SECTION 3 : LES PROBLEMES DE LA FISCALITE CONGOLAISE
FACE A LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE FISCALE
§1. Les moyens de lutte contre la fraude
fiscalé1)
La réaction du contribuable devant le
prélèvement fiscal est conditionnée par le contexte
d'imposition, la discipline fiscale et l'etat de la morale des
contribuables.
Ainsi, nous donnons quelques moyens de lutte contre la fraude
fiscale :
· S'efforcer d'avoir un système fiscal rationnel, et
adapté et s'assurer une meilleure application possible du système
de prélèvement ;
· Améliorer les moyens préventifs et
répressifs de la fraude ;
· Améliorer les moyens d'information et
d'éducation civique des contribuables ;
· Assurer la présence de l'Etat en ce qui concerne
notamment les mécanismes d'investigation de la matière imposable,
bref, assuré le contrôle de l'impôt.
(1) VUNABANDI KANYAMIHIGO, Cours sciences et
techniques fiscales, inédit, Edition 1998.
§2. Analyses de la problématique de la fraude
fiscale sur le développement économique du territoire de
Mambasa
D'une manière générale, selon le
ministère des finances(1), les inepties qui font
considérer le système fiscal congolais comme inadapté aux
besoins d'un Etat et d'une économie moderne peuvent être
listées comme suit : l'inexistence d'une obligation fiscale minimale
dans le chef de personnes adultes, traduisent un manque de solidarité
pour la participation de chacun aux charges de fonctionnement et
développement de sanction ; le maintien du principe de la
territorialité de l'impôt qui ne permet pas à l'Etat
d'imposer des obligations aux nationaux et résidents qui
réalisent des revenus à l'étranger, alors qu'ils
bénéficient de la protection diplomatique ; un régime
d'imposition de droit commun anti-économique caractérisé
par des taux d'imposition trop élevés et l'absence d'incitants
fiscaux à l'investissement, freinant ainsi l'activité
économique et donc réduisant l'assiette fiscale ; une
fiscalité indirecte en cascade, cumulative, qui ne favorise pas
l'industrialisation et la compétitivité des entreprises locales,
un code des investissements inefficace, car malgré les
exonérations accordées, l'investissement productif est
resté à un niveau très bas ; une gestion irrationnelle des
exonérations, qui ne permet pas d'en évaluer l'impact réel
sur les recettes (manque à gagner).
Comme nous l'avons souligné dans les lignes ci-haut,
les causes et les formes de la fraude fiscale seraient connues de tous car nul
n'est censé ignoré la loi.
En effet, dans la Province Orientale, la tenue de la
comptabilité des contribuables par les conseillers fiscaux est souvent
entachée des irrégularités, sources de la fraude fiscale,
surtout pour certains comptes du bilan et du TFR démontrés ci
haut. Celles-ci sont exécutées pour chercher à adapter la
capacité contributive de chaque contribuable à ses charges
fiscales.
Ensuite, un régime d'imposition inadaptée des
PME ; un secteur informel développé servant de refuge aux sans
emplois, aux épouses des agents de
(1) André Philippe FUTA, op. Cit.
l'Etat et aux opérateurs économiques fuyant
l'impôt ; l'absence d'une codification suffisante et
régulière en matière de taxes administratives qui favorise
les irrégularités multiples dans leur création ; une
fiscalité régionale et locale foisonnante et anarchique,
doublée d'une quasi absence de péréquation entre les
entités ; une administration fiscale pléthorique au niveau du
siège et d'une répartition inéquitable à travers
les territoires, les districts ; un management insuffisant de l'administration
fiscale Provinciale, laissant à l'abandon quasi-total les services plus
ou moins éloignés de l'administration du siège ;
l'insuffisance des moyens de fonctionnement de l'administration fiscale
provinciale ainsi que la mauvaise allocation des ressources existantes ;
l'absence de synergie dans le fonctionnement des branches de l'administration
fiscale en province, et de l'ensemble de l'administration fiscale de la
province ; la fraude et l'évasion fiscales
généralisées, ce qui explique la modicité des
recettes par rapport au nombre de contribuables ; un contrôle fiscal de
complaisance ou intéressé, sinon totalement absent dans certains
secteurs comme l'impôt foncier et l'impôt sur les revenus locatifs
; la non identification de tous les contribuables par le siège à
cause de l'absence de coordination entre les différents services
intéressés et de l'existence de plusieurs numéros
d'identification, rendant quasiment impossible le recoupement des informations
entre les services ; l'absence de culture fiscal, se traduisant notamment par
l'absence d'exemplarité des autorités politiques et
administratives en matière fiscale en s'octroyant des exemptions et
exonérations indues et les tracasseries administratives de toute sorte
et l'utilisation abusive de la notion d'autorité et de force publique,
etc.
Cependant, l'analyse de la problématique de la fraude
fiscale sur le développement économique conduit aux constats
ci-après(1) :
1° Au plan organisationnel, la fiscalité dans la
Province Orientale est une fiscalité rampante caractérisée
par une course effrénée vers la maximisation quantitative des
recettes, avec pour conséquences la prolifération des
impôts et taxes et la pression fiscale sur un nombre réduit des
contribuables.
2° Au plan de la perception, celle-ci se trouve à
plusieurs obstacles notamment : laissés pendant longtemps sans payer
les impôts et taxes, les contribuables, à qui on
demande aujourd'hui de payer les impôts et taxes, crient
aux tracasseries ; beaucoup de contribuables échappent au paiement des
impôts et taxes de par leur position politique, et à cause du
trafic d'influence et de la corruption ; l'ensemble des impôts et taxes
prévus ne sont pas perçus, la pression fiscale ne s'exerce que
sur ceux (des impôts) qui le sont effectivement et le mode de
recouvrement par contact entre les agents du fisc et les contribuables est
à la base de la corruption, la concussion, de faux et usage de faux, la
vente illicite et surfacturation des documents officiels.
L'excessive pression fiscale, avons-nous dit, favorise le
comportement frauduleux. Le bat blesse lorsque l'on prend conscience que la DPI
ne combat pas la fraude avec les moyens appropriés et reste sur ce plan
très inefficace. Une série des facteurs contribue à
expliquer cet échec(1) : la DPI manque éventuellement
des spécialistes très pointers en informatique. Pourtant de
telles compétences s'avèrent indispensables afin de
débusquer les combines dans les comptabilités
informatisées ; les effectifs tournent trop dans les différents
services voire dans les différentes divisions. Les agents amenés
à exercer des métiers très divers n'ont souvent pas le
temps de se spécialiser et de devenir parfaitement compétents ;
les redressements non fondés restent beaucoup trop nombreux. Ils
engendrent de la procédure contentieuse et une perte du temps
considérable.
Ce temps ainsi gaspillé ne peut donc être
utilisé avec profit pour lutter contre la véritable fraude ; les
opérateurs économiques qui fraudent sont, dans beaucoup de cas,
assistés par les services ou les agents publics. La fraude est ainsi
favorisée par ceux -là même dont la mission est de la
combattre(2) et donc, un redéploiement des effectifs sur tout
le territoire de la province.
La problématique de la fraude est, à l'image du
phénomène, complexe. Elle apparaît comme une limite au
pouvoir d'imposer et implique dès lors la confrontation des
contribuables et de l'Etat. En contrariant la collecte des ressources
étatiques elle constitue un sujet d'inquiétude pour la Province.
Cette
(1) Bernard Zimmenn et Sandrine Gorreri, Contrôle
fiscal, le piège, comment faire changer l'administration fiscale,
Paris, éd. l'Harmattan, p. 120.
(2) Alexis THAMBWE MWAMBA, op.cit.
inquiétude est de plusieurs ordres. Elle revêt
d'abord une dimension purement financière car la fraude
génère une perte de ressources fiscales. Néanmoins, si la
fraude grève les capacités de la Province à faire face aux
dépenses, elle contraint aussi la répartition équitable du
fardeau du financement public entre les contribuables en accroissant la charge
de ceux qui demeurent honnêtes. En somme, la fraude contrarie à la
fois l'efficacité et l'équité de la collecte des
ressources publiques. Enfin, elle traduit également les lacunes du
contrôle qu'exercent les pouvoirs publics sur les agents privés et
témoigne de la méconnaissance des causes et des schémas
par lesquels les contribuables éludent l'impôt. (1)
La première particularité de ce crime de fraude
fiscale est alors de s'exercer à l'encontre d'un acteur qui dispose du
pouvoir de décision en matière fiscale. Ainsi, l'Etat fixe-t-il
les règles fiscales, déterminant par là même, tant
la structure que le niveau de l'imposition. Mais il est également
l'organisateur de la perception des sommes dues, l'instigateur du
contrôle, ainsi que celui qui fixe les sanctions applicables lors de la
détection de l'acte de fraude. Il dispose donc du pouvoir et des
ressources nécessaires pour lutter contre l'offense faite à son
encontre.
De ce fait, le problème de la fraude fiscale est donc
lié au problème du contrôle et de ses effets dissuasifs,
car l'absence de menace peut justifier des diminutions considérables de
la matière imposable. Plusieurs éléments doivent donc
être mis en exergue successivement afin d'appréhender le
rôle du contrôle fiscal dans la problématique de la fraude :
l'organisation du contrôle, le nombre de vérifications
menées et leurs résultats et enfin leur fréquence et les
sanctions auxquelles elles peuvent donner lieu.
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