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De la garantie des droits fondamentaux en République Démocratique du Congo. Cas de la province du Sud-Kivu

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par Dominique KAMWANGA KILIYA
Université de Kisangani, Centre Universitaire extension de Bukavu - Licence en Sciences Politiques et Administratives 2003
  

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B. Santé, Education et travail.

Les articles 25 et 26 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme des nations Unies disposent que toute personne à droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille. Mais un niveau de vie suffisant suppose du travail, et du travail rémunéré de façon à satisfaire les besoins dont font partie les soins de santé. Ensuite, comment accéder aux soins de santé dans une province où hôpitaux, pharmacies et centres de santé sont détruits, incendiés et/ou pillés ?

En effet, au Sud-Kivu, le taux de chômage est très élevé. Le peu de fonctionnaires de l'administration publique est impayé malgré les recettes fiscales, parafiscales et douanières réalisées par les services publics. Dans les institutions privées, les responsables sont forcés à mettre leurs travailleurs en congé technique ou procéder à des compressions des effectifs suite au manque de finances suffisantes pour répondre aux obligations salariales suite à l'environnement économique malsain. Tel est le cas de la Bralima et de la Pharmakina qui ont procédé, plus d'une fois, à des licenciements pendant ces quatre années de guerre.

Concernant le droit à la santé, il y a lieu de relever que dans un contexte de guerre caractérisé par la crise économique, facteur de paupérisation généralisée de la population ; l'accès aux services de santé est devenu un véritable casse-tête. Les coûts sont, en effet, devenus très élevés. En outre, la destruction des infrastructures sanitaires a véritablement contribuée à la détérioration de l'état de santé des populations du Sud-Kivu. Cette destruction d'infrastructures sanitaires est prouvée par le tableau N°3 en annexe du travail que nous présente Jean MIGABO KALERE à titre illustratif. Le tableau reprend quelques services médicaux pillés et détruits pendant la période du 02 août 1998 à décembre 2000. Ici encore, ce sont les Centres des milieux ruraux qui sont les plus touchés par ces actes de pillage et de destruction.

L'insécurité a aussi conduit les médecins et les techniciens de santé de l'intérieur à fuir vers les grands centres urbains. Selon Médecins Sans Frontières, dans certains districts de l'Est de la R.D.C. plus ou moins 75 % des enfants de moins de 3 ans n'ont pas survécus. La mortalité infantile moyenne décime 60 % des enfants de moins de 5 ans. Près de 18,5 millions de personnes n'ont plus accès aux soins de santé, les enfants n'ont plus été vaccinés dans certains coins et la mortalité maternelle est l'une des plus élevés du monde avec à peu près 3000 décès sur 100 000 en couche. Cela est lié notamment à la guerre, et lorsque les armes se taisent, c'est la pauvreté et la misère qui tuent108(*).

Les écoles sont aussi victimes de la guerre dans la province du Sud-Kivu. Le secteur de l'éducation est, en effet, largement affecté par les effets de la guerre. Les infrastructures scolaires, surtout celles situées dans les zones rurales, ont été détruites par les belligérants. Plus de la moitié d'écoles ont été touchées et, dans certains villages, seulement un enfant sur deux fréquente l'école. D'où une diminution sensible du taux de scolarisation. Dans les territoires de Mwenga, Bunyakiri, Kalehe, Kalonge, par exemple, les écoles n'ouvrent pas souvent les portes à cause de l'insécurité. Dans d'autres comme Walungu, Fizi, Uvira, Shabunda ; les écoles ne sont opérationnelles que dans les chefs-lieux109(*). Dans la ville de Bukavu, par contre, les écoles ont fonctionné par intermittence au début de la guerre avant une stabilisation qui survint peu de temps après.

Un autre aspect non négligeable ayant affecté le domaine de l'éducation en faveur de la jeunesse du Sud-Kivu est le problème de frais d'études. Cette situation remonte à 1993, depuis que l'Etat Congolais démissionna des missions sociales par l'accumulation des arriérés de salaires des fonctionnaires et enseignants. Face à cette situation, les responsables d'écoles et les professeurs mirent au point, en accord avec les parents, le système de « prime » ou de « frais de motivation ». Mais, à l'heure actuelle, suite à la situation de conflit armé qui a accru le niveau de pauvreté de toute la population Congolaise, la plupart de parents sont incapables de payer cette prime due aux enseignants, prime variant entre 2,5 et 25 dollars le mois par enfant dans la ville de Bukavu. Cela a une lourde conséquence sur le taux de déperdition scolaire alors que le pays connaissait, vers la fin des années 1990, un taux de scolarisation de 30 % ; presque sans équivalent en Afrique110(*).

Ainsi, les enquêtes rapportées par la Ligue des Droits de la personne dans la région des Grands-Lacs (1999-2000-2001) démontrent que le taux de déperdition scolaire est de 35 % en 1999 et atteignait 40 % en 2000 uniquement dans la ville de Bukavu. Au niveau de l'enseignement supérieur et universitaire, ce taux était de 11 % à l'I.S.D.R. et de 7 % à l'I.S.T.M., par exemple, pour l'année académique 1999-2000. Il est passé, pour l'année académique 2000-2001 à plus de 15 %111(*).

Pour clore cette section, mentionnons que toutes ces violations des droits humains dont il est question sont en même temps des violences structurelles, instituées, vives, chaudes, massives et systématiques. Elles frappent la dignité humaine dans ses valeurs fondamentales d'ordre personnel (la vie, l'estime de soi, la liberté, l'auto-accomplissement) ou d'ordre relationnel et collectif (l'égalité, la tolérance, la fraternité, l'ouverture à l'autre, etc.)112(*). Elles ne distinguent pas aussi les lieux (marchés, lieux de cultes, installations sanitaires), les catégories socio-économiques (leaders coutumiers, intellectuels, commerçants, hommes d'églises ou personnalités religieuses) et touchent tant les villes que les villages de la province113(*).

Mais il faut noter que toutes les informations livrées sur les violations des droits humains au Sud-Kivu ne constituent qu'une infime partie de celles qui se commettent. Le nombre exact de victimes n'est souvent pas précisé et les données officielles ne correspondent pas toujours à celles des sources indépendantes constituées des sources locales renforcées par les investigations menées sur les lieux de violations par les organisations spécialisées. Cet état des choses est dû, notamment, au contexte d'insécurité qui régnait dans la majorité des territoires sous contrôle des bandes armées créant ainsi une inaccessibilité. Il y a aussi l'effacement de traces des forfaits par les auteurs des crimes.

Enfin, l'état de guerre dans lequel se trouvait la R.D.C., en général, et la Province du Sud-Kivu, en particulier, ne peut en aucun cas servir d'alibi pour toutes les atrocités commises sur les civils non armés. Aucun degré de violence de la part des violateurs ne saurait justifier ces massacres et autres violations dont les populations sont victimes. Mais qui sont, en fait, les auteurs des violations des droits humains en cette période de guerre dans la Province du Sud-Kivu ? La réponse à cette question est donnée dans le paragraphe qui suit.

* 108 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.156.

* 109 Héritiers de la Justice, Situation des droits de l'homme en R.D.C. : Cas du Sud-Kivu, Bukavu, avril 1999, p.30.

* 110 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.158.

* 111 L.D.G.L., Op.Cit., p.95.

* 112 D. MASUMBUKO NGWAS, « Les droits de l'homme, la démocratie et la paix » in Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'homme, Op.Cit., p.27.

* 113 J. MIGABO KALERE, Op.Cit., pp.82-107.

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