Communication et insertion socio-professionnelle des déscolarisés en Côte d'Ivoire: cas des jeunes filles de la commune d'Abobo( Télécharger le fichier original )par N'Goumissa Marie Laure DIALLO Institut des sciences et ttechniques de la communication (ISTC) - Diplôme d'études supérieures en communication 2009 |
2.1.4 Le processus de déscolarisationLe « métier d'élève », expression couramment entendue en milieu scolaire et systématisée par Philippe PERRENOUD13(*), comprend quatre (04) points principaux : v L'assiduité : ils doivent aller à tous les cours ; v Le comportement, l'acceptation du travail demandé : ce qui pose des problèmes ; v Quand ils ont des lacunes scolaires importantes ou manquent d'attention au cours ; v Les habiletés scolaires : venir en classe avec le matériel demandé, rendre les travaux à temps, répondre en levant la main, faire les exercices demandés par l'enseignant. La majorité des adolescentes dont les trajectoires ont fait l'objet d'analyses se sont signalés par des perturbations importantes de l'ordre scolaire, menant pour plusieurs d'entre elles à un conseil de discipline et une exclusion définitive. Elles avaient également des résultats plutôt faibles à la fin de l'école élémentaire et ont vécu très difficilement les changements occasionnés par la scolarité au collège. Arrivées en sixième (6è), elles ont dû s'adapter à plusieurs enseignants alors qu'elles avaient un maître ou une maîtresse à l'école élémentaire. Les élèves en très grande difficulté scolaire ont une relation d'imbrication au savoir qui se traduit par une dépendance à la situation scolaire et à l'enseignant. Certains enseignants arrivent même à demander à des élèves de faire semblant de travailler, c'est-à-dire de rester dans la classe sans perturber le cours...S'ensuivent une escalade de sanctions, des phénomènes de stigmatisation bien connus, des exclusions par le conseil de discipline ou une mise en retrait de l'élève elle-même, par un absentéisme très important. Il faut alors rechercher la source de ce retrait dans des problématiques familiales. La jeune fille devient de plus en plus isolée et le rôle de soutien parental prend le pas sur la nécessité d'aller en classe. Ces jeunes filles peuvent être tentées de suivre le chemin de leur mère et d'avoir un enfant plus tôt que la moyenne des femmes. Cette perspective n'est pas extravagante lorsque leurs mères ont eu leurs premiers enfants vers quinze (15) ou seize (16) ans. La maternité devient alors une sorte de valeur refuge observée en milieu très défavorisé comme le dit Camille Lacoste-DUJARDIN14(*). 2.1.5 Les aspects négatifs du travail des enfants(6/7 à 15/16) ans Selon les informations recueillies de la période coloniale, a dit Ageron C.R15(*), les jeunes mais des enfants à un âge où ils devraient être à l'école, se trouvent contraints d'intégrer le monde du travail, parce qu'ils constituaient entre-autre une source de revenu supplémentaire pour leur famille. N'ayant pas d'autres alternatives, les enfants étaient livrés à toutes sortes d'activités, allant des travaux les plus ou moins tolérables aux travaux à grand risque. Dans les zones urbaines, les filles exercent beaucoup plus dans la vente de fruits et légumes, les travaux de maison, comme porteuses de charges au marché, garde-bébé, potières, tisseuses, couturières, broderie, tapissières. Lorsque le travail précoce devient la préoccupation majeure des enfants, il les privera d'une phase importante qui est l'enfance, étape qui se distingue par ses propres caractéristiques sur le plan du développement psychologique et physique. Dans la revue publiée sous la direction d'Elias MENDEELIEVICH16(*), on note que dans les conditions habituelles d'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine, quand il s'agit d'une activité à plein temps ou du moins de la principale activité dans la vie de l'enfant, le travail déclenche un ensemble de comportements et de transformations psychiques qui se traduisent par un passage brutal et prématuré, à l'état d'adulte. En contraignant le garçon, ou la fille à travailler, le milieu social les pousse à abandonner leur personnalité d'enfant, avec les impulsions, les intérêts et les problèmes propres à leur age. L'une des activités les plus caractéristiques de l'enfance est le jeu, activité spontanée, libre, purement gratuite. Le travail empêche les enfants de donner libre cours à leur goût naturel de jeu, qui s'éteint peu à peu. D'après Elias MENDEELIEVICH « le véritable jeu, fait place parfois à des jeux utilitaires : la tendance ludique, réprimée, cherche à se manifester, mais de façon masquée ; le jeu ne doit pas paraître enfantin. La fille qui travaille, n'incite pas les adultes dans les jeux dans lesquels ils peuvent se livrer, car ils mènent déjà une vie d'adulte. Chez l'enfant qui s'amuse, toutes les tendances propres au jeune âge peuvent se manifester ». En effet, si l'enfant peut fort bien accomplir les petits travaux que ses parents lui confient, travaux qui lui permettent de se sentir utile, solidaire des siens, et qui préparent son insertion dans la vie sociale, le véritable quant à lui, causera des atteintes irréversibles à sa santé, à son bien-être lui compromettant ainsi son avenir. Pour se développer harmonieusement, non seulement l'enfant ne doit pas travailler, mais aussi, il doit avoir la possibilité de jouer, se distraire sainement, ce qui va favoriser son épanouissement. Il est démontré, selon les rapports et des études, que certains enfants (filles), commencent à travailler dès l'âge de sept (07) à huit (08) ans. Ce sont des âges qui sont reconnus pour leurs profondes transformations psychiques. Or, l'enfant est déjà défavorisé intellectuellement. « Si, de surcroît, son développement psychique est entraîné, le résultat peut être catastrophique, et c'est le cas des enfants qui combinent, dès leur jeune âge, le travail et l'école. Ils finissent par quitter l'école pour intégrer le monde du travail. L'influence négative du travail précoce ne peut être écartée, bien au contraire les tendances et les besoins normaux de l'adolescence ne peuvent s'exprimer mais faisant place trop vite à une pseudo maturité, la vie psychique comme déjà soulignée se trouve durablement perturbée. Le sentiment de frustration et d'injustice de l'enfant qui sait qu'il ne parviendra pas au même point d'accomplissement que les autres et qui se sent inférieur peut entraîner des difficultés permanentes dans les relations avec autrui, voire des troubles plus ou moins graves du comportement et de la personnalité. Jointes à l'absence d'instruction et de formation, ces déficiences limitent beaucoup la contribution que l'individu peut apporter à la vie de la société. Dans certains secteurs qui échappent au regard, les enfants peuvent facilement être victimes d'exploitation, de mauvais traitements physiques, psychologiques, et même d'abus sexuels, comme c'est le cas dans la servitude pour dettes, dans les travaux domestiques, dans la vente et la traite des enfants, et dans l'exploitation sexuelle.
* 13 PERRENOUD Philippe, Métier d'élève et sens du travail scolaire, Paris : ESF, (1994), 207 p. * 14 Camille Lacoste-DUJARDIN, Des mères contre les femmes, Paris, la découverte, 1985. * 15 Ageron C R, Les algériens musulmans et la France, 1968. * 16 Mendeelievich, Revue travail des enfants, BIT, 1990, p14. |
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