La recevabilité des requêtes devant la cour de justice de la CEMAC( Télécharger le fichier original )par Apollin KOAGNE ZOUAPET Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) - Master en Relations Internationales, option Contentieux International 2010 |
2- Le contrôle du comportement des Etats membresLe docteur Jean Kenfack explique l'échec des organisations d'intégration africaines par l'effritement de leur ordre juridique dû à la « vulnérabilité des institutions et de facteurs d'affaiblissement des actes juridiques communautaires et d'intégration. Cette situation est générale en Afrique, mais le cas de l'Afrique Centrale est plus caractéristique de la propension des sujets du droit communautaire ou de l'intégration économique à se soustraire à la contrainte des actes juridiques 300(*)». S'il est vrai que la CJC s'est toujours préoccupée de ne pas empiéter sur les compétences du juge interne et sur l'autonomie institutionnelle des Etats membres, par une interprétation indûment extensive de sa propre fonction, le souci de garantir le respect par les instruments communautaires devrait la conduire à donner leur plein effet aux moyens contentieux dont elle dispose pour soumettre à son contrôle, fût-ce de façon indirecte l'action des Etats membres dans l'application des normes communes. Sur ce plan, l'introduction dans l'ordre juridique communautaire du recours en manquement constitue une véritable avancée. Mais ce recours ne peut produire son plein effet que si la Cour interprète largement, mais rigoureusement, les conditions de recevabilité en élargissant par exemple la définition de l'objet même du manquement dans un sens favorable à une extension de son contrôle. La CJCE s'est efforcée de compenser les insuffisances de ce contrôle juridictionnel direct par le jeu combiné de l'effet direct et du recours préjudiciel en interprétation permettant, grâce à la collaboration du juge national et du juge communautaire, de sanctionner indirectement l'inobservation par les Etats membres des règles communes301(*). Ainsi, tout en insistant sur l'autonomie de deux voies de droit permettant de censurer la violation par les Etats de leurs obligations, le juge communautaire européen met l'accent sur leur complémentarité qui assure, grâce à un véritable concours d'actions judiciaires, un contrôle renforcé du respect par les autorités nationales des obligations imposées par l'application des traités. Le véritable contrôle du comportement des Etats membres appelle du juge CEMAC une politique jurisprudentielle double : devant son prétoire un assouplissement des conditions de recevabilité du recours en manquement et des autres voies susceptibles de lui permettre de contrôler le comportement des Etats membres en aval, mais déjà en amont inciter les juges nationaux à assouplir les conditions de recevabilité des actions fondées sur le droit communautaire et de se reconnaitre compétent pour statuer sur de telles actions302(*). C'est là l'une des stratégies jurisprudentielles du juge de Luxembourg. * 300 Kenfack Op. Cit p.366. * 301 Simon Op. Cit. pp.747-748. * 302 Chamegueu Op. Cit. |
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