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La politique chinoise de l'administration Bush après la répression place Tiananmen : l'interdépendance peut-elle apaiser les tensions politiques ? 1989-1993

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par Nicolas Le Guillou
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 1 Science Politique - Relations Internationales spécialité Sécurité & Défense 2014
  

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Chapitre 3 : La complexification des échanges

Au-delà des problématiques habituelles autour desquelles les relations bilatérales s'articulent souvent, nous allons ici traiter des enjeux alternatifs que la Chine et les Etats-Unis ont peu à peu placés au coeur de leur rapport pendant la période post-Tiananmen. L'interdépendance complexe qui se développa dans cette période fit apparaître de nouvelles facettes de la relation.

Section 1 : Les échanges touristiques, académiques et culturels

Dans un premier temps, Tiananmen affecta un autre domaine économique de la relation sino-américaine : celui des échanges touristiques. En Octobre 1989, le nombre de touristes américains était 55% inférieur au même mois de l'année précédente313. Cependant, le secteur rebondit assez vite puisqu'en mai 1990 le nombre d'Américains en Chine était aux deux tiers le même que celui de l'année passée. A la fin de l'année 1990, environ 230 000 Américains s'étaient rendus en Chine pour visiter le pays, contre 300 000 en 1989314. Dans le domaine culturel, la relation sino-américaine récupéra de Tiananmen seulement à la fin de l'année 1991. Après un déclin en 1990, le nombre de chinois participant à des échanges culturels et académiques officiels avec les Etats-Unis fut restauré315. Bien que les Etats-Unis aient suspendu leurs échanges académiques via l'arrêt temporaire des activités de la National Academy of Science et de la National Science Foundation en 1989-1990, celles-ci réactivèrent leurs programmes avec la Chine dès la fin de l'année 1990. Quoique cet aspect puisse paraître largement secondaire au regard de tout ce qui a pu être explicité précédemment, les échanges académiques participent largement de la stabilité de la relation entre deux sociétés. La meilleure connaissance de l'autre contribue en effet à briser les « préjugés destructeurs » dénoncés par Montesquieu. Pour les Américains, c'était aussi un facteur de promotion de la modernisation et des réformes en Chine. Les deux gouvernements et plus

313 HARDING Harry, A Fragile Relationship: The United States and China since 1972, op. cit. p. 286.

314 Ibid.

315 Ibid., p. 287.

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particulièrement les leaders chinois prirent conscience de l'avance des Américains dans le domaine des technologies de pointe. Pour s'en approprier la connaissance, Deng Xiaoping réalisa dès 1978 que les échanges universitaires constitueraient le vecteur de cette transmission de connaissance. 100 000 étudiants et universitaires chinois étaient ainsi venus aux Etats-Unis depuis la normalisation316. Dans une proportion beaucoup moins importante, quelques milliers d'Américains participèrent à des programmes d'échanges dans le domaine scientifique pur ou celui des sciences sociales, enseignant parfois dans des institutions chinoises. Une relation durable sino-américaine passait donc aussi par une meilleure connaissance du pays à tous les niveaux de la société.

En plus des contacts maintenus dans les hautes sphères de la politique, la reprise des échanges à des niveaux sub-gouvernementaux contribua à développer une politique chinoise américaine dotée d'une meilleure compréhension du système politique et économique chinois.

Section 2 : L'émergence de questions transnationales dans l'agenda diplomatique

Dans l'agenda diplomatique des Etats américain et chinois s'ajouta au fil de la période post-Tiananmen et plus encore par la suite, des questions transnationales d'ordre environnemental notamment. Dès le début des années 1990, les leaders chinois, portés par la volonté de regagner la reconnaissance de la communauté internationale, inscrivirent leur pays dans la construction d'un régime international de contrôle de pollution de l'air. Dans deux discours à l'Assemblée Générale des Nations Unies en Septembre 1990 puis en Septembre 1991, le ministre chinois des Affaires Etrangères Qian Qichen, souligna les ambitions de Pékin de coopérer dans le domaine environnemental. En effet, à mesure que son développement s'accéléra, la Chine prit conscience de son impact sur la pollution. En Juin 1991, Pékin accueillit une conférence ministérielle des pays en voie de développement sur les liens entre environnement et développement. En 1991, la RPC ratifia le protocole de Montréal sur la diminution de l'ozone de 1987 (les Etats-Unis le signèrent en 1993)317, en 1992 elle fut l'une des premières nations à signer la convention pour la diversité biologique, créée dans le sillage du sommet de la Terre à Rio318. Toutefois, nuançons d'emblée les positions chinoises dans ce domaine, Pékin ne s'engagea dans les traités que lorsque le coût des mesures impliquées ne portait pas préjudice à ses ambitions économiques. Parmi les autres problématiques transnationales figurent la maîtrise des armements que nous avons détaillés précédemment.

316 Ibid., p. 350.

317 LAMPTON M. David, Same Bed, Different Dreams: Managing U.S.-China Relations, 1989-2000, op. cit. p. 165.

318 Ibid.

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Section 3 : Les implications sur la relation sino-américaine

La diversification et la multiplication des chaînes de contact entre les Etats-Unis et la Chine apaisa la relation et renforça les intérêts mutuels. Alors qu'en 1977 la RPC était membre de 21 organisations internationales gouvernementales, et de 71 organisations internationales non-gouvernementales, en 1995 Pékin avait rejoint 49 OIG et 1013 ONG319. Si cette montée en puissance fulgurante pouvait susciter des inquiétudes légitimes dans le camp américain, dans le même temps, elle montrait que Pékin aspirait à jouer un rôle constructif dans le système international. Ce mouvement d'intégration chinois concourut à complexifier l'interdépendance croissante entre les deux pays : la relation sino-américaine impliquait désormais plusieurs niveaux de prises de décision sur de multiples enjeux globaux (armements, environnement, commerce, tourisme...), le tout faisant intervenir une palette d'acteurs de différente nature : touristes, étudiants, investisseurs privés américains et chinois, organisations internationales gouvernementales, non-gouvernementales, diplomates et ambassadeurs, haute sphère politique de l'Etat (contact entre le cercle restreint de l'administration Bush et les hauts dirigeants chinois), entreprises pour ne citer que les plus importants.

L'interdépendance semble donc instaurer un cadre en apparence stable et figé, favorable à l'apaisement des tensions politiques. Si cela peut être effectivement le cas dans certaines situations, l'interdépendance telle que la décrivent J. Nye et R. Keohane peut produire des configurations bilatérales asymétriques, ouvertes à la manipulation et vecteur de tensions politiques.

Titre 2 : L'apparition des premières asymétries dans la relation commerciale sino-américaine

Comme le soutient Dario Battistella, plus que l'interdépendance en elle-même, ce sont les rapports de puissance dans l'interdépendance qui intéressent J. Nye et R. Keohane. Tandis que Pékin et Washington renforçaient leurs liens d'interdépendance en s'engageant sur la voie de la coopération, simultanément, cette même interdépendance posait les jalons de la rivalité actuelle.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe