1 .3. Place de la
chèvre dans l'économie des ménages
L'importance économique des caprins en Afrique et pour
des populations les plus défavorisées est souvent sous
estimée. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette
méconnaissance : d'abord les chèvres sont difficiles
à compter car, dans les élevages traditionnels qui constituent
l'énorme majorité en Afrique, elles sont laissées en
liberté, ensuite leur commerce se fait le plus souvent à
l'intérieur de circuits informels (CTA., 2006).
Pourtant, elles sont présentes dans la vie
quotidienne : pour la consommation ménagère, pour renflouer
la caisse de menues dépenses domestiques, pour les rites coutumiers,
pour les mariages et les baptêmes, etc. Les chèvres constituent
aussi une source de plusieurs produits de valeur : en dehors de la viande
dont la consommation est très répandue, il y a bien sûr le
fumier, mais surtout le lait pour sa commercialisation et la fabrication du
fromage et leurs peaux pour l'industrie du cuir, en plaine expansion. Parmi les
espèces caprines, figure la chèvre rousse ou ``Red de
Sokoto'' dont sa rusticité (Haumesser, 1975) est un atout, dans les
pays du Sahel en particulier qui connaissent des sècheresses
successives. Elle permet de compenser les fortes mortalités et assure
ainsi au moins l'auto-renouvellement des troupeaux, même dans les
conditions les plus difficiles.
Au Niger, c'est traditionnellement les femmes qui
possèdent les chèvres qui constituent en quelque sorte leur
épargne sur pied.
1.4. Quelques aspects sur les
pâturages
Le pâturage selon sa nature est une communauté
végétale en équilibre instable sous l'influence de divers
facteurs et des interactions de divers éléments de la
stratification des végétaux en présence (Boudet, 1975).
L'étude du pâturage (Sanoussi, 2002) est d'abord
un inventaire des espèces végétales, une
appréciation de leur production potentielle en fourrage et de leur
réaction aux facteurs broutages, piétinement...
Plusieurs études ont été faites dans sur
les pâturages sahéliens. Ainsi la végétation des
parcours au Sahel se compose presque toujours des deux éléments
majeurs : une strate herbacée dominée par des plantes
annuelles, principalement des graminées, et un peuplement de plantes
ligneuses éparses, de hauteur et de phénologies variées
(Hiernaux, 2006).
Cette composition différencie la
végétation du Sahel non seulement de celle des deux zones
biogéographiques voisines (zones soudaniennes et le désert
saharien), mais aussi d'autres écosystèmes arides et
semi-arides.
Au Sahel, les nuances du régime hydrique des sols sont
à la base d'une forte différenciation des formations
végétales, en particulier de leurs composantes
pérennes : Peuplement ligneux et éventuellement strate
herbacée pérenne. En revanche, la composition des annuelles varie
largement d'une année sur l'autre en réponse à la
distribution des pluies en début des saisons pluvieuses et à son
impact sur le régime d'humidité du sol, sur le stock semencier et
la dynamique des germinations (Hiernaux, 2006)
La distribution des précipitations au cours de la
saison de pluie et leur redistribution par ruissellement à la surface
des sols sont les facteurs prépondérants de la diversité
du couvert végétal et de sa production. Les nuances du
régime hydrique des sols qui résultent de l'interaction entre la
redistribution des eaux de pluie et de la texture des sols, sont à la
base d'une forte différenciation des formations végétales,
en particulier de leur composante pérenne-arbre et arbuste-alors que la
composition des herbacées annuelles varie largement d'une année
à l'autre au gré de la distribution des pluies dans l'espace et
dans le temps et de la dynamique de stock semencier (Hiernaux, 2006).
Ainsi, à la limite des zones sahéliennes arides
et semi-arides, Casenave et Valentin (1989) notent une progression
significative de Balanites aegyptiaca au détriment des
Combrétacées. Au sud du Mauritanie, Boudet et al. (1987)
ont observé une disparition quasi-totale du peuplement ligneux sur
plateau cuirassé. Dans certains cas, les modifications de composition de
la strate ligneuse ont été mises en relation avec les
différentes contraintes du milieu, notamment la sècheresse
(Poupon, 1980), mais aussi les facteurs anthropozoogènes. Ainsi, au Nord
du Burkina Faso, qu'à l'issue d'une expérience de mise en
défens, le recouvrement du peuplement ligneux est passé de 1,5
à 9% (Carriere, 1996).
Les tendances actuelles signalées dans les
régions arides et semi-arides sont les suivants (Carriere,
1996) :
-Régression des espèces pérennes, au
profit des espèces annuelles. Dans certains cas, l'influence de
la pâture a pu être mise en évidence de façon
expérimentale
-Régression des espèces à cycle long, au
profit des plantes à cycle court. Cela peut être la
conséquence d'un accroissement de l'aridité ou d'un effet
négatif dû à la pâture pendant la période de
végétation.
- Régression des espèces fourragères, au
profit de plantes de moindre appétence. Les préférences
alimentaires sont supposées favoriser les espèces peu
consommées. En fait dans des nombreuses situations, les espèces
multipliées par le bétail ont un réel intérêt
fourrager.
Au Sahel, par exemple les herbes comme Cenchrus biflorus,
Zornia glochidiata et certains Acacia se développent avec
un fort pâturage.
-l'augmentation de
l'hétérogénéité spatiale du tapis
herbacé, avec l'apparition de structure en mosaïque, et la
spécialisation de l'habitat des espèces.
La grande différence entre les plantes pérennes
et les plantes annuelles réside dans le fait que chaque année
pendant 9-11 mois, les annuelles n'existent que sous forme des graines et de
paille tandis que les pérennes gardent une fraction de leur biomasse
vivante. Ceci est un facteur dans la stabilité des
végétations où les pérennes dominent et où
la vie actif, quoique limité, peut fournir encore de la nourriture de
qualité pour le bétail en saison sèche. Il existe deux
groupes de pérennes, notamment les arbres et arbustes d'une part et les
graminées pérennes d'autre part (Penning de
Vries, 1991).
L'élevage sahélien se base encore pour une
très grande partie sur les pâturages naturels. Le fourrage est ce
que la nature donne, presque sans aucune gestion humaine. Mais le
caractère du fourrage change, en rapport avec le bétail, d'un
endroit à l'autre et au cours des saisons. Les boeufs ont un menu
surtout basé sur des graminées, les moutons montrent une
préférence pour les herbes, les chèvres aiment les
feuilles de ligneux, et ce pâturage aérien est intensivement
exploité par les chameaux aussi. Au nord du Sahel ce sont les
graminées et les herbes annuelles qui dominent les pâturages et
ainsi les menus du bétail. Dans le sud et dans les plaines d'inondation
les graminées pérennes sont plus importantes. Dans ces
dernières zones la paille du riz et du mil peut être aussi d'une
certaine importance après les récoltes. Les ligneux prennent le
pas aux endroits relativement humides (aux endroits qui reçoivent l'eau
de ruissellement) et aux alentours des villages et de campement fixes avec un
grand cheptel (Penning de Vries, 1991).
Concernant les facteurs de dégradations des parcours
sahéliens, il y a des controverses. Certains pensent que ``c'est la
sècheresse et non le bétail qui dégrade le parcours
sahélien'' (CIPEA, 1993). Cette affirmation a provoquée,
en réponse, « une extrême consternation et une vive
inquiétude » (CIPEA, 1994). S'il est
généralement admis que la sècheresse est l'une des causes
de la dégradation des parcours, la plupart des auteurs s'accorde
à dire que l'homme y contribue également. Au centre de cette
polémique, la question a longtemps tourné autour de
l'appréciation des parcs respectifs des
facteurs « climatiques »,
et« anthropozoogénes » (Carriere,
1996). Quand à P.P.S. (Production Primaire au Sahel), elle constate que,
ce n'est pas la sècheresse, qui est le problème N°1 au
Sahel, pour la production primaire, mais la pauvreté du sol. Par suite
d'une augmentation de l'exploitation causée par des besoins croissants
de développement de l'exploitation, la zone est soumise à une
production décroissante. De plus que l'eau de pluie au Sahel n'est pas
utilisée de façon optimale pour la production
végétale, les sols étant carencés en azote et en
phosphore. C'est ainsi qu'au Sahel seulement 10% de la pluviométrie
annuelle est utilisée par les plantes alors que la production
végétale sous les mêmes conditions pluviométriques
pourrait y être quintuplé par apport d'engrais. En moyenne
seulement 75% de la pluviométrie pénètre dans le sol, le
reste ruisselle. Le ruissellement est une source importante d'eau d'abreuvement
de surface. Mais l'exploitation des pâturages aggrave le ruissellement et
la surexploitation peut causer un ruissellement excessif, qui entraine une
dégradation de l'environnement (Penning de Vries, 1991). Mais,
toujours est- il dit que l'homme est le responsable de la dégradation
des terres par ses pratiques car s'il n'intervient pas, les
éléments du climat vont s'équilibré.
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