5. Du responsable sur-mesure au responsable de masse
Pour cela il faut d'abord revoir les critères
d'engagement auprès des professionnels. Dans cet objectif, un projet a
été validé lors d'une Assemblée
générale extraordinaire le 20 juin 2014, signé par
l'ensemble des membres de l'association. Le projet consiste à
séparer les membres d'ATR en deux « clubs » différents
afin de démocratiser le label pour un plus grand nombre de
professionnels du tourisme. Le premier serait pour les professionnels
souhaitant obtenir la certification ATR, et le deuxième pour les membres
non-certifiés qui souhaitent tout de même intégrer ATR.
Cela leur permettrait de se déclarer acteurs du tourisme responsable, en
mettant en place différentes actions (voyages responsables, tri des
déchets en interne, sélection de prestataires locaux) mais sans
possession du label. L'idée serait donc de faire participer un nombre
plus important d'acteurs au tourisme responsable sans avoir besoin de passer
par le processus de certification qui peut paraître trop lourd. Pour
rappel, la base de l'audit pour les TO cherchant à se faire certifier
s'effectue sur un référentiel de 25 critères
regroupés en 4 engagements91. Cette réforme
représente donc un changement conséquent puisqu'auparavant les TO
membres de l'association avaient deux ans pour se mettre aux normes du
référentiel, sous peine d'être retirés de
l'association.
91 Cf. 2.3 Label ATR : un outil de
différenciation, p.28
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Le projet ATR va encore plus loin. Julien BUOT explique qu'il
faut revoir l'intégralité de la pédagogie de l'association
suite à cette réforme : « On ne s'adressera pas de la
même manière à un voyagiste d'aventure qu'à un
opérateur de masse ». Car le but d'ATR, en
démocratisant la marque, est de s'ouvrir à tous types
d'opérateurs incluant les opérateurs de masse. Selon Julien BUOT,
le tourisme responsable ne doit pas s'adresser uniquement à des TO tels
que Comptoir des Voyages qui propose des voyages sur-mesure en individuel. Il
peut très bien s'adresser à des voyagistes de groupe en adaptant
les critères de responsabilité. M. BUOT confirme : « Par
exemple, il est possible d'engager un guide local qui mobilisera le groupe aux
valeurs responsables en leur faisant rencontrer des habitants locaux. Il suffit
simplement de s'adapter et de trouver des moyens différents selon le
type de voyage. » C'est ainsi que des géants du tourisme tels
que Club Med, Vacances Transat ou encore Kuoni s'intéressent à la
certification ATR. Ces potentiels nouveaux arrivants risquent donc de
représenter une menace directe pour des TO tels que Comptoir des
Voyages, Nomade Aventure ou encore Atalante, spécialisés dans le
voyage en individuel et/ou en petit groupe et privilégiant un tourisme
en qualité plutôt qu'en quantité, et n'ayant donc pas la
même stratégie commerciale de masse. En outre, le tourisme
responsable est-il vraiment accessible à tous types d'opérateurs
? A travers cette analyse nous avons étudié le cas de l'agence
Comptoir des Voyages, spécialisée dans le voyage en individuel et
qui propose des produits basés sur un échange interculturel et un
réel souci d'équité (notamment grâce à ses
voyages accessibles). Or, comment adapter ce type de tourisme à un TO
tel que Club Med dont le nom même stipule déjà un isolement
? En effet, la marque de fabrique du TO est de proposer des voyages en clubs,
isolés de la population locale, où le client vit dans sa «
bulle » de loisir. Le seul contact avec l'habitant est celui avec le
personnel de l'établissement. Néanmoins, en reprenant le
graphique représentant les acteurs du tourisme les plus connus des
français92, on observe que Club Med est placé en
première position. Ainsi, on suppose que sa labellisation ne fera
qu'augmenter sa notoriété et renforcer son gage de qualité
auprès des
92 Cf. Annexe n°7 Classement des TO par
notoriété, p.124.
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français, représentant par conséquent un
réel danger pour des TO tels que Comptoir qui en font leur
stratégie principale.
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