INTRODUCTION
DEFINITIONS DES TERMES DU SUJET
Le Conseil Constitutionnel est une juridiction suprême.
C'est la réforme de 1992 communément appelée
réforme Keba Mbaye1(*) qui l'a institué. Avant 1992 le contentieux
électoral et constitutionnel etaient dévolu à la Cours
Suprême. Dans ces conditions on notait une difficile gestation de la
jurisprudence du Conseil en raison de la composition héréroclite
des sections reunies ou siègent des magistrats ayant des profils
différents et souvent sans véritable théoricien du droit.
Conscient de cet état de fait, le constituant sénégalais
à considérer qu'il était grand temps de créer des
juridictions suprêmes spécialisées dans les contentieux
aussi spécifiques que ceux de l'excés de pouvoir, du droit des
affaires, du contrôle de constitutionnalité ou des
élections. Ayant constaté que « les raisons qui
militaient déjà voici plus de trente ans n'ont fait que se
renforcer au fil des années....et que....la complexité et la
spécificité des différentes branches du droit se sont
considérablement accrues depuis l'indépendance, au point qu'il
est désormais impossible à un juriste même s'il compte
parmi les plus éminents de maitriser toute la matière juridique
dans toutes ses dimensions »2(*), le constituant en tire la conséquence que
« la spécialisation n'est pas un simple choix
d'opportunité, elle est devenue un impératif pour la sauvegarde
de l'institution judiciaire ». C'est ainsi que le conseil
constitutionnel fut crée dans le contexte de la réforme
judiciaire de 1992 avec l'éclatement de la Cour Suprême et la
création de trois juridictions supérieures
spécialisées3(*). Lorsque la révision constitutionnelle de 1992
donna jour au conseil constitutionnel, « on a assisté
à une mutation de l'ordre juridique tellement profonde que la nature de
la démocratie s'en est elle-meme trouvée
métamorphosée pour tendre vers une démocratie
constitutionnelle. La saisine de la politique par le droit semble instituer
progressivement une démocratie de type nouveau et avec comme principal
maitre d'oeuvre le conseil constitutionnel »4(*). Cependant au delà de
l'analyse juridique de la réforme certains5(*) y voient la volonté de l'ancien
président Abdou Diouf de réhabiliter la justice secouée
par une crise de confiance. Mais également des préoccupations
politiques dans la mesure où la réforme intervient à moins
d'un an des élections présidentielles. Quant à la classe
politique son point de vue sur la réforme était à la fois
marqué par la prudence et la méfiance et dans une moindre mesure
par une acceptation ou un accueil favorable de celle-ci6(*). En ce qui concerne les
magistrats et les avocats, ce sont surtout ces derniers qui ont
manifesté une certaine hostilité à l'égard de la
réforme parce qu'ils n'ont pas été consulté7(*). Quant à la presse, elle
s'est contentée à analyser les raisons de la réforme et
son impact dans le système démocratique
sénégalais8(*).
A l'instar de l'ancien président Abdou Diouf, le
président Wade sera l'initiateur d'une nouvelle réforme du
système judiciaire en proposant de revenir sur le modele de la Cour
Supreme mais sans y intégrer le Conseil constitutionnel. En effet la
cérémonie solennelle de rentrée des Cours et Tribunaux
présidée par le président Wade a été
l'occassion pour ce dernier d'annoncer la réforme du système
judiciaire en regroupant le conseil d'etat et la cour de cassation en une Cour
Supreme. Ce sera également le moment pour le président Wade de
faire le bilan du conseil constitutionnel qui selon lui « en 15
ans n'a seulement rendu qu'une centaine d'arrets, c'est une activité
fort limitée, mais compte tenu de la trace symbolique de cette
juridiction, il ya lieu de plaider son maintien mais elle ne doit pas seulement
s'interesser aux questions électorales »9(*). Le conseil se voit ainsi
délivrer un nouveau certificat de naissance et de durée mais
également une opportunité d'élargir ses
compétences.
Par ailleurs il faut noter qu'en matière de
compétence, le Conseil constitutionnel est une juridiction
d'attribution. Celle-ci est définie comme « un tribunal
compétent en vertu d'un texte exprés, pour statuer sur telle ou
telle catégorie de litige »10(*). Ce sont des
compétences conférées à la juridiction en fonction
de la nature des taches. La compétence a une vertu simplificatrice. Le
conseil constitutionnel dispose d'une compétence d'attribution sur le
fondement de la constitution et de la loi organique. En effet la constitution
énumère un domaine de compétence à partir duquel
s'exerce la compétence du Conseil constitutionnel. Selon les
dispositions de la Constitution, le Conseil constitutionnel est
compétent pour connaître du contrôle de la
constitutionnalité des lois et des engagements internationaux, des
conflits de compétence entre le Conseil d'Etat et la Cour de Cassation,
les exceptions d'inconstitutionnalité. Il veille également
à la répartition du domaine de la loi et du règlement.
Sur le fondement de la constitution, la loi organique
92-2311(*) précise
tout en ajoutant des compétences au Conseil. Il s'agit en l'occurrence
d'une attribution électorale pour l'élection du président
de la République et des députés. A ce titre aux termes de
l'article 2 de la loi organique 92-23 modifiée,
« conformément aux dispositions des articles 24, 25, 28, 29,
31 et 35 de la constitution, le Conseil constitutionnel reçoit les
candidatures à la présidence de la République, arrete la
liste des candidats, statut sur les contestations relatives aux
élections du président de la République et des
députés à l'Assemblée Nationale et en proclame les
résultats. Il reçoit le serment du président de la
République et constate sa démission, son empechement ou le
déces des personnes appelées à le suppléer dans ces
cas.
En dernier lieu le Conseil constitutionnel exerce des
compétences consultatives. Génériquement il importe de
repérer les attributions du Conseil à partir de trois domaines
formellement délimités par la constitution et la loi organique
sur le Conseil constitutionnel. Il s'agit d'une mission de contrôle en
vue de garantir l'expression sincère des suffrages mais également
d'une mission de contrôle de l'activité normative du pouvoir
législatif ou même de l'executif. Enfin il s'agit d'une mission de
contrôle de constitutionnalité des conventions internationales.
Le Conseil constitutionnel comprend cinq membres nommés
par décret pour six ans non renouvelables12(*). L'article 4 de la loi
organique sur le Conseil constitutionnel dispose que les membres sont choisis
parmis les magistrats, les professeurs de droit13(*) et les avocats.
En ce qui concerne la notion de vie politique avant de
l'aborder dans le fond, il est nécessaire d'apporter quelques
précisions terminologiques sur la « politique ».
D'emblée il faut noter que l'essence de la politique,
sa nature propre, sa veritable signification, c'est qu'elle est toujours et
partout une notion ambivalente.
La politique désigne « la lutte pour la
conquete, l'exercice et la conservation du pouvoir dans la
sociéte ».14(*) Selon Max Weber « la politique est
l'ensemble des efforts que l'on fait en vue de participer au pouvoir ou
d'influencer la répartition du pouvoir entre les divers groupes à
l'intérieur d'un meme Etat »15(*). Quant à Maurice
Duverger, il étudie la notion de politique en s'inspirant tour à
tour de Littré qui définit en 1870 la politique comme
« science du gouvernement des Etats » et de
Robert qui considère la politique comme « art et pratique
du gouvernement des sociétés humaines »16(*). Partant de ces
définitions Duverger note que derrière tous les systèmes
de valeurs et tous les jugements particuliers, deux attitudes fondamentales se
retrouvent généralement. Depuis que les hommes
réfléchissent sur la politque, ils oscillent entre deux
interprétations diamétralement opposées. Pour les uns la
politique est essentiellement une lutte, un combat, le pouvoir permettant aux
individus et aux groupes qui le détiennent d'assurer leur domination sur
la société et d'en tirer profit.
Pour les autres la politique est un effort pour faire
régner l'ordre et la justice, le pouvoir assurant le bien commun,
l'intérêt général. L'adhésion à l'une
ou l'autre thèse est en partie déterminée par la situation
sociale. Duverger en arrive à la conclusion que toutes les tentatives de
définition tournent autour de la notion de lutte et
d'intégration17(*).
Ces précisions sur le concept de politique faciliteront
l'intéligibilité de la notion de vie politique. Il faut d'abord
préciser que la notion de « vie politique » n'a pas
été définie par les textes18(*). En effet l'approche juridique qui accorde une
grande importance à la définition19(*), de même que la démarche politiste, les
deux à la fois nous offrent une grille d'analyse qui nous permet
d'appréhender la notion de vie politique20(*). En effet du point de vue des théoriciens de
la science politique, d'abord la vie politique d'un pays n'est pas le
produit des seules règles de droit, mais de multiples facteurs : la
dynamique de la structure sociale, les oppositions ou divisions
régionales, religieuses, ethniques, les croyances collectives, le nombre
et les stratégies des partis politiques, l'organisation de la presse
écrite et audiovisuelle...21(*)
Ensuite la vie politique d'un pays se déroule plus ou
moins selon une logique autonome par rapport au droit. Ce que le doyen Vedel
appelle « l'insoutenable autonomie du
politique »22(*). Enfin l'empreinte du droit sur la vie politique ne
s'explique pas par les qualités propres des règles
constitutionnelles. La juridicisation repose aussi sur la reconnaisance
sociale, c'est-à-dire par les acteurs du jeu politique, du droit comme
mode légitime de représentation et d'expression de la politique,
cette légitimité étant conférée par l'usage
routinisé des arguments constitutionnels dans le débat
politique.
Il va sans dire que la vie politique ne se résume pas
aux seuls domaines dans lesquels le conseil constitutionnel intervient car il
faut le rappeler la vie politique n'est pas entièrement saisie par le
droit. A cet effet l'interrogation du Doyen Rousseau garde toute son
actualité : « la vie politique a-t-elle ses propres
lois23(*), ou est-elle
régie par le droit 24(*)? »25(*)
A la lumière de ces considérations nous ne
circonscrirons pas la notion de vie politique uniquement dans le cadre de sa
juridicisation. Même si en effet « la création du
conseil constitutionnel a provoqué l'apparition d'un nouvel espace
organisé selon les règles propres et différentes des
autres espaces institutionnels dans lequel et par lequel s'opère la
transformation d'un conflit politique en conflit
juridique »26(*) Mais également au déla de la
juridicisation, c'est-à-dire cette partie de la vie politique qui se
déroule en marge des interventions du conseil et dont celui-ci devrait
s'en saisir. Ce « vide juridique » interpelle activement
la juridiction constitutionnelle car comme nous le verrons le Conseil est
reconnu comme un acteur capital de la régulation du jeu
démocratique. Cette partie sera abordée dans une perspective
d'élargissement des compétences du Conseil comme moyen de combler
« le déficit démocratique » du jeu
politique.
En définitive la vie politique résulte de
l'activité des partis politiques dans leur relation de collaboration ou
de confrontation pour la conquete, l'exercice et la conservation du pouvoir.
Mais également de leur activité dans le cadre institutionnel dans
leur stratégie de contestation de la majorité gouvernementale
DELIMITATION DU SUJET
Dans le cadre de notre sujet nous analyserons à la fois
la jurisprudence électorale et constitutionnelle du Conseil
constitutionnel. Il ne s'agit pas cependant d'une analyse des décisions
du Conseil dans une perspective purement juridique. Mais surtout de l'attitude
du conseil, la « stratégie »27(*) qu'il adopte pour
résoudre les conflits qui se posent dans la vie politique. Il s'agira
egalement de voir l'impact des décisions du Conseil dans la vie
politique. Dans la mesure où le Conseil se déploie dans
l'activité de régulation du jeu démocratique, notre
étude ne se limitera pas seulement dans le cadre de la
juridicisation28(*) de la
vie politique. Mais aussi on se propose d'aborder le role qu'il lui est
possible de jouer dans le système politique. Plus concrètement il
s'agira de voir les cas dans lesquels le Conseil n'est pas sollicité par
les acteurs politiques soit parce qu'ils comprennent si bien le Conseil et
surtout ses compétences qu'ils sont convaincus qu'un recours devant la
haute juridiction n'aboutirait pas, soit qu'ils n'ont aucun juge à
saisir. Mais toujours est-il que dans la logique du jeu démocratique ces
conflits politiques seraient dévolus à la compétence du
Conseil.
PROBLEMATIQUE
Au demeurant la problématique que pose le sujet se
résume à une analyse de l'activité de régulation du
Conseil de la vie politique. Notre étude consistera à analyser le
comportement du conseil à travers ses décisions, face aux recours
qui lui sont adressés. La position qu'il occupe dans le système
politique mais aussi l'incidence en cette matière de sa composition. En
d'autres termes il s'agira de l'appréciation de sa credibilité et
de son indépendance. Il sera aussi question des rapports du conseil avec
les partis politiques de façon général, on abordera ici
l'appréciation de l'activité du conseil par les partis
politiques. On traitera également et surtout de l'activité de
régulation du conseil dans les conflits entre majorité et
opposition parlementaire (ou dans une certaine mesure les conflits au sein de
la majorité gouvernementale, étant toujours bien attendu dans la
logique du jeu démocratique)29(*) . Mais également les conflits qui
interviennent à l'intérieur d'un meme parti politique30(*)
D'un autre coté il s'agira d'apprécier le role
de la Haute juridiction en tant que régulateur de l'activité
normative des pouvoirs publics à savoir son role de protection
constitutionnelle des droits fondamentaux
INTERET DU SUJET
Le système sénégalais de justice
constitutionnelle présente des intérêts et des
originalités sans précédent. La réalité
implique de souligner qu'au dela des institutions, aussi bien
élaborées soient-elles, au delà des mécanismes
juridiques aussi performants soient-ils, au delà des hommes aussi
compétents soient-ils l'essentiel des garanties démocratiques
réside dans l'existence d'une culture démocratique qui n'est
jamais définitivement acquise. Cette etude nous permettra
également de connaitre qu'au delà de la justice
constitutionnelle, la mesure de l'etat de droit au Sénégal. Mais
également de relever les manquements de la juridiction de la corniche de
Dakar dans une perspective de la refonte de l'institution dans le souci d'une
« remise à niveau » ou d'un alignement au titre des
juridictions constitutionnelle à l'identique du modèle
inspirateur qu'est le conseil constitutionnel français ou bien de la
Cour Constitutionnelle béninoise.
METHODOLOGIE
Notre parcours méthodologique consistera d'abord
à ressembler toute la jurisprudence du Conseil. Ensuite nous
étudierons l'apport de ces décisions dans le règlement des
conflits politiques. Nous verrons par ailleurs l'appréciation de ces
décisions par la classe politique à travers les commentaires
faits dans les journaux. Mais également nous prendrons en compte
l'attitude de la presse vis-à-vis du conseil à travers les
positions exprimées dans les journaux mais également en essayant
de rencontrer quelques journalistes politiques.
Enfin nous comparerons la position actuelle du conseil par
rapport à certaines juridictions constitutionnelles « dans
certains Etats au passé récent de régime dictatorial ou de
faible intensité démocratique »31(*) ou meme de certaines
democraties très avancées
ANNONCE ET JUSTIFICATION DU PLAN
A la lumière de ces considération il en resulte
d'abord de l'activité formelle de régulation du conseil dans la
vie politique. Ensuite de nous verrons malgré ce pouvoir, cette
compétence de régulateur de la vie politique, le conseil
constitutionnel manifeste une prudence excessive dans la vie politique.
Autrement il s'agira de rechercher les raisons de l'attitude du Conseil dans la
vie politique et ses conséquences sur le système
démocratique sénégalais.
PREMIERE PARTIE : La mission du conseil constitutionnel de
régulation de la vie politique
Le conseil constitutionnel a une mission institutionnelle
d'arbitrage entre l'exécutif et le législatif. A cet effet il a
un pouvoir de clarification matérielle. Autrement dit il doit être
à même de donner une idée claire des diverses
compétences des pouvoirs exécutifs et législatifs. Cette
mission institutionnelle trouve son fondement dans l'article 92 de la
Constitution. Le conseil constitutionnel connaît des conflits de
compétences entre l'exécutif et le législatif32(*)
Cette mission intègre également
l'autorité du conseil constitutionnel dont les décisions
s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités
administratives et juridictionnelles.
Entre également dans les compétences du conseil
la mission de contrôler l'activité normative des pouvoirs. Cette
mission englobe les rapports entre pouvoir exécutif et
législatif33(*)
Cependant la mission de contrôler la
régularité des élections34(*) constitue l'une des plus importantes et des plus
sensibles mission de la juridiction de la corniche de Dakar. En effet dans nos
relativement jeunes Etats où la démocratie demeure
« fragile et réversible »35(*) l'élection reste
souvent chargée de tensions et de conflits, qui exige un organe
régulateur dont la mission sera de contraindre les différents
protagonistes ou compétiteurs à rester dans les limites du droit.
Aussi « le juge constitutionnel est-il donc l'aiguilleur
comparable à l'aiguilleur des chemins de fer qui se borne à
mettre les trains sur une voie ou une autre »36(*).
D'une manière générale l'étude de
la mission de régulation du conseil tournera essentiellement autour de
deux points : celle relative aux élections d'une part et celle
concernant la production normative ou pour parler comme le Doyen Rousseau celle
concernant « le processus de fabrication des
lois »37(*). De façon particulière l'analyse
portera partout où la rencontre entre partis politique
génère des conflits qui nécessite l'intervention du
conseil dans les différentes sphères de la vie politique.
Il s'agira parallèlement de voir la perception que les
acteurs politiques ont de cette mission de régulation, mais
également la presse et dans une certaine mesure l'opinion publique.
CHAPITRE I : Les cadres de la mission de
régulation
Le conseil constitutionnel est reconnu aujourd'hui comme un
acteur capital de la régulation du jeu démocratique. Lors des
élections présidentielles et parlementaires (exclusion faite des
élections sénatoriales vue la faiblesse et la teneur du
contentieux), le conseil a été largement sollicité par les
membres des partis politiques. En effet la haute juridiction intervenait
à la fois comme arbitre des conflits entre partis politiques et Ministre
de l'intérieur mais également entre partis politiques eux
même. Son intervention couvre plusieurs étapes du processus
électoral.
Par ailleurs le conseil occupe une place fondamentale dans le
processus législatif que certains n'hésite pas à y voir
« un pouvoir d'amendement
irréfragable »38(*). Pouvoir d'amendement parce qu'il peut supprimer des
dispositions législatives, en déclarer d'autres dépourvues
d'effets juridiques. Irréfragable parce qu'aucun autre acteur de la
procédure législative n'est en mesure de s'opposer, ignorer ou
contester ses décisions.
Ainsi nous verrons successivement la régulation par le
conseil de l'activité électorale d'une part et d'autre part la
régulation de l'activité institutionnelle
Section I : la régulation de l'activité
électorale par le Conseil
La période électorale est un moment important
dans la vie d'une nation, elle est souvent pleine d'effervescence, d'agitation,
de tension...
En réalité les consultations électorales
ne sont pas inconnu sur le continent africain et plus particulièrement
au Sénégal tant durant la colonisation qu'après les
indépendances à quelques exceptions prés,
« elles y étaient organisées sur un mode unanimiste
et elles remplissaient des fonctions principalement symboliques et de
renforcement du pouvoir des régimes
autoritaires »39(*).
Depuis le démarrage de ce que l'on appelle les
« transitions démocratiques »- qui a principalement
concerné les Etats francophones, inaugurées en 1990 par le
Bénin, l'Afrique se voit dérouler une série
d'élections transparentes et calmes, qui s'effectuent dans un contexte
de pluralisme politique. Désormais les partis au pouvoir commencent
à perdre les élections, l'alternance n'est plus interdite.
Toutefois le recours aux élections n'est pourtant pas
aujourd'hui sans rencontrer des réserves et susciter des
appréhensions. Les difficultés semblent parfois empirer si l'on
en juge par la gravité des crises liées à l'organisation
et au déroulement des scrutins.
N'a-t-on pas vu dans les consultations électorales de
véritables « impostures » se
réduisant à de « simples formalités
administratives »40(*) dominées par des acteurs se livrant
à un banditisme électoral plutôt qu'à une
compétition loyale. Par un curieux retournement, les élections
qui avaient été considérées en Afrique comme une
voie privilégiée de sortie de crise et d'expression du pluralisme
se voit attribuer la responsabilité des tensions voire des ruptures de
consensus qui affectent la vie politique en Afrique et particulièrement
dans nos Etats.
Dans un tel contexte le conseil constitutionnel doit
être la sentinelle qui aura la lourde mission de sanctionner les
contrevenants à la loi électorale ou les comportements
anti-démocratiques de façon générale. Il sera
question de l'étude de l'activité régulatrice du conseil
en tenant compte de l'environnement sociopolitique
Cette partie sera à la fois descriptive des
différents contentieux que le conseil a eu à connaître.
Mais surtout analytique en mettant en exergue les différents facteurs
qui ont eu à influer sur le rôle du conseil ou sur son
attitude.
Paragraphe I : La problématique de la
régulation de l'élection présidentielle
Bien que faisant l'objet d'une attribution de
compétences, le conseil constitutionnel sénégalais exerce
dans sa mission de régulation des élections de très larges
pouvoirs. C'est d'ailleurs ce qui fait de lui le véritable juge de la
régularité, de la transparence et de la sincérité
ou moralité des opérations électorales. Ces pouvoirs lui
permettent de réguler le jeu électoral à travers tout son
processus
En effet le conseil intervient à la fois au
début du processus électorale ce que l'on appelle la phase
préélectorale et à la fin appelée la phase
post-électorale
Dans la période préélectorale, l'office
du conseil est de recevoir les candidatures à l'élection
présidentielle et de publier la liste des candidats. A cette occasion il
peut accepter ou rejeter les candidatures qui ne remplissent pas les conditions
exigées par la loi électorale. En revanche les candidats
disposent de recours auprès du même conseil pour faire respecter
leurs droits
Mais en réalité cette étape qui constitue
une phase préliminaire de l'élection proprement dite et dont
l'enjeu n'est pas très important à la fois du point de vue de la
population mais aussi dans une certaine mesure pour les leaders politiques ou
les candidats au regard de leur comportement, on a l'image d'un conseil au
dessus des institutions parlementaires et gouvernementales soucieux du respect
de la loi électorale.
Le conseil a ainsi rejeté lors des élections
présidentielles de 1993 la déclaration de candidature additive de
Landing Savané. Ce dernier a fait déposer au greffe du conseil
constitutionnel une requête aux termes de laquelle sa candidature est
devenue la candidature du « Rassemblement Bokk
Yaakar » incluant notamment les partis AND-Jef/Pads, le MSU,
l'UDF/Mbolo-Mi.
Le juge constitutionnel rejette cette déclaration de
candidature pour raison portant sur « l'absence de toute mention
que le candidat a reçu l'investiture de ce rassemblement. Par
conséquent la déclaration de candidature additive est
rejetée »41(*)
Dans le même ordre d'idées, le conseil a eu
à rejeter la déclaration de candidature indépendante de
Yoro Fall. Selon le juge « après vérifications
faites conformément à l'article 116 du code
électoral42(*), il
a été constaté que la liste de 10000 électeurs
appuyant la candidature de Yoro Fall, seuls 8715 ont pu être
identifiés et leurs signatures validés. Par conséquent la
candidature de Yoro Fall à l'élection présidentielle est
irrecevable »43(*)
Le juge constitutionnel intervient également dans la
phase post-électorale. Sachant que les élections constituent le
talon d'Achille des régimes politiques africains, les litiges issus des
élections, à défaut de trouver une solution
juridictionnelle consensuelle et acceptable risquent de s'exposer dans la rue.
Et souvent ils aboutissent à provoquer des guerres civiles. C'est
pourquoi le juge doit agir avec subtilité et perspicacité pour
faire respecter les droits de chaque candidat.
C'est ainsi que dans le cadre de son pouvoir de
régulation, le conseil « procède à la
rectification des erreurs44(*) commises au cours du processus de recensement des
votes soit d'office soit à la demande d'un candidat »45(*). Dans le même ordre
d'idées, le conseil en tant que juge de la régularité et
de la sincérité ou moralité des élections veille au
respect des règles de la compétition électorale. Par
conséquent le conseil a le pouvoir d'annuler les résultats du
scrutin.
En dépit de tous ses pouvoirs considérables et
cette volonté constante de régulation impartiale du jeu
politique, le conseil demeure mal vu dans bien des cas. Pour le professeur
Kanté et ancien vice président du conseil, le conseil est victime
d'un mauvais procès dans la mesure où :
« l'évaluation de l'activité contentieuse de ces
juridictions nouvellement créées en Afrique est souvent faite
à l'aide d'un seul critère : le degré
d'indépendance au moment de la proclamation des résultats d'une
élection présidentielle. Selon l'attitude du juge à
l'occasion du contentieux électoral, la juridiction concernée
sera considérée comme digne de respect ou non, un promoteur ou un
fossoyeur de la démocratie »46(*)
Cette affirmation est également valable pour le
contentieux constitutionnel - dans la mesure où le juge est toujours
jugé en fonction de ses attitudes par rapport aux exigences de la
démocratie et de l'Etat de droit. Mais seulement, elle est plus
« visible », plus vérifiable pour les
élections présidentielles du point de vue de l'enjeu qu'elle
suscite. Par exemple lors des élections présidentielles de 1993,
les premières élections auxquelles le conseil faisait face pour
la première fois après moins d'une année d'existence,
constitue une belle illustration de cette réalité. En effet lors
de la proclamation des résultats de l'élection
présidentielle de 1993, la haute juridiction avait repris mot pour mot
le slogan de campagne du candidat déclaré vainqueur en
l'occurrence le candidat président de la république Abdou
Diouf47(*).
Dans la décision du conseil il est mentionné la
formule solennelle : « que le candidat Abdou Diouf...... est
élu dès le premier tour président de la République
du Sénégal pour un mandat de 7ans »48(*). Cette clause de style n'a pas
échappé à la vigilance de la presse qui n'a pas
manqué à critiquer sévèrement l'attitude des juges,
et de facto remis en cause la neutralité du conseil. Dans un
éditorial intitulé au delà du droit, le journaliste
Babacar Touré fait une analyse très peu reluisante de la
décision du conseil. Revenant sur la formulation de la décision
proclamant les résultats, il écrit « le
communiqué du conseil, par son libellé, est
particulièrement choquant dans la mesure, où il s'est
départi de cette sérénité et de cette distance
arbitrale si caractéristiques des hommes et des femmes qui n'ont souci
que de dire le Droit. La touchante générosité du `discours
de la méthode' qui a précédé `le constat' du
conseil a quelque relent de parti-pris délibéré en faveur
du candidat le mieux placé dont le nom a été cité
avant même que les résultats soient annoncés ni même
consignés dans le communiqué ». De ce son point de vue
`l'équipe de Youssou Ndiaye a fait plus et mieux que le parti
socialiste'. Pour lui « ce qui est en cause c'est autant le score
attribué au candidat Abdou Diouf que les conditions dans lesquelles, on
y est parvenu au terme d'un scrutin entaché d'encre
délébile, d'ordonnances et de pratiques aux antipodes de la
sincérité et de la transparence. Ce sentiment de gêne est
d'autant plus présent que le chiffre de 58% avait été
annoncé dans certains milieux dirigeants du PS et de l'Etat bien avant
le 21 février.(......) Comme pour complaire aux souhaits du Prince et de
ses affidés, le communiqué du conseil a repris le mot d'ordre du
Ps : « Abdou Diouf élu des le premier tour »
auquel on aurait préféré « élu au premier
tour »49(*).
Cette critique de la presse semble bien fondée dans la mesure où
le conseil aurait pu entourer beaucoup plus de solennité à sa
décision. D'ailleurs si on regarde la jurisprudence qui a suivi ces
élections, on constate que le conseil à corriger cette
formulation en retenant une formule en tout cas moins chargée à
savoir par exemple pour les élections de 2000 qui ont consacré
l'alternance politique au Sénégal avec une nouvelle équipe
politique qui n'a aucun lien avec le conseil : « Abdoulaye
Wade élu président de la République du
Sénégal »50(*). Cependant 7 ans plus tard lors de la
réélection du président Wade qui durant son premier mandat
a eu à faire des réaménagements au conseil avec la
nomination à la tête de l'institution d'une personne
supposée lui être proche. Le conseil revient à la formule
des élections de 1993 : « le candidat Abdoulaye
Wade est élu des le premier tour président de la
république du Sénégal »51(*). Ce manque de constance dans
la formulation des résultats de l'élection présidentielle
n'est pas acceptable pour une juridiction de cette envergure. D'ailleurs la
formulation adoptée semble être liée à la
proximité ou non de l'institution avec le pouvoir en place faisant ainsi
peser de sérieuses réserves sur l'impartialité,
l'indépendance et la crédibilité de l'institution. Cette
remarque est d'autant plus fondée qu'en 2007 lors de la prestation de
serment du président réélu Abdoulaye Wade, la
présidente du conseil s'est contentée à faire un long
éloge du président. Ce qui n'est pas un gage de neutralité
dans une démocratie digne de ce nom.
En effet pendant les élections présidentielles
le conseil est largement sollicité et les partis politiques ou plus
exactement les leaders politiques n'hésite pas à critiquer voire
menacer ouvertement le conseil. Par exemple lors des élections de 1993
le conseil a vu l'un de ses membres en l'occurrence le vice président
maitre Babacar Seye assassiné. Juste avant cet assassinat son
président avait démissionné. Ajouté à cela
la tension sociale et politique du pays, le conseil était dans une sorte
de crise qui a pu fortement marquer sa psychologie et peut-être une
certaine peur des hommes politiques explique certaines de ses décisions.
D'ailleurs lors des élections de 1993 le candidat wade dans une de ses
déclarations manifestait sa méfiance vis-à-vis de
l'institution et sur certains de ses membres. En effet il affirmait
« qu'au point où nous en sommes une solution politique de
la crise actuelle ne peut sortir de cette institution », au sein
du conseil il doute que l'un de ses membres, maitre Seye,
« malgré toute sa bonne volonté puisse juger de
manière impartiale, après avoir été pendant une
bonne partie de sa vie responsable du PS »52(*).
Les leaders politiques sénégalais ont toujours
manifesté pendant les élections présidentielles surtout
une grande méfiance vis-à-vis du Conseil constitutionnel, on a
l'impression qu'ils nourrissent de forte présomption de
partialité de la part du Conseil, qu'ils préfèrent le voir
exit ou pour parler juridiquement le récuser. D'ailleurs lors de
l'alternance démocratique de 2000, l'opposition n'avait pas
manqué de faire de telles déclarations qui ont pour
conséquences à la fois de minimiser le Conseil et d'heurter sa
crédibilité. L'enjeu et la tension qui accompagne cette
élection justifie de telles pratiques. Comme l'a si bien remarqué
Momar Coumba Diop53(*) « la situation était d'autant
plus tendue que le leader de l'opposition lui-même n'avait pas
hésité, durant la campagne à demander à
l'armée de faire respecter la volonté de changement du peuple
sénégalais en cas de fraude du pouvoir54(*). Le sentiment de malaise et
les critiques à l'égard du conseil se nourrissent surtout du
nombre important de décisions par lesquelles le conseil confirme une
élection tout en reconnaissant expressément que les
irrégularités sont « regrettables »,
« critiquables », « condamnables »...
On peut retenir que depuis sa création le conseil n'a
pas encore atteint le degré d'indépendance et la
crédibilité nécessaire que les acteurs du jeu politique
attendent de lui. Cette analyse est légèrement applicable aux
élections législatives
Paragraphe II : La régulation des élections
législatives
Dans la régulation des élections
législatives, le Conseil constitutionnel semble être plus à
l'aise, en tout cas il fait montre d'une plus grande impartialité,
peut-être que cela est du à l'absence de l'institution toute
puissante que représente le Président de la République. Le
conseil est en vertu de la constitution, du code électoral et de la loi
organique sur le Conseil constitutionnel, juge des élections
législatives. Mais il faut préciser qu'ici sa compétence
n'est que contentieuse puisque l'article 59 dispose que « le Conseil
veille à la régularité des élections parlementaires
qu'en cas de contestation ». Toutefois le Conseil a été
amené à plusieurs reprises à intervenir dans la phase
préparatoire des élections comme arbitre entre l'administration
en l'occurrence le Ministre de l'intérieur et les partis politiques.
Mais également comme juge entre les partis politiques eux-mêmes en
cas de litiges portant sur le choix des couleurs et des symboles. Concernant
ces élections les litiges entre le ministre de l'intérieur et les
partis politiques sont plus fréquents. En effet les partis d'opposition
ont toujours contesté la neutralité voire l'implication du
ministre de l'intérieur dans l'organisation des élections
parlementaires. Ce qui pose alors un véritable problème
d'éthique politique. En effet, « l'inféodation » de
l'administration électorale avec le parti unique ou le parti majoritaire
la rend « inapte à garantir la sincérité du scrutin
»55(*). En effet,
membre éminent d'un gouvernement qui est l'émanation
institutionnelle du parti au pouvoir, le ministre de l'Intérieur est,
dans les faits, politiquement responsable de la victoire électorale de
sa famille politique. L'obligation politique de rendre compte qui pèse
sur lui s'étend également à ses représentants dans
les circonscriptions administratives en charge du pilotage, à la base,
du processus électoral. D'ailleurs récemment les raisons du
boycott des législatives de 2007 sont en grande partie liée
à la question du fichier électoral géré par le
ministre de l'Intérieur56(*). En quelques années plutôt le Conseil
avait été saisi lors des élections législatives de
1998 par l'Alliance « Jef Jel - U.S.D » Union pour le
Renouveau Démocratique, visant à entendre le Conseil dire si le
Ministre de l'intérieur est tenu de mettre à la disposition de
l'O.N.E.L et en définitive des partis politiques
l'intégralité du fichier électoral ou seulement une partie
de ce fichier57(*). Le
Conseil refuse d'examiner la demande qui lui est soumise au motif qu'il s'agit
d'une « demande d'avis ». Ce qui ne rentre pas dans le
champ de ses compétences. Pour le professeur Alioune Sall le Conseil
« aurait pu, par exemple dire que l'examen de la
régularité du scrutin s'étend à l'ensemble du
processus électoral, que se prononcer sur la sincérité
d'un scrutin implique un droit de regard sur toutes les étapes de
l'opération électorale. Il aurait pu se poser en véritable
gendarme de l'élection, soucieux de combler toutes les failles possibles
d'un contrôle, et interpréter de manière finaliste sa
mission »58(*).
Section II : la régulation de l'activité
institutionnelle
Une fois l'indépendance obtenue, le
Sénégal s'est doté d'une chambre constitutionnelle
intégrée à la Cour Supreme. Cet organe était
prévu par l'article 65 de la constitution votée le 26 aout 1960
et promulguée le 29 aout 1960 par décret n°60-29559(*).
Celle-ci connut un essor sans précedent en
régnant souveraine, incarnant la volonté générale.
Ceci s'explique par le fait de l'existence réelle d'une synchronisation
entre représentant et représenté et de la solidité
du « cordon ombilical » reliant l'élu à
l'électeur. Ce dernier etait dignement représenté par le
premier, exclusivement habité par la satisfaction des
intérêts de celui-ci. Cette atmosphère qui planait sur
l'espace juridique et politique sénégalais, reposait sur
l'identification des gouvernés aux gouvernants, sur la confusion entre
volonté générale ou nationale et volonté
parlementaire. Avec le temps et l'évolution sociale, cette figure de la
démocratie s'est renversée et l'étanchéité
du lien s'est flétrie comme le souligne Dominique Rousseau pour ce
qui est de la France, « le représentant exprime davantage
la volonté de son parti que celle de la nation, que la loi répond
davantage aux impératifs électoraux qu'à ceux de la
nation »60(*)
Quoique le Sénégal ait connu un système
de contrôle de constitutionnalité des lois depuis 1960, la
découverte du constitutionnalisme moderne, c'est-à-dire la
primauté des droits et libertés proclamés par la
constitution et protégés par un juge constitutionnel autonome,
sur la loi votée par la représentation nationale ne date
juridiquement et idéologiquement que d'une vingtaine d'années
environ au Sénégal.
L'étude du contentieux constitutionnel
sénégalais est intéressante...
Dans cette partie nous mettrons l'accent sur les controverses
de la régulation de l'activité institutionnelle à savoir
faire la description de la régulation d'une part et d'autre une
régulation analyser l'opportunité de la régulation de
l'activité institutionnelle
Paragraphe I : L'état descriptif et analytique de
la régulation institutionnelle
Avec l'autonomie et la spécialisation du conseil
constitutionnel le droit est aujourd'hui au coeur de la modernisation de la
démocratie sénégalaise. D'ailleurs lorsque les neufs sages
de la juridiction constitutionnelle française ont affirmé le 23
aout 198561(*) que
« la loi exprime la volonté générale que
dans le respect de la constitution ». Les cinqs sages
sénégalais diront le 19 juin 1995 dans un considérant de
principe que « la seule préoccupation du conseil
constitutionnel demeure le fonctionnement harmonieux et complémentaire
des juridictions qui commandent aux juges de corriger les imperfections de la
loi, de combler les lacunes par des constructions jurisprudentielles
réfléchies, patientes et parfois
audacieuses »62(*)
Dès lors on pourrait également supposer que le
conseil, juge supreme, est habilité à corriger les imperfections
ou « combler les lacunes » de la loi.
Le Conseil donne et refuse force de droit et valeur juridique
à tout texte législatif qui lui est soumis. Ainsi, il a fait de
la constitution la sève qui alimente tout l'arbre juridique, ce qui a
favorisé la naissance du nouveau droit constitutionnel jurisprudentiel.
Ce nouveau modèle constitutionnel sénégalais fait
état de la naissance d'une conception nouvelle du droit constitutionnel.
Il consacre l'avènement de démocratie constitutionnelle dans le
contexte duquel le Conseil constitutionnel sénégalais joue un
rôle tellement capital que la notion elle-même semble être
caractérisée par une grande viabilité63(*). Cette affirmation de M.Sy est
dans une certaine mesure très contestable. En effet avec la soudure qui
s'établit entre le gouvernement et la majorité parlementaire
à travers le parti dominant, la loi semble être l'expression de la
volonté gouvernementale, du parti au pouvoir approuvée par un
législatif solidaire. Dans ce contexte le juge constitutionnel doit
jouer pleinement son rôle de gardien de constitution ou de rempart contre
les atteintes à la démocratie. Ici la ligne principale de
contrôle doit être contenue dans la formule : « la
loi n'exprime la volonté général que dans le respect de la
constitution ».
Toutefois il est important de préciser que vue
l'ampleur des décisions déclaratives
d'incompétences64(*) et celles dites
« timorées » ou qualifiées de
« manque d'audace ou de courage » qui sont souvent des
décisions de déclaration de conformité ; on peut
remarquer que les décisions dans lesquelles le Conseil à
répondu favorablement aux attentes des juristes, politiques et
observateurs de la vie politique constituent une très faible part et
semblent relever d'un accident de parcours dans la vie du Conseil. Les exemples
qu'on peut citer sont très rares. Même l'invalidation partielle de
loi Ezzan65(*) n'est pas
satisfaisante aux yeux de l'opinion et de la classe politique. Il ya
également la censure de la loi sur la parité66(*). Cette censure, violemment
critiquée par le Président Wade et par les défenseurs de
la cause des femmes, a paru neutraliser le Préambule de la Constitution
qui incorpore la convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination à l'égard des femmes, du 18 décembre 1979.
Toutefois le Conseil Constitutionnel sénégalais a tort de calquer
sa position sur celle prise par son homologue de France dans ses
décisions n° 82-146 DC du 18 novembre 1982 et
n° 98-407 DC du 14 janvier 1999. La question qui se posait au juge
français était de savoir si le principe d'égalité
permettait ou interdisait au législateur de prendre des dispositions
spécifiques pour éviter la monopolisation de la representation
politique par le sexe masculin. En 1982, le Parlement français avait
decide que, pour les elections municipals, les listes des candidats ne
pouvaient «comporter plus de 75% de personnes du meme sexe». Saisi de
cette loi, le Conseil dans sa decision du 18 novembre 1982, soulève
d'office la question de sa constitutionnalité pour qu' «une
règle, qui pour l'établissement de listes soumises aux
électeurs, comporte une distinction entre candidat en raison de leur
sexe» n'est pas conforme à la Constitution. Le Conseil devait
encore confirmer sa position dans sa decision du 14 janvier 1999. Mais
après un long et passionné débat, le constituant ajoute,
le 08 juillet 1999, à l'article 3 de la Constitution la disposition
suivante «la loi favorise l'égal accès des femmes et des
hommes aux mandats électoraux et fonctions electives». Dès
lors la jurisprudence de 1982 devient caduque et le Conseil reconnait dans sa
decision du 30 mai 2000 que «le constituant a entendu permettre au
législateur d'instaurer tout dispositif tendant à rendre effectif
l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats
électoraux; qu'à cette fin, il est désormais loisible au
législateur d'adopter des dispositions revetant soit un caractère
incitatif, soit un caractère contraignant». Parallèlement,
le Président Wade a, en tout cas, invité le pouvoir de
révision souverain à «casser» la décision du
Conseil pour donner une assise constitutionnelle incontestable à la
parité ou aux quotas de genre. Pouvait-il faire un autre choix et ne pas
imiter l'attitude des gouvernants français. Il s'avère que
l'imitation par le Conseil constitutionnel sénégalais de la
juridiction française est inopportune en raison de plusieurs raisons
dont la composition sociologique de la société
sénégalaise composée à plus 70% de femmes. Il
parait logique que la representation au niveau des fonctions electives puisse
tenir compte de cet état de fait.
L'état descriptif de l'intervention du conseil dans
l'activité législative révèle que « dans
l'ordre d'importance, le contrôle des lois ordinaires par la voie du
contrôle d'action arrive en 3ème position avec une
quinzaine de décisions. Par ailleurs la jurisprudence du conseil est
marquée par le caractère marginal des décisions relatives
au contrôle des engagements internationaux (2 seulement) ou à
l'exception d'inconstitutionnalité (4 décisions). Tout aussi
marginal l'exercice des attributions consultatives (3 décisions). Quant
aux contrôle des lois constitutionnelles, il se heurte au refus du juge
de l'exercer (3 décisions), tandis que le contentieux de la
répartition des compétences entre l'exécutif et le
législatif, abondant ailleurs est inexistant. Dans le même sens le
contentieux des droits fondamentaux qui occupe une place de choix dans le
contentieux constitutionnel béninois et Sud africain, demeure marginal
voire inexistant au Sénégal.67(*) Cependant il faut pas perdre de vue que cette
régulation du Conseil est abordée dans le cadre de son impact
dans la vie politique à travers les luttes entre les partis politiques.
Le constat qui se dégage est que statistiquement la majorité des
décisions du Conseil intervenant dans les conflits entre partis
politiques au niveau de l'hémicycle révèle une grande part
de prudence, voire de timidité. Et pose du coup un véritable
problème d'opportunité
Paragraphe II : L'opportunité des décisions
du conseil
Si « recourir au juge, c'est choisir la
résolution pacifique des litiges. C'est renoncer à les trancher
par la force, accepter de se soumettre à un tiers arbitre et imposer la
même attitude à l'adversaire ».68(*) Les décisions du
conseil n'arrivent pas à imposer cette attitude, non seulement aux
partis politiques mais également les structures telles que
« la société civile ». Les décisions
du Conseil ne remplissent toujours pas cette fonction de pacification de la vie
politique ou d'extinction des conflits politiques qui persistent et remettent
toujours en cause l'effectivité de la démocratie
sénégalaise. En effet s'il s'agit de trancher les conflits
engendrés par l'application de la Constitution, la question ne s'en
trouve pas radicalement transformée : ne décrit-on pas
couramment la technique du contrôle de constitutionnalité comme un
procédé garantissant l'élimination des rapports de force,
par l'assujettissement à un même degré de l'ensemble des
protagonistes du système politique ? « Le
contrôle juridictionnel des lois écrit M.Favoreu, permet de faire
trancher en termes juridiques des conflits d'ordre politique. Il ya une
pacification de la vie politique par le contrôle juridictionnel des
lois »69(*)
Au Sénégal si les décisions du Conseil
sont formellement acceptées, elles n'éteignent pas pour autant
les conflits politiques. La bataille juridique est prolongée souvent
dans la rue, par les invitations à la marche et par les
déclarations à travers la presse qui ont la particularité
d'instaurer un semblant de malaise social et politique dans le pays,
préjudiciable dans une certaine mesure au pouvoir et à la
démocratie sénégalaise.
Les propos de Jacques Attali, conseiller spécial du
Président de la République français, après la
décision du 16 juillet 1982 qui invalide le mode d'indemnisation des
actionnaires privés, expriment le bénéfice que la
majorité peut recevoir de l'intervention du Conseil. Ce dernier, dit -il
« ayant reconnu la conformité à la constitution
des nationalisations, tout le débat de la campagne présidentielle
et de la bataille parlementaire sur le caractère constitutionnel des
nationalisations est terminée ».70(*) Autrement dit, l'intervention
du Conseil a, pour la majorité et l'opposition également, le
double avantage d'éteindre la polémique. L'intervention du
Conseil confère en réalité à la loi mise en cause
une légitimité supplémentaire en atténuant son
aspect partisan. Ce qui n'est pas le cas de la réalité
constitutionnelle sénégalaise. En effet le droit n'a pas
véritablement une emprise sur la vie politique. Cela ne s'explique pas
par un défaut de qualité inhérent aux règles
constitutionnelles. Ici la juridicisation est marquée par un manque de
« reconnaissance sociale », c'est-à-dire
par les acteurs du jeu politique, du droit comme mode légitime de
représentation et d'expression de la politique, cette
légitimité étant conférée par l'usage
routinisé des arguments constitutionnels dans le débat politique.
Autrement dit le ressort du succès de la juridicisation, de
l'efficacité du droit, se trouve ni dans les qualités du texte
constitutionnel de 2001 ou de la jurisprudence du Conseil, ni hors du droit,
dans la société, dans les rapports de forces politiques ou dans
les intérêts et stratégies des acteurs politiques. Le
mouvement de juridicisation ne peut se comprendre que dans la relation qui
s'établit entre ce que la règle de droit offre en termes de
formalisation, de neutralisation et d'objectivation des questions politiques,
et ce que les acteurs politiques demandent ou recherchent, à un moment
donné, pour atteindre leur objectif. C'est ainsi que, tirant le bilan de
neuf année de mandat de Conseiller, le doyen Vedel écrit de
manière significative que le Conseil a posé « des
règles permanentes et objectives, susceptibles d'opérer
indépendamment du pouvoir en place, qu'il soit de droite ou de
gauche... »71(*). L'inexistence de cette relation entre la
règle de droit et les acteurs politiques se justifie davantage lorsqu'on
regarde de près les rapports entre la juridiction constitutionnelle et
les partis politiques. Au regard de la jurisprudence de l'ex-Cour Suprême
et du Conseil constitutionnel, on se rend compte que les autorités
politiques (le Président de la République et les
députés de l'Assemblée nationale) ne sont
intéressés à la constitutionnalité des lois que
sous couleur de leur seul intérêt politiques. Rappelons que le
Sénégal n'a enregistré qu'une seule proposition de loi
adoptée provenant des députés : ce fut la
révision n°76.01 du 19 mars 1976 (Moussa Mbengue) accordant un
statut spécial aux anciens présidents de la République.
Toutes les autres proviennent de projets présidentiels, et l'on voit mal
le président de la République lui-même les attaquer pour
inconstitutionnalité, de même que les députés dont
l'écrasante majorité appartenait ou appartient encore à la
mouvance présidentielle72(*).
D'une manière générale on peut dire que
cette situation qui voudrait qu'après les décisions du Conseil
soient rendues, le débat se poursuit par d'autres moyens ou d'autres
voies, incombe à la responsabilité à la fois aussi du
Conseil pour une large part mais aussi des acteurs politiques par leur attitude
CHAPITRE II : LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DANS LA
STRATEGIE DE LUTTE DES PARTIS POLITIQUES ET SON APPRECIATION DANS LA VIE
POLITIQUE
Dans cette partie nous mettrons l'accent sur les tentatives
d'instrumentalisation du Conseil par les partis politiques et comment ces
derniers usent du Conseil dans leurs stratégies de lutte. Nous verrons
ensuite comment à la fois les partis politiques, la presse et les
différents acteurs de la vie politique perçoivent le Conseil. Ce
qui nous permettra d'avoir une idée assez précise de
l'évaluation de l'activité du Conseil.
Section I: Le Conseil dans la stratégie de lutte des
partis politiques
Dans cette partie notre étude portera sur les
appréciations que les partis politiques portent à l'endroit du
Conseil d'une part, nous verrons également comment les partis politiques
en saisissant le Conseil le cherchent à susciter un débat
politique voire d'exacerber la querelle politique.
Paragraphe I : Un Conseil formellement
ménagé par la classe politique.
La classe politique apprécie le Conseil de façon
différente selon qu'on est devant le contentieux électoral ou le
contentieux constitutionnel. Le constat qui se dégage est que les
critiques faites à l'encontre du Conseil ne s'inscrivent pas dans la
logique du professeur Favoreu qui considère que « si les
décisions du Conseil constitutionnel sont parfois contestées, ce
n'est du qu'au mécontentement de ceux dont il limite l'arbitraire, ou
à l'impatience d'autres qui voudraient le voir se mettre au service de
leurs intérêts. Le caractère contradictoire de ces
critiques le confirme : il est un simple régulateur de
l'activité normative des pouvoirs publics »73(*). Cette affirmation du doyen
Favoreu est certainement valable dans les démocraties dites
avancées. Mais dans nos pays où la démocratie est en
construction, les décisions contestées du Conseil dans la
certains cas sont justes et justifiées. Cependant dans la plupart des
cas ce sont des critiques qui s'inscrivent dans ce qu'on pourrait qualifier de
« critiques politiciennes »74(*).
En effet devant le contentieux constitutionnel, les leaders
politiques ne critiquent jamais ou en en tout cas pas ouvertement les
décisions du Conseil constitutionnel. A défaut de pouvoir
contester directement la décision rendue par le juge constitutionnel,
ils se retranchent derrière les formules telles
que : « nous exprimons notre surprise, notre
étonnement et nos inquiétudes à l'issue des
délibérations des cinq sages » ou d'expressions
comme « dans la décisions du Conseil constitutionnel,
beaucoup de questions sont restées sans réponse, avec des
incohérences et des omissions surprenantes » ou encore
« nous laissons aux juristes le soin de commenter la
décision »75(*)
Cette attitude des hommes politiques s'explique par le fait
que même si les décisions du Conseil sont défavorables
à l'opposition, celle-ci considère qu'il ne sied pas que les
décisions de la plus haute instance judiciaire soient discutées
ou critiquées. Même si elle est déboutée, pour la
simple raison que l'opposition ne veut pas porter le sobriquet
d'antirépublicain.
On peut citer à titre d'exemple la réaction de
quelques leaders politiques au lendemain de la décision du Conseil sur
l'amendement Moussa Sy76(*) et qui était défavorable à
l'opposition.
D'abord le leader de l'URD (l'union pour le renouveau
démocratique) Djibo Ka disait que « nous avions saisi le
Conseil pour qu'il déclare non conforme à la Constitution ce
fameux texte qu'on a appelé amendement. Si nous l'avons fait c'est parce
que nous sommes des légalistes. Nous croyons aux institutions de la
République, nous estimons que le rempart de la démocratie et de
l'Etat de droit le plus sur et le plus sérieux, c'est la justice en
l'occurrence le Conseil constitutionnel. Nous prenons acte de sa
décision que nous respectons pour rester cohérent avec nos
choix 77(*)»
Dans le même ordre d'idée Aminata Mbengue Ndiaye
responsable socialiste affirmait « nous respectons la
décision du Conseil constitutionnel ». La
réaction de Jacques Baudin est encore plus expressive de ces
déclarations ou acceptations formelles qui laissent entrevoir un
arrière gout amer de la décision. En effet Me Jacques Baudin,
membre du pool des avocats du groupe socialiste, a rappelé qu'il est "
un républicain profondément attaché à
l'indépendance de la Justice de son pays qu'il a servi par choix, en
tant que magistrat et qu'il sert encore comme avocat, en participant à
la distribution de la Justice. Tous ces éléments mis ensemble
l'obligent " à prendre acte de la décision du Conseil
Constitutionnel et à la respecter, parce qu'elle est exécutoire
". Néanmoins, en tant que juriste, Me Baudin reconnaît qu'il
" pourrait faire un commentaire soit pour des étudiants,
soit à la faveur d'une conférence ou d'un séminaire ; ce
qui est du domaine de la participation à l'évolution de la
Justice de notre pays ".78(*)
Dans la même veine Abdoulaye Bathily, secrétaire
général de la LD/MPT se dit « être heureux
que l'amendement soit accepté, cela veut dire qu'il est finalement
conforme à la loi »
Le constat qui se dégage est que l'opposition ou plus
exactement les leaders de l'opposition s'inclinent devant les décisions
du Conseil surtout dans le souci de rester en phase avec leur conviction ou
principe républicain. Toutefois derrière leur déclaration
s'exprime une non satisfaction et un désarroi.
Cependant lorsqu'il s'agit des élections surtout
présidentielles, les hommes politiques n'hésitent pas à
attaquer ouvertement à travers des déclarations incendiaires les
décisions du Conseil et parfois même physiquement79(*)les membres du Conseil. Ainsi
aux élections de 1993, le candidat Wade80(*) ne manquait pas de manifester ses réserves
quant à la capacité de certains membres du Conseil à
pouvoir juger en toute impartialité. Il est même allé
jusqu'à récuser la juridiction constitutionnelle et demander la
mise en place d'un tribunal arbitral81(*). D'ailleurs mis à part l'alternance de 2000,
toutes les élections organisées sous l'égide du Conseil
constitutionnel ont été vivement contestées par la classe
politique.
Toutefois les partis politiques même s'ils le disent pas
considèrent le Conseil comme une arme politique.
Paragraphe II : le Conseil constitutionnel : une
arme politique
Dans certaines hypothèses on a l'impression que les
leaders politiques ne prennent pas au sérieux le Conseil
constitutionnel. Il l'utilise à leur guise comme toute arme politique
dont il dispose à des fins « politiciennes ». Cette
tentative d'instrumentalisation du Conseil par les leaders politiques est dans
une certaine mesure la résultante de l'attitude du conseil dans la vie
politique. En effet le Conseil depuis sa création n'est pas
arrivé à s'imposer comme un arbitre impartiale entre l'opposition
et la majorité. Il parait beaucoup plus comme l'instrument de la
majorité contre l'opposition.82(*)
En effet dans la formulation des saisines du Conseil par les
partis politiques, on se rend compte que ces derniers ne sont pas
ignorants « du code de compétence » du Conseil
constitutionnel. Mais qu'ils le saisissent surtout pour manifester leur
désaccord sur une politique gouvernementale, et que même s'ils
savent a priori que leur recours n'a aucune chance d'aboutir ils saisissent
exprès le Conseil. En effet dans ces cas la décision qui sera
rendue par le Conseil est tout à fait prévisible. Cette
stratégie de contestation peut du coup être de nature à
mettre mal à l'aise le Conseil. C'est ainsi que le doyen Rousseau
constate à juste titre que « la saisine devient en effet,
pour l'opposition, un élément obligé de sa
stratégie de contestation de la politique législative du
Gouvernement. Elle y trouve de multiples avantages : gêner ou
retarder l'exercice du pouvoir législatif....., montrer à son
électorat la détermination de son opposition, mettre en
difficulté la majorité en essayant d'obtenir une invalidation
totale ou partielle de la loi qui l'oblige à une nouvelle
rédaction et donc à de nouveaux compromis
politiques. »83(*)
Si certains n'hésitent pas parler de requêtes
fantaisistes comme le professeur Ismaila Madior fall84(*), d'autres au contraire
considèrent que c'est une bonne chose85(*). A titre illustratif la décision du
Président de la République de négocier avec le MFDC
à fait l'objet d'un recours devant le Conseil. Il a été
saisi dans cette affaire par le secrétaire général d'un
parti politique, le RND (Rassemblement National Démocratique). Le
conseil constitutionnel a déclaré la requête irrecevable
pour deux raisons : elle ne rentre dans aucun des cas de saisine
prévus par la Constitution, et , d'autre part, elle n'émane pas
d'une autorité apte à saisir la haute juridiction. Pour le
professeur Alioune Sall « il n'en demeure pas moins que la
décision rendue pouvait difficilement ignorée les lacunes de
cette saisine. En d'autres termes, le verdict rendu était
prévisible. Non seulement l'auteur de la requête n'y était
pas habilité (seul le Président de la République ou un
dixième des membres de l'Assemblée nationale peuvent saisir le
Conseil constitutionnel. Dans ces conditions, il est permis de se demander si
la saisine en question ne tenait pas plus du symbole, ou de la volonté
de provoquer seulement un débat public. D'autres requêtes,
introduites plus récemment par l'opposition au pouvoir, semblent
obéir à la même logique. Ne se faisant point d'illusions
sur le sort qui leur sera réservé, les saisissants visent en
fait, par ce biais, à susciter le débat et, il faut aussi le
dire, à pointer du doigt les failles de l'interprétation que le
Conseil fait de ses compétences. Un tel état de fait est bien
entendu regrettable, dans la mesure où il révèle une
béance que le contrôle de constitutionnalité a
précisément pour vocation de combler.
Plus symptomatique est encore les menaces de saisine du
Conseil par l'opposition regrouper au sein de « Bennoo »
faire constater l'incapacité de Me Wade de continuer à assurer
ses charges présidentielles. La lettre que « Benno »
a envoyé au Président du Sénat à l'allure d'une
requête adressée à un juge. Il expose les faits et invoque
les dispositions constitutionnelles applicables à ces mêmes faits.
Dans la première lettre envoyée par les leaders de Bennoo au
président du Sénat, il est écrit : «Monsieur le
Président, les sénégalais en sont témoins, depuis
quelques temps, le Président de la République pose
régulièrement dans la vie publique nationale des actes qui
inclinent les patriotes de bonne foi à s'interroger sur son
intégrité mentale et sur sa capacité à continuer
à assumer le gouvernement de notre pays ». Poursuivant leurs propos
pour étayer leur argumentaire, les opposants prennent l'exemple des
«incessants remaniements ministériels » qui selon eux
«témoignaient assez de son instabilité fondamentale qui
tient à sa totale incapacité à fixer un cap à la
Nation et à choisir les hommes pour conduire le navire
Sénégal, mais beaucoup plus révélatrice encore, est
sa propension à multiplier des déclarations incendiaires de
nature à saper la cohésion nationale voire l'existence même
de la Nation ». Les attaques contre les imams, les récents
différents avec les chrétiens «dans le cadre de la
laborieuse défense de la statue des mamelles ou encore la dangereuse
exacerbation des tensions entre les communautés religieuses et (ou)
confrériques » sont autant d'arguments exposés par les
opposants pour disqualifier le président. « Sur un autre registre,
plus loufoque cette fois, ses prétentions à accaparer tout ou
partie des retombées du monument de la renaissance édifié
avec l'argent des sénégalais ou sa proposition de transplantation
du peuple haïtien dans une région d'Afrique dont on leur ferait
cadeau ne dissipent pas les craintes nos compatriotes »
écrivent-ils.
A cela, les leaders de Benno descellent des
«signaux cliniques d'une dégénérescence mentale mise
en évidence par une fâcheuse tendance aux trous de mémoire
et à l'amnésie caractéristiques du grand âge »
dans leur lettre. «C'est ainsi qu'il y a peu, il déclarait sans
sourciller ne pas connaître l'un de ses anciens directeurs de cabinet et
toujours porte parole de son parti. Pire, et plus symptomatique du danger que
sa désormais évidente sénilité fait peser sur
l'avenir pays, il a révélé dernièrement l'oubli de
ses déclarations scandaleuses qui ont failli mettre le feu aux poudres
» poursuivent-ils. «Pour toutes ces raisons, les partis politiques
regroupés au sein de Bennoo Siggil Sénégal s'estiment
fondés à nourrir les plus vives inquiétudes quant à
la santé psychique du Président de la République et sur
son aptitude à demeurer à son poste. Soucieux de s'en assurer,
les partis soussignés ont pris la ferme résolution de s'adresser
à qui de droit pour édifier les sénégalais sur la
question et le cas échéant, faire déclarer
l'empêchement définitif du Chef de l'Etat » arguent-ils.
Les leaders de Bennoo n'ont pas manqué de citer l'article 39
alinéa 1er de la constitution sénégalaise qui dit qu'en
«cas de démission, d'empêchement ou de décès,
le Président de la République est supplée par le
Président du Sénat... ». Mieux, les opposants convoquent
l'article 41 de la Constitution qui dit que «la démission,
l'empêchement ou le décès du Président de la
République sont constatés par le conseil constitutionnel saisi
par le Président de la République en cas de démission, par
l'autorité appelée à le suppléer en cas
d'empêchement ou de décès ». «Ainsi donc il
ressort de l'interprétation combinée de ces deux dispositions
qu'il appartient au Conseil Constitutionnel de se prononcer sur
l'empêchement définitif du Chef de l'Etat à la demande du
Président du Sénat » ajoutent les leaders de Benno86(*). Cette initiative de Bennoo
n'est pas sans intérêt dans la mesure où au delà des
extrapolations sur l'âge et la santé du Président, force
est de constater que de sérieuses réserves pèsent sur la
capacité d'un homme qui a plus de 80 ans à diriger un pays en
l'occurrence le Président Wade. Dans l'entretien qu'il nous a
accordé, le journaliste Abdou Latif Coulibaly s'exprimant sur la
question, considère que «lorsqu'on a un certain âge, on
doit laisser la politique et se consacrer à sa religion, Wade devrait
s'inspirer de Senghor à l'age de 74 ans avait dit n'avoir plus les
capacités physiques et mentales pour diriger le
pays ».87(*) Face à cette menace de l'opposition, la
réaction du pouvoir est encore plus surprenante. Par la voix de Me
Ousmane Sèye, conseiller spécial du président, le pouvoir
menace l'opposition réunie au sein de Bennoo Siggil
Senegaal. ''J'avertis l'opposition devant l'opinion nationale et
internationale. Le jour où des partis politiques vont déposer une
requête auprès du Conseil constitutionnel pour constater
l'empêchement ou la démission du président de la
République, ce jour même une plainte sera déposée
pour le compte de l'Etat du Sénégal entre les mains du procureur
de la République sur le fondement des articles 72 et 80 du code
pénal et que les personnes signataires d'une telle requête seront
traduites devant le procureur et devant le tribunal pour être
poursuivies''88(*). Cette
situation créait par la menace de Benno de saisir le Conseil ressemble
à un véritable feuilleton politique. Après la
déclaration de l'avocat conseiller du Président Wade, la
réaction des leaders de l'opposition ne s'est fait pas attendre. C'est
au leader de l'Alliance des Forces de Progrès de monter au
créneau. ''Si Me Ousmane Sèye peut tous nous envoyer en
prison, ma valise est prête. Moi, ma valise est prête. Je suis
prêt, si j'ai un chapelet, un pyjama avec des paires de sandales, cela me
va. Et Fann résidence n'est pas loin de Rebeuss''89(*), a affirmé
Moustapha Niasse. Le constat est que l'opposition, même si les raisons
invoquées par les leaders de Bennoo paraissent sérieuses, la
manière avec laquelle ils ont conduit cette affaire laisse sous-entendre
qu'ils ne cherchaient qu'à susciter un débat politique.
Même s'ils ont saisi le Président du Sénat ils savaient que
c'était impensable que ce dernier très proche du Président
et membre du Pds puisse leur donner satisfaction. Il faut connaissait à
l'avance le sort de leur requête comme l'a si bien dit le
secrétaire général de l'AFP « Il ne faudrait
pas se faire beaucoup d'illusions parce que je ne vois pas, le président
actuel du Sénat (Pape Diop) prendre cette requête et aller au
Conseil constitutionnel pour dire : « je suis d'accord avec
Bennoo. A moins que le bon Dieu ne l'inspire ». Ainsi
considère-t-on que les partis politiques utilisent le Conseil comme une
arme politique, c'est dans une certaine mesure une tentative
d'instrumentalisation de celui-ci, dans la mesure où comme nous venons
de le voir le sort de toutes les requêtes était prévisible.
Les saisines obéissent plutôt à « des calculs
politiciens ». L'image du conseil parait beaucoup plus exacte dans
ces conditions à travers les photographies qu'en font la presse, les
universitaires. Cette image est dans une large mesure dépendante de
l'environnement judiciaire ou plutôt de l'image du système
judiciaire sénégalais
Section II : l'appréciation du Conseil dans la vie
politique
Dans cette partie nous aborderons d'une part la perception du
Conseil par la presse en général . Et d'autre part nous verrons
comment le conseil est apprécié à partir de la mesure de
son indépendance par rapport au pouvoir politique
.
Paragraphe I : Le regard de la presse et de l'opinion
publique
En réalité la presse met au devant de
l'actualité le conseil surtout au moment des élections
présidentielles, tout au plus lors de la proclamation des
résultats par celui-ci. Elle découvre également le conseil
dans les grandes tensions politiques entre opposition et majorité
parlementaire, dans lesquelles le plus souvent sont soulevés des
arguments tenants à l'Etat de droit et à la démocratie par
l'opposition minoritaire qui finalement en appelle à l'intervention et
à l'arbitrage du conseil.
En effet depuis les premières activités du
conseil, la presse produit des commentaires réguliers de ses
interventions, qui façonnent l'image d'un conseil largement en dessous
des attentes démocratiques et de l'Etat de droit mais aussi un conseil
domestiqué par le pouvoir exécutif
« Mode d'emploi incompétence »,
« éloge de la présidente du conseil au président
de la République », « la peur du
pouvoir », « les cinq sages font faux
bond »90(*). Ou
de formules humoristiques telles que : Le Conseil constitutionnel y est
allé finalement de sa « sagesse légendaire »
consistant à se conformer à la volonté du président
de la République, comme une coutume, en ces huit ans
d'alternance91(*). Autant
de formules journalistiques qui donnent à voir l'institution comme
organe « allié de l'exécutif »92(*). Cette image qui nuit à
sa crédibilité et à son autorité, va se consolider
progressivement au fil des décisions rendues mais également au
fil des années et des différents régimes qui ont eu
à se succéder. Cette médiatisation des décisions du
conseil et la représentation de son rôle qui en découle,
n'en produisent pas moins, dans une société dominée par
les médias, un effet de réalité qui constituent pour
l'autorité et le crédit du conseil dans l'opinion publique un
soutien fort appréciable.
Le 25 mars 2010 le journaliste politologue Abdou Latif
Coulibaly nous a accordé un entretien où il était question
de la perception du conseil par le journaliste qu'il est, très
impliqué dans la vie politique. On reportera ici les grandes lignes de
cette interview.
Du point de vue du journaliste Abdou Latif Coulibaly, le
conseil constitutionnel tel qu'il est aujourd'hui n'est pas une juridiction
indépendante : plusieurs raisons l'expliquent. Selon ses dires, le
conseil n'a jamais été une juridiction indépendante, ni
à l'époque où le parti socialiste était au pouvoir
encore moins avec le parti démocratique sénégalais. Mais
ce qui différencie la nature des rapports entre le conseil et le pouvoir
politique. C'est que les socialistes contrôlaient le conseil sans
l'afficher contrairement au régime libéral qui ne se gêne
pas à montrer publiquement qu'il maitrise le conseil. A l'appui de son
argumentation il avance d'abord la lettre envoyée par le
président Wade94(*)
à la haute juridiction, à la suite de sa décision rendue
concernant l'affaire Alé Lo95(*), pour leur faire savoir qu'il est le gardien de la
constitution , et que par conséquent « si le conseil a
pour mission de veiller au respect de la constitution par l'exécutif et
le législatif, il va de soi qu'il est tenu lui même aux
mêmes obligations de respect de la constitution et de la
loi ». En d'autres termes il accuse le conseil d'avoir
violé la constitution. A quoi servent donc les institutions si on ne les
respecte pas, si on peut les intimider publiquement à orienter leur
décisions dans le sens voulu par l'exécutif.
Toujours dans la même perspective pour Abdou Latif
Coulibaly le deuxième point manifeste qui explique la mise sous tutelle
du conseil est démontré par l'attitude de la présidente du
conseil lors de la prestation de serment du président Wade en 2007, en
effet selon Latif la présidente du conseil à consacrée un
long moment à chanter les louanges du président Wade. Il en
conclut que le conseil au regard de son activité ne sert absolument
à rien du tout sinon pour « remplir le décor
institutionnel » : c'est une institution budgétivore.
L'explication de ce comportement c'est que le conseil ne se préoccupe
nullement de l'image qu'elle reflète dans la société ni de
sa crédibilité96(*)
Paragraphe II : Le conseil constitutionnel
apprécié par rapport à son degré
d'indépendance du pouvoir politique.
D'après M. Samb, « l'indépendance
de la justice s'exprime, de prime abord, par une autonomie à
l'égard du pouvoir politique »97(*). Malgré les garanties
textuelles d'indépendances98(*), les rapports entre pouvoir judiciaire et politique
laissent apparaitre la domination du politique sur le pouvoir judiciaire. En
effet depuis quelques années une séries d'incidents entre ces
deux pouvoirs a fait croire à la majorité des
sénégalais l'inefficacité de leur justice judiciaire et
constitutionnel compris.
L'image de la justice est ternie par plusieurs séries
d'événements99(*) parmi lesquels on peut citer par exemple l'affaire
opposant le Président du tribunal départemental de Dakar et l'une
des épouses du ministre de la justice Serigne Diop. En effet il est
établi que son départ est lié à l'incident qu'il a
eu avec l'épouse du ministre. S'agissant du cas de M. Ba,
Président du tribunal hors-classe de Dakar, il est fait état d'un
appel du ministre en question lui faisant injonction sur une affaire concernant
le partage du patrimoine d'Air Afrique, « conformément au voeu
qu'aurait exprimé le chef de l'Etat en personne »100(*). Lui avait refusé
catégorique de se plier à la volonté du ministre, ce qui
lui a valu la détérioration de ses relations avec ce dernier. Ces
histoire anecdotique montre que la situation actuelle aboutit à faire
des magistrats des complices de l'exécutif. Celui ne manque pas de moyen
pour contraindre des magistrats récalcitrants. Si un ministre de la
justice a autant de moyen ou d'influence face au pouvoir judiciaire alors on
peut se poser la question de savoir qu'elle est l'état des rapports
entre le Président de la République, autorité toute
puissante dont les pouvoirs sont hypertrophiés face au constitutionnel.
En effet en France tout comme au Sénégal, le Président de
la République n'a jamais déféré une loi au Conseil.
Cette abstention peut se comprendre en période d'accord politique entre
la majorité parlementaire, le Premier ministre et le Président de
la République, ce dernier n'ayant aucune raison de contester les lois
dont il est alors, peu ou prou, l'inspirateur. En période de
cohabitation (ce qui peu probable au Sénégal) l'usage de ce
pouvoir présidentiel peut paraitre plus facile, dans la mesure
où, le chef de l'Etat n'ayant plus de responsabilité dans la
détermination de la politique législative, il se trouve libre de
contester les lois élaborées par un premier ministre et
votées par une majorité parlementaire qui lui sont politiquement
hostiles. Cependant, le face-à-face Conseil
constitutionnel-Président de la République risquait de
créer une situation politique délicate pour les deux
institutions : pour le Conseil, qui serait accusé de soumission
s'il donnait raison au Président, et d'usurpation s'il donnait tort au
Premier magistrat de l'Etat, gardien de la Constitution ; pour le
Président de la République, qui verrait son autorité
morale et politique atteinte par un désaveu constitutionnel. C'est
pourquoi le chef de l'Etat semble avoir préférer laisser ses amis
parlementaires contester devant le Conseil la politique législative du
Premier ministre....et saisir lui même l'opinion publique par l'usage
d'une parole critique.101(*) Au Sénégal le Président ne se
gêne pas à attaquer ouvertement le Conseil. Ce qui parait à
la fois être une tentative d'intimidation et de domestification. On se
rappelle de la colère du Président Wade suite à la
décision du Conseil sur l'affaire relative à l'effigie du
Président de la République102(*). Selon le Conseil constitutionnel, le
« nom de Wade et la photographie du président de la
République ne doivent pas figurer sur le bulletin de vote de la
coalition Wade ». Cette décision a suscité une vive
désapprobation du président Wade qu'il n'a pas manqué de
porter à l'attention du Conseil à partir d'une lettre.
Il s'en est suivi un échange de correspondances103(*). D'ailleurs Doudou Ndoye
qualifie la lettre du Président de « demande d'explication
injonctive faite au Conseil constitutionnel »104(*). D'ailleurs cet incident
semble avoir provoqué la peur du conseil qui n'ose plus s'aventure hors
des champs de ses compétences, c'est un conseil qui reste
hermétiquement enfermé sur lui-même, sur ses
compétences. D'ailleurs l'attitude de la présidente du Conseil
avait été fortement décriée par l'ensemble de la
classe politique et de la presse, qui lors de la prestation de serment du
président Wade en 2007, n'a cessé de tarir d'éloge le
Président Wade.105(*)Beaucoup d'observateurs avait analysé cette
attitude de la présidente du Conseil, comme un acte d'allégeance
faite au président Wade. N'en faut-il pas convenir avec Dominique
Rousseau lorsqu'il affirme : « principe sans doute
important, l'indépendance des juridictions se mesure cependant
véritablement à l'indépendance de ses
membres »106(*). Dans cette ambiance des rapports entre
l'exécutif et le judiciaire, marquée de plus en plus par une
prééminence de l'exécutif sur le judiciaire, le Conseil
n'a pas voulu s'opposer à la toute puissance de l'exécutif, de
devenir l'instrument de la société civile contre la
société politique. Cette situation ternie beaucoup l'image du
Conseil. De façon il est à noter que l'image du Conseil dans la
vie politique n'est pas très reluisante.
Deuxième partie : l'analyse de l'attitude du
conseil dans la vie politique.
Plusieurs éléments entrent dans l'explication de
l'attitude du Conseil dans la vie politique. Il en est par exemple des rapports
de force avec le pouvoir politique, de l'existence relativement récente
du Conseil, de la loi organique attributive de compétence, du mode de
nomination des conseillers et même de leur profil..... En effet le
Conseil n'est pas très imprégné de la vie politique, il
n'est pas non plus à la marge de la vie politique. Ce que le doyen Vedel
appelle : « l'insoutenable autonomie du
politique » à savoir que la vie politique d'un pays se
déroule, plus ou moins souvent, selon une logique autonome, se
vérifie au Sénégal. Autrement dit pour rendre compte du
régime politique du pays, inutile de lire la Constitution, il vaut mieux
étudier l'évolution des rapports de forces politiques ou le
systèmes des partis politiques, la séparation de la
majorité et de l'opposition est plus importante que la séparation
des pouvoirs législatifs et exécutifs qui n'a plus grand sens. On
est dans une certaine mesure à l'époque où Georges Burdeau
considérait que « la Constitution n'est qu'une survivance,
un temple allégorique habité par des
ombres »107(*). En effet le Conseil fait montre d'une prudence
excessive dans la vie politique.
Chapitre I : La prudence excessive : raison des
manquements du conseil dans la vie politique
Le Conseil constitutionnel sénégalais manifeste
une grande prudence dans la vie politique. Cette prudence fait que
l'activité du conseil est en sorte inexistante. Cette attitude trouve
certainement une explication dans les circonstances de la naissance du Conseil
et son manque d'expérience. Cette situation aura pour conséquence
des manquements graves du Conseil aux attentes des citoyens vis-à-vis
des exigences démocratiques et de l'Etat de droit
Section I : L'explication de cette posture du Conseil
Ce comportement du Conseil s'explique d'une part par le souci
d'asseoir sa légitimité. Et d'autre part la forte influence de
l'héritage de la 5ème République
française en ce sens qu'il est une copie du Conseil constitutionnel
français de 1958
Paragraphe I : le poids de l'heritage de la 5ème
République française
A l'origine, le conseil constitutionnel français ne
disposait d'aucun capital spécifique, plus exactement il hérite
d'un capital négatif qui contribuait à le mettre « hors
jeu ». Toute l'histoire politique, depuis 1789 témoigne de
l'hostilité de la France à l'égard de la création
d'un organe spécial chargé de controler la
constitutionnalité ; au point que certains interprètent
l'entrée en scène du cinseil en 1958 comme la rupture d'une
tradition républicaine fondée sur le souvenir des parlements de
l'ancien régime, et la primauté de la loi. Toutes les autres
institutions (le parlement et l'executif) bénéficie d'une
légitimité, historique ou démocratique, sur laquelle
appuyer leur revendication de pouvoir ; le conseil d'aucune. Ce
déficit de légitimité explique et renforce la position
médiocre attribué par la Constitution de 1958 : simple
régulateur sur une saisine limitée de l'activité des
pouvoirs publics.
Egalement en 1958 encore la création du conseil
constitutionnel est pour certains auteurs, la preuve du caractère
bonapartiste et anti-parlementaire de la Constitution de la
5ème République, et sa composition l'assurance qu'il
se comportera en serviteur docile des volontés du Président de la
République108(*).
A cet effet, François Mitterand dira : « le conseil
constitutionnel n'a jamais eu d'autre utilité que de servir de
garçon de course au Général de Gaulle, chaque fois que ce
dernier a cru bon de l'employer à cet usage ».109(*)
Le conseil constitutionnel sénégalais correspond
actuellement à l'état du conseil constitutionnel français
en 1958 où il faisait « figure de troisième
chambre » ou était considérer comme
« allier de l'executif ». Dominique Rousseau nous
montre que l'hésitation des constituants à ne pas donner une
grande importance au conseil se retrouve jusque dans la dénomination de
l'organe constitutionnel : ni « comité » ou
« commision » termes trop prosaiques, ni
« cour » ou « tribunal » trop nobles,
mais « conseil » qui n'engage rien de précis sur le
plan juridique ou politique110(*)
Le conseil constitutionnel sénégalais n'a pas
connu ce meme parcours historique que le conseil français. La naissance
du conseil français était une exigence et une
nécessité pour la survie de la cinquième République
française. En effet la Constitution avait délimité, pour
la première fois le domaine de la loi en énumérant de
manière précise, dans son article 34, les matières sur
lesquelles le législateur peut intervenir, découvrant ainsi, a
contrario, un vaste champ de compétence normative au
bénéfice du gouvernement. La précision ou
l'élevation à la qualité constitutionnelle de disposition
traditionnellement du domaine des réglements intérieurs des
chambres n'apparut pas suffisante aux constituants de 1958. Instruits par
l'histoire constitutionnelle française, ils savent q'une
Assemblée élue au suffrage universel direct et
héritière de « mauvaises » habitudes, arrive
toujours à détourner ou contourner les règles juridiques
les plus rigoureuses : l'évolution de la quatrième
République leur offrait une illustration éclatante de cette
pesanteur de ces moeurs parlementaires. Aussi, les constituants ont-ils eu la
prudence d'accompagner leur nouvelle réglementation d'un
mécanisme de sanction en « imaginant »- le mot est
de Michel Debré - une institution particulière chargée de
la faire respecter et de maintenir le parlement dans le cadre strict de ses
attributions. Cette institution, c'est précisément le Conseil
constitutionnel. En d'autres termes, la création, en 1958, du Conseil
constitutionnel repose sur une intention claire : mettre fin à
l'arbitraire et à l'hégémonie du parlement. Mais elle se
heurte aussitôt à une autre intention, tout aussi clairement
exprimée : éviter d'instaurer une véritable
juridiction constitutionnelle, contraire à la tradition politique
française. Ceci illustre en quelque sorte la conception que les
constitutants se font, en 1958, de l'institution qu'ils créent : un
organe permettant seulement, mais permettant enfin de faire respecter, par son
pouvoir de sanction, les dispositions constitutionnelles limitant le pouvoir du
parlement. « Surveiller le Parlement », telle est, selon
François Luchaire, la mission première assignée au Conseil
constitutionnel.111(*)
D'ailleurs lors des différentes étapes de l'examen du projet
constitutionnel, le principe de l'institution d'un Conseil constitutionnel n'a
jamais été véritablement discuté. En revanche,
dès que le débat s'engage sur la question de ses fonctions, une
hostilité très majoritairement partagée, se manifeste,
avec fermeté et constance, contre l'idée de lui confier un
contrôle de la constitutionnalité des lois veritables,
c'est-à-dire portant sur le fond meme de la loi et non seulement sur les
règles de compétence et de procédure fixées par la
constitution. Ainsi dès le début des travaux, le
Général de Gaulle lui-meme répond, le 13 juin 1958, au
Président Cassin inquiet des rumeurs relatives à la
création d'une cour constitutionnelle, que cette idée n'a jamais
été envisagée par le gouvernement.112(*) L'argument qui emporte
l'adhésion des plus constituants les plus réservés
à l'idée d'un Conseil constitutionnel est l'assurance
donnée par François Luchaire que, par son mode de saisine,
« il ne sera pas le gardien de la Constitution mais permettra de
régler certains litiges d'ordre politique opposant les grands organes de
l'Etat ».113(*) Cette volonté explicite des rédacteurs
de la Constitution de ne pas créer une justice constitutionnelle sur le
modèle des autres pays européens à été
clairement affirmée.
Le Conseil constitutionnel sénégalais est
à l'image du celui français de 1958. En effet le Conseil
sénégalais semble étre calqué sur le texte de la
constitution de 1958, dont il respecte beaucoup plus d'ailleurs que le conseil
français, qui a connu une evolution surprenante. Cela s'explique par le
fait que Conseil sénégalais est le fruit d'une simple parachutage
institutionnel ou encore d'un mimétisme « à
pérroquet » institutionnel. Et qu'il ne répond pas
à la théorie qui voudrait que « chaque pays porte
dans ses institutions, règles, procédures et traditions, les
stigmates de son passé »114(*)
On aurait pu initier ou imaginer par exemple le modèle
béninois ou Sud-Africain de justice constitutionnelle car
« tout projet de réforme devrait etre
précédé d'une sérieuse étude d'impact
effectuée notamment en utilisant les enseignement du droit
comparé. L'ingénierie constitutionnelle n'est pas un jeu de
construction, on ne peut changer les pièces au gré de
l'imagination des réformateurs »115(*)
Cependant cette attitude du Conseil sénégalais
peut également trouver son fondement dans la quete d'une
légitimité.
Paragraphe II : Un souci de légitimité
Lorsqu'il s'agit de légitimité d'une
institution, il est de coutume de l'analyser sous l'angle de la
nécessité de sa création par rapport aux attentes
populaires. Mais étant donné que le conseil
sénégalais, dont il est question, même s'il est loisible de
convenir avec Mounirou Sy, qu'il s'agit plus d'une
« création » appréciée qu'une
« créature » redoutée, la controverse de sa
légitimité s'est très tôt
estompée116(*). S'il est également vrai que
l'existence d'un conseil constitutionnel sénégalais est
politiquement et juridiquement acceptée. Il faut dire que c'est dans
l'appréciation de son caractère utilitaire ou indispensable dans
la régulation de la vie politique que se pose le problème de sa
légitimité. Il ne s'agit pas de revenir sur la
nécessité de sa création mais plutôt sur la fonction
heuristique de l'institution qui est sans doute un gage de
légitimité. Et qui fera de sorte qu'il n'apparait pas devant le
citoyen comme un simple « habit constitutionnel »117(*) présentable aux yeux
de l'opinion nationale et même internationale. Ou pour parler comme
Bayart qu'il apparaisse comme` une institution créée pour
« sauvegarder la façade
démocratique »118(*) du régime. En cela on s'inscrirait
directement dans même optique que le Doyen Rousseau qui considère
que « la légitimité d'une institution repose sur la
croyance collective en sa valeur sociale »119(*). Car à noter avec
Madeleine Grawitz : « le principe de l'effectivité
reste le meilleur baromètre pour apprécier le sens d'une
idée ou d'une entreprise »120(*) Aujourd'hui on peut
affirmer de façon péremptoire que le Conseil constitutionnel
sénégalais, ne bénéficie pas de cette croyance,
après une quinzaine d'année d'existence et au terme d'une
jurisprudence très mal perçue par la majorité des
sénégalais. Pourtant le conseil aurait pu facilement asseoir sa
légitimité. Car comme l'a remarqué Ives Poirmeur
« le Conseil trouverait sa légitimité à la
fois dans la méfiance vis-à-vis des hommes politiques..... Et
dans les dysfonctionnements de la démocratie génératrice
de vide politique »121(*). Autrement dit la légitimité du
conseil réside dans la nécessité de contrôler les
Parlements parce que leur législation, mue par les passions
électorales, est devenue une dangereuse menace pour l'avenir. Un
parlement peut mal faire et en son sein, une majorité peut opprimer,
surtout lorsqu'il n'y a plus de séparation des pouvoirs du fait du
monolithisme du bloc Parlement-Gouvernement122(*). En vertu de la conjoncture politique actuelle la
nécessité de définir des garde-fous aux pouvoirs publics
sénégalais est devenue impérieuse. La raison en est que le
régime politique sénégalais tel qu'il est, tend toujours
vers la cristallisation d'un système dans lequel s'exerce un pouvoir
exécutif sans limite123(*). En effet le Parlement n'est plus le lieu de
discussion où débats et discours contribuent à la
formation de la volonté générale ; il n'est plus le
lieu de décision, mais celui où, de manière solennelle et
dans le rituel des débats dont chacun sait qu'ils ne changeront pas
l'issue, s'enregistrent pour parler comme Rousseau les décisions voulues
et conçues ailleurs, autrement dit à l'Elysée ou à
Matignon. Face à cette situation l'opposition comme le peuple de
protection. Le Conseil constitutionnel dont il incombe cette mission, dans les
appréciations de la presse, d'une bonne partie de l'opinion et
même de certains leaders politique, a lamentablement failli à son
rôle. Au point que son existence même est remise en question. En
effet par une méfiance accrue à l'égard du Parlement, et
plus encore des députés, dés lors il n'est pas surprenant
que l'opinion reporte sa confiance sur des institutions qui, comme le Conseil
constitutionnel, exerce un contrôle sur les activités de la classe
politique à la sincérité de laquelle on ne croit plus. Le
conseil est ainsi perçu dans une certaine mesure comme l'instrument de
la société civile contre la société politique,
perception qui, en l'affaissement de la croyance en la vertu du politique,
participe à sa légitimation.
Ce manque de légitimité du conseil s'explique
d'une part par les raisons que nous venons d'invoquer mais également par
d'autres facteurs.
D'abord il faut noter la fréquence des
déclarations d'incompétence rendu par le Conseil. Et dans une
certaine mesure même s'il se déclare compétent et se
prononce sur une question donnée, sa décision a la
particularité de n'être d'aucun apport dans la résolution
des conflits politiques. A en croire le professeur Demba Sy en ce qui concerne
les déclarations d'incompétence « le conseil refuse
de jouer le rôle d'arbitre qui lui sied. Il se déclare
incompétent parce qu'il ne veut ni être accusé de
pro-pouvoir ni pro-opposition »124(*). Cette posture
supposée de neutralité est largement favorable à
l'exécutif. En réalité l'exécutif est le principal
bénéficiaire des déclarations répétitives
d'incompétence, en l'occurrence le Président de la
République qui voit ses pouvoirs hypertrophiés. Et à
certains égards l'exécutif se ramène à lui
même125(*).
Quant au tonitruant journaliste Abdou Latif Coulibaly, il
estime que « le Conseil constitutionnel tel qu'il est
actuellement n'a pas sa place dans le décor institutionnel
sénégalais. Son rôle dans la régulation du jeu
démocratique est évanescent voire inexistant. Il s'agit
plutôt d'une institution budgétivore. Or le peuple a besoin d'un
conseil crédible qui régule le jeu politique, qui prend ses
responsabilités mais pas d'une institution qui se déclare
toujours incompétent »126(*)
On peut dire actuellement le Conseil est supplanté dans
sa mission de régulation du jeu politique et démocratique par le
pouvoir religieux. En effet en s'inscrivant dans la meme optique que le
professeur Mamadou Diouf « les hommes religieux ont fortement
influencé le système politique. Ils ont joué un rôle
important dans la stabilisation du pouvoir, dans les élections et dans
les conflits au sein de la classe politique, au pouvoir comme dans
l'opposition. Donald Cruise O'Brien, considère que les marabouts ont
joué un rôle essentiel dans le « succès
story » démocratique sénégalaise. Ils ont en
quelque sorte, constitué une sorte de société civile
capable de contre balancer le pouvoir politique »127(*). On pourrait illustrer par
le conflit qui a opposé le Président de la République au
président de l'Assemblée nationale128(*). Ce dernier pour
« éviter » sa « destitution »
à la tête de l'institution car des manipulations constitutionnelle
était en cours visant à réduire le mandat du
président de l'Assemblée nationale à une année, (ce
qui dans une certaine mesure aurait obligé Macky Sall a quitté la
présidence de l'Assemblée nationale) avait requis l'intervention
du khalife général des mouride. L'intervention du marabout avait
été mal vue par une certaine presse qui la considère comme
une ingérence dans une affaire dont le règlement n'a d'autre
référence que la constitution, dont le Conseil constitutionnel
est le gardien.129(*)
Section II: Les absences marquées du Conseil dans la
vie politiques
Dans partie cette nous mettrons l'accent d'abord sur le fait
que le Conseil est très absent dans le contentieux de la protection des
droits fondamentaux qui sont proclamés et consacrés dans la
constitution. Ensuite nos développements tourneront autour l'attitude du
Conseil dans la consolidation de la démocratie.
Paragraphe I : Une protection imparfaite des droits
fondamentaux
Il semblerait hasardeux, voir osé de remettre en cause
la capacité du Conseil à protéger les droits fondamentaux
si l'on sait que Mounirou Sy a soutenu une thèse codirigée par
le professeur Babacar Kanté, ancien vice président du Conseil
constitutionnel et le professeur Henry Roussillon dont l'autorité
scientifique n'est plus à démontrer. Toutefois les études
menées sur le terrain à travers des entretiens que nous ont
accordés certains observateurs avertis130(*) de la vie politique sénégalaise nous
font penser le contraire.
Tout d'abord la nature des compétences du Conseil
n'offre pas les moyens de garantir une protection efficace des droits
fondamentaux. Ajouté à cela que le Conseil adopte une conception
minimaliste en matière de compétence131(*). En effet le Conseil
Constitutionnel sénégalais n'est pas entièrement
entré dans l'évolution de la matière constitutionnelle.
Avec l'ère du constitutionnalisme moderne instaurant le contrôle
constitutionnel exercé par une juridiction instituée pour cette
raison, les droits de l'homme recouvre les droits de tout individu en dehors de
tout contexte particulier (géographique, social, économique).
Ainsi sont considérés comme droits fondamentaux l'ensemble des
droits et libertés qui sont mentionnés, proclamés et
garantis par un texte constitutionnel, et comme tels, protégés
par la juridiction constitutionnelle.132(*) Aujourd'hui la constitution n'est plus seulement la
« détermination de la séparation des
pouvoirs ». Les constituants considéraient cette protection
comme la conséquence nécessaire d'une limitation du pouvoir
obtenue par sa division. Tout serait perdu pour la liberté
écrivait en ce sens Montesquieu « si le même homme
ou le même corps des principaux ou des nobles, ou du peuple,
exerçait ces trois pouvoirs, celui de faire des lois, celui
d'exécuter les résolutions publiques et celui de juger les crimes
ou les différends des partis ».133(*) Aujourd'hui, la
Constitution, c'est la garantie des droits. Assurer la liberté politique
des citoyens passe, non par une réflexion sur la meilleure organisation
des pouvoirs, mais par l'élaboration d'une charte des libertés
dont les citoyens pourront imposer le respect aux gouvernants ; renforcer
la démocratie implique que le texte constitutionnel s'intéresse
davantage aux droits des gouvernés qu'au statue des gouvernants, parte
parle et davantage du citoyen que des pouvoirs publics. Telle est bien
aujourd'hui la réalité constitutionnelle. La constitution au sens
moderne du terme, c'est pour une part stable mais qui proportionnellement se
réduit, l'organisation de l'Etat, et pour une part, considérable
et qui s'accroit sans cesse par le travail du Conseil par : la protection
et l'énoncé des principes constitutionnels relatifs aux droits et
libertés des citoyens. En effet celui qui incarne l'Etat de droit et qui
le constitue pleinement comme Etat démocratique respectueux des droits
fondamentaux des citoyens, c'est en principe le Conseil constitutionnel, qui a
le pouvoir de soumettre le législateur comme tous les organes de l'Etat
au respect des principes et des règles de valeurs constitutionnelles, et
dont les décisions s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes
les autorités administratives et juridictionnelles. En
effet « le Conseil est le gardien de toutes les exigences
constitutionnelles »134(*). Le Conseil constitutionnel sénégalais
a failli à cette noble mission. Nos propos sont soutenus dans une
certaine mesure par le professeur Ismaila Madior Fall qui affirme qu'
« il est possible de formuler à l'endroit du Conseil bien
des griefs dans la prise en charge de son rôle implicite de
régulateur des pouvoirs publics et de l'Etat de
droit »135(*). Plusieurs exemples nous permettent de
défendre ce point de vue.
Il ya d'abord la mise en accusation du Premier ministre
Idrissa Seck, devant la Haute Cour de Justice. Dans ce cas particulier, la mise
en accusation ne peut être faite que par l'Assemblée Nationale,
statuant par un vote au scrutin secret, « à la majorité
des trois cinquièmes des membres la composant »,
c'est-à-dire le nombre de 72 députés. Cependant du fait
que certain députés devaient être membres de la haute cour
de justice et donc ne pouvant pas prendre part au vote. Il s'est posé la
question de savoir si le nombre de députés constitutifs de la
majorité qualifiée nécessaire à la validité
du vote de mise en accusation était susceptible de variations.
Finalement lors du vote de la mise en accusation de l'ancien Premier Ministre,
la majorité exigée pour la validité de la mise en
accusation est une majorité qualifiée prédéfinie
par le constituant et non susceptible de variation arithmétique
contingente, n'a pas été respectée. Pour le professeur
Ismaila Madior Fall, un précédent dangereux venait d'être
posé, en ce sens que, désormais une majorité
étriqué de 62 députés peut traduire même le
Président de la République pour haute trahison devant la Haute
Cour de Justice. Devant cette violation flagrante de la Constitution portant
atteinte à un droit fondamental d'une haute personnalité de la
République n'a pas été sanctionné par le
Conseil.
Il ya également le cas de l'exclusion de certains
députés au niveau de l'Assemblée nationale136(*). Les raisons
évoquées par le Président du groupe parlementaire
libéral et démocratique sont injustifiées. En
conférence de presse dans les locaux de l'Assemblée nationale, le
président du groupe parlementaire Libéral et démocratique,
Doudou Wade, a tenté d'expliquer maladroitement les fondements de sa
démarche. Pour lui, les députés exclus sont frappés
par les dispositions de l'Article 7, alinéa 2 du Règlement
intérieur de l'Assemblée. «Ce texte, qui reprend la
première phrase de l'article 60 de la Constitution, est ainsi
rédigée : «Tout député qui démissionne
de son parti en cours de législature est automatiquement déchu de
son mandat.» C'est vrai que les députés Lô et Ndiaye,
respectivement élu à Darou Mousty et aux Parcelles Assainies,
n'ont jamais démissionné du Pds. Mais, Doudou Wade est convaincu
que «le droit constitutionnel et le droit parlementaire ont vocation
à régir des situations, des pratiques et des comportements
politiques». Et, croit-il savoir, «au cours de plusieurs
cérémonies publiques, dans des déclarations
relayées par la presse et confirmées par les
intéressés, MM. Lô et Ndiaye ont soutenu qu'ils
n'adhèrent plus aux idéaux du Pds et ont rejoint le camp de ses
adversaires. Par leur comportement politique, ils se sont placés hors du
Pds». Estimant que le règlement intérieur de
l'Assemblée nationale prévoit deux cas de pertes de mandat,
à savoir la déchéance et la démission, le
président du groupe parlementaire considère que la loi est
applicable aux mis en cause, même s'ils n'ont pas
démissionné. «Ici, la déchéance est la
sanction du non-respect d'une des conditions d'exercice du mandat de
député : la loyauté et la fidélité
vis-à-vis du parti qui investit», interprète-t-il. Ainsi,
pour M. Wade, la déchéance est constatée par le Pds qui a
investit. De plus, l'Article 5 des statuts du Pds retient que
«l'adhésion en droit ou en fait à une formation politique
nationale concurrente entraîne ipso facto la perte de la qualité
de membre du Pds, constatée souverainement par les instances».
Ainsi il remplace le député de Darou Mousty par Amadou Fall et
Lamine Dia va prendre la place de Mbaye Ndiaye137(*).
Le Conseil en tant que gardien de la Constitution, est
resté insensible face à cette atteinte grave des droits des
députés exclus.138(*) En effet « c'est l'article 60 de la
Constitution qui définit les conditions dans lesquelles peut prendre
fin, en cours de législature, le mandat d'un
député ». En vertu de cette disposition
« mandat du député est libre, intégral,
irrévocable, souverain et protégé ». Chacun de
ces qualificatifs est tiré d'une disposition de la Constitution. Et de
surcroit le mandat du député est représentatif, libre et
non impératif. Par ailleurs le moyen tiré de la démission
évoqué par président du groupe parlementaire
libéral et démocratique et inopérant dans la mesure
où la démission est un acte libre, lucide, volontaire et non
équivoque ; il n'existe pas de démission de fait de la part
d'un député, ni dans la Constitution, ni dans le Règlement
intérieur de l'Assemblée nationale. Par conséquent les
exigences de l'Etat de droit et la défense de l'institution
parlementaire exige le rejet de toute tentative d'y imposer l'application de la
discipline spécifique d'un parti à la place des dispositions
légales qui régissent les députés de la nation.
Il se pose à chaque fois que la volonté
générale ou plutôt la majorité parlementaire n'est
pas respectueuse des libertés et des droits. Le doyen Hauriou avait
écrit avec une belle formule sous la IIIème République sur
l'héritage libéral incontestable. Selon lui, « on a
mis du temps à se rendre compte que le pouvoir législatif est
plus dangereux encore pour les libertés individuelles que le pouvoir
administratif ».139(*)
Il ne s'agit pas ici d'arguer du fait que le Conseil n'a pas
de pouvoir d'auto saisine, encore moins de diagnostiquer ses failles. Mais
surtout de montrer ce que la classe politique et l'ensemble de la population
attendent de lui c'est-à-dire d'être au premier plan dans la
construction d'un Etat démocratique modèle. Dans notre
système juridictionnel, il y a énormément de niches
d'impunités, de dénis de Justice, qui veulent que, des fois,
l'Assemblée peut, en toute impunité, violer la Constitution, sans
qu'on reconnaisse la possibilité pour un citoyen, un
député ou une victime d'attaquer cette décision.
Le constat général qui se dégage est que
le Conseil est en réalité très effacé de la vie
politique, sa présence est évanescente, et ses absences se font
largement ressentir.
Paragraphe II : Le manque d'approfondissement de la
démocratie
Les craintes du professeur Favoreu sur «
l'absence de réflexion et le manque d'approfondissement du modèle
africain de justice constitutionnelle »140(*) ne se dissipent
guère, au rythme des années d'existence de la haute juridiction
constitutionnelle de Dakar. En effet le Conseil est resté très
absent sur les véritables questions démocratiques qui
préoccupent la majorité des sénégalais. Le Conseil
semble n'avoir pas entendu l'interpellation du doyen M. Hauriou pour apporter
une réponse aux exigences démocratiques. Selon le doyen Hauriou,
« on se doit de tenir compte de la nécessité de
contrôler les Parlements parce que leur législation, mue par les
passions électorales, est devenue une dangereuse menace pour
l'avenir »141(*). Un Parlement peut mal faire et en son sein, une
majorité peut opprimer, surtout lorsqu'il n'y a plus de
séparation des pouvoirs du fait du monolithisme du bloc
Parlement-gouvernement. En vertu de la conjoncture actuelle, la
nécessité de définir des garde-fous aux pouvoirs publics
sénégalais est devenue impérieuse. L'illustration des
dérives anti démocratiques du Parlement sénégalais
est fournie par les nombreux actes qu'il a posé parmi lesquels on peut
citer la loi très querellée de prorogation du mandat des
députés.142(*) Sous prétexte des nécessités
financières pour prendre en charge les personnes victimes des
inondations dans la banlieue dakaroise, les députés ont
voté une loi constitutionnelle prorogeant leur mandat. Saisi par 15
députés de l'opposition en vue de faire déclarer la loi
inconstitutionnelle, le Conseil ayant tranché que la loi est une loi
constitutionnelle, en tire la conséquence de son incompétence
pour statuer sur une révision constitutionnelle. Autrement dit à
travers cette décision le Conseil estime qu'il n'y a pas de
barrière juridique, mis à part le respect de la forme
républicaine de l'Etat, à la volonté des élus de se
soustraire à la date échue à la sanction populaire. Ne
s'agit-il pas là dans un système démocratique en
maturation de la caution d'une tendance pernicieuse de remise en cause du
principe de l'élection. Il avalise un précédent dangereux
dans un pays africain où la démocratie demeure fragile et
réversible143(*).
Sur la même question, la Cour constitutionnelle béninoise a, pour
sa part, radicalement refusé d'admettre dans le but d'une noblesse
suprême, celui de sauvegarder et de consolider la démocratie
encore fragile dans nos Etats. En effet insensible aux arguments de
rationalisation des finances publiques avancés par les
députés pour motiver la décision de prorogation de leur
mandat, la Cour constitutionnelle a joué un rôle de rempart dans
un moment ou le système démocratique est susceptible d'être
en péril, en rendant une décision qui restera gravée dans
les annales de la jurisprudence constitutionnelle universelle :
« considérant qu'au terme de l'article 80 de la
Constitution du 11 décembre 1990, les députés sont
élus au suffrage universel direct, la durée du mandat est de 4
ans. Ils sont rééligibles. Chaque député est le
représentant de la nation toute entière. Considérant que
ce mandat de 4 ans qui est une situation constitutionnellement établie
est le résultat du consensus national dégagé par les
forces vives de la nation de février 1990 et consacré par la
constitution en son préambule qui réaffirme l'opposition
fondamentale du peuple béninois à la confiscation du pouvoir que
même si la Constitution a prévu les modalité de sa propre
révision, la détermination du peuple béninois à
créer un Etat de droit et de démocratie pluraliste, la sauvegarde
de la sécurité juridique et de la cohésion nationale
commande que toute révision tienne compte des idéaux qui ont
présidé à l'adoption de la Constitution du 11
décembre 1990 et puis le consensus national principe à valeur
constitutionnelle. Qu'en conséquence les articles 1 et 2 de la loi
portant révision de la Constitution n°2006/13 adoptés par
l'Assemblée nationale le 23 juin 2006 sans respecter le principe
constitutionnel à valeur rappelée sont contraires à la
Constitution.... »144(*). En s'érigeant en rempart contre les abus du
phénomène majoritaire et en traçant une ligne rouge de
sauvegarde de la démocratie, le juge donne corps à l'affirmation
du doyen Favoreu : « voilà ce qu'est un juge
constitutionnel : c'est un juge qui peut dire non au Parlement et au
Gouvernement sans craindre d'être
désavoué »145(*). Ce refus du juge à contrôler les lois
portant révisions constitutionnelles est très nuisible à
la construction démocratique du pays. En effet la Constitution est
déstabilisée. C'est surtout la Constitution politique du
Sénégal qui a été et sera victime des
embardées du pouvoir de révision souverain, intimement
liées aux inconstances de la vision institutionnelle du Président
Abdoulaye Wade. La Constitution du 22 janvier 2001 portera ainsi les stigmates
de l'étrange mal constitutionnel diagnostiqué par le professeur
Ismaila Madior Fall dans son ouvrage Evolution constitutionnelle du
Sénégal : «Le Constituant tourne en rond, avec un mouvement
de va-et-vient incessant entre des institutions qu'on instaure, supprime et
restaure, sans que la logique qui sous-tend ce mouvement soit toujours
motivée par des préoccupations de rationalité
démocratique.»146(*)
Par ailleurs en matière électorale on peut
reprocher au Conseil d'avoir dans une certaine mesure sa part de
responsabilité dans le boycott des élections législatives
de 2007 par l'opposition dite significative. En effet les acteurs ne
s'étaient pas entendus sur les règles du jeu politique notamment
sur la question du fichier électoral. En effet comme un retournement de
l'histoire le Conseil avait été saisi lors des élections
législatives de 1998 par l'Alliance « Jef Jel -
U.S.D » Union pour le Renouveau Démocratique, visant à
entendre le Conseil dire si le Ministre de l'intérieur est tenu de
mettre à la disposition de l'O.N.E.L et en définitive des partis
politiques l'intégralité du fichier électoral ou seulement
une partie de ce fichier147(*). Le Conseil refuse d'examiner la demande qui lui est
soumise au motif qu'il s'agit d'une « demande d'avis ». Ce
qui ne rentre pas dans le champ de ses compétences. Pour le professeur
Alioune Sall le Conseil « aurait pu, par exemple dire que
l'examen de la régularité du scrutin s'étend à
l'ensemble du processus électoral, que se prononcer sur la
sincérité d'un scrutin implique un droit de regard sur toutes les
étapes de l'opération électorale. Il aurait pu se poser en
véritable gendarme de l'élection, soucieux de combler toutes les
failles possibles d'un contrôle, et interpréter de manière
finaliste sa mission »148(*). En adoptant une telle attitude le Conseil aurait
par exemple permis d'éviter le boycott des législatives de 2007
par l'opposition qui remettait en doute la fiabilité du
fichier149(*).
Dans la même logique le Conseil aurait même pu
être compétent des litiges qui interviennent dans le
fonctionnement même des partis politique. Comme par exemple dans
l'affaire opposant Landing à Decroix. En effet Landing Savané et
Mamadou Diop Decroix se disputent la direction de And Jëf/Parti africain
pour la démocratie et le socialisme (AJ/PADS) depuis quelques mois. M.
Savané a tenu en décembre dernier au siège du Parti
socialisme (PS) un congrès au cours duquel il a été
réélu secrétaire général de cette formation
politique. Secrétaire général d'AJ/PADS depuis la
création de ce parti, Landing Savané est contesté depuis
la fin d'un autre congrès tenu en juin. Celui-ci avait permis aux
partisans de Mamadou Decroix de faire de leur leader le secrétaire
général d'AJ/PADS créé dans les années 1970.
Malgré tout, M. Savané estime qu'il est le seul leader
d'AJ/PADS, au motif que le congrès organisé par la fraction
rivale n'est pas légitime. Vu l'action supposée partisane du
ministre de l'intérieur150(*), ajouté au fait qu'un recours devant une
juridiction politique comme le Conseil constitutionnel serait sanctionné
par une déclaration d'incompétence de celle-ci. Landing n'avait
d'autres choix que de d'attaquer Decroix devant le tribunal correctionnel de
Dakar a décidé, pour les délits de faux, d'usage de faux
et d'usurpation de titre de secrétaire général d'And
Jëf. La décision rendue par le tribunal est intéressante
à plus d'un titre car révélateur d'un vide juridique
crée par l'attitude du Conseil constitutionnel. En effet Le
président dudit tribunal a rappelé que sa juridiction
`'n'était pas habilitée à trancher sur les questions de
fonds d'un parti politique régulièrement constitué'' et
`'que le ministère de l'Intérieur ne peut ni valider ni invalider
un congrès car ne faisant pas partie de ses attributions''.151(*)
En le Conseil constitutionnel doit par une
interprétation dynamique de ses compétences, saisir toute la
réalité de la politique sénégalaise dans le souci
d'un renforcement et d'une consolidation de la démocratie
sénégalaise.
Chapitre II : L'influence du pouvoir politique sur le
Conseil constitutionnel
Cette partie nous permettra de montrer les rapports
d'influence qui peuvent exister entre le Conseil constitutionnel et le pouvoir
politique. En effet par la détention exclusive du pouvoir de nomination
des membres du Conseil, le pouvoir politique influence tant la composition du
Conseil ainsi que son fonctionnement. On a l'impression que grâce
à son pouvoir de nomination, le pouvoir politique cherche à
orienter la politique jurisprudentiel du Conseil dans un sens bien
déterminé. Nous étudierons dans cette partie l'impact que
peut avoir le mode désignation sur les membres du Conseil ainsi que le
lien entre pouvoir politique et attitude du Conseil.
Section I: L'impact du mode de désignation des juges
constitutionnels
Dans cette partie nous étudierons l'influence que peut
avoir le mode de nomination dans le fonctionnement et la vie du Conseil,
à travers l'autorité nommante. Nous verrons également
à travers le processus de nomination le profil des personnes
nommées.
Paragraphe I : L'autorité nommante
« Une institution, surtout lorsqu'elle se
construit, dépend toujours pour une part, de la personnalité des
hommes qui l'incarnent et la font vivre »152(*). Cette assertion du doyen
Rousseau révèle l'importance accordée à la
politique de nomination par la classe politique qui reste encore à la
recherche d'un mode idéal, non politisé de désignation.
Ils s'agit pour la classe politique de s'assurer de la haute qualité
morale des futurs membres du conseil et surtout de le changement du
système de nomination destiné à garantir leur totale
indépendance et la dignité de leurs fonctions.
En effet, s'il ya parfois quelque doute sur les
préférences politiques des membres
« ordinaires » du conseil constitutionnel, il y en a
toujours eu sur celle de son président. Les présidents de la
République ont à quelques exceptions153(*) prés
désigné à cette fonction des personnalités plus ou
moins politiquement engagées à leurs cotés. C'est ainsi
que beaucoup voit dans les décisions du conseil la manifestation de
préférences politiques ou partisanes.
En effet les personnalités désignées pour
siéger au conseil constitutionnel sont choisies prioritairement dans le
cercle des amis politiques154(*) de l'autorité de nomination. Souvent, elles
sont choisies en relation avec un engagement partisan. Or les procédures
du contrôle de constitutionnalité leur imposent de trancher
à chaud des conflits dans lesquels ont pris positions des formations
auxquelles elles ont appartenu- auxquelles elles peuvent d'ailleurs toujours
appartenir. Il existe donc d'excellentes raisons d'imaginer les membres de
l'institution transportant au conseil des solidarités, des
réflexes qui ne céderont pas facilement, quelque que soit la
bonne volonté des intéresses et malgré le serment
prêté, en investissant leurs nouvelles fonctions,
« de les exercer en toute impartialité ».
D'autant qu'aux solidarités politiques s'additionnent souvent des
relations personnelles - d'allégeance et des amitiés anciennes.
Sans prétendre en aucune manière que les personnalités
nommées se soient comportées en représentants
zélés, on doit souligner que ce risque existe. Le mode de
nomination met à l'abri bien qu'imparfaitement, les membres du conseil
de pressions qui viendraient des pouvoirs publics.
Le président de la République en
procédant discrétionnairement à la nomination des
conseillers constitutionnels va certainement, comme on le disait du
président de la cinquième République française,
exercer « une magistrature d'influence » en
privilégiant ses amis politiques155(*). Cette prérogative est plus ou moins
critiquable en comparaison avec d'autres institutions dans les pays souvent
cités comme modèle de démocratie. On peut citer par
exemple cette observation d'un auteur, caractéristique d'une certaine
démarche doctrinale : « le Président des
Etats-Unis choisit ordinairement les juges de la Cour Suprême au sein de
son propre parti ; l'élection par les chambres de membres du
Tribunal de Karlsruhe est finalement sous la sauvegarde des partis politiques,
sans garantie qu'ils en fassent usage innocent. Même la
désignation d'une partie des membres de la Cour Constitutionnelle
italienne par les magistrats n'échappe pas au phénomène
partisan »156(*)
Cette liberté dans la nomination des membres du conseil
laisse supposer la présence ou l'entrée au conseil de
personnalités choisies sur des critères ouvertement partisans et
possédant souvent une expérience juridique inférieure
à celle des conseillers constitutionnels.
Au Sénégal l'autorité exclusivement
compétente pour nommer les membres de droit du Conseil est et demeure le
Président de la République. En France certains auteurs
considèrent que la nature politique d'une juridiction constitutionnelle
est tributaire de sa composition. Désignés très souvent
par les élus les plus en vue de l'Etat, tous les membres sont des hommes
ou des femmes, des conseillers choisis comme tels, ou à tout le moins,
des amis politiques. D'ailleurs certains professeurs, comme P.Jan et J.P. Roy
sont allés jusqu'à parler de « composition
suspecte »157(*) sous prétexte que « l'article
56 de la constitution donne un pouvoir discrétionnaire au
Président de la République et aux présidents des
assemblées pour désigner les membres nommés du Conseil
constitutionnel, puisqu'il ne définit aucune condition, notamment de
compétence et de qualification juridique. Ils peuvent donc y nommer des
amis politiques, et comme ces trois autorités peuvent appartenir pendant
une longue période à la même famille politique, cela peut
permettre au pouvoir en place de s'assurer une certaine allégeance de la
part du Conseil constitutionnel »158(*)
En toute logique, le mode de désignation et la
composition qui en résulte ne sont pas sans conséquence sur la
production décisionnelle du conseil. En effet ces textes rendus ne
naissent pas par magie. Ils sont le fruit de recherches, de réflexions,
de préférences individuelles et de délibérations
collectives qui conduisent à ces décisions imputées au
conseil constitutionnel. Les institutions n'ont pas d'autre volonté que
celle des individus qui les composent. En effet
« l'interprétation, l'attribution d'un sens n'est jamais
un acte de pure connaissance juridique mais un choix, une décision, qui
engage nécessairement, consciemment ou non, les valeurs et les
préférences de ceux qui
interprètent »159(*). Sans doute, les membres du conseil ne sont jamais
totalement libres de leur interprétation : ils doivent tenir compte
de leurs décisions antérieurs, des analyses de la doctrine, des
réactions de la classe politique, de l'état de l'opinion....mais
ces contraintes sont plus « politiques » que juridiques.
En réalité même si on appliquait le
système français de nomination. Il faut remarquer comme le
souligne à juste titre Rousseau « qu'en France les
autorités nommantes peuvent appartenir, pendant une longue
période à la même famille idéologique ».
Cette remarque est valable pour le Sénégal. A l'heure actuelle
les présidents du Sénat et de l'Assemblée Nationale sont
membres du parti au pouvoir à savoir le Pds.
Dans une démocratie juvénile, dotée de
justice constitutionnelle, peu expérimentée et moins
« prouvée par le temps, avec le mission combien importante que
le Conseil constitutionnel est appelé à accomplir dans son
travail de protection des droits fondamentaux et de régulation de la vie
politique, la désignation exclusive des membres par le chef de l'Etat
est révélateur d'un péril certain. Péril
accentué par une certaine crainte qui se justifie par le fait du
monolithisme politique. Depuis l'accession à la souveraineté
internationale du Sénégal, le parti au pouvoir sous la
bannière du Président de la République qui est la
clé de voute et la plaque tournante du pouvoir exécutif, a
toujours obtenu la majorité au Parlement. Etant donné qu'une loi
ordinaire ou organique, d'origine parlementaire ou gouvernementale, est
susceptible de bafouer un principe constitutionnel, il serait très
préjudiciable qu'elle incorpore le droit positif sous l'action partisane
des juges constitutionnels.
Même s'il est possible de relativiser cette position,
à l'instar du doyen Roussillon, l'idée selon laquelle les
autorités chargées de nommer les membres du Conseil choisissent
des personnes plutôt proches de leurs idées politiques ne favorise
pas systématiquement la politisation de l'institution. Par
conséquent, il est loisible d'admettre que « le fait
d'avoir été nommés majoritairement par des
autorités appartenant à tel ou tel courant politique ne suffit
pas pour en conclure que le Conseil est de cette
tendance »160(*). Ce constat du doyen Roussillon ne dissipe pas les
fortes présomptions de partialité qui pèsent sur la Haute
juridiction. On trouve difficilement de cas ou d'hypothèse où
l'institution constitutionnelle aurait le courage de s'opposer fermement
à la volonté présidentielle au point de
préférer démissionner plutôt que de valider une loi
inconstitutionnelle. L'exemple de la présidente de la Cour
constitutionnelle nigérienne en particulier et des membres de cette
même Cour est salutaire dans la mesure où bien qu'étant
nommée par le Président Tandian, elle n'a pas
hésité à s'opposer à son projet monarchique. Ce
faisant, le fait que des autorités politiques élues choisissent
des amis politiques ne suffit pas pour en conclure que le Conseil est de cette
tendance. En effet en parodiant M.R.Badinter, un bon juge constitutionnel doit
avoir une obligation de fidélité aux citoyens et « un
devoir d'ingratitude » envers ceux qui l'ont nommé.161(*)
Si au Sénégal on redoute la nomination sans
partage du Président de la République, c'est parce qu'il est,
comme le signale le professeur El Hadj Mbodj, une sinon, la
« pièce maitresse du dispositif constitutionnel tant par son
statut que par l'étendue de ses
prérogatives »162(*) la conséquence logique de son élection
au suffrage universel. Il jouit d'une légitimité
démocratique et populaire qui est la conséquence logique de son
élection au suffrage universel direct. Au Sénégal le
Président de la République est à la fois chef de l'Etat et
de l'exécutif. En tant que tel, « il est le gardien de la
constitution.»163(*). L'illustration de cette toute puissance ou
autorité du Président de la République à
l'égard du Conseil164(*) est fournie par la décision du Conseil
constitutionnel du 26 mars 2001 sur l'affaire relative à l'effigie du
Président de la République. Selon le Conseil le
« nom Wade et la photographie du Président de la
République ne doivent pas figurer sur le bulletin de vote de la
coalition Wade ». Cette décision du Conseil a
suscité une désapprobation du Président qu'il n'a pas
manqué de porter par à l'attention du Conseil à partir
d'une lettre. Il s'en est suivi un échange de correspondances.
D'ailleurs Doudou Ndoye dans son ouvrage La Raison, valeur de modernité
pour l'Afrique, qualifie la lettre du Président de la République
de « demande d'explication injonctive faite au Conseil
constitutionnel »165(*)
Ayant analysé le régime juridique du mode de
désignation inhérent aux autorités nommantes, on peut
maintenant étudier le profil de ceux qui composent ou devraient composer
le Conseil constitutionnel
Paragraphe II : Le profil des juges constitutionnels
En effet le serment prêté d'exercer les
fonctions de juges en toute impartialité ne peut empêcher les
effets d'inclinations spontanées, plus dangereuses, puisque, à
supposer qu'ils en aient conscience, les membres du Conseil leur opposeraient
moins de résistance qu'à des pressions
caractérisées.
En outre une longue expérience de la vie politique
montre qu'on introduit au Conseil des gens pour lesquels c'est
généralement le couronnement et souvent la fin de
carrière, « ce sont généralement des
magistrats à la retraite, agés, dociles, liés d'une
quelconque manière au pouvoir. En tout cas ce ne sont pas les meilleurs
qu'on nomme »166(*). Cette façon de procéder peut
figer les attitudes, enfermer les acteurs dans leurs convictions. Le souci de
continuité et de cohérence des choix personnels pèsera
lourd, au détriment de la perspective juridique qui devrait
prévaloir dans leurs nouvelles fonctions. On peut appliquer au juge
constitutionnel sénégalais ce qui pourrait passer pour un aveu
d'un ancien membre du Conseil constitutionnel français, un
« politique » : « c'est un corps
composé de neuf personnes qui ont beaucoup vécu ; ils ne
vont pas faire un lavage de cerveau en arrivant. Ce ne sont pas des voyageurs
sans bagages. On ne va pas se transformer, transformer ses habitudes de
pensée. On vous a fait venir parce que vous avez des bagages, par
conséquent vous n'allez pas prendre une position de voyageur sans bagage
une fois que vous entrez au Conseil constitutionnel »167(*)
L'exercice du contrôle de constitutionnalité par
des personnalités engagées, amenées par
intérêt ou conviction à se comporter en mandataires de ceux
qui les ont désignées, et qui, même animées de la
volonté d'agir en toute impartialité, ne sauraient en arrivant au
Conseil, abandonner le point de vue sur les affaires publiques qui les
inspirait jusque là. Alors « la décision
collégiale serait le terme d'un processus comptable : la somme des
préférences individuelles ».168(*)
Dans cette partie on se proposera d'étudier le profil
des présidents qui ont eu à diriger la haute juridiction de
certains vices président et des professeurs d'universités.
L'explication du choix des deux premiers réside dans l'importance de
leur prérogative et de leur influence dans le fonctionnement de
l'institution. L'option pour les universitaires est à chercher dans
l'influence qu'ils peuvent avoir dans l'orientation de la jurisprudence du
Conseil. En effet aux termes de la loi organique 92-23 du 30 mai 1992 sur le
Conseil constitutionnel modifié par la loi 99-71 du 17 février
1999, le président du Conseil détient d'importantes attributions,
il est chargé de l'administration du Conseil169(*). Il supervise le
secrétariat qui est le centre nerveux, intellectuel, juridique et
politique du Conseil et désigne le conseiller rapporteur, qui joue un
rôle important dans l'orientation de la décision170(*). Il est à la
tête du Conseil qui établit son règlement
intérieur171(*),
dirige les débats et a voix prépondérante en cas de
partage172(*).
Avec l'existence du poste de vice président173(*) le constituant
sénégalais a choisi de se démarquer du modèle
français. Ainsi en cas d'empêchement, le Conseil ne se
réunit pas sur convocation de son doyen d'âge comme en France.
L'article 22-1 de la loi organique 92-23 dispose que « si l'un des
membres du Conseil est temporairement empêché, est le
président, le vice président assure son
intérim »
Les quatre présidents qui ont eu à occuper les
postes de président du Conseil à l'exception du président
Kéba Mbaye ont tous vu leur nomination critiquée soit par la
presse soit par les partis politiques en raison de leur appartenance ou de leur
proximité par rapport au parti au pouvoir.
Il faut dire que le profil des juges constitutionnels a
à certains égards provoquer la méfiance ou susciter la
confiance des leaders politiques en l'institution qu'est le Conseil
constitutionnel. C'est ainsi que la nomination de Keba Mbaye à la
présidence du Conseil à contribuer à l'acception de
l'institution ou sa reconnaissance par les leaders politiques. En effet Keba
Mbaye à présidé aux destinées de la défunte
Cour Suprême avant de se retrouver à la Cour Internationale de
justice de la Haye au Pays-Bas, Keba Mbaye est un homme salué par
l'ensemble de la classe politique pour son intégrité et son
indépendance. Il affirmait au lendemain de sa nomination le 17 juin 1992
à la tête du Conseil constitutionnel « le
président de la République me connaît très bien.
Nous avons depuis longtemps des rapports personnels. Je dirais même que
nous avons des liens d'amitiés. Mais il sait très bien que je
préfère ma réputation de juge à son confort
à lui comme président de la
République »174(*) Ces propos ont par delà du parcours et du
prestige de l'homme contribué à rassurer l'ensemble de la classe
politique. Cependant peu de temps après sa nomination le
président Kéba Mbaye démissionnera de son poste de
président du Conseil.
Quant au président Youssoupha Ndiaye jusqu'avant sa
nomination à la présidence du Conseil, il était le
président de la Cour de Cassation. Il arrive à la tête de
cet organe juridictionnel à un moment particulièrement difficile.
A l'instar de son prédécesseur, il occupera les fonctions les
plus prestigieuses de notre système judiciaire : président
du tribunal de première instance de Dakar, conseiller secrétaire
général de la Cour Suprême, premier président de la
cour d'Appel, président de la Cour de cassation. Youssoupha Ndiaye dont
la science juridique n'est contestée par personne est
présenté dans certain milieu comme proche du pouvoir175(*). Il détient le record
de longévité à ce poste jusqu'à ce jour. Deux ans
après la survenance de l'alternance politique, il démissionnera
de son poste pour occuper la fonction de ministre plus prestigieuse.176(*)
Enfin le dernier président nommé et qui
préside actuellement l'institution est Mireille Ndiaye. Sa nomination a
été fortement critiquée par la presse qui voit en sa
nomination comme une simple promotion voire une récompense de la part du
président de la République. En effet Mireille Ndiaye serait
l'épouse d'un ancien proche du président Wade et numéro 2
du Pds dans les années 80. De sérieux soupçons de
partialité pèsent sur elle.
En ce qui concerne les vices présidents, d'abord le
premier vice président à savoir maitre Babacar Seye, la presse le
décrit comme une personne ne présentant aucune
ambiguïté dans son profil. Militant du parti socialiste, maitre
Seye à été député-maire de Saint Louis et
figure de proue de la politique. Selon Abdou Latif Coulibaly « il
a un long passé de militantisme dans le PS »177(*). Lors des élections
présidentielles de 1993, à la veille de la proclamation des
résultats, il a été assassiné. Ce qui à
provoquer l'arrestation de quelques leaders politiques de l'opposition dont le
plus charismatique et le plus populaire de l'époque à savoir
l'actuel président de la République maitre Abdoulaye Wade.
Il faut noter que ces dernières années le poste
de vice président est confié au professeur de droit. Il ya eu
d'abord la nomination du professeur agrégé de droit public en la
personne de Babacar kanté. Ensuite celle récente du professeur
Isaac Yankhoba Ndiaye en remplacement au professeur Kanté. La nomination
d'Isaac Yankhoba Ndiaye n'a pas échappé à la critique de
la doctrine et de certains ses collègues professeurs. D'abord parce
qu'il est un professeur au surplus agrégé de droit privé.
Or on considère que le droit constitutionnel ne peut s'épanouir
qu'en présence des spécialistes du droit
constitutionnel178(*).
Ensuite la doctrine juridique considère que « le conseil a
pour rôle principal d'interpréter la constitution, ce qui exige de
ses membres des connaissances techniques approfondies179(*) ». Et
J.Robert résume bien cette idée : « il
faudrait, bien sur, qu'ils aient tous une compétence juridique leur
permettant d'apprécier et d'assimiler rapidement les problèmes
juridiques, qu'ils soient dégagés de toute appartenance politique
partisane et qu'ils ne soient peut-etre pas tous très
agés »180(*)
En réalité l'impact du mode de
désignation sur les membres du Conseil et le profil des conseillers
constitutionnels expliquent dans une certaine mesure le comportement du Conseil
dans la vie politique et révèle les liens étroits qui
peuvent exister entre le pouvoir politique et le comportement du Conseil. En
effet le pouvoir politique influence la jurisprudence du Conseil. Ce dernier
est très permissif par rapport au pouvoir.
Section II : Le lien entre l'hypertrophie du pouvoir
politique et la position de faiblesse du Conseil et ses conséquences sur
la vie politique
Dans cette partie nous montrerons que la stabilité ou
l'instabilité constitutionnelle est dans une certaine mesure la
conséquence de l'attitude du conseil dans la vie politique. En effet en
prenant une position déterminée par rapport à sa mission,
le Conseil est facteur d'équilibre ou de déséquilibre du
régime politique.
Paragraphe I : Une instabilité constitutionnelle
établie
Une relation de cause à effet se dessine non seulement
entre la jurisprudence répétitive des déclarations
d'incompétence mais également les déclarations
systématiques de conformité du conseil constitutionnel et
l'instabilité constitutionnelle connue au Sénégal et qui a
pris une proportion manifestement importante depuis quelques années.
L'instabilité constitutionnelle constatée en
régime politique sénégalais trouve sa source dans
l'initiative de révision reconnue constitutionnellement à
l'exécutif181(*).
Il importe de noter à cet égard l'absence de retenue du pouvoir
exécutif dans l'exercice de cette attribution constitutionnelle souvent
maladroitement motivée. Ce phénomène de révision
intempestive s'explique par la quasi absence de mécanismes
opérants susceptible de poser des limites ou des arguments de
résistance à cet appétit exagéré du pouvoir
exécutif à apporter de multiple retouche à la
constitution182(*).
En effet cette instabilité constitutionnelle est
doublement justifiée.
Il ya d'un coté, la carence du Conseil constitutionnel
symbolisée par le silence né des déclarations
répétitives d'incompétence profite au pouvoir
exécutif. Il en est ainsi de la jurisprudence invariable du Conseil
constitutionnel qui affranchit de tout contrôle les lois portant
révision de la constitution symbolisée par cette clause de
style « Le Conseil constitutionnel ne tient ni de la
Constitution ni de la loi organique ni d'aucune autre disposition de la
constitution le pouvoir de statuer sur une révision de la
Constitution »183(*). Cette orientation du Conseil constitutionnel
sénégalais semble inspirer de la jurisprudence postérieure
française, qui dans la décision n° 469 D.C, affirme
« Le Conseil constitutionnel ne tient ni de l'article 61, ni de
l'article 89, ni d'aucune autre disposition de la Constitution le pouvoir de
statuer sur une révision constitutionnelle »184(*). Dans cette décision
le juge constitutionnel français s'est refusé à examiner
le fond de l'affaire en interprétant restrictivement ses
compétences à l'image du Conseil constitutionnel
sénégalais.
Ces considérations font que le pouvoir exécutif
ne se « sent plus tenu » donne libre cours à ce
profond désir d'un exécutif toujours prompt à se donner
les moyens d'une puissance inégalée dans le système
politique. C'est alors le recours aux révisions
constitutionnelles185(*)
pour assouvir ses desseins en s'auto octroyant les moyens nécessaires
à la mesure de ses ambitions hégémoniques. Cela se traduit
par la domestication du parlement et la marginalisation du juge constitutionnel
plutôt timoré. D'ailleurs ce phénomène explique le
caractère présidentialiste du modèle
sénégalais.186(*) Autrement dit, la carence de l'autre favorise le
pouvoir exécutif d'où la corrélation jurisprudence
répétitive d'incompétence et révision
répétitive de la constitution entrainant une instabilité
constitutionnelle en phase de devenir structurelle.
A cet égard dans la décision n°
3 /C / 2005, le conseil constitutionnel a fait une méprise sur
les différentes de la procédure d'adoption sur le couplage des
élections. En effet, le Conseil constitutionnel estime
que « dans le cas de révision de la constitution par la
seule assemblée nationale, le vote à la majorité
qualifiée des trois cinquièmes réalise à la fois
l'adoption et l'approbation au mépris des trois phases
identifiées par l'article 103 de la constitution. Ces circonstances
libèrent généralement le pouvoir exécutif de toute
pression. C'est alors, le libre recours à l'exercice favori du pouvoir
exécutif : la quête de moyens nécessaire à
l'affirmation de sa toute puissance. A un niveau non formel, la jurisprudence
répétitive des déclarations d'incompétence confirme
et alimente à certains égards le déséquilibre parti
dominant, parti d'opposition. Ce déséquilibre se manifeste par le
fait que la majorité électorale qui se retrouve au niveau de
l'exécutif s'appuie sur une majorité partisane à
l'assemblée Nationale pour couronner au plan législatif ses
ambitions. Cette entreprise peut souvent se heurter à la
résistance d'une opposition minoritairement représenté
à l'Assemblée Nationale. Elle a des moyens légaux
d'opposition et de contestation, il en est ainsi de la technique de
contrôle de la constitutionnalité des lois. Cette
résistance est souvent inopérante dés lors que l'essentiel
des recours de l'opposition débouche sur des constats
d'incompétence fait par le Conseil constitutionnel. Ce qui constitue un
moyen de démobilisation judiciaire pour l'opposition souvent convaincue
de l'inutilité du recours au Conseil constitutionnel. Alors se fraie une
forte inclination à l'expression d'une autre nature des demandes
politiques.
Il s'y ajoute d'un autre coté la promptitude du Conseil
à s'aligner presque toujours sur les positions du pouvoir
exécutif. L'affaire Macky Sall illustre parfaitement cet état de
fait. En effet le Conseil constitutionnel y est allé de sa
« sagesse légendaire » consistant à se
conformer à la volonté du président de la
République. Comme une coutume, en ces huit ans d'alternance. Il a
déclaré, à l'issue de sa séance du 30 octobre 2008,
que l'Article 15 est conforme à la Constitution, permettant ainsi au
président de la République de promulguer cette loi de toutes les
controverses. Désormais, aux termes de l'Article 1er du décret de
promulgation : « Le président de l'Assemblée
nationale et les autres membres du Bureau sont élus pour une
durée d'un an. » « Les membres du Bureau sont
rééligibles et les mandats du président de
l'Assemblée nationale, ainsi que celui des autres membres du Bureau sont
renouvelés à la première séance de la session
ordinaire. » « L'Assemblée nationale peut,
toutefois, mettre fin aux fonctions du président ou d'un membre du
Bureau par l'adoption d'une résolution à la majorité
absolue. Un minimum de trente huit (38) députés doit, cependant,
présenter cette résolution. ». De l'avis de
l'éminent professeur Mbodj il s'agit « d'une manipulation du
Droit et de la Constitution pour un règlement de comptes ; ce qui
n'agrandit pas du tout notre démocratie »187(*). La Constitution a
été violée manifestement. Ils ont violé
manifestement l'Etat du Droit existant. Là, il ne faudrait pas qu'il
profite de leurs propres turpitudes pour régler ces
comptes-là.
L'Etat de droit recule du fait du déséquilibre
global du régime politique sénégalais. Ce
déséquilibre profite immanquablement à l'exécutif.
Paragraphe II: La contribution juridictionnelle au
déséquilibre institutionnel
Par contribution juridictionnelle il faut entendre l'apport du
Conseil constitutionnel au maintien et à l'entretien d'un régime
politiquement déséquilibré. Cette contribution ou cet
apport se manifeste à partir du silence du Conseil constitutionnel
né des déclarations répétitives
d'incompétence mais également la propension du Conseil à
faire systématiquement des déclarations de conformité sur
tous les projets ou propositions de loi.
Les déclarations d'incompétence traduisent
incontestablement un silence qui est en réalité une abstention
sur les préoccupations qui seraient de nature à modifier dans un
sens ou dans l'autre l'ordre juridique et politique. Ces déclarations
d'incompétence vont dans le sens d'un exercice de routine
déroulant un silence complice sur un partage déjà
léonin des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif.
C'est pourquoi celles-ci constituent un apport du Conseil constitutionnel dans
la consolidation d'un ordre juridique inégalitaire. L'illustration est
donnée par les tentatives de domestication du Conseil
constitutionnel188(*).
Cette jurisprudence participe d'une idée de conservation d'un ordre
juridique et politique dont le plus grand bénéficiaire est le
pouvoir exécutif.
Par ailleurs il faut signaler également que les
déclarations aussi répétitives de conformité de la
part du Conseil constitutionnel dans la quasi-totalité des cas de
contestation, dénote des relents de parti pris ou de peur189(*) de l'institution toute
puissante que représente le président de la République.
L'attitude du Conseil fait que tous les projets de lois et même les
propositions de loi épousent immanquablement les caprices du Prince
grâce à la double complicité d'abord le soutien
inconditionnel du PDS, parti ultra majoritaire au parlement, ensuite de
l'attitude passive, déroutante et inopportune du conseil au regard de
l'Etat de droit et de la démocratie. En effet, eu égard à
la nature du régime politique sénégalais, le
président de la République est le principal
bénéficiaire des déclarations répétitives de
conformité et même d'incompétence. Ces pouvoirs se trouvent
hypertrophiés. A certains égards l'exécutif se
ramène à lui. Il en est ainsi de l'expérience du
régime présidentiel. Elu au suffrage universel, il dispose d'une
légitimité initiale. Il s'y ajoute que le président de la
République dispose de pouvoirs qui n'ont jamais variés compte
tenu des vicissitudes constitutionnelles. Il s'agit par exemple de la
nomination du premier ministre et des membres du gouvernement, du droit de
dissolution de l'Assemblée Nationale. La liste est loin d'être
exhaustive. Le schéma décrit conforte l'idée selon
laquelle, la réalité de l'exécutif est incarnée par
le président de la République. Alors se dessine un état
des lieux amplement favorable à l'exécutif et qui
révèle prééminence quasi-congénitale de ce
dernier, incarné par le président de la République. En
réalité la distribution du pouvoir obéit à un
partage léonin entre l'exécutif et le législatif. Alors le
principal bénéficiaire est le pouvoir exécutif. Le
président de la République est déjà la clef de
voute des institutions. A ce titre d'illustration, il est le principal
bénéficiaire des mécanismes de cantonnement
matériel et politique du parlement qu'il est convenu d'appeler les
techniques de régime parlementaire rationalisé (question de
confiance, la réglementation de la motion de censure, le droit de
dissolution du président de la République). Outre du renforcement
des pouvoirs de l'exécutif, il s'y ajoute un phénomène
déterminant qui est relatif à la stabilité de
l'exécutif.
Schématiquement le pouvoir exécutif devient fort
et stable. Il fait face alors à un pouvoir législatif de plus en
plus faible cantonné dans un domaine perméable aux interventions
intempestives du pouvoir exécutif. Il en est ainsi du rôle
prépondérant de l'exécutif dans la procédure
législative. C'est l'exemple de l'ordre du jour prioritairement
fixé par le gouvernement, le vote bloqué et les
différentes restrictions à l'initiative des
députés. Il en est ainsi de la limitation du droit d'amendement
des députés à laquelle souscrit avec démesure le
Conseil constitutionnel.
En définitive on peut dire que la présence du
conseil dans la vie politique est évanescente, par un effet pervers
préjudiciable à la démocratie. En effet l'absence ou le
silence du Conseil et sa permissivité sont totalement inopportune car
affectant profondément la démocratie
Section II : Le lien entre l'hypertrophie du
pouvoir politique et la position de faiblesse du Conseil constitutionnel et ses
consequences dans la vie politique.
Tout laisse croire qu'au-delà du déficit de
compétence souvent évoqué, le Conseil est victime du mode
de nomination de ses membres. Autrement dit l'autorités nommante a
tendances à privilégier ses amis politiques. Ce devoir de
reconnaissance des membres à l'égard de l'autorité
nommante explique dans une certaine mesure au-delà des
compétences statiquement énumérées, cette
propension du Conseil a toujours se déclarer incompétent ou
à toujours donner des brevets de conformité. Ce qui instaure une
véritable instabilité constitutionnelle et un
déséquilibre institutionnel au profit de l'exécutif
Paragraphe I: Une instabilité constitutionnelle
établie
Une relation de cause à effet se dessine non seulement
entre la jurisprudence répétitive des déclarations
d'incompétence mais également les déclarations
systématiques ou répétitives de conformité du
conseil constitutionnel et l'instabilité constitutionnelle connue au
Sénégal et qui a pris une proportion manifestement importante
depuis quelques années.
L'instabilité constitutionnelle constatée en
régime politique sénégalais trouve sa source dans
l'initiative de révision reconnue constitutionnellement à
l'exécutif190(*).
Il importe de noter à cet égard l'absence de retenue du pouvoir
exécutif dans l'exercice de cette attribution constitutionnelle souvent
maladroitement motivée. Ce phénomène de révision
intempestive s'explique par la quasi absence de mécanismes
opérants susceptible de poser des limites ou des arguments de
résistance à cet appétit exagéré du pouvoir
exécutif à apporter de multiple retouche à la
constitution191(*).
En effet cette instabilité constitutionnelle est
doublement justifiée.
Il ya d'un coté, la carence du Conseil constitutionnel
symbolisée par le silence né des déclarations
répétitives d'incompétence profite au pouvoir
exécutif. Il en est ainsi de la jurisprudence invariable du Conseil
constitutionnel qui affranchit de tout contrôle les lois portant
révision de la constitution symbolisée par cette clause de
style « Le Conseil constitutionnel ne tient ni de la
Constitution ni de la loi organique ni d'aucune autre disposition de la
constitution le pouvoir de statuer sur une révision de la
Constitution »192(*). Cette orientation du Conseil constitutionnel
sénégalais semble inspirer de la jurisprudence postérieure
française, qui dans la décision n° 469 D.C, affirme
« Le Conseil constitutionnel ne tient ni de l'article 61, ni de
l'article 89, ni d'aucune autre disposition de la Constitution le pouvoir de
statuer sur une révision constitutionnelle »193(*). Dans cette décision
le juge constitutionnel français s'est refusé à examiner
le fond de l'affaire en interprétant restrictivement ses
compétences à l'image du Conseil constitutionnel
sénégalais.
Ces considérations font que le pouvoir exécutif
ne se « sent plus tenu » donne libre cours à ce
profond désir d'un exécutif toujours prompt à se donner
les moyens d'une puissance inégalée dans le système
politique. C'est alors le recours aux révisions
constitutionnelles194(*)
pour assouvir ses desseins en s'auto octroyant les moyens nécessaires
à la mesure de ses ambitions hégémoniques. Cela se traduit
par la domestication du parlement et la marginalisation du juge constitutionnel
plutôt timoré. D'ailleurs ce phénomène explique le
caractère présidentialiste du modèle
sénégalais.195(*) Autrement dit, la carence de l'autre favorise le
pouvoir exécutif d'où la corrélation jurisprudence
répétitive d'incompétence et révision
répétitive de la constitution entrainant une instabilité
constitutionnelle en phase de devenir structurelle.
A cet égard dans la décision n°
3 /C / 2005, le conseil constitutionnel a fait une méprise sur
les différentes de la procédure d'adoption sur le couplage des
élections. En effet, le Conseil constitutionnel estime
que « dans le cas de révision de la constitution par la
seule assemblée nationale, le vote à la majorité
qualifiée des trois cinquièmes réalise à la fois
l'adoption et l'approbation au mépris des trois phases
identifiées par l'article 103 de la constitution. Ces circonstances
libèrent généralement le pouvoir exécutif de toute
pression. C'est alors, le libre recours à l'exercice favori du pouvoir
exécutif : la quête de moyens nécessaire à
l'affirmation de sa toute puissance. A un niveau non formel, la jurisprudence
répétitive des déclarations d'incompétence confirme
et alimente à certains égards le déséquilibre parti
dominant, parti d'opposition. Ce déséquilibre se manifeste par le
fait que la majorité électorale qui se retrouve au niveau de
l'exécutif s'appuie sur une majorité partisane à
l'assemblée Nationale pour couronner au plan législatif ses
ambitions. Cette entreprise peut souvent se heurter à la
résistance d'une opposition minoritairement représenté
à l'Assemblée Nationale. Elle a des moyens légaux
d'opposition et de contestation, il en est ainsi de la technique de
contrôle de la constitutionnalité des lois. Cette
résistance est souvent inopérante dés lors que l'essentiel
des recours de l'opposition débouche sur des constats
d'incompétence fait par le Conseil constitutionnel. Ce qui constitue un
moyen de démobilisation judiciaire pour l'opposition souvent convaincue
de l'inutilité du recours au Conseil constitutionnel. Alors se fraie une
forte inclination à l'expression d'une autre nature des demandes
politiques.
Il s'y ajoute d'un autre coté la promptitude du Conseil
à s'aligner presque toujours sur les positions du pouvoir
exécutif. L'affaire Macky Sall illustre parfaitement cet état de
fait. En effet le Conseil constitutionnel y est allé de sa
« sagesse légendaire » consistant à se
conformer à la volonté du président de la
République. Comme une coutume, en ces huit ans d'alternance. Il a
déclaré, à l'issue de sa séance du 30 octobre 2008,
que l'Article 15 est conforme à la Constitution, permettant ainsi au
président de la République de promulguer cette loi de toutes les
controverses. Désormais, aux termes de l'Article 1er du décret de
promulgation : « Le président de l'Assemblée
nationale et les autres membres du Bureau sont élus pour une
durée d'un an. » « Les membres du Bureau sont
rééligibles et les mandats du président de
l'Assemblée nationale, ainsi que celui des autres membres du Bureau sont
renouvelés à la première séance de la session
ordinaire. » « L'Assemblée nationale peut,
toutefois, mettre fin aux fonctions du président ou d'un membre du
Bureau par l'adoption d'une résolution à la majorité
absolue. Un minimum de trente huit (38) députés doit, cependant,
présenter cette résolution. ». De l'avis de
l'éminent professeur Mbodj il s'agit « d'une manipulation du
Droit et de la Constitution pour un règlement de comptes ; ce qui
n'agrandit pas du tout notre démocratie »196(*). La Constitution a
été violée manifestement. Ils ont violé
manifestement l'Etat du Droit existant. Là, il ne faudrait pas qu'il
profite de leurs propres turpitudes pour régler ces
comptes-là.
L'Etat de droit recule du fait du déséquilibre
global du régime politique sénégalais. Ce
déséquilibre profite immanquablement à l'exécutif.
Paragraphe II: La contribution juridictionnelle au
déséquilibre institutionnel
Par contribution juridictionnelle il faut entendre l'apport du
Conseil constitutionnel au maintien et à l'entretien d'un régime
politiquement déséquilibré. Cette contribution ou cet
apport se manifeste à partir du silence du Conseil constitutionnel
né des déclarations répétitives
d'incompétence mais également la propension du Conseil à
faire systématiquement des déclarations de conformité sur
tous les projets ou propositions de loi.
Les déclarations d'incompétence traduisent
incontestablement un silence qui est en réalité une abstention
sur les préoccupations qui seraient de nature à modifier dans un
sens ou dans l'autre l'ordre juridique et politique. Ces déclarations
d'incompétence vont dans le sens d'un exercice de routine
déroulant un silence complice sur un partage déjà
léonin des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif.
C'est pourquoi celles-ci constituent un apport du Conseil constitutionnel dans
la consolidation d'un ordre juridique inégalitaire. L'illustration est
donnée par les tentatives de domestication du Conseil
constitutionnel197(*).
Cette jurisprudence participe d'une idée de conservation d'un ordre
juridique et politique dont le plus grand bénéficiaire est le
pouvoir exécutif.
Par ailleurs il faut signaler également que les
déclarations aussi répétitives de conformité de la
part du Conseil constitutionnel dans la quasi-totalité des cas de
contestation, dénote des relents de parti pris ou de peur198(*) de l'institution toute
puissante que représente le président de la République.
L'attitude du Conseil fait que tous les projets de lois et même les
propositions de loi épousent immanquablement les caprices du Prince
grâce à la double complicité d'abord le soutien
inconditionnel du PDS, parti ultra majoritaire au parlement, ensuite de
l'attitude passive, déroutante et inopportune du conseil au regard de
l'Etat de droit et de la démocratie. En effet, eu égard à
la nature du régime politique sénégalais, le
président de la République est le principal
bénéficiaire des déclarations répétitives de
conformité et même d'incompétence. Ces pouvoirs se trouvent
hypertrophiés. A certains égards l'exécutif se
ramène à lui. Il en est ainsi de l'expérience du
régime présidentiel. Elu au suffrage universel, il dispose d'une
légitimité initiale. Il s'y ajoute que le président de la
République dispose de pouvoirs qui n'ont jamais variés compte
tenu des vicissitudes constitutionnelles. Il s'agit par exemple de la
nomination du premier ministre et des membres du gouvernement, du droit de
dissolution de l'Assemblée Nationale. La liste est loin d'être
exhaustive. Le schéma décrit conforte l'idée selon
laquelle, la réalité de l'exécutif est incarnée par
le président de la République. Alors se dessine un état
des lieux amplement favorable à l'exécutif et qui
révèle prééminence quasi-congénitale de ce
dernier, incarné par le président de la République. En
réalité la distribution du pouvoir obéit à un
partage léonin entre l'exécutif et le législatif. Alors le
principal bénéficiaire est le pouvoir exécutif. Le
président de la République est déjà la clef de
voute des institutions. A ce titre d'illustration, il est le principal
bénéficiaire des mécanismes de cantonnement
matériel et politique du parlement qu'il est convenu d'appeler les
techniques de régime parlementaire rationalisé (question de
confiance, la réglementation de la motion de censure, le droit de
dissolution du président de la République). Outre le renforcement
des pouvoirs de l'exécutif, il s'y ajoute un phénomène
déterminant qui est relatif à la stabilité de
l'exécutif.
Schématiquement le pouvoir exécutif devient fort
et stable. Il fait face alors à un pouvoir législatif de plus en
plus faible cantonné dans un domaine perméable aux interventions
intempestives du pouvoir exécutif. Il en est ainsi du rôle
prépondérant de l'exécutif dans la procédure
législative. C'est l'exemple de l'ordre du jour prioritairement
fixé par le gouvernement, le vote bloqué et les
différentes restrictions à l'initiative des
députés. Il en est ainsi de la limitation du droit d'amendement
des députés à laquelle souscrit avec démesure le
Conseil constitutionnel.
En définitive on peut dire que la présence du
conseil dans la vie politique est évanescente, pour ne pas dire nocive
pour la démocratie. En effet l'absence ou le silence du conseil et sa
permissivité sont totalement inopportune car affectant
profondément la démocratie
Conclusion
Le Conseil constitutionnel sénégalais existe depuis
une quinzaine d'année. C'est beaucoup et c'est peu199(*). Cependant certains juristes
orthodoxes n'hésitent pas à défendre l'attitude actuelle
du Conseil constitutionnel dans la vie politique. Pour eux, bien
qu'étant le régulateur de l'activité des pouvoirs publics,
au sens de gardien de la Constitution, le Conseil constitutionnel n'est pas une
Cour Suprême chargée de réguler le jeu politique200(*). Cette vision est
très contestable dans la mesure où le Conseil est une institution
éminemment politique au point que pendant longtemps certains juristes
lui ont refusé l'appellation « juridiction ».
En effet la position actuelle du Conseil dans la vie politique
laisse une grande part d'insatisfaction et de « vide
juridique », que tentent souvent de couvrir, d'ailleurs de
façon laconique, l'argument du défaut de compétence. Il
faut le reconnaitre que le Conseil ne saisit qu'une faible part, voire
inexistante de la vie politique.
Dans le souci de fermer la polémique relative à
l'accroissement des compétences du Conseil ou de l'interprétation
qu'il en fait, il urge de transformer le Conseil constitutionnel en une Cour
constitutionnelle. Celle-ci à l'instar de la Cour constitutionnelle
béninoise aura la plénitude de ses compétences et statuera
en toutes circonstances. Le juge constitutionnel est celui par lequel passe la
critique de la raison instrumental. Si en effet l'exigence démocratique
consiste à confronter sans cesse les actes du pouvoir aux valeurs
auxquelles la société s'identifie, il s'ensuit naturellement dans
l'ordre constitutionnel la montée en puissance de l'institution qui
assure cette évaluation, ce contrôle des actes. Le juge devient
ainsi celui à qui est demandé d'exercer la fonction critique,
celui qui oblige les acteurs sociaux et politiques à s'interroger sur la
validité de leurs actes.
A défaut de pouvoir instaurer une Cour constitutionnelle,
il faudra amener le Conseil à intérioriser sa fonction nouvelle,
à savoir que dans la démocratie constitutionnelle, le Conseil est
destiné à être à la fois la barrière des
extravagances du politique et la sauvegarde du peuple. Sauvegarde en tant qu'il
garantit les droits des individus visés par la norme fondamentale et
barrière en tant que, sur le plan politique, il équilibre la
puissance de la majorité. Comme pour résumer cette nouvelle
conception du Conseil constitutionnel, Dominique Rousseau prétend :
« aux gouvernants, les organes exécutifs et
parlementaires ; aux citoyens, le Conseil
constitutionnel »201(*)
En définitive le Conseil sera « une
juridiction au service du droit »202(*)
Table des matières
INTRODUCTION
1
DEFINITIONS DES TERMES DU SUJET
1
DELIMITATION DU SUJET
5
PROBLEMATIQUE
6
INTERET DU SUJET
6
METHODOLOGIE
6
ANNONCE ET JUSTIFICATION DU PLAN
7
PREMIERE PARTIE : La mission du conseil
constitutionnel de régulation de la vie politique
8
CHAPITRE I : Les cadres de la mission
de régulation
9
Section I : la régulation de
l'activité électorale par le Conseil
9
Paragraphe I : La problématique
de la régulation de l'élection présidentielle
10
Paragraphe II : La régulation
des élections législatives
14
Section II : la régulation de
l'activité institutionnelle
15
Paragraphe I : L'état descriptif et
analytique de la régulation institutionnelle
15
Paragraphe II : L'opportunité des
décisions du conseil
18
CHAPITRE II : LE CONSEIL
CONSTITUTIONNEL DANS LA STRATEGIE DE LUTTE DES PARTIS POLITIQUES ET SON
APPRECIATION DANS LA VIE POLITIQUE
20
Section I: Le Conseil dans la
stratégie de lutte des partis politiques
20
Paragraphe I : Un Conseil formellement
ménagé par la classe politique.
20
Paragraphe II : le Conseil
constitutionnel : une arme politique
23
Section II : l'appréciation du
Conseil dans la vie politique
26
Paragraphe I : Le regard de la presse et de
l'opinion publique
26
Paragraphe II : Le conseil constitutionnel
apprécié par rapport à son degré
d'indépendance du pouvoir politique.
28
Deuxième partie : l'analyse de
l'attitude du conseil dans la vie politique.
31
Chapitre I : La prudence
excessive : raison des manquements du conseil dans la vie politique
31
Section I : L'explication de cette posture du
Conseil
31
Paragraphe I : le poids de l'heritage de la
5ème République française
31
Paragraphe II : Un souci de
légitimité
34
Section II: Les absences marquées du Conseil
dans la vie politiques
36
Paragraphe I : Une protection imparfaite des
droits fondamentaux
36
Paragraphe II : Le manque d'approfondissement
de la démocratie
40
Chapitre II : L'influence du pouvoir politique
sur le Conseil constitutionnel
43
Section I: L'impact du mode de désignation
des juges constitutionnels
43
Paragraphe I : L'autorité nommante
43
Paragraphe II : Le profil des juges
constitutionnels
46
Section II : Le lien entre l'hypertrophie du
pouvoir politique et la position de faiblesse du Conseil et ses
conséquences sur la vie politique
49
Paragraphe I : Une instabilité
constitutionnelle établie
49
Paragraphe II: La contribution juridictionnelle au
déséquilibre institutionnel
52
Paragraphe I: Une instabilité
constitutionnelle établie
54
Paragraphe II: La contribution juridictionnelle au
déséquilibre institutionnel
56
* 1 Du nom du premier
président du conseil constitutionnel sénégalais
* 2 Ismaila Madior Fall,
Evolution constitutionnelle du Sénégal, Crédila, 2007,
Dakar, p.240
* 3 Loi organique n°92-23
du 30 mai 1992 sur le conseil constitutionnel, J.O.n°5469 du
1er juin 1992
Toutefois la création du conseil constitutionnel a
été précédée d'une révision
constitutionnelle pour intégrer dans le dispositif institutionnel les
trois juridictions nées de l'éclatement de la Cour Supreme. Il
s'agit du Conseil Constitutionnel, du Conseil d'Etat et de la Cour
Cassation.
* 4 Mouhamadou Mounirou Sy, La
Protection Constitutionnel des Droits Fondamentaux en Afrique : l'exemple
du Sénégal, Edition Harmattan 2007, p. 50
* 5 Commentaires du journal
Sudhebdo, jeudi 14 Mai 1992, p.8
* 6 Voir les commentaires des
leaders politiques dans les colonnes de Sudhebdo du 15 mai 1992. p 6
D'ailleurs à la veille de la proclamation des
résultats des élections présidentielles,
intérrogé sur la réforme judiciaire, le candidat wade chef
de file de l'opposition sénégalaise, s'est posé la
question de savoir si elle « ne répondait pas à
l'idée de mettre en place des gens aux ordres » in sud Hebdo
du 03 mars 1993.
* 7 Maitre Alioune Badara
Sène batonnier de l'ordre des avocats ne cache pas sa
déception : la démocratie élémentaire aurait
voulu qu'on consulte certains cercles intéressés au
premièr plan par cette réforme, comme les magistrats et les
avocats. Voir Sudhebdo 15 mai 1992, p.6
* 8 Du point de vue d'une partie
de la presse, la réforme telle qu'elle est adoptée par le conseil
des Ministre du mardi 12 mai 1992 serait l'aboutissement d'un scénario
en plusieurs actes qui ont précipité la crise qui
gangrénait le système judiciaire. Premier acte :
l'arrivée à la tete de la Cour Supreme de magistrats
considérés par certains comme « tetes de
turc », credités d'une certaine indépendance d'esprit
et d'une intégrité réfractaire à toutes sortes de
pression. C'est d'ailleurs pour certains ce qui explique la friction entre la
Cour Supreme et le ministère de la justice. En effet lors de la
rentrée des cours et des tribunaux, le nouveau président de la
Cour Supreme avait laissé entendre qu'il fallait supprimer le
ministère de la justice pour que la magistrature soit libre et
indépendante. L'atmosphère ne fera que se dégrader entre
l'executif et une partie des magistrats. Deuxieme acte : le code
électoral, en effet sous la pression des partis d'opposition, la
commission de réforme et le chef de l'Etat avaient accepté que le
texte consensuel issu des travaux ne soit pas modifié mais adopté
tel quel par l'assemblée nationale. Ce qui fut fait, mais
problème, car après son adoption on soumet le texte à la
Cour Supreme qui le juge anticonstitutionnel sur certains point comme la
nationalité du président de la République. Dilemme pour le
gouvernement qui pour tenir une promesse faite aux partis se voit renvoyer sa
copie pour anti-constitutionnalité. Les audiences accordées au
président de la Cour Supreme n'ont pas permis de faire revenir ces
magistrats sur leurs décisions. Pour eviter une crise politique avec
l'opposition d'une part et avec ceux qui sont dans la majorité
présidentielle d'autre part, on soumet en octobre à
l'assemblée nationale un projet de modification de la constitution pour
etre en phase avec le code électorale. Troisième acte qui a
défrayé la chronique et mis à nu le bras de fer entre la
magistrature dite « assise » et le parquet : l'affaire
Korban. La Cour Supreme rend un arret de libération de M.Korban et le
procureur général refuse. Là également pour tenter
de trouver une solution à la crise, le chef de l'Etat reçoit en
audience le président de la Cour Supreme, les membres du bureau de cette
juridiction ainsi que le ministre de la justice. Rien à faire, la Cour
Supreme maintien sa décision. Dés lors il ne fait aucun doute que
cette crise doit trouver une solution. Ce sera la réforme. Commentaires
du journal Sudhebdo, 15 mai 1992.p 6
* 9 Soleil Jeudi 24 janvier 2008
n°11294, 36ème année, p.3
* 10 Georges Vedel, Droit
administratif, PUF 9ème edition 1984, p.596
* 11 Loi n°92-23 du 30 mai
1992 sur le Conseil constitutionnel modifiée par la loi n°99-71 du
17 février 1999
* 12 Article 3 de la loi
organique n°92-23 sur le conseil constitutionnel modifiée par la
loi n°99-71 du 17 février 1999
* 13 Depuis sa création
le Conseil n'a eu à compter que 2 professeurs de droit qui se sont
succédés en l'occurrence le professeur babacar kanté
remplacé par l'actuel vice président le professeur Isaac Yankhoba
Ndiaye. La présidence est réservée aux magistrats. Mais il
faut faut noter que le Conseil est resté une phase sans avoir de
professeur de droit parmi ses membres
* 14 Lexique de politique,
7ème edition, Dalloz, p.328
* 15 Max Weber : le savant et
le politique, Paris, édition Plon, 1986, p.101
* 16 Maurice Duverger :
introduction à la politique, Paris édition Gallimard, 1964,
p.17
* 17 ibid
* 18 Absence de la notion de
vie politique dans les dictionnaires de droit constitutionnel et de la science
politique
* 19 « Les
definitions n'ont de valeur qu'en mathématique ou en droit, où
elles créent l'objet même qui est défini : la
circonférence n'est pas autre chose que sa définition, l'homicide
par imprudence est établi en tant qu'infraction juridique par la
définition du législateur » in Maurice
Duverger : Introduction à la politique, gallimard, paris, 1964,
p.1
* 20 Pour Aristote, la vie
politique constitue l'art « architectonique » visant
à organiser la vie sur terre. Or la terre est définie comme
« un monde sublunaire », c'est-à-dire qu'il aspire
à une harmonie qu'on ne peut complètement réaliser. Voir
Aristote, Ethique à Nicomaque, II, 1094 et s
* 21 Dominique Rousseau, Droit
du contentieux constitutionnel, Paris, 8ème edition Montchrestien, 2008,
p.492
* 22 Georges Vedel, «le
hasard et la nécessité», Pouvoirs, 1989 n°50, p.50
* 23 Selon georges Burdeau
« la vie politique, le fonctionnement des institutionsse
déroulent en marge des règles constitutionnelles » in
« Une survivance : la notion de constitution » in
l'Evolution du droit public, etudes offertes à Achille Mestre, Sirey
1956, p.53
* 24 « Pour les
politistes les questions politiques s'expriment de plus en plus dans les termes
du droit, que les hommes politiques usent davantage d'arguments
constitutionnels pour justifier leur comportement » in Dominique
Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, 8ème edition
Montchrestien, 2008, Paris, p.492 et s
* 25 Dominique Rousseau, Droit
du contentieux constitutionnel, Paris, 8ème edition Montchrestien, 2008,
p.492
* 26 Ibid
* 27 Le terme est
emprunté à Jacques Meunier dans son ouvrage : Le pouvoir du
conseil constitutionnel. Essai d'analyse stratégique, PUR n°198,
1994
* 28 Daniel Gaxie a trace les
lignes de force d'une analyse de la juridicisation de la vie politique.
« Ces juridicisation consistant à mettre en evidence que
la politique peut etre saisie par le droit et pour les hommes politiques
à se placer dans leur débat sur un terrain juridique, s'explique
à la fois par des interets individuels, collectifs et coorporatif des
membres de la doctrines interessés par les profits qui s'attachent pour
eux à l'existence de ce processus et par des préoccupations
spécifiquement politiques qui commandent l'intervention des politiques
quand ils débattent des aspects juridiques » : Gaxie
(D), « jeux croisés » : droit et politique dans
la polémique sur le refus de signature des ordonnances par le
président de la République, in Les usages sociaux du droit, Puf,
Paris , 1989, p.209 et s
* 29 Conflits entre le
president de l'Assemblée National et n°2 du PDS et le president de
la République secrétaire general du meme parti
* 30 Exemple le litige opposant
Decroit à Landing
* 31 Cette distinction est
opérée par le professeur Babacar kanté, ancien vice
president du Conseil, preface Recueil des Decisions et Avis du Conseil
constitutionnel du Sénégal, Rassemblés et commentés
sous la direction de Ismaila Madior Fall, Crédila 2008, p.11
* 32 Cette mission originelle
portée par la réforme de 1992, demeure avec la constitution du 22
janvier 2001
* 33 Favoreu ( L) «Le
conseil constitutionnel, régulateur de l'activité normative des
pouvoirs».RDP.1967, p.5 et s
* 34 La loi organique 92-23
attribue une compétence électorale au conseil constitutionnel. Il
s'agit d'une compétence électorale pour l'élection du
président de la République et des députés. A ce
titre aux termes de l'article 2 de la loi organique 92-23 modifiée par
la loi N°99-71 du 17 février
1999 « conformément aux dispositions des articles 24, 25,
28, 29, 31 et 35 de la constitution, le conseil constitutionnel reçoit
les candidatures à la présidence de la République, arrete
la liste des candidats, statue sur les contestations relatives aux
élections du président de la République et des
députés à l'Assemblée Nationale et en proclame les
résultats. Il reçoit le serment du président de la
République et constate sa démission, son empechement ou le
décés des personnes appelée à le suppléer
dans ces cas »
* 35 Ismaila Madior Fall,
Recueil des Decisions et Avis du conseil constitutionnel
sénégalais, p.499
* 36 Michel Troper, la Theorie
du droit, le Droit, l'Etat, Paris-PUF, 2001.p183
* 37 Dominique Rousseau, Droit
du contentieux constitutionnel, Paris, 8ème edition Montchrestien, 2008,
p.61
* 38 Dominique Rousseau, Droit
du contentieux constitutionnel, Paris, 8ème edition Montchrestien, 2008,
p.79
* 39 Jean du Bois de Gaudusson,
les Elections à l'Epreuve de l'Afrique, Etude et Doctrine : la
sincérité du scrutin, Cahiers du conseil constitutionnel
n°13
* 40 Albert Bourgi cite par
Jean du Bois de Gaudusson in les Elections à l'Epreuve de l'Afrique,
Etude et Doctrine : la sincérité du scrutin, Cahiers du
conseil constitutionnel n°13
* 41 Affaire n°1/E/93 du
21 février 1993 : elections présidentielles
* 42 Pour s'assurer de la
validité des candidatures déposées et du consentement des
candidats, le conseil fait procéder à toute vérification
qu'il juge utile
* 43 Affaire n°1/E/2007 du
26 janvier 2007 : élections présidentielles.
* 44 Pour un cas concret de
rectification d'erreur on peut donner l'exemple de la requete du candidat Abdou
Diouf demandant au conseil la rectification des résultats du bureau de
vote n°5 de Richard Toll tels que proclamés par la commission
nationale de recensement des votes de Dagana, au motif que ce dernier a
attribué les 107 voix qu'il a obtenu au candiadt Ousseynou Fall. Le juge
après vérification déclare « que la
comparaison de la photocopie de procés verbal jointe à la requete
avec le procés verbal de l'Onel fait apparaître en effet, que les
candidats Ousseynou Fall et Abdou Diouf ont obtenu respectivement 01 et 107
voix ; qu'en conséquence il ya lieu de procéder à la
rectification du procès verbal de la commission de Dagana en restituant
au candidat Abdou Diouf les 107 voix litigieux », Affaire 4
à 11/E/2000 : élections présidentielles
* 45 Affaire n°30/E/98 du
03 juillet 1998 : elections législatives
* 46 Babacar Kanté in La
Protection constitutionnelle des droits fondamentaux en Afrique, l'exemple du
Sénégal, Harmattan 2007, p.13
* 47 «l'idée que
Abdou Diouf a gagné l'élection présidentielle dès
le 1er tour semble etre le leitimotiv qui voudrait confirmer le mot
d'ordre pré-électoral du parti socialiste'' Abdou Latif Coulibaly
in Sud ay Quotidien n°19-1er mars 1993
* 48 Décision
n°6/93 affaire n°7 à 12/E/93
* 49 Sud quotidian, n°29,
Lundi 15 mars 1993
* 50 Affaire n°13/E/2000 :
proclamation des resultants de l'élection présidentielle
* 51 Affaire n°s 4 et
5/E/2007 : proclamation des resultants du premier tour du scrutin de
l'élection présidentielle du 25 février 2007
* 52 Sud Quotidien du 03 mars
1993
* 53 Momar-Coumba Diop, Mamadou
Diouf et Aminata Diaw, Le baobab a été déraciné.
L'alternance au Sénégal, Politique Africaine,
n°157
* 54 Lire la déclaration
de Me Wade, «L'armée et les jeunes doivent prendre leurs
responsabilités»,
Sud Quotidien, 31 décembre 1999. Après la
réaction de plusieurs hommes politiques se désolidarisant
de tout appel à l'armée en vue de prendre le
pouvoir et de la condamnation de ces propos par des officiels
français, Wade a précisé sa pensée:
«L'armée, ce serait l'échec de ma vie [...] mais cela ne
veut
pas dire qu'on laissera Diouf faire ce qu'il veut» (Sud
Quotidien, 24 janvier 1999). Un peu avant les
élections, il a à nouveau déclaré:
«En cas de confiscation du pouvoir, l'armée doit prendre ses
responsabilités
» (Sud Quotidien, 18 février 2000).
* 55 Cf. Professeur Jean du
Bois de Gaudusson, « Les élections à l'épreuve de
l'Afrique », in Les Cahiers du Conseil constitutionnel,
n°13/ 2002, pp. 101.
* 56 Au lendemain de la
présidentielle de février 2007, qui consacre la victoire du
président Abdoulaye Wade dès le premier tour avec plus de 57 %
des suffrages, l'opposition significative refuse de reconnaître sa
défaite et appelle à boycotter les élections
législatives prévues quelques mois plus tard. Elle émet
des doutes sur la fiabilité du fichier électoral. En tout cas, ce
boycott a permis une large victoire du parti au pouvoir et ses alliés
aux législatives, toutefois, avec un faible taux de participation. Le
Soleil du 03 avril 2010
* 57 Affaire 11/E/98
* 58 Voir Recueil des
Décisions et Avis du Conseil constitutionnel sénégalais,
p. 237
* 59 JORS du 31 aout 1960
* 60 Dominique Rousseau, Droit
du Contentieux constitutionnel, Paris, 8ème Edition,
Montchrestien, 2008, p.504
* 61 Cc, 85-197 DC, 23 aout
1985, Rec.p70
* 62 in
www.accpuf.org/sen/ispelec2.html
* 63 Mouhamadou Mounirou Sy, La
Protection Constitutionnel des Droits Fondamentaux en Afrique : l'exemple
du Sénégal, Edition Harmattan 2007, p. 487
* 64 Le professeur et ancien
vice Président du Conseil Kanté faisait remarquer dans sa
préface du « Recueil des Avis et Décisions du
Conseil », p 11, que « certains peuvent malgré
tout se demander quel intérêt il ya à commenter les
décisions d'une juridiction réputée pour rendre souvent
des déclarations d'incompétence »
* 65 La loi Ezzan n'est que la
traduction juridico-politique de la volonté du Président de la
République A. Wade d'amnistier des délinquants et criminels
politiques. D'ailleurs, le dénouement de cette loi s'est traduit par sa
promulgation par le Président le jeudi 17 février 2005. Ce texte
offre ainsi l'impunité à tous les crimes politiques commis entre
1993 et 2004. Un choix délibéré pour le chef de l'Etat qui
pourtant disposait d'une autre alternative : le renvoi de la loi devant
l'Assemblée Nationale pour une seconde lecture. Cette loi, qui fut
adoptée par l'Assemblée Nationale le 7 janvier dernier par 70
voix contre 20, avait fait par la suite l'objet d'un recours devant le Conseil
constitutionnel. Les 5 « sages » qui ont rendu leur
décision le 9 février dernier ont procédé à
une « validation partielle » du texte, suffisant pour que
le Président puisse promulguer le texte en toute légalité.
Si la constitution sénégalaise précise que les
décisions constitutionnelles « sont insusceptibles d'aucune
voie de recours », la loi organique relative au Conseil des
« sage » donne la possibilité au Président de
la République de renvoyer le texte pour une seconde lecture. Ce qu'il
n'a pas fait. Le Conseil constitutionnel qui a rendu sa décision il ya
10 jours, a procédé à une « validation
partielle » de la loi Ezzan. Ce qui signifie tout d'abord que le
texte n'est qu'en partie conforme à la constitution et qu'il entre en
vigueur dès sa promulgation par le chef de l'Etat,
dépouillé toutefois des dispositions non validées par le
Conseil. Celui-ci a effectivement invalidé l'article 2 de la loi,
prévoyant que « sont amnistiées de plein droit toutes
les infractions criminelles ou correctionnelles, au Sénégal ou
à l'étranger, en relation avec le décès de Monsieur
Babacar Seye, Magistrat du Conseil constitutionnel, que leurs auteurs aient
été jugés définitivement ou non ». Une
disposition qui fait en réalité double emploi avec l'article 1 de
ladite loi, qui amnistie toutes celles « en relation avec les
élections générales ou locales ou ayant des motivations
politiques ». Or le caractère politique de l'assassinat du
Pr2sident du Conseil constitutionnel, abattu à la veille du
résultat des élections législatives de 1993 n'a jamais
été à prouver. Voir
http://www.afrik.com/article8133.html
* 66 Dans sa décision
n°97/2007, le Conseil constitutionnel a censuré la loi
n°23/2007 modifiant l'article L 146 du Code électoral pour
instituer la parité dans la liste des candidats au scrutin de
représentation proportionnelle pour les élections legislatives.il
faut reconnaitre que la censure de cette loi ne s'analyse point comme une
victoire de l'opposition sur la majorité parlementaire dans la mesure
où la position de celle-ci était mitigée car ne voulant se
priver de l'électorat feminine. Mais comme une volonté de vouloir
copier vaille que vaille le juge français.
* 67 I.M.Fall, Recueil des
Décisions et Avis du Conseil constitutionnel, Credila, 2008, p. 27
* 68 Charles Eisenmann, La
justice dans l'Etat, in La Justice, PUF, 1961, p. 21
* 69 L. Favoreu,
Actualité et Légitimité du controle juridictionnel des
lois en Europe Occidentale, RDP, 1986, p. 1195
* 70 Jacques Attali, le monde
du 19 janvier 1982
* 71 Georges Vedel, le
Débat 1989, n°55, p. 48
* 72 Mouhamadou Mounirou Sy, La
Protection Constitutionnel des Droits Fondamentaux en Afrique : l'exemple
du Sénégal, Edition Harmattan 2007, p. 120
* 73 L.Favoreu, le Conseil
constitutionnel, régulateur de l'activité normative des pouvoirs
publics, RDP, 1967, p. 5
* 74 Voir l'article de Fara
Mbodj où il démontre que les décisions du Conseil sont
juridiquement justifiées mais que c'est sur le plan de
l'opportunité qu'elles posent problème, in Les compétences
du conseil constitutionnel à l'épreuve des saisines. Quelques
remarques sur le pouvoir jurisprudentiel du juge constitutionnel au
Sénégal
* 75 Déclaration de
l'opposition regroupée au sein du CPC (cadre permanent de concertation),
in walfadjri, vendredi 14 décembre 2001
* 76 L'histoire de cet
amendement est un peu particulière. En effet le 21 novembre,
l'Assemblée nationale réunie pour examinait le projet de loi
prorogeant le mandat des élus locaux qui s'expirait dans les trois
prochains jours. Au moment où, ils s'y attendaient le moins, un jeune
député de la majorité parlementaire, du nom de Moussa Sy,
décide de bouleverser le cours de l'histoire des collectivités
décentralisées. En proposant un amendement du projet de loi, il
prend de cours l'opposition, sortie vainqueur des locales de 1996. Ses
camarades le soutiennent et légifèrent. Désormais, les
conseillers locaux laissent le champ local aux délégations
spéciales. Après des gorges chaudes, Me Abdoulaye Babou, Ousmane
Tanor Dieng, Djibo Kâ, Amath Dansokho, Talla Sylla, et 20 autres
députés de l'opposition continuent le débat devant les
juges politiques. Le 23 novembre, le Conseil constitutionnel est saisi aux fins
de déclarer inconstitutionnelle, la loi n°9/2001 instituant,
à titre transitoire, des délégations spéciales pour
la gestion des conseils régionaux, municipaux et ruraux jusqu'aux
prochaines élections locales du 12 mai 2002.
L'opposition fait valoir ses arguments juridiques : le groupe
amené par Me Babou prétend que l'amendement n'est pas conforme
à la Constitution puisqu'étant " en réalité une
proposition de loi ". Et, une proposition d'origine parlementaire doit
respecter " la procédure normale de présentation, de discussion
et d'adoption ". Celui de Ousmane Tanor Dieng croient dur comme fer que
l'amendement n'est pas assorti de proposition de recettes compensatrices "
alors qu' [il] crée une incidence financière certaine sur les
finances publiques... ". Enfin, les requérants soutiennent que
l'amendement du député de Pikine viole la charte fondamentale en
ses articles 67, 82, 102 et les dispositions du règlement
intérieur de l'Assemblée nationale relative à la
procédure législative.
Le problème juridique est de savoir si la mise en place
des délégations spéciales en lieu et place des élus
locaux doit être assortie de proposition de recettes compensatrices. Se
prononçant sur les moyens juridiques des requérants, les quatre
sages (le cinquième étant absent) écartent d'emblée
la théorie des recettes compensatrices ; la disposition
constitutionnelle invoquée n'est pas applicable en l'espèce
puisque " les collectivités locales prévoient dans leurs budgets
autonomes, les charges inhérentes à la mise en place des
délégations spéciales ". Les juges politiques
considèrent que le droit d'amendement est un corollaire du droit
d'initiative, il peut donc " s'exercer, sans limite dans le domaine
législatif et dans le respect des restrictions imposées par les
articles 77, 82, et 83 de la loi fondamentale.
Enfin, le juge de la constitutionnalité des lois
considèrent que sa compétence d'attribution exclut " le domaine
du règlement intérieur de l'Assemblée nationale ". En
conséquence, l'amendement du président de la commission Sports
loisirs et éducation de l'Assemblée nationale est recevable et
son adoption conforme à la Constitution.
* 77 Walfadjri, jeudi 13
décembre 2001
* 78 Le Soleil, jeudi 13
déc. 01
* 79 L'assassinat de maitre
Seye, vice président du Conseil constitutionnel lors des
élections présidentielles de 1993 est symptomatique de cette
façon de ménager le Conseil en fonction des situations et des
enjeux politiques
* 80 A l'époque il
était l'opposant le plus populaire et le plus charismatique de
l'opposition
* 81 Sud Quotidien 03 mars
1993
* 82 Pour M.Mbodj
l'exécutif est la principal bénéficiaire des
décisions du conseil constitutionnel, in Les compétences du
conseil constitutionnel à l'épreuve des saisines. Quelques
remarques sur le pouvoir jurisprudentiel du juge constitutionnel au
Sénégal
* 83 Dominique Rousseau, Droit
du contentieux constitutionnel, Paris, 8ème edition Montchrestien, 2008,
p. 485
* 84 Voir Evolution
constitutionnelle de Sénégal, de la veille de
l'indépendance aux élections de 2007, Credila-Crepos, 2007, voir
également Recueil des Décisions et Avis du Conseil
constitutionnel commentant la saisine du Conseil par l'opposition en
contestation de la composition du directoire de campagne du parti au pouvoir.
Le professeur I.M.Fall considère que « ce type de recours
montre la méconnaissance du Conseil par les acteurs du jeu politique ou
la volonté de ceux-ci de l'instrumentaliser pour le faire mener des
combats qui ne relèvent pas de ses attributions ». p.
347
* 85 Voir commentaire de la
décision du Président de la République de négocier
avec le MFDC par Alioune Sall, in Recueil des Décisions et Avis du
Conseil constitutionnel, p 156
* 86 Cette lettre a
été publiée le jeudi 4 mars 2010. www.nettali.net
* 87 Entretien
* 88
www.leral.net . samedi 09 janvier
2010
* 89
www.nettali.net jeudi 14 janvier
2010
* 90 Walfadjri, Mardi
22septembre 1998, n°1955, p.4
* 91 Le Quotidien.sn, lundi 03
novembre 2008, il s'agissait de la révision constitutionnelle portant
sur la réduction de la durée du mandate du Président de
l'Assemblée Nationale
* 92 93 Dominique
Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, 8ème édition
Montchrestien, 2008, Paris, p.65
* 94 Correspondances
Wade-Conseil constitutionnel, le Soleil du Mardi 10 avril 2001
* 95 En effet le Sieur
Alé Lo députe socialiste de Taiba Ndiaye est investi par son
parti sur la liste départementale de Tivaouane. La liste du PS est
déposée dans les délais au Ministère de
l'intérieur. C'est alors qu'intervient une ordonnance du
président de la République qui proroge le délai du
dépôt des listes permettant ainsi aux partis politiques d'ajouter
au de compléter leur liste au delà du délai légal.
Le PDS met à profit cette période et réussi à
démarcher puis à débaucher le sieur Alé Lo qui
démissionne de son parti. Dés son inscription sur la liste de la
mouvance présidentielle, le PS saisit d'abord le ministre de
l'intérieur qui le déboute, ensuite le conseil constitutionnel
qui lui donne raison.
Cc/affaire n°2,3 et 4/E/2001 du 26 mars 2001 :
élections législatives
* 96 Entretien avec Abdou Latif
Coulibaly Propos recueillis le Jeudi 25 mars 2010.
* 97 M. Samb, « La
gouvernance politique : changement ou
continuité ? », in Diop (M-C) (sous la dir. de),
Gouverner le Sénégal. Entre ajustement structurel et
développement durable, Karthala, 2004, p.41-69.
* 98 Art. 88 :
« le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir
législatif et du pouvoir exécutif. Il est exercé par le
Conseil constitutionnel, le Conseil d'Etat, la Cour de Cassation, la Cour des
Comptes et les Cours et tribunaux »
* 99 Le limogeage de 3 juges.
Sous la présidence du chef de l'Etat, l'instance supérieure des
magistrats a prononcé le limogeage de M. Abdoulaye Ba, Président
du tribunal hors-classe régional de Dakar, de M. Mamadou Dème,
Président du tribunal départemental de Dakar et de M. Mamadou
Baal, doyen des juges d'instruction du Tribunal régional de Dakar
à la suite d'un différend de taille qui les opposait au ministre
de la justice, le professeur Serigne Diop. Cf.., Sud Quotidien du 19 avril
20003, « Serigne Diop règle ses comptes » ; ou
encore « le glaive contre la balance », in www.sudonline.sn
* 100 Ces propos sont du
ministre, il a même précisé que : « j'avoue
que j'ai effectivement appelé le juge pour lui dire que l'Etat en
l'occurrence, le ministre de l'économie et mon département qui
était concernés par cette affaire aimeraient, conformément
même à sa décision, voir remplacer le deuxième
syndic qui ne voulait pas travailler. Et ainsi procéder à la
nomination d'un second syndic. Je ne vois pas en la matière, une
quelconque violation » in Sud Quotidien du 19 avril 2003
* 101 Dominique Rousseau,
Droit du contentieux constitutionnel, Paris, 8ème édition
Montchrestien, 2008, p. 186
* 102 Voir J.O du 28 juin
2001, p. 156
* 103 Voir le Soleil du mardi
10 avril 2001.
* 104 Doudou Ndoye, La Raison.
Valeur de modernité pour l'Afrique. EDJA. 2007. Collection l'Afrique du
XXIe Siècle, p.56
* 105 Même certains ont
contesté le fait que le Conseil se soit déplacé pour
recueillir le serment de Wade au Stade Léopold Sédar Senghor.
* 106 Dominique Rousseau,
Droit du contentieux constitutionnel, op cit, p 278
* 107 Georges Burdeau,
« une survivance : la notion de Constitution », in
L'évolution du droit public, Etudes offertes à Achille Mestre,
Sirey, 1956, p.53
* 108 Dominique Rousseau,
Droit du Contentieux constitutionnel, Paris, 8ème Edition,
Montchrestien, 2008, p.12 et s
* 109 François
Mitterand, Le coup d'Etat permanent, Plon, 1964, p.140
* 110 Dominique Rousseau,
Droit du Contentieux constitutionnel, Paris, 8ème Edition,
Montchrestien, 2008, p.35
* 111 François
Luchaire, Le Conseil constitutionnel, Economica, 1980, p.20
* 112 Documents pour servir
à l'histoire de l'élaboration de la Constitution du 4 octobre
1958, volume 1, p.249
* 113 in Dominique Rousseau,
Droit du Contentieux constitutionnel, Paris, 8ème Edition,
Montchrestien, 2008, p. 26
* 114 Ives Meny, Politique
Comparée. Les Démocraties : Allemagne, Etas-Unis, France,
Grande-Bretagne, Italie, Paris, 4ème édition,
Montchrestien, 1993, p.10
* 115 Louis Favoreu in
«Le retour des Mythes» le Monde 11 aout 1989
* 116 Mouhamadou Mounirou Sy,
La Protection Constitutionnel des Droits Fondamentaux en Afrique :
l'exemple du Sénégal, Edition Harmattan 2007, p 73
* 117 Dominique Rousseau,
Droit du Contentieux constitutionnel, Paris, 8ème Edition,
Montchrestien, 2008, p. 95
* 118 Cf., J.F. Bayart, L'Etat
en Afrique, la politique du ventre, Paris, Fayard, 1989.
* 119 Ibid. p 82
* 120 Madeleine Grawitz,
Méthodes des sciences sociales, 11ème Ed. Dalloz,
2001, p. 159
* 121 Ives Poirmeur, Droit et
Politique, PUF, 1993, p. 32 et s
* 122 L'histoire politique et
juridique du Sénégal a été dominée par la
constance de cette solidarité entre Parlement et Gouvernement Senghor
à Wade et quel que soit le gouvernement en place
* 123 Au regard de la
jurisprudence constitutionnelle de l'ex-Cour Suprême et du Conseil
constitutionnel, on se rend compte les autorités politiques (le
Président de la République et les députés de
l'Assemblée nationale) ne sont intéressés à la
constitutionnalité des lois que sous couleur de leurs seuls
intérêts politiques. Rappelons que le Sénégal n'a
enregistré qu'une seule proposition de loi adoptée provenant des
députés : ce fut la révision n°76.01 du 19 mars
1976 (Moussa Mbengue) accordant un statut spécial aux anciens
Présidents de la République. Toutes les autres proviennent de
projets présidentiels, et on voit mal le Président de la
République lui-même les attaquer pour inconstitutionnalité,
de même que les députés dont l'écrasante
majorité appartenait ou appartient à la mouvance
présidentielle
* 124 Entretien
* 125 Fara Mbodj, Les
compétences du Conseil constitutionnel à l'épreuve des
saisines. Quelques remarques sur le pouvoir jurisprudentiel du juge
constitutionnel au Sénégal, EDJA, n°78,
juillet-aout-septembre 2008, p. 7 et s
* 126 Entretien
* 127 Le Soleil, mardi 13
Avril, p. 5
* 128 En effet le
président de l'Assemblée nationale Macky Sall avait
convoqué le fils du Président à l'Assemblée
nationale pour qu'il s'explique sur dépenses engagées dans le
cadre
* 129 Sud Quotidien, Samedi
5-dimanche 6 Janvier 2008, n° 4417
* 130 Entretien avec le
journaliste Abdou Latif Coulibaly, le professeur El hadj Mbodj.....
* 131 Le professeur Ismaila
Madior Fall, résume parfaitement cette attitude du Conseil en
matière de compétence : lorsqu'une affaire lui est soumise,
le Conseil se réfère, pour se déclarer compétent ou
non, à son code de compétence dont la substance transcrite
à l'article premier de la loi organique sur le Conseil constitutionnel,
est la suivante : le Conseil constitutionnel se prononce sur la
constitutionnalité des lois, sur le caractère
réglementaire des dispositions de forme législative, sur la
constitutionnalité des lois organiques, sur la recevabilité des
propositions et amendements d'origine parlementaire, sur les exceptions
d'inconstitutionnalité soulevées devant le Conseil d'Etat et la
Cour de Cassation et entre le pouvoir exécutif et le pouvoir
législatif.
Deux hypothèses sont à envisager. Soit le Conseil
se déclare compétent, statue au fond du recours et rend une
décision.....soit l'objet de l'affaire pour laquelle il est saisi ne
figure pas sur la liste de ses attributions, le Conseil se déclare
alors, de façon implacable incompétent avec le prononcé de
la formule connue de beaucoup de
requérant : « Considérant que le Conseil
est une juridiction d'attribution dont la compétence est strictement
limité par les textes qui le régissent et qu'il ne saurait se
prononcer que sur des cas expressément prévus par ces
textes ».
* 132 Voir P.
Esplugas « Protection des droits et libertés »,
Ellipses, 2002, p.89
* 133 Montesquieu, De l'Esprit
des Lois, livre XI, chap. 6, PUF, 1984
* 134 Dominique Rousseau,
Droit du contentieux constitutionnel, Paris, 8ème édition
Montchrestien, 2008, p. 208
* 135 Ismaila Madior Fall,
Evolution constitutionnelle du Sénégal, de la veille de
l'indépendance aux élections de 2007, Dakar, CREDILA, 2007, p.
76 et 77
* 136 L'intention
déclarée du PDS d'exclure 12 députés de
l'Assemblée nationale et de les faire remplacer par des
suppléants, communiqué de l'Agence Presse
Sénégalaise du1er juin 2005
* 137 Toutefois il faut noter
que le Cadre permanent de concertation des partis de l'opposition (Cpc), le G10
et la Ld/Mpt réaffirment leur décision de s'opposer à
l'exclusion de l'Assemblée nationale des députés dits
« frondeurs ».En considérant que cette « affaire »
devient celle de l'Assemblée nationale, l'opposition s'est dit
prête à s'opposer à ce qui, pour elle, a les allures «
d'un coup de force, une violation de la Constitution et du Règlement
intérieur de l'Assemblée nationale ». Dans son optique, cela
ne passera pas puisque Amath Dansokho, Abdoulaye Bathily et tous leurs
camarades sont décidés à développer une
série d'initiatives et de mobilisation populaire. On retient, entre
autres, une campagne de sensibilisation du corps diplomatique
accrédité à Dakar, des institutions et de toutes autres
structures concernées par la démocratie dans le monde. Le Soleil,
27 mai 2005
* 138 La situation est
d'autant plus arbitraire avec le cas de Fada. Interrogé, Doudou Wade
n'a pas voulu se prononcer sur le cas du député Modou Diagne Fada
qui se trouve presque dans les mêmes situations que Moustapha
Cissé Lô et Mbaye Ndiaye. En effet, M. Fada a été
investit par la Coalition Waar wi qu'il a abandonnée par la suite.
Mieux, M. Fada s'affiche partout avec la Coalition Sopi 2007 qu'il a combattue
aux Législatives, tout comme les députés exclus
s'affichent avec l'Apr/Yaakaar qui vient de naître
* 139 M. Hauriou, Principes de
droit public, 2ème éd, Paris, Sirey, 1916, p. 34 et
s
* 140 L. Favoreu,
« Brèves réflexions sur la justice constitutionnelle
africaine », in Les Cours Suprêmes en Afrique, Tome 2, Paris,
Economica, 1989, p. 40
* 141 M. Hauriou,
Précis, op.cit., p.636
* 142 DC 3/C/2005
* 143 Ismaila Madior Fall,
Evolution constitutionnelle du Sénégal, de la veille de
l'indépendance aux élections de 2007, Dakar, CREDILA, 2007. Voir
également Recueil des Décisions et Avis du Conseil
Constitutionnel sénégalais
* 144 La décision DCC
2006-074 de la Cour constitutionnelle lue sur le site :
www.sonagnon.net
* 145 L. Favoreu,
« Crise du juge et contentieux constitutionnel en droit
français », in la crise du juge, Paris, L.G.D.J., 1996, p.
81
* 146 Ismaila Madior Fall,
Evolution constitutionnelle du Sénégal, op.cit., p. 150
* 147 Affaire 11/E/98
* 148 Voir Recueil des
Décisions et Avis du Conseil constitutionnel sénégalais,
p. 237
* 149 Au lendemain de la
présidentielle de février 2007, qui consacre la victoire du
président Abdoulaye Wade
dès le premier tour avec plus de 57 % des suffrages,
l'opposition significative refuse de reconnaître sa défaite et
appelle à boycotter les élections législatives
prévues quelques mois plus tard. Elle émet des doutes sur la
fiabilité du fichier électoral. En tout cas, ce boycott a permis
une large victoire du parti au pouvoir et ses alliés aux
législatives, toutefois, avec un faible taux de participation. Le Soleil
du 03 avril 2010
* 150 Mettant de
sérieuses réserves sur l'impartialité du ministre de
l'intérieur, on peut lire dans les colonnes de certains journaux les
expressions telles que : Depuis que le ministre de l'Intérieur de
l'époque, Cheikh Tidiane Sy, lui a remis le
récépissé de And Jëf, à Decroix dont son
adversaire Landing prétend détenir l'original. Depuis lors,
Decroix n'a cessé de poser des actes, fort du soutien de son «
allié » le président Wade, qui a du mal à agir comme
« le président de tous les Sénégalais »
* 151 Source Agence
Sénégalaise de Presse, Jeudi 07 janvier 2010
* 152 Dominique Rousseau,
Droit du Contentieux constitutionnel, Paris, 8ème Edition,
Montchrestien, 2008, p.37
* 153 Le seul qui, à
l'époque de sa nomination n'exerçait pas un role politique et
dont la désignation fut favorablement accueillie, M Kéba Mbaye,
fut aussi le premier à abondonner la présidence avant le terme de
son mandat. M Youssoupha Ndiaye a également démissionné de
son poste de président du conseil.
* 154 Kéba Mbaye
affirmait le 17 juin 1992, au lendemain de sa nomination à la tete du
conseil constitutionnel : « le président de la
République me connaît très bien. Nous avons depuis
longtemps des rapports personnels. Je dirais meme que nous avons des liens
d'amitié » in SudHebdo n°21, 03 mars 1993
* 155 Entretien avec le
professeur Elhadj Mbodj
* 156 J.P.Lebreton,
« Conseil constitutionnel et initiative financière dans le
cadre de la procédure législative », RA, 1978,
p.421-422
* 157 P.JAN et J.P. ROY, Le
Conseil constitutionnel vu du Parlement, Ellipses, 1999 p. 170
* 158 Ibidem
* 159 Dominique Rousseau,
Droit du Contentieux constitutionnel, Paris, 8ème Edition,
Montchrestien, 2008, p.59
* 160 Henry Roussillon, Le
Conseil Constitutionnel, Dalloz, 5ème édition, 2004,
p. 16et 17
* 161 R.Badinter,
« Condorcet et les droits de l'Homme », in Etudes
politiques, Edition Gallimard, 1972, p. 51
* 162 EL. MBODJ,
« Le Sénégal : un régime
présidentiel hétérodoxe », in Les Nouvelles
constitutions africaines : la transition démocratique, Presse
I.E.P. Toulouse, 1995, p.165
* 163 Voir article 42 de la
constitution du Sénégal de 2001
* 164 Conscient de cette
`anomalie', le professeur B.Kanté, vice président du Conseil
constitutionnel, souhaitait une réforme du système d'organisation
des juridictions constitutionnelles africaines notamment en ce qui concerne la
désignation des membres. Pour lui, il serait salutaire que la
composition soit hétérogène et que d'autres organes
puissent également participer à la désignation des
conseillers constitutionnels
* 165 Doudou Ndoye, La Raison,
Valeur de modernité pour l'Afrique, EDJA, 2007, collection l'Afrique du
XXIe Siècle, p.57
* 166 Entretien avec Abdou
Latif Coulibaly
* 167 Jacques Meunier, Le
pouvoir du Conseil constitutionnel. Essai d'analyse stratégique, PUR
n°198, LJDG, 1994, p.65
* 168 Ibid
* 169 Article 9 al 1er :
«le président est chargé de l'administration du
conseil»
* 170 Voir article 12 al 2
* 171 Article 10
* 172 Article 22
* 173 Article 3 de la loi
organique 92-23 «le conseil comprend cinq membres nommés par
décret pour 6 ans non renouvelables, dont un vice président''
* 174 Sud au Quotidien du 02
mars 1993, p.1
* 175 Sud au Quotidien du 03
mars 1993, n°21, p.1
* 176 Voir commentaire du
professeur Ismaila Madior Fall in Recueil des Décisions et Avis du
conseil constitutionnel. D'ailleurs cette la démission du
président et sa nomination au poste de ministre est décrite par
la presse comme un arrangement avec le président de la République
qui pourra ainsi nommer au conseil une personne qui lui serait proche
idéologiquement.
* 177 Propos recueillis lors
de l'entretien avec Abdou L. Coulibaly
* 178 Entretien avec le
professeur Elhadj Mbodj
* 179 Maurice Duverger,
institutions politiques et droit constitutionnel
* 180 in Bulletin
bibliographique, RDP, 1978, p.1511
* 181 Ismaila Madior Fall,
Evolution constitutionnelle du Sénégal de la veille des
indépendances aux élections de 2007, Credila Crepos 2007, p.152
et s
* 182 La fièvre
révisionniste. La Constitution du 22 janvier 2001 n'a de cesse
d'être modifiée, alors même que son auteur -au sens
politique, le Constituant étant le peuple sénégalais qui
s'est prononcé par référendum le 7 janvier 2001- continue
d'occuper la magistrature suprême. La troisième loi fondamentale
du Sénégal indépendant est, en effet, le pur produit de
l'alternance au pouvoir par les urnes : élu le 19 mars 2000 par 58%
des suffrages, Abdoulaye Wade, l'opposant historique au
«régime» socialiste, avait fait plébisciter -par 94%
des suffrages- son projet de nouvelle Constitution, sur le fondement
-contesté- de l'article 46 de la Constitution de 1963 alors en vigueur.
Nonobstant ce changement licite de Constitution et la modernité de la
Constitution Wade, le Sénégal n'a pas rompu avec les errements
passés, les révisions à répétition du texte
suprême. La Constitution du 7 mars 1963 avait été
révisée à 20 reprises. La Constitution du 22 janvier 2001,
qui lui a succédée, change à un rythme beaucoup plus
soutenu, grâce au soutien inconditionnel du Pds (Parti
Démocratique Sénégalais), le parti ultra majoritaire.
Extrait d'un article de Stéphane BOLLE - Maître de
conférences Hdr en Droit public Université Paul Valéry -
Montpellier III in Ferloo.com
* 183 Voir les
décisions 9/C/98, 1/C/2003, 3/C/2005
* 184 D.C. 469 D.C. Cette
décision porte sur l'affaire relative à la loi constitutionnelle
relative à l'organisation décentralisée de la
République. J.O n°75 du 29 mars 2003. P. 5570. Le Conseil
constitutionnel a été saisi par les parlementaires par la voie de
l'article 61 alinéa 2 de la Constitution. Il lui était
demandé de statuer sur la conformité de la réforme
constitutionnelle de la décentralisation à l'alinéa 5 de
l'article 89 de la Constitution.
* 185 A propos des lois
portant révision de la Constitution, le Conseil déclare
invariablement son incompétence au fait que la connaissance des lois
portant révision de la Constitution ne figure pas au rang des
matières qui lui sont dévolues par la Constitution et la loi
organique. Voir les décisions 3/C/2005 du 18 janvier 2005 sur la
prorogation du mandat des députés, 1/C/2003 du 11 juin 2003 sur
le conseil des affaires économiques et sociales, 9/C/98 du 09 octobre
1998 portant révision de la Constitution en ses articles 21 et 28. Voir
également le récent projet de loi sur la révision de
l'article 27 de la Constitution. En lors du Conseil des ministres du 9 mai
2008, le Chef de l'Etat a fait adopter un projet de loi constitutionnelle
modifiant l'article 27 alinéa 1 de la Constitution pour restaurer le
septennat. L'annonce de cette volte-face constitutionnelle a été
redoublée d'une controverse sur la voie à emprunter pour adopter
la révision. Pour des raisons de pure opportunité politique, la
Présidence a, en effet, entrepris de convaincre l'opinion de la
possibilité d'allonger la durée du mandat présidentiel,
sans recourir au référendum. Finalement «Sans
référendum, pas de révision de l'article 27 !»
La controverse procédurière l'a emporté sur la discussion
du fond du projet de révision.
* 186 El hadj Mbodj, Le
Sénégal, un régime présidentiel
hétérodoxe, Presses de l'Institut d'études politiques de
Toulouse 1995. P 1, et du point de vue du professeur Mbodj dans une interview
publiée dans le site
www.galsentv.com une grande part
de responsabilité, malheureusement, incombe à l'opposition
boycotteuse. J'avais dénoncé, en ce moment-là, le boycott,
parce que je savais exactement ce qui allait se passer. Donc, ils (les leaders
de l'opposition ayant boycotté les élections législatives
de 2007 : Ndlr) ont balisé la voie, permettant la majorité
qui est en place de faire tout ce qu'elle veut de la Constitution.
* 187 Interview du professeur
El hadj Mbodj publiée dans le site
www.galsentv.com
* 188 L'illustration est
fournie par la décision du Conseil constitutionnel du 26 mars 2001 sur
l'affaire relative à l'effigie du président de la
République, voir J.O du 28 juin 2001, p. 156. Selon le Conseil
constitutionnel, le « nom Wade et la photographie du Président
de la République ne doivent pas figurer sur le bulletin de vote de la
coalition Wade ». Cette décision du conseil a suscité
une désapprobation du président de la République qu'il n'a
pas manquée de porter à l'attention du Conseil à partir
d'une lettre. Il s'en est suivi un échange de correspondances. Voir le
Soleil du mardi 10 avril 2001. D'ailleurs Doudou Ndoye, dans son ouvrage La
Raison, Valeur de modernité pour l'Afrique, p. 57 qualifie la lettre du
président de « demande injonctive d'explication faite au
Conseil constitutionnel»
* 189 On peut citer comme
exemple la modification du règlement intérieur de
l'Assemblée Nationale notamment en son article 15 réduisant
ainsi le mandat du Président l'Assemblée Nationale à 1 an.
En effet c'est par 111 voix pour, 22 contre, que les députés
sénégalais ont mis fin ce dimanche soir aux fonctions du
président de l'Assemblée nationale. Partisans et adversaires de
Macky Sall se sont succédé à la tribune tout au long des
six heures de débat, expliquant pourquoi ils voteraient, ou non, le
projet de résolution. Les adversaires de Macky Sall ont affirmé
que les relations entre le législatif et l'exécutif
étaient bloquées en raison des désaccords entre le
président de l'Assemblée et le chef d'Etat, Abdoulaye Wade. Ils
ont aussi critiqué la gestion actuelle de l'Assemblée. «
Il y a eu abandon de poste », ont lancé certains
députés. Les députés partisans de Macky Sall, ceux
en tout cas qui s'opposaient à son départ, ont tenté de
défendre le bilan du président de l'Assemblée. D'autres
ont regretté que l'Assemblée s'intéresse à des
questions purement politiciennes au moment où, selon l'un des orateurs,
« les urgences sont ailleurs ». « Cette
résolution est une résolution de complot », a
lancé l'une des oratrices. Voir www.rfi.fr. Quant au Conseil, il a
déclaré, à l'issue de sa séance du 30 octobre 2008,
que l'Article 15 est conforme à la Constitution, permettant ainsi au
président de la République de promulguer cette loi de toutes les
controverses.
* 190 Ismaila Madior Fall,
Evolution constitutionnelle du Sénégal de la veille des
indépendances aux élections de 2007, Credila Crepos 2007, p.152
et s
* 191 La fièvre
révisionniste. La Constitution du 22 janvier 2001 n'a de cesse
d'être modifiée, alors même que son auteur -au sens
politique, le Constituant étant le peuple sénégalais qui
s'est prononcé par référendum le 7 janvier 2001- continue
d'occuper la magistrature suprême. La troisième loi fondamentale
du Sénégal indépendant est, en effet, le pur produit de
l'alternance au pouvoir par les urnes : élu le 19 mars 2000 par 58%
des suffrages, Abdoulaye Wade, l'opposant historique au
«régime» socialiste, avait fait plébisciter -par 94%
des suffrages- son projet de nouvelle Constitution, sur le fondement
-contesté- de l'article 46 de la Constitution de 1963 alors en vigueur.
Nonobstant ce changement licite de Constitution et la modernité de la
Constitution Wade, le Sénégal n'a pas rompu avec les errements
passés, les révisions à répétition du texte
suprême. La Constitution du 7 mars 1963 avait été
révisée à 20 reprises. La Constitution du 22 janvier 2001,
qui lui a succédée, change à un rythme beaucoup plus
soutenu, grâce au soutien inconditionnel du Pds (Parti
Démocratique Sénégalais), le parti ultra majoritaire.
Extrait d'un article de Stéphane BOLLE - Maître de
conférences Hdr en Droit public Université Paul Valéry -
Montpellier III in Ferloo.com
* 192 Voir les
décisions 9/C/98, 1/C/2003, 3/C/2005
* 193 D.C. 469 D.C. Cette
décision porte sur l'affaire relative à la loi constitutionnelle
relative à l'organisation décentralisée de la
République. J.O n°75 du 29 mars 2003. P. 5570. Le Conseil
constitutionnel a été saisi par les parlementaires par la voie de
l'article 61 alinéa 2 de la Constitution. Il lui était
demandé de statuer sur la conformité de la réforme
constitutionnelle de la décentralisation à l'alinéa 5 de
l'article 89 de la Constitution.
* 194 A propos des lois
portant révision de la Constitution, le Conseil déclare
invariablement son incompétence au fait que la connaissance des lois
portant révision de la Constitution ne figure pas au rang des
matières qui lui sont dévolues par la Constitution et la loi
organique. Voir les décisions 3/C/2005 du 18 janvier 2005 sur la
prorogation du mandat des députés, 1/C/2003 du 11 juin 2003 sur
le conseil des affaires économiques et sociales, 9/C/98 du 09 octobre
1998 portant révision de la Constitution en ses articles 21 et 28. Voir
également le récent projet de loi sur la révision de
l'article 27 de la Constitution. En lors du Conseil des ministres du 9 mai
2008, le Chef de l'Etat a fait adopter un projet de loi constitutionnelle
modifiant l'article 27 alinéa 1 de la Constitution pour restaurer le
septennat. L'annonce de cette volte-face constitutionnelle a été
redoublée d'une controverse sur la voie à emprunter pour adopter
la révision. Pour des raisons de pure opportunité politique, la
Présidence a, en effet, entrepris de convaincre l'opinion de la
possibilité d'allonger la durée du mandat présidentiel,
sans recourir au référendum. Finalement «Sans
référendum, pas de révision de l'article 27 !»
La controverse procédurière l'a emporté sur la discussion
du fond du projet de révision.
* 195 El hadj Mbodj, Le
Sénégal, un régime présidentiel
hétérodoxe, Presses de l'Institut d'études politiques de
Toulouse 1995. P 1, et du point de vue du professeur Mbodj dans une interview
publiée dans le site
www.galsentv.com une grande part
de responsabilité, malheureusement, incombe à l'opposition
boycotteuse. J'avais dénoncé, en ce moment-là, le boycott,
parce que je savais exactement ce qui allait se passer. Donc, ils (les leaders
de l'opposition ayant boycotté les élections législatives
de 2007 : Ndlr) ont balisé la voie, permettant la majorité
qui est en place de faire tout ce qu'elle veut de la Constitution.
* 196 Interview du professeur
El hadj Mbodj publiée dans le site
www.galsentv.com
* 197 L'illustration est
fournie par la décision du Conseil constitutionnel du 26 mars 2001 sur
l'affaire relative à l'effigie du président de la
République, voir J.O du 28 juin 2001, p. 156. Selon le Conseil
constitutionnel, le « nom Wade et la photographie du Président
de la République ne doivent pas figurer sur le bulletin de vote de la
coalition Wade ». Cette décision du conseil a suscité
une désapprobation du président de la République qu'il n'a
pas manquée de porter à l'attention du Conseil à partir
d'une lettre. Il s'en est suivi un échange de correspondances. Voir le
Soleil du mardi 10 avril 2001. D'ailleurs Doudou Ndoye, dans son ouvrage La
Raison, Valeur de modernité pour l'Afrique, p. 57 qualifie la lettre du
président de « demande injonctive d'explication faite au
Conseil constitutionnel»
* 198 On peut citer comme
exemple la modification du règlement intérieur de
l'Assemblée Nationale notamment en son article 15 réduisant
ainsi le mandat du Président l'Assemblée Nationale à 1 an.
En effet c'est par 111 voix pour, 22 contre, que les députés
sénégalais ont mis fin ce dimanche soir aux fonctions du
président de l'Assemblée nationale. Partisans et adversaires de
Macky Sall se sont succédé à la tribune tout au long des
six heures de débat, expliquant pourquoi ils voteraient, ou non, le
projet de résolution. Les adversaires de Macky Sall ont affirmé
que les relations entre le législatif et l'exécutif
étaient bloquées en raison des désaccords entre le
président de l'Assemblée et le chef d'Etat, Abdoulaye Wade. Ils
ont aussi critiqué la gestion actuelle de l'Assemblée. «
Il y a eu abandon de poste », ont lancé certains
députés. Les députés partisans de Macky Sall, ceux
en tout cas qui s'opposaient à son départ, ont tenté de
défendre le bilan du président de l'Assemblée. D'autres
ont regretté que l'Assemblée s'intéresse à des
questions purement politiciennes au moment où, selon l'un des orateurs,
« les urgences sont ailleurs ». « Cette
résolution est une résolution de complot », a
lancé l'une des oratrices. Voir www.rfi.fr. Quant au Conseil, il a
déclaré, à l'issue de sa séance du 30 octobre 2008,
que l'Article 15 est conforme à la Constitution, permettant ainsi au
président de la République de promulguer cette loi de toutes les
controverses.
* 199 Propos de Babacar
Kanté in Recueil des Décisions et Avis du Conseil constitutionnel
du Sénégal, op cit
* 200 Mouhamadou Mounirou Sy,
La Protection Constitutionnel des Droits Fondamentaux en Afrique :
l'exemple du Sénégal, Edition Harmattan 2007, op cit
* 201 Dominique Rousseau,
Droit du contentieux constitutionnel, Paris, 8ème édition
Montchrestien, 2008, p. 392
* 202 Louis Favoreu, La
politique saisie par le droit. Alternances, cohabitation et Conseil
constitutionnel, Paris, Economica, 1998, p. 7
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