tendance
à nous précipiter dans les actions de l'histoire, à lire
et à amener les éléments sensoriels de manière
assez rapide. Puis, j'ai réussi à ralentir mes gestes cependant
je pense que la séance pouvait être encore plus longue en termes
de temps. Il est très important de ralentir lors des accompagnements de
personnes en situation de polyhandicap, notamment pour leur donner le temps de
recevoir l'information. «Elles ont besoin de temps pour pouvoir
répondre. Il nous faut apprendre à repérer leurs
stratégies et leur «temps» qui n'est pas le
nôtre.»38(*) C'est alors que j'ai réalisé, que
malgré nos efforts, il est très difficile de ralentir le rythme
de l'activité lors d'un accompagnement. En outre, ces arrêts sur
image permettent également aux jeunes de mieux comprendre le sens de
l'histoire.
Puis, après un petit incident lors de la
première séance, j'ai pris la décision de fermer la porte
de la salle à clef, pour que l'activité ne soit plus
perturbée par l'ouverture de la porte par une personne
extérieure.
A propos de l'évaluation, j'ai testé plusieurs
manières de l'effectuer. J'ai d'abord débuté par
l'écriture et ce, sous la forme d'un journal de bord dans lequel je
notais quelques observations. J'ai pensé à
l'éventualité d'omettre des éléments. Alors, j'ai
préféré aborder la séance suivante sous la forme
d'un tableau en y comparant le comportement des jeunes : avant, pendant et
après l'activité. Ce type d'évaluation m'a
été bien utile cependant, j'ai réalisé que ce type
d'organisation pouvait engendrer des oublis. Ainsi, j'ai effectué la
troisième évaluation sous forme d'objectifs afin de
repérer s'ils avaient été atteints.
Faute de temps, je n'ai pas procédé de la sorte.
De ce fait, pour la quatrième évaluation, j'ai
réalisé un questionnaire dans le but de comparer les
comportements des jeunes avec les séances précédentes ;
j'y ai également ajouté d'autres items tels que «Est-ce que
leurs réactions étaient adaptées au contenu ?»
Inscrire des questions au préalable m'a permis d'élargir mes
questionnements en prenant davantage de temps pour les élaborer. Toutes
ces tentatives m'ont permis de cheminer vers la méthode la plus
efficiente qui pour moi s'est traduite de la sorte : lire en un premier temps,
les objectifs de mon activité ainsi que les observations
précédentes au préalable de toute nouvelle
évaluation puis dans un second temps, rédiger l'évaluation
tel un journal de bord.
2. Qu'en est-il des objectifs ?
Afin d'évaluer l'activité «contes
sensoriels,» je propose d'étudier les objectifs un par un.
? Donner aux jeunes l'accès aux
histoires
Je pense avoir pu donner aux jeunes l'accès aux
histoires du fait qu'ils étaient captivés par les diverses
scènes, qui ont pu leur faire ressentir des émotions
variées. Ils ont pu sursauter, être effrayés par les
personnages ou rire face aux scènes divertissantes. Par leur
réactions à l'activité et leur concentration, je peux
constater que les jeunes ont écouté le récit, ils ont eu
donc accès à une histoire. Par contre, pour qu'ils aient
accès aux histoires, avec un s, il faudrait continuer l'activité
sur le long terme, durant plusieurs mois dans le but de leur proposer une
histoire différente lorsque l'histoire aura été
suffisamment répétée. Nous verrons plus bas
l'intérêt de répéter la même histoire ;
? apporter un moment d'interactions
L'histoire est racontée pour les jeunes dans laquelle
ils peuvent participer par les actions sollicitées par les personnages
de l'histoire ; mais également parce que nous discutons du conte
après les séances. En premier lieu, je peux constater que les
jeunes entrent en relation du fait qu'ils écoutent attentivement,
suivent du regard. Leurs réactions soulignent qu'ils sont bien
présents, être présent c'est interagir. Comme vu plus haut,
interagir c'est agir et comme ils ont réagi face à mes
stimulations, j'en déduis qu'ils ont été dans
l'interaction. Le corps est un être de parole. Ainsi, même si les
jeunes ne communiquent pas ou difficilement avec des mots, ils sont tout de
même dans l'interaction. J'ai noté des regards, de l'attention,
des réactions expressives etc. Il est simplement nécessaire d'y
prêter attention et, de leur donner un support pour enclencher cette
interaction qui est proposée à deux sens. Dans un second temps,
j'ai pu constater qu'il est assez difficile de discuter avec les jeunes
à l'issue de l'activité, en effet, comme j'ai pu évoquer
plus haut, les résidents restent pensifs et dans l'expectative.
Peut-être aurions-nous pu mettre en place un atelier hebdomadaire
dédié à échanger avec les jeunes à propos de
la dernière séance «contes sensoriels» ? ;
? vivre et découvrir les noms des
émotions, des sensations, des sentiments et des
idées...
En fin de séance, des échanges avec les jeunes
leur ont permis de revivre certaines émotions. Nous évoquions les
différentes émotions suscitées chez les jeunes. A titre
d'illustration, nous avons abordé la surprise au travers de l'expression
de leur visage ou leur mutisme qui semblait traduire cette émotion. Le
loup-garou du conte est poilu c'est ce qui le caractérise, l'animal
devient réel par le biais des poils que les jeunes ont pu toucher. Nous
avons donc évoqué le pelage du loup-garou avec les jeunes, cet
échange aide les jeunes à intégrer l'histoire en
opérant un retour en arrière. Au sujet des sensations, Angel a pu
acquiescer afin de nous confirmer qu'elle avait bien senti les odeurs
proposées lors du conte. Je pense que les séances ont permis une
introduction face à ces nouveaux sujets et émotions qu'ils ont pu
expérimenter et en «parler» ;
? s'habituer au contact corporel et entrer en relation
avec l'autre
L'activité a permis aux jeunes d'expérimenter
leur corps d'une toute autre manière. Afin de sortir du contexte
quotidien dans lequel le contact corporel est utilitaire (par exemple lors des
moments de soins), il leur a été proposé de
découvrir leur corps par les sens, à travers une histoire. Les
stimuli ont été acceptés par les jeunes, qui se sont
laissés entrer en relation. Ce qui s'est traduit notamment lorsque j'ai
donné la balle de caoutchouc à Angel, elle a pu la tenir dans sa
main. Ainsi, je n'ai pas constaté de leur part de difficultés eux
à entrer en relation. Néanmoins, il est vrai que je m'attendais
à davantage de réactions de leur part face aux stimuli. Je
détaillerai ce point dans le paragraphe suivant ;
? utiliser son corps comme moyen d'exploration
grâce aux stimulations sensorielles
Cet objectif va de pair avec le précédent. Comme
je l'explique plus haut, les jeunes ont acceptés les stimuli, ils ont
donc exploré le conte grâce aux sens. Il est à noter
cependant qu'un sens était plus particulièrement investi que
d'autres. En effet, seul le spectacle occasionnait de vives réactions. A
titre d'exemple, les jeunes regardaient d'un coup d'oeil les capsules odorantes
lorsque je les amenais à leur portée, ils les sentaient puis se
concentraient aussitôt sur les personnages. C'est pourquoi, je pense que
le sens de la vue a semblé plus captivant pour les jeunes.
Néanmoins, je pense que les stimuli sont importants pour l'exploration
du corps, du conte et pour la participation à l'histoire. Il est
compréhensible que le spectacle occasionne le plus de réactions,
il s'agit d'une expérience complètement nouvelle, dynamique et
donc qui attire l'attention et le regard. En SNOEZELEN, il est conseillé
de séparer les stimuli afin de favoriser l'attention et l'assimilation
de l'information puisque tel que le relate Anne-Marie ASENCIO au sujet des
personnes présentant un polyhandicap, «ces personnes conjuguent
à la fois le non accès à une communication verbale [...]
et dans un environnement saturé de messages multi sensoriels, que les
spécificités de leur fonctionnement sensoriel, organique et
neuronal ne leur permettent pas toujours de réguler, en termes de flux
et, de métaboliser au niveau du sens.»39(*) Peut-être, aurait-il
été intéressant de séparer le spectacle (la vue)
des autres éléments sensoriels. Prolonger la séance
pourrait être possible mais nécessiterait plus de temps et donc
serait plus difficilement mis en place, en fonction des emplois du temps de
chacun ;
? percevoir et découvrir son corps propre et
son environnement, ainsi que ses possibilités de participation
Je pense que les jeunes, grâce aux sollicitations
sensorielles de l'histoire proposées ont pu expérimenter
l'environnement de l'activité et l'impact de leur personne sur
l'histoire, puisque les personnages réagissent également aux
jeunes. Afin d'illustrer cet exemple, si Angel ne réussissait pas
à jeter la balle sur un des personnages comme demandé par l'un
deux, celui-ci lui faisait une remarque humoristique, ce qui faisait rire
Zadkiel. En revanche, si Angel atteignait le personnage avec la balle, celui-ci
se transformait et retirait son masque.
De surcroît, les jeunes qui doivent appréhender
toutes les informations provenant de leur environnement avec des moyens de
connaissance et de communication limitées, ont besoin de structure, ce
qui aménage leur environnement pour «le rendre plus sûr,
plus contenant et plus reconnaissable pour cette personne car sa qualité
de vie en dépend largement.»40(*) C'est pourquoi, il est nécessaire
d'utiliser à la fois un langage accessible aux personnes si cela est
réalisable c'est-à-dire un langage qui passe par le corps et,
d'apporter également des repères auxquels les jeunes puissent
s'appuyer pour construire leurs représentations mentales de leur
environnement. Dans la situation de l'activité, il s'agit de comprendre
l'importance de la répétition afin de la mettre en place. Il est
nécessaire de répéter le récit, de disposer de la
même salle, de prévenir les jeunes de tout changement survenu
(changement de participants...) ; il s'agit de parler de la séance pour
mieux la comprendre. Ainsi, le professionnel est un «passeur de
sens,» «notre rôle de passeur entre le monde et la personne
polyhandicapée est bien de trouver les moyens d'installer dans leur vie
les rythmes et les éléments de temps qui la structurent et
rendent ce monde un peu plus compréhensible»41(*);
? éveiller la curiosité
J'ai pu observer l'étonnement, la surprise voire
quelques fois l'émerveillement dans les expressions de leur
faciès. Ce spectacle sensoriel peut être considéré
par les résidents comme un événement magique. La
découverte était l'un des objectifs de l'activité, et le
moyen de l'évaluer est de repérer la curiosité. Ainsi,
selon moi les jeunes ont pu découvrir leur propre corps et leur
environnement par la curiosité qu'ils ont manifestés.
Il est
à noter que l'activité a apporté une nouveauté qui
a amené de l'excitation car ces stimulations peuvent faire coupure dans
la continuité de leur rapport au monde, que Véronique PAUTREL
qualifie de «difficilement perceptible tant il y semble
indifférent faute de moyens psychiques.»42(*). Ainsi, précise-t-elle
«Les seuils d'excitations sont facilement franchis pour ces enfants
qui n'ont pas les moyens de donner du sens à ce qu'ils
éprouvent.» Ceci pourrait expliquer la raison pour laquelle
Zadkiel réagit vivement aux nouveautés du quotidien et la raison
pour laquelle les jeunes ont semblé déboussolés par la
séance ;
? prendre du plaisir
Cette curiosité semble montrer l'intérêt
des jeunes pour l'activité. De plus, j'ai constaté l'enthousiasme
des jeunes à chaque fois que je venais les chercher avec le cheval. J'ai
eu l'opportunité de demander à Angel et à Zadkiel s'ils
avaient apprécié l'activité, leurs retours ont
été positifs. En revanche, je donne la possibilité aux
jeunes de refuser ou de remettre à plus tard la séance en
veillant à leur réaction à l'annonce de cette
dernière dans le but de renforcer leur «sentiment continu
d'exister.»43(*)
3. Le sentiment continu
d'exister
Au cours de mon projet, je me suis
inspirée du concept de la stimulation basale d'Andreas FROLICH. Cette
théorie consiste à proposer à la personne des sensations
relatives à la vie intra-utérine, par exemple des
«sensations d'enveloppement, frottement, serrage, percussions,
vibrations, déplacements.»44(*) Philippe CAMBERLEIN et Gérard PONSOT
précisent «qu'il s'agit de fournir à l'enfant des
stimuli spécifiques susceptibles de provoquer son intérêt
et son attention» et de «stimuli relatifs aux
expériences corporelles primitives, à la base probablement du
sentiment d'exister.»45(*) A ce sujet, j'ai intégré des vibrations
dans les éléments sensoriels de l'histoire.
Par ailleurs, il se peut que
l'activité ait répondu à une angoisse de morcellement. En
effet, Véronique PAUTREL a émis l'hypothèse que les
personnes présentant un polyhandicap «vivent sans doute des
angoisses que nous pourrions qualifier d'archaïques au sens où
elles seraient antérieures à la problématique de la perte
de l'objet.»46(*) L'angoisse de morcellement est une angoisse
archaïque d'une rupture du
moi
différencié, soit la peur de la destruction de son propre corps
ou de son propre psychisme. Les personnes sujettes aux angoisses de
morcellement ont besoin de sentir la limitation de leur corps.
C'est
pourquoi, l'histoire a pu constituer une enveloppe qui les a contenu, qui les a
transporté, qui les a «porté» vers un voyage, ainsi les
éléments sensoriels ont permis aux jeunes de sentir leurs corps.
Grâce aux diverses sensations, les jeunes ont pu percevoir
«l'extérieur» puisque ceux sont les
«différentes perceptions émanant de l'objet, qui
permettent à celui qui perçoit de le vivre comme extérieur
à son intériorité de sujet percevant.»47(*) Ainsi, ils ont eu conscience
de leur corps et ont pris conscience de leur existence. Il s'agit de passer
«d'une existence organique à une existence corporelle, d'une
existence qui s'ignore à une existence consciente
d'elle-même.» C'est donc en favorisant
«l'activité attentionnelle»48(*) de la personne que l'on
favorise la conscience de soi et de l'environnement. Ceci en passant par le
corps car «le corps est l'intermédiaire entre la personne et le
monde»49(*). Je
peux en conclure que l'interaction proposée qui passe par la
sensorialité permet de développer cette attention chez la
personne et de favoriser son existence consciente.
VI La suite au prochain
épisode ?
Je tiens à rappeler qu'Angel a quitté
l'établissement. Je préconise que Zadkiel continue à
participer à l'activité. Celui-ci l'apprécie et s'est
prêté au jeu. En outre, j'ai constaté une évolution
du jeune, notamment lors de la dernière séance, j'ai
remarqué qu'il émettait des vocalises plus aisément en fin
de séance et semblait moins perplexe. Je souligne donc l'importance de
la répétition de l'activité. Si l'activité perdure,
Zadkiel pourra intégrer de plus en plus d'informations à mesure
que sa compréhension de l'histoire s'acquiert. Cette
répétition «permet de retrouver des sensations
identiques, rassemblées dans la même expérience, de
retrouver des traces de déjà vécu, qui constituent autant
d'ébauches de représentation mentale et du sentiment continu
d'exister. Il s'agit d'activité à penser sur le long
terme.»50(*)
Je sollicite les professionnels de l'établissement pour
continuer à inscrire l'activité au sein de
l'établissement. Effectivement, lors de la cinquième session,
nous avons effectué une séance d'essai, ainsi deux nouveaux
enfants ont accompagné Zadkiel. Nous avons constatés que ces
dernières pourraient s'y complaire. Concernant le déroulement de
l'activité en elle-même, je préconiserais d'espacer les
séances, d'en proposer moins mais de la prolonger afin de favoriser la
séparation des stimuli. C'est-à-dire, de commencer par le
spectacle, puis d'emmener les éléments de l'histoire aux jeunes
tout en rappelant l'histoire et ses caractéristiques. Parler l'histoire
permettrait de mieux l'appréhender et de pouvoir amorcer
«l'atterrissage». Il faut néanmoins garder certains
éléments qui favorisent la compréhension de l'histoire et
la participation des jeunes ; tels que la vibration des chaises lorsqu'un des
personnages fait trembler le sol, ainsi que toutes les participations des
jeunes, à titre d'exemple lorsque les personnages s'approchent des
jeunes pour les solliciter dans des actions précises. De plus, je
préconise d'effectuer une deuxième séance, le lendemain,
si cela est possible. Cet échange serait uniquement dédié
à discuter de l'activité car comme nous l'avons vu plus haut, les
participants ne sont pas disponibles en fin de séance.
Enfin au cours des évaluations, je me suis
interrogée sur la fréquence des représentations. A quel
moment doit-on proposer une seconde histoire ? Comment repérer si la
répétition du premier récit a été bien
intégrée ? L'enseignante spécialisée m'a
expliqué que les jeunes en situation de polyhandicap peuvent apprendre
mais que le temps pour que les apprentissages puissent s'opérer se
compte en années. Ainsi, nous ne connaissons pas le nombre de
séances qu'il serait préférable d'effectuer pour une
histoire. En effet, quel que soit ce que nous proposons aux jeunes, que ce soit
un conte sensoriel ou un autre atelier, nous pouvons avoir toutes les
idées théoriques, et connaître tous les
bénéfices que cela puisse apporter, seul le jeune en question
pourra nous indiquer s'il adhère ou non à l'accompagnement
proposé. Aucune journée ne se ressemble, d'un jour à un
autre, les jeunes peuvent réagir d'une manière très
différente. En revanche, les réactions des jeunes me permettent
de réguler mon approche. Je pense donc qu'il faut rester ouvert au sujet
avec lequel nous travaillons, et qu'il nous dirigera certainement toujours vers
la bonne direction, si toutefois nous sommes prêt à rebondir,
revoir notre positionnement en fonction de ce qu'il nous montre. Tel que
l'affirme si bien Sophie LUTZ, mère d'une jeune polyhandicapée
«La première chose que j'ai découvert c'était que
j'avais à travailler sur moi parce que c'était moi d'abord qui
devait trouver comment me comporter et une des choses qui est venue en premier
c'est d'accepter mon impuissance. [...] J'ai découvert que la meilleure
manière de m'approcher d'elle c'était d'arriver comme quelqu'un
qui va apprendre, non pas comme quelqu'un qui va accompagner l'autre mais qui
va se faire accompagner par elle, [...] pour être vraiment
adéquate, être vraiment en lien avec elle, d'une manière
qui soit respectueuse»51(*).
Auto-évaluation
Initialement ma crainte était de ne pas réussir
à trouver un ou une professionnelle pour m'accompagner lors de
l'activité, par faute de temps ou de moyens humains. Cependant, avec de
l'anticipation et de l'organisation, c'est-à-dire en informant en amont
l'unité des jeunes et mon binôme de l'horaire et du cours de
l'activité, je n'ai rencontré aucune difficulté à
effectuer l'activité en binôme. Je les ai réalisés
avec plusieurs professionnels différents, ce qui a permis de faire
découvrir les «contes sensoriels» à un maximum de
personnes dans la perspective que l'activité se perpétue suite
à mon départ. J'ai d'ailleurs pu constater un
intérêt des professionnels pour mon activité.
Puis, lorsque j'ai changé d'unité, j'ai
douté de mon diagnostic énonçant un besoin de stimulations
sensorielles. En effet, j'ai accompagné des enfants de 7 à 14 ans
qui étaient très fatigables aux diverses sollicitations et cela
m'a interpellé sur le fait que trop de stimulations fatiguent les
personnes en situation de polyhandicap. Ainsi, j'en ai conclu que malgré
ce besoin, il est nécessaire de veiller à ne pas sur-stimuler les
résidents mais de séparer les stimuli lors des activités,
comme expliqué plus haut, afin de s'adapter au mieux à leur
condition.
Enfin, j'ai engagé ma réflexion suivante :
comment continuer ce travail de prise en compte du besoin d'interactions par
les stimulations sensorielles lorsque l'activité cesse ? Comment
élargir le travail afin qu'il puisse s'opérer en dehors des
séances ? Au fil de mes accompagnements au quotidien, j'ai dirigé
mon approche éducative sur les sensations sensorielles afin d'entrer en
relation avec les enfants de ma nouvelle unité. A titre d'exemple,
j'utilisais leurs jouets ou des bouteilles sensorielles Montessori afin de
capter leur attention et engager une interaction. En l'occurrence, il s'agit de
bouteilles remplies d'eau, d'huile ou de billes pour stimuler l'éveil
des jeunes enfants En outre, lors des moments de soins, j'utilisais l'eau, le
toucher des produits ou la mousse pour inviter le jeune à se concentrer
sur une sensation et je théâtralisais mes réactions ou mes
phrases afin de me faire entendre, de rencontrer la personne là
où je peux la trouver, c'est-à-dire de prendre en compte sa
manière spécifique d'appréhender et de recevoir les
informations de son environnement. En d'autres termes, nous ne sommes pas
obligés d'attendre les activités mis en place au sein de
l'établissement pour rencontrer le jeune et l'inviter vers quelque chose
que l'on considère intéressant pour son bien être. Les
moments de soins aussi représentent des occasions de stimulations
basales. De plus, tel que le précise Andreas FROLICH, le quotidien doit
donner «l'occasion [...] d'intégrer des sensations qui [...] le
submerge bien souvent, entraînant stress et réactions de
protection et de défense, et l'empêchent de comprendre les
situations dans lesquelles il se trouve impliqué.» L'approche
bienveillante qui l'invite à re-découvrir ses sensations
corporelles l'aide à soutenir sa confrontation à la
complexité «des situations sensorielles complexes» de
sa vie quotidienne. En effet, «les ressources cognitives de l'enfant
ou de l'adulte polyhandicapé ne lui permettent guère de
transférer les découvertes vécues en atelier à son
vécu dans un autre espace-temps.»52(*)
Conclusion
Au cours des accompagnements, je me suis penchée sur
les besoins des personnes en situation de polyhandicap.
Tout d'abord, inspirée par mon entretien avec la
psychologue de l'EEAP, je pense qu'il est nécessaire face à cette
pathologie, de se remémorer quotidiennement les cinq besoins de base
présentés par Abraham MASLOW, psychologue, à savoir les
besoins : physiologiques, de sécurité, d'appartenance, d'estime
et de s'accomplir. Ainsi, je pense que bien que la façon de subvenir aux
besoins physiologiques de ces personnes concentre de manière
conséquente le personnel soignant et éducatif, elles ont autant
besoin d'être considérées dans leur ensemble, que le reste
de la population.
Ensuite, j'ai constaté que les deux jeunes que j'ai
accompagné dans le cadre de mon projet se montrent en demande constante
d'interactions sociales. Cependant, pour subvenir à ce besoin, j'ai
noté l'importance de prendre en compte leur manière
spécifique d'envisager et de comprendre le monde. En effet, à
défaut de pouvoir comprendre et manipuler les mots, dans leurs
caractéristiques brutes et absolues c'est-à-dire le mot en
lui-même, les jeunes ont besoin de contexte, de tonalité et de
sensorialité. Ils ont donc besoin de stimulations sensorielles
favorisant la réception des informations provenant de leur
environnement.
Puis, j'ai pu noter un besoin de dynamisme par leur grand
intérêt et attention envers tout comportement à
caractère festif ou événement inhabituel.
Enfin, j'ai explicité le besoin de participation,
à savoir d'être pris en considération lors de choix qui les
concernent, d'être avertis de tout changement et de les inclure le plus
possible aux conversations et aux activités de l'unité.
Au cours de mon projet, j'ai été amenée
à m'interroger sur la réponse apportée par l'équipe
des professionnels aux divers besoins des jeunes et, si celle-ci était
satisfaisante.
Avant toute chose, j'ai constaté que les cinq besoins
de base sont pris en compte, dans la mesure du possible, c'est-à-dire,
avec les contraintes de temps et de moyens disponibles, ceci au quotidien ou
lors d'activités.
Ensuite, le besoin d'interactions sociales et de participation
est pris en compte quotidiennement en revanche, il fait face à des
contraintes de temps étant donné que les professionnels ne sont
pas toujours disponibles pour discuter ou proposer une activité.
Puis, concernant le besoin de dynamisme, j'ai noté que
les professionnels ont à coeur de dynamiser les moments de soin, par
exemple à l'aide de musique. A ce titre, l'établissement organise
trois fêtes par an, à savoir la fête de Noël, le
Carnaval et la fête de l'établissement dans laquelle la famille
est conviée.
Enfin, concernant le besoin de stimulations sensorielles, j'ai
pu observer l'équipe faire sentir les odeurs de la nature lors de
sorties à l'extérieur. Cependant, ces besoins ne sont pas
toujours pris en considération ; il arrive souvent à
l'équipe de converser avec le jeune sans théâtraliser pour
favoriser la compréhension, sans utiliser de tonalités
poussées, ou sans y associer de stimulations sensorielles.
Ainsi, je me suis interrogée tout
particulièrement sur la manière de répondre aux divers
besoins d'interactions sociales et de stimulations sensorielles d'Angel et
Zadkiel. Pour se faire, je leur ai proposé des contes sensoriels
car l'activité me semblait en concordance avec leurs besoins
spécifiques.
Au fil des séances, les deux jeunes se sont
montrés attentifs, participatifs face aux sollicitations et
étonnés une fois l'activité terminée.
J'ai observé l'importance de prendre du temps
après chacune des séances afin de permettre
«l'atterrissage» suite au voyage des sens proposé. Mon
binôme et moi avons pris du temps pour discuter de l'histoire et/ou des
éléments sensoriels présentés cependant les jeunes
ne semblaient pas disponibles car trop pensifs. Ainsi, je pense qu'il serait
utile de proposer une autre séance dédiée à la
discussion afin de permettre aux jeunes une meilleure appréhension et
compréhension de l'activité «contes sensoriels».
D'autre part, j'ai pu constater la nécessité de
séparer certains éléments sensoriels pour les proposer
(tels que la musique, les matières à toucher et les odeurs) en
fin de séance, dans le but d'éviter une sur-stimulation et de
favoriser de cette manière l'assimilation des informations liées
à l'activité.
Au fil de mes lectures portant sur la sensorialité des
personnes en situation de polyhandicap et à partir de mes
accompagnements auprès de Zadkiel et d'Angel, j'en conclus qu'il est
intéressant d'approcher ce public par le biais de la
sensorialité. En effet, celle-ci les amène à
acquérir une conscience de leur corps et de leur environnement. Cette
activité attentionnelle ainsi que, la participation des jeunes
renforcent leur sentiment continu d'exister. Par conséquent, inclure la
personne dans le dynamisme de la vie c'est s'adapter à elle, afin de lui
proposer des outils qui lui permettent d'agir sur son environnement et
d'être en capacité de recevoir sereinement l'extérieur et
de le comprendre.
Je me suis intéressée à deux jeunes en
recherche d'interactions et disposant de nombreuses facultés
sensorielles (ouïe, odorat, vue, goût, toucher). Cependant, qu'en
est-il des jeunes qui ne disposant pas de tous leurs sens ? Peut-on adapter
l'activité «contes sensorielles» pour ces derniers ? Qu'en
est-il des jeunes qui ne semblent pas être dans la recherche
d'interactions sociales ? Pourrait-on envisager d'interagir avec eux par le
biais de la sensorialité ?
Bibliographie
Ouvrages lus :
? DOLTO Françoise, La cause des adolescents :
respecter leur liberté et leurs différences, Pocket, Paris,
2003
? JUZEAU Dominique, Louis Vallée, Pierre Tisserand, et
Philippe Pernes, Vivre et grandir polyhandicapé, Dunod, Paris,
2010, page 21, page 91, page 46
? DALLA PIAZZA Serge, GODFROID Bénédicte, La
personne polyhandicapée : son évaluation et son suivi, De
Boeck, Bruxelles, 2010, pages 29, 112, et 119
Ouvrages et documents
consultés :
? Projet d'établissement de l'EEAP, 2010
? Etude commanditée par le CLAPEAHA,
Recherche-action nationale : Les situations de handicap complexe,
Île-de-France, 2013
? Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne
polyhandicapée, la connaître, l'accompagner, la soigner,
Paris, Dunod, 2017, page 124, page 127, page 362, 671, page 1039
? ASENCIO Anne-Marie, FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les
situations de handicap complexe : besoins, attentes et modes d'accompagnement
des personnes avec altération des capacités de décision et
d'action dans les actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI,
Paris, 2013, page 38, page 46, page 48 consulté sur
http://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756
? BETTELHEIM Bruno, CARLIER Théo, Psychanalyse des
contes de fées, Éditions Robert Laffont, Paris, 2016, page
19, page 20
Revues
? WOLF Danièle, Polyhandicap, le nouveau
défi : l'accompagnement éducatif des adultes, Revue suisse
de pédagogie spécialisée, page 25, page 26
? VISSCHER Cécile, TORAS Pere, Activités
groupales et découverte du corps avec des enfants polyhandicapés,
dans une crèche spécialisée, La nouvelle revue de
l'adaptation et de la scolarisation, n°50, 2010, page 60, page 61,
page 64
Webographie
?
https://www.croix-rouge.fr/La-Croix-Rouge/Un-mouvement-international/7-principes-fondateurs
?
https://www.croix-rouge.fr/La-Croix-Rouge/Un-mouvement-international/Origines
? Interagir, dans le dictionnaire Larousse en ligne,
consulté le 14 décembre 2019 sur
https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/interagir/43600
? Participer, dans le dictionnaire Larousse en ligne,
consulté le 14 décembre 2019 sur
https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/participer/58375
? Prendre part à, dans le dictionnaire linternaute en
ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur
https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/prendre-part-a/
Audio-Visuels
? Alliance VITA, Comment accompagner une personne gravement
handicapée ? [Youtube], 2017, consulté sur le lien
https://www.youtube.com/watch?v=ME5bexStCCw&t=219s
Glossaire des sigles
? EEAP : établissement pour enfants et adolescents
polyhandicapés
? ESS : équipe de suivi de scolarisation
? CDAPH : Commission Départementale pour l'Autonomie des
Personnes Handicapées
* 1 Dispositif permettant
d'apporter un soutien matériel, éducatif et psychologique aux
majeurs âgés de moins de 21 ans confrontés à des
difficultés familiales, sociales et éducatives susceptibles de
compromettre gravement leur équilibre.
* 2 WOLF Danièle,
Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des
adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée, page
25
* 3
https://www.croix-rouge.fr/La-Croix-Rouge/Un-mouvement-international/7-principes-fondateurs
* 4
https://www.croix-rouge.fr/La-Croix-Rouge/Un-mouvement-international/7-principes-fondateurs
* 5 Méthode de relaxation
par la stimulation sensorielle
* 6 Atelier proposant divers
jeux ou activités afin de travailler le développement sensoriel,
moteur psycho-affectif et/ou social d'un enfant
* 7 Il s'agit d'une piscine
adaptée au handicap et sécurisée pour travailler la
motricité, le tonus musculaire et apporter un moment de détente
aux personnes accompagnées
* 8
http://www.lesouriredalexis.com/pages/l-arthrodese.html
* 9 DALLA PIAZZA Serge, GODFROID
Bénédicte, La personne polyhandicapée: son
évaluation et son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 17
* 10 Utilisation d'images
représentant des objets, personnes connues de la personne dans le but de
communiquer.
* 11 VISSCHER Cécile,
TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec
des enfants polyhandicapés, dans une crèche
spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la
scolarisation, n°50, 2010, page 60
* 12 VISSCHER Cécile,
TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec
des enfants polyhandicapés, dans une crèche
spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la
scolarisation, n°50, 2010, page 64
* 13 Dalla Piazza, S.,
Godfroid, B., La personne polyhandicapée: son évaluation et
son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 29
* 14 WOLF Danièle,
Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des
adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée
* 15 Cité par VISSCHER
Cécile, TORAS Pere, dans Activité groupales et
découverte du corps avec des enfants polyhandicapés, dans une
crèche spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et
de la scolarisation, n°50, 2010, page 60
* 16 VISSCHER Cécile,
TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec
des enfants polyhandicapés, dans une crèche
spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la
scolarisation, n°50, 2010, page 64
* 17 VISSCHER Cécile,
TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec
des enfants polyhandicapés, dans une crèche
spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la
scolarisation, n°50, 2010 page 61
* 18 Dalla Piazza, S.,
Godfroid, B., La personne polyhandicapée: son évaluation et
son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 112
* 19 Interagir, dans le
dictionnaire Larousse en ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur
https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/interagir/43600
* 20 Participer, dans le
dictionnaire Larousse en ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur
https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/participer/58375
* 21 Prendre part à,
dans le dictionnaire linternaute en ligne, consulté le 14
décembre 2019 sur
https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/prendre-part-a/
* 22 WOLF Danièle,
Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des
adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée, page 26
* 23 WOLF Danièle,
Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des
adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée, page 26
* 24 DALLA PIAZZA Serge,
GODFROID Bénédicte, La personne polyhandicapée: son
évaluation et son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 117
* 25 ASENCIO Anne-Marie,
FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe:
besoins, attentes et modes d'accompagnement des personnes avec
altération des capacités de décision et d'action dans les
actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page
46, consulté sur
http://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756
* 26 ASENCIO Anne-Marie,
FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe:
besoins, attentes et modes d'accompagnement des personnes avec
altération des capacités de décision et d'action dans les
actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page
48, consulté sur
http://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756
* 27 ASENCIO Anne-Marie,
FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe:
besoins, attentes et modes d'accompagnement des personnes avec
altération des capacités de décision et d'action dans les
actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page
38, consulté sur h
ttp://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756
* 28 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
127
* 29 VISSCHER Cécile,
TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec
des enfants polyhandicapés, dans une crèche
spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la
scolarisation, n°50, 2010, page 64
* 30 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
362
* 31Dalla Piazza, S., Godfroid,
B., La personne polyhandicapée: son évaluation et son
suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 119
* 32 WOLF Danièle,
Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des
adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée
* 33 JUZEAU Dominique, VALLEE
Louis, TISSERAND Pierre, et PERNES Philippe, Vivre et grandir
polyhandicapé, Dunod, Paris, 2010, page 21
* 34 JUZEAU Dominique, VALLEE
Louis, TISSERAND Pierre, et PERNES Philippe, Vivre et grandir
polyhandicapé, Dunod, Paris, 2010, page 91
* 35 C'est l'histoire d'un loup
garou qui vivait dans une grotte au milieu d'une forêt. Un beau jour, une
fille vint en aide au roi qui souhaitait se débarrasser du loup garou.
Celle-ci usa de sa bonne humeur pour provoquer une transformation de ce
dernier.
* 36 BETTELHEIM Bruno, CARLIER
Théo, Psychanalyse des contes de fées, Éditions
Robert Laffont, Paris, 2016, page 19
* 37 BETTELHEIM Bruno, CARLIER
Théo, Psychanalyse des contes de fées, Éditions
Robert Laffont, Paris, 2016, page 20
* 38 JUZEAU Dominique, Louis
Vallée, Pierre Tisserand, et Philippe Pernes, Vivre et grandir
polyhandicapé, Dunod, Paris, 2010 page 46
* 39 ASENCIO Anne-Marie, FIACRE
Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe: besoins,
attentes et modes d'accompagnement des personnes avec altération des
capacités de décision et d'action dans les actes essentiels de la
vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page 49 consulté sur
http://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756
* 40 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
120
* 41 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
127
* 42 Paurel
Véronique, L'enfant polyhandicapé douloureux face à
ses soignants, [Thèse], Poitiers, 2009
* 43 Citation de Korf Sausse,
cité par Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne
polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner,
Paris, Dunod, 2017, page 1039
* 44 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
361
* 45 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
361
* 46 PAUTREL Véronique,
L'enfant polyhandicapé douloureux face à ses soignants,
[Thèse], 2009, Poitier, page 256, consulté sur
http://nuxeo.edel.univ-poitiers.fr/nuxeo/site/esupversions/a48f6e65-9575-479c-aa1d-2efff494de2d
* 47 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
370
* 48 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
370
* 49Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
124
* 50 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
371
* 51 Alliance VITA, Comment
accompagner une personne gravement handicapée ? [Youtube], 2017,
consulté sur le lien
https://www.youtube.com/watch?v=ME5bexStCCw&t=219s
* 52 Camberlein Philippe,
Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La
connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page
362
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