B. Les atteintes à la
dignité humaine.
Il est relevé ici des cas qui choquent les consciences.
Il s'agit, par exemple des cas d'arrestations arbitraires,
d'enlèvement, de tortures, de mises en détention
caractérisées par la force et l'arbitraire.
1. Les arrestations arbitraires
L'article 9, alinéa 2 du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques dispose que « Tout individu a droit
à la liberté et à la sécurité de sa
personne. Nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention
arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce
n'est pour des motifs, et conformément à la procédure
prévus par la loi ». Plusieurs personnes au Sud-Kivu ont
été arrêtées et/ou détenues arbitrairement et
cela souvent sans inculpation ni jugement et pendant des périodes
prolongées. Si la justice ordinaire conserve encore son estime, les
organes chargés de la distribuer ou de la dire constituent
néanmoins une source de préoccupation.
Alors que le Code de procédure pénale
prévoit que personne ne peut être arrêtée et mise en
prison sans que la loi ne l'autorise ; ces détenus doivent
être déférés devant le parquet dans les 48 heures
suivant leur arrestation, au Sud-Kivu, hormis le non respect de ces
règles élémentaires, les forces de l'ordre et de
sécurité ainsi que les agents publics s'arrogent le pouvoir
d'arrêter et de détenir des personnes sans mandat et sans les
déférer devant le parquet dans le délai
réglementaire. Parfois, les mandats de justice, les exploits d'instance
et les autres démarches administratives et judiciaires sont même
monnayés pour faire avancer rapidement l'affaire.
Ignorant ou négligeant carrément les
procédures en vigueur, certains officiers de la police judiciaire
avaient des maisons de détention sous leur responsabilité
arrêtant ainsi abusivement n'importe où, n'importe quand et dans
n'importe quelles circonstances les personnes présumées coupables
d'infractions. Avec ou sans mandat d'arrêt, les policiers arrêtent
les gens sur la route, au marché et dans les maisons ; les jettent
en prison ou dans les cachots. Des centres de détention secrets ont
même été créés pour accueillir les
détenus (Mess des Officiers de l'Auditorat, résidences
officielles des autorités politico-administratives et militaires, amigo,
containers, puits, caves, prisons souterraines, etc.). Parfois, de paisibles
citoyens sont arrêtés pour des faits civils comme les dettes, les
conflits de parcelles ou fonciers qui sont transformés en infractions
pénales par les officiers du ministère public dans l'intention de
nuire. Ces arrestations sont suivies des traitements cruels, inhumains et
dégradants, des tortures par flagellation (coups et fouets ou de verge),
la privation des visites. La libération est subordonnée par le
paiement d'amendes forfaitaire, arbitrairement fixés et sans aucune
référence à la loi.
Voici, ci-après, quelques cas illustratifs
enregistrés et suivis par les organisations membres de la Ligue des
Droits de la personne dans la région des Grands-Lacs (L.D.G.L.) et ses
membres sur le terrain, dans le rapport des années 2000 et
2001 :
· Du 10 au 27 mars 2000, détention dans des
cachots de la Division Provinciale de la Sécurité et des
Renseignements (D.S.R.) à Bukavu de Monsieur MUKABO MUCHUKI J.-M. ;
ancien Coordinateur du R.C.D. à Uvira, soupçonné d'avoir
collaboré avec les ennemis du mouvement qu'il servait.
· Le 13 avril 2000, les services de
sécurité du R.C.D. ont arrêté et détenu
Monsieur BYAMUNGU LUFUNGULO, propriétaire de la pharmacie SODIPHAR au
motif qu'il soignerait les mayi-mayi et aurait mal parlé du mouvement et
collaboré à la concrétisation des journées
« villes mortes » à Bukavu en février
2000.
· Le 1er mai 2000, l'épouse de BAGULA
BUHENDWA, directeur de l'école primaire Pendu de Mushekere en Commune
Urbano-Rurale de KASHA, a été arbitrairement arrêtée
en lieu et place de son mari absent de la maison pour des raisons qui n'avaient
pas été élucidées.
· Le 23 juin 2000, monsieur Vicent, un sujet Hutu
rwandais travaillant dans les champs du chef de quartier de Mushenyi, Monsieur
KATEMBO et du Diacre MUKENDI Bin RUZINGI, a été
arrêté à quelques mètres du bureau de la
Croix-Rouge, antenne de Sange, territoire d'Uvira. Depuis lors, aucune
nouvelle de lui.
· Le 29 août 2000, Messieurs Gervais CHIRHALWIRA,
Paulin BAPOLISI, MUZALIYA WAKYEBWA et Madame Régine MUTIJIMA,
respectivement Vice-Président de la Société Civile du
Sud-Kivu, ancien directeur de Cabinet du Gouverneur de Province, directrice de
l'école primaire Mwangaza et responsable de l'ONG Action pour le
Développement Intégré de la Femme (ADIF) ont
été arrêtés à Bukavu et
déportés à Kisangani où ils ont été
gardés pendant plusieurs semaines à la prison d'Osio. Ils ont
été accusés d'avoir livré des informations
compromettantes à la presse étrangère après
l'attentant à la grenade qui a coûté la vie à 8
personnes lors de la Kermesse du 26 août 2000. Mais dans les couloirs
cette arrestation était consécutive à leur nomination par
le pouvoir de Kinshasa comme membres de l'Assemblée Constituante de la
R.D.C.
· Le 09 octobre 2000, 12 animateurs de la
Société Civile du Sud-Kivu, membres du Réseau des
Associations des droits de l'homme du Sud-Kivu (RADHOSKI) ont été
arrêtés par des militaires du R.C.D. conduits respectivement par
les Commandants FUNU et CHUMA à Bukavu. Au moment de leur arrestation,
les victimes ont été traînées dans la boue, battues
à coups de fouets et de bâtons avant d'être conduits,
certains au Camp SAIO et d'autres dans l'amigo de la D.S.R. Leurs biens parmi
lesquels un ordinateur, des appareils de communication, des montres ont
été emportés par les militaires du R.C.D.
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