INTRODUCTION GENERALE
Pratiquement éliminée d'Europe à la fin
du XIXe siècle, la torture connaît au XXIe siècle une
recrudescence et une extension géographique particulièrement
inquiétante. Au cours donc des 50 dernières années, la
lutte contre la torture est devenue un sujet de préoccupation essentiel
relevant des droits de l'homme. La Déclaration universelle des droits de
l'homme de 1948, dans son article 5, est le premier texte juridique
international où la « torture » est déclarée
illégale de manière spécifique. Le premier traité
interdisant la torture, adopté peu après, en 1950, est la
Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales (appelée aussi Convention européenne des droits de
l'homme), avec son article 3. La Convention des Nations Unies de 1984 contre la
torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
est le premier instrument international contraignant qui porte exclusivement
sur la lutte contre l'une des violations des droits de l'homme les plus graves
et les plus répandues de notre époque.
De nos jours, la plupart des traités
généraux relatifs aux droits de l'homme, adoptés à
l'échelon régional et mondial, concernent le problème de
la torture et des mauvais traitements infligés aux personnes. Ils
affirment que la torture est absolument interdite -- et même dans des
situations d'urgence ou de conflit armé, ces traités insistent
sur le fait qu'elle n'est pas permise. L'existence d'instruments
consacrés à la prévention de la torture prouve
également que les droits de l'homme s'attachent à interdire de
tels actes.
Le fait que la torture soit à maintes reprises
interdite dans les droits de l'homme ne devrait pas occulter l'importance des
contributions relevant du droit international humanitaire qui ont
été apportées dans ce domaine au cours du siècle
écoulé. Sans mentionner explicitement la « torture »,
l'article 4 du Règlement annexé aux Conventions de La Haye de
1899 et 1907 concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre dispose que
les prisonniers de guerre doivent être traités avec
humanité, le recours à la torture. L'article 3 commun aux quatre
Conventions de Genève de 1949 inclut dans la liste des règles
minimales que doivent observer toutes les parties, même dans un conflit
armé non international, une interdiction concernant « (...) les
atteintes portées à la vie et à l'intégrité
corporelle, notamment (...) les mutilations, les traitements cruels, tortures
et supplices (...) ». De même, le Protocole II additionnel aux
Conventions de Genève prohibe « (...) les atteintes portées
à la vie, à la santé et au bien-être physique ou
mental des personnes, en particulier (...) les traitements cruels tels que la
torture, les mutilations ou toutes formes de peines corporelles ». En
vertu de la IIIe Convention de Genève, les États parties et leurs
autorités sont tenus, lors de conflits armés internationaux, de
traiter les prisonniers de guerre en tout temps avec humanité et de
respecter leur personne en toutes circonstances. La IVe Convention interdit les
actes de violence et la torture contre les civils protégés en
temps de guerre. Enfin, l'article 75 du Protocole I étend cette
interdiction à toutes les personnes se trouvant dans ce genre de
situation et précise que « la torture sous toutes ses formes,
qu'elle soit physique ou mentale » est absolument prohibée.
Dans la même veine, la résolution
2002/38 de la Commission des Droits de l'homme de l'ONU reconnaît
que « Nul ne doit être soumis à la torture ou
à d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,
(...) de tels actes représentent une tentative criminelle de
détruire un être humain physiquement et psychiquement, que ne
peuvent justifier aucune circonstance, aucune idéologie ni aucun
intérêt supérieur, (...), une société qui
tolère la torture ne peut en aucun cas prétendre respecter les
droits de l'homme »1(*). De toute évidence, la torture est un
sujet qui concerne à la fois les droits de l'homme et le droit
humanitaire, les deux ensembles de normes se renforçant mutuellement.
C'est pour atteindre cet idéal d'un monde sans torture, que les Nations
Unies ont mis en place deux mécanismes : le mécanisme
préventif et le mécanisme répressif.
Ce dernier mécanisme a pour objectif
de dissuader la commission des actes de torture d'une part, et de l'autre,
punir les auteurs et leurs complices et dédommager les victimes. La
répression est donc, « l'action de sanctionner les auteurs
et les complices des violations graves des droits de
l'homme »2(*).
Dans le présent travail, il est
important de préciser le sens des termes torture et droit pénal
international.
L'article 1er de la convention
contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants définit la torture
comme : « tout acte par lequel une douleur ou des
souffrances aigües, physiques ou mentales, sont intentionnellement
infligées à une personne... ». Cette
définition regroupe à la fois torture proprement dite,
c'est-à-dire « forme aggravée de traitements
inhumains et délibérés provoquant de fort graves et
cruelles souffrances »3(*) mais aussi des « atteintes à la
dignité et à l'intégrité physique de la
personne »4(*) qu'on désigne sous l'expression de
« traitement cruel, inhumain ou
dégradant ». Cette expression renferme aussi des
humiliations graves. La torture présente plusieurs formes : elle
peut être physique ou psychologique.
Quant au droit international, il est perçu comme le
droit qui émane de la communauté internationale5(*). C'est le droit régi par
l'Organisation des Nations Unies. En matière de répression de la
torture, comme dans tout autre domaine des droits de l'homme, le droit
applicable au niveau régional ou même national, doit être
conforme au droit onusien.
Le droit international de répression de la torture peut
alors être défini comme le droit de l'O.N.U, s'inspirant de la
Charte de San Francisco de 26 Juin 1945 et de la Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme, auquel tous les autres droits : nationaux,
régionaux doivent nécessairement se conformer et s'approprier.
Ce ne sera pas la première fois qu'un travail de
recherche soit consacré à la torture. Les mémoires et
autres travaux de recherche existent déjà. Mais ils ne traitent
que des mesures préventives. En effet selon leurs analyses, en raison de
ses graves conséquences psychologiques, le mal infligé à
la victime par la torture ne saurait être réparé. La
prévention revêt donc une importance primordiale. Sur le plan des
droits de l'homme, selon l'article 2.1 de la Convention contre la torture, tout
État est tenu de « prendre des mesures législatives,
administratives, judiciaires et autres mesures efficaces pour empêcher
que des actes de torture soient commis(...) ». Ces mesures
comprennent non seulement l'interdiction sans équivoque des actes de
torture, mais aussi la formation du personnel de police et de
sécurité, l'application de directives précises concernant
le traitement des personnes privées de liberté, la mise en place
de mécanismes nationaux d'inspection et de supervision et/ou
l'introduction d'un dispositif permettant d'enquêter efficacement sur les
plaintes relatives à des mauvais traitements.
Comme l'a souligné à juste titre
l'ancien rapporteur spécial sur la torture de la Commission des droits
de l'homme des Nations Unies, Peter Kooijmans6(*), la torture n'est jamais un phénomène
isolé : « Elle ne commence pas dans les salles de torture de ce
monde. Elle commence bien avant, lorsque le respect de la dignité de
tout être humain et le droit à la reconnaissance de cette
dignité inhérente sont absents. »7(*). Par conséquent, des
mesures de sauvegarde contre la torture doivent déjà être
prévues dans le traitement des prisonniers et des autres personnes
détenues.
Depuis longtemps, le droit humanitaire
reconnaît la nécessité d'élaborer des dispositions
précises concernant le traitement des personnes privées de
liberté, et ce à titre de sauvegarde contre les mauvais
traitements. On peut considérer que les nombreuses dispositions de la
IIIe Convention de Genève, notamment celles relatives à
l'internement des prisonniers de guerre (articles 21 et suiv.) et celles
relatives aux relations entre prisonniers de guerre et autorités
(articles 78 et suiv.), constituent une codification de normes destinées
à prévenir efficacement la torture et les peines ou traitements
cruels ou inhumains pour cette catégorie de personnes
protégées. Cela vaut également pour de nombreuses
dispositions relatives au traitement des internés contenues dans la IVe
Convention de Genève.
Les violations étant souvent
dissimulées, le devoir de prévenir la torture est d'une
importance capitale. Peter Kooijmans qualifie avec justesse la torture de
violation du droit à la dignité, qui est le plus intime de tous
les droits de l'homme, étant donné qu'elle se produit dans des
lieux isolés et est souvent infligée sous le couvert de
l'anonymat par un tortionnaire qui considère la victime comme un objet.
Les visites de lieux de détention permettent d'éliminer ce
caractère d'anonymat et sont donc un moyen très efficace
d'éviter la torture. Ces visites permettent également de
déterminer les situations susceptibles d'entraîner des actes de
torture, et de prendre les mesures appropriées afin de réduire ce
risque. Le droit international humanitaire reconnaît l'utilité de
ces visites. Selon l'article 143 de la IVe Convention de Genève, les
délégués du CICR ou des Puissances protectrices «
seront autorisés à se rendre dans tous les lieux où se
trouvent des personnes protégées, notamment dans les lieux
d'internement, de détention et de travail ». En vertu de
l'article 126 de la IIIe Convention de Genève, les prisonniers de guerre
bénéficient du même droit. Dans les situations de conflit
armé non international, le CICR peut offrir ses services aux parties au
conflit et être ainsi autorisé à visiter les personnes
privées de liberté du fait de ces conflits. Le droit d'initiative
est lui aussi reconnu dans les situations de tensions et de troubles
intérieurs, quand le CICR visite des personnes détenues pour des
raisons liées à cette situation particulière,
c'est-à-dire des prisonniers «politiques» ou de
«sécurité»8(*).
Dans le cadre de leurs visites, le CICR et ses
délégués entreprennent des démarches de
caractère confidentiel auprès des autorités afin
d'améliorer la situation des détenus. En outre, il arrive souvent
que la simple présence physique de personnes extérieures au lieu
de détention empêche effectivement la torture et les mauvais
traitements et conduise à l'amélioration des conditions de
détention. L'expérience du CICR a montré que «
(...) de l'avis des détenus et même de gouvernements qui ont
choisi d'accepter les services du CICR, les visites des
délégués du CICR amènent, en général,
des résultats positifs ».
Jean-Jacques Gautier, un banquier privé
installé à Genève, a partagé cette opinion
positive. En 1977, il a fondé le Comité suisse contre la torture,
basé à Genève9(*). Il avait une vision d'avenir : il voulait
étendre à l'ensemble des prisonniers le système des
visites à caractère préventif de lieux de détention
par des experts internationaux et appliquer ainsi un instrument du droit
humanitaire au domaine de la protection des droits de l'homme.
Le moment n'était manifestement pas
encore venu pour les Nations Unies d'adopter un traité imposant de
telles visites. Aussi le Conseil de l'Europe a-t-il pris la question en main et
a adopté, en 1987, la Convention européenne pour la
prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou
dégradants. Cette Convention permet à un organe d'experts
indépendants (connu sous le nom de Comité européen pour la
prévention de la torture (CPT) d'effectuer des visites
périodiques ou ad hoc dans tous les lieux de détention sur le
territoire des États parties et de faire des recommandations
confidentielles au pays concerné, afin d'améliorer certaines
situations susceptibles d'entraîner des actes de torture et des mauvais
traitements10. Ces visites ont eu des résultats
extrêmement positifs dans la lutte contre la torture.
En même temps, l'idée de
créer un instrument de prévention efficace à
l'échelon mondial n'a pas été abandonnée. En 1991,
la Commission des droits de l'homme des Nations Unies a reçu du Costa
Rica une proposition de projet de protocole facultatif se rapportant à
la Convention contre la torture de 1984. Le projet vise à introduire un
système de visites préventives dans les lieux de détention
« en vue de renforcer, si nécessaire, la protection [... des
personnes détenues...] contre la torture et autres peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants (...) ». Si le protocole est
ratifié, ces visites seront effectuées par un sous-comité
composé d'experts indépendants. Les négociations relatives
à ce projet se poursuivent au sein du groupe de travail
créé par la Commission des droits de l'homme des Nations
Unies.
Les instruments des droits de l'homme pour la
prévention de la torture n'existeraient pas s'ils n'avaient pour
modèle le droit international humanitaire. L'expérience a
toutefois montré que la Convention européenne pour la
prévention de la torture a un champ d'application plus vaste que celui
du principe des visites du CICR aux détenus, et qu'elle a, par
conséquent, sa raison d'être. Par exemple, elle couvre toutes les
situations de détention, tandis que les visites du CICR se limitent
à des situations particulières dans le contexte des conflits
armés et de troubles accompagnés d'actes de violence.
Il faut souligner que le CICR
s'intéresse avant tout aux individus, tandis que le CPT se concentre
essentiellement sur les situations. Le CICR assure une présence à
long terme dans les lieux qu'il visite : visiter les prisonniers à
plusieurs reprises -- et, le cas échéant, leur fournir une
assistance matérielle -- est un des principes de base de son action.
D'une manière générale, les visites du CPT ne sont pas
répétées, mais elles permettent d'engager avec le
gouvernement un dialogue suivi sur les mesures visant à réduire
les risques de torture et de mauvais traitements. Par conséquent, le CPT
est concerné au premier chef par les questions relatives aux droits des
personnes placées en détention préventive (les personnes
gardées au secret, par exemple) ou par l'amélioration de
conditions de détention qui ne répondent pas aux normes
exigées11.
Tout comme pour les visites du
CICR, le travail du CPT reste confidentiel. Toutefois, l'importance
particulière accordée aux réformes explique la raison pour
laquelle les États ont jugé nécessaire de renoncer au
principe de la confidentialité absolue et d'inclure dans la Convention
européenne la possibilité de faire des déclarations
publiques si l'État partie concerné « (...) ne
coopère pas ou refuse d'améliorer la situation à la
lumière des recommandations du Comité (...) ». Si le
projet de protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la
torture entre en vigueur, l'intérêt porté aux situations et
aux réformes pourrait s'accentuer encore, en particulier parce que le
projet a été amendé au cours des négociations afin
de créer un fonds qui devrait permettre aux États dont les moyens
sont limités d'appliquer des réformes coûteuses.
En ce qui concerne la méthode
utilisée lors des visites de lieux de détention, le droit
humanitaire sert aussi d'exemple pour les instruments des droits de l'homme.
Conformément à l'article 143 de la IVe Convention de
Genève, les délégués sont autorisés à
se rendre dans tous les lieux de détention et d'internement de leur
choix et ils doivent avoir « accès à tous les locaux »
dans ces lieux. Ils doivent pouvoir s'entretenir sans témoin avec tous
les détenus qu'ils souhaitent rencontrer, sans restriction quant
à la durée et à la fréquence de ces visites. Ces
conditions doivent aussi être remplies avant que le CICR n'entreprenne
des visites sur la base de son droit d'initiative.
Ces principes fondamentaux ont été
incorporés dans la Convention européenne pour la
prévention de la torture. La Commission interaméricaine des
droits de l'homme a elle aussi le droit d'accéder aux lieux de
détention et de s'entretenir avec les détenus sans témoin;
quant aux rapporteurs spéciaux des Nations Unies, ils insistent pour
avoir les mêmes possibilités quand ils visitent des lieux de
détention. Le projet de protocole facultatif se rapportant à la
Convention contre la torture, actuellement devant la Commission des droits de
l'homme des Nations Unies, va dans le même sens, mais la disposition
prévue à cet effet n'a pas encore été
adoptée. Il faut espérer que les procédures habituelles
des mécanismes internationaux qui visitent les lieux de détention
-- procédures établies en tant que telles -- ne seront pas
menacées une fois le protocole facultatif adopté !
Partant de toutes ces analyses qui à notre avis
revêtent un sens inouï, il nous paraît tout aussi utile, sinon
plus d'aborder la question de la torture d'une façon beaucoup plus
pratique, par le biais de la répression.
L'intérêt de ce sujet réside donc en ce
que les différents mécanismes expérimentés jusque
là ne sont pas arrivés à faire reculer la pratique de la
torture10(*).
C'est pourquoi la présente étude essaiera de
vérifier l'efficacité des stratégies de répression
de ces « violations graves des droits de
l'homme »11(*) aussi bien par le juge international que le juge
interne. Car l'avènement de la Cour Pénale Internationale qui a
été salué par les militants des droits de l'homme comme
une fin à l'impunité ne résout pas le problème. La
justice internationale (même perfectionnée) restera une lourde et
coûteuse machine. Elle convient certainement au jugement de hauts
responsables de très grands crimes (planificateurs).
En revanche, elle est mal placée pour juger les agents
subalternes de ces crimes d'Etat (exécutants) et, surtout, les actes
perpétrés dans l'intérêt purement privé de
leurs auteurs12(*).
Ainsi, la torture relèvera de la compétence de
la cour si et seulement si elle est commise sur une grande
échelle13(*).
Cette précision étant faite, la
répression de la torture en droit international soulève un
certain nombre d'interrogations :
§ Comment fonctionnent les règles de la
répression de la torture ?
§ Que dire de leur efficacité ?
§ Ces règles permettent-elles de répondre
efficacement à la recrudescence des actes de torture et
barbarie ?
§ Pouvons-nous affirmer qu'avec le mécanisme
répressif actuel, l'humanité se trouve en mesure de mettre hors
d'état de nuire tous les tortionnaires ?
§ Quelles solutions peut-on envisager pour garantir
efficacement l'humanité de ces actes ignobles et humiliants ?
Toutes ces interrogations peuvent se résumer en une
seule question : comment utiliser à bon escient les instruments
relatifs à la torture pour l'éradiquer?
Pour répondre à cette question, nous avons
adopté une démarche à la fois analytique et critique sur
l'état actuel de la répression. Cette méthode nous a
amené à constater d'abord, dans la première partie un
contraste qui existe entre l'abondance de source de répression et
l'inefficacité de la répression ; ceci nous a conduit
à proposer dans la deuxième partie, des stratégies qui,
à notre avis, aideront à réprimer efficacement la
torture.
PREMIERE PARTIE :
SOURCE ABONDANTE DU DROIT ET REPRESSION INEFFICACE DE LA
TORTURE AU PLAN INTERNATIONAL
La torture et les peines et traitements cruels, inhumains ou
dégradants font partie des rares droits de l'homme qui
bénéficient d'une pluralité de sources. Grâce
à ces sources diverses et variées, l'infraction devrait
être facilement et efficacement réprimée. Mais aussi
paradoxal que cela puisse paraître, cette infraction fait partie des
violations des droits de la personne qui se commettent quotidiennement et
impunément. En réalité, les nombreuses sources dont
bénéficient la torture et les peines et traitements cruels,
inhumains ou dégradants sont inconsistantes et donc conduisent à
un résultat inefficace. De plus le caractère volontaire du droit
international conduit à restreindre le peu d'effet que comportait le
fondement répressif de ce crime par l'usage des réserves.
C'est ce double constat qui nous conduit à analyser
dans un premier chapitre le fondement répressif qui est apparemment
consistant ; ensuite les effets des réserves sur ce fondement.
CHAPITRE I :
UN FONDEMENT REPRESSIF EN REALITE INCONSISTANT
Pour mieux apprécier le fondement répressif de
la torture, il convient de conduire son étude à travers deux
points essentiels : d'une part, les instruments y relatifs, ce qui nous
amène à voir la diversité d'arsenal répressif, et
d'autre part, les institutions qui interviennent dans la répression
c'est-à-dire le régime répressif.
SECTION 1 : UNE DIVERSITE D'ARSENAL DE
REPRESSION
Plusieurs instruments relatifs aux droits de l'homme
interdisent de manière absolue la torture, peines et traitements cruels,
inhumains ou dégradants. Ces différents textes forment un
véritable arsenal qui vise à éradiquer cette violation des
droits humains.
Pour mieux appréhender cet arsenal, nous allons
étudier d'abord la convention du 10 Décembre 1984 qui a
marqué le couronnement du processus de codification en matière de
lutte contre la torture (paragraphe 1), ensuite, les autres instruments qui
prévoit et interdisent aussi la torture et autres peines et traitements
cruels, inhumains ou dégradants (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La convention contre la torture
Elle sera analysée du point de vue de son contenu et de
son effet.
A/ Du point de vue de son contenu
Analyser du point de vue de son contenu, on constate que
ladite convention définit en son article 1er, la torture mais
laisse en son paragraphe 2, une ouverture qui prendra en compte toute autre
définition qui protègera mieux contre la torture. Cette option
confirme l'inquiétude que la torture, les peines et traitements cruels,
inhumains ou dégradants peuvent être commis de différentes
manières et qu'il est impossible pour un législateur, même
le plus expérimenté, d'arriver à le prévoir
d'avance avec précision. L'évolution de la définition de
la torture le prouve bien. Nous y reviendrons.
De même, elle oblige les Etats parties à prendre
toutes les mesures pour mettre leurs populations à l'abri des actes de
torture (art 2). Au nombre de ces mesures, doit figurer en bonne place,
à notre avis, les recours utiles pour sanctionner et décourager
les auteurs potentiels de ce crime. A défaut de ces mesures, les
victimes potentielles de la torture émigrent vers les Etats où la
protection leur semble plus efficace car ils évoqueront, dans leur Etat
de destination, l'interdiction d'expulsion de l'article 3.
L'analyse du contenu de la convention onusienne montre aussi
que l'obligation est faite au juge interne d'être le premier protecteur
de ses justiciables contre la torture. Pour ce faire, il appliquera son droit
national qui doit être rendu conforme à la convention ou, à
défaut appliquer directement celle-ci (art.4 à 7, 14, 16). Nous y
reviendrons.
B/ Du point de vue de ses effets
Analyser du point de vue de son effet, on constate que la
convention contre la torture devient une simple tribune de bonnes intentions.
Nombreux sont les Etats qui ont adhéré à la convention
moins par conviction que par souci de décrocher le mérite
démocratique. On refuse à la convention d'avoir d'effet à
l'intérieur de l'Etat.
En effet, c'est la déclaration de l'article 22 qui
permet à la convention d'avoir d'effet direct à
l'intérieur de l'Etat, au profit de ses justiciables. Mais
malheureusement, cette déclaration de l'article 22 est facultative, ce
qui conduit certains Etats (malheureusement les plus nombreux) à
s'abstenir de faire cette déclaration. Ils se contentent uniquement des
rapports périodiques et dans une certaine mesure des enquêtes sur
des violations massives. Tout cela n'est pas suffisant puisqu'il
n'inquiète pas les auteurs même des actes de torture. La seule
méthode, susceptible d'intimider et de décourager directement la
commission des actes de torture, c'est la possibilité de communication
individuelle. C'est ce droit de recours individuel effectif qui peut donner de
la crédibilité à la convention, ainsi que l'explique le
professeur SUDRE : « un système de protection
des droits de l'homme n'est crédible que s'il offre aux individus des
garanties efficaces pour la protection de leurs
droits »14(*). Or, cette possibilité du droit d'action
individuelle c'est-à-dire du droit de plainte est facultative et ne lie
pas d'office les Etats parties à la convention. Ceci permet de dire que
celle-ci est un géant au pied d'argile car il suffit de s'abstenir de
faire cette déclaration de l'article 22 pour mettre quasiment à
néant tous les droits énoncés dans ce traité
international. Surtout que dans beaucoup d'Etats parties, les textes nationaux
ne sont pas rendus conformes à la convention et les juges
résistent à appliquer directement celle-ci.
Tout ceci montre que ni le Comité contre la torture -
seulement une minorité ont la possibilité de le saisir - ni les
dispositions de la convention ne profitent pas à la majorité des
victimes de la torture de par le monde. T comme pour ajouter à son
inconsistance, la convention prévoit, contrairement aux autres
instruments, que les dépenses occasionnées par les travaux du
comité sont à la charge des Etats parties15(*). Ce mode de financement peut
décourager les Etats à être partie et peut même
bloquer le bon fonctionnement de l'organe chargé de superviser son
application, ainsi que le constate A.
Dormenval : « Tout mécanisme autofinancé
risque de se trouver un jour paralysé par un Etat, surtout gros
distributeur, peu désireux de voir sa situation
examinée »16(*). Dans le cas de la torture, on n'en est pas encore
arrivé là, mais il est fort probable qu'on en arrive dans
l'avenir.
En dehors de la convention contre la torture, peines et
traitements cruels, inhumains ou dégradants, nombreux sont les
instruments qui ont prévu dans leurs dispositions, l'interdiction et la
répression de la torture et les traitements cruels, inhumains ou
dégradants. Ainsi, les dispositions de la convention ne profitent pas
à la majorité des victimes de la torture de par le monde.
Paragraphe 2 : Les autres instruments de
répression de la torture
Les personnes qui prétendent être victime de
torture peuvent se prévaloir de conventions universelles ou de
convention régionales.
A/ Au niveau universel
Au niveau universel, en dehors de la convention contre la
torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,
les personnes qui prétendent être victimes de la torture peuvent
se prévaloir de l'article 7 du pacte international relatif aux droits
civils et politiques. Il énonce que : « Nul ne sera
soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants. En particulier, il est interdit de soumettre
une personne sans son libre consentement à une expérience
médicale ou scientifique. ». Les pactes de 1966 sont des
conventions internationales avec effet juridique contraignant pour les
Etats ; et les particuliers peuvent s'en prévaloir.
Au-dessus de tous ces instruments, il y a évidemment la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme qui énonce en son
article 5 que : « nul ne sera soumis à la torture ni
à des peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants ». Mais contrairement aux pactes de 1966, la
DUDH n'a pas d'effet juridique contraignant.
Nous avons exclu de notre travail, les conventions de la Haye
et de Genève et leurs protocoles additionnels qui prescrivent aussi
l'usage de la torture. Mais contrairement au pacte international relatif aux
droits civils et politiques, les actes de torture dans ce cas constituent une
violation aux droits et coutumes de guerre qui tombent sous la
compétence de la cour pénale internationale avec des
qualifications précises17(*) ; ce qui ne relève pas de notre
étude.
Avec l'article 7 du pacte, la protection contre la torture est
beaucoup plus large. En effet, un Etat qui n,'est pas partie à la
convention de 1984 ou qui n'a pas reconnu la compétence du comité
contre la torture à recevoir des communications individuelles, peut se
faire condamner par le comité des droits de l'homme s'il est partie au
pacte et qu'il a violé son obligation de l'article 7. Le CDH est
l'organe qui surveille le respect des obligations prescrites par le pacte et
condamne les violations si l'Etat est partie à son premier protocole
facultatif.
Les articles 6 et 10 du pacte renforcent la protection contre
la torture.
En tout état de cause, le comité des droits de
l'homme ne peut recevoir que des communications intéressant un Etat
partie à la fois au pacte et à son protocole facultatif.
Une fois encore, une tranche non négligeable de
victimes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants se trouve exclue du droit de recours devant le comité
des droits de l'homme.
Qu'en est-il des conventions régionales ?
B/ Au niveau régional
Au niveau régional, l'analyse du droit international
des droits de l'homme conduit à constater que tous les continents
disposent aujourd'hui d'une convention régionale relative aux droits de
l'homme. Chacune de ces conventions prescrit, à travers ses
dispositions, l'interdiction de la torture ou des peines et traitements cruels,
inhumains ou dégradants. Ainsi on pourrait citer entre autre :
Ø La convention de sauvegarde des droits de l'homme et
des libertés
fondamentales, plus connue sous le nom de convention
européenne des droits de l'homme du 4 novembre 1950 à Rome
contient le mécanisme le plus perfectionné de garantie des droits
de l'homme18(*). La
Convention inscrit en son art 3 que : « Nul ne peut
être soumis à la torture ni à des peines ou traitements
inhumains ou dégradants. ». Une disposition absolue et
indérogeable qui a donné des interprétations bien larges
par la Cour Européenne des Droits de l'homme au profit des victimes.
Nous reviendrons sur les différentes interprétations
évolutives faites par la CEDH de ce texte.
Ø La convention américaine relative aux droits
de l'homme du 22 novembre
1969 à San José proscrit la torture sous toutes
ses formes en son article 5, intitulé, `'droit à
l'intégrité de la personne''. Il
énonce : «
1. Toute personne a droit au respect de son
intégrité physique, psychique et morale
2. Nul ne peut être soumis à la torture ni
à des peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants. Toute personne
privée de sa liberté sera traitée avec le respect dû
à la dignité inhérente à la personne
humaine.
3. La peine est personnelle et ne peut frapper que le
délinquant.
4. Les prévenus doivent être, sauf dans des
circonstances exceptionnelles
séparées des condamnés, et soumis
à un régime approprié à leur condition de personnes
non condamnées.
5. Lorsque le prévenu est dans sa minorité,
il doit être séparé des adultes
et traduit, avec la célérité
possible, devant un tribunal spécialisé où il recevra un
traitement approprié à son statut.
6. Les peines privatives de liberté doivent avoir
pour but essentiel
l'amendement et le reclassement social des
condamnés ».
La cour interaméricaine des droits de l'homme
sanctionne les violations de ce texte.
Ø En Afrique, c'est la charte africaine des droits de
l'homme et des peuples qui
interdit la pratique de la torture sous toutes ses formes en
son article 5. « Tout individu a droit au respect de la
dignité inhérente à la personne humaine et à la
reconnaissance de sa personnalité juridique. Toutes formes
d'exploitation et d'avilissement de l'homme notamment l'esclavage, la traite
des personnes, la torture physique ou morale, et les peines ou les traitements
cruels inhumains ou dégradants sont interdits ». Ainsi
qu'on le constate, ce texte reconnaît en des termes clairs et sans aucune
restriction le respect de la dignité humaine, sous toutes ses formes.
Ø Enfin la charte arabe du 15 septembre 199419(*) des droits de l'homme Interdit
aussi la torture en son article 13 :
a. « Les Etats partie protègent toute
personne résidant sur leur territoire
contre toute forme de torture morale ou physique contre
tout traitement dégradant ou inhumain et ils prennent toutes les mesures
effectives. Toute pratique de ce genre ou toute participation est
considérée comme une infraction punissable.
b. Il est interdit de soumettre une personne à des
expériences médicales
ou scientifique sans son consentement »
Les textes à base desquels on pouvait réprimer
la torture, les peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants,
sont ainsi qu'on vient de le voir, facultatifs en partie et ne s'imposent pas
d'office. Ceci explique en partie la défaillance qu'on observe dans le
mécanisme répressif du crime.
Qu'en est-il alors des organes créés pour
superviser l'application de ces instruments et des organes qui sont
susceptibles de requérir leur respect ? C'est ce qui fera l'objet
de la deuxième subdivision de ce chapitre.
SECTION 2 : Un régime répressif
virtuel de la torture
Pour mieux appréhender l'état du régime
répressif, nous allons l'analyser à travers les institutions qui
y interviennent et les règles de procédure que doit respecter la
saisine de ces organes.
Paragraphe 1 : L'organisation institutionnelle
En dehors du comité contre la torture qui est l'organe
principal et direct en matière de torture, beaucoup d'autres
institutions interviennent dans la lutte contre la torture.
A/Le comité contre la torture
L'analyse du droit international des droits de l'homme conduit
à constater que la répression des actes de torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants met en exergue le
comité contre la torture. Il est institué par l'article 17 de la
convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants.
Il assure principalement trois fonctions : L'examen des
rapports que produisent périodiquement les Etats parties sur leur
conformité avec la convention, l'étude des plaintes
interétatiques et l'examen des communications émanant des
particuliers.
Cette dernière fonction est fondamentale puisqu'elle
permet aux victimes de mettre en oeuvre leurs droits à elles reconnus
par la convention. Mais elle est, à l'instar de la deuxième
fonction, facultative à l'égard des Etats puisqu'on peut
être partie au pacte mais refuser d'être soumis à ce
contrôle du comité. C'est pourquoi dans la majorité des
cas, le comité assure uniquement l'examen des rapports
périodiques que bon nombre d'Etats parties ne s'empressent pas
d'ailleurs à faire.
B/Les autres institutions
Il ne sera ici question du comité des droits de
l'homme, de la cour européenne des droits de l'homme, de la cour
américaine relative aux droits de l'homme et des peuples et bien entendu
des juridictions nationales puisqu'en matière des droits de l'homme,
elles appliquent soit directement le droit international soit le droit
national, et celui-ci doit être conforme aux principes internationaux de
protection des droits de l'homme.
Comme le comité contre la torture, le comité des
droits de l'homme assure aussi trois fonctions principales :
Il s'agit de l'examen des rapports périodiques des
Etats parties de l'étude des plaintes interétatiques et de
l'examen des communications émanent des particuliers.
Les deux dernières fonctions sont facultatives pour les
Etats. On est alors en face d'un obstacle similaire à celui du
comité contre la torture. Mais dans le cas du comité des droits
de l'homme, le nombre d'Etats parties au premier protocole facultatif au pacte
est plus élevé que celui des Etats ayant fait la
déclaration de l'article 22 de la convention du 10 Décembre 1984.
Ce qui permet de constater que la protection devant le comité des droits
de l'homme est plus large que devant le CCT. Mais toujours est-il que ce ne
sont pas toutes les victimes potentielles du monde qui
bénéficient de la garantie du CDH.
Au niveau régional, nous avons la cour
européenne des droits de l'homme qui interdit en son article 3 la
torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Cette cour régionale se veut la plus active en matière des droits
de l'homme. Elle a en effet contribué à faire
évoluer la définition de la torture pour mieux la
réprimer. Mais sa compétence se limite au niveau du conseil de
l'Europe. Il serait souhaitable qu'une action pareille à la cour de
Strasbourg s'installe dans tous les quatre coins du monde pour faire reculer
effectivement la torture et les autres violations graves des droits de la
personne.
Nous avons la cour interaméricaine qui oeuvre sur le
continent américain.
Sur le continent africain, nous avons la commission africaine
des droits de l'homme et des peuples, instituée par la charte. Elle
n'est pas une juridiction. Contrairement aux mécanismes institutionnels
européen et américain, le système de sauvegarde de la
charte africaine ne repose jusque-là que sur un organe de conciliation,
dépourvu de garantie juridictionnelle. Il présente donc une
lacune et une faiblesse qui réduisent considérablement son
efficacité et ses chances de succès. Ainsi BA Abdoul et autres
ont pu écrire que : «sa mission est fort
délicate dans la mesure où elle se trouve privée de tout
pouvoir juridictionnel, qui seul pourrait lui permettre de remplir ses
fonctions avec plus d'indépendance et sans trop de
difficultés »20(*).
La présence des juridictions nationales parmi les
institutions chargées de réprimer les actes de torture en droit
international peut surprendre. Mais en réalité, elles devraient
être classées au premier rang. En effet, le protecteur premier des
droits de l'homme est le juge national. Pour ce faire, il ne peut pas se
réfugier derrière l'argument selon lequel le juge national
applique son droit positif ; puisqu'en matière des droits de
l'homme, c'est la charte de l'ONU et la DUDH qui doivent être des
références à tout juge, international, comme national,
chargé de protéger et de garantir ces droits. Ce qui veut dire
que tout droit, régional ou national, relatif aux droits de l'homme,
à moins d'être des instruments rétrogrades, doivent se
conformer aux principes universellement acceptent et régis par la charte
de l'ONU et la DUDH.
Mais à voir la pratique quotidienne dans les pays, le
constat est amer. Certains juges appliquent des textes qui n'ont rien à
voir avec la réalité internationale des droits de l'homme, ou
refusent ou résistent à faire bénéficier ses
justiciables compatriotes des avancées internationales des droit de
l'homme21(*).
Quand on a la possibilité de saisir ces
différents organes, quelle procédure doit-on suivre pour
espérer que sa plainte sera effectivement examinée ?
Paragraphe 2 : les règles de la
procédure
Les règles de la procédure ne sont pas toujours
identiques quand il s'agit de s'adresser à un juge national ou à
un juge international.
Il convient d'étudier d'une part l'action devant les
juridictions nationales et l'action devant les juridictions internationales
d'autre part.
A/La compétence des juridictions nationales
Les juridictions nationales sont compétentes pour
connaître des actions intentées par leurs justiciables ; mais
il arrive que certains justiciables soient traduits devant les tribunaux avec
qui ils n'ont aucun lien.
1-Les juges internes et la répression de la torture
Le mode de saisine du juge interne varie d'un Etat à un
autre puisqu'il obéit au droit national de procédure. Il faut
dire qu'en matière de torture comme en matière des droits de
l'homme en général, le juge constitutionnel intervient de plus en
plus22(*).
En ce qui concerne la qualification des faits, elle ne devrait
pas poser problème puisque la convention du 10 Décembre 1984
exige des Etats parties de rendre conforme leur droit pénal à la
convention contre la torture23(*).
En tout état de cause le juge interne devrait
être disponible à toutes allégations des personnes qui
s'estiment victimes de torture dans les conditions prescrites par l'article 5
de la convention.
2-La compétence universelle des juridictions
nationales
La compétence universelle en matière de torture
plus qu'en tout autre cas de violations des droits de l'homme est une
institution qui tend à parfaire la répression de ces actes.
C'est un mécanisme qui vise par exemple qu'un auteur
présumé d'actes de torture qui ne serait pas poursuivi dans son
propre pays24(*), soit
parce qu'un changement politique est intervenu et que les nouvelles
autorités ne cherchent pas à poursuivre les dirigeants
précédents, puissent être jugé malgré cela
dans un autre pays25(*).
Ainsi la compétence pénale d'une juridiction nationale est dite
« universelle » quand elle s'étend, en
principe à des faits commis n'importe où dans le monde et par
n'importe qui ; lorsque, par conséquent un tribunal que ne
désigne aucun critère ordinairement retenu, peut, cependant
connaître d'actes accomplis par des étrangers, à
l'étranger ou dans un espace échappant à toute
souveraineté. Pour que s'exerce cette compétence, il suffit
théoriquement, des hasards d'une arrestation, d'une plainte ou d'une
dénonciation26(*).
En tout état de cause, le paragraphe 3 de l'article 5
de la convention de 1984 autorise l'établissement de la
compétence universelle en vue de sanctionner les auteurs d'actes de
torture partout où ils fuiront. En effet, rien n'empêche un Etat
d'user, à cette fin, du principe général qui lui permet de
déterminer librement l'étendue de sa juridiction
répressive27(*).
En ce qui concerne les conditions d'exercice de la
compétence universelle, les conventions ou les lois nationales qui
l'instituent au profit des juridictions nationales, déterminent
elles-mêmes les conditions de leur mise en oeuvre28(*).
L'affaire Pinochet restera en mémoire en ce qui
concerne la mise en oeuvre de la compétence universelle pour des actes
de torture29(*).
Pour la première fois un Etat (la GRANDE BRETAGNE) a
procédé à l'arrestation d'un auteur présumé
d'actes de torture qui se trouvait sur son territoire en application d'une
instruction donnée par un autre pays (Espagne).
La décision de la chambre des Lords le 24 Mars 1999 de
refuser l'immunité à Pinochet est historique et crée une
véritable jurisprudence internationale en ce qui concerne la mise en
oeuvre de la compétence universelle.
Elle a incontestablement entraîné des incidences
majeures dans la construction d'une justice sans frontières et dans les
relations internationales30(*).
B/L'action devant les juridictions internationales
Il faut rappeler que toutes les instances internationales de
garanties des droits de l'homme exigent que la prétendue victime puisse
épuiser les recours que son droit positif lui offre. Cela ne voudrait
pas dire qu'à chaque fois, il faut aller jusqu'à la cassation et
attendre sa décision avant de saisir l'instance régionale ou
universelle. Il en est ainsi si, on peut établir que la décision
de la juridiction nationale suprême est connue d'avance et n'est pas
favorable à la victime, donc ne garantit pas les droits humains. C'est
aussi le cas si les délais dans lesquels ces juridictions nationales
doivent se prononcer deviennent excessivement longs ou si la procédure
devant elles est telle qu'elle ne garantit aucune issue favorable à la
protection des droits de l'homme. On parle de plus en plus de
l'épuisement des voies de recours `'disponibles'' ou recours
`'utiles'' pour mettre davantage l'accent sur la disponibilité
de ces instances nationales à réprimer les agissements contraires
aux principes universels des droits de l'homme.
Au niveau régional, la CEDH de Strasbourg demeure
l'instance de référence en matière de garantie des droits
de l'homme.
Au niveau régional, la CEDH de Strasbourg demeure
l'instance de référence en matière de garantie des droits
de l'homme en général et des actes de torture en particulier.
Elle bat le record du nombre annuel des plaintes. Elle peut être saisie
d'une requête individuelle par toute personne physique, toute ONG ou tout
autre groupe de particulier (art 34) dans un délai de 6 mois à
partir de la date de la décision interne définitive.
Cette requête ne doit pas être anonyme. L'audience
est normalement publique. Les arrêts de la cour ont force obligatoire et
exécutoire. Ils sont définitifs s'ils proviennent de la Grande
Chambre. S'ils proviennent d'une chambre, ils deviennent
définitifs : « a- lorsque les parties
déclarent qu'elles ne demanderont le renvoi de l'affaire devant la
Grande Chambre ; ou b- trois mois après la date de l'arrêt,
si le renvoi de l'affaire devant la Grande Chambre n'a pas été
demandé ; ou c- lorsque le collège de la Grande Chambre
rejette la demande de renvoi formulée en application de l'article
43 » (article 44§2 a-b-c.).
Quant à la cour interaméricaine des droits de
l'homme, elle ne peut, malheureusement, pas être saisie par les
particuliers, prétendues victimes de la torture. L'individu ne dispose
pas d'un droit d'action individuelle devant la cour. Nous pouvons donc dire,
avec le professeur F. SUDRE qu'il n'y a pas de garantie véritable et
efficace contre la torture devant la cour interaméricaine des droits de
l'homme. Car la notion de recours individuels « est au fondement
même de l'efficacité de la garantie internationale des droits de
l'homme »31(*).
La commission devant laquelle l'individu dispose d'un droit de
recours n'est pas malheureusement une juridiction, et n'a donc pas de
décision obligatoire et exécutoire sous la forme de chose
jugée.
En ce qui concerne l'Afrique, la situation est pratiquement la
même qu'en Amérique.
Pour le moment, il n'existe pas encore une cour africaine
susceptible d'être saisie par les prétendues victimes d'actes de
torture32(*). La seule
commission disponible n'est pas une juridiction. De plus, le droit de saisine
des individus devant elle est encore restreinte, ainsi que l'explique le juge
KEBA M'BAYE : « les auteurs de la charte manifestent
une très grande méfiance vis-à-vis des communications
autres que celles des Etats parties ; aussi les ont-ils enfermés
dans des conditions de recevabilité dont le respect intégral bien
que difficile est nécessaire pour assurer une saisine valable de la
commission »33(*).
En définitive, la procédure devant la commission
fait la part belle aux Etats en matière de saisine dans un continent ou
l'arbitraire étatique est encore une réalité.
Le particulier qui prétend être victime de
torture et qui a rempli la condition d'épuisement des recours internes,
peut introduire une communication auprès du CCT si l'Etat incrimina fait
la déclaration de l'article 22 de la convention de 1984.
Il peut aussi saisir le CDH si l'Etat incriminé est
partie au pacte international relatif aux droits civils et politiques et
à son premier protocole facultatif.
Dans l'un ou l'autre cas, la procédure adopte est
quasiment la même.
D'abord l'adresse précise de l'organe doit
apparaître au début de la communication. Ensuite les
renseignements sur l'auteur de la communication doivent être fournis
ainsi que ceux de la victime, si l'auteur n'est pas la victime. Les
renseignements sur l'Etat en cause, les articles violés et les recours
internes exercés doivent être signalés.
Enfin, il faut préciser si la même affaire a
été soumise à une autre instance nationale ; et
exposer les faits en cause34(*).
Toute communication introduite suivant la procédure,
sera examinée par l'organe qui constatera si oui ou non il y a eu
torture. Dans ce dernier cas, il peut être fait obligation à
l'Etat incriminé d'allouer une réparation suffisante à la
victime.35(*)
A cette inconsistance du fondement répressif, s'ajoute
l'effet destructif des réserves.
CHAPITRE 2 :
LE SYSTEME DES RESERVES AU FONDEMENT DE LA REPRESSION
DE LA TORTURE
Les réserves constituent la plaie qui gangrène
le droit international des droits de l'homme, puisqu'elles détruisent
les fins poursuivies, ainsi que le reconnaît M. Boutros-Ghali, alors
secrétaire général de l'ONU, lors de la conférence
mondiale sur les droits de l'homme en 199336(*).
Pour bien comprendre l'effet destructif des réserves
sur les instruments relatifs à la torture, nous allons étudier
dans un premier temps la problématique des réserves aux
instruments relatifs aux droits de l'homme, en général et dans un
second temps, nous étudierons les réserves à la convention
du 10 Décembre 1984.
SECTION I : Problématique des
réserves aux instruments internationaux
Il convient ici d'analyser d'abord le régime
général des réserves aux traités internationaux
avant de voir le cas spécifique des conventions relatives aux droits de
l'homme.
PARAGRAPHE 1 : Régime général des
réserves aux traités
La convention de Vienne sur le droit des traités du 23
Mai 1969 définit en son article 2-a la réserve comme
étant « une déclaration unilatérale,
quel que soit son libellé ou sa désignation, faite par un Etat
quand il signe, ratifie, accepte ou approuve un traité ou y
adhère, par laquelle il vise à exclure ou à modifier
l'effet juridique de certaines dispositions du traité dans leur
application à cet Etat ».
La réserve est une pratique très ancienne en
droit international. Contrairement en droit interne où le droit s'impose
aux individus sans leur consentement, l'Etat, entité souveraine37(*) ne peut se faire obliger que
par sa propre volonté. Forts de ce principe, les Etats observaient des
réticences à s'obliger vis-à-vis des conventions
internationales38(*).
Pour amener les Etats à conclure des traités en
faveur de la coopération et la paix internationale, cette astuce
permettrait d'accepter des engagements internationaux `'avec
réserve''. La doctrine de `'l'intégrité du
traité'' régissait la pratique. Il exigeait le consentement
de tous les Etats contractants avant que soit acceptée une
réserve et que son auteur devienne partie au traité39(*). La SDN a pratiqué
cette doctrine puisque « pour accepter une réserve,
le secrétaire général exigeait non seulement le
consentement de tous les Etats parties, mais aussi celui des Etats
signataires »40(*).
L'évolution dans le domaine a été
progressive depuis la convention de la Havane dont l'article 6 énonce
que l'objection qu'un Etat peut formulé contre une réserve
n'empêche pas l'Etat, auteur de la réserve de devenir partie au
traité. L'objection a seulement pour conséquence d'éviter
que le traité entre en vigueur entre l'Etat, auteur de la réserve
et l'Etat, objecteur. Cette évolution a été
consacrée par la Cour Internationale de Justice.
En effet, dans son avis consultatif de 1951 relative aux
réserves à la convention sur la prévention et la sanction
du crime de génocide, la cour a adopté la position de la
convention panaméricaine et profita pour fixer la règle qui
permet d'apprécier l'admissibilité d'une réserve. C'est,
dit la cour, la compatibilité de la réserve avec l'objet et le
but du traité qui doit déterminer l'attitude tant de l'Etat qui
se propose de la formuler que des autres Etats au moment de l'accepter ou de
formuler une objection41(*).
C'est cette opinion que le convention de Viennes sur le droit
des traités a adopté pour définir le régime
général des réserves dans ses articles 2 et 19 à
23.
A la lecture de ces dispositions, il ressort que : sauf
prohibition expressément formulée dans le texte du traité,
les Etats peuvent formuler toute réserve compatible avec l'objet et le
but du traité (art. 19). Il revient aux autres Etats parties d'accepter
la réserve ou d'objecter contre elle42(*).
Mais s'agissant des traités constitutifs d'organisation
internationale, c'est l'organe compétent de celle-ci sauf disposition
contraire, qui peut accepter ou refuser la réserve43(*).
En tout état de cause, une réserve produit des
effets dans des conditions suivantes :
- La réserve est acceptée par tous les Etats
partie44(*). Dans ce cas,
le traité entre en
vigueur entre l'Etat réservataire et tous les autres
Etats parties. Les dispositions sur
lesquelles porte la réserve se modifient dans la mesure
prévue par elle (art. 21, 1-a et b).
- La réserve n'a pas été acceptée
par tous les Etats parties. Dans ce cas, le traité entre
en vigueur entre l'Etat réservataire et les Etats qui
ont accepté la réserve (art. 20-4-a)
- Un Etat partie objecte de façon non équivoque
qu'une réserve empêchera l'entrée
en vigueur du traité. Dans ce cas le traité
n'entrera pas en vigueur entre cet Etat objecteur et l'Etat auteur de la
réserve. Si au contraire cette intention n'était pas
exprimée par l'Etat objecteur, le traité produira ses effets
entre les deux Etats, à l'exception de la clause ou des clauses
affectées par la réserve.
Il se crée alors une série de régimes
conventionnels particuliers entre l'Etat réservataire et les autres
Etats.
A cause de leur spécificité, ce régime
général ne peut s'appliquer aux conventions internationales
relatives aux droits de l'homme.
PARAGRAPHE 2 : la spécificité des
conventions relatives aux droits de l'homme
Même si la possibilité de formuler des
réserves est aussi acquise quand il s'agit des instruments relatifs aux
droits de l'homme, le contrôle de leur compatibilité avec l'objet
et le but du traité, cette fois-ci, n'est pas laissé aux
objections éventuelles des autres Etats parties au traité. Il
obéit à un régime spécifique.
A/Possibilité de formuler des
réserves
Nombreux sont les juristes qui soutiennent que les
réserves aux dispositions de protection des droits de l'homme sont
irrecevables. Mais il faut reconnaître que les réserves
présentent une certaine utilité car elles permettent une large
acceptation des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. La
possibilité d'effectuer des réserves facilitent des
ratifications. Elle encourage l'adhésion de plus grand nombre d'Etats
qui respectent généralement les obligations qui sont
énoncées45(*). Or dans le domaine des droits de l'homme, plus
qu'ailleurs, il est recherché l'adhésion de plus grand nombre
d'Etats, si possible tous les Etats. C'est pourquoi beaucoup de conventions de
protection des droits de l'homme n'interdisent pas la possibilité de
formuler des réserves.
La Convention contre la torture, peines et traitements
inhumains ou dégradants a admis aussi la possibilité de se
dérober de l'obligation de certaines de ses dispositions.
Il s'agit de la déclaration facultative des articles 21
et 22 ; si elles ne sont pas faites, le comité ne pourra pas
examiner les communications interétatiques (art21) et les communications
des particuliers (art. 22).
A ces deux possibilités de se dérober des
obligations énoncées par la convention, il faut ajouter la
réserve de l'article 28 qui empêchera le comité de
procéder à une enquête confidentielle sur le territoire
d'un Etat partie où la torture serait pratiquée de manière
systématique et celle de l'article 30 qui délie son auteur des
dispositions contenues dans son premier paragraphe, selon lesquelles, tout
différend entre deux ou plus des Etats parties concernant
l'interprétation ou l'application de la convention qui ne peut pas
être réglé par voie de négociation sera soumis
à l'arbitrage à la demande de l'un d'entre eux, ou à la
cour internationale de justice.
A l'analyse, le caractère facultatif de la
déclaration de l'article 22 paraît fondamental au vu de cette
étude.
En effet, c'est la reconnaissance du comité, inscrite
à l'article 22 qui lui permettra d'être un moyen de recours
individuel dans la mise en oeuvre des droits reconnus dans la convention. C'est
donc la garantie même de ces droits qui se trouve être
défaillante46(*).
Disons carrément que cette garantie des droits énoncés
dans la convention n'existera plus dès lors que le comité ne sera
pas compétent pour recevoir et examiner les communications
présentées par ou pour le compte des particuliers, ainsi que
l'affirme le professeur SUDRE « la proclamation
internationale des droits de l'homme est une chose, la garantie internationale
du respect de ces droits en est une autre »47(*).
La possibilité de formuler des réserves existe
aussi à l'égard du pacte international relatif aux droits civils
et politiques48(*). Il en
est de même de la convention européenne des droits de l'homme
(art.75) et de la charte africaine des droits de l'homme et des
peuples.49(*)
B/Contrôle de la compatibilité des
réserves
Depuis l'arrêt Belilos du 29 Avril 198850(*) on peut affirmer que les
réserves émises à propos des traités relatifs aux
droits de l'homme obéissent à un régime spécifique
puisque c'est l'organe chargé de supervision de l'instrument qui est
admis à contrôler la compatibilité avec le but et l'objet
poursuivi par l'instrument 51(*). Car le droit international des droits de l'homme
diffère du droit international classique ; c'est un droit objectif
qui au rang de droit international52(*). Et comme le reconnaît encore Mazyambo M.
KISALA, les droits humains se réfèrent à l'identité
universelle de la personne humaine53(*). Ils sont donc attachés par principe à
la seule qualité de la personne humaine54(*). Les traités qui proclament les droits de
l'homme ont ainsi pour finalité de créer pour les Etats des
obligations absolues qui impliquent l'uniformité de conduite envers tous
les individus se trouvant sous la juridiction des Etats parties55(*).
Ainsi, ni l'entrée en vigueur d'une convention relative
aux droits de l'homme à l'égard de l'égard de l'Etat
auteur d'une réserve, ni l'appréciation de celle-ci et sa
validité ne dépendent pas du consentement exprès ou tacite
des autres Etats, mais plutôt de l'organe de supervision de ladite
convention56(*).
L'objection à une réserve d'un traité relatif aux droits
de l'homme ne devrait produire aucun effet.
C'est dans cette optique que s'inscrit la pratique du CDH.
Dans son observation générale n°24(52) relatives aux
réserves au pacte et à ses protocoles facultatifs, adoptée
le 2 Novembre 1994 au cours de sa 52ème période de
session57(*) le
comité des droits de l'homme définit ce qui constitue les objets
et les buts du pacte et de ses protocoles. En fonction de cela, il donne les
caractéristiques que doit présenter toute réserve au pacte
ou à ses protocoles, ce qui constitue des instructions précises
tant aux Etats qui ont l'intention de formuler des réserves qu'à
ceux qui l'ont déjà fait58(*).
Cette position a été consacrée le 2
Novembre 1999 dans la jurisprudence Kennedy où le comité des
droits de l'homme a invalidé la réserve de Trinité et
Tobago relative à l'article 1er du premier protocole
facultatif59(*).
On espère que le comité contre la torture
s'approprie ce procédé pour contrôler et juger de la
compatibilité des différentes réserves faites par certains
Etats parties.
Il faut reconnaitre que le travail du comité contre la
torture dans ce domaine, sera difficile, voire utopique en ce qu'il
n'atteindra jamais le but.
En effet, le principal obstacle à la mission du
comité, celle de garantir la jouissance par les individus des droits
énoncés dans la convention n'est pas à proprement parler
une réserve qu'on peut contrôler facilement.
En effet, la déclaration prévue à
l'article 22 pour reconnaitre la compétence du comité à
examiner des plaintes émanant des particuliers, est facultative. Un Etat
peut adhérer à la convention sans faire cette déclaration.
Elle apparaît comme un autre instrument qui n'est pas contenu dans la
convention. Ce sont donc deux choses différentes : le texte de la
convention et une déclaration facultative donnant la possibilité
aux citoyens sous juridiction d'un Etat partie de se faire entendre par le
comité en cas de violation des droits à eux reconnus par la
convention, à l'instar du premier protocole facultatif par rapport au
pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Profitant de cette possibilité de formuler des
réserves, nombreux sont les Etats partie à la convention contre
la torture, peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants qui
ont soit formulé directement des réserves ou des
déclarations soit se sont abstenus se faire la déclaration
facultative de l'article 22, refusant ainsi des communications émanant
des particuliers, vidant du coup l'essentiel des garanties contenues dans la
convention.
SECTION 2 : Les réserves à la
convention de 1984
Avant d'étudier les conséquences de ces
réserves sur la convention, il importe de faire l'état des lieux
quant à la nature des réserves et les Etats partie qui en sont
les auteurs.
Paragraphe 1 : les Etats réservataires
Des 138 Etats qui ont signé ou ratifié la
convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants, seulement 41 Etats ont accepté la
compétence du comité contre la torture pour recevoir et examiner
les communications présentées par et pour le compte des
particuliers relevant de leur juridiction (art.22)60(*).
Il s'agit de : l'Afrique du Sud, l'Algérie,
l'Allemagne, l'Argentine, l'Australie, l'Autriche, l'Azerbaïdjan, le
Bahreïn, la Belgique, la Bulgarie, Cameroun, le Canada, le Chypre, la
Croatie, le Danemark, l'Equateur, l'Espagne, la Finlande, la
Fédération de Russie, la France, le Ghana, la Grèce, la
Hongrie, l'Islande, l'Italie, le Liechtenstein, le Luxembourg, le Malte, le
Monaco, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas, le
Portugal, la Suède, la Suisse, les Seychelles, le Togo, la Tunisie, la
Turquie, l'Ukraine, l'Uruguay et la Yougoslavie.
Nombreux sont aussi les Etats partie à la convention
qui ont formulé des réserves diverses et variées. On peut
regrouper ces différentes réserves par rapport aux
différentes dispositions de la convention.
Trois Etats ont formulé des réserves ou des
déclarations interprétatives par rapport à la
définition de la torture énoncée à l'article
1er. Il s'agit de : Botswana, de Luxembourg et des Etats-Unis
d'Amérique.
Par rapport à l'article 3 et à l'article 16,
seuls les Etats-Unis ont formulé une déclaration
interprétative.
Par contre, ils sont au nombre de trois à formuler des
réserves qui touchent le contenu de l'article 14 : le Bangladesh,
la Nouvelle-Zélande et les Etats-Unis d'Amérique.
Les Etats comme l'Afghanistan, l'Arabie Saoudite, la Chine, le
Cuba, l'Indonésie, l'Israël le Koweït et la Pologne ont
formulé des réserves par rapport aux dispositions de l'article
20.
Mais c'est surtout par rapport à l'article 30 que les
Etats sont nombreux à formuler des réserves. Ils sont au nombre
de dix-sept à savoir : l'Afghanistan, l'Arabie Saoudite, le
Bahreïn, le Chili, la Chine, le Cuba, les Etats-Unis d'Amérique, la
France, le Ghana, l'Indonésie, l'Israël, le Koweït, le Maroc,
le Monaco, le Panama, la Pologne et la Turquie.
Quant au Qatar, il fait réserve à
« toute interprétation des dispositions de la convention qui
soit incompatible avec les préceptes du droit islamique et de la
religion islamique ».
Paragraphe 2 : les conséquences des
réserves sur la convention de 1984
S'agissant de la validité des réserves, la
compétence appartient-elle aux Etats partie au traité ou au
comité qui a été créé en vue de
contrôler l'application de la convention ?61(*)
Ainsi se pose d'emblée la question. En ce qui concerne
la convention de 1984 comme le reconnaît le CDH à l'égard
du pacte et ses protocoles, c'est le comité contre la torture, organe de
contrôle qui doit connaitre l'étendue des obligations
étatiques afin de s'acquitter de ses fonctions62(*). L'objection ou la non
objection de la part des Etats partie n'a donc pas d'effet63(*). Il appartient au
comité contre la torture et à lui seul d'accepter ou de refuser
une réserve64(*).
Surtout lorsqu'il examine une requête individuelle, il
doit se prononcer sur l'effet et l'étendue d'une réserve afin de
déterminer l'admissibilité de la requête, et sa conclusion
devra être respectée par les Etats parties65(*).
C'est seulement de cette manière que le comité
pourra atteindre son objectif, celui de constituer un organe de recours aux
victimes de la torture. Car l'impossibilité pour les particuliers de
saisir le comité contre la torture supprime tous les
éléments des garanties prévues par la convention.
Elle est le développement pour sa mise en oeuvre de
l'article 7 du pacte international relatif aux droits civils et
politiques66(*).
Or l'article 7 fait partie de la catégorie des
dispositions du pacte qui ne sont pas susceptibles de dérogations
même en situation d'urgence nationale67(*). Ainsi le caractère de certaines dispositions
de la convention de 1984 notamment de l'article 22 contredisent cette
conception, c'est-à-dire celle qui classe l'article 7 parmi les
dispositions obligatoires et absolues. C'est pourquoi, il convient de dire que
la convention de 1984 est une simple déclaration qi sert de tribune aux
Etats et de préambules aux lois fondamentales.
Le moins qu'on puisse dire, au vu de tout cela, est que le
CCT, malgré la publicité qu'on en fait autour de ses
activités68(*)
n'arrive pas encore à assurer la mission qu'on était en droit
d'attendre de lui. Cela ne dépend peut-être pas du comité
en tant qu'institution. C'est la flexibilité de la conception de la
souveraineté des Etats ou l'abus du principe de la compétence
exclusive des Etats69(*)
au détriment de la protection internationale de l'individu70(*) qui constituent les
véritables obstacles. Mais le comité pourra inverser la tendance
en redéfinissant son rôle en tant qu'organe chargé de
sanctionner une infraction qui fait partie des plus cruelles et des plus
redoutables vis-à-vis de la dignité humaine.
A la suite de cette analyse, il convient de retenir qu'en
l'état actuel de son fonctionnement, le mécanisme
répressif actuel de la torture est en deçà des attentes
des nombreuses victimes de ce crime.
Face à cet état de chose, il est
impérieux d'instaurer d'autres stratégies pour corriger les tares
recensées, et par là même, éradiquer le
phénomène.
DEUXIEME PARTIE :
LA NECESSITE D'UN CHANGEMENT DE STRATEGIE DANS LA
REPRESSION DE LA TORTURE
Comme signalé plus haut, l'effectivité du
système répressif est un élément fondamental dans
la lutte contre la torture, les peines et traitements cruels, inhumains ou
dégradants.
La situation qui se présente actuellement, relativement
à cette question est assez préoccupante, si l'on s'attarde un peu
sur l'écart qui existe entre l'abondance des traités
internationaux, les grandes conférences mondiales et
l'inefficacité du mécanisme de répression du crime.
Les nouvelles stratégies à instaurer et dont la
nécessité n'est plus à démontrer, devront toucher
deux points essentiels à savoir : sortir du statisme actuel d'une
part et de l'autre, renforcer la répression de proximité.
CHAPITRE 1 :
UNE DYNAMISATION NECESSAIRE
Pour rendre dynamique la lutte contre la torture, certaines
mesures ont été prises. Il y a lieu d'évaluer la
pertinence de ces mesures envisagées avant d'étudier d'autres
mesures qu'on devrait normalement envisagées.
SECTION 1 : Les solutions envisagées
L'organisation des Nations Unies, depuis sa création
n'a jamais cessé de se déployer contre la torture. Les
dernières créations en date concernent l'élaboration d'un
projet de protocole facultatif à la convention de 1984 et l'implication
des organes des Nations Unies aux côtés du comité contre la
torture dans la lutte contre le crime.
Paragraphe 1 : le projet de sous-comités
Pour bien appréhender cette nouvelle initiative des
Nations Unies, nous allons analyser d'abord son contenu avant de constater ses
carences à atteindre les fins poursuivies.
A/Le contenu de la réforme
L'objectif principal sinon unique du projet de protocole
facultatif est de prévenir la torture dans les lieux de
détention, ainsi que cela ressort clairement du préambule et de
l'article premier du protocole.
La mise en oeuvre de cette prévention sera
assurée par un sous-comité (articles 5 à 10). Le
sous-comité international sera assisté des mécanismes
nationaux de prévention (articles 17 à 23). Le sous-comité
et les mécanismes de prévention pourront formuler des
recommandations à l'attention des Etats visités (articles 11-a et
19-b).
Le mécanisme national est aussi habilité
à présenter des propositions et des observations au sujet de la
législation en vigueur ou des projets de loi en la matière
(article 19-c). C'est une attribution si elle devient effective, pourra rendre
conforme les législations nationales des Etats concernés au droit
international des droits de l'homme. Cela pourra déboucher sur la
reconnaissance du Comité contre la torture de l'article 22 de la
convention de 1984 pour recevoir et examiner les plaintes individuelles, des
Etats parties qui n'ont pas encore fait cette déclaration. L'effet de
cette déclaration sur les gouvernants reste, au demeurant utopique.
Des garanties pouvant favoriser le travail des membres du
sous-comité et de leurs collaborateurs des mécanismes nationaux,
sont reconnues et accordés (art. 14 et 18). Des protections sont
renforcées en faveur des `'informateurs'' du sous-comité (art.15)
et (art.21). Cette protection pourra aider à avoir des
éléments de preuve dans cette manière où elle est
très rare et engendre l'impunité. On espère donc que les
sources d'information du sous-comité serviront aussi les victimes des
actes de torture devant le juge71(*).
L'une des mesures efficaces prévues par le protocole
est la possibilité de publier le rapport annuel du sous-comité et
l'obligation de publier les rapports annuels des mécanismes nationaux.
Nous sommes dans un domaine où la publicité d'un Etat comme bon
ou mauvais protecteur des droits humains renforce le prestige international de
l'Etat ou l'anéantit et le rend méprisable.
Contrairement à ce qui est prévu dans la
convention où ce sont les Etats parties qui prennent en charge les
dépenses occasionnées par les activités du comité
c'est l'ONU qui prend en charge les dépenses résultant des
travaux du sous-comité de prévention. Ce mode de financement le
mettra certainement beaucoup plus indépendant des Etats parties.
Il est prévu la création d'un fonds
spécial pour aider les Etats à améliorer entres autres les
conditions de détention.
Il est dit expressément qu'il ne sera admis aucune
réserve au protocole. Mais les Etats parties peuvent ajourner
l'essentiel des obligations qui leur incombent au titre de ce protocole. Cet
ajournement peut aller jusqu'à cinq ans à compter de la date
à partir de laquelle l'Etat intéressé est partie au
protocole. Concrètement, la jouissance des mesures de protections
contenues dans le protocole par les victimes potentielles n'est pas pour
demain.
B/Les limites de la réforme
A l'analyse, la réforme issue du protocole facultatif
en projet présente deux défauts fondamentaux. D'abord, la
réforme s'est limitée à la prévention.
C'est-à-dire que l'objectif ne serait pas de punir pour dissuader la
commission de l'infraction. Les rédacteurs du protocole facultatif sont
partis d'un constat : « convaincus que d'autres mesures
sont nécessaires pour atteindre les objectifs de la convention contre la
torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou
dégradants... »72(*). et pour apporter ces mesures qui manquent pour
atteindre les objectifs de la convention, il faut selon les rédacteurs,
la prévention. Alors que la convention elle-même avait plusieurs
mesures de prévention73(*). Il s'agit des systèmes de rapports
périodiques (art.19) et surtout des mesures louables prévues
à l'article 20. Ces mesures peuvent conduire le comité à
descendre sur le terrain pour enquêter. Mais elles sont devenues
ineffectives à cause de l'usage qui en est fait. Ce qui veut dire
concrètement que les nouvelles mesures qu'apporte le protocole
facultatif n'atteindront leur objectif que si et seulement si, on en fait un
bon usage. Et l'usage le plus bénéfique à notre avis c'est
le constat de torture et peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants auquel ces mesures pourront conduire, puisse déboucher
sur la répression ou au moins puisse servir de preuve devant les juges.
Il n'y a que la répression qui puisse réduire ce crime
puisqu'elle a plusieurs fonctions à savoir : dissuader,
décourager, effrayer, réparer, dédommager...
Ensuite, le deuxième défaut fondamental,
à notre avis, de ce protocole est son domaine d'action trop
limité : les lieux de détention. C'est croire que le torture
et peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ne peuvent se
commettre qu'en prison. Nous sommes d'accord que les périodes de
détention constituent des périodes propices pour subir la
torture. Mais les infractions de sévices corporelles, la torture
psychologique, les humiliations grossières... ne sont pas l'apanage des
seuls personnels pénitentiaires et autres intervenants dans la garde des
personnes privées de liberté74(*). La torture et autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants se commettent un peu partout et à tout
moment : à la maison, au travail, à l'école, sur la
voie75(*). Limiter les
actions aux seuls lieux de détention, c'est priver un grand nombre de
victimes potentielles d'être protégées contre la torture.
Seule la répression de toute personne, physique ou morale, reconnue
coupable d'acte de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants peut susciter une méfiance et une prise de conscience
des auteurs potentiels de ces crimes.
Paragraphe 2 : l'implication de tous les organes de
l'ONU dans la lutte contre la torture
Pour mieux appréhender cette implication des Nations
Unies dans l'éradication de la torture, il convient d'analyser d'abord
les actions engagées avant d'évaluer les effets.
A/Les actions
L'éradication de la pratique de la torture dans le
monde constitue l'un des principaux défis que l'ONU s'est
employée relever quelques années seulement après sa
création. Afin d'assurer à tous, une protection adéquate
contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants, l'ONU a adopté au fil des ans des normes
universellement applicables. Mais constatant que celles-ci n'ont pas pu
atteindre les objectifs fixés, l'organisation reprend du travail. Il
n'est plus question de laisser seuls la convention de 1984 et les organes
qu'elle a institués dans la bataille. C'est ainsi que le comité
des droits de l'homme, organe chargé de superviser le pacte n'a
cessé de recevoir et d'examiner les plaintes relatives à la
violation de l'article 7 qui interdit la torture. Pour faire
bénéficier un plus grand nombre de personnes de ses services en
la matière, et de façon générale tous les droits de
l'homme, le CDH a élaboré une observation
générale76(*) qui anéantit les obstacles que constituaient
les réserves aux instruments relatifs aux droits de l'homme. Le
comité des droits de l'homme fait aussi une interprétation large
de la notion de torture. Ainsi, il a reconnu que l'article 7 s'appliquait aux
techniques d'exécution des condamnés à mort, et que les
exécutons doivent être menées de manière à
réduire au minimum les souffrances physiques et psychologiques77(*).
La commission des droits de l'homme, elle aussi s'investit
depuis peu dans la lutte contre la torture. Dans sa Rés.
2002/3878(*)
adoptée sans vote le 22 Avril 2002, elle rappelle aux gouvernements que
les châtiments corporels infligés aux enfants ainsi que les
menaces de mort, peuvent être assimilées à) un traitement
cruel, inhumain ou dégradant ou à la torture. La
résolution recommande aussi que les allégations faisant
état d'actes de torture ou d'autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants doivent être examiner sans délai et
en toute impartialité par l'autorité nationale compétente,
posant ainsi le problème de recours utiles, base d'une garantie efficace
des droits de l'homme. Elle revient aussi sur l'éternel problème
de preuve et demande que toutes les personnes qui fournissent des informations
sur les actes de torture et d'autres peines ou traitements cruels inhumains ou
dégradants soient protégées.
La commission invite les gouvernements à
reconnaître la compétence du comité pour recevoir et
examiner entre autres les plaintes individuelles et de s'abstenir de formuler
des réserves à l'égard des dispositions de la convention.
Elle salue enfin la constitution du fonds de contribution volontaire des
Nations Unies pour les victimes de la torture, la commission loue aussi les
actions positives du secrétaire général en faveur de la
prévention et de la réadaptation sociale des victimes de
torture.
B/Les limites de ces actions
Toutes ces actions sont intéressantes en ce qu'elles
révèlent la gangrène sociale que représente le
crime de torture. Elles montrent que les actes de torture sont quotidiens dans
les différentes sociétés du monde. Mais aussi
révélatrices qu'elles soient, ces différentes actions de
l'ONU sont vouées à l'échec puisqu'elles ne touchent
pratiquement pas la cause première du phénomène. En effet,
si la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants persistent c'est parce que les auteurs de ces actes ignobles,
faciles et rapides à commettre sont assurés de ne pas être
punis. Et beaucoup d'éléments concourent à
l'impunité du crime. Il s'agit entre autres de l'existence de recours
utiles et le problème de manque de preuve quand bien même les
allégations paraissent évidentes.
Or, toutes les actions de l'ONU n'ont fait que recommander la
création de ces conditions. Il serait beaucoup plus intéressant
de contraindre les Etats à adopter des mesures concrètes devant
concourir à l'éradication du crime79(*).
Section 2 : les solutions envisageables
L'analyse du droit international des droits de l'homme conduit
à remarquer que l'institution la plus active dans la répression
de la torture demeure la cour de Strasbourg. Pour lutter contre ce crime, les
autres instances devraient s'inspirer de la méthode de la cour
européenne des droits de l'homme auxquelles on peut ajouter une
méthode alternative de répression.
Il convient alors d'étudier l'expérience de la
cour de Strasbourg d'une part et la répression alternative d'autre
part.
Paragraphe 1 : l'expérience de a cour de
Strasbourg
L'évolution de la jurisprudence de la cour
européenne des droits de l'homme a perms de réprimer certains
comportements qui apparemment n'étaient pas protégés par
les diverses dispositions qui interdisent la torture. Ainsi depuis
l'arrêt Irlande c. RU80(*) du 18-01-1978 qui qualifie la torture de
« traitement inhumain délibéré provoquant de
fort graves et cruelles souffrances », la notion a
évolué dans le seul souci de mieux réprimer le crime. Au
fil des années et de la jurisprudence de la cour et de la commission,
l'article 381(*) a pu
être appliqué à des situations qui ne relevaient
nécessairement pas de ce que les rédacteurs de la convention
avaient en tête, à savoir des situations
«classiques » de mauvais traitements subis par les
requérants du fait d'agents étatiques82(*).
Ainsi, en 1999, dans l'arrêt Selmouni c. la France, la
cour a fait un pas qui assure une prospérité dans la
jurisprudence européenne quand elle dit : « ...
à l'égard d'une personne privée de sa liberté,
l'usage de la force physique qui n'est rendu strictement nécessaire par
le comportement de ladite personne porte atteinte à la dignité
humaine et constitue, en principe, une violation du droit garanti par l'article
3 »83(*).
Cette évolution jurisprudentielle importante présente un autre
intérêt en ce qu'elle dissocie les termes
« torture » et « traitement inhumain ou
dégradant » dans l'interprétation de l'article
384(*). Cette distinction
que comporte l'article 3 de la CEDH entre « torture » et
« traitements inhumains ou dégradants »,
distinction qu'on retrouve aussi dans la convention de 1984, serait retenue
pour marquer d'une spéciale infamie des traitements inhumains provoquant
délibérément de graves cruelles souffrances85(*). Dans l'affaire Irlande c. RU,
la cour avait considéré que les techniques policières
d'interrogatoire utilisées ne constituent pas des actes de torture mais
seulement « une pratique de traitements inhumains et
dégradants »86(*). En effet, un traitement inhumain désigne des
pratiques qui provoquent un sentiment de désespoir et
d'infériorité et un traitement dégradant est un traitement
qui vise à humilier l'individu devant autrui ou devant ses yeux87(*). Il est utile de
préciser que le traitement considéré n'est pas
nécessairement une coercition physique ; mais peut être un
traitement qui entraîne des effets psychiques d'une certaine
gravité88(*). C'est
cette évolution jurisprudentielle intéressante de la CEDH qui a
amené Jean-Manuel LARRALDE à considérer que la cour a fait
un recul quand elle se refuse à admettre la violation de l'art. 3 chez
une personne indûment privée de sa liberté à qui on
a posé des menottes lors de son transfert de la prison à
l'hôpital89(*). Mais
l'application de l'article 3 au contentieux des étrangers lorsque leur
expulsion, extradition ou refoulement sont envisagés constitue sans nul
doute l'une des avancées les plus spectaculaires90(*).
A cet égard le célèbre arrêt
Soering c. RU91(*) est
très illustratif à un double point de vue. D'abord il a
considéré que le « syndrome du couloir de la
mort »92(*)
constitue « un traitement inhumain » au sens de
l'article 3. C'est un curieux exemple de protection par ricochet93(*) puisque la cour est parvenue
à contourner l'art2§1 de la convention94(*).
Le deuxième point important de l'arrêt Soering
est qu'il ne suggère aucunement un acte direct de l'Etat
défendeur contraire à l'article 395(*).
En effet, ce n'est pas le RU qui allait se prononcer, ni
exécuter la peine de mort qui menaçait Jens Soering mais l'Etat
de Virginie vers lequel il devrait être extradé pour être
jugé pour l'assassinat de deux personnes96(*). Mais pour la cour, le fait que l'Etat extradant ou
expulsant ne soumet pas directement le requérant à des
« traitements inhumains » ne saurait le relever de
« sa responsabilité au regard de l'art. 3 pour tout ou
partie des conséquences prévisibles qu'une extradition
entraîne en dehors de sa juridiction ». La jurisprudence
Soering affranchit ainsi l'applicabilité de l'art. 3 d'un acte direct de
l'Etat défendeur97(*). La cour sanctionne le fait que l'Etat partie
à la convention prête la main à un comportement contraire
à la convention98(*).
L'autre interprétation évolutive non moins
spectaculaire est celle que la cour a adopté dans l'arrêt D c. RU,
rendu le 2 Mai 1997 où la cour a considéré que l'absence
de soins médicaux à une personne en phase terminale du SIDA est
comparables aux traitements inhumains et dégradants99(*).
L'inspiration de la jurisprudence de la juridiction de
Strasbourg par toutes les instances internationales et nationales comme l'a
déjà fait le CDH100(*) serait bénéfique pour la lutte contre
la torture.
Paragraphe 2 : la prise en compte d'une
répression alternative
Pour combler les lacunes d'une procédure de justice qui
n'aboutit presque toujours pas, d'autres mesures, telles les sanctions
administratives et disciplinaires doivent être prévues et
exécutées. Même dans les Etats où les poursuites
pénales sont développées, elles ne peuvent
représenter qu'une partie des mesures propres à mettre un terme
à l'impunité.
Le but de ces sanctions administratives et disciplinaires
serait de faire savoir que la torture et les peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants ne sont pas une méthode acceptable pour
obtenir des informations ni pour parer aux menaces auxquelles sont
confrontées les forces de sécurité dans l'accomplissement
de leur mission101(*).
Les règlements administratifs, règlements intérieurs
devraient prévoir : l'ouverture sans délai d'enquêtes
approfondies indépendantes et impartiales sur tous les actes de torture
qui sont signalés102(*) ; la suspension de tout service actif pour le
ou les fonctionnaires mis en cause pendant la durée des investigations
ainsi que leur mise à l'écart, leur mutation ou leur
révocation s'ils sont reconnus coupables ; d'autres sanctions
appropriées, comme une peine d'amende ou l'obligation de verser des
dommages et intérêts103(*) à la victime104(*).
En effet, la réaction interne d'une institution
à des accusations de recours à la torture formulées contre
son personnel est déterminante pour renforcer l'impunité ou pour
y mettre un terme105(*).
Un fonctionnaire présumé coupable d'actes de torture ne devrait
plus bénéficier d'aucune faveur professionnelle au moment
même où la procédure d'accusation est en cours. Le fait de
traiter des actes de torture commis dans une institution par exemple de faits
isolés imputables à des fonctionnaires peu recommandables
désignés comme « brebis galeuses »
peuvent empêcher que le caractère institutionnalisé de e
problème soit reconnu ou traité.
La pratique courante malheureusement, qui consiste à
indemniser les victimes seulement sans déférer les tortionnaires
à la justice106(*) est à décourager puisqu'elle ne
participe pas réprimer effectivement le crime en vue de
l'éradiquer.
CHAPITRE 2 :
LE JUGE INTERNE : UN ORGANE INCONTOURNABLE DANS LA
REPRESSION DE LA TORTURE EN DROIT INTERNATIONAL
Le recours aux juridictions nationales est aujourd'hui, vu
l'état actuel de la question de la répression de la torture en
droit international, la seule solution capable de surmonter au mieux les divers
obstacles rencontrés dans ce cadre.
En effet, nous savons que l'interdiction de la torture est
absolue et non dérogeable mais que la souveraineté internationale
des Etats a vidé de tout sens, ce qui fait que beaucoup de personnes ne
sont pas protégées.
Face à cette situation, il est nécessaire de
prendre des mesures afin d'en tirer et d'exploiter au besoin tous les
avantages. Il faut pour cela, garantir le droit d'accès au juge interne,
puis se servir des conventions internationales pour mieux réprimer le
crime au niveau national.
Section 1 : les garanties du droit d'accès
au juge interne
Pour permettre à toutes les victimes de torture de
pouvoir s'adresser à son juge pour avoir justice, il faut pouvoir
détruire certains obstacles, puis restaurer la justice classique.
Paragraphe 1 : les obstacles à surmonter
Ces obstacles peuvent varier d'un Etat à un autre. Mais
quelle que soit la nature de ces obstacles, ils concourent tous à un
même résultat : exclure une majorité de la protection
de la justice.
Selon le professeur Pierre COUVRAT, il faut distinguer le
droit au juge et le `'droit au droit'' qui concourent tous les deux au droit
à la justice107(*).
En effet, le droit à la justice est le droit au juge
parce que ce droit suppose la saisine d'un juge étatique en vue
d'obtenir de lui une décision. Le droit à la justice est
également `' le droit au droit'' en ce sens que le recours
à la justice vise à faire reconnaître et sanctionner les
droits individuels.
Mais puisque dans l'institution judiciaire, le juge joue un
rôle central, le droit à la justice peut se ramener au droit
d'accès au juge.
Ainsi apparaissent les deux obstacles qui doivent être
surmontés pour avoir accès à la justice : il s'agit
d'une part de disposer des potentialités intellectuelles,
financières, nécessaires pour s'adresser au juge ; et de
l'autre, être en mesure de savoir qu'on est victime.
En d'autres termes, les obstacles à la justice suppose
qu'une catégorie non négligeable de la population se trouve
exclue des services de la justice soit parce qu'elle est pauvre, soit parce
qu'elle est analphabète ou encore parce qu'elle ignore ses droits.
Détruire les obstacles qui bloquent l'accès
à la justice, revient à agir d'abord sur le coût «
trop cher » de la justice, ensuite alphabétiser ou
scolariser les populations et enfin, enseigner aux populations leurs droits les
plus élémentaires. Ceci permettra de donner effet au principe de
l'accès de tous à la justice.
En matière de torture, plus qu'en toute autre
matière des droits de l'homme, si ce principe continue d'être une
simple profession de foi sans être concrétisé, il ne peut
pas être mis un terme aux violations. En matière de torture plus
particulièrement d'autres exigences complémentaires sont à
observer : le droit au juge doit être non seulement garanti par,
comme le dit le professeur COUVRAT, « une accessibilité
constante dans le temps à l'obtention de la justice (...) une
accessibilité dans l'espace quel que soit l'endroit où elle est
sollicitée (...) une égalité de traitement pour tous par
elle »108(*), mais surtout encourager les victimes
présumées en les sensibilisant et en les
protégeant109(*).
L'accès au juge suppose aussi le droit à un juge
impartial et indépendant qui tiendra compte des circonstances pour
apprécier les éléments de preuve110(*).
Le droit à la défense, exigence fondamentale de
toute procédure doit être renforcé dans ce domaine, car les
victimes d'actes de torture sont souvent analphabètes et issues des
couches défavorisées de la société et ne sont as
forcément capables de payer les services d'une bonne défense.
Il faut aussi et dans tous les cas, rapprocher les
juridictions des justiciables, puisque la distance qui sépare les
juridictions des justiciables est très souvent la cause de
l'impunité, comme l'explique le professeur SAWADOGO :
« l'éloignement géographique de la justice du
justiciable est un facteur de premier ordre de la difficulté
d'accès à la justice, surtout quand on tient compte du temps
nécessaire au règlement d'une seule affaire. Pour le justiciable
éloigné, en effet, plusieurs déplacements sont
nécessaires au siège de la juridiction avant que son affaire ne
soit tranchée. Cet obstacle se trouve aggravé pour les pays
vastes, forestiers ou désertiques dont l'état des infrastructures
laisse à désirer »111(*).
Si la destruction de tous les obstacles est nécessaire
pour avoir accès à la justice, il n'en demeure pas moins que la
justice classique soit restaurée.
Paragraphe 2 : la restauration d'une justice
classique
Pour garantir le droit d'accès au juge, il faut
restaurer la justice, c'est-à-dire, la rendre conforme aux exigences du
droit international des droits de l'homme.
En effet, les textes applicables dans la plupart des Etats
parties à la convention de 1984 ne prennent pas en compte les principes
énoncés par la convention. Ce sont des textes vétustes. Et
comme le rapporte Amnesty International, dans certains pays, « le
crime spécifique de torture n'exista pas toujours. Les faits sont alors
qualifiés de `'coups et blessures'', infraction sanctionnée par
une peine moins lourde »112(*). Face à cette situation, il est
impérieux d'actualiser les textes, c'est-à-dire, les
rénover, les adapter à l'environnement socioculturel et
économique international.
Cette opération passe nécessairement par une
acceptation indirecte du droit international en droit interne. On pourrait par
exemple définir dans la législation interne la torture et les
autres infractions assimilables en reprenant les principaux termes
utilisés dans la convention de 1984 et l'élargir si possible,
ainsi que le suggère implicitement l'article 1er paragraphe 2
de la convention. On pourrait aussi adopter d'autres mesures sur le plan
interne de lutte contre le crime, qui ne sont pas contraires aux grands
principes tracés par la convention de 1984.
A cela, il faut ajouter la vulgarisation de la convention en
insistant sur les possibilités de garanties qu'elle offre aussi bien au
plan interne que sur le plan international à toute personne d'actes de
torture et autres peines et traitements cruels inhumains ou
dégradants.
En effet, si les victimes n'ont aucune connaissance de leur
droit, comment pourront-ils y accéder ? C'est dans cette optique
que le professeur DEGNI-SEGUI constate que « l'un des
obstacles majeurs à l'accès au prétoire (...), c'est
l'ignorance du droit en général et de leurs droits en particulier
par les citoyens qui sont pourtant censés ne pas les ignorer, en vertu
de l'adage nemo legem ignorare censetur »113(*).
Ainsi tous les citoyens, en milieu urbain et en milieu rural
pourront bénéficier des différentes mesures de protection
et de garantie du droit à ne pas être soumis à la
torture.
Pour ce faire, certaines mesures doivent être prises.
Dans un premier temps, il s'agira de traduire la convention et
les lois et textes nationaux qui s'y rapportent en langues nationales. Cette
mesure permettra d'informer et d'instruire les populations rurales souvent
déconnectées de la réalité juridique et qui
n'hésitent pas souvent à lancer que `'les lois sont faites
pour les gens de la ville et non pour les villageois''114(*).
Dans un second temps, il s'agira de multiplier les
émissions radiodiffusées ou télévisées en
direction des justiciables, aussi bien dans la langue officielle que dans les
langues nationales, dans les Etats où elles existent.
Dans un troisième temps, il s'agira d'inscrire dans les
programmes scolaires, l'enseignement des notions élémentaires des
droits de l'homme et leurs mécanismes de garantie. Cela permettra au
monde scolaire de connaître les notions élémentaires de
droit afin de ne pas être victime de l'ignorance.
L'accès au juge interne constitue une urgence dans la
lutte contre l'impunité des tortionnaires. Il faudra donc assurer ce
droit tout en l'améliorant avec les garanties qu'offrent les conventions
internationales en la matière. Cette mesure permettra de connaître
la supériorité et la force obligatoire au niveau national des
instruments de protection des droits humains.
Section 2 : la dynamique de la
supériorité de la norme internationale
La dynamique de la supériorité de la norme
internationale par rapport à la norme nationale suppose d'abord que la
convention internationale prime sur la loi nationale quand les deux se
contredisent, ensuite que le juge interne respecte l'interprétation
faites par le juge international.
Paragraphe 1 : l'applicabilité directe des
conventions internationales par le juge interne
Dans l'optique d'une application des instruments
internationaux relatifs aux droits de l'homme, le juge interne pourra, dans un
premier temps, se servir de ces normes internationales pour enrichir sa loi
nationale, et dans un second temps, s'en servir en lieu et place de sa loi
nationale.
A/Convention internationale : source
d'élargissement du pouvoir de création du droit des juges
Le juge national, saisi d'une plainte faisant
allégation de torture et des peines et traitements cruels, inhumains ou
dégradants peut et il doit le faire pour ne pas être un obstacle
à l'évolution internationale des droits de l'homme, recourir
à la convention onusienne et à des dispositions pertinentes de
convention ou charte régionales pour compléter la loi nationale
ou pour l'enrichir.
Ainsi, le juge national peut se servir de deux manières
des conventions internationales pour pouvoir rendre une décision
exemplaire.
Dans un premier temps, le juge doit recourir de manière
systématique à la norme internationale pour
compléter la loi nationale là où elle apparaît
incomplète, lacunaire, insuffisante ou en contradiction avec la
convention onusienne.
Plusieurs jurisprudences montrent que les juges internes
ouverts au droit international n'ont pas hésité à recourir
à la norme internationale pour compléter la loi
nationale115(*).
Dans un second temps, le juge doit recourir à la norme
internationale pour enrichir la loi nationale, pour la vivifier, en
dégager toutes les potentialités pour protéger les droits
humains116(*).
Cette ouverture du juge national permet non seulement de
donner effet à la convention au profit des particuliers qu'elle est
censée protéger, mais aussi permet à l'Etat partie dont il
est l'organe de respecter ses engagements internationaux.
B/Le principe d'application de la convention par le
juge national
Pour assurer l'effectivité de la convention en droit
interne, le meilleur moyen et le plus simple est l'application de ces
dispositions par le juge interne lors de ses décisions par rapport aux
plaintes qui lui sont soumises.
L'applicabilité directe et la primauté des
conventions internationales relatives au droit de l'homme ont fait l'objet
d'une littérature particulièrement abondante.
Pour le Dr Alain Didier OLINGA,
« l'applicabilité directe des traités
internationaux reste une question de stratégie jurisprudentielle,
d'attitude globale face au droit international, ou tout simplement un
réflexe d'opportunité, lié au contexte de la
décision. »117(*)
Mais pour Hervé BRIBOSIA, la principale condition
d'applicabilité interne d'un traité est sa réception dans
l'ordre étatique par la loi118(*) qui lui permettra de produire d'effet
direct119(*). Ainsi les
particuliers sous la juridiction d'un Etat partie à la convention
peuvent se prévaloir directement devant le juge national de cette
convention. Cette possibilité permettra à toute personne se
trouvant sur un territoire sous la juridiction d'un Etat partie qui n'aurait
pas pris les mesures préconisées par la convention pour rendre
conforme son droit national, de bénéficier directement des
dispositions de celle-ci, comme le recommande la jurisprudence le
Ski : « Attendu que, lorsque le conflit existe entre
une norme de droit interne et une norme de droit international qui a des effets
directs dans l'ordre juridique interne, la règle établie par le
traité doit prévaloir ; que la prééminence de
celle-ci résulte de la nature même du droit international
conventionnel »120(*).
Mais l'application des conventions par le juge national un
autre avantage non moins important. Elle permet à l'Etat de respecter
ses engagements internationaux.
En effet, la méconnaissance dans son droit interne de
la convention internationale qu'il s'est engagé à respecter met
l'Etat dans la position de violation de la convention devant le juge
international. Car l'application d'une règle nationale clairement
incompatible avec la disposition d'un traité peut constituer un fait
illicite international121(*).
Paragraphe 2 : L'autorité de chose
interprétée par les juridictions internationales
Il n'est pas suffisant que le juge national applique la
convention ou s'en serve comme source d'élargissement du droit. Il faut
surtout qu'il l'interprète dans le sens donné par l'instance
internationale chargée de sa supervision, comme l'a fait, la
deuxième chambre civile du tribunal fédéral suisse, en
privant d'effet la déclaration interprétative suisse relative
à l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne des droits
de l'homme, suivant ainsi la cour européenne des droits de l'homme.
C'est seulement à cette condition que les justiciables pourront
bénéficier de l'évolution de plus en plus efficace du
droit international des droits de l'homme.
De plus, dans les litiges auquel il est partie, l'Etat est
lié par l'autorité de chose interprétée par
l'instance internationale122(*). Le juge étant un organe de l'Etat, il est
aussi lié par les engagements qui lient son Etat.
En effet, par son fait, le juge peut engager la
responsabilité de l'Etat. Il en est ainsi parce que l'instance
internationale ayant un contrôle supranational. Il vérifie le
respect des engagements pris par l'Etat. Et ce respect suppose
l'obéissance par tous les organes de l'Etat de ces engagements.
Il est vrai que certains juges peuvent se réfugier dans
le respect des règles internes de séparation des pouvoirs et
chercher à se limiter dans l'interprétation de sa loi
nationale123(*). Mais en
agissant ainsi, il dénie à ses justiciables ce caractère
« d'identité universelle de la personne
humaine »124(*) qui a pour fondement l'égalité de tous
les êtres humains. Les droits de l'homme ne sont pas, en effet,
attribués aux individus au moyen d'un statut juridique
particulier ; au contraire, ils sont attachés par principe,
à la seule qualité de la personne humaine125(*). C'est pourquoi, le juge
interne doit pouvoir, afin de faire produire à la convention l'effet
utile auquel elle prétend, mettre de côté les règles
de droit interne qui limitent sa compétence. Ce procédé
lui permettra certainement de déclarer, de nul effet les
déclarations retenues sous l'effet de la torture.
CONCLUSION GENERALE
On a voulu, dans ce travail présenter et évaluer
le système répressif d'une des violations les plus
fréquentes des droits de la personne.
Le premier constat qui s'est imposé est celui d'une
déception voire une certaine hypocrisie : les Etats et les
organisations internationales sont très dynamiques dans la
définition des droits de l'homme. Mais au stade pratique de leur mise en
oeuvre, ils deviennent perplexes voire hostiles. C'est la cause fondamentale de
l'échec de toutes les politiques d'éradication du crime de
torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants.
L'impunité est l'une des causes majeures de la
persistance de la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou
dégradants. Les différents mécanismes de lutte contre ce
crime ont attaché peu d'importance à la répression. Le
mécanisme onusien, universel qui devrait bénéficier
à toute l'humanité se trouve être léger du fait du
caractère politique de l'organisation en charge126(*).
Au niveau régional, les instances n'ont pas
nécessairement le pouvoir qu'il faut bien réprimer le crime.
Très souvent, la procédure devant ces instances est telle que
l'individu, alléguant des actes de torture ne peut les saisir
directement pour avoir justice.
C'est seulement au sein du conseil de l'Europe, avec la cour
de Strasbourg qu'on observe une efficacité certaine de la
répression des actes de torture et les peines et traitements cruels,
inhumains et dégradants. Mais là encore, les plaintes se
multiplient au jour le jour et débordent la cour. Il revient alors au
juge national, premier protecteur des droits de l'homme à prendre
conscience de son rôle.
Pour ce faire, il doit dépasser les mesures très
souvent rétrogrades de son droit national. Le droit international des
droits de l'homme met tous les individus quel que soit le pays dans lequel ils
vivent sur le même pied d'égalité pour leur faire
bénéficier des mêmes protections et des mêmes
garanties qu'il offre. C'est pourquoi, le juge national est tenu d'exploiter
les mécanismes internationaux.
Les mécanismes de surveillance de l'application du
droit international humanitaire sont relativement faibles. Dans les cas de
torture, les Puissances protectrices et le CICR peuvent faire des
démarches auprès de l'État responsable partie aux
Conventions de Genève et aux Protocoles, mais il n'existe pas de
procédures officielles permettant de faire appliquer l'interdiction de
la torture. La Commission internationale d'établissement des faits,
créée en application de l'article 90 du Protocole I, est
notamment habilitée à enquêter sur des cas graves de
torture.
En revanche, le droit humanitaire a joué un rôle
essentiel dans l'élaboration de modalités d'application
concernant la répression pénale des infractions graves aux
obligations fondamentales découlant des Conventions de Genève et
de leurs Protocoles additionnels. La torture est explicitement
mentionnée dans la définition des infractions graves
donnée dans les quatre Conventions. Les États sont tenus de
« (...) prendre toute mesure législative nécessaire pour
fixer les sanctions pénales adéquates à appliquer aux
personnes ayant commis, ou donné l'ordre de commettre (...) » de
tels actes ; ils ont également l'obligation « de rechercher les
personnes prévenues d'avoir commis, ou d'avoir ordonné de
commettre, l'une ou l'autre de ces infractions graves, et [ils devront] les
déférer à [leurs] propres tribunaux, quelle que soit leur
nationalité (...) », si elles ne sont pas extradées vers un
autre État partie. La torture étant ainsi clairement reconnue
comme un acte impliquant la responsabilité pénale personnelle des
auteurs, il n'est pas étonnant qu'elle soit aussi mentionnée dans
les actes punissables par les Tribunaux internationaux créés pour
juger les crimes commis dans l'ex-Yougoslavie et au Rwanda. La torture figure
en outre dans la liste du projet de code des crimes contre la paix et la
sécurité de l'humanité127(*).
La responsabilité individuelle ne
relève généralement pas des droits de l'homme. Il est donc
crucial pour lutter contre la torture qu'en vertu des articles 4 et 5 de la
Convention contre la torture, les États promulguent des lois
prévoyant de sanctionner les auteurs d'actes de torture -- qu'il
s'agisse de leurs propres ressortissants ou d'étrangers, si ceux-ci ne
sont pas extradés. Si, conformément aux travaux
préparatoires, ces dispositions sont inspirées de conventions se
rapportant à la lutte contre le terrorisme128(*), elles sont fondées
sur la notion de responsabilité individuelle dans le cas d'infractions
graves au droit international humanitaire.
En l'état actuel, le droit international montre que les
instruments de droit humanitaire et ceux des droits de l'homme offrent un
ensemble complet de normes et de procédures relatives à la
prévention et la répression des actes de torture et à la
réparation de tels actes. Du point de vue historique, ces deux branches
du droit se sont influencées mutuellement de manière positive.
Aujourd'hui, les faiblesses constatées dans l'une peuvent bien souvent
être compensées en invoquant des instruments relevant de l'autre.
Le fait que la torture continue d'exister dans de nombreux pays n'est pas
dû à un vide juridique, mais plutôt à un manque de
volonté politique des États de s'acquitter des obligations qui
leur incombent en vertu du droit international humanitaire et des droits de
l'homme.
En effet, les dispositions de l'article 7 du pacte
international relatif aux droits civils et politiques sont absolues et
indérogeables, même en cas d'urgence national. Et la convention
contre la torture, peines et traitements cruels, inhumains ou
dégradants, n'est que le développement de cet article du pacte,
dans le souci de sa mise en oeuvre129(*). Mais aussi paradoxal que cela puisse
paraître, la disposition principale de cette convention est
facultative130(*), ce
qui ne lui permet pas d'atteindre son objectif. Il faut donc que les juges
internes s'en servent pour lui donner l'effet que le caractère
volontaire du droit international lui a dénié.
La formation que reçoivent les juges nationaux est
souvent centrée sur le droit national. S'ils connaissent le droit
international, ce n'est que de façon superficielle
De ce point de vue, la répression efficace de la
torture n'oblige-t-elle pas qu'on revoit la formation à donner aux
magistrats de chaque pays ?
Jurisprudence de la cour européenne des droits de
l'homme et du comité des droits de l'homme
Projet de protocole facultatif à la convention de
1984
Déclaration universelle des Droits de l'Homme
Modèle de communication
BIBLIOGRAPHIE
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le droit international et la défense des droits de l'homme, Paris, EFAI,
1985, 416 pages.
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SCHABAS, William A. : les réserves des Etats-Unis
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SUDRE, Frédéric : « Extradition et
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RAPPORTS-COLLOQUES
1- Actes du colloque de la commission des juristes, Nairobi,
du 2 au 4 décembre 1985, 118 pages.
2- Colloque sur l'effectivité des droits fondamentaux
dans les pays de la communauté francophone à Port-Louis, les 29,
30 septembre et 1er octobre 1993. AUPELF-UREF, 258 pages.
3- CPT, 11ème rapport général
d'activité, couvrant la période du 1er janvier au 31
décembre 2000, Strasbourg, 3 Septembre 2001.
JURISPRUDENCE
1- CEDH : arrêt Irlande contre Royaume-Unis du 18
Janvier 1978, série A, n°25.
2- CPJ : affaire du lotus du 7 septembre 1928, I,
R.C.D.I.P.
3- CDH : constatation n° 172/1984 du 9 Avril
1987 : S.W.M. Brocks contre Pays-Bas, in : Documents d'études,
n°3-6, 1999.
4- CEDH : arrêt Belilos du 24 avril 1988,
série A, N°132.
5- CEDH : arrêt campbell et cosans du 25
février 1982, série A.
6- CEDH : arrêt Ranien contre Finlande, in
R.T.D.H., n°38/99 pp. 291-298
7- CEDH : arrêt Soering c. Royaume-Unis du 7
juillet 1989, série A.
8- CEDH : arrêt D. contre Royaume-Unis du 2 mai
1997, série A.
9- CEDH : arrêt Ahmed Sadik contre Grèce du
15 Novembre 1996, série A.
TEXTES OFFICIELS ET JURIDIQUES
1- Projet facultatif à la convention contre la torture
et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants.
2- Statut de Rome de la cour pénale internationale, in
code de droit international humanitaire, Bruxelles, 2002, 750 pages. Textes
réunis par Eric DAVID, Françoise TULKENS et Damien
VANDERMEERSCH.
3- Convention contre la torture, peines et traitements cruels,
inhumains ou dégradants, in : code de droit internatioanl des
droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant, 2000. Textes réunis par Olivier
DE SCHUTTER, Françoise TULKENS et Sébastien VAN BROOGHEN
BROEK.
4- Statut de Ouagadougou du protocole relatif à la
charte des droits de l'homme et des peuples portant création d'une cour
africaine des droits de l'homme et des peuples, in : code de droit
international des droits de l'homme.
5- Charte des Nations-Unies et statut de la cour
internatioanle de justice.
6- Convention de Vienne sur le droit des traités.
7- Observation générale n°24 (52) du 4
novembre 1994.
8- Convention américaine relative aux droits de
l'homme, in : code de droit international des droits de l'homme.
9- Charte africaine des droits de l'homme et des peuples,
in : code de droit international des droits de l'homme.
10- Convention européenne des droits de l'homme
n : code de droit international des droits de l'homme.
11- Déclaration islamique des droits de l'homme
12- Déclaration universelle des droits de l'homme,
in : code de droit international des droits de l'homme.
13- Pactes international relatif aux droits civils et
politiques in : code de droit international des droits de l'homme.
SITES INTERNET
1- http://www.unhchr.ch
2- http://www.asf.be
3- http://www.ictr.org
4- http://www.icty.org
5- http://www.ichrdd.ca/publications f/femtri.html
6- http://www.un.org
7- http://www.fundp.ac.be
8- http://www.echr.coe.int
9- http://www.parliament.the
stationery-office, co.uk/pa/Id
10- http://www.excite.fr
TABLES DES MATIERES
INTRODUCTION GENERALE
1ére PARTIE : source abondante du droit et
répression inefficace de la torture au plan international
Chapitre 1 : présentation d'ensemble du
fondement répressif de la torture en droit international
Section 1 : une diversité d'arsenal de
répression
Paragraphe 1 : la convention contre la torture
Paragraphe 2 : les autres instruments de
répression de la torture
Section 2 : un régime répressif virtuel de
la torture
Paragraphe 1 : l'organisation institutionnelle
A- Le comité contre la torture
B- Les autres institutions
Paragraphe 2 : les règles de la
procédure
A- La compétence des juridictions nationales
1- Les juges internes et la répression de la torture
2- La compétence universelle des juridictions
nationales
B- L'action devant les juridictions internationales
Chapitre 2 : le système des réserves
au fondement de la répression de la torture
Section 1 : problématique des réserves aux
instruments relatifs aux droits de l'homme
Paragraphe 1 : régime général
des réserves aux traités
Paragraphe 2 : la spécificité des
conventions relatives aux droits de l'homme
A- Possibilité de formuler des réserves
B- Contrôle de la compatibilité des
réserves
Section 2 : les réserves à la convention de
1984
Paragraphe 1 : les Etats ayant fait des
réserves
Paragraphe 2 : les conséquences des
réserves sur la convention de 1984
2ème Partie : la
nécessité d'un changement de stratégie dans la
répression de la torture
Chapitre 1 : une dynamisation
nécessaire
Section 1 : les mesures envisagées
Paragraphe 1 : le projet de sous-comités
A- Le contenu de la réforme
B- Les limites de la réforme
Paragraphe 2 : l'implication de tous les organes de l'ONU
dans la lutte contre la torture
A- Les actions
B- Les limites
Section 2 : les mesures envisageables
Paragraphe 1 : l'expérience de la cour de
Strasbourg
Paragraphe 2 : la prise en compte d'une répression
alternative
Chapitre 2 : le juge interne : un organe
incontournable dans la répression de la torture en droit
international
Section 1 : les garanties du droit d'accès
au juge interne
Paragraphe 1 : les obstacles à surmonter
Paragraphe 2 : la restauration d'une justice classique
Section 2 : la dynamique de la supériorité
de la norme internationale
Paragraphe 1 : l'applicabilité directe des
conventions internationales par le juge
A- Convention internationale : source
d'élargissement du pouvoir de création du droit des juges
B- Le principe d'application de la convention par le juge
national
Paragraphe 2 : l'autorité de chose
interprétée par les juridictions internationales
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE
* 1 Rés.2002/38 de la
commission des droits de l'homme du 22 Avril 2002 P.1
www.un.org.
* 2 Salmon, Jean (sous la
direction de dictionnaire de droit international public, Bruylant,
Bruxelles, 2001
* 3 CEDH, Arrêt Irlande c.
Royaume Unis, 18 Janvier 1978, série A n°25
www.echr.coe.int
* 4 Salmon, Jean
précité
* 5 CORNU, Gérard (sous
la direction de) Vocabulaire juridique, PUF, Paris 1987
* 6
* 7 Traduction du CICR. En
effet, les scènes de torture s'observent un peu partout et non seulement
dans les prisons et autres lieux de détention.
* 8 Il faudrait souligner que
c'est avec l'autorisation de l'Etat concerné que le CICR y
procède.
* 9 Aujourd'hui appelé
Association pour la prévention de la torture
* 10 La torture se pratique
presque quotidiennement dans beaucoup de pays du monde. Cf les rapports annuels
d'Amnesty International
* 11 Préambule du projet
de protocole facultatif à la convention contre la torture et autres
peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants.
* 12 ASCENCIO, H. ;
DECAUX, E. et ALAIN, P : le droit international pénal, A ;
Pédone, Paris, 2000, p. 917
* 13 Statut de la CPI :
art. 6-b : la torture est qualifiée de génocide ; art.
7-f : elle est qualifiée de crime contre l'humanité ;
art. 8-2-a : elle est qualifiée de crime de guerre.
* 14 SUDRE,
Fréderic : les mécanismes et les techniques de garantie
internationale des droits fondamentaux : les mécanismes quasi
juridictionnels et juridictionnels, AUPEF-UREF, sans pagination
* 15 Le comité pour
l'élimination de toutes formes de discrimination raciale et le CCT sont
les seuls organes à prévoir ce mode de financement.
* 16 DORMENVAL,
Agnès : procédures onusiennes de mise en oeuvre des droits
de l'homme : limites ou défauts ?, PUF, Paris 1991, P.166
* 17 Supra note n° 12
* 18 SUDRE, F., cité
note n°13
* 19 Cf. www.google.fr
* 20 BA Abdul et
autres : l'organisation de l'unité africaine : de la charte
d'Addis-Abéba à la convention africaine des droits de l'homme et
des peuples, Paris, Silex, 1984, pp. : 410-411
* 21 Face à l'emprise et
à la pénétration croissante de la convention
européenne dans le droit national, l'attitude de la jurisprudence
française, notamment celle de la cour de cassation est ambivalente, elle
est faite tout à la fois d'ouverture et de réticences, d'audace
et de prudence, d'avancées et de réticences : Regis de
GOUTTES : le juge français et la cour européenne des droits
de l'homme : avancées et résistances... in RTDH n°
24-1995, Bruylant, Bruxelles, P.605.
* 22 En Côte d'Ivoire par
exemple, en matière de violation des droits de l'homme, les justiciables
préfèrent s'adresser à la cour constitutionnelle
plutôt qu'à un juge de droit commun ou administratif puisque la
procédure est moins complexe et rapide, mais surtout parce que le juge
constitutionnel applique et la constitution et la charte africaine qui sont les
directives tracées par la charte internationale des droits de
l'homme.
* 23 Cf. art.4 et 16 de la
convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants.
* 24 Les exemples sont
légions : Pinochet, Hissein Hahré, Capitaine Ely Ould
Dah...
* 25 ASCENCIO, H. ;
DECAUX, et ALAIN, p : op. cit., p. 373
* 26 ASCENCIO, H. ;
DECAUX, et ALAIN, p : op. cit., p. 305
* 27 CPJ.I, 7 septembre,
Affaire du Lotus, R.C.D.I.P., p.354, Note H. Donnedieu de Vabres.
* 28 Cf. art. 689-2 du code
pénal de procédure pénale français
* 29 Le 16 octobre 1998, l'ex
dictateur chilien Augusto Pinochet est arrêté à Londres
pour torture sur requête du juge espagnol Bathazar Garzon : TINE,
A : la cour pénale internationale ; l'Afrique face au
défi de l'impunité, édition Raddho, Dakar, 2000, p. 49.
* 30 TINE, A
précité, note n°28
* 31 SUDRE, F., op. Cit.
* 32 La cour issue du protocole
relatif à la charte portant création d'une cour africaine des
droits de l'homme et des peuples, statut de Ouagadougou, 9 Juin 1998 n'est pas
encore entrée en vigueur, faute de ratification suffisante. Sur les 15
ratifications nécessaires, jusqu'en janvier 2003, seuls 6 pays ont
déposé leurs instruments de ratification : Afrique du Sud,
Burkina Faso, Gambie, Mali, Ouganda et Sénégal.
* 33 KEBA MBAYE :
IN : `'Rapport introductif sur la charte africaine des droits de l'homme
et des peuples'',actes du colloque de la commission internationale des
juristes, Nairobi, du 2 au 4 décembre 1985, p. 42.
* 34 Cf. Haut Commissariat des
Nations Unies pour les droits de l'homme :www.unhchr.org :
modèle de communication
* 35 Les affaires de violation
aux droits de l'homme portées devant le CDH ont souvent
été sanctionnées par des réparations
accordées aux victimes : constatation n° 172/1984 du 9 avril
1987 : S.W.M. Broeks c. Pays-Bas, documents d'études
n°3.06.1999. Protection Universelle des droits de l'homme.
* 36 Cité par
Gérard COHEN-JONATHAN : la décision du comité des
droits de l'homme des Nations-Unies du 2 novembre 1999 dans l'affaire Kennedy
contre Trinité-et-Tobago ; des réserves au premier protocole
facultatif In Rn° 6-9/2000, p. 213.
* 37 Cf. art. 2-1 de la charte
des Nations Unies.
* 38 En effet, une fois
engagé, l'Etat est obligé de respecter le traité sans quoi
il engage sa responsabilité internationale : art 26, convention de
Vienne sur le droit des traités
* 39 Mazyambo Makengo
KISALA : l'Etat d'acceptation du pacte international relatif aux droits
civils et politiques et de son 1er protocole facultatif par les
etats africains, in revue de droit africain n°3/97, p.8
* 40 COOCIA, M. cité par
Mazyambo Makengo KISALA, ibid
* 41 CIJ, Recueil des
arrêts ; Avis consultatifs et ordonnances, 1951, p.22
* 42 Mazyambo Makengo KISALA,
précité.
* 43 Cf. art.20-3 de la
convention de Vienne sur le droit des traités.
* 44 Mais l'article 20-1
énonce qu'une réserve expressément autorisée n'a
pas besoin d'être acceptée à moins que le traité ne
le prévoit.
* 45 William A. SCHABBAS :
les réserves des Etats-Unis d'Amérique au pacte interational
relatif aux droits civils et politiques en ce qui a trait à la peine de
mort, in R.U.D.H. N°4-6, 1994, P.140. Aussi non moins pertinent :Obs.
Générale n°24 (52) para 4, www.un.org.
* 46 Le comité des
droits de l'homme fait la même remarque sur le 1er protocole
facultatif par rapport aux droits contenus dans le pacte, obs.
générale n°24c (52)§ 13-14, op.cit.
* 47 SUDRE, F. op. cit
* 48 Observation
générale n°24 (52) §5, op. cit
* 49 En effet
l'interprétation faite par le comité des droits de l'homme
à l'égard du silence du pacte peut-être appliqué
aussi en silence de la charte africaine, cf. obs. générale
n° 24 (52) §4 et 5, op. cit.
* 50 CEDH : arrêt
Belilos du 24 avril 1988, série A, n°132,
www.echcr.coe.int: c'est depuis
cet arrêt que la cour a décidé de sanctionner
elle-même les réserves considérées comme contraires
à l'objet et au but de la convention ou trop générales.
* 51 COHEN-JONATHAN,
Gérard : op. cit P.209
* 52 Mazyambo, Makengo, KISALA,
Loc. cit.
* 53 Mazyambo, Makengo, KISALA,
Ibid
* 54 F. SUDRE, cité par
M. M. KISALA, Ibid
* 55 COHEN JONATHAN,
Gérard, op. cit. p.209
* 56GOLSONG, H. Cité par
Mazyambo, Makengo, KISALA, op. cit. p.10. il existe cependant des instruments
relatifs aux droits de l'homme qui ont adopté des règles
semblables à celles établies par la convention de Vienne. Tel est
e cas des conventions relatives aux droits de la femme et à
l'élimination raciale.
* 57 Texte publié en
anglaisdans la revue Human Rights Law journal, 1994, vol 15 n°11-12
pp.464-467
* 58 Mazyambo,
Makengo, KISALA, op. cit. p.11
* 59 Pour un commentaire de
cette jp, voy COHEN-JONATHAN, GERARD : la décision du comité
des droits de l'homme des Nations Unies du 2 novembre 1999 dans l'affaire
Kennedy c. Trinité-et-Tobago. Des réserves au premier protocole
facultatif, pp. 209-217.
* 60L'état de la
Convention de 1984 au 1er juillet 2002
* 61 Cf. COHEN-JONATHAN,
Gérard, précité p.210
* 62 Christine SHANET,
présidente du comité des droits de l'homme, citée par
COHEN-JONATHAN : elle réagissait suite aux conclusons
adoptées par la commission du droit international selon
lesquelles : « en cas d'illicéité d'une
réserve, il appartient à l'Etat, auteur, d'en tirer les
conséquences ».
* 63 Voy. Obs.
générale n° 24 (52) § 17, op.cit.
* 64Voy. Obs.
générale n°24 (52) §18, op.cit.
* 65 Christine CHANET,
présidente du comité des droits de l'homme, citée par
COHEN-JONATHAN,
* 66 L'article 7 du pacte
provient de l'article 5 de la DUDH, cf préambule de la convention contre
la torture § 4
* 67 Voir notamment William
SHABAS, op. cit. pp. 140-141 et aussi observation générale
n°24 (52), op. cit.
* 68 Beausoup s'accordent
à reconnaître que le CCT fait partie des plus actives des
institutions onusiennes chargées de protéger les droits de
l'homme ; mais on oublie très souvent que ses actons se limitent
à des constats de violations par tel ou tel partie, puisqu'il n'arrive
pas à étudier le cas de chaque victime pour en accorder des
réparations.
* 69 DORMENVAL, Agnès,
op. cit.pp. 112-113 : elle estime que les limites aux organes onusiennes
sint inhérentes au domaine auquel elles appartiennent à savoir
droit international public.
* 70 Mazyambo Makengo Kisala,
loc. cit : le principe de la souveraineté exclusive des Etats
devrait être limité au droit international classique, le droit
international des droits de l'homme devrait être
échappé.
* 71 En effet, il est
fréquent que le juge rejette les allégations de torture sous
prétexte qu'elles ne sont pas prouvées.
* 72 Préambule du projet
de protocole facultatif à la convention contre la torture §2.
* 73 Divers mécanismes
pareils à ce que le protocole facultatif existaient déjà
dans certains pays mais n'ont rien apporté comme solution. C'est le cas
par exemple du Comité National des droits de l'homme au Cameroun,
créé par décret n° 90/1459 du 8 novembre 1990.
* 74 Par exemple le fait
d'exposer des fillettes au risque d'excision est une violation des dispositions
interdisant la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou
dégradants : trib. Administratif de Lyon, 12 Juin 1996.
* 75 Les humiliations
assimilables à des traitements inhumains ou dégradants sont plus
graves si elles surviennent en public, dans la rue par exemple.
* 76 Obs.
générale n° 24(52), op. cit ;
* 77 Observation
générale n°20 (44), Document N.U.
CCPR/C/21/Rév/1Add/3 §6.
* 78 www.un.org
* 79 On peut par exemple isoler
(embargo) un gouvernement réfractaire aux mesures de garanties efficaces
contre la torture.
* 80 Arrêt Irlande c.
R.U, précité.
* 81 L'art.3 de la CEDH
énonce : « Nul ne peut être soumis à la
torture ni à des peines ou traitements inhumains ou
dégradants ».
* 82 Syméon
KARAGIANNNIS/ Expulsion des étrangers et mauvais traitements imputables
à l'Etat de destination ou à des particuliers, in RTDH n°
37/99, P ; 34.
* 83 Cf. arrêt Selmouni,
in : RTDH n° 41/2000, p.123 et suivants.
* 84 Pierre LAMBERT,
Dignité humaine et interrogations musclées de la police,
in : RTDH n° 41/2000 p.138.
* 85 Pierre LAMBERT,
op.cit.p.139
* 86 Arrêt Irlande c.RU,
précité
* 87 CPT,
11ème rapport général d'activité,
couvrant la période du 1er janvier au 31 Décembre
2000, Strasbourg, 3 septembre 2001
* 88 CEDH : arrêt
Campbell et Csans du 25 Février 1982, série A.
www.echr.coe.int
* 89 CEDH : arrêt
Ranien c. Finlande, in RTDH n°38/99, le requérant se plaint d'avoir
été victime d'un « traitemen
dégradant » contraire à l'article 3.
* 90 Syméon
KARAGIANNIS : loc.cit.
* 91 CEDH : ARRËT
Soering c. RU du 7 Juillet 1989, série A. www.echr.coe.int
* 92 C'(est le lieu où
le condamné à mort est emprisonné en attendant son
exécution ; on l'appelle aussi `'quartier des morts''.
* 93 Le raisonnement de la CEDH
est extrêmement sinueux ainsi que le relève le professeur F.
SUDRE : « extradition et peine de mort : arrêt
Soering de la CEDH du 7 juillet 1989, RGDIP, 1990 pp. 103-122.
* 94 L'art. 2§1 de la CEDH
est relative à la protection de la vie et à la peine de mort. Il
n'interdit point la peine capitale car il énonce : »le
droit de toute personne à la vie est protégée par la loi.
La mort ne peut être infligée à quiconque
intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale
pronnonc ée par un tribunal au cas où le délit est
puni de cette peine par la loi ». (nous l'avons souligné)
* 95 Syméon KARAGIANNIS,
loc. cit.
* 96 Cf. arrêt Soering c.
Ru précité
* 97 Syméon KARAGIANNIS,
loc. cit
* 98Henri
LABAYLE : « l'éloignement des étrangers
devant la CEDH » in RFDA, 1997.p0 989
* 99 CEDH : arrêt D
c. Ru du 2 mai 1997, série A
www.echr.coe.int/: la cour estime
que l'expulsion d'une personne condamnée au RU vers son pays d'origine
(Saint Kitts) serait contraire à l'article 3 du moment où cette
personne se trouve en phase terminale du sida et ne pourrait pas retrouver dans
l'Etat d'arrivée le soutien moral et médical dont il
bénéficie au RU. « Son expulsion l'exposerait à
un risque réel de mourir dans des circonstances particulièrement
douloureuses »§ 53 de l'arrêt.
* 100 Dans son observation
générale n° 24 (52), précité, le CDH s'est
largement inspiréde la jp de la cedh en particulier des solutions des
arrêts Belilos et Loizoidou.
* 101 La convention de 1984 y
oblige les Etats parties (art 10)
* 102 Les procédures
qui sont très souvent classées, sans suite en matière de
torture le sont très souvent à cause de la dépendance des
enquêteurs au supérieur hiérarchique, mais aussi à
la légèreté.
* 103 Ces dommages et
intérêts qui touchent directement le patrimoine du tortionnaire
est une sanction véritablement dissuasive.
* 104 Amnesty
International : la torture ou l'humanité en question, EFAI, Paris,
2000, P. 97
* 105 Amnesty International
p.95
* 106 La cour suprême de
Sri Lanka accorde chaque année des indemnités à des
personnes qui ont été torturées par les policiers, alors
qu'aucun responsable de torture n'a, à ce jour, été
reconnu coupable par une juridiction Srilankaise. Cf. A I
précédemment cité, p.98
* 107 COUVRAT, P. :
l'accès à la justice et ses obstacles, in : Colloque sur
l'effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la
communauté francophone à Port- Louis les 29, 30 septembre et
1er octobre 1993 AUPELF-UREF, 1994, p. 258.
* 108 COUVRAT, P. note
106
* 109 Les intimidations et les
menaces à l'encontre des victimes de tortures les empêchent de
porter plainte : cf. AI, cit.p. 90.
* 110 Les enquêtes sur
les allégations de torture sont parfois menées par l'organisme
auquel appartiennent les auteurs des sévices. Ce qui fait que ces
enquêtes débouchent sur des preuves qualifiées
d'insuffisantes : cf. AI
* 111 SAWADOGO, F6M :
l'accès à la justice en Afrique francophone :
problèmes et perspectives : le cas du Burkina-Faso, in :
colloque sur l'effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la
communauté francophone p. 297.
* 112 Amnesty International
pp. 91-92
* 113 DEGNI-SEGUI, R. :
l'accès à al justice et ses obstacles, in :
l'effectivité des droits fondamentauxdans les pays de la
communauté francophone, ed. Kéilher, 1994, p. 253.
* 114 DIENG, A. :
assistance juridique aux populations rurales, in : justice en Afrique.
Afrique contemporaine n° spécial 156, sous la direction de :
GAUDUSON, J.B0 et CONAC, G, la documentation française, Paris, 1990.
* 115 Cf. cass. Crim. 15 mai
1990 en France qui s'est efforcé de compléter lui-même le
droit sur les écoutes téléphoniques à la suite des
arrêts de condamnation de la CEDH du 24 avril 1990 (Kruslin et Huvig), et
ce, jusqu'à ce qu'intervienne la nouvelle loi française du 10
juillet 1991.
* 116 GOUTTES, Régis
de : le juge français et la convention européenne des droits
de l'homme : avancées et résistances...op.cit. p607
* 117 OLINGA, A.D. :
l'applicabilité directe de la convention internationale sur les droits
des enfants devant le juge français, in : RTDH n°24/1995,
p.713.
* 118BRIBOSIA, H. :
applicabilité directe et primauté des traités
internationaux et du droit communautaire ; réflexion
générale sur le point de vue de l'ordre juridique belge,
in : RBDI, Vol. XXIX, 1996-1, p.36
* 119L'effet direct d'une
norme de droit international se définit comme son aptitude à
conférer par elle-même au particulier sans requérir aucune
mesure interne d'exécution, des droits dont ils puissent se
prévaloir devant les autorités juridictionnelles de l'Etat
* 120 Cass.
1ère chambre, 27 mai 1971, Pas, I, 886, arrêt le Ski
(Belgique). Aussi la non moins pertinente jp : CEDH, arrêt Ahmed
SADIK contre Grèce du 15 novembre 1996, série A : la cour
dit « la convention forme partie intégrante du système
juridique grec où elle prime toute disposition contraire de la
loi ».
* 121 BRIBOSIA, H. op. cit.
p.57
* 122 Arrêt du 17
décembre 1992, cf FLAUSS, Jean-François, op. cit. p.303.
* 123 DE SCHUTTER, O. :
la coopération entre la cour européenne des droits de l'homme et
le juge national, il : RBDI Vol. XXX, 1997-1. P.67.
* 124 Pour M. de SCHUTTER, il
s'agit d'un dilemme pour le juge. Il utilise le critère de la
proportionnalité pour aider à résoudre ce dilemme :
l'excès de pouvoir que le juge doit commettre, au regard des
règles dudroit interne relatives à la séparation des
pouvoirs ne doit pas excéder ce qui est strictement nécessaire
à assurer le respect par l'Etat de ces obligations
internationales ; op. cit. p.9
* 125 L'expression est de M.
Mazyambo, Makengo, Kisala, op. cit. p.9
* 126 Voir note n°68
* 127 . Voir J. Herman
Burgers/Hans Danelius, The United Nations Convention against torture,
Dordrecht/Boston/Londres, 1988, pp. 56, 57 et 130, qui mentionne comme sources
d'inspiration la Convention sur la prévention et la répression
des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale,
y compris les agents diplomatiques (1973), la Convention internationale contre
la prise d'otages (1979), ou la Convention pour la répression de la
capture illicite d'aéronefs (Convention de La Haye, 1970).
* 128 Anciennement article 50
de la Convention européenne.
* 129 En effet, c'est pour
donner effet contraignant à l'article 5 de la DUDH qu'il est repris par
le pacte en son article 7 qui est une convention internationale dont l'effet
juridique obligatoire ne se discute pas. La même disposition est reprise
par les instruments régionaux : convention européenne (art
3), charte africaine (art 5), convention américaine (art 5), charte
arabe des droits de l'homme (art 13)
* 130 Il s'agit de l'article
22 qui permet au particulier de saisir le comité contre la torture en
cas de violation de leurs droits.
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