INTRODUCTION GENERALE
1. Compréhension du sujet
L'humanisation du territoire ivoirien se dessine sous l'action
des producteurs et des consommateurs. Leurs rencontres animent des espaces pour
les transformer en places marchandes grâce aux transactions
effectuées. Autour de ces espaces, se développent de nouveaux
lieux qui sont une sorte de « marché de route » qu'exploitent
les consommateurs sur les axes de communication. Ces marchés dynamiques,
dont les consommateurs ambulants et les entreprises tirent profit, se
structurent pour devenir des villes. Méagui, est un exemple de ce
phénomène. Cette localité est née du rassemblement
de cinq villages Bakwé à coté d'une scierie près de
laquelle s'était créé un marché local dominé
par la production vivrière (Dardel 1991, p 10). Situé au centre
d'une zone pionnière de produits de rentes, ce marché a pris de
l'ampleur tant au niveau local, régional que national grâce au
couple café cacao. Des commerçants sont venus s'y installer et
ont développé un véritable centre de transit et de
distribution de la production. Cette situation était favorable selon
l'étude de Dardel (1991, p 46) puisque les voies et moyens de
communication servaient indifféremment aux cultures de rentes et aux
cultures vivrières. Faiblement peuplée de Bakwé, la
région a vu, dans le cadre d'une opération de mise en valeur du
Sud-Ouest (A.R.S.O.), affluer des migrants d'origines variées, qui
représentent aujourd'hui la majorité de la population : Dioula,
Burkinabé, et surtout Baoulé.
La diversité des produits vivriers vendus est à
mettre en relation avec les différentes ethnies. Selon nos
enquêtes de juin 2009 : les Baoulé sont les principaux producteurs
d'igname, les Dioula et les Burkinabé produisent les
céréales (riz et maïs), les Bakwé mettent sur le
marché de la banane plantain. Pour finir nous avons noté que
toutes les ethnies mettent du manioc en association avec la culture principale.
Pour la commercialisation nos préenquêtes (juin 2009) ont
révélé que sur le marché local, chaque ethnie vend
ce qu'elle produit et pour le transport vers les villes ce sont des
regroupements ponctuels par types de produits. Cependant la production
vivrière joue un rôle secondaire dans les revenus de
l'exploitation : l'essentiel des ventes provient du café et surtout du
cacao. Une lecture de la trajectoire de l'agriculture de plantation souligne le
fait qu'elle a reposé sur des formes d'incitation (Chauveau 2003, p 2).
Les populations migrantes et étrangères, constituant la main
d'oeuvre essentielle pour le développement des cultures d'exportations
se trouvent soutenu par le système politique ivoirien des années
1960. Celui-ci faisait pression sur les populations autochtones pour accueillir
et installer les étrangers, galvanisant de plus en plus la migration
et
l'immigration par le slogan « la terre appartient
à celui qui la met en valeur »1. Ainsi, profitant de
cette situation, ceux-ci ont transformé cette zone forestière en
de vastes espaces occupés par les cultures pérennes ; toutes
choses qui contribuaient à l'essor économique du pays. Mais avec
la demande cumulée de la population urbaine et de la population
immigrée, on a le développement du vivrier renforcé par la
crise alimentaire urbaine plus accrue. La production et le commerce de produit
vivrier dans la région est le fait en partie des couronnes
périurbaines (Méagui et Touagui 2) mais aussi de zones plus
éloignées comme Robert-Porte et Oupoyo. Les agriculteurs
produisent d'avantage pour se nourrir et alimenter les villes comme San-Pedro,
Soubré (O.C.P.V., 2008), que pour acheminer leurs produits sur Abidjan,
marché fort éloigné de plus de 440 Km.
Dans cette région, l'activité agricole fournit
aux femmes leurs principaux revenus. Agents producteurs de vivriers et exclus
partiellement des retombées des cultures de rentes, elles investissent
dans le vivrier d'où elles tirent de nombreux bénéfices.
Ensuite, elles assurent la trésorerie quotidienne, par les ventes
régulières effectuées sur les marchés.
Le problème géographique posé est le suivant
: comment la région de Méagui va mettre en place des
mécanismes pour polariser tout son potentiel en vivrier et le
commercialiser.
2. Questions de recherche
La production et la commercialisation des denrées
alimentaires se heurtent à un certain nombre de contraintes. Il faut
tenir compte de celles-ci pour que la région de Méagui puisse
jouer son rôle de zone de production. Malgré cela, on note
l'existence et les actions de plusieurs acteurs autour des produits vivriers de
cette région. Alors, comment se fait la production et
se déroule la commercialisation des produits vivriers de cette
région.
La réponse à cette question de départ
nécessite de répondre à ces interrogations:
-Quels sont les produits vivriers concernés,
les zones de production et le niveau de leurs productions ?
-Quels sont les acteurs qui interviennent et comment
son-ils structurés autour de la production vivrière
?
-Comment est animé le commerce des produits
vivriers de la région et quel est son ampleur ?
1 Discours de Félix Houphouët B.
(Août 1963)
REVUE DE LA LITTERATURE
L'intitulé du sujet suggère une
référence à des publications sur le ravitaillement en
général, et en particulier sur l'apport de la région de
Méagui pour les marchés abidjanais. Dans le but de
réaliser un travail plus spécifique et de couvrir un champ plus
large, nos informations sont regroupées en quatre points :
-La production vivrière et son importance ;
-L'organisation des circuits de distribution fonctionnelle sur
les marchés ; -L'importance des marchés urbains ;
-L'impact du vivrier sur la structuration de l'espace.
Dans l'analyse des relations ville-campagne et les recherches
sur les politiques alimentaires, il faut introduire une différence
d'approche entre ravitaillement et approvisionnement au niveau du
fonctionnement et des acteurs majeurs du système. Avant tout, une
définition des termes du sujet est nécessaire. Selon le
Dictionnaire Robert 2010 (version électronique), une zone est une
portion de l'espace terrestre, d'un territoire. C'est aussi un domaine dans
lequel s'exerce une activité, ce domaine représente
Méagui. La production de vivrier est assurée par les producteurs
de la région. Le commerce de ces produits implique plusieurs agents,
avec le commerçant grossiste au coeur du dispositif. Cet entrepreneur
(le grossiste) prend en compte les besoins des consommateurs et met en oeuvre
des procédures de régulation en vue de satisfaire producteurs et
consommateurs.
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