CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE DE LA RECHERCHE
Dans ce premier chapitre, il sera question de faire un bilan
scientifique des connaissances sur le sujet et de déboucher sur le cadre
théorique propre à la recherche. Il s'agira à cet effet,
dans un premier temps, de construire la problématique en s'approchant
progressivement de l'objet de recherche et dans un second temps, de clarifier
les concepts propres au sujet. Ce travail se terminera par une revue des
connaissances sur le sujet de recherche afin de le situer dans le prolongement
de travaux précédents.
1.1. Problématique
L'éthique dans l'administration publique a, depuis bien
des décennies, engagé l'attention des institutions et agences
donatrices, celle des Etats, des fonctionnaires et des chercheurs dans divers
pays du monde. L'enjeu est la quête permanente d'une gestion performante
et transparente des affaires publiques dans une perspective d'optimisation du
développement, l'aspiration fondamentale de toute société.
En réalité, elle est devenue une préoccupation de taille,
tant pour les pays développés que pour ceux en voie de
développement. Les raisons d'un tel attachement sont multiples.
Tout d'abord, la réputation d'un gouvernement, son
succès, de même que la concrétisation de ses orientations
de développement dépendent de la conduite des fonctionnaires des
services publics dans l'accomplissement des différentes tâches et
responsabilités qui leur sont assignées. Ceci a plusieurs
implications pour le fonctionnaire qui, en dehors d'être intègre
lorsqu'il accepte un emploi public, doit comprendre et exécuter ses
tâches avec abnégation, justice et intégrité,
notamment dans ses relations avec le public. C'est dire que
l'intérêt personnel des fonctionnaires doit, en toutes
circonstances, être subordonné à l'intérêt
public et leurs activités et aspirations personnelles, assujetties aux
principes éthiques telles qu'elles ne doivent pas entacher leurs postes,
discréditer le gouvernement (Chapman 1993, Rohr, 1978, Kernaghan, 1980)
ou encore mettre l'usager en difficulté.
Ensuite, et plus important encore, un service public conforme
à l'éthique est une composante importante d'une bonne
gouvernance, une notion qui, depuis peu, est exigée par les institutions
de Bretton Woods et autres donateurs, comme condition nécessaire pour
bénéficier des prêts étrangers et de l'aide au
développement dont semble dépendre le développement des
pays du Sud. Ceci pose dès lors la probité comme une
denrée cruciale et une condition sine qua non pour disposer
d'une fonction publique performante.
Enfin, un pays dont les fonctionnaires érigent les
contre valeurs en mode de vie verra toujours son développement reporter
aux calendes grecques puisque les générations successives seront
perpétuellement exposées à la tentation d'emboiter le pas
à celles qui les ont précédées.
Or, dans les faits, qu'il s'agisse des pays
développés ou ceux en voie de développement,
l'administration publique, dans son fonctionnement au quotidien, semble
dresser le lit à une kyrielle de pratiques paradoxales aux valeurs
éthiques comme la corruption, la lourdeur administrative, d'arrogance
vis-à-vis des usagers, de gaspillage de temps et de ressources humaines
et matérielles, de services peu compétitifs, etc. Toutes ces
pratiques souvent observées à large échelle,
discréditent l'administration publique qui perd progressivement la
confiance de ses usagers/clients. Cet état de chose n'épargne
pas le Bénin dont l'administration publique est
caractérisée par les mêmes maux qui, malheureusement,
compromettent dangereusement sa performance.
En réaction à cette préoccupation
générale quant à la conduite non éthique, les
gouvernements ont conçu des mécanismes visant à promouvoir
et préserver une conduite morale de la part des fonctionnaires (Dwivedi,
1987, Caiden, 1981).
Au Bénin, la réponse se traduit par un certain
nombre de réformes que le pays a entreprises depuis les Etats
Généraux de la Fonction publique et de la Modernisation de
l'Administration de décembre 1994. De façon concrète,
d'importantes actions ont été menées et concernent entre
autre la création de la Cellule de Moralisation de la Vie Publique par
décret N° 96-579 du 19 décembre 1996, la mise en vigueur
d'un Code d'éthique et de moralisation des marchés publics par le
décret N° 99-311 du 22 Juin 1999 et, la réorganisation des
organes de contrôle et d'inspection de l'Administration publique en
République du Bénin adopté par le décret N°
2006-627 du 04 décembre 2006. C'est sans compter avec l'adoption du Plan
de Réforme et de Modernisation de l'Administration publique en Juin
1995, visant le développement d'une culture administrative
centrée sur le mérite, le service public, le travail en
équipe et le contrôle de gestion ou des résultats et, la
politique de promotion de la fonction publique professionnelle par l'outil de
la Gestion Axée sur les Résultats. Il faut également et
surtout mentionner l'élaboration depuis 2007 du Code des Valeurs et
d'Ethique de la Fonction Publique adopté par le décret
N°2008-813 du 31 décembre 2008, visant à soutenir les agents
publics dans toutes leurs activités professionnelles et à
restaurer l'image de marque de la Fonction publique béninoise. Ce code,
lancé depuis janvier 2010 a fait l'objet de vulgarisation dans plusieurs
ministères, les Institutions de l'Etat ainsi que les Chefs-lieux de
Département. On pourrait ajouter à cette liste non exhaustive, la
signature le jeudi 23 février 2012 par l'ensemble des acteurs de la vie
socio politique du Bénin à commencer par le Président de
la République, de la Charte Nationale pour la Gouvernance du
Développement du Bénin dont la convention d'adoption s'est
ténue les 03 et 04 Novembre 2011 à Cotonou. Cette charte fait la
promotion de quinze valeurs dont l'intégrité, la dignité,
le sens élevé de responsabilité, le travail,
l'excellence,...etc.
Malgré tous ces efforts et, contrairement à
toutes les attentes, le problème de l'éthique dans la fonction
publique demeure et semble même prendre de l'ampleur au fil du temps.
C'est justement cet état de chose qui justifie, entre autre,
l'intérêt porté à l'étude de cette
problématique dans l'administration publique béninoise et qui
prend pour espace empirique d'investigation, le Ministère du Travail, de
la Fonction Publique, de la Réforme Administrative et Institutionnelle
Chargé du Dialogue Social. Se fondant sur ces constats, il a paru
pertinent de poser l'interrogation suivante : Comment expliquer la
persistance des comportements non éthiques dans l'administration
publique malgré les efforts faits pour y remédier ?
En réponse à ce questionnement, deux
hypothèses auxquelles sont associées deux objectifs
spécifiques ont été formulées après mention
de l'objectif général de la recherche.
1.1.1. Hypothèses
· Les conduites non éthiques observées dans
l'administration publique sont fonction de la paupérisation des
fonctionnaires ;
· L'inefficacité des dispositifs de
sanction dans l'administration publique explique les comportements non
éthiques développés par les fonctionnaires.
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