CHAPITRE V : LE POIDS
DE LA TRADITION SUR LA FEMME MALIENNE
La société malienne se compose de
différents groupes ethniques répartis sur l'ensemble du
territoire national dont les principaux sont : les Bambaras, les
Malinkés, les Soninkés, les Sénoufos, les Dogons, les
Sonrhaïs, les Bozos, les Tamasheqs, les Peuls et les Maures. Ils sont
nomades ou sédentaires et de fait, évoluent dans trois
systèmes de production dominants à savoir l'agriculture, la
pêche et l'élevage sur lesquels viennent se greffer l'artisanat et
le commerce.
Ces groupes ethniques se caractérisent
traditionnellement par une forte hiérarchie sociale introduisant des
clivages entre d'une part les « nobles »; et d'autre part
les personnes de « castes » et les
« captifs ». Les valeurs socialement acquises sont
véhiculées en leur sein à travers une socialisation dont
les contenus et canaux d'apprentissage (rites et cérémonies,
interdits, pratiques comportementales, contes, adages et proverbes) se
transmettent entre les générations principalement à
travers l'oralité. Du fait de cette catégorisation sociale, la
femme malienne connaît une diversité de situation mettant en jeu
son niveau d'accès aux ressources, à la prise de parole et
à la décision ou encore d'opportunités économiques
et sociales, bref, à ses possibilités d'autonomisation qui lui
sont tant nécessaires pour son épanouissement. Cet état de
fait est favorisé par les pesanteurs sociales qui résultent de
nos us et coutumes, notre tradition.
I- LES OBSTACLES À
L'AUTONOMIE SOCIALE DE LA FEMME MALIENNE
La famille se présente comme l'institution de base
à partir de laquelle s'organise principalement la vie sociale et
économique. Malgré la diversité de leurs croyances et
pratiques, les ethnies partagent la spécificité de la
différenciation des rôles masculin et féminin, même
si celle-ci peut varier en intensité selon le milieu géographique
d'appartenance la catégorie socioprofessionnelle et l'âge.
Dans ces systèmes sociaux de type patriarcal, la vie
des ménages s'érige selon une culture valorisée de
subordination des femmes et de domination de l'homme.
Traditionnellement l'homme qui incarne l'autorité au
sein du ménage, instaure les règles, assure le contrôle et
la gestion des biens familiaux, décide de la répartition du
patrimoine foncier familial et en planifie l'utilisation, prend les
décisions capitales, assure la fourniture des moyens de subsistance
notamment la distribution des céréales aux membres du
ménage. La femme lui doit respect et obéissance, voire pour
certaines cultures un témoignage quotidien de gratitude.
La femme, mère et épouse a la charge sociale du
fonctionnement de la vie domestique, elle réalise les travaux
ménagers, prend soin des enfants, entretient la reproduction sociale de
la main d'oeuvre. Il lui revient, par ailleurs, de soutenir l'homme dans sa
mission sociale au niveau de la famille, en prenant en charge tout ce qui
concourt à organiser les conditions favorables à
l'accomplissement de cette mission et aussi, dans les conditions
d'incapacité (absence, maladie). Elle se substitue alors à
l'homme dans la réalisation pratique de ses prérogatives.
Les rôles sociaux sont ainsi confortés par des
stéréotypes qui en font les portraits imagés facilement
intériorisés comme étant dévolus aux hommes et aux
femmes en fonction de capacités féminines/masculines
considérées comme normales. Les stéréotypes,
richesse culturelle fièrement affichée, sont souvent confondus
à dessein ou inconsciemment avec les sources religieuses (cas de
l'excision). Ils gardent une force et un poids moral et psychologique à
travers les générations.
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