1.2 Les biais liés à la MEC
La Méthode d'Evaluation Contingente s'expose à
des difficultés d'analyse importantes. Ces difficultés
découlent non seulement de limites opératoires (ex: lourdeur du
dispositif d'enquête) mais aussi de multiples biais qu'elle peut
impliquer (Bonnieux, 1998; Carson, 1999). Il s'agit notamment du
caractère fictif de l'échange proposé qui impose de
s'interroger sur la solidité du consentement à payer
déclaré ex ante.
Selon Young et Allen (1986), les principaux «biais
»liés à l'interrogation directe des agents
économiques sont les suivants :
- «biais stratégiques» (passagers
clandestins): tendance du répondant à exagérer (resp.
à réduire) la disposition à payer (resp. à accepter
une compensation) selon son anticipation de l'avenir.
- «biais» informationnels: le marché
expérimental ne reflétant guère les aspects du
marché réel (expérience du passé, prix et
possibilité de substitution).
- «biais» hypothétiques: risque de
réponses hypothétiques aux questions hypothétiques
caractérisant le marché expérimental. Le répondant
doit donc bien percevoir l'importance du problème.
Selon Barde (1992), la méthode des marchés
hypothétiques comporte des difficultés liées
en particulier aux problèmes de « mise en condition » des
personnes interrogées, dont certaines refusent parfois de jouer le
jeu. On peut ainsi douter de la précision de ces évaluations
en
raison même du caractère hypothétique des
situations. Un problème essentiel est de s'assurer que les
enquêtés sont bien incités à dire la
vérité.
Cummings et al. ont identifié six « biais »
à éviter dans ces évaluations.
Le biais stratégique se manifeste lorsque les personnes
interrogées donnent à dessein des réponses fausses,
sachant que dans la réalité elles ne devront effectuer aucun
paiement. Le biais du point de départ (ou biais initial) ou encore biais
d'encrage est lié à l'influence des premiers ordres de grandeur
(« enchère ») suggérés par l'enquêteur
(« accepteriez vous de payer telle somme? »). L'enquêté
peut se sentir enfermé dans une certaine fourchette; il faut dès
lors veiller à ce que les valeurs exprimées soient à la
fois « libres » et « réalistes ». Le biais
informationnel découle de la nature de l'information fournie à
l'enquêté: information sur la nature et les conséquences de
la pollution, sur les mesures à prendre, les dépenses à
engager, etc. Le biais instrumental traduit la sensibilité des valeurs
révélées en fonction des moyens de paiements
proposés (majoration d'impôts, droit d'entrée, augmentation
du prix de certains biens et services tels que l'électricité ou
l'eau, etc.): on accepte plus facilement certaines formes de paiement que
d'autres. Le biais hypothétique est dû à l'absence de
conséquence financière du choix exprimé: sur un
marché réel, une erreur de choix ou de calcul est
sanctionnée par une perte; sur un marché hypothétique, il
n'en est rien. Le biais opérationnel, enfin, correspond au degré
de cohérence entre le marché hypothétique et le
marché réel. Il importe que l'enquêté ait une
connaissance aussi bonne que possible des biens qu'on lui demande
d'évaluer. On établit ainsi une liste de « conditions
opérationnelles de référence » qui définissent
les nécessaires « passerelles » avec la
réalité.
On notera par ailleurs que les sommes
révélées peuvent également varier selon que l'on
demande combien l'on consentirait à payer pour obtenir une
amélioration ou quel montant l'on exigerait en compensation des dommages
ou nuisances subis.
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