2. CAN
a. Valeur épistémique et énoncés
non-assertifs
Lorsqu'il s'agit de la valeur épistémique, le
modal can a un rôle particulier. La valeur
fondamentale qu'on lui attribue généralement
dans ce cas est la possibilité logique, tout comme may.
Cependant, les différences sont évidentes. Étant
donné la trop grande influence de la valeur radicale de can,
à savoir, la capacité, ou la possibilité
matérielle, sa valeur de possibilité logique est
normalement incompatible avec un énoncé assertif au
présent, où il faudra utiliser may. Toutefois, dans des
assertions négatives ou interrogatives, can
épistémique est possible, car les formes négatives et
interrogatives, ou même l'ajout de -ED, donnent à la
possibilité matérielle un caractère théorique, qui
la rapproche de la possibilité logique. Le modal can remonte au
vieil anglais cunnan, et à la base indo-européenne
gn-, qui a servi à former le verbe know. Ainsi,
l'étymologie contenue dans can correspond au savoir, qui s'est
développé en savoir comment faire (know how
to), puis en be able to. La possibilité matérielle
liée au modal aura donc très souvent une influence dans son
emploi épistémique, d'où les confusions fréquentes
entre les deux valeurs, voire l'impossibilité de la valeur
épistémique. Can ne permet pas d'exprimer
l'équiprobabilité de l'actualisation d'un
événement, car il ignore, non plus légèrement comme
dans le cas de may dans les énoncés assertifs, mais
totalement le négatif. Bien que l'incertitude de can concernant
un fait soit toujours présente, elle n'est pas aussi forte qu'avec le
modal may, un degré supérieur de certitude est atteint,
d'où son association fréquente avec le modal must
(quasi-certitude), dont il est la forme retenue dans les énoncés
négatifs en anglais britannique.
A la différence de may not, la négation
ajoutée à can porte sur le modal et non sur
l'évènement (peut-être cela a-t-il une influence sur le
fait que la forme contractée mayn't est beaucoup plus rare que
le courant can't ?). Par conséquent, la traduction en
français de l'énoncé it cannot be true serait
il n'est pas possible que ce soit vrai, par opposition à it
may not be true, glosable en it may be false (il est possible
que ce ne soit pas vrai). Au présent, la valeur
épistémique de can(not) est donc principalement la
non-possibilité.
1. Pooh! You can't be silly enough to wish to leave such a
splendid place?
2. And Lucky Dick can't be one of these clever men; he must
be less intact, even faintly destroyed.
Dans ces deux exemples, l'association de can avec
l'adverbe not autorise une interprétation
épistémique du modal. En 1, le point d'interrogation renforce
l'idée d'hypothèse et d'une incertitude quant à la
réalisation de l'évènement. L'emploi de can't
pour parler de la relation <you - be silly> plutôt que may
not, qui aurait indiqué l'incertitude totale de
l'énonciateur, souligne cependant le fait que l'énonciateur
serait un peu étonné d'apprendre le contraire.
L'exemple 2 est pertinent car il montre que la valeur
épistémique de can(not) est à rapprocher
de must. Les modaux sont ici placés sur le même plan et
ont un degré de certitude par rapport à l'évènement
à peu près similaire. Néanmoins, le fait que can
épistémique reste proche de may lui donne une valeur
légèrement plus faible que must.
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