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Les comportements sexuels et reproductifs des femmes vivant sous antirétroviraux au Cameroun

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par Moustapha Mohammed Nsangou Mbouemboue
Université Yaoundé I - Master en sociologie 2010
  

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V - METHODOLOGIE

Dans tout travail de recherche, la méthodologie constitue le noeud. Car elle comporte, selon F. CHINDJI-KOULEU, « à la fois la structure de l'esprit et de la forme de la recherche et les techniques utilisées pour mettre en pratique cet esprit et cette forme ».38(*)Cette partie du travail est subdivisée en quatre moments à savoir : le cadre théorique d'analyse, le cadre de l'étude et les techniques de collecte de données, l'analyse des données et enfin la définition de la population d'étude.

V-1- CADRE THEORIQUE D'ANALYSE

Une mobilisation des théories s'impose d'autant plus que c'est le préalable de toute connaissance scientifique. Notre thématique à savoir les comportements sexuels et reproductifs des femmes vivant sous ARV au Cameroun, a amené à envisager la mobilisation de certaines grilles théoriques pour l'observation, l'exploitation, l'interprétation et la compréhension du phénomène. Dans le cadre de notre travail, la théorie de l'imaginaire social et l'ethnométhodologie ont servi à l'interprétation de cette réalité sociale.

V-1-1 - La théorie de l'imaginaire social

Dans cette approche, la clé de compréhension du phénomène de procréation réside dans les valeurs culturelles partagées par un ensemble de personnes. La reproduction ou la fécondité et la sexualité étant liées en Afrique, comprendre le niveau de ce phénomène dans une société revient à sonder les profondeurs de son inconscient collectif. Il existe donc une relation qui pourrait être qualifiée de cause à effet, entre le système de représentation et le système de reproduction d'un peuple. C'est ainsi que LOCOH 39(*) affirme qu'il existe une rationalité collective dans la fécondité d'une nation. Ceci étant, le constat qui se dégage est que : sexualité et reproduction sont indissociables en Afrique noire car le but premier de la sexualité dans l'imaginaire collectif africain c'est la procréation.

Dans le cadre de ce travail, cette théorie a été mobilisée pour expliquer les fondements des comportements sexuels et reproductifs des africains en général et des Camerounais en particulier. L'une des figures phares de ce courant en Afrique est Jean -Marc ELA, sociologue camerounais. Pour lui, le sociologue qui veut décrypter les déterminants de la fécondité, trouve dans la théorie de l'imaginaire qui s'impose aujourd'hui à de nombreuses recherches en sciences sociales, un cadre d'analyse incontournable.40(*)

Ainsi, cet auteur démontre que c'est l'imaginaire social qui structure les comportements, les représentations et le choix stratégique d'un individu en matière de fécondité.

En Afrique subsaharienne, malgré la tendance à la baisse de la fécondité et la variété des comportements en matière de sexualité et de fécondité (due à la crise économique, à l'instruction de la femme et son accès à l'emploi rémunéré, à l'utilisation des méthodes contraceptives...), l'enfant demeure une préoccupation sociale. Il a une place dans l'imaginaire africain ; aucun individu ou couple n'y échappe. C'est lui qui fait de l'homme, un père et de la femme, une mère. Ainsi, un africain ou un camerounais quelque soit son niveau d'instruction, sa tendance à l'individuation41(*) est structurée par cet imaginaire social, sa trajectoire socialisatrice ou son « à priori historique ».42(*) En Afrique noire, loin d'être un acte engageant les seuls individus, la fécondité est un fait de société. Elle répond ainsi à des sollicitations sociales et la société à travers un certains nombre d'images et de symboles.

Le cadre souhaitable pour exprimer ce désir reste le mariage, c'est pour cette raison que malgré des transformations sociales43(*), cette institution est toujours valorisée et a pour but la procréation. C'est dans cette union que l'individu se sent en sécurité. Car, cela lui permettra de pérenniser l'espèce humaine à travers sa descendance. Cela se justifie par ce proverbe Béti qui stipule que « l'homme n'a de valeur que s'il est marié ».

Pour l'appliquer à ce travail, nous comprendrons pourquoi certaines femmes sous ARV opèrent une résistance aux changements de leurs comportements. Pour celles-ci, ne décider de ne plus accoucher ce n'est plus assurer sa féminité car, il n'ya pas de féminité sans maternité44(*), dans un contexte de forte stigmatisation45(*). Egalement le recours aux nouvelles technologies de reproduction46(*) (pour celles qui désirent avoir absolument des enfants) demande assez de moyens financiers, or elles sont dans un contexte où prévaut la précarité économique. A ce niveau, l'accouchement sous ARV sera l'apanage des femmes pécuniairement aisées. Pour ne pas semer le moindre doute dans la société (partenaire, belle famille, entourage), ces femmes (celles qui sont mariées) pour la plupart voudront faire des enfants pour assurer leur considération sociale et allaiter maternellement car, cette forme d'allaitement est symbole de santé physique dans la société. Pour celles qui ne sont pas mariées ou qui sont encore en quête de mariage pourront camoufler leur statut sérologique pour ne pas compromettre leur chance47(*).

En outre, les femmes ont des difficultés à allier les normes thérapeutiques (utilisation des méthodes de contraception...), les normes traditionnelles en matière de sexualité et de procréation puisqu'en Afrique noire en général, la procréation est contraignante et pour en arriver là il faut passer par des rapports sexuels naturels48(*).

* 38 F. CHINDJI-KOULEU, Mes premiers pas dans la recherche, Yaoundé, Sagraaph, 2002, p.74.

* 39 T. LOCOH, Fécondité et famille en Afrique de l'Ouest : le Togo méridional contemporain, Paris, PUF, travaux et documents, cahier n° 107, 1984.

* 40 J-M. ELA, « Fécondité, structures sociales et fonctions dynamiques de l'imaginaire en Afrique noire » in H. GERARD et V. PICHE (dir.), La sociologie des populations, Montréal, PUM, 1995, p.192.

* 41 Concept de WEBER, M qui montre que les individus ont tendance à s'autonomiser en se détachant plus ou moins de leur groupe. Dans ce cas précis, ce concept est utilisé pour expliquer les transformations sociales qui s'opèrent dans la plupart des sociétés actuelles, en ce sens que certes l'enfant appartient à la communauté mais les charges liées à sa nutrition, à sa scolarisation, à sa santé sont l'apanage de ses parents. Ce qui amène les individus à restreindre leur fécondité.

* 42 Concept de M. FOUCAULT, L'archéologie du savoir, Paris, Gallimard, 1969, p.166.

* 43 La société africaine en générale est caractérisée par un certains nombres de transformations sociales à savoir : l'abondance des célibats, des mariages tardifs dues à l'autonomie de la femme impulsée par sa scolarisation, son accès à des emplois rémunérés.

* 44 J-M. ELA, op. cit. p.198.

* 45 En Afrique noire généralement, une femme qui n'a pas d'enfants est étiquetée ou stigmatisée de malade ou de sorcière.

* 46 En santé de reproduction, avec les progrès de la science, une femme peut forcer l'accouchement soit par assistance médicale ou par FIV ou procréer à partir d'une couveuse. Quant à l'allaitement, il peut avoir substitution du lait maternel au lait artificiel. Mais les méthodes naturelles restent plus prisées car elles offrent une force sociale à l'enfant.

* 47 H. MIMCHE et al, op. cit. p.11.

* 48 J. KENYATTA, Au pied du mont Kenya..., Paris, Maspero, 1967.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway