2.2.4.
La double corrélation
La corrélation en syntaxe représente le rapport
qui existe entre deux propositions. Deux termes sont dits corrélatifs
d'une manière générale quand ils sont entre eux dans un
rapport de dépendance ; plus spécialement on appelle
corrélatif celui qui est l'antécédent du second dit
relatif : tellement par rapport à que. Pour Stage
(2005 :1), c'est une construction binaire dont les deux parties (A+B)
sont unies comme les doigts de la main ou des soeurs siamoises. Ainsi, la
construction est composée de deux séquences P1 et P2 solidaires
et exprime une relation causale. Cependant la définition de Stage
s'applique mieux aux structures juxtaposées. Dans les exemples que nous
étudions, le rapport qui unit les deux énoncés est
marqué par les morphèmes de corrélation qui, dans certains
emplois, sont doublés soit en « tel », soit en
« quel ».
Dans le système
corrélatif en effet, l'indéfini tel représente,
selon Muller (1996 :1), une petite famille de marques
caractéristiques tel, si, quel, qui sont les vestiges en
français d'un vieux système corrélatif
indo-européen. Cette petite famille de marques constitue
l'antécédent de la conjonction que comme il est question
dans :
14a. Les galeries d'approche ne s'étaient heureusement pas
éboulées, à la suite du coup de grisou ; seulement,
l'air y brûlait, si lourd et
si vicié qu'il
avait fallu installer d'autres ventilateurs. (Ge, p464) ;
14b. Maintenant, c'était en lui un
tel calme, une guérison
si complète de ses doutes,
qu'il s'entêtait, en homme sauvé par
hasard. (Ge, p438) ;
14c. Leur fille adorée, cette fille désirée
si longtemps, comblée ensuite de tous leurs biens,
qu'il allait regarder dormir sur la pointe des
pieds, qu'ils ne trouvaient jamais assez
bien nourrie, jamais assez grasse ! (Ge, p470).
Dans [14a], l'antécédent tel est de
même nature. Il s'agit de l'adverbe d'intensité si,
alors que dans [14b] tel est de nature différente. Ces deux
marqueurs font partie des marqueurs factuels de la conséquence.
Marqueurs qui expriment, une conséquence objective. Or,
l'énonciation est la production d'un énoncé avec tout ce
que cela comporte notamment l'intention de l'auteur, la production d'un
énoncé résultant de plusieurs éléments comme
le dit Muller (2002 :23-27) : la motivation, le contrôle, les
choix syntaxiques, rhétoriques, sémantiques et lexicaux. Alors,
si le système à corrélation simple traduit une
conséquence objective, devons-nous tirer la même conclusion avec
le système complexe de double corrélation tel que le montre
[14] ? Le locuteur cherche-t-il à montrer que l'intensité
d'un seul fait n'est pas suffisante pour produire la conséquence
réelle ? Quelle est la motivation du locuteur dans le choix de
cette syntaxe complexe ?
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