B- Les motivations politiques et culturelles.
Selon M. Alain Titus BILOA TANG, les objectifs officiels de la
politique étrangère du Cameroun sont : consolidation des
amitiés traditionnelles, établissement de nouvelles
amitiés et diversification des partenaires de la coopération,
protection des intérêts et des nationaux du
50 Joseph MBENOH WUAKOH Economic development and
foreign policy in the developing state: the Cameroonian experience,
1960-1982, Thèse de Doctorat en Relations internationals,
Yaoundé, IRIC, Septembre 1990, PIII.
51 « ... Cameroon's domestic processes and foreign policy
are largely conditioned by the post colonial situation and (...) the domestic
political and economic structures not only «determine the amount of the
social effort which can be devoted to foreign policy, but also set limits to
possibilities of foreign policy» ». Ibid. P369.
Cameroun52. La réalisation des deux derniers
objectifs exige la contribution du Cameroun aux grandes causes de
l'humanité et assurer ainsi prestige, respect et considération au
pays dans le monde. C'est en tout cas ainsi que semblait l'entendre le chef de
l'Etat camerounais M. Paul BIYA dans son discours inaugural du 22 Janvier 1984
à l'issue de l'élection présidentielle du 14 Janvier 1984
en affirmant que << L'action diplomatique camerounaise se ressentira des
effets de la dynamique du renouveau national. Par une politique de
présence et de participation effective et réaliste, elle
s'efforcera de consolider toujours davantage l'indépendance et le
rayonnement du Cameroun, de faire toujours mieux entendre notre voix dans la
solution des grands problèmes qui confortent l'humanité de notre
temps et d'apporter ainsi une meilleure contribution à
l'édification d'un nouvel ordre international plus juste. >>.
Pourtant à l'opposé des discours officiels, et
malgré les nombreux instruments internationaux invitant et consacrant
une solidarité internationale en matière de
catastrophes53, le Cameroun est resté pratiquement muet et
invisible lors des catastrophes telles que le tsunami ayant touché
l'Asie du sud-est en Décembre 2004 ou plus récemment les ravages
causés par certains cyclones en Amérique et en Asie. Cette
<<absence >> pourrait s'expliquer d'abord par les principes
fondateurs de la politique étrangère du Cameroun notamment la
nonintervention dans les affaires relevant de la compétence nationale
des Etats qui se traduit par une réserve que M. Alain Titus BILOA TANG
qualifie << d'excessive >>. En effet selon lui, << la
participation relativement limitée aux évènements
continentaux, régionaux ou sousrégionaux (à un niveau
élevé) participerait de cette réserve ou prudence
trouvée par certains excessive, voir teintée de mépris ou
d'indifférence vis-à-vis des pays de la sous région
>>54. Ensuite la coordination imparfaite de la politique
étrangère du Cameroun doublée du système politique
présidentialiste constitue un frein dans un contexte de vitesse de
l'information et de l'évènement. En effet sous le
Président de la République dont la politique
étrangère constitue << le domaine réservé
>>, la coordination de celle-ci peut prêter à confusion
selon que l'on s'appuie sur le Décret N° 73/671 du 27 Octobre 1973
portant création d'un comité inter ministériel de
coordination des relations internationales placé sous l'autorité
du Secrétaire général de la Présidence de la
République, le Décret N° 2005\286 du 30 Juillet 2005 portant
organisation du Ministère des relations extérieures qui stipule
à son article 2 que << le Ministre des relations
extérieures a pour mission d'assurer la mise en oeuvre de la politique
des
52 Alain Titus BILOA TANG La politique
étrangère du Cameroun à l'ère de la transition vers
un << Nouvel ordre mondial>> (1990-2001) Une analyse à
travers le prisme des politiques publiques, Thèse de Doctorat de
3ème cycle en Relations internationales, Yaoundé,
IRIC, Janvier 2002, 204 P.
53 Voir supra Chapitre III, section I, paragraphe I,
A.
54 Alain Titus BILOA TANG La politique
étrangère du Cameroun à l'ère de la transition vers
un << Nouvel ordre mondial >> (1990-2001) Une analyse à
travers le prisme des politiques publiques, Op. Cit. P155
relations extérieures arrêtée par le
Président de la République » ou l'Instruction
générale relative à l'organisation du travail
gouvernemental de Juin 1998 qui stipule que le Premier ministre en sa
qualité de chef du Gouvernement << dirige l'action du Gouvernement
et en assure l'impulsion, l'animation, la coordination et le contrôle
». Cette confusion a pour conséquence de ralentir la
réaction de l'Etat camerounais en ce qui concerne la décision et
les modalités de soutien aux nations victimes de catastrophes.
La faible participation du Cameroun à la
solidarité internationale dans la gestion des catastrophes pourrait
également s'expliquer par la culture camerounaise et africaine. En
effet, dans le jeu diplomatique on ne saurait dissocier un Etat de la
civilisation à laquelle il appartient et qu'il exprime. La diplomatie
d'un Etat n'est pas indépendante de l'image qu'il donne de ses
ambitions, de ses intérêts, de sa force et de sa
résolution, ainsi que la représentation qu'il se fait de son
environnement, des partenaires ou adversaires qu'il y trouve. Sur ce plan les
Etats africains apparaissent comme des Etats qui ne se projettent que dans le
rôle d'<< assistés » et rarement dans celui d'
<<assistants ». Cela s'illustre par le fait que les textes sur la
protection civile au Cameroun ne parlent de l'aide internationale que dans la
perspective ou celle-ci se déploierait au Cameroun. Il n'est pas
envisagé l'hypothèse du Cameroun participant à cette aide
internationale ailleurs. Il faudrait tout de même remarquer que cette
approche est aussi le résultat des contraintes extérieures.
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