2. Analyse sémiotique de documents et du
discours de CDM
Les thèmes proposés pour l'analyse
sémiotique correspondent à un corpus constitué de trois
groups de documents plus un élément graphique: le logo de
l'association
Citoyens du Monde, deux numéros du bulletin trimestriel
de CDM, deux ouvrages imprimés ; un qui est un recueil de 59 articles de
l'Agence mondialiste de presse et un autre ouvrage qui corresponde à la
somme mondialiste.
a) Document A : Le logo de CDM
Commençons par l'analyse des éléments
graphiques : le logo de l'association CDM est composé de deux
éléments sans relief et entièrement monochromes : un
cercle et la figure d'un homme au centre. Le figure de l'homme est
esquissée d'une façon très simple, il s'agit d'une figure
humaine telle que la dessinerait un enfant : un trait pour les bras, un trait
pour le tronc, un trait pour chaque jambe et un cercle qui représente la
tète. De toute évidence, par sa position, il s'agit d'une
allusion à l'Homme de Vitruve de Leonardo da Vinci,
considéré comme le symbole de la symétrie basique du corps
humain et de l' « universel » par extension. L'Homme de Vitruve est
le symbole de la renaissance et de la pensée de Lumières :
l'homme au centre. La simplicité du dessin nous propose la
représentation d'un minimum commun dénominateur de
l'espèce humaine : il suggère le caractère universel de ce
type de dessins enfantins, qui ne représente ni un adulte ni un enfant.
Le féminin et le masculin, impossible à distinguer, se trouvent
ainsi réunis, la figure est dépourvue de signes raciaux ou
politiques, aucun relief ou dégradé n'interfère avec la
simplicité des formes. Il s'agit en effet de la façon la plus
simple de représenter un être humain.
L'Homme de Vitruve est une symbolique étroitement
liée au mouvement Franc Maçon, mais nous ne nous s'approfondirons
pas cette piste d'analyse à cause de son caractère
spéculatif.
Cette évocation de l'universalité de l'Homme
suggère aussi un accueil chaleureux : les bras sont ouvert, prêts
à recevoir et à prendre dans les bras de façon anonyme. Le
cercle qui l'entoure, et dont il touche les bords, représente la
planète terre. En conclusion, cette composition graphique est un homme
universel dépourvu de caractères différentiels, qui
accueille chaleureusement, en toute simplicité, et par lequel chaque
habitant de la planète peut se retrouver représenté.
b) Documents B : Bulletin trimestriel du centre
Français des Citoyens du monde n°144 et premier numéro de la
nouvelle série.
Ces deux documents correspondent à la publication du
bulletin trimestriel de l'association Citoyens du monde. Malgré
l'appellation de « trimestriel », cette publication reste discontinue
et liée aux moyens humains et économiques actuels fragiles et
instables de l'association. Cette publication fait son apparition au
début des années 1950, elle cessera au milieu des années
soixante et après un petit rebond dans cette période, elle
s'éteint jusqu'à il y a quelques années. Elle est
essentiellement destinée aux adhérents de l'association, et
arrive aux abonnés principalement par voie postale.
Le premier document date du 4ème trimestre
de 2005 (voir annexe 3), il est composé de deux feuilles format A3
pliées, d'une qualité légèrement supérieure
à celle d'un journal de presse. Le deuxième document, qui
appartient à une nouvelle série datée 4ème
trimestre 2009 (voir annexe 4), est composé de 4 feuilles et
imprimé dans le même type de support.
Au niveau de la couverture, les deux publications gardent
globalement la même structure : le quart supérieur constitue
l'en-tête avec le nom de l'association écrit avec la typographie
distinctive de CDM et le sous titre « Bulletin trimestriel du centre
français ». Sur un fond respectivement bleu et rouge pour celui de
2005 et de 2009, on distingue le logo de CDM en monochrome avec une
planète terre en plus pour l'édition 2005. En plus des maximes
idéologiques de CDM qui figurent au-dessus du nom de l'association, nous
trouvons les coordonnées de l'association ainsi que les
références de la publication : codes, prix, date, etc.
Ensuite, sur les deux publications, les titres des articles de
couverture recouvrent un huitième de surface de la Une, le reste est
composé d'un texte rangé en colonnes, comme dans un journal. La
nouvelle édition de 2009 comporte une photographie en noir et blanc d'un
homme, qui est en train de déposer un bulletin de vote. Derrière
lui un grand logo de CDM accroché au mur. La photographie couvre un
huitième de la surface de la Une et se place dans la moitié
inferieure gauche.
En ce qui concerne le contenu, dans l'édition du
4ème trimestre 2005, sur les trois principales colonnes de
texte, l'une rappelle les principes politiques, les revendications militantes
CDM. Elle fait d'abord un bilan général des menaces mondiales
caractéristiques de l'après guerre et de l'époque de la
Guerre froide telles que la menace bactériologique, les bombes
nucléaires, la répétition d'une « solution finale
», etc. Ensuite, l'article fustige l'ambition des états-nations et
leur manque de vision cosmopolitique qui est, selon le texte, la cause
principale du manque de sécurité, d'abondance et de
prospérité dans le monde. Il fait un appel à
fédérer les « peuples du monde », afin de créer
une institution supranationale. Il propose comme geste militant de
s'enregistrer en tant que CDM, comme un moyen de se procurer le droit de vote
pour l'organisation du Congrès des peuples.
La deuxième colonne est une liste des
personnalités de renommée internationale qui ont fait un appel
à la conscience mondiale dans les années 1960, parmi eux, des
Prix Nobels, des intellectuels, des scientifiques, l'ancien maire d'Hiroshima,
entre autres. La troisième colonne, démarquée par un cadre
bleu, correspond à la liste des noms des personnes du Comité de
soutien en France. Et enfin, tout en bas de la page, un encadrement bleu avec
des noms de Citoyens du monde sensés avoir aussi une certaine
renommée.
Le contenu de la couverture de ce Bulletin trimestriel de CDM
de 2005 est essentiellement tourné vers le riche passé politique
de ce mouvement, toutefois il ne conserve pas sa totale pertinence dans
l'actualité. En effet, la moitié des noms figurants sur la Une
sont des personnalités d'un passé politique actif, mais qui ont
peu de rapport avec l'actualité politique de l'association. Et le titre
« le 3 mars 1966, 13 personnalités de réputation mondiale
lancent cet appel » remémore un acte qui a eu lieu 41 ans avant la
publication de ce numéro. Cette publication n'est donc même pas
destinée à commémorer spécialement cet acte,
puisqu'elle correspond au 4ème trimestre 2005.
A l'intérieur, ce bulletin de 2005 affiche une
quinzaine d'articles très hétérogènes
répartis sur les huit pages de la publication. Dès l'ouverture du
document, le courrier des lecteurs occupe une place importante, contenue dans
un rectangle bleu qui le détache du reste des articles. A la tête
de la deuxième page, il est précisé que celle-ci est
traditionnellement réservée à des associations dans
lesquelles militent des citoyens
monde. La suite de la publication aborde, selon un point de vu
mondialiste, des sujets variés tels que la surpopulation mondiale ou des
critiques sur les organismes internationaux. Elle reprend aussi quelques sujets
déjà traités dans les brochures : un rappel historique,
les communes mondialisées, et la Charte de mondialisation à
remplir et à signer si l'on veut déclarer un territoire en tant
que zone mondialisée. Enfin, la publication est clôturée
par le formulaire d'inscription nécessaire pour se déclarer
citoyen du monde, à remplir avec : nom, prénom,
nationalité, date et lieu de naissance, profession, adresse, date et
signature. Elle est proposée en douze langues différentes, parmi
lesquelles l'esperanto. Ce formulaire stipule aussi qu'il est nécessaire
de rajouter un chèque de quinze euros ou sept euros cinquante pour les
précaires ou les chômeurs.
Le deuxième bulletin est celui de 2009, nouvelle
série. La Une est dominée par un grand texte divisé en
quatre colonnes, comme un journal, que n'est interrompu que par une
photographie. Cette photographie et le titre d'actualité - sans que la
formulation du sujet soit pour autant inédite - ainsi que
l'arrière plan translucide de la Terre, qui figure presque sur
l'intégralité de la Une, lui donnent au premier abord un aspect
nettement plus dynamique que la série précédente. Ce
bulletin établit une relative rupture avec les sujets et le ton qui
dominaient dans son prédécesseur de 2005. Cependant, le texte sur
la Une commence par se féliciter d'avoir pu relancer cette publication,
puis se relance immédiatement dans la même démarche
répétitive sur l'histoire du mouvement, sur les moments les plus
mémorables et sur les principes idéologiques fondamentaux du
mouvement mondialiste.
Au niveau du contenu, la deuxième page rompt avec la
tradition des publications précédentes de laisser cette place
à d'autres associations. Une douzaine d'extraits de déclarations
récentes de différents hommes politiques et de différents
intellectuels remplissent presque la totalité de la page. Ces
déclarations ont été extraites des divers journaux tels
que Le Monde, Libération ou Le Figaro. Le principal lien entre elles est
la formule de « gouvernance mondiale » qui est marquée en
gras. Ainsi, par ce jeu de mise en rapport de convergences discursives
hasardeuses hors du contexte, la suite de l'article essaye d'attribuer
implicitement ces déclarations à la pensée mondialiste,
alors qu'il est impossible de déterminer si la formule «
gouvernance mondiale » se réfère effectivement à une
institution supranationale ou, au contraire, à un renforcement des
puissances mondiales déjà en place et de leur rôle au sein
des organismes internationaux.
Les portraits à page entière de deux citoyens du
monde qui ont menaient des engagements remarquables sont
présentés dans cette publication. M Henri Cainaud, avec qui nous
avons pu obtenir un entretien (voir annexe 5), et M Eugène Riguidel,
navigateur aventurier qui fait le trajet de la route du rhum avec un voilier
qui affiche « Citoyens du Monde » sur la coque et sur la voile. La
suite du bulletin est un mélange de rappels historiques, des appelles
à l'engagement militant et d'un article d'un ancien citoyens du monde de
renommé très important pour le mouvement dans les années
1970.
En conclusion, ces bulletin sont à l'image du contexte
présent de l'association : très ancrés dans une lutte
politique qui date d'il y a soixante ans et dont, malgré son
degré de pertinence actuelle, la forme du discours reste
étroitement liée à une réalité d'antan. Le
rappel presque insistant de l'histoire du mouvement, ainsi que des «
personnalités de renommée mondiale » qui y ont
participé, imprègne la publication d'une certaine nostalgie d'un
passé illustre de Citoyens du Monde. Le discours contenu dans ces deux
Bulletins fait ressortir une claire nostalgie de cette très riche et
intense activité politique du passé. Les sujets abordés
doivent peut-être conforter les esprits des citoyens du monde de longue
date : ils trouveront dans ce bulletin les références aux grandes
axes politiques ainsi que les grands moments vécu par ce mouvement. La
« gloire du passé » conduit donc sensiblement la proposition
politique actuelle, qui reste fidèle aux origines, mais qui n'est pas du
tout déconnectée de l'actualité. En effet, des sujets
très actuels comme la gestion de ressources naturelles, ou
l'environnement, sont au coeur de la démarche de Citoyens du monde
depuis ses origines.
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