UNIVERSITE DE LIMOGES
FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES DE
LIMOGES
PROGRAMME UNIVERSITE PAR SATELLITE AGENCE
UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)
MASTER 2 DROIT INTERNATIONAL ET COMPARE DE
L'ENVIRONNEMENT Formation à distance, Campus Numérique «
ENVIDROIT »
DE LA PROTECTION JURIDIQUE DES FORETS DU BURUNDI : LE CAS
DU PARC NATIONAL DE LA KIBIRA
Mémoire présenté par
Désiré UWIZEYIMANA
Sous la direction de Monsieur le Professeur KOFFI
AHADZI-NONOU
Août 2013
DEDICACE
A ma regrettée mère Antoinette MUHIMPUNDU, pour
l'éducation morale qu'elle m'a donnée et son inlassable
dévouement.
A mes frères défunts Pacifique HABONIMANA et
Egide KAREMERWA A mon fils défunt Lucky Gabriel NINAHAZA
A ma chère épouse Claudine KWIGIZE, pour avoir
su gérer avec compréhension mes fréquentes absences au
ménage et l'éducation des enfants toute seule.
A ma fille Manna Manuela IRAKUZA
A mon fils Lucky Stéphane IRISHURA
Enfin, à tous ceux qui combattent pour un environnement
sain
REMERCIEMENTS
Ce travail de recherche est le fruit d'un long parcours au
cours duquel nous avons bénéficié d'un soutien multiforme.
Qu'il nous soit alors permis d'adresser nos remerciements à toutes ces
personnes et institutions dont le concours et l'apport ont permis
l'aboutissement de ce travail, en commençant par ceux qui nous ont
assuré l'accompagnement scientifique.
Nos vifs remerciements s'adressent tout d'abord à
l'endroit de Monsieur le Professeur KOFFI AHADZI-NONOU, Directeur de ce
mémoire, pour avoir bien voulu superviser ce modeste travail. Ses sages
et pertinents conseils, sa méthode de travail et sa
disponibilité, nous ont été d'une grande utilité.
Qu'il trouve dans ce travail un hommage vivant.
Nos sincères remerciements s'adressent à tous
les Professeurs de l'Université de Limoges, particulièrement ceux
de la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de Limoges et
spécialement Messieurs les Professeurs Jean Marc LAVIEILLE et
François PELISSON, respectivement Responsable pédagogique de la
formation et Responsable de la gestion, pour leurs nombreux conseils et
encouragements.
Les mots de remerciement s'adressent aussi à tout le
personnel du Campus Numérique Francophone de Bujumbura,
particulièrement à Madame Daphrose NIYINDABA,
Animatrice-documentaliste dudit campus. Son accueil et ses services nous ont
été d'un grand intérêt académique et
scientifique.
Notre reconnaissance envers l'Institut National pour
l'Environnement et la Conservation de la Nature (INECN) à travers son
personnel est sans limite. Notre gratitude s'adresse plus
particulièrement à Messieurs Damien NINDORERA et Léonidas
NZIGIYIMPA, respectivement Conseiller juridique de l'INECN et Gestionnaire de
la Réserve Naturelle de Bururi. Que ces personnes et institutions
acceptent nos sincères remerciements. Nous ne pouvons pas passer sous
silence l'incomparable soutien moral, matériel et surtout affectif dont
nous ont comblé les personnes suivantes :
Madame Sylvie ITANGISHAKA, Docteur François
RWITEYIMANZA, Monsieur Innocent COYISHAKIYE, Monsieur Pamphile MALAYIKA,
Monsieur Vital NSHIMIRIMANA, Monsieur Liboire NDAYISUNZE et Monsieur Jean
Baptiste SAHOKWASAMA
Que ce travail soit pour eux un réel signe de
reconnaissance. Chers camarades de classe, merci à vous pour tous ces
moments agréables de partage. Que tous ceux qui nous ont aidé, de
près ou de loin, trouvent ici l'expression de nos sentiments les
meilleurs.
SIGLES ET ABREVIATIONS
ABO : Association Burundaise pour la protection des Oiseaux
AEWA : African-Eurasian Waterbird Agreement
ARCOS : Arbertine Right Conservation Society
ASBL : Association Sans But Lucratif
BOB : Bulletin Officiel du Burundi
CARPE : Programme Régional de l'Afrique Centrale pour
l'Environnement
CDB : Convention sur la Diversité Biologique
CEFDHAC : Conférence des Ecosystèmes des
Forêts Denses et Humides d'Afrique Centrale
CEPGL : Communauté Economique des Pays des
Grands-Lacs
CITES : Convention sur le commerce international des
espèces de faune et de flore
sauvages menacées d'extinction
COMIFAC : Commission des Forêts d'Afrique Centrale
DP : Diagnostic Participatif
DPAE : Directions Provinciale de l'Agriculture et de
l'Elevage
FAO : Food and Agriculture Organization of the United
Nations
FEM : Fond pour l'Environnement Mondial
FIDA : Fond International pour le Développement
Agricole
IBC : Initiative du Bassin du Congo
IBN : Initiative du Bassin du Nil
INCN : Institut National pour la Conservation de la Nature
INECN : Institut National pour l'Environnement et la
Conservation de la Nature
IRAZ : Institut de Recherche Agronomique et Zootechnique
IRScNB : Institut Royal des Sciences Naturelles de
Bruxelles
ISA : Institut Supérieur d'Agriculture
MEEATU : Ministère de l'Eau, de l'Environnement, de
l'Aménagement du Territoire et
de l'Urbanisme
ODEB : Organisation pour la Défense de l'Environnement
au Burundi
ONG : Organisation Non-Gouvernementale
OTB : Office du Thé du Burundi
OUA : Organisation de l'Unité Africaine
PACO : Programme Afrique Centrale et Occidentale
PCFN : Projet Conservation de la Forêt de Nyungwe
PNK : Parc National de la Kibira
PNN : Parc National de Nyungwe
PNUD : Programme des Nations-unies pour le
Développement
PNUE : Programme des Nations-Unies pour l'Environnement
PPP : Projet Parcs pour la Paix
RDC : République Démocratique du Congo
REGIDESO : Régie de Protection et de Distribution d'Eau
et d'Electricité, Burundi
RJE : Revue Juridique de l'Environnement
UICN : Union Internationale pour la Conservation de la
Nature
WCS : Wildlife Conservation Society
ZICO : Zones Importantes de Conservation des Oiseaux
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE vi
Ière partie : LES INSTRUMENTS JURIDIQUES REGISSANT LA
PROTECTION DU
PARC NATIONAL DE LA KIBIRA 8 CHAPITRE I : LES TEXTES DE DROIT
INTERNE DE PROTECTION DU PARC
NATIONAL DE LA KIBIRA 8
CHAPITRE 2.LES CONVENTIONS INTERNATIONALES RATIFIEES PAR LE 19
BURUNDI EN RAPPORT AVEC LA PROTECTION DU PARC NATIONAL
DE LA KIBIRA ET LEUR MISE EN OEUVRE 19
2ème Partie : LES MECANISMES INSTITUTIONNELS DE PROTECTION
DU PARC
NATIONAL DE LA KIBIRA 34 CHAPITRE 1 : LES INSTITUTIONS
INTERVENANT DANS LA CONSERVATION DU
PARC NATIONAL DE LA KIBIRA 34 CHAPITRE 2 : VERS UNE PROTECTION
EFFECTIVE DU PARC NATIONAL DE LA
KIBIRA 49
CONCLUSION GENERALE 63
INTRODUCTION GENERALE
Si l'homme s'inquiète aujourd'hui à propos de la
viabilité de sa situation socio-économique, il doit aussi
reconnaître le caractère fragile de l'environnement d'où il
tire les ressources naturelles dont il a constamment besoin. Il doit aussi
comprendre qu'il est impérieux d'assurer une gestion rationnelle des
potentialités biologiques disponibles notamment du secteur forestier, en
vue du développement socio-économique national et pour
protéger l'environnement mondial, comme l'a indiqué Dany Dietmann
: « Les feux de l'environnement planétaire clignotent à
l'orange, d'autres sont déjà passés au rouge depuis belle
lurette »1.
En effet, les ressources forestières sont
diversifiées: forêts naturelles, les plantations, les arbres hors
forêts. Ainsi, les forêts naturelles du Burundi comptent 17 aires
protégées2 ayant une superficie d'environ 166.662,85
ha soit 5,9% du total du pays.
La forêt n'est pas seulement source de production
ligneuse, créatrice de bénéfices économiques. Elle
est aussi dispensatrice des avantages multiples qui assurent la conservation du
sol et de l'eau : prévention des inondations et de glissement de
terrain, défense contre l'érosion et protection de
l'environnement. L'exploitation abusive des forêts bouleverse rapidement
l'équilibre naturel et compromet ces
bénéfices3. De ce fait, la pression sur ces
écosystèmes constitue une vraie menace à la sauvegarde de
ces ressources et de l'environnement en général.
Depuis l'époque coloniale, les pouvoirs successifs ont
pris conscience de la dégradation accélérée des
forêts naturelles. Mais, c'est avec le décret-loi n°1/6 du 3
mars 1980 portant création des parcs nationaux et des réserves
naturelles au Burundi que les lambeaux qui restaient ont été
légalement reconnus comme parcs ou réserves
naturelles4. A ce titre, le décret-loi de 1980 a permis de
démarrer les activités de création des aires
protégées sous l'autorité de l'INECN, l'organe de
création et en même temps gestionnaire des aires
protégées du Burundi. Tel fut le cas pour la forêt de la
Kibira, objet de la présente étude. C'est le même
décret-loi de 1980 qui a doté le Parc National de la Kibira du
Burundi d'un statut légal.
Actuellement, on s'accorde sur le fait que les ressources
naturelles de cette aire protégée sont menacées de
dégradation par des activités anthropiques de destruction ou de
surexploitation, qui risquent d'entraîner la disparition imminente de
beaucoup d'espèces fauniques et floristiques qui la peuplent. En effet,
une multiplicité des infractions découlant de l'occupation de la
Kibira par les parties prenantes (bandes armées, militaires,
orpailleurs, etc) s'observe chaque jour avec une ampleur d'une montée
fulgurante.
1 Dany, D., La Terre Trop belle pour mourir,
Editions L'Harmattan, Paris, 2006, p.14
2 Ces aires protégées se
répartissent en cinq réserves naturelles forestières, deux
parcs nationaux, trois monuments naturels, deux arboretums et cinq paysages
protégés.2
3 INECN, Concept d'éducation
environnementale au Burundi, Gitega, 1997, p.42
4 UICN/PACO. (2011). Parcs et réserves du
Burundi : évaluation de l'efficacité de gestion des aires
protégées. Ouagadougou, p.11.
Le Parc National de la Kibira (PNK), une des 17 aires
protégées du Burundi, se trouve au Nord-Ouest du pays (Figure 1)
sur la crête Congo-Nil. Il se trouve à cheval sur quatre provinces
du
Pour ce faire, si l'on tient à conserver les ressources
naturelles de cet écosystème et à léguer ses
richesses aux générations futures, une conservation et une
utilisation durable s'avèrent indispensables. A travers le monde, il est
bien connu que pour être efficaces et durables, les décisions de
gestion doivent s'inscrire dans un cadre institutionnel approprié
établi et renforcé par l'autorité de la loi. On ne devrait
donc pas négliger l'importance d'identifier les mécanismes
juridiques et institutionnels pour faire face aux différents dangers sur
les ressources biologiques en particulier les forêts et en vue d'assurer
la protection de ces patrimoines naturels en perpétuelle
dégradation. C'est donc dans ce contexte que nous avons voulu savoir
l'importance ou le rôle joué par les règles de droit,
justement, dans cette politique de la protection des forêts du Burundi,
tout en accordant un accent particulier au Parc National de la Kibira du
Burundi (PNK) . Ainsi, le thème de notre analyse est formulé de
la manière suivante : « De la protection juridique des
forêts du Burundi : Cas du Parc National de la Kibira »
1. Intérêt du sujet
Notre sujet de recherche présente un
intérêt sur trois plans: intérêts personnel,
écologique, académique et scientifique.
? Sur le plan personnel, vu le rôle que joue
cette aire protégée sur le plan tant écologique
que socioéconomique, l'étude de la protection
juridique du Parc National de la Kibira nous est d'un grand
intérêt particulier. En effet, le rythme avec lequel se
dégrade le Parc National de la Kibira est préoccupant si bien que
nous avons voulu comprendre davantage les mécanismes légaux et
institutionnels de la protection de ce patrimoine naturel et analyser les
réformes normatives et institutionnelles qui sont susceptibles
d'être entreprises pour sauver sa précieuse diversité
biologique.
? Sur le plan écologique, les défenseurs de
l'environnement ont un intérêt à connaître
l'état d'avancement du développement de la législation
tant nationale que conventionnelle fondée sur la conservation et la
protection des aires protégées en général, et en
particulier le Parc National de la Kibira. En effet, c'est au niveau de la
région de la Kibira que le Burundi enregistre une plus forte
pluviosité dans toutes les régions environnantes, en particulier
pour la plaine de l'Imbo et les plateaux situés en contrebas, pour
lesquels ce milieu protégé sert de régulateur des eaux.
Ces conditions particulières créent par ailleurs les bases d'une
grande richesse en flore et en faune.
? Sur le plan académique et scientifique,
ce travail servira de document de base pour les
futurs chercheurs qui traiteront de la même question
que nous et qui voudront nous emboiter le pas dans la préservation de
cet écosystème naturel. A ce titre, l'intérêt de la
conservation de ses ressources naturelles pour les générations
présentes et futures est donc indéniable.
2. Présentation générale du Parc
National de la Kibira
pays qui sont du Sud au Nord : Muramvya, Bubanza, Kayanza et
Cibitoke. Ce massif forestier s'étend sur une longueur de 80 km et
environ 8km de large et couvre une superficie de 40.000 ha, soit 1,4% de la
superficie du pays5. Le Parc National de la Kibira dont l'altitude
varie entre 1600 à 2666m6, est subdivisé en 4 secteurs
qui sont:
- Secteur Teza avec 5794 ha, localisé à
l'extrême sud en province Muramvya;
- Secteur Musigati avec 15424 ha, situé entre le
piedmont Nord du Mont Teza et le col de la Gitenge en province Bubanza ;
- Secteur Rwegura avec 12423 ha, situé entre le col de
la Gitenge et la frontière rwandaise en province de Kayanza;
- Secteur Mabayi avec 359 ha, localisé à
l'extrême nord.
Il est essentiellement constitué de forêt
ombrophile de montagne (Figure 2). C'est une zone bien arrosée avec une
pluviométrie moyenne annuelle de l'ordre de 1 700 à 2 000 mm. Il
abrite, en effet, la plupart des sources hydriques du pays et agit comme
régulateur hydrologique et climatique pour ses alentours et la plaine de
l'Imbo. Ces conditions particulières créent par ailleurs les
bases d'une grande richesse en flore et en faune.
Selon NZIGIDAHERA, la diversité floristique du PNK est
remarquable, elle se compose de plus 644 espèces
végétales, déjà inventoriées et plusieurs
ressources biologiques constamment exploitées par les communautés
locales7.
Figure 1: Carte de la République du Figure 2 :
Forêt ombrophile de la Kibira
Burundi : localisation de la forêt de
Kibira
5UICN/PACO. (2011). Op.cit., p.12.
6 WIBEREHO, W., HABONIMANA, B. et NZIGIDAHERA, B.,
Impacts des mesures de protection sur la physionomie de la
végétation du Parc National de la Kibira à Bugarama.
Bulletin scientifique de l'INECN, 2010, n°8: 35-43.
7 NZIGIDAHERA, B., Analyse de la
diversité biologique végétale nationale et identification
des priorités pour sa conservation. PNUD/INECN, Bujumbura, 2000,
p.8.
Situé au centre du Rift Albertin, le PNK fait
également partie d'un réseau transfrontalier d'aires
protégées absolument uniques au monde qui s'étend sur les
territoires du Burundi, du Rwanda, de la République Démocratique
du Congo, de la Tanzanie et de l'Ouganda. La région abrite une
diversité biologique extraordinaire, avec un grand nombre
d'espèces fauniques et floristiques endémiques. Le bloc forestier
du massif de Nyungwe-Kibira constitue enfin un cas intéressant de
collaboration transfrontalière entre les autorités des deux parcs
nationaux qui forment le paysage Nyungwe-Kibira.
Au point de vue socio-économique, le parc est source de
multiples produits ligneux et non ligneux pour les populations riveraines.
Constituant un réservoir d'eau et donc d'énergie potentielle, le
rôle essentiel de la forêt de la Kibira se remarque surtout
à travers la production d'électricité et dans le
développement rural : des barrages hydroélectriques sont
installés sur les rivières qui prennent leur source dans cet
écosystème naturel. Ainsi, c'est dans le Parc National de la
Kibira à Rwegura que se trouve le plus grand barrage
hydroélectrique du Burundi sur la rivière Gitenge. Ce barrage
produit 50 % de la consommation du pays en
électricité8. De plus, le Parc National de la Kibira
est à proximité de grandes étendues de plantations de
thé du pays, le thé étant avec le café, l'une des
deux principales cultures d'exportation. Aussi, c'est la forêt du Parc
National de la Kibira qui protège le Lac Tanganyika contre la pollution,
ce lac constituant la source d'eau potable pour la population de la capitale
Bujumbura et la réserve de poissons pour tout le pays, une richesse de
biodiversité unique au monde. Malgré sa richesse exceptionnelle
en termes de biodiversité, comme pour la plupart des aires
protégées du pays, le PNK est confronté à un grand
nombre de menaces qui trouvent leur origine dans la pression humaine qui
s'exerce sur tout le parc, avec pour conséquences la réduction de
la végétation forestière et la disparition de certaines
espèces. Les pressions anthropiques les plus importantes sont les
suivantes: les défrichements, l'exploitation anarchique des ressources
végétales et les feux de brousse.
Sur le plan légal et institutionnel, la Kibira a
été considérée comme parc national dès la
promulgation du décret-loi n° 1/6 du 3 mars 1980 portant
création des parcs et des réserves naturelles. Ce texte de loi
déterminait le régime juridique des aires
protégées. L'organe d'aménagement et de gestion de ces
aires protégées a été créé à
la même date par le décret n°100/147 portant création
de l'Institut National pour la Conservation de la Nature (INCN) et placé
sous l'autorité directe de la Présidence de la République
du Burundi. Cette institution fut restructurée en 1989 pour devenir
l'Institut National pour l'Environnement et la Conservation de la Nature
(INECN), qui a été par la suite placé sous
l'autorité du Ministère ayant l'environnement dans ses
attributions. Enfin en 2000, le PNK reçoit son statut juridique à
travers le décret n°100/007 du 25 janvier 2000 portant
délimitation d'un Parc et de quatre réserves. Le
décret-loi
8 INECN, Plan d'Aménagement et de Gestion
du Parc National de la Kibira, Gitega, Burundi, 2009, p.14.
du 3 mars 1980 a été révisé par la
loi n°1/10 du 30 mai 2011 portant création et gestion des aires
protégées au Burundi qui régit actuellement les aires
protégées du Burundi.
De ce qui précède, il ressort que
l'intérêt de la protection du Parc National de la Kibira au moyen
du droit et par des structures concernées témoigne de son
importance tant sur le plan national qu'international.
3. Clarification conceptuelle
Il s'agit ici de préciser le contenu des concepts
« parc » et « protection » afin d'en
saisir la portée réelle dans le cadre de cette étude. Ces
termes doivent être entendus de manière large. D'après le
dictionnaire Petit Larousse, un « parc» est un « terrain
boisé enclos, assez vaste, ménagé pour l'agrément,
la promenade, ou servant de réserve de gibier »9.
Selon toujours le même dictionnaire, l'expression « parc
national » se définit comme étant « une vaste
étendue du territoire à l'intérieur de laquelle la faune,
la flore et le milieu naturel en général sont
protégés de l'action destructrice de l'homme
»10.
A analyser l'acception du concept «parc national
» fournie par ce dictionnaire, elle répond aux critères
de classement des aires protégées définis par l'Union
Mondiale pour la Nature (UICN). En effet, les aires protégées du
Burundi sont réparties en quatre catégories de
l'UICN11.Par ailleurs, notre zone d'étude (le PNK) est
reprise dans la catégorie II comprenant des aires
protégées gérées principalement dans le but de
protéger les écosystèmes et à des fins
récréatives. Le Parc National de la Kibira est effectivement une
aire protégée de la catégorie II de l'UICN «parc
national», défini comme « une zone naturelle, terrestre ou
marine, désignée :
a) pour protéger l'intégrité
écologique dans un ou plusieurs écosystèmes pour le bien
des générations actuelles et futures ;
b) pour exclure toute exploitation ou occupation
incompatible avec les objectifs de la désignation ;
c) pour offrir des possibilités de visite,
à des fins scientifiques, éducatives, spirituelles,
récréatives ou touristiques, tout en respectant le milieu naturel
et la culture des communautés locales »12.
Cette définition rejoint le contenu de l'article 1,
point 16, de la loi n°1/10 du 30 mai 2011 portant création et
gestion des aires protégées du Burundi. Ainsi, le PNK est donc
saisi comme une aire
9 Petit Larousse illustré, 2008, p.742.
10 Ibidem.
11 Dudley, N. (Éditeur), Lignes
directrices pour les catégories de gestion aux aires
protégées, Gland, Suisse, UICN, 2008, p.13.
12 Dudley, N., op .cit., p.19.
protégée, administrée principalement dans
le but de préserver les écosystèmes et aux fins de
récréation13.
S'agissant de la protection, elle est définie dans le
dictionnaire Petit Larousse illustré comme l'action de
protéger14. La protection
de l'environnement consiste à prendre toutes mesures utiles afin de
préserver ou défendre l'environnement des dangers qui le
menacent15. La protection juridique consisterait alors en des
mesures organisées par le droit afin de préserver ou
défendre l'environnement des dangers qui le menacent, protection qui ne
saurait se faire sans prévention et encore moins sans
répression.
Soulignons en outre que la protection ne signifie pas la
non-utilisation des ressources environnementales, mais plutôt leur
utilisation durable, de telle sorte qu'elles profitent aux
générations présentes sans compromettre les besoins des
générations futures. Précisons que notre sujet
d'étude consiste en une protection juridique des forêts en ce qui
concerne particulièrement le Parc National de la Kibira.
4. Formulation de la problématique
L'intérêt pour la conservation de la nature s'est
manifesté depuis belle lurette au Burundi. De source orale, on raconte
que déjà au début du 20ème
siècle, le roi MWEZI GISABO (1852-1908) avait refusé à ses
troupes de brûler la forêt où s'était
installée l'armée rebelle de son gendre qui combattait
l'autorité royale. Ce roi disait que " la forêt de la Kibira
constitue le trait d'union entre le ciel et la terre, personne n'a le droit de
le faire disparaître "16. La sauvegarde des aires
protégées s'est poursuivie à l'époque coloniale et
elle a été renforcée dans les années 80 avec la
création de l'Institut National pour l'Environnement et la Conservation
de la Nature (INECN), un organe d'aménagement et de gestion des 17 aires
protégées dont dispose le Burundi. Quant au PNK, comme
écosystème naturel le plus important du Burundi, il assure la
conservation des milliers d'espèces de faune et de flore très
diversifiées. Ce massif forestier est le château d'eau du Burundi,
jouant ainsi un rôle fondamental sur le plan écologique et
socio-économique.
En conséquence, le pays s'est doté des
mécanismes aussi bien juridiques qu'institutionnels pour assurer la
protection des ressources naturelles de cette aire protégée. Sur
le plan national, des lois en la matière existent. Le Burundi a
également adhéré à nombre de conventions et
réglementations internationales ayant trait à la protection de
cette forêt naturelle. En dépit des moyens juridiques et
institutionnels importants qui régissent cette aire
protégée, ses ressources
13 INECN, Rapport d'étude sur les modes
de gouvernance et les catégories d'aires protégées au
Burundi, Octobre 2008, p.18.
14 Petit Larousse illustré, op.cit.,
p.829.
15 MENGANG MEWONDO J., La conservation des
écosystèmes et la biodiversité au Cameroun, Moabi
n°8, juin 1999, p.29.
16 INECN, Stratégie Nationale et Plan
d'Action en matière de diversité biologique, Bujumbura,
2000, p.55
naturelles sont menacées d'épuisement. A
l'égard de ce danger imminent, quelques questions essentielles se posent
à savoir :
- Face aux différentes menaces subies par le Parc
National de la Kibira, les mécanismes juridiques de sa protection dont
dispose le pays sont-ils efficaces ?
- Les institutions de protection du Parc National de la Kibira
permettent-elles une conservation et une utilisation durable de ses ressources
naturelles ?
5. Justification et annonce du plan
Hormis l'introduction et la conclusion générale,
notre travail est subdivisé en deux grandes parties comportant chacune
deux sections et deux paragraphes.
La première partie traite des instruments juridiques
régissant la protection du Parc National de la Kibira. Dans son premier
chapitre, il sera question d'analyser les textes de droit interne de protection
du PNK tandis que le second chapitre concernera les conventions internationales
ratifiées par le Burundi en rapport avec la protection du PNK et leur
mise en oeuvre. La deuxième a trait aux mécanismes
institutionnels de protection du Parc National de la Kibira. Il s'agit ici
d'analyser dans son premier chapitre, les institutions intervenant dans la
protection du PNK. Le deuxième chapitre concerne les stratégies
institutionnelles à mettre en oeuvre pour établir une protection
effective du PNK. Enfin, une conclusion générale couronnera ce
travail.
Ière partie : LES INSTRUMENTS JURIDIQUES REGISSANT
LA PROTECTION DU PARC NATIONAL DE LA KIBIRA
La forêt se réduit chaque année dans le
Parc National de la Kibira. Une des dix sept aires protégées du
Burundi, le Parc National de la Kibira, contient l'unique forêt
ombrophile de montagne du Burundi. Il regorge en effet d'une diversité
très riche et variée d'une valeur inestimable pour les
générations présentes et futures. Cependant, la
disparition de ses espèces en raison d'activités anthropiques se
poursuit à un rythme alarmant et si l'on tient à conserver ses
ressources naturelles et à léguer ses richesses aux
générations futures, une gestion rationnelle et durable
s'avère indispensable.
De tout temps, il est connu que pour être efficace et
durable, toute décision doit s'inscrire dans un cadre légal et
réglementaire approprié, c'est pourquoi la conservation des
ressources naturelles de cette aire protégée doit s'inscrire dans
cette logique.
Ainsi, les instruments juridiques ayant trait à la
conservation des ressources naturelles du Parc National de la Kibira se
composent de textes légaux relevant du droit positif interne (Chapitre
I) et des conventions internationales ratifiées par le Burundi (Chapitre
II).
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