Le concept accepté presque universellement à
l'heure actuelle concernant le développement du cancer du colon/rectum
est que la majorité se développe à partir d'un
adénome, qui est en fait des tumeurs néoplasiques
constituées par une prolifération épithéliale
bénigne.
Le développement des carcinomes à partir du
colon est connu sous le terme « séquence adénome - carcinome
». Les adénomes se développent à partir des FCA
« focus de cryptes aberrantes », plus spécifiquement des FCA
présentant une dysplasie.
La distribution des adénomes dans le colon est assez
typique. 75% des lésions se trouvent dans le réctosigmoïde.
L'incidence des adénomes est fortement liée à l'age ;
à 50 ans, 20% des individus auront un adénome du colon alors
qu'à 70 ans environ 40% des individus auront un ou plusieurs
adénomes.
Dans la majorité des cas les adénomes sont
solitaires, dans 20% des cas, ils sont multiples. La multiplicité des
adénomes est un facteur de risque supplémentaire pour le
développement de nouveaux adénomes et/ou carcinomes
métachrones.
La relation est directe entre adénomes et carcinomes,
une surveillance des adénomes et d'une importance capitale ; l'ablation
de tous les adénomes éliminerait en théorie presque tous
les carcinomes.
Histologiquement, l'adénome présente deux
zones, l'une de prolifération glandulaire, sous-tendue par la musculaire
muqueuse, l'autre qui est l'axe conjonctif et qui se continue avec le
conjonctif pédiculaire si l'adénome est pédiculaire et
avec la sous muqueuse s'il est sessile.
Les adénomes sont habituellement classés selon
leur architecture en (Ainsleigh, 1993) tubulaires, villeux ou
tubulovilleux, ce dernier étant une forme mixte. Les adénomes
tubulaires et tubulovilleux sont presque toujours pédiculaires ; les
adénomes villeux sont presque toujours sessiles avec une base large.
o Les adénomes tubulaires
Cette forme histologique représente 75% des
adénomes (slattery, 2000) donc les plus
fréquents. Ce type d'adénome comporte une prolifération
tubulo-glandulaire avec en stroma conjonctif peu abondant ; il est presque
toujours pédiculé.
o L'adénome villeux
L'adénome villeux présente une
prolifération végétante digitiforme ; il est
constitué par l'excroissance de minces franges bordées de
cellules épithéliales disposées sur un stroma conjonctif
délicat, l'ensemble réalisant un aspect papillaire, à
l'oeil nu comme au microscope.
Les adénomes villeux sont des lésions sessiles
plutôt que pédiculées, à base d'implantation large.
Il s'agit en règle d'une lésion toujours volumineuse, rarement
inférieur à 2cm.
La prolifération de l'adénome villeux se fait
à partir de l'épithélium vers la lumière
contrairement à celle de l'adénome tubulaire où la
prolifération se fait de la surface vers la profondeur.
o l'adénome tubulovilleux
Cette forme histologique représente 20% des
adénomes (Slattery, 2000).L'adénome
tubulovilleux associe la structure tubulaire et villeuse. Beaucoup
d'adénomes tubulaires, évoluant depuis longtemps,
acquièrent certains caractères des adénomes villeux,
surtout en surface ; tandis que l'aspect général de la
lésion ressemble à celui d'un adénome tubulaire pur.
Cytologiquement, les trois types d'adénomes montrent des
degrés variables de dysplasie, de la dysplasie légère
ç la dysplasie sévère.
Le mot dysplasie indique une combinaison des
altérations de la prolifération et de la différenciation
cellulaire menant à une atypie des cellules épithéliales
(Damhuis et a!, 1996)
L'atypie se manifeste à deux niveaux, au niveau
architectural et au niveau de la morphologie des cellules. Sur le plan
architectural, l'épithélium dysplasique
montre une diminution de la régularité des
glandes s'associant à une stratification des cellules
épithéliales. Au niveau de la morphologie des cellules, il existe
une irrégularité des noyaux, une activité mitotique
élevée, une augmentation du rapport noyau/cytoplasme et une perte
de différenciation. En utilisant ces critères, on a classé
les adénomes en adénomes de bas degré de dysplasie ou haut
degré de dysplasie.
o La dysplasie légère
Dans ce cas, l'évolution vers le cancer est rare ;
moins la prolifération est active, moins il y'a des cellules
indifférenciées et plus les glandes sont
différenciées et mucosécrétantes en profondeur.
o La dysplasie moyenne
Dans ce cas, la prolifération est active, les cellules
indifférenciées occuperont de larges zones de l'adénome et
les mitoses seront nombreuses, les noyaux sont irrégulièrement
répartis dans les cellules et on observe l'aspect de pseudo
stratification.
o La dysplasie sévère
Dans ce cas, la prolifération est très active,
l'indifférenciation gagne la totalité du polype, et s'accompagne
parfois d'aspect villeux en surface et d'anomalies nucléaires, les
noyaux sont gros, irréguliers et pléomorphes, l'aspect de pseudo
stratification s'accentue avec ébauche de stratification vraie.
A part la morphologie, une différence importante entre
les adénomes de haut et de bas degrés de dysplasie est la
mutation du gène suppresseur de tumeur P53 (Hohenberger et
a!, 1994) Ce gène, dont la protéine est
responsable soit d'un blocage du cycle cellulaire lors d'un dommage
réparable de l'ADN soit d'apoptose lors d'un dommage irréparable
d'ADN. Ce gène n'est presque jamais muté dans les adénomes
de bas degrés de dysplasie ; il est muté dans 50% des
adénomes de haut degrés de dysplasie et dans environ 70% des
carcinomes.