UNIVERSITE DE YAOUNDE II
THE UNIVERSITY OF YAOUNDE II
INSTITUT DES RELATIONS INTERNATIONALES DU
CAMEROUN
B.P.: 1637 Yaoundé
Tel: 22 31 03 05
Fax: (237) 22 31 89 99
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INTERNATIONAL RELATIONS INSTITUTE OF
CAMEROUN
P.O Box: 1637 Yaoundé
Tel: 22 31 03 05
E-Mail: iric@uycdc.unicet.cm
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LA RECEVABILITE DES REQUETES DEVANT
LA COUR DE JUSTICE DE LA CEMAC.
Mémoire présenté et soutenu
publiquement en vue de l'obtention
du Master en Relations internationales,
Option : Contentieux
international
Par :
M. KOAGNE ZOUAPET Apollin
Maître en Droit
Sous la direction de :
Dr KENFACK Jean
Chargé de Cours à l'IRIC
Sous la supervision de :
Pr. OLINGA Alain Didier
Maître de Conférence en Droit public
Chef de département de Droit international à
l'IRIC
Année académique
2009-2010
DEDICACE
A vous qui avez toujours crû en moi et oeuvré
à ce que j'aie le nécessaire pour travailler sereinement :
Megne Julienne, Ngoumdjou Jeanne, Kengne Alphonse, Djoumessi Lydie
Raïssa.
REMERCIEMENTS
Nous adressons nos sincères remerciements :
- Au professeur Alain Didier Olinga, Chef de
département de droit international à l'IRIC, notre
« véritable maitre » académique, pour avoir
accepté de superviser ce travail. Sa grande rigueur et son exigence
scientifique auront été pour nous tout au long de notre
séjour à l'IRIC des exemples et défis à relever.
- Au docteur Jean Kenfack, enseignant
à l'IRIC, pour avoir accepté de diriger ce travail. Ses conseils,
orientations, recommandations et avis gracieusement prodigués, tant
à l'endroit de l'étudiant que de l'individu, auront largement
contribué faire de nous le juriste et l'homme que nous sommes
aujourd'hui.
- Aux professeurs Narcisse Mouelle Kombi et
Jean Louis Atangana Amougou, respectivement directeur et
directeur adjoint chargé des études, et à travers eux
à tout le personnel de l'IRIC pour le travail qu'ils abattent au
quotidien afin que les étudiants de l'IRIC travaillent dans la
sérénité.
- A tous les enseignants de l'IRIC qui ont guidé avec
passion et abnégation nos pas dans l'univers scientifique des Relations
internationales et du Contentieux international.
- A madame Félicité Owona
Mfegue, enseignante à l'IRIC, pour son écoute, sa
disponibilité et ses conseils pour tous nos travaux à l'IRIC.
- Au Père Claude Lah et aux enfants de
l'Orphelinat « La Bonne Case » à Bangangté
pour leurs incessants encouragements. Leur optimisme et leur foi en toutes
circonstances auront été pour nous une source
supplémentaire de motivation dans les moments de
découragement.
- A messieurs Rigobert Fodjo, Albert
Kamsu, Sébastien Ndeffo, Emmanuel
Takoutchou, Luc Siga pour leur soutien multiforme et
leurs encouragements.
- A mes frères et colocataires, Armand
Silatcha et Guy Serge Kontchoupe avec qui je partage
mon quotidien et qui ont toujours accordé la plus grande importance
à mes études.
- A tous mes camarades de promotion, tout
particulièrement Arsène Singa Yonga, pour les
encouragements, le climat de franche camaraderie et la saine émulation
durant nos années d'études.
- A tous ceux que je ne peux nommer ici individuellement, et
qui ont tous oeuvré à faciliter notre séjour et nous ont
accompagné tout au long de nos études.
Que tous daignent trouver ici l'expression de notre totale et
infinie gratitude.LISTE DES ACRONYMES ET ABREVIATIONS
AFDI : Annuaire Français de
Droit International.
Aff. : Affaire
BDEAC : Banque de développement
des Etats de l'Afrique Centrale.
BEAC : Banque des Etats de
l'Afrique Centrale
c/ : contre
CE : Communauté
Européenne
CEBEVIRHA. : Communauté
Economique du Bétail, de la Viande et des Ressources Halieutiques
CECA : Communauté
Européenne du Charbon et de l'Acier
CEE : Communauté
Economique Européenne
CEEA : Communauté
Européenne de l'Energie Atomique.
CEEAC : Communauté
Economique des Etats de l'Afrique Centrale
CEMAC : Communauté
Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale
CIJ : Cour Internationale de
Justice
CJ/CJ.CEMAC : Chambre Judiciaire
de la Cour de Justice de la C.E.M.A.C.
CJC : Cour de Justice Communautaire
de la CEMAC.
CJCE : Cour de Justice des
Communautés Européennes
COBAC : Commission Bancaire de
l'Afrique Centrale
Convention CJC : Convention
régissant la Cour de Justice Communautaire.
CPJI : Cour Permanente de Justice
Internationale.
dir. : Sous la direction de
Ibid. : Même auteur,
même texte
IRIC : Institut des Relations
Internationales du Cameroun.
ISSEA : Institut Sous
régional de Statistiques et d'Economie Appliquée
ISTA : Institut Sous
régional multisectoriel de Technologie Appliquée, de
planification et d'évaluation des projets
OHADA : Organisation pour
l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires
OIT : Organisation Internationale du
Travail
ONU : Organisation des Nations
Unies
Op. Cit. : Opere citare /
cité plus haut
Ord. : Ordonnance.
p. : Page
pp. : Pages
PUF : Presses Universitaires de
France.
RCADI : Recueil de Cours de
l'Académie de Droit International.
RGDIP : Revue Générale
de Droit International Public
RSA : Rapport de Stage
Académique.
SDN : Société Des
Nations
SFDI : Société
française de Droit International
TANU : Tribunal Administratif des
Nations Unies
TAOIT : Tribunal Administratif de
l'Organisation Internationale du Travail
TPICE : Tribunal de
Première Instance des Communautés Européennes
UDEAC : Union Douanière et
Economique de l'Afrique Centrale
UE : Union Européenne
UEAC : Union Economique de
l'Afrique Centrale
UMAC : Union Monétaire de
l'Afrique Centrale
UNESCO : United Nations for Education,
Science and Culture Organization (Organisation des Nations unies pour
l'éducation, la science et la culture).
Vol. : Volume.
LISTE DES ANNEXES
1- Convention régissant la Cour de justice
communautaire de la CEMAC.
2- Tableau récapitulatif de l'issue des requêtes
devant la Chambre judiciaire de la CEMAC, du 13 décembre 2001 au 19 juin
2008.
3- Tableau récapitulatif des principales causes
d'irrecevabilité des requêtes devant la Chambre judiciaire de la
CEMAC du 13 décembre 2001 au 19 juin 2008.
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIERE PARTIE : LA RECEVABILITE, UNE
EXIGENCE POUR L'EXAMEN AU FOND DE LA REQUETE PAR LE JUGE DE LA CEMAC
13
CHAPITRE I : LES CONDITIONS DE
RECEVABILITE
15
SECTION I : LES CONDITIONS RELATIVES AU
REQUERANT.
15
SECTION II : LES CONDITIONS RELATIVES A LA
REQUETE.
28
CHAPITRE II : L'EXAMEN DE LA
RECEVABILITE
43
SECTION I : LE REGIME DE LA RECEVABILITE DES
REQUETES.
43
SECTION II : LE JUGEMENT SUR LA RECEVABILITE
DE LA REQUETE.
48
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
55
DEUXIEME PARTIE : LA RECEVABILITE DES
REQUETES, UN INSTRUMENT AU SERVICE DE LA POLITIQUE JURISPRUDENTIELLE DE LA COUR
DE JUSTICE COMMUNAUTAIRE.
56
CHAPITRE III : UNE POLITIQUE INITIALE
RESTRICTIVE DE L'ACCES AU JUGE COMMUNAUTAIRE
58
SECTION I : UNE RIGUEUR TEXTUELLE
DESEQUILIBREE.
58
SECTION II : UNE RIGIDE INTERPRETATION
PRETORIENNE DES CONDITIONS DE RECEVABILITE.
69
CHAPITRE IV : LA TENDANCE NAISSANTE A
UNE LIBERALISATION DE L'ACCES AU JUGE COMMUNAUTAIRE.
80
SECTION I : LA « PRUDENTE
HARDIESSE » DU JUGE CEMAC DANS L'EXAMEN DE LA RECEVABILITE DES
REQUETES.
80
SECTION II- POUR UNE POLITIQUE JURISPRUDENTIELLE
PLUS LIBERALE DE LA COUR DANS L'APPRECIATION DE LA RECEVABILITE DES
REQUETES
88
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
101
CONCLUSION GENERALE
102
ANNEXES
106
BIBLIOGRAPHIE
121
TABLE DES MATIERES
131
RESUME
La CEMAC est l'aboutissement d'un processus de relance de la
construction communautaire de l'Afrique centrale, amorcée à la
suite de la crise de l'UDEAC. Cette Communauté qui se veut une
« Communauté de droit » comporte une cour de justice
communautaire dont la mission essentielle, selon les termes du Traité
révisé de Yaoundé du 25 juin 2008, est le contrôle
juridictionnel des activités de la Communauté. Au delà des
conditions d'accès au juge de la CEMAC, le présent travail se
donne pour but d'évaluer l'efficacité de l'action du juge
communautaire telle qu'elle résulte de l'interprétation et
l'application des conditions de recevabilité.
Adoptant une triple démarche descriptive, analytique et
comparative, la présente étude s'ouvre sur la présentation
de la recevabilité comme une exigence procédurale requise pour
l'examen de la requête par le juge de N'djamena. Il en ressort que les
conditions de recevabilité des requêtes devant le juge
communautaire se rapprochent en bien de points des règles
appliquées devant les juridictions administratives nationales tout comme
la démarche suivie par le juge dans l'examen des critères de
recevabilité des recours.
Le travail révèle dans une seconde partie la
politique jurisprudentielle du juge communautaire telle qu'elle apparaît
dans l'examen de la recevabilité : une politique originaire
critiquée et critiquable, restrictive de l'accès à son
prétoire à travers une application rigoureuse des règles
de recevabilité. Cette politique, expression d'une justice plus
interétatique que supra étatique, est tempérée tout
de même par l'émergence d'une lecture plus libérale de
certaines règles à travers une interprétation
téléologique, et la prise en compte des exigences du
procès équitable et d'une bonne administration de la justice.
Cette seconde démarche du juge de la CEMAC s'avère salutaire dans
la perspective de l'édification de la « Communauté de
droit » proclamée.
ABSTRACT
CEMAC is the outcome of a process that originally sought to
kick-start the building of the Central African regional community system, a
process begun following the crises that rocked UDEAC. This regional community,
concerned with being seen as one based on the rule of law, comprises amongst
its institutions, a community court essentially charged with the judicial
control of the regional body. Apart from the procedural conditions for seizing
the CEMAC Court, this work seeks to evaluate the effectiveness of the actions
of the CEMAC judge as a result of the interpretation and the application of the
conditions for admissibility of a case.
Based on a triple approach, viz; descriptive, analytic and
comparative, this work opens with the presentation of the conditions for the
admissibility of a case as a procedural exigency before a case is heard by the
judge of the N'djamena court. We find that the conditions for admissibility of
a matter before the Community judge resemble the procedure before domestic
administrative courts in many respects, much as the procedure followed by the
judge in the examination of the admissibility of a case.
The study dwells in its second part on the case-law policy of
the CEMAC community judge as it appears in the examination of the admissibility
of a case: a policy that is quite original but debatable and debated, a policy
that restricts access to the Court through a rigorous application of the rules
of admissibility; but tempered by the emergence of a more liberal
interpretation of the conditions for admissibility; a more teleological
understanding and the taking into consideration of due process.
This, within the perspective of the edification of a regional
community based on the rule of law as proclaimed.
INTRODUCTION GENERALE
I-
CONTEXTE ET OBJET DE L'ETUDE
Née sur les cendres de l'Union douanière et
économique de l'Afrique centrale (UDEAC), la Communauté
économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC)
après une longue période de maturation a pris son envol le 05
février 1998 à l'issue du trente troisième sommet des
chefs d'Etat de l'UDEAC avec pour mission essentielle selon l'article 2 du
Traité révisé instituant la CEMAC
« de promouvoir la paix et le
développement harmonieux des Etats membres, dans le cadre de
l'institution de deux unions : une Union Economique et une Union
Monétaire. Dans chacun de ces deux domaines, les Etats membres entendent
passer d'une situation de coopération, qui existe déjà
entre eux, à une situation d'union susceptible de parachever le
processus d'intégration économique et
monétaire ».
Cette évolution proclamée des Etats de l'Afrique
centrale s'est traduite par la mise en place d'une Cour de justice
communautaire, corollaire indispensable d'une communauté fondée
sur le droit et qui ne peut pleinement se réaliser que dans le seul
respect du droit et des obligations incombant aux Etats membres1(*). Création du droit et
reposant sur lui pour assurer son efficacité, l'ordre juridique
communautaire est essentiellement créateur de droit. C'est un ordre qui
assure un haut degré de développement des règles
normatives et du respect de ce droit par une institution
juridictionnelle2(*).
Située à N'djamena au Tchad, la Cour de justice
communautaire actuelle de la CEMAC est issue de la reforme introduite le 25
juin 2008 par le Traité révisé instituant la dite
Communauté, qui à son article 10 à la place de l'ancienne
Cour de justice de la CEMAC bicamérale, énumère deux
nouvelles institutions, la Cour de justice et la Cour des comptes.
Héritant pour l'essentiel des attributions, étoffées tout
de même par l'introduction de nouvelles voies de droit, de l'ancienne
Chambre judiciaire de la Cour de justice de la CEMAC, la CJC assure selon les
termes des articles 46 et 48 alinéa 1 du Traité instituant la
CEMAC3(*) le contrôle
juridictionnel des activités de la Communauté.
Concrètement, la Cour est chargée d'assurer le respect des
dispositions des traités de la CEMAC et des conventions
subséquentes par les Etats membres, les institutions et les organes de
la CEMAC, de réaliser par ses décisions l'harmonisation des
jurisprudences dans les matières relevant du domaine des traités,
et de contribuer par ses avis à l'harmonisation des législations
nationales des Etats membres dans ces matières et enfin de régler
les contestations relatives à sa compétence4(*). Pour exercer ces
compétences, la Cour dispose d'une triple fonction juridictionnelle,
consultative et d'administration des arbitrages dans les matières
relevant du droit communautaire de la CEMAC5(*).
La cour comme son homologue de la CJCE a été
conçue suivant des principes différents de ceux qui
régissent les juridictions internationales traditionnelles6(*). Alors que ces dernières
ne peuvent généralement être saisies qu'en vertu d'un
accord des parties, la juridiction de la CJC est obligatoire7(*) ; il faut entendre par
là d'abord que les Etats peuvent être attraits devant elle contre
leur gré. Par ailleurs, la juridiction communautaire est contraignante
dans le sens que ses décisions s'imposent non seulement aux Etats
membres, mais dans les Etats membres ; ses jugements sont
exécutoires dans l'ordre interne de ceux-ci. Enfin, la Cour ne se
contente pas de trancher les différends qui opposent les Etats entre eux
mais statue également sur certains litiges mettant aux prises un
particulier et une institution communautaire ou un Etat et une institution
communautaire ou encore entre deux institutions communautaires entre
elles8(*). Comme
l'écrit le professeur Louis Cartou,
« la juridiction internationale est à
l'image du droit international. Le droit international entend imposer ses
règles à des sujets dont le caractère spécifique
est la « souveraineté », c'est-à-dire le
pouvoir de ne se soumettre qu'à des obligations librement et
discrétionnairement acceptées (au moins en apparence). De
même, la juridiction internationale est une juridiction qui ne juge que
des justiciables qui acceptent volontairement de s'y soumettre et la
compétence obligatoire des juges internationaux est exceptionnelle. Au
contraire, la juridiction interne poursuit ses justiciables, les saisit, les
juge sans leur consentement (même si, pour certains d'entre eux, elle
peut se révéler impuissante à leur imposer
l'exécution : ainsi, si l'Etat soumis au contrôle des juges
internes exécute ses condamnations, c'est volontairement car personne ne
pourrait le lui imposer puisqu'il détient le monopole de la force
publique). La Cour de justice n'est pas une juridiction internationale, elle
est la juridiction interne de la Communauté, conçue à
l'image des juridictions étatiques »9(*).
En effet, de nombreux traits rapprochent la CJC des
juridictions internes et l'éloignant ainsi des juridictions
classiques : sa compétence n'a pas besoin d'être
acceptée par les Etats membres pour être obligatoire, une absence
d'obligations d'épuisement de recours internes, elle ne peut sous peine
de déni de justice refuser de statuer, l'accès à la
juridiction communautaire n'est pas l'exclusivité des Etats, la Cour ne
comprend pas de juge ad hoc lors des procédures, les opinions
individuelles ou dissidentes ne sont pas prévues et enfin ses
arrêts ont non seulement force obligatoire mais aussi force
exécutoire dans les Etats membres sans aucun exequatur
préalable10(*).
Certes, il ne s'agit pas d'une juridiction fédérale
hiérarchiquement supérieure aux juridictions des Etats membres,
mais l'importance donnée au contentieux de la légalité,
ses rapports directs avec les instances nationales et le rôle reconnu aux
particuliers en font la juridiction interne d'une communauté d'Etats
engagés dans un processus d'intégration.
Si l'existence de la Cour est le signe et la garantie du
rôle du droit dans l'ordre juridique communautaire et s'avère
être un vecteur fondamental du renforcement de la communauté du
droit, elle est surtout la matérialisation de l'attachement des Etats
membres de la CEMAC « aux principes de démocratie, des
droits de l'Homme, de l'Etat de droit, de la bonne gouvernance, du dialogue
social et des questions de genre» tel que proclamé au
préambule du Traité instituant la CEMAC. Cette
« communauté de droit » selon l'expression dont la
paternité est attribuée á Walter Hallstein, premier
président de la Communauté économique
européenne11(*), se
veut à la fois l'expression de la réalité du
système communautaire et la manifestation de l'aspiration à un
développement croissant du rôle du droit au sein de l'ordre
juridique communautaire. Mais l'expression signifie également que les
particuliers disposent, comme dans un « Etat de droit » de
garanties juridictionnelles efficaces pour faire respecter les droits qu'ils
tirent des textes communautaires. Mais parce que le juge communautaire12(*) comme le juge administratif en
droit interne ne s'autosaisit qu'exceptionnellement, il ne peut exercer ses
pouvoirs que si un requérant le lui demande, que s'il a
été saisi et bien saisi. C'est dans cette logique que s'inscrit
notre sujet d'étude « La recevabilité des
requêtes devant la Cour de justice Communautaire de la
CEMAC. »
II-
CLARIFICATIONS CONCEPTUELLES
1- Recevabilité
La recevabilité se présente selon le professeur
Witenberg en droit international arbitral sous un double aspect : elle est
tout d'abord l'ensemble des moyens par lesquels le défendeur
dénie au demandeur le droit d'agir ou se prévaut de
l'inobservation des règles de formes ou délais qui pouvaient
s'imposer à cette action. Ensuite, dans son second aspect
« la recevabilité n'est plus rien que la forme, la
méthode, applicable au gré du défendeur aux moyens qu'il
fait valoir »13(*). Cette définition semble ramener la
recevabilité à l'exception d'irrecevabilité
c'est-à-dire un moyen excipé par le défendeur tendant
à obtenir que le juge compétent pour connaître d'une
affaire ne procède pas à l'examen au fond pour le motif qu'une
condition préalable à cet examen fait défaut14(*).
Le professeur Santulli tente une approche distinctive en
démarquant la recevabilité de la compétence :
« la compétence est la catégorie
des différends dont le tribunal peut connaître, alors que la
recevabilité détermine la possibilité d'exercer ses
pouvoirs juridictionnels sur le différend qui lui est soumis (cette
possibilité étant naturellement limitée à la
catégorie de différends pour laquelle le tribunal a
compétence). La distinction tient donc à la différence
entre compétence et pouvoir. Distingués, les deux concepts sont
néanmoins étroitement liés. En particulier si la
juridiction est incompétente, l'action portée devant elle est
nécessairement irrecevable, la juridiction (comme tout organe) ne
pouvant pas exercer ses pouvoirs en dehors de la sphère qui lui est
attribuée car elle en est, par définition la
limite »15(*).
Pour avoir une définition positive, il faut faire appel
à celle du professeur Basdevant pour qui la recevabilité s'entend
comme la «qualité que doit présenter une demande, une
pièce de procédure ou une preuve pour qu'elle soit
examinée par l'autorité à laquelle elle est
soumise »16(*). S'agissant de l'action en justice, elle signifie
qu'il n'existe aucun obstacle juridique à l'examen au fond17(*). Sur un plan purement
processuel on peut définir la recevabilité comme le moment, le
stade processuel au cours duquel l'on s'assure que la requête
présente ou satisfait aux exigences de forme et de substance qui la
rendent apte à faire l'objet d'un examen au fond.
2- Requête
Plus simple est la définition de la requête
proposée par le Dictionnaire de droit international
public : « acte de procédure par lequel une
personne privée (requête individuelle) ou un Etat (requête
étatique) introduit une instance devant un organe
quasi-judiciaire »18(*). Bien que l'on se trouve devant une institution
totalement judiciaire, la requête est assurément l'un des modes de
saisine de la CJC comme elle l'était pour la Chambre judiciaire de
l'ancienne Cour de justice de la CEMAC. L'article 13 de l'Acte additionnel
N° 4/00/CEMAC/-041-CCE-CJ-02 portant règles de procédure de
la Chambre judiciaire de la CEMAC énonçait en effet clairement
à son alinéa 1 :
« La chambre est saisie, soit par requête
d'un Etat membre, du secrétaire exécutif, d'une institution, d'un
organe de la CEMAC et de toute personne physique ou morale justifiant d'un
intérêt certain et légitime, soit par notification d'un
compromis, soit par renvoi des juridictions nationales ou des organismes
à fonction juridictionnelle ».
Même si la Chambre entretenait le doute dans sa
jurisprudence en parlant tantôt de lettre19(*), de requête20(*) ou même vaguement de demande d'avis21(*), c'est bien par requête
que la Cour est saisie des demandes d'avis si l'on se réfère
à l'article 102 de l'Acte additionnel portant règles de
procédure de la Chambre judiciaire de la CEMAC qui précisait
« dès réception de la
requête... » ou à l'article 103 du même
texte : « le juge rapporteur, peut en cas de besoin,
communiquer la requête aux Etats... ». Dans l'attente du
Règlement de procédure de la CJC, on ne peut que regretter le
mutisme conservé sur ce point par l'article 34 de la Convention CJC qui
traite des demandes d'avis devant la Cour. Mais de façon
générale, la saisine de la Cour par requête apparait
clairement à la lecture des articles 12, 23, 24, 27, 31 et 32 de la
Convention CJC.
III-
INTERET DE L'ETUDE
La réflexion que nous entendons mener revêt un
triple intérêt scientifique, communautaire et personnel.
Sur le plan scientifique, peu d'études ont
été faites sur la CJC, ses techniques et méthodes de
travail. En effet, contrairement à sa consoeur européenne, la
CJCE, la CJC est quasi inconnue, oubliée par les chercheurs et la
doctrine. Il serait souhaitable que les chercheurs se tournent de plus en plus
vers de telles études dans le but d'expliquer, d'éclaircir et de
vulgariser le travail de la Cour afin de lui permettre de s'améliorer et
de mener à bien sa tâche au sein de la Communauté. C'est en
cela qu'il a paru intéressant de mener une étude dans un domaine
et sur une question encore peu explorée par la science.
L'intérêt communautaire est tout aussi manifeste.
Suivant le rapport d'activités de la première étape du
processus d'intégration économique de la CEMAC
(1999-2004) « on note un faible ancrage, pour ne pas dire
l'intérêt insuffisant accordé à la politique
d'intégration économique sous régionale car bien que les
Etats signent les traités et autres textes, et que les organes
communautaires adoptent au cours des sessions annuelles, nombre d'actes ont
encore une emprise insuffisante sur les programmes et politiques mis en oeuvre
dans la majorité des Etats membres, d'où la
nécessité de faire intervenir le juge pour veiller à
l'effectivité des engagements pris par les Etats. Les entorses à
l'application des codes et règlements communautaires, l'observation
insuffisante des règles d'origine et des dispositions communautaires
constituent des dérives dangereuses qui peuvent entraîner
l'effondrement de tout l'édifice en
construction »22(*). Le rôle de la Cour de justice est susceptible
d'influencer considérablement la manière dont les citoyens
perçoivent la construction communautaire et la légitimité
qu'ils lui accordent. Une meilleure connaissance de la Cour par les
« citoyens communautaires » et des modes d'accès
à celle-ci ainsi que de son travail contribuera sans nul doute à
une présence mieux ressentie du juge auprès des citoyens et une
augmentation du nombre de saisine de la Cour qui reste jusqu'ici relativement
bas. De plus, comme signalé plus haut, la juridiction de N'djamena ne
s'autosaisissant qu'exceptionnellement, la sauvegarde de l'ordre juridique
communautaire et l'exercice de son pouvoir juridictionnel est dépendante
de l'accessibilité à son prétoire par les justiciables.
Le choix de ce thème est enfin l'expression de deux
aspirations en rapport avec notre formation : d'abord la volonté de
traiter d'une question technique apte à nous faire maitriser les
concepts et mécanismes juridiques du contentieux international ;
ensuite, le souci de faire oeuvre utile en participant à
l'édification et à la dynamisation d'une communauté
naissante. Ce souci est soutenu par la volonté d'une
spécialisation dans un domaine en pleine expansion du droit des gens et
susceptible de nous offrir des perspectives professionnelles.
IV-
REVUE DE LA LITTERATURE
Comme nous l'avons précédemment relevé,
la CJC a fait l'objet de peu d'études et d'écrits, ce qui se
traduit par le déficit de littérature qui existe sur l'objet de
notre étude. Toutefois, nous avons pu avoir accès à
quelques ouvrages en dépit de leur caractère soit trop
général, soit très parcellaire.
Le premier ouvrage est le Droit du contentieux
international de Carlo Santulli23(*). Comme son intitulé le laisse deviner, cet
ouvrage revisite la quasi-totalité des règles du contentieux
international et examine les différentes techniques ainsi que les
mécanismes usuels devant les juridictions internationales. Sur la
recevabilité, après l'avoir distingué de la
compétence, l'auteur la présente comme l'objet de la juridiction
dont elle délimite à rebours le pouvoir de juger. Le concept de
recevabilité s'identifie donc ainsi comme les conditions d'exercice du
pouvoir juridictionnel à travers les conditions de recevabilité
générales ou spéciales qui sont à la fois les
limites du pouvoir de juger et l'aptitude à exercer le pouvoir
juridictionnel. Si l'ouvrage du professeur Santulli pose sans doute les bases
utiles à la compréhension du concept de recevabilité
devant les juridictions internationales, son caractère
général en fait surtout un ouvrage théorique dont les
énoncés n'étaient pas toujours confirmés par la
pratique de l'ancienne Cour de justice de la CEMAC et aujourd'hui de la CJC.
Bien que plus ancien, l'ouvrage de Jean-Denis Mouton et
Christophe Soulard, La Cour de justice des communautés
européennes24(*), semble plus intéressant en ce sens qu'il
porte sur une institution qui a sans doute inspiré et servi de
modèle aux créateurs de la CJC. Dans une approche plus
descriptive qu'analytique, l'ouvrage après avoir exposé
l'organisation et le fonctionnement de la CJCE, la présente comme
régulatrice du droit communautaire et gardienne des droits de l'homme.
Ce rôle l'a conduit parfois à adopter une attitude souple envers
les requérants dans une perspective de protection des droits de l'homme
notamment de l'accès au juge. Toutefois, comme le relèvent
à juste titre ces auteurs, la construction européenne est le
fruit d'une évolution et d'une histoire qui influent le juge
communautaire dans l'exercice de sa tâche. Le contexte spécifique
de travail du juge de la CEMAC ne permet donc pas une transposition du
comportement européen en Afrique centrale.
Plus proche de notre champ de travail est le mémoire de
monsieur Gabriel Marie Chamegueu sur le thème Le contrôle
juridictionnel des activités de la CEMAC25(*). S'interrogeant sur l'institution d'un
système judiciaire de contrôle des activités communautaires
comme avancée dans l'intégration en Afrique centrale ou bien
comme simple mimétisme conforme au phénomène
général de juridictionnalisation des relations internationales,
l'auteur examine la singularité de la justice communautaire dans
l'espace CEMAC face au modèle référentiel européen
et l'ancrage processuel de la CEMAC dans le modèle européen. Il
constate d'abord la méconnaissance par les citoyens des pays membres du
droit communautaire CEMAC.
« Les raisons de cette méconnaissance ne
sont pas seulement juridiques, mais sont également
et davantage techniques et sociologiques et tiennent en
grande partie aux limites des citoyens à
assimiler une juridicisation (sic) mouvante de la
société sujette à une
« prolifération normative
cancéreuse » ».26(*)
Les règles de procédure devant les deux Chambres
de la Cour de Justice de la CEMAC étaient inspirées d'une part
des règles applicables devant la CJCE et d'autre part des règles
applicables devant les juridictions financières tant internes à
l'image des Cours et Chambres des Comptes nationales, que communautaires
à l'instar des Cours des Comptes européenne et de l'UEMOA
remarque-il. Monsieur Chamegueu note le double aspect tant politique que
juridictionnel de l'ancienne Cour et fort probablement de la CJC ; double
aspect qui expliquerait peut-être la « prudente hardiesse en
matière de recevabilité des recours des personnes
privées », qui ne l'empêche pas de conclure à
l'effectivité du droit d'accès au juge communautaire à
travers une saisine ouverte et une instruction garante des droits de la
défense. L'auteur conclut son étude en remarquant que s'il ne
fait aucun doute que le juge est le meilleur garant de l'effectivité du
droit communautaire, il est cependant permis de croire que le succès de
l'intégration sous régionale en chantier en Afrique centrale
dépend plus de la volonté politique des Etats membres, premiers
acteurs du processus d'intégration, que de la hardiesse des juges.
C'est en amont du travail accompli par le dernier auteur que
nous pouvons situer notre travail de recherche. En effet, le contrôle
juridictionnel des activités de la CEMAC qu'effectue la CJC n'est
possible que si elle a été valablement saisie.
V-
DELIMITATION SPATIO-TEMPORELLE
A l'évidence notre travail portera sur la Cour de
justice communautaire de la CEMAC telle qu'instituée par le
Traité révisé de Yaoundé du 25 juin 2008.
Toutefois, notre travail s'effectuant pendant une période transitoire
où la CJC n'est pas encore pleinement active et reste encore en attente
de certains textes tels le Règlement de procédure, nous nous
appuierons à la fois sur le projeté et l'existant.
Concrètement, notre travail portera à la fois sur la Chambre
judiciaire de l'ex Cour, ancêtre de l'actuelle Cour qui devrait
s'inspirer abondamment de son règlement et de sa pratique, et sur les
innovations et réformes que présagent et révèlent
autant le Traité révisé que la Convention
régissant la nouvelle CJC.
VI-
PROBLEMATIQUE
Les conditions d'accès au juge et l'observation des
règles de recours sont au coeur de la science du droit et de
l'effectivité de la règle de droit. Paraphrasant Kelsen27(*), l'on pourrait écrire
que la question du mode d'introduction de la procédure devant le juge
communautaire a une importance primordiale : c'est de sa solution que
dépend principalement la mesure dans laquelle la CJC pourra remplir sa
mission de garant de l'ordre juridique communautaire. Ainsi, au-delà des
questions telles les conditions d'accès au juge de la CEMAC, il s'agit
de mesurer l'efficacité de l'action du juge communautaire. Quelles sont
les conditions d'accès à la Cour de justice communautaire de la
CEMAC ? Quelles sont les qualités que doit présenter une
demande pour être examinée par le juge communautaire ?
L'application de ces conditions par la Cour permet-elle à celle-ci de
mener efficacement et effectivement la mission qui lui a été
assignée par les textes organiques de la Communauté ? De
façon plus spécifique, « l'immédiateté
descendante », c'est-à-dire l'existence des règles
communautaires créant directement à l'égard des individus
des obligations et des droits, est-elle complétée par une
« immédiateté ascendante » dont la
signification particulière serait ici la possibilité pour les
titulaires de ces droits d'engager une action communautaire en vue d'obtenir
leur respect par les Etats membres ?28(*)
Ce questionnement nous permettra en réalité
d'examiner l'objet de la juridiction de la CJC c'est-à-dire, suivant
l'approche du professeur Santulli29(*), les conditions d'exercice du pouvoir juridictionnel
du juge de la CEMAC et son aptitude à l'exercer. Ce double
questionnement est important, car il permet d'évaluer les textes
appliqués et de pouvoir envisager les éventuelles adaptations
nécessaires.
VII-
HYPOTHESES
Notre postulat de départ ici est que les juges
communautaires ressortissants des pays membres qui les ont
désignés auront tendance à reproduire au niveau
communautaire, les travers de la justice administrative interne. Ces travers
s'illustreraient par une pusillanimité à l'égard des Etats
et des institutions communautaires se traduisant par une application et une
interprétation rigoureuse des règles de recevabilité de
nature à restreindre l'accès du prétoire communautaire
aux particuliers et à lui éviter de prendre position dans les
différends entre Etats.
Cette hypothèse principale est soutenue par une seconde
hypothèse dédoublée en deux alternatives tirées de
l'article 20 de la Convention régissant la CJC. Suivant l'alinéa
2 de cet article, « les membres de la Cour de justice exercent leurs
fonctions en toute indépendance, dans l'intérêt de la
Communauté »30(*). L'intérêt général de la
Communauté appelle la Cour soit à interpréter de
façon souple les conditions de recevabilité pour se saisir des
questions qu'elle juge importantes afin d'y apporter son éclairage et
ainsi préserver le droit communautaire, soit à avoir une attitude
plus rigide de l'examen de recevabilité de manière à
limiter les recours contre la Communauté.
VIII-
METHODE DE TRAVAIL
Dans le cadre de cette réflexion dont l'ambition est de
faire l'évaluation de l'examen de la recevabilité par le juge
CEMAC, nous procéderons à une triple démarche :
descriptive, analytique et comparative.
Sur le plan de l'analyse théorique, en nous appuyant
sur la philosophie du droit (les raisons qui justifient l'élaboration du
droit) et le dogmatisme juridique (le droit tel que
légiféré), nous ferons recours à la méthode
objectiviste d'essence sociologique selon laquelle le droit devrait être
le reflet des conceptions sociales dominantes.
L'observation consistera à travers la casuistique
juridique, ici principalement la jurisprudence de la défunte Chambre
judiciaire de la Cour de justice de la CEMAC, à recueillir les
données nécessaires afin d'évaluer l'adaptation du droit
à la société (sociologie) juridique. Parce que
« la comparaison est (...) de nature à libérer le
raisonnement juridique de certains carcans conceptuels sclérosants en
ouvrant la porte à d'autres grilles de lecture »31(*), nous ferons sans cesse
recours à la pratique d'autres juridictions internationales dans les
domaines proches de ceux de la CJC notamment le contentieux de la fonction
publique, mais surtout à la CJCE dont l'antériorité,
assurément gage d'une plus grande expérience, nous permettra
d'envisager les recours nouvellement ouverts devant le juge de la CEMAC et
inconnus de la Chambre judiciaire . Il convient sans nul doute de confesser
dès ici la portée volontairement subversive de cette approche au
sens où l'entendait madame Haratia Muir-Watt :
« le message subversif est donc fort
simple : regardons ailleurs, comparons, interrogeons-nous sur les
alternatives- pour élargir la perspective traditionnelle, enrichir le
discours juridique et lutter contre les habitudes de pensée
sclérosante. Ce n'est qu'au prix de cet enrichissement que l'on peut
comprendre l'autre, et, à terme, se comprendre
soi-même »32(*).
IX-
ESQUISSE DE PLAN
L'approche de cette étude consistera à concilier
tout au long de notre travail tant l'approche comparative que descriptive avant
de se livrer à un véritable examen de la pratique ainsi
dégagée. Ainsi, la première partie de notre analyse
portera sur les exigences textuelles et jurisprudentielles des
prétentions des requérants devant la Cour de justice de la CEMAC
avant dans une seconde partie de se pencher sur la politique jurisprudentielle
de la Cour telle qu'elle se dégage.
PREMIERE PARTIE : LA RECEVABILITE, UNE EXIGENCE
POUR L'EXAMEN AU FOND DE LA REQUETE PAR LE JUGE DE LA CEMAC
Reflet exact de la fonction juridictionnelle qu'elles tendent
à préserver selon le professeur Carlo Santulli, les règles
de recevabilité permettent de déterminer l'objet de la
juridiction en délimitant à rebours le pouvoir international de
juger33(*). Elles
renvoient d'abord aux conditions de recevabilité (chapitre I) qui
s'attachent à l'ensemble des prétentions des parties. Leur effet
le plus visible, note l'éminent auteur, est sans doute
l'irrecevabilité de l'action en justice dans son ensemble34(*). L'ensemble des conclusions en
demande en effet, peut être entaché par une
irrégularité de procédure, ou par l'irrecevabilité
de la demande formulée ; ce qui conduit la juridiction au terme
d'un examen plus ou moins approfondi (chapitre II) à rejeter en bloc
l'action.CHAPITRE I : LES CONDITIONS DE
RECEVABILITE
Certains auteurs regroupent sous le vocable de conditions de
recevabilité, non seulement les conditions spéciales mais
également les conditions générales c'est-à-dire
celles par lesquelles le droit du procès réserve la juridiction
aux actes juridictionnels35(*) : une prétention n'est recevable que si
elle soumet à la juridiction un différend, qui peut faire l'objet
d'une décision obligatoire, rendue en application du droit. Le
professeur Santulli envisage ainsi sous ce titre l'existence d'un
différend né et actuel, la possibilité objective et
subjective d'appliquer le droit au différend et la possibilité
pour le juge de rendre une décision36(*). Ces règles nous semblant justement trop
générales et relatives à la définition et à
la nature même de la juridiction, nous n'envisagerons ici que les
conditions de recevabilité que l'auteur sus cité qualifie de
« spéciales » et qui concernent la
procédure ; c'est-à-dire celles relatives au
requérant ( section I) et à la requête ( section II). Mais
déjà, l'on doit noter qu'en raison de sa nature
spécifique37(*) la
procédure contentieuse conduite devant la CJC, comme avant elle devant
la Chambre judiciaire, se rapproche davantage de celle en vigueur devant les
juridictions administratives internes que celle devant les juridictions
administratives internationales classiques38(*).
SECTION I : LES CONDITIONS RELATIVES AU REQUERANT.
Au sens propre du terme, le requérant est la personne
pour le compte de laquelle est formée la requête, la partie qui
prend l'initiative de l'introduction de l'instance39(*). Le requérant ne peut
saisir valablement la juridiction communautaire que s'il a le locus
standi devant elle (paragraphe I) et a un intérêt pour le
faire (paragraphe II).
PARAGRAPHE I- LES CONDITIONS OBJECTIVES
Nous analyserons ici la capacité (A) et la
qualité (B) pour agir devant la CJC.
A- La
détermination nationale de la capacité pour agir en justice
La capacité est, selon la définition qu'en donne
le professeur Chapus, « la condition sans laquelle il est en
principe, exclu que le requérant puisse valablement prendre
lui-même la décision de saisir un tribunal. »40(*). Cette aptitude à
agir en justice s'apprécie différemment selon qu'il s'agisse
d'une personne morale (1) ou d'une personne physique (2).
1- La capacité des
personnes physiques
En attendant le règlement de procédure de la CJC
tel qu'issue du Traité révisé de Yaoundé, il faut
se référer au droit processuel de la Chambre judiciaire qui reste
muet sur la question. Tout au plus, l'article 13 des Règles de
procédure de la Chambre judiciaire de la CEMAC dispose-t-il en des
termes très vagues à son alinéa 2 :
« Les personnes physiques ou morales requérantes doivent
en outre jouir de la capacité d'ester en justice. », sans
préciser quelle est cette capacité et sans expressément
renvoyer au droit national des parties. Ce mutisme est suivi par le juge
communautaire qui se contente de citer cet article sans apporter plus de
précisions même lorsqu'il conclut à la capacité du
requérant41(*).
La capacité pour agir des personnes physiques est une
question de droit national, car elle est relative à l'état des
personnes. Saisi, le juge communautaire doit pour vérifier la
capacité du requérant se référer aux règles
nationales y relatives. Une personne ne peut saisir la juridiction
communautaire que si elle a la capacité pour ester devant les
juridictions de son pays.
Mais de façon générale, la
capacité d'ester en justice est un attribut de la personnalité et
est liée à l'existence même de la personne physique qui
doit être née et vivante. Il appartient donc au requérant
de justifier son existence si celle-ci est mise en doute par le
défendeur. De même, le requérant doit avoir atteint la
majorité, ou être mineur émancipé, n'être pas
un majeur sous tutelle et n'avoir pas été déchu sous le
coup de la loi ou d'une condamnation, de sa capacité à ester en
justice.
Fragmentées en ce qui concerne les personnes physiques,
les règles sur la capacité à ester devant la CJC
apparaissent plus uniformes en ce qui concerne les personnes morales.
2- La capacité des
personnes morales
Il convient de distinguer entre les Etats, les institutions
communautaires et les personnes morales privées.
La capacité des Etats, écrit le professeur Carlo
Santulli, ne soulève jamais de difficultés. En effet,
« si la possibilité d'ester devant
certaines juridictions dépend de la participation à leur statut,
c'est la compétence du tribunal qui en dépend, et non la
capacité étatique de le saisir ou d'être attrait devant
lui. Le pouvoir d'adopter les actes nécessaires à la
participation de l'Etat (demandeur ou défendeur) à la
procédure, quant à lui, est gouverné par les règles
générales du droit international relatives aux actes
étatiques. Les personnes pouvant engager l'Etat aux fins de la
procédure juridictionnelle sont donc celles qui ont été
désignées conformément aux règles
constitutionnelles telles qu'interprétées dans la pratique
nationale des autorités qui contrôlent effectivement le
territoire. Celles-ci pourront désigner ensuite des représentants
spéciaux (ad litem), agents ou conseils. » 42(*).
S'agissant des institutions communautaires, elles semblent
tirer leur capacité de la personnalité juridique reconnue
à la Communauté à l'article 3 du Traité. En effet,
suivant cet article la Communauté « possède dans
chaque Etat membre la capacité juridique la plus large reconnue aux
personnes morales par la législation nationale ».
Même si l'on pourrait déduire de cette « capacité
nationale » la « capacité communautaire »
comme pour les personnes morales de droit privé, il serait juridiquement
plus exact de tirer cette capacité du droit international. Celui-ci
reconnait en effet à toute organisation internationale une
personnalité juridique propre distincte de celle de ses Etats
membres ; laquelle implique elle-même une capacité d'ester en
justice dans le domaine statutairement défini.
La capacité des personnes morales se confond avec leur
personnalité juridique. Un groupement ou organisme, public ou
privé, ne peut agir en justice en son nom, et quel que soit sa
représentation, que s'il jouit de la personnalité juridique. La
capacité des personnes morales de droit interne ne fait donc pas de
difficulté, tant que leur personnalité est effectivement
posée par le droit qui leur confère l'existence légale.
Les six Etats de la CEMAC étant tous membres de l'OHADA, on assiste
à une certaine uniformisation des règles en ce qui concerne les
sociétés commerciales tant pour ce qui est de leur
capacité que pour la qualité pour agir en leur nom.
B- La qualité pour
agir
La qualité pour agir est le titre en vertu duquel une
partie agit en justice (1)43(*). La personne qui signe la requête n'est
cependant pas toujours celle pour le compte de laquelle elle est formée
(2).
1- La qualité pour
agir à titre principal
Ni la convention régissant la CJC, ni l'Acte
additionnel portant Règles de procédure de la Chambre judiciaire
de l'ancienne Cour de justice de la CEMAC ne précisent clairement la
qualité que doit avoir le requérant. En attendant l'adoption du
règlement de procédure de la Cour, l'on peut se
référer à celui de la CJCE où le requérant
ne peut attaquer un acte que s'il en est le destinataire à moins qu'il
ne prouve que l'acte attaqué le concerne individuellement et
directement44(*). Cette
idée ne serait d'ailleurs pas totalement nouvelle devant la Cour de
N'djamena puisque dans l'affaire COBAC c/ Tasha L. Lawrence du 16 mai 2002, la
Chambre judiciaire avait affirmé qu'ont la qualité pour agir en
recours contre les décisions de la COBAC sur la base de l'article 4
alinéa 1 de l'ancienne convention portant création de la Cour de
justice, « les dirigeants sanctionnés ». On
peut certes y voir un intérêt à agir, mais aussi avant et
en amont une qualité à agir qui résulte du statut de
destinataire de l'acte. Comme l'écrit le professeur Philippe Manin,
lorsque des personnes physiques ou morales sont
« destinataires d'une décision, elles ne
sont soumises à aucune condition restrictive de recevabilité. En
revanche pour pouvoir attaquer un acte dont elles ne sont pas destinataires- et
notamment un règlement qui, par hypothèse, n'a pas de
destinataire- elles doivent démontrer que l'acte les
« concerne directement et
individuellement » »45(*).
Ainsi, la qualité de destinataire devrait a priori
suffire à rendre le recours formé contre une décision
recevable. Cette qualité se prouve assez aisément puisque les
destinataires sont indiqués nommément dans l'acte. Si une
personne estime qu'elle aurait dû être le destinataire d'un acte
alors qu'elle ne l'a pas été, elle peut utiliser le recours en
carence. Par contre une décision rejetant une demande formulée
par un particulier ne peut être utilement attaquée que si l'acte
auquel elle se rapporte était un acte contre lequel le recours aurait
été recevable46(*). La CJCE évite ainsi que, par le biais d'une
demande d'abrogation ou modification d'un acte existant, un requérant
ordinaire puisse tourner les dispositions restrictives de
recevabilité47(*).
Pour qu'une personne physique ou morale soit recevable
à attaquer un acte dont elle n'est pas le destinataire, il faut et il
suffit, outre que l'acte fasse grief, qu'elle soit « directement
et individuellement concernée par lui». La première
condition, directement concerné, signifie soit qu'aucune mesure
intermédiaire d'application prise au niveau national ou communautaire
n'est venue s'interposer entre l'acte attaqué et le requérant,
soit que l'auteur de cette mesure ne disposait d'aucune marge
d'appréciation. Quant à la seconde condition, individuellement
concerné, elle suppose suivant une formule consacrée, que le
requérant est atteint par l'acte en raison d'une situation de fait qui
la caractérise par rapport à toute autre personne et qui
l'individualise de manière analogue à celle d'un
destinataire48(*). L'on
pourrait penser qu'il n'est pas possible pour une personne physique ou morale
d'attaquer une directive même si elle se trouve directement et
individuellement concerné. Un arrêt de la CJCE permet de tirer une
conclusion différente. En l'espèce, la juridiction
européenne a déclaré irrecevable un recours contre une
directive effectué par un requérant non institutionnel non pas
parce qu'il s'agissait d'une directive, mais au motif que la directive est en
principe un acte qui a une portée générale et que, dans le
cas d'espèce, la portée générale de la directive
n'était pas contestée49(*). L'on peut donc, en déduire que si une
disposition de directive était de nature à concerner directement
et individuellement une personne physique ou morale, celle-ci pourrait
présenter un recours à son encontre. Une telle
interprétation selon le professeur Manin est tout à fait conforme
à la jurisprudence50(*).
S'agissant des Etats et de la Communauté, sans
être destinataires de l'acte attaqué, ils n'ont pas à
prouver que celui-ci les concerne directement et individuellement et ont
toujours qualité pour agir. En réalité, la notion de
qualité n'est ici qu'une généralisation d'un
intérêt pour agir reconnu à toutes les personnes
appartenant à une même catégorie, en fonction des
caractéristiques propres à cette dernière. Pour ces
requérants, il se pose plus la question de la personne habilitée
à agir en leur nom.
2- La qualité pour
agir au nom d'autrui
Les Etats ainsi que les institutions et organes de la
Communauté sont représentés par un agent nommé pour
chaque affaire ; l'agent pouvant être assisté d'un avocat ou
celui-ci représentant tout seul l'Etat51(*). Pour les autres parties, elles doivent sous peine
d'irrecevabilité être représentées par un conseil.
Cette règle de la représentation obligatoire a pour but de
« garantir que la Cour n'entendra que des opinions juridiques et
des explications de fait qu'un avocat a examinées et qui lui ont paru de
nature à être exposées »52(*). Il en résulte que la
présence de la personne physique n'est pas requise, de sorte que les
frais de déplacement et de séjour à N'djamena d'un
requérant ne devraient pas, comme c'est d'ailleurs le cas devant son
homologue européen, entrer dans les dépens
récupérables sauf si cette présence est indispensable aux
fins de la procédure53(*).
Cette obligation soulève tout de même quelques
questions notamment au regard des termes de l'article 8 des Règles de
procédure de la Chambre judiciaire qui continue à s'appliquer en
attendant le règlement de procédure de l'actuelle Cour. En effet,
cet article dispose dans sa dernière phrase « les autres
parties sont représentées par un conseil ». Cette
obligation concerne-t-elle le tiers intervenant ? Ensuite, le conseil
exigé est-il nécessairement un avocat ?
A la première interrogation, certains répondent
que « comme toute partie à l'instance, la partie qui
intervient a la possibilité de recourir au ministère
d'avocat »54(*). Pour eux, la représentation processuelle de
l'intervenant ne serait qu'une faculté, une possibilité et non
une obligation pour l'intervenant. Nous ne partageons ce point de vue qu'en
partie. Délaissant les réserves que soulève l'expression
même de « partie qui intervient »55(*), nous distinguons entre
l'intervenant « ami de la Cour » et l'intervenant qui a un
intérêt propre à faire valoir. Le premier, en principe
désintéressé, n'est pas affecté par le dispositif
de la décision à intervenir et n'étant donc pas une partie
à l'instance n'est pas concerné par les termes de l'article 8 qui
vise les parties. La représentation processuelle ne devrait donc pas
être obligatoire pour lui. Le second par contre a un intérêt
propre à faire valoir et l'autorité de la chose jugée qui
s'impose aux parties s'étend également à l'intervenant
devenu partie à l'instance56(*). Par conséquent, il est soumis aux exigences
de l'article 8. Cette distinction entre ces deux types de tiers existe bien
devant la juridiction communautaire même si dans la pratique la
frontière n'est pas aussi nette57(*).
Pour répondre à la seconde interrogation, nous
ferons deux remarques : d'abord que l'article 8 utilise
expressément le mot « avocat » pour parler de la
représentation processuelle des Etats,
et « conseil » uniquement pour les particuliers ;
ensuite, l'article 10 du même texte distinguant clairement entre agents,
conseils et avocats permet de déduire que c'est à bon escient que
le « législateur » communautaire parle pour la
représentation processuelle des parties autres que les Etats et les
institutions et organes communautaires de « conseil » et
pas exclusivement d' « avocat ». La
représentation de ces parties peut donc se faire non seulement par un
avocat mais également par toute autre personne ayant la qualité
de conseil.
Par ailleurs, est admise à exercer le ministère
d'avocat devant la CJC toute personne justifiant de cette qualité devant
la juridiction d'un Etat membre. Des dérogations peuvent toutefois
être accordées par la Cour pour un avocat étranger58(*). Les parties élisent
domicile au siège de la cour, conformément à l'article 19
des Règles de procédure de la Chambre judiciaire, sans doute pour
raccourcir la distance entre la Cour et les avocats situés hors du pays
de siège. L'avocat n'a évidemment pas besoin de prouver son
intérêt mais celui de son client qui est le véritable
requérant.
PARAGRAPHE II : LA CONDITION SUBJECTIVE :
L'INTÉRÊT À AGIR
La saisine du juge communautaire ne se fait pas selon
la formule de l'action populaire selon laquelle n'importe qui peut attaquer
n'importe quoi. Pour être recevable un requérant doit justifier
soit d'un droit lésé, soit d'un intérêt à
agir. Il ne peut en effet être d'action juridictionnelle gratuite. Dans
le contentieux subjectif des droits, cette condition d'un
bénéfice attendu fait corps avec l'objet du procès qui est
de rétablir des droits qu'on estime atteints. Dans le contentieux
objectif du Droit, c'est en revanche sous forme distincte et
préjudicielle qu'apparait l'exigence d'un intérêt du
requérant à l'annulation qu'il recherche. Dès la
recevabilité, elle garantit que l'auteur du recours, non seulement
défend la légalité, mais encore poursuit un avantage
personnel59(*). On
pourrait identifier deux types d'intérêt devant la CJC :
l'intérêt à agir à titre principal (A) et
l'intérêt à intervenir (B).
A- L'intérêt
du demandeur
Comme nous l'avons déjà précisé,
l'intérêt pour agir est l'utilité que présente pour
le requérant la solution du litige qu'il demande au juge d'adopter.
Cette condition de recevabilité est l'adaptation de l'adage
« pas d'intérêt pas d'action ». Le
principe général du droit du contentieux communautaire ne
s'écarte pas sur ce point de la théorie du procès
national : seul le titulaire du droit en cause a qualité pour s'en
prévaloir (2). Toutefois, dans le procès international comme en
droit interne, il est des cas où certaines personnes se voient
reconnaitre le pouvoir d'agir en justice dans certaines situations sans avoir
à prouver que leurs droits subjectifs sont en cause. On dirait alors
qu'ils peuvent faire valoir une sorte d' « intérêt
général », ou que la qualité pour agir
établit l'intérêt juridique de l'action60(*) (1).
1- Les requérants
privilégiés : la qualité donnant intérêt
à agir
« Il est deux types de situations
profondément différentes dans lesquels une personne est recevable
à agir en justice sans avoir à établir que ses droits
subjectifs sont en cause. Dans deux cas, le droit international donne à
des personnes le pouvoir de déclencher la procédure
juridictionnelle (et donc la qualité pour agir) même si elles ne
sont pas affectées. La première situation correspond à
l'hypothèse de l'action publique : un organe reçoit la
fonction de « gardien du droit », et le pouvoir de
déclencher l'action juridictionnelle dans
l' « intérêt de la loi (du droit) ». La
deuxième situation relève encore, en réalité de
l'action privée : une personne, en raison de sa qualité, est
nécessairement atteinte ex lege par toute mesure contraire aux droits
attachés à cette qualité.61(*) »
C'est dans cette dernière situation que se trouvent les
Etats, les institutions et organes de la Communauté qui n'ont pas
à prouver un intérêt pour agir. La doctrine reste
divisée sur la qualification à donner à ces
requérants : privilégiés62(*), constitutionnels63(*) et institutionnels64(*). Le dernier qualificatif nous
semble mieux traduire la réalité et nous sommes d'avis que la
pratique ayant conduit à désigner certains requérants de
« privilégiés » est une
« terminologie tendancieuse dans la mesure où, dissimulant
la véritable inspiration de la distinction, elle considère comme
un privilège ce qui en réalité n'en est pas un, mais tout
simplement la conséquence d'une qualité 65(*)». Il s'agit bien
d'une transposition au niveau communautaire de la qualité donnant
intérêt pour agir que l'on retrouve dans le contentieux
administratif interne. En effet, la situation juridique dans laquelle se
trouvent certaines personnes leur donne toujours intérêt à
contester les décisions qui modifient cette situation : tous ceux
qui se trouvent dans cette situation ont par là même
intérêt pour agir, sans avoir à justifier d'un
intérêt plus personnel. Ils sont individuellement porteurs de
l'intérêt collectif reconnu à la catégorie juridique
à laquelle ils appartiennent, à condition qu'elle ne soit pas
trop générale66(*).
L'article 24 de la Convention régissant la CJC ne parle
de l'intérêt que pour les personnes physiques ou morales. Ainsi
les Etats membres, les institutions, institutions spécialisées et
organes de la CEMAC disposent d'un droit de recours qui ne souffre pratiquement
d'aucune restriction : sous réserve d'agir dans le délai
prévu, ils sont recevables à attaquer tous actes notamment
règlements, directives et décisions, contre lesquels ils peuvent
invoquer n'importe lequel des moyens d'illégalité. La CJC dont la
jurisprudence sur la question reste attendue devrait suivre la voie de son
homologue européen qui dans un arrêt du 22 mai 1990 dit
« Tchernobyl », a reconnu au Parlement communautaire,
malgré le silence des textes, le droit de former un recours en
annulation contre un acte du Conseil ou de la Commission, à la condition
que ce recours ne tende qu'à la sauvegarde de ses prérogatives et
qu'il ne se fonde que sur des moyens tirés de la violation de
celles-ci67(*). Cette
décision était motivée par la considération que les
prérogatives du Parlement sont l'un des éléments de
l'équilibre institutionnel créé par les traités,
dont la sauvegarde implique que chacune des institutions exerce ses
compétences dans le respect de celles des autres, et que tout
manquement à cette règle devait pouvoir être
sanctionné. Cette jurisprudence place ainsi le Parlement à un
niveau intermédiaire entre les requérants institutionnels et les
requérants non institutionnels.
2- Les requérants
ordinaires
Contrairement au traité européen qui n'y fait
pas expressément référence, la règle de
l'intérêt étant de création
jurisprudentielle68(*), la
Convention CJC stipule clairement à son article 24 l'exigence pour les
particuliers, personnes physiques et morales, d'un intérêt pour
agir. En effet, n'importe quel requérant ne peut agir contre n'importe
quel acte. Il lui faut être atteint. Pour le particulier, attaquer c'est
d'abord se défendre, avoir un motif propre de protester et
réclamer69(*). Si
cet intérêt est établi, le requérant pourra non
seulement déposer un recours mais aussi le déployer pleinement
sans que la nature de cet intérêt conditionne la catégorie
des moyens susceptibles d'être présentés. Pour le
professeur René Chapus, l'exigence d'un intérêt se situe au
tout premier rang des conditions de recevabilité ;
l'intérêt justifie l'exercice du recours. C'est de sa
lésion que le requérant tire le titre juridique qui l'habilite
à saisir le juge70(*). Le juge communautaire CEMAC n'hésite pas
à vérifier cet intérêt indépendamment de la
qualité :
« Que les recours peuvent être
formés devant la Chambre judiciaire, « par les dirigeants
sanctionnés » des établissements de crédit
assujettis à la COBAC, contre une décision de cet organisme et
dans les deux mois suivant la notification de la dite décision, au sens
de l'article 18 de l'annexe 2 à la convention portant création de
la commission bancaire de l'Afrique Centrale.
Que privé de l'emploi qu'il occupait à
l'Amity Bank consécutivement à la sanction de démission
d'office, Tasha Loweh Lawrence a tout intérêt à attaquer la
décision portant ladite sanction »71(*).
Selon les termes de l'article 24 de la convention CJC,
l'intérêt allégué doit être certain et
légitime. Il en résulte que le recours est irrecevable s'il est
exercé pour la sauvegarde d'une situation irrégulière ou
immorale. Ainsi que dans le cas où l'auteur du recours a lui-même
délibérément créé la situation
irrégulière ou immorale qui a provoqué la décision
qu'il conteste. De même le requérant ne peut invoquer un
intérêt futur et hypothétique. Cet intérêt est
également requis pour l'obtention de mesures provisoires. Selon le
professeur Rostane Mehdi, l'admissibilité d'une demande tendant à
l'octroi de mesures provisoires pourra être écartée lorsque
le recours principal apparaît comme manifestement irrecevable faute pour
le requérant d'avoir établi son intérêt et sa
qualité pour agir72(*). L'appréciation de l'intérêt du
requérant à l'obtention des mesures provisoires demandées
revêt aux yeux du juge communautaire européen, une importance
singulière dans le cadre d'une procédure en
référé. Il considère invariablement que
« des mesures provisoires qui ne seraient pas
aptes à éviter le préjudice grave et irréparable
dont fait état le requérant ne sauraient a fortiori être
nécessaires à cet effet. En l'absence d'intérêt du
requérant à l'obtention de mesures provisoires
sollicitées, ces dernières ne sauraient donc satisfaire au
critère de l'urgence »73(*).
L'on doit cependant relever pour s'interroger les dispositions
de l'article 27 de la Convention CJC qui dispose :
« Si, à la requête du
Président de la Commission, de toute Institution Organe ou Institution
spécialisée de la CEMAC ou de toute personne physique ou morale,
la Cour constate que dans un Etat membre, l'inobservation des règles du
recours préjudiciel donne lieu à des interprétations
erronées du Traité de la CEMAC ou des conventions
subséquentes, des statuts des Institutions, Organes et Institutions
spécialisées de la Communauté ou d'autres textes
pertinents, elle rend un arrêt donnant les interprétations
exactes. Ces interprétations s'imposent à toutes les
autorités administratives et juridictionnelles de l'Etat
concerné ».
Cet article en n'exigeant pas un intérêt pour
agir des personnes physiques ou morales, ouvrirait-il dans ce cadre particulier
une actio popularis ? L'individu, citoyen communautaire, se
verrait-il érigé dans cette procédure particulière
en « gardien de la légalité
communautaire » ? En attendant une réponse que ne
manqueront d'apporter le règlement de procédure de la Cour et la
Cour elle-même, il s'agirait d'une véritable révolution
dans un ordre juridique où les requérants non institutionnels
n'ont pas le droit d'intervenir dans les « litiges
constitutionnels ».
B- L'intérêt
à intervenir
« Demande incidente par laquelle un tiers entre
dans un procès déjà engagé, de son propre mouvement
(intervention volontaire) ou à l'initiative de l'une des parties en
cause (intervention forcée)74(*) », l'intervention permet à un
tiers intéressé de se joindre à une procédure
pendante devant le juge. Elle doit être distinguée de la tierce
opposition qui entraine le réexamen de l'affaire alors que le jugement
est déjà rendu. L'article 72 alinéa 1 des Règles de
procédure de la Chambre judiciaire distingue deux types
d'intervention : spontanée (1) ou provoquée (2).
1- L'intervention
volontaire
Le tiers dont les droits risquent d'être mis à
mal est en droit d'intervenir dans le procès à l'effet de les
sauvegarder. Il s'agit là d'un principe qui bien qu'admis par les
Règles de procédure de la Chambre judiciaire n'est pourtant pas
clairement exprimé, l'article se bornant à parler de
l'intervention spontanée sans préciser les motifs d'une telle
intervention : doit-elle être nécessairement
intéressée ? Ou y'a-t-il possibilité d'une
intervention sans intérêt, amicus curiae, devant la
Cour ?
Le professeur Olivier De Schutter nous propose une distinction
entre les deux notions :
« L' « ami de la Cour »
est en principe désintéressé, c'est-à-dire qu'il
n'a pas d'intérêt propre à l'issue de l'instance. Le
dispositif de la décision de justice à intervenir ne doit
normalement pas l'affecter en propre. Sa présence n'est justifiée
qu'afin d'éclairer le juge sur les enjeux de la décision qu'il
est appelé à rendre. (...) En revanche,
l' « intervenant » au sens strict a un
intérêt propre à faire valoir. Lorsqu'elle est volontaire,
son intervention vise à protéger ses droits ou
intérêts, auxquels les parties du litige pourraient porter
atteinte ; (...) Une fois l'intervention admise, l'intervenant devient
partie au litige : l'autorité de la chose jugée qui s'impose
aux parties s'étendra également à l'intervenant75(*) ».
Si la distinction entre ces deux types de
« tiers » est aisée en théorie76(*), la pratique a brouillé
la frontière qui les sépare. De fait, bien que ni la Convention
CJC, ni le Statut de la CJCE ne prévoit la possibilité pour des
« amis de la Cour » d'intervenir, la CJC ne devrait pas
comme son homologue européenne tarder à voir intervenir devant
elle des groupes ou organismes dont l'intérêt dans l'instance est
difficile à déterminer77(*). C'est ce que pensent certains pour qui le droit
d'intervention au titre d'amicus curiae peut être
réservé à des organisations professionnelles suffisamment
représentatives des intérêts de leur organisation78(*).
Quoi qu'il en soit, la Chambre judiciaire de l'ancienne Cour
s'est toujours attachée à rechercher l'intérêt du
tiers intervenant volontaire79(*). Cette identification de l'intérêt pour
intervenir résulte, selon le professeur Santulli, d'une casuistique
complexe. Il est apprécié au regard du litige, car l'intervenant
doit pouvoir justifier que son intérêt est « en
cause » dans la procédure eu égard à la
décision qui doit être adoptée. La recevabilité de
l'action est donc subordonnée à l'appréciation de la
connexité entre l'objet du litige et l'intérêt du
tiers80(*). L'intervenant
devant conclure au soutien des conclusions de l'une des parties, il en
résulte que l'intérêt doit exister par rapport aux dites
conclusions et non par rapport aux moyens ou arguments invoqués. Le juge
européen exige que cet intérêt soit suffisamment
caractérisé81(*). La preuve de cet intérêt est parfois
à la charge de l'une des parties lorsqu'elle est à l'origine de
l'intervention.
2- L'intervention
forcée
Inconnue devant la juridiction communautaire
européenne, l'intervention forcée ou provoquée est
expressément consacrée à l'article 72 des Règles de
procédures de la Chambre judiciaire. Elle est un moyen pour les parties
originaires, et plus spécialement pour le défendeur, de provoquer
la participation au procès de tiers qui ne le souhaitent pas
nécessairement, qui risquent même de voir leurs
intérêts en souffrir et à l'encontre desquels elle est
comme un moyen d'assurance. Elle a l'utilité de rapprocher
immédiatement un ensemble de relations juridiques imbriquées et
interdépendantes82(*). C'est donc l'intérêt de l'une des
parties à ce que la décision à venir soit opposable au
tiers convoqué qui doit être avéré et que recherche
le juge83(*).
Bien que l'article 72 des règles de procédures
de la Chambre judiciaire ne l'envisage pas, le juge de N'djamena n'a pas
hésité à s'octroyer un droit à faire intervenir
devant elle un tiers qu'il estime intéressé à
l'instance :
« Mais attendu que si l'intervention
forcée est subordonnée en principe à la demande d'une
partie, le juge rapporteur qui « veille au déroulement
loyal » de la procédure et n'accomplit que des actes
d'instruction sur demande d'une partie ou d'office, peut appeler dans cette
phase de procédure, en lui communiquant le recours dont il est saisi,
toute personne qu'il estime intéresser à l'instance et dont il
souhaite obtenir des observations, au sens des articles 28, 29 et suivants du
Règlement de procédure de la Cour.
que la personne appelée en cause pour observations
devant le juge rapporteur participe à l'instruction de l'affaire sans
avoir la qualité de partie.
qu'au surplus le principe de contradiction impose qu'une
personne intéressée soit appelée à l'instance
lorsque l'issue de la procédure est susceptible d'emporter des effets
sur ses droits »84(*).
Ainsi, l'on distingue selon le cas un triple
intérêt à intervenir : pour protéger les droits
du tiers, pour rendre opposable la décision au tiers et enfin pour
éclairer le juge. Encore faudrait-il que la requête réponde
aux prescriptions légales.
SECTION II : LES CONDITIONS RELATIVES A LA REQUETE.
De façon générale, l'on pourrait classer
les conditions de recevabilité relatives à la requête en
deux grandes catégories : celles touchant au fond de la
requête (paragraphe I) et celles relatives à la
présentation formelle de la requête (paragraphe II).
PARAGRAPHE I- LES CONDITIONS MATÉRIELLES
Nous regrouperons sous ce titre les règles de
recevabilité portant sur le déroulement procédural
auxquelles est astreint le requérant dans certains contentieux,
c'est-à-dire les préalables procéduraux (A), et celles
visant l'objet du recours (B).
A- Les préalables
procéduraux
Les préalables procéduraux obligatoires lient le
contentieux juridictionnel ultérieur et provoquent
l'irrecevabilité de la requête lorsqu'ils n'ont pas
été respectés. Dans le contentieux communautaire de la
CEMAC, l'on pourrait en distinguer trois liés à diverses voies de
droit : le contentieux de la fonction publique communautaire, le recours
en carence et le recours en manquement. Si le premier a été
clairement aménagé et respecté devant la Chambre
judiciaire de l'ancienne Cour (1), les deux dernières bien
qu'inévitables restent à être aménagées
(2).
1- Le recours
administratif préalable dans le contentieux de la fonction publique
communautaire
Non inscrite dans les Règles de procédure de la
Chambre judiciaire, la règle du recours administratif préalable
est énoncée à l'article 113 du Règlement N°
8/99/UEAC-007-CM-02 du 18 août 1999 portant Statut des fonctionnaires du
Secrétariat Exécutif de la Communauté Economique et
Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC). Aux termes de cet article, le
recours en contentieux de la fonction publique communautaire n'est valablement
formé devant la Cour que si le Comité consultatif de discipline a
été préalablement saisi d'une réclamation de
l'intéressé et si cette réclamation a abouti à une
décision explicite ou implicite de rejet partiel ou total du
Secrétaire exécutif85(*).
Cette règle qui vise selon la Cour à permettre
une solution amiable en « rendant obligatoire le
préliminaire de conciliation86(*) » est appliquée de façon
très rigoureuse par celle-ci avec parfois une grande confusion. D'abord,
la Cour ne semble pas fixée elle-même sur la nature du recours
préalable : est-ce un recours administratif préalable ou un
recours hiérarchique ? D'une part, la Cour affirme clairement que
le recours administratif préalable devant le Comité consultatif
de discipline est d'ordre public et obligatoire pour tout contentieux de la
fonction publique communautaire, qu'il soit ou non disciplinaire, auquel ne
pourrait même se substituer un recours gracieux adressé au Conseil
des ministres de l'UEAC87(*) ; d'autre part, il admet une substitution du
recours hiérarchique au recours administratif préalable88(*). Cette confusion est d'autant
plus grave qu'il s'agit bien de deux recours distincts en droit public :
s'ils sont tous les deux des recours administratifs non contentieux, l'un est
adressé à l'autorité dont émane la décision
ou qui est désigné pour le recevoir, c'est le recours
administratif préalable ; l'autre est adressée au
supérieur hiérarchique de l'auteur de la décision, c'est
le recours hiérarchique89(*). D'ailleurs, la Cour distingue elle-même
parfaitement entre les deux recours90(*).
Existerait-il alors deux préalables procéduraux
distincts pour le fonctionnaire communautaire ? Oui peut-on penser
à la lecture des motivations du juge CEMAC dans l'affaire Asngar
Miayo91(*) :
« qu'il en résulte que le fonctionnaire
de l'Ecole Inter-Etats des Douanes, au contraire de son homologue du
Secrétariat Exécutif, ne jouit pas du droit de saisir le
comité consultatif de discipline dudit Secrétariat
« d'une réclamation » visant un acte du Directeur de
l'Ecole ou de son Conseil d'administration lui faisant grief, ce Conseil
d'administration « disposant des pouvoirs les plus étendus
nécessaires à la réalisation de son objectif »,
et le secrétaire exécutif n'étant lui-même qu'un
« membre de plein droit » dudit conseil, au sens des
dispositions des articles 3 et 4 de l'annexe du statut de ladite Ecole,
que c'est valablement que le requérant a saisi le
Conseil d'administration de l'Ecole Inter-Etats des Douanes de recours
hiérarchique litigieux, faute d'avoir obtenu de son directeur,
autorité subordonnée, de rapporter l'ordre verbal à
l'origine de l'amputation de son traitement ».
Aussi séduisant qu'apparaît ce raisonnement, il
laisse dubitatif lorsqu'on remarque que dans un contentieux opposant des
fonctionnaires de la même administration, l'EIED, la Cour suit le
raisonnement sus exposé en admettant le recours hiérarchique
d'une part92(*), et
d'autre part sans justifier son changement d'attitude elle rejette le recours
hiérarchique en « affirmant qu'en l'état actuel de
la législation communautaire la Cour est valablement saisie non pas
après un recours hiérarchique, mais après la saisine
préalable du Comité consultatif de discipline 93(*)». Cette confusion
jurisprudentielle est de nature à troubler les justiciables et à
restreindre davantage l'accès à la justice communautaire94(*).
Quoi qu'il en soit, le recours administratif préalable
cristallise le litige et constitue une source d'information pour le juge, comme
dans les préalables procéduraux en cas de carence et de
manquement, il délimite ou lie le contentieux.
2- Les phases
« précontentieuses » des recours en carence et en
manquement
Comme nous l'avons déjà noté, en
l'absence du règlement de la CJC et dans le silence de la Convention
CJC, nous inspirerons essentiellement du droit et de la pratique
européenne dans une logique prospective.
Un recours en carence ne peut être formé devant
la CJCE que si le requérant a préalablement et de manière
expresse invité l'institution concernée à agir en lui
indiquant précisément le contenu de l'acte qu'elle devrait
prendre et si l'institution n'a pas pris position dans un délai. Cette
mise en demeure n'étant inscrite dans aucun délai, la CJCE a
estimé qu'elle devrait être effectuée dans un
« délai raisonnable95(*) ». Le contenu et l'objet de la mise en
demeure sont déterminés par la fonction même de l'action
dont elle participe. Elle n'a donc de sens qu'en l'état d'une inertie
institutionnelle sur un point à propos duquel il est prétendu
qu'il existe une obligation légale d'agir. Ainsi, une mise en demeure
adressée à une institution d'avoir à modifier ou à
abroger un acte prétendument illégal ne constitue pas une
modalité du préalable administratif, puisque
précisément il n'y a pas eu abstention. La réglementation
CECA ajoute à l'abstention dans l'exercice d'une compétence
liée, l'abstention dans l'exercice d'une compétence
discrétionnaire si cette abstention est constituée de
détournement de pouvoir. Ayant pour objet de rappeler l'institution au
respect de ses obligations, la mise en demeure doit indiquer de manière
précise le fondement et le contenu de l'obligation prétendument
méconnue. Elle ne peut émaner que de ceux qui seront
ultérieurement recevables à saisir le juge d'un refus.
Ce préalable administratif peut se conclure de trois
manières : ou bien l'institution mise en demeure reconnait
l'existence de l'obligation légale auquel cas elle est tenue d'agir et
s'exécute, ce qui met fin à la procédure ; ou bien,
cette même institution conteste l'existence d'une telle obligation et se
refuse expressément à agir ; ou bien enfin l'institution ne
réagit pas. Cette troisième hypothèse est la seule que
prennent en considération les traités en ouvrant alors un recours
devant le juge, le Traité CECA contre la décision implicite de
refus réputée résulter du silence gardé par
l'institution, les traités de Rome (CEE et CEEA) contre l'absence de
prise de position de l'institution96(*).
S'agissant du recours en manquement, l'ordre juridique
communautaire européen consacre deux réglementations distinctes
selon que l'action est menée en vertu du Traité CECA ou des
traités de Rome. Dans le premier cas, seule la Haute
autorité/Commission est compétente pour engager la
procédure, même si elle peut y être invitée voire
contrainte par la voie du recours en carence, alors que dans les traités
de Rome, l'action appartient concurremment à la Commission et aux Etats
membres. Dans l'énumération qu'il fait des compétences de
la Cour, l'article 23 de la convention CJC dispose tout simplement que la Cour
connait des « recours en manquement des Etats membres, des
obligations qui leur incombent en vertu du Traité de la CEMAC et des
textes subséquents. » sans préciser qui serait
l'initiateur d'un tel recours. En l'absence d'un règlement de
procédure, l'on pourrait sur la base de l'article 24 du même texte
qui accorde à tout Etat membre, institution, institutions
spécialisée, tout organe de la CEMAC ou toute personne physique
ou morale qui justifie d'un intérêt certain et légitime, un
droit d'action dans tous les cas de violation des dispositions du Traité
de la CEMAC ou des textes subséquents, et surtout au regard de la forte
dose d'inter-étatisme qui sous-tend la construction communautaire,
conclure à une procédure plus ouverte ou au moins ouverte aux
mêmes requérants que dans la procédure européenne
des traités de Rome.
Si la poursuite est à l'initiative de la Commission,
elle débute formellement par l'envoi à l'Etat visé d'une
lettre qui le met en demeure de présenter ses observations dans un
délai déterminé. Il s'agit là d'une importante
garantie pour l'Etat, qui est en mesure de justifier et, le cas
échéant, de convaincre la Commission de sa position : aussi
le juge communautaire européen y voit-il une formalité
substantielle dont le défaut entrainerait l'irrecevabilité du
recours subséquent97(*). Si l'Etat ne s'est pas exécuté dans le
délai fixé, la Commission peut saisir la juridiction
communautaire.
Lorsqu'un Etat membre veut faire constater le manquement d'un
autre Etat, il doit d'abord saisir la Commission en lui communiquant son
intention de former un recours et les motifs qui fondent, selon lui, le
manquement. La Commission doit mettre l'ensemble des parties
intéressées et pas seulement l'Etat incriminé, en mesure
de présenter contradictoirement leurs observations, puis elle doit
émettre un avis motivé. Contrairement à l'hypothèse
précédente, l'avis ne contient pas nécessairement un
délai dans lequel l'Etat doit s'exécuter. La saisine de la Cour
est possible aussitôt que l'avis a été rendu, même si
l'Etat incriminé s'y est conformé. L'absence d'avis dans les
trois mois autorise la saisine directe de la Cour98(*). Cette saisine se fait par une
requête qui doit clairement indiquer l'objet du recours.
B- Les conditions
relatives à l'objet du recours
Il s'agit ici des règles de recevabilité qui
portent sur le but poursuivi par le recours, la finalité de la
requête. A une approche transversale permettant d'examiner les actes
attaquables et les auteurs des actes, nous opterons pour une approche
thématique centrée sur les principales voies de droit ouvertes
devant la CJC. Les professeurs Jean Boulouis et Marco Darmon proposent une
classification selon que l'action vise à faire sanctionner par le juge
le respect de la légalité par une institution communautaire (1)
ou qu'elle vise à faire sanctionner le respect par un Etat membre de ses
obligations (2). Nous nous attarderons également de façon
spécifique sur quelques procédures urgentes et
particulières (3).
1- Les voies de droit
visant les institutions communautaires.
Il s'agit principalement ici parmi les voies de droit
énumérées dans la Convention régissant la Cour de
justice communautaire, des recours en carence, en annulation, en
responsabilité contractuelle de la communauté, en contentieux de
la fonction publique communautaire et l'exception d'illégalité.
Nous n'envisagerons toutefois ici que celles qui ont des règles
spécifiques liées à leur objet, à l'exclusion du
contentieux de la fonction publique communautaire et des recours contre les
sanctions prononcées par les organismes à fonction
juridictionnelle.
Le recours en annulation a pour objet de faire annuler un acte
émanant d'une institution communautaire et constitue l'une des
principales garanties de la légalité communautaire. Il consolide
de ce fait les assises du système normatif et développe son
aptitude à être légitimement accepté. Il traduit
selon le docteur Jean Kenfack, « le souci de marquer l'emprise du
droit dans l'ordre juridique communautaire ou d'intégration. C'est donc
une garantie fondamentale du respect de la légalité dans la mise
en oeuvre du droit communautaire, de l'intégration économique et
juridique99(*) ». Quelle que soit l'institution qui
en est l'auteur, seuls sont attaquables les actes qui produisent des effets de
droit en modifiant la situation juridique d'une personne. En principe, il
s'agit suivant l'article 41 du traité révisé de la CEMAC
des décisions c'est-à-dire des actes des institutions et organes
communautaires faisant grief100(*). La CJCE a adopté une interprétation
extensive, que devrait suivre la CJC, de façon à donner la plus
grande efficacité au contrôle de légalité.
Indifférente à la forme, peu importe qu'il
s'agisse par exemple d'une simple lettre101(*), la CJCE recherche si l'acte entrepris constitue
matériellement une décision, c'est-à-dire une
manifestation définitive de volonté destinée à
produire des effets de droit102(*). D'autre part, un acte peut ne pas apparaître
en la forme comme de nature communautaire mais être
considéré comme tel s'il est intervenu dans un domaine de
compétence communautaire et faire l'objet d'un recours en
annulation103(*).
S'agissant des accords internationaux, ils sont certes imputables à la
Communauté mais aussi dans certains cas aux Etats. Le juge
communautaire, CJC ou CJCE, ne peut donc pas exercer une compétence
d'annulation sur l'accord en tant que tel. En revanche, s'il est établi
qu'un accord est contraire à la légalité communautaire,
elle peut en empêcher l'application pour ce qui concerne la
communauté en annulant la décision de conclusion104(*) ou des décisions
d'application105(*).
Dans tous les cas, la responsabilité internationale de la
Communauté vis-à-vis de ses cocontractants est susceptible
d'être engagée. Il convient enfin de signaler qu'un acte imputable
à un Etat ne peut être déféré pour annulation
à la Cour comme l'a affirmé la Chambre judiciaire dans l'affaire
société anonyme des Brasseries du Cameroun106(*). Pour le professeur Manin,
pareil acte ne peut pas être déféré même s'il
constitue un élément d'une procédure
communautaire107(*).
Si le recours en annulation a pour objet de sanctionner
l'illégalité d'actes communautaires, le recours en carence a pour
objet de sanctionner des abstentions illégales d'institutions de la
Communauté. Dans un sens étroit, il n'est que le
complément du recours en annulation car il permet d'attaquer ce qui
n'est pas attaquable par la voie de celui-ci, à savoir toute attitude
d'une institution communautaire qui ne se traduit pas par un acte juridique
express. Dans un sens plus large, le recours en carence permet de mettre en
cause l'attitude d'une institution qui s'est abstenue de prendre un ensemble de
mesures108(*). Cela vise
non seulement le défaut d'adopter un règlement, une directive ou
une décision, mais aussi tous les autres actes ayant une portée
obligatoire109(*).
Devant la CJCE, les traités de Rome limitent l'action de toute personne
physique ou morale au grief d'avoir manqué de lui adresser un acte
« autre qu'une recommandation ou un avis ». La
formule apparemment large, ne visant que les actes de la nomenclature
insusceptibles d'effet contraignant, ne peut cependant pas faire illusion selon
le professeur Boulouis si l'on se souvient que de telles personnes ne peuvent
être destinataires ni d'un règlement, ni d'une directive110(*).
Le principe de la responsabilité
extracontractuelle111(*)
de la Communauté est posé par l'article 20 de la Convention CJC.
Ce recours permet à ceux qui s'estiment victimes d'un dommage
causé par la communauté, la mise en cause de sa
responsabilité extracontractuelle, la responsabilité
contractuelle étant régie par la loi du contrat. Ce recours tend
à établir l'existence d'un dommage et à démontrer
l'existence d'un lien de causalité entre la faute commise par les
institutions communautaires ou leurs agents dans l'exercice de leurs fonctions
et le dommage causé. Il participe accessoirement du contrôle de la
légalité, la faute invoquée pouvant être
l'illégalité de l'acte prétendument à l'origine du
dommage. Alors que la CJCE, bien qu'admettant que l'obligation de
réparer incombe à la Communauté, affirme que seules les
institutions de celle-ci peuvent être parties défenderesses
à un recours en indemnité112(*), le juge de la CEMAC adopte le raisonnement
contraire en affirmant que du fait de sa personnalité juridique, la
Communauté « absorbe » la responsabilité des
institutions et de ses agents et est donc seule défenderesse à
l'action en responsabilité113(*). Cette position du juge communautaire de
N'djamena114(*) nous
semble contestable à la lecture de l'article 28 du Traité
révisé, il devrait épouser le raisonnement du juge de
Luxembourg qui tout en préservant l'unité de la
personnalité juridique de la Communauté permet une action plus
efficace des individus qui ne connaissent pas toujours le rattachement d'une
institution à la CEMAC. Quoi qu'il en soit, le recours en
indemnité ne devrait pas être ouvert contre les actes dont le
requérant avait la possibilité de demander l'annulation ; ce
qui constituerait un détournement de voies de droit115(*).
2- La voie de droit
visant les Etats : le recours en manquement.
Destiné à assurer le respect par les Etats
membres des obligations que leur impose l'appartenance à la
Communauté, le recours en manquement revêt aux yeux des
professeurs Jean Denis Mouton et Christophe Soulard, des traits les distinguant
des règles jusqu'à présent admises en droit international
classique, par le rôle déterminant qu'il réserve à
la Commission, organe indépendant des Etats116(*). Cette procédure
marque une révolution dans le droit d'émanation internationale,
en tout cas depuis son institution par les articles 88 CECA, 169 à 171
CEE, 141 à 143 CEEA117(*). Bien qu'elle n'ait pas d'équivalent en droit
international, l'action en manquement est souvent considérée
comme d'inspiration « internationaliste » parce qu'elle ne
peut être mise en oeuvre que par une institution, la Commission, ou par
un Etat membre118(*).
Le recours en manquement permet de sanctionner non seulement
la violation des règles du Traité, mais également celles
du droit dérivé. La violation peut résulter d'un
comportement positif de l'Etat, tel que l'adoption d'un texte contraire au
droit communautaire, ou d'une abstention, par exemple le défaut de mise
en oeuvre d'une directive. Elle peut être le fait soit de l'Etat
lui-même, soit d'organes dépendant de celui-ci, même s'il
s'agit d' « une institution
indépendante 119(*)». Cette responsabilité peut être
engagée en l'absence de toute intention fautive. En outre, l'existence
d'un préjudice dans le chef des autres Etats membres n'est pas
exigée. Pareille condition n'est requise que pour les procédures
urgentes120(*).
3- Les procédures
urgentes et particulières.
Sans prétendre être exhaustif, nous envisagerons
ici l'exception d'illégalité, le référé et
certaines voies de rétractation.
Aux termes de l'article 24 alinéa 2 CJC,
« toute partie peut, à l'occasion d'un litige soulever
l'exception d'illégalité d'un acte juridique d'un Etat membre,
d'une institution, d'un organe ou d'une institution
spécialisée ». La CJCE a estimé que la
principale fonction de l'exception d'illégalité est de corriger
les restrictions auxquelles les traités soumettent le recours en
annulation des particuliers contre les décisions générales
et les règlements et cela compte tenu de la
« nécessité d'assurer un contrôle de
légalité en faveur des personnes exclues... du recours direct en
annulation contre les actes de caractère général au moment
où elles sont touchées par des décisions d'application qui
les concerne directement et individuellement121(*) ». En revanche, sont
repoussées toutes les tentatives des particuliers invoquant l'exception
d'illégalité de décisions individuelles dont ils
étaient destinataires et qui, comme telles, étaient attaquables
au titre et dans le délai du recours en annulation122(*) sauf dans le cas de
décision individuelle nulle de plein droit, c'est-à-dire
inexistante123(*) ou
intégrée dans une « procédure
complexe » telle le recrutement d'un fonctionnaire124(*). Les Etats membres et les
institutions ont intérêt à disposer de l'exception
d'illégalité pour empêcher l'application d'actes
généraux illégaux qu'ils auraient pu attaquer mais qu'ils
n'ont pas déférés au juge dans le délai du recours
en annulation dont ils disposaient. Mais précisément, estimant
sans doute que la possibilité d'invoquer l'exception
d'illégalité ne peut qu'inciter les Etats membres à
ignorer les règlements et à ne pas les attaquer dans les
délais prescrits, le juge de la CJCE manifeste une réticence
très nette à leur endroit125(*) même s'il est admis que les Etats membres
auxquels il est fait grief dans le cadre d'un recours en manquement d'avoir
violé un règlement, puissent invoquer pour leur défense
l'illégalité de ce règlement126(*). Finalement, note le
professeur Guy Isaac, « l'exception d'illégalité
est donc essentiellement utilisable par les particuliers pour autant, bien
sûr, qu'une autre voie leur a donné accès à la
Cour127(*)».
En effet, cette voie de recours incidente se greffe
nécessairement sur une autre procédure intentée devant la
Cour. Sa raison d'être principale est de permettre aux particuliers, qui
n'ont généralement pas le droit d'attaquer directement un
règlement, d'en soulever l'illégalité à l'occasion
d'un recours formé contre une décision individuelle prise sur la
base de ce règlement128(*).
D'autres procédures incidentes sont prévues par
les articles 32 et 33 de la Convention CJC : le sursis à
exécution et les mesures provisoires ou conservatoires. De façon
générale, ces procédures sont soumises aux mêmes
règlements même s'il convient de préciser s'agissant du
sursis que l'acte attaqué ne doit intéresser ni la
sécurité, ni la tranquillité publiques129(*). Le sursis ne peut
être demandé que par celui qui a attaqué l'acte par le
moyen d'un recours devant la Cour ou qui a formé contre l'arrêt
une tierce opposition130(*). Les autres mesures provisoires peuvent être
sollicitées par n'importe quelle partie. Dans tous les cas, la Cour doit
être déjà saisie du recours principal, qui peut être
n'importe quel recours direct. En revanche le référé ne
peut se greffer sur un recours préjudiciel car c'est alors au seul juge
national, saisi de l'affaire au principal, qu'il appartient d'ordonner
d'éventuelles mesures provisoires, par exemple de suspendre les effets
d'une loi qui lui apparaît contraire aux dispositions de droit
communautaire dont il demande l'interprétation.
S'agissant des voies de rétractation, on pourrait citer
le recours en interprétation, le recours en révision,
l'opposition et la tierce opposition. L'ordre juridique communautaire consacre
deux types d'interprétation : l'une classique régie par
l'article 98 des Règles de procédure de la Chambre judiciaire,
ouverte en cas de contestation sur le sens ou la portée du dispositif de
l'arrêt. La seconde est celle qui ressort de l'article 27 de la
Convention CJC, qui est une sorte de « recours dans
l'intérêt de la loi » ouvert pour éviter la
violation par les juridictions nationales du droit communautaire par des
interprétations erronées.
La révision a pour objet de permettre à toute
partie au litige, après le prononcé de l'arrêt, de revenir
devant la juridiction pour lui demander de modifier sa décision à
la suite de la découverte d'un fait nouveau et décisif.
L'ouverture du recours en révision est subordonnée à trois
conditions qui doivent être établies par le
requérant : le fait invoqué doit être antérieur
au prononcé de l'arrêt dont la révision est
demandée ; il doit être susceptible d'exercer une influence
décisive sur la solution apportée au litige et dès lors de
modifier l'arrêt rendu131(*). De plus, le juge de N'djamena exclut tout recours
en révision contre un arrêt intervenu dans une
précédente procédure de révision132(*).
La tierce opposition est une voie de recours extraordinaire
ouverte aux tiers contre les arrêts qui portent atteinte à leurs
droits. De caractère exceptionnel parce qu'intervenant après le
prononcé de l'arrêt contre lequel elle est dirigée et
portant, de ce fait, atteinte au principe de l'autorité de la Chose
jugée et à la sécurité des relations juridiques, la
tierce opposition est soumise à des conditions strictes de
recevabilité.
« Le contentieux communautaire a prévu
cette voie de droit dans le souci d'assurer une bonne administration de la
justice et de conférer notamment une protection juridique à ceux
qui, tout en étant demeurés étrangers au litige, ont
souffert d'un préjudice consécutif à celui-ci. La tierce
opposition vise à mettre à la disposition des tiers
menacés ou lésés par l'existence d'un arrêt qui leur
est opposable, une voie de droit qui leur permet, s'ils le désirent, de
se faire entendre et de solliciter la rétractation de la décision
qui porte préjudice à leurs droits133(*) ».
Le droit de former tierce opposition est subordonné
à trois conditions : n'avoir pas été appelé
à l'arrêt contre lequel la tierce opposition est dirigée,
avoir subi un préjudice dans ses droits à la suite de cet
arrêt et avoir présenté sa demande dans les délais
prescrits. La tierce opposition est cependant toujours irrecevable contre un
arrêt de rejet, un tel arrêt ne pouvant porter atteinte aux droits
du tiers puisqu'il ne modifie pas les situations juridiques
existantes134(*).
Toutes ces voies de droit ordinaires ou extraordinaires
doivent en plus de ces conditions qui leur sont spécifiques
répondre à certaines conditions de forme.
PARAGRAPHE II - LES CONDITIONS FORMELLES
En plus des conditions portant sur la présentation de
la requête (A) le juge veillera à s'assurer que le
différend qui lui est porté est encore actuel (B).
A- La présentation
de la requête
La saisine de la CJC se fait essentiellement par un
écrit qui doit contenir sous peine d'irrecevabilité certains
éléments (1) et obéir à une certaine forme (2).
1- Le contenu de la
requête
Aux termes des articles 14 à 17 des Règles de
procédure de la Chambre judiciaire de la Cour de son ancienne
configuration, la requête rédigée datée et
signée du demandeur ou de son agent, conseil ou avocat est
adressée à la Cour ou déposée au greffe en cinq
exemplaires et autant de copies qu'il y'a de parties en cause. La requête
doit à peine d'irrecevabilité, indiquer les noms, profession et
adresse des parties, l'objet de la demande, contenir l'exposé sommaire
du litige et les moyens invoqués à l'appui de la demande et
être accompagnée de l'acte attaqué. La requête
introductive d'instance doit être suivie dans les quarante cinq jours,
d'un mémoire ampliatif.
Lorsqu'il s'agit d'un recours en annulation, le
requérant devait produire l'acte dont l'annulation est demandée.
S'il s'agit d'une action en carence, le requérant doit justifier de la
date de la saisine préalable de l'institution mise en cause. Enfin,
lorsque la juridiction statue en vertu d'une clause compromissoire, celle-ci
doit être produite. Il en serait de même si la Cour statue sur la
base d'un compromis conclu entre Etats membres.
Interrogée sur la qualité sommaire d'une
requête rédigée sur trois pages par un défendeur qui
la jugeait irrecevable, la Chambre judiciaire n'a pas statué sur cet
argument et a manqué ainsi de préciser le sens du mot
« sommaire »135(*). Son homologue européenne s'est
penchée sur la question et a estimé que la formule
« exposé sommaire des moyens » imposait que la
requête explicite en quoi consistait le moyen sur lequel se fondait le
recours136(*)
c'est-à-dire que la requête permette de dégager les griefs
que le requérant entendait faire valoir ainsi que l'essentiel des
arguments invoqués à leur appui137(*). La CJCE se montre assez libérale à
cet égard et déclare recevable une requête dès lors
qu'elle « mentionne avec une clarté suffisante les
principes de droit qui, selon le requérant, auraient été
enfreints...138(*) ». Quelques imperfections de la
requête ne sauraient suffire à la faire déclarer
irrecevable dès lors qu'elles ne sont pas de nature à
empêcher le défendeur d'organiser sa défense et à la
Cour d'exercer son contrôle139(*). Dans tous les cas, la requête
détermine l'objet du litige et ne peut être modifié par la
suite. Il en est de même de la langue utilisée.
2- La forme de la
requête
L'article 21 de la Convention régissant la Cour de
justice communautaire dispose : « le français est la
langue officielle de travail de la Cour de justice de la CEMAC. Toutefois, il
est admis, au sein de la Cour, l'usage de l'anglais, de l'arabe et de
l'espagnol ». Ainsi bien que les décisions de la Cour
soient rendues en français, les justiciables peuvent user devant la Cour
des autres langues de la Communauté. Les juges autant que les
justiciables doivent, en effet, pouvoir comprendre et se faire comprendre dans
la langue qui leur est habituelle : la confiance dans la justice est
à ce prix140(*).
Contrairement à ce qui se passe devant la CJCE
où la procédure est gratuite et ne comporte pas de frais, la
procédure devant la CJC est soumise à une obligation de
cautionnement141(*). En
effet, la procédure devant la Cour, comme avant elle devant la Chambre
judiciaire, n'est gratuite que dans les cas de renvoi préjudiciel et en
matière de contentieux de la fonction publique communautaire ou dans
tous les cas de saisine de la Cour par les organes et institutions
communautaires. Par contre, le taux de consignation de cent mille francs CFA
est exigé pour tous les autres cas de saisine. Cette exigence de frais
peut dans certains cas pousser le justiciable à se désister.
B - L'existence d'un
différend non éteint
Le différend peut être éteint par l'effet
du temps (1) ou par l'impossibilité pour le requérant de saisir
la juridiction communautaire d'un litige épuisé (2).
1- Les délais
d'action
Le juge ne peut se prononcer que si le requérant a
intenté son recours dans le temps à lui accordé ;
dans le cas contraire, celui-ci ne pourra statuer. Il existe dans la plupart
des cas un temps pour initier une instance, ou alors un délai d'action,
de même qu'un délai pour exercer une voie de recours et un temps
pour la comparution. Aux termes de l'article 12 des Règles de
procédure de la Chambre judiciaire, le délai de recours contre
les actes est de deux mois sauf s'il en est décidé autrement. Il
s'agit d'un délai franc où le dies ad quem et le
dies ad quo ne sont pas pris en compte dans la computation. De
même, les jours fériés et les dimanches ne sont pas
comptés. Ce délai, le juge de N'djamena l'a étendu au
sursis à exécution142(*) tout en précisant qu'il ne concerne que le
recours en annulation à l'exclusion du recours en
indemnisation143(*). Par
ailleurs, le recours en intervention est recevable en tout état de cause
jusqu'à la clôture des débats144(*).
A l'expiration du délai, même si une
requête avait été déposée, son auteur cesse
de pouvoir la développer au-delà de son objet initial, voire
au-delà de ses moyens initiaux et en tout cas de la « cause
juridique » déjà soutenue avant la forclusion ;
les requérants doivent donc non seulement agir à temps mais aussi
assez agir à temps, sauf que subsiste la possibilité d'invoquer
à tout moment l'ordre public145(*). Mais le principal effet du délai reste bien
l'impossibilité pour le requérant de saisir le juge
communautaire, l'écoulement du délai ressemblant à une
renonciation tacite.
2- L'actualité de
la réclamation
Le droit du contentieux international admet qu'une action
puisse être écartée à titre préliminaire, au
motif que l'auteur de la demande avait pu légalement renoncer à
trouver son action. Toutefois, un tel effet est subordonné à un
examen de la juridiction qui le reconnait seulement si la renonciation est
établie par un acte écrit non équivoque146(*). Ainsi, les parties en
litige ayant réussi à se concilier et à conclure un accord
mettant fin à leur différend, l'existence d'un tel accord emporte
l'irrecevabilité du recours que l'une exercerait ultérieurement
et qui tendrait à soumettre au juge les questions mêmes sur
lesquelles l'accord s'est fait. Il reste tout de même constant qu'un tel
accord n'est opposable à ses auteurs que pour autant qu'il porte sur des
droits dont elles ont la disposition, ce qui signifie que l'accord ne saurait
exclure l'exercice d'un recours ayant pour objet la sauvegarde de la
légalité tel que le recours en annulation.
En effet, peut-il être opposé à un
requérant qu'il aurait antérieurement et irrévocablement
renoncé à l'action qu'il prétend intenter
aujourd'hui ? Une exigence de bonne foi y conduit, quand les
impératifs de l'ordre public juridique voire la protection
d'administrés abusés ou en tout cas imprudents retiennent d'y
souscrire147(*). La
renonciation à des droits subjectifs est bien opposable à son
auteur, pourvu qu'elle soit sûre et sincère, et à condition
qu'elle n'attente pas à des questions d'ordre public. La renonciation
à une action en illégalité en revanche est sans effet ni
valeur. Tout de même serait dénié l'intérêt
à agir d'un requérant contre un acte pris sur sa demande ou qui
aurait renoncé expressément à ses droits, sauf vice du
consentement148(*).
Pour le demandeur, se désister ; c'est renoncer au
procès, donc l'arrêter. On en distingue d'après le
professeur Pacteau, deux grandes formes selon que ce désistement est
volontaire, traduisant la renonciation, en quelque sorte l'abdication, du
requérant ou prononcé d'autorité et d'office par le juge,
constituant alors plutôt sa déchéance149(*). Dans la première
hypothèse qui nous intéresse ici, le juge peut ne pas tenir
compte d'un désistement présenté après
clôture de l'instruction. Il reviendra sans doute au juge communautaire
d'en « donner acte » et de liquider le procès. Ce
donné acte n'est pas sans importance et il rend le désistement
irréversible ; aussi sa procédure doit être
contradictoire. Mais pour le juge, donner acte du désistement, c'est
bien seulement en prendre acte et au besoin par simple ordonnance150(*).
L'actualité de la réclamation stipule aussi
l'absence de la chose jugée. L'autorité de la chose jugée
interdit en effet la répétition pure et simple d'un
procès. Cette chose jugée est opposable même au
défendeur qui prétendrait agir cette fois en demande. Le juge
communautaire rejette ainsi un recours en révision d'une
précédente procédure de révision pour
autorité de la chose jugée151(*). L'éventualité de nouveaux contentieux
subsiste tout de même : un recours déclaré irrecevable
est donc renvoyé plus que rejeté, il peut être
retenté.
Le constat de l'actualité de la réclamation est
l'une des étapes de l'examen par le juge de la recevabilité des
requêtes par le juge communautaire.
CHAPITRE II : L'EXAMEN DE LA RECEVABILITE
Avant de se prononcer sur la recevabilité de la
requête (section II), le juge communautaire de N'djamena comme n'importe
quel juge d'ailleurs, l'examine au regard d'un certain nombre de principes et
de règles qui s'imposent à lui ou que lui-même
aménage (section I).
SECTION I : LE REGIME DE LA RECEVABILITE DES
REQUETES.
Le régime de la recevabilité pourrait être
organisé autour de deux principales idées : la place du
débat sur la recevabilité au sein de la procédure
contentieuse (paragraphe 1) et le titulaire du droit d'exciper le moyen au
cours de la procédure (paragraphe II)
PARAGRAPHE I- LE STATUT PROCÉDURAL DE LA
RECEVABILITÉ.
Le statut procédural de la recevabilité
soulève deux questions principales dans la démarche du juge. A
quel moment examine-t-il la recevabilité de la requête ?(A)
Lors de cet examen, quand apprécie-t-il la recevabilité de la
requête ? (B)
A- La
préliminarité de la recevabilité de la requête.
Selon le professeur Chapus, dans l'ordre normal des choses, la
question de savoir si un recours est recevable se situe à un stade
intermédiaire entre la question de savoir si la juridiction saisie est
compétente (1) et celle du bien fondé de la prétention
soumise au juge (2).
1- Recevabilité
et compétence
Dans le procès international, note le professeur
Santulli, la répartition matérielle entre compétence et
recevabilité n'est pas stable. En effet, dès qu'une exigence de
recevabilité est utilisée pour identifier l'étendue de
l'attribution d'une juridiction, c'est-à-dire la catégorie de
différends soumis à la juridiction, elle devient une condition de
compétence.
« Il en résulte que, suivant les termes
des engagements juridictionnels, la même exigence est une condition de
recevabilité ici, est une condition de compétence là. Ces
glissements conduisent à conclure que l'identification des conditions de
recevabilité suppose logiquement la détermination des conditions
de compétence, puisque celles là sont telles seulement si elles
ne sont pas incluses dans celles-ci »152(*).
Quoi qu'il en soit, un principe élémentaire
exprime le caractère préliminaire des questions de
compétence. En particulier, si la CJC est incompétente, l'action
portée devant elle est nécessairement irrecevable, la Cour ne
pouvant pas exercer ses pouvoirs en dehors de la sphère qui lui est
attribuée car elle en est, par définition, la limite153(*).
Normalement donc, la question de la recevabilité d'un
recours vient après celle de la compétence du juge communautaire
saisi. Si une réponse négative est faite à la question de
la compétence, le recours sera, sans examen de sa recevabilité,
rejeté. Toutefois, « l'ordre entre compétence et
recevabilité n'a rien de nécessaire. Concrètement, au
regard des liens qui unissent compétences et pouvoirs, une juridiction
peut, d'abord, déclarer une action irrecevable après avoir
constaté qu'elle est sans compétence pour en
connaître 154(*)». Il n'est donc pas exclu que le juge de
N'djamena puisse rejeter un recours comme irrecevable alors qu'il
n'était pas, le juge compétent pour y statuer.
« Le rejet pour cause d'irrecevabilité,
dans une telle hypothèse, a pour intérêt de dispenser la
juridiction saisie à tort de provoquer le renvoi de l'affaire, qui, s'il
était prononcé, serait inutile, en ce sens que la juridiction de
renvoi devrait rejeter le recours comme irrecevable. Il n'y a lieu de statuer
sur le caractère « manifeste » de
l'irrecevabilité que pour rappeler qu'il peut arriver, dans des cas
limites, que ce qui est évident pour les uns ne le soit pas pour les
autres.155(*) »
Cette préliminarité exceptionnelle de la
recevabilité face à la compétence est le principe par
rapport aux questions de fond.
2- Recevabilité de
la requête et fond du litige
Le juge communautaire ne peut aborder l'examen du fond si le
recours est irrecevable. Pour le professeur Witenberg,
« Il y'a à cela un intérêt
logique et juridique. Intérêt logique, tout d'abord,
intérêt évident de méthode et de bonne tenue du
débat judiciaire. De quoi, servirait-il, en effet, que les débats
s'instituassent ou se poursuivissent sur l'existence, sur l'étendue des
obligations réclamées, au cas où ces dernières,
à les tenir pour constantes, ne pourraient être judiciairement
sanctionnées ? Intérêt juridique ensuite. Car le
défendeur, attrait devant le juge sur l'initiative unilatérale du
demandeur, ne saurait être juridiquement contraint de développer
sa défense s'il peut, sans supporter cette charge, se soustraire
à toute condamnation. Or les irrecevabilités éventuelles
lui en offrent, logiquement, le moyen. S'il en excipe, il évitera ou
tout au moins retardera le débat sur la question fondamentale du litige.
L'on contrôlera donc, au préalable, que le demandeur a le droit
d'agir, qu'il exerce ce droit dans les formes prescrites et qu'aucun obstacle
légal ne viendra paralyser l'adjudication de la demande si l'obligation
réclamée existe. Logiquement et juridiquement, cette technique
s'impose. Mieux vaut accroitre la charge subie par le demandeur
prétendant au bénéfice d'une obligation non
présumable que de soumettre le défendeur qui subit la litigation
à la nécessité d'une défense susceptible de
paraitre vaine156(*) ».
Le caractère préliminaire des conditions de
recevabilité a pour conséquence qu'elles doivent être
appréciées avant d'adopter une décision quant au bien
fondé de sa prétention.
Toutefois, l'état du droit n'est pas d'une rigueur
absolue sur ce point et il n'exclut pas dans l'intérêt d'une bonne
administration de la justice, le rejet d'une demande manifestement mal
fondée, sans examen de la recevabilité. Cette jonction au fond
par la juridiction communautaire est généralement motivée
par le fait que les moyens invoqués à l'appui de la fin de non
recevoir sont peu convaincants ou que leur pertinence ne peut être
appréciée indépendamment du fond157(*). Pour le professeur Chapus
une telle pratique ne peut qu'être approuvée, et tout
particulièrement dans le cas où il pouvait effectivement y avoir
rejet pour cause d'irrecevabilité : mieux vaut régler une
affaire au fond que prononcer un tel rejet, qui occulterait ce qu'est
l'état du droit quant à la question litigieuse et qui, de plus,
pourrait faire croire au requérant que son succès n'a
été empêché que pour des raisons de
procédure158(*).
Il reste qu'en aucun cas, le juge ne saurait donner satisfaction au
requérant si le recours est irrecevable.
B- Le moment de
l'appréciation de la recevabilité de la requête
La question du moment auquel s'apprécient les
conditions de recevabilité soulève de façon plus
spécifique la question de la régularisation de certaines
irrégularités en cours d'instance. Le juge communautaire en
déterminant le moment à partir duquel il juge de la
recevabilité de la requête octroie ou non une chance aux
requérants de rectifier d'éventuels manquements. En l'absence
d'un règlement de procédure de la Cour et d'une pratique
plutôt rigoureuse159(*), l'on énoncera ici les principes
généraux qui pourraient guider le juge de N'djamena.
De façon générale, les conditions de
recevabilité qui s'apprécient au moment de l'introduction de la
requête et qui en raison de leur nature même ne peuvent être
couvertes sont celles qui tiennent à la tardiveté du recours,
à la méconnaissance d'une obligation de former un recours
préalable, ainsi qu'au fait que le recours a été
dirigé contre une mesure ou une décision insusceptible de
recours160(*). L'on
pourrait a contrario admettre la régularisation ultérieure d'une
requête présentée par un acteur sans qualité, si
celui qui avait capacité ou mandat à cet effet se l'approprie
dans les délais d'action comme l'a admis le Conseil d'Etat
français dans un arrêt du 8 mars 1963, amicale des membres des
tribunaux administratifs161(*).
Cette faculté de sauvetage qui compense l'accroissement
des règles de recevabilité, est précieuse pour les
plaideurs inexpérimentés. Au nom de « ses
obligations dans la conduite de l'instruction », le Conseil
d'Etat a même astreint le juge à y inviter les requérants
avant de leur opposer une irrecevabilité qu'il invoquerait
d'office162(*).
PARAGRAPHE II- L'INITIATIVE DU MOYEN DE RECEVABILITÉ DE
LA REQUÊTE.
Qui doit exciper le moyen d'irrecevabilité de la
requête ? Est ce le juge dans son rôle de gardien de l'ordre
juridique communautaire ? (B) ou le défendeur dont le moyen
d'irrecevabilité est justement un moyen pour se soustraire aux demandes
du requérant sans débat sur l'objet du litige ? (A).
A- Le principe de la
présentation par le défendeur
En fait, écrit le professeur Witenberg, une des raisons
d'être de la recevabilité est de permettre au défendeur
d'éviter, s'il le peut, les débats au fond du droit163(*). L'on pourrait même
induire du silence du défendeur l'abandon du moyen
d'irrecevabilité, ou tout au moins de la procédure liminaire et
spéciale normalement applicable à ce moyen164(*). Cette idée du moyen
d'irrecevabilité comme moyen destiné à sauvegarder les
intérêts du défendeur transparait clairement de la
jurisprudence communautaire CEMAC où les défendeurs
n'hésitent pas à l'exciper pour empêcher tout débat
au fond165(*).
Dans le droit processuel, on distingue ainsi entre exception
d'irrecevabilité et fin de non recevoir. L'exception
d'irrecevabilité est selon le Dictionnaire de droit international, un
« moyen de procédure tendant à obtenir que le juge
compétent pour connaitre une affaire ne procède pas à
l'examen au fond pour le motif qu'une condition préalable à cet
examen fait défaut166(*) » tandis que la fin de non recevoir est
une
« expression de droit processuel interne qui
exige un moyen de défense consistant à contester le droit d'agir
de l'adversaire en se fondant sur son défaut d'intérêt ou
de qualité, la prescription, la forclusion ou la chose jugée et
tendant au rejet de sa demande sans examen au fond. Ce moyen peut être
invoqué en tout état de cause sans que celui qui s'en
prévaut ait à faire la preuve d'un grief. En ce sens, la fin de
non recevoir est parfois distinguée de l'exception
d'irrecevabilité qui, s'opposerait, elle, à l'exercice de
l'action en justice »167(*).
Que le défendeur excipe du défaut
d'intérêt ou de qualité de son adversaire, qu'il oppose le
caractère tardif du recours formé contre lui, le résultat
de l'exception d'irrecevabilité sera non pas seulement d'arrêter
ou de retarder l'instance, mais de faire rejeter la demande d'une façon
définitive ; alors que les fins de non recevoir sans contredire la
demande sur le fond, la paralysent sans engager ouvertement le conflit sur
elle168(*). La Cour
permanente de justice internationale a ainsi commenté cette
distinction :
« S'agit-il ici d'un de ces moyens de
défense, tirés du fond de la cause et tendant à en faire
écarter l'examen par le juge, auxquels on donne,
généralement, ainsi que l'a fait le droit français, le nom
de « fin de non-recevoir » ? Ou bien n'est-on pas
plutôt en présence d'une véritable exception, s'opposant
(...) non pas à l'action elle-même et au droit sur lequel elle
repose, mais à l'exercice de cette action en
justice ?169(*) »
En droit interne et sous réserve des moyens dits
d'ordre public, l'exception doit être soulevée in limine
litis, tout au moins dès que le fait qui y donne lieu se produit.
Faute de quoi la partie défenderesse ne pourra plus prétendre se
soustraire aux débats du fond et restreindre son argumentation au moyen
tant que celui-ci n'aurait pas fait l'objet d'une décision
particulière. Cette idée d'appartenance du moyen de
recevabilité au défendeur correspond à une conception de
la justice internationale où le procès est d'abord la chose des
parties. En raison justement de la spécificité de la juridiction
communautaire, le juge de la CEMAC n'hésite pas à invoquer ex
officio l'inobservation de certaines conditions de recevabilité
pour préserver l'ordre juridique communautaire.
B- L'invocation d'office
par le juge.
« Il est juste que l'exercice du procès
soit canalisé. La fonction disciplinaire des règles de
recevabilité en impose aussi la mise en oeuvre stricte, voire
mécanique. Leur méconnaissance est par principe d'ordre public
invocable à tout instant et opposable d'office170(*) ».
Cette conception des règles de recevabilité est
celle suivie par le juge communautaire tant européen que de l'Afrique
centrale. La Cour peut donc d'office à tout moment examiner les fins de
non recevoir d'ordre public. Le juge communautaire n'hésite donc pas
à sanctionner le non respect des délais
impératifs171(*),
le défaut d'intérêt172(*), la non observation des préalables
procéduraux173(*). Ce raisonnement est partagé par la doctrine
qui estime que les moyens d'ordre public tels que l'incompétence ou la
violation des formes substantielles peuvent être soulevés à
tout moment et doivent même être relevés d'office par le
juge communautaire174(*).
Si le juge de N'djamena et celui de Luxembourg ont
adopté le même raisonnement sur la nature d'ordre public de
certains critères de recevabilité, des différences
apparaissent dans leurs méthodes de travail.
SECTION II : LE JUGEMENT SUR LA RECEVABILITE DE LA
REQUETE.
Le prononcé de la décision par le juge
(paragraphe II) est précédé d'une phase d'analyse et
d'instruction au cours de laquelle le juge examine véritablement les
arguments des parties sur la recevabilité et le cas
échéant la défense du demandeur aux exceptions
d'irrecevabilité et fins de non recevoir (paragraphe I).
PARAGRAPHE I- L'INSTRUCTION DE LA RECEVABILITÉ.
Selon les termes de l'article 24 des Règles de
procédure de la Chambre judiciaire, dès transmission du dossier,
un juge rapporteur est désigné pour instruire la
procédure. Il s'agit là de la soumission de la juridiction
communautaire à ce que le professeur Chapus désigne comme
« le principe de l'obligation d'instruire avant de
juger175(*) ». Le principe est en effet que les
affaires dont une juridiction administrative est saisie ne puissent être
jugées sans avoir fait l'objet d'une instruction propre à les
mettre en état d'être réglées par cette juridiction
en aussi bonne connaissance de cause que possible. L'importance du principe
explique qu'il ne peut céder que dans l'hypothèse précise
où il apparaît au vu de la requête introductive d'instance,
que la solution de l'affaire est d'ores et déjà certaine. Au
centre de l'instruction de la CJC se trouve le juge rapporteur (B) qui doit
observer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice
certains principes (A).
A- Les caractères
généraux de la procédure d'instruction.
L'instruction devant le juge rapporteur de la CJC est
écrite, contradictoire tout en demeurant inquisitoriale.
Le principe du caractère écrit de la
procédure d'instruction est une garantie de bonne justice176(*). Il permet, en effet, au
juge communautaire comme aux parties d'être pleinement et constamment au
courant du déroulement de l'instruction du procès. Il
prévient les surprises « et si, bien entendu, une
procédure orale peut être disciplinée de façon
à satisfaire aux exigences de la nécessaire contradiction, une
procédure écrite est de nature à y satisfaire plus
naturellement et sûrement177(*) ».
Le principe d'inquisitorialité de l'instruction renvoie
de façon traditionnelle et usuelle au principe selon lequel le
déroulement de la procédure d'instruction est sous la maitrise,
non des parties, mais du juge. Le juge rapporteur dirige l'instruction ou plus
précisément, il la dirige seul. Ce rôle directeur du juge
communautaire pendant la durée du procès est symbolisé au
début même de l'instance par la technique de sa saisine, la
requête. C'est dire que le demandeur ne procède pas, comme cela
se fait en principe en matière civile devant les juridictions internes,
en faisant « assignation » à son adversaire de se
présenter devant le juge. Il s'adresse directement et exclusivement au
juge communautaire. C'est celui-ci qui aura la charge d'assurer la
communication de la requête au défendeur178(*), et, en somme de mettre ce
dernier en rapport avec le requérant. Une fois l'instance
engagée, toute initiative n'est sans doute pas interdite aux
parties ; elles peuvent notamment demander des mesures d'instruction. Il
est normal qu'elles ne soient pas réduites à la passivité,
mais la conduite de l'instruction leur échappe179(*).
Le principe du contradictoire dérive justement de cette
nature inquisitoriale de l'instruction comme le démontre le professeur
Elisabeth Zoller en le distinguant de l'égalité des armes :
« la règle du contradictoire opère
dans le champ de la procédure inquisitoire, celle de
l'égalité des armes fait sens dans le champ de la
procédure accusatoire. La règle du contradictoire retire son
venin à la procédure inquisitoire, en donnant un droit de
réponse au justiciable face à ses juges, elle lime, pour ne pas
dire, elle sape la figure de l'Etat dans le prétoire, elle le rabaisse
au rang d'un justiciable ordinaire. L'égalité des armes retire
son venin à la procédure accusatoire ; en donnant aux
parties le droit d'être à égalité, elle
dépouille le représentant de l'Etat de sa position
traditionnellement « supérieure » à celle du
justiciable dans le prétoire et sape, elle aussi, la position de l'Etat
dans la procédure 180(*)».
Selon la Cour européenne des droits de l'homme,
l'égalité des armes « implique l'obligation d'offrir
à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter
sa cause... dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net
désavantage par rapport à son adversaire181(*) ». Ainsi compris,
le principe de l'égalité des armes « constitue un
élément de la notion plus large de procès
équitable, qui englobe aussi le droit fondamental au caractère
contradictoire de la procédure pénale182(*) ».
Le principe du contradictoire permet de faire des Etats
membres et des institutions et organes communautaires, des justiciables comme
les autres, humbles et soumis à la toute puissance du droit
communautaire et de son représentant, le juge. Ce principe garantit
d'abord aux parties le droit d'être informées. C'est leur droit
à savoir. Cela emporte un droit d'information sur l'instance par ceux
contre qui elle est dirigée, et non moins au cours de l'instance sur
l'ensemble du dossier d'instruction. Ainsi aucun document ne saurait être
régulièrement soumis au juge sans que les parties aient
été à même d'en prendre connaissance. Il
n'appartiendrait pas de même au juge communautaire de prendre de
lui-même en considération des éléments qui
n'auraient pas été communiquées à la partie
défenderesse. Le contradictoire implique d'autre part pour les parties
un droit d'informer ; c'est alors leur droit de faire savoir, donc de
répondre aux observations de leur adversaire, avec la garantie, pour que
ce droit soit effectif, de disposer à cet effet d'un délai
suffisant pour cette réplique. La question peut se poser sur les moyens
d'ordre public soulevés par le juge ou encore du cas de l'Avocat
général.
S'agissant de l'Avocat général, la Cour de
justice des Communautés européennes a souligné que
l'avocat général a le même statut qu'un juge, qu'il n'est
pas chargé de la défense de quelque intérêt que ce
soit et que ses délibérations ouvrent la phase du
délibéré de la Cour. La CJCE affirme que «
l'avocat général participe ainsi publiquement et
personnellement au processus d'élaboration de la décision de la
Cour et, partant, à l'accomplissement de la fonction juridictionnelle
confiée à cette dernière ». En
conséquence, « eu égard aux liens tant organique que
fonctionnel entre l'avocat général et la Cour », la
jurisprudence précitée de la Cour européenne des droits de
l'homme -- examinée par le juge communautaire -- « ne
paraît pas transposable aux conclusions des avocats
généraux à la Cour 183(*)». Les conclusions de l'avocat
général ne sont donc pas soumises au principe du contradictoire.
Quant à la seconde question qui est de savoir si les moyens
d'irrecevabilité soulevés d'office par le juge doivent être
soumis au principe du contradictoire, nous penchons, dans la logique de la
« communauté de droit » et du procès
équitable, pour une réponse affirmative. Le juge de N'djamena
devrait suivre l'exemple du juge administratif français où depuis
un Décret du 22 janvier 1992, les moyens d'ordre public susceptibles
d'être retenus d'office doivent avoir été
préalablement communiqués aux parties, et s'ils n'apparaissent
qu'au délibéré, ils ne sauraient être retenus sans
que l'instruction ait été rouverte afin qu'ils soient
débattus184(*).
Cette démarche permettrait au juge rapporteur de présenter un
rapport éclairé et objectif.
B- L'office du juge
rapporteur
De façon générale en droit processuel
interne, le juge rapporteur est le juge chargé de procéder
à une synthèse du dossier : chronologie des faits, rappels de la
procédure, et reprise succincte de l'argumentation des parties en
présence. Le juge rapporteur fait son rapport à l'audience avant
que les parties ne s'expriment. Cela permet à la juridiction d'avoir un
premier aperçu du dossier avant l'intervention des parties ainsi que les
éventuelles questions et difficultés que pose le dossier. La
fonction de juge rapporteur permet aux juridictions collégiales de se
répartir les dossiers, chaque membre de la juridiction étant juge
rapporteur pour la partie de dossiers qui lui ont été
confiés.
Cet office devant la Chambre judiciaire est traité aux
articles 24 à 26 des Règles de procédure de la Chambre
judiciaire. Comme l'indique bien le titre du chapitre IV qui regroupe ces
articles, le juge rapporteur est essentiellement chargé de la mise en
état des procédures. Il veille au déroulement loyal de la
procédure, à la ponctualité de l'échange des
mémoires, à la communication des pièces et au
contrôle de l'exécution des mesures d'instructions
ordonnées. Il peut mettre en demeure de lui fournir des explications
écrites ou tout document dont la production lui parait nécessaire
à la solution du litige.
Concernant spécifiquement la recevabilité, c'est
au juge rapporteur qu'il appartiendra de s'assurer que le requérant a eu
la possibilité de répondre aux exceptions d'irrecevabilité
et fins de non recevoir soulevées par le défendeur ou qu'il aura
soulevées d'office. A ce propos, l'observation de la pratique de la
Chambre judiciaire de l'ancienne Cour de justice de la CEMAC
révèle quelquefois des contrariétés avec l'article
29 des Règles de procédure de la Chambre. En effet, alors que cet
article limite le rôle du juge d'instruction aux seuls actes
d'instruction, certains juges rapporteurs n'hésitent pas à juger
véritablement l'affaire en insérant dans leur rapport une partie
« Point de vue de la Cour » qu'heureusement la
Cour ne suit pas toujours185(*).
A l'issue de son instruction, le juge rapporteur
présente un rapport préalable. Ce rapport présente
l'affaire en examinant les conditions de recevabilité et les points de
droit soulevés. Il propose éventuellement des mesures
d'instruction ou des mesures préparatoires, les questions à poser
aux parties, voire à un Etat membre ou à une institution qui ne
sont pas parties186(*).
De même, la procédure orale commence par la lecture du rapport
présenté par le juge rapporteur187(*). Cette communication permet aux parties de
vérifier que le rapport est à la fois objectif et complet et, le
cas échéant, de suggérer qu'il y soit apporté
certaines modifications ou ajouts. C'est sur la base de ce rapport,
qu'après avoir écouté les réquisitions de l'Avocat
général et les conclusions des agents, mandataires et avocats, la
Cour prend sa décision.
PARAGRAPHE II- L'EFFET DE LA DÉCISION SUR LA
RECEVABILITÉ DE LA REQUÊTE
Les effets du jugement de recevabilité seront distincts
selon qu'il admet (B) ou écarte le moyen d'irrecevabilité (B).
A- La décision de
recevabilité de la requête.
La décision qui écarte le moyen
d'irrecevabilité ou le moyen de défense avancé en forme
d'exception ne met pas fin au procès mais au contraire ouvre
« véritablement » le procès en permettant le
débat sur les questions de fond. Elle n'est qu'une étape dans
l'accomplissement par le juge communautaire de sa mission et constitue selon le
professeur Witenberg moins un jugement proprement dit que des incidents de
procédure. Elle participe moins des sentences judiciaires que des
ordonnances provisoires émises en cours de procédure par le juge
pour régler le cours des débats188(*).
Les débats vont désormais s'engager sur la
question fondamentale du litige, sur les mérites des prétentions
du demandeur. La préliminarité et la spécialité des
débats de recevabilité auront sauvegardé
l'intégralité des moyens de défense au fond du
défendeur. Les moyens de fait et les moyens de droit, d'où se
déduit le dispositif du jugement ne permettent pas de
présumer l'existence de l'obligation réclamée et, s'ils
peuvent « effleurer le fond » ne le font que
provisoirement. « En un mot la décision prononçant
la recevabilité ne lie au fond ni les parties, ni le juge, elle se borne
à préparer le fond en permettant d'y accéder189(*) ». Il en est
autrement de la décision d'irrecevabilité.
B- La décision
d'irrecevabilité.
La décision d'irrecevabilité a pour principale
conséquence d'empêcher l'examen des prétentions du
demandeur. Contrairement a ce qui a été dit
précédemment pour la décision de recevabilité, le
juge communautaire en prononçant l'irrecevabilité de la
requête met fin au procès et à sa mission ; tout au
moins dans cette instance particulière. Cet effet est d'autant plus
radical que la CJC ne connaît a priori pas de double degré de
juridiction et ses décisions sont insusceptibles d'appel comme
l'énoncent clairement les articles 29 à 31 de la Convention
régissant la CJC190(*).
En effet contrairement à sa consoeur européenne
dont les statuts admettent un pourvoi contre les décisions du tribunal
de première instance des communautés européennes sur des
moyens tirés soit de l'incompétence du tribunal, soit
d'irrégularités de procédure, soit de la violation du
droit communautaire, la CJC rend ses décisions en premier et dernier
ressort. Certes « le double degré de juridiction n'est pas
reconnu comme un principe général du droit s'imposant en
l'absence d'une disposition écrite la prévoyant191(*) » et l'on ne
saurait exiger du juge de N'djamena qu'il institue un double degré de
juridiction dont n'ont pas voulu les Etats, législateurs communautaires,
mais celui-ci en raison des conséquences qu'emporte justement la
décision d'irrecevabilité sur la protection de l'ordre juridique
communautaire et des droits des particuliers, se doit de mettre sur pied une
véritable politique jurisprudentielle d'examen de recevabilité
plus libérale sans être laxiste.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
S'il est difficile d'examiner de façon
définitive les règles de recevabilité requises pour
l'examen des requêtes par le juge communautaire en l'absence d'un
règlement de procédure de la Cour de justice communautaire telle
qu'issue de la reforme conventionnelle de Yaoundé du 25 juin 2008, il ne
fait cependant pas de doute que ces règles comme celles en vigueur
devant la Chambre judiciaire de la Cour dans son ancienne formule, ne devraient
pas s'éloigner dans les grands traits des conditions de
recevabilité devant les juridictions administratives des Etats membres.
La Cour en effet se rapproche en bien des points des juridictions
administratives internes et de nombreuses voies de droit ouvertes devant elles
se rapprochent fort opportunément des recours administratifs
internes : recours en annulation, recours en responsabilité
extracontractuelle, recours en contentieux de la fonction publique. Ce
rapprochement avec les juridictions administratives, d'inspiration
française, s'observe également dans les méthodes d'examen
de la recevabilité par le juge communautaire.
Toutefois, ce rapprochement doit se faire de façon
raisonnable car la CJC est également une juridiction internationale
chargée d'appliquer un droit supranational à des acteurs
dotés de la personnalité juridique internationale. Sur ce point,
il sera particulièrement intéressant de voir la gestion par le
juge de N'djamena des voies de droit inconnues de l'ordre juridique interne des
Etats que sont le recours en manquement et le recours en carence.
On s'en rend bien compte, le juge communautaire de la CEMAC,
comme son homologue de l'Union européenne, n'est pas un juge
commun : partagé entre sa double essence interne et internationale.
C'est le juge interne de la Communauté, d'une juridiction sui generis
qui doit construire sa crédibilité et asseoir une jurisprudence
qui se montre adaptée et conforme aux grandes préoccupations de
son temps notamment l'omniprésente question de la protection des droits
de l'homme. C'est sous cet aune et plus concrètement la question du
droit d'accès au juge, que sera observée la politique
jurisprudentielle de la CJC en matière de recevabilité des
requêtes.
DEUXIEME PARTIE : LA RECEVABILITE DES REQUETES,
UN INSTRUMENT AU SERVICE DE LA POLITIQUE JURISPRUDENTIELLE DE LA COUR DE
JUSTICE COMMUNAUTAIRE.
Comme l'écrit le professeur Denys Simon, la
définition du rôle du juge, consistant à dire le droit en
se gardant de toute ingérence dans le domaine du politique, semble
difficilement conciliable avec la mise en oeuvre d'une politique
interprétative, et a fortiori d'une interprétation politique, qui
lui feraient encourir les critiques classiquement adressées aux
« juges qui gouvernent ».
« Mais en même temps, on ne peut nier que
la fonction interprétative reconnue aux juridictions internationales
leur impose de construire une véritable « politique
juridique » susceptible d'orienter leurs options
interprétatives en fonction d'une appréciation globale des bases
politiques du système. Le juge se trouve donc nécessairement
partagé entre le souci de respecter les limites de sa fonction
judiciaire, et l'obligation de prendre en compte les composantes politiques de
sa fonction interprétative. Or cette tension permanente entre deux
exigences antagonistes prend précisément une acuité
particulière dans le système juridictionnel communautaire, compte
tenu de l'ampleur de la tâche interprétative confiée
à la Cour de justice et de la nature spécifique de l'ordre
juridique créé par les traités192(*) ».
Cette tension s'observe chez le juge CEMAC par deux attitudes
adoptées dans l'examen des règles de recevabilité :
l'une restrictive résultant de l'application rigoureuse des conditions
de recevabilité (chapitre III) et l'autre relativement libérale
conduisant à un plus large accès à son prétoire
(Chapitre IV). Bien qu'alternatives et difficiles à situer dans le
temps, nous qualifierons la première attitude d'initiale parce qu'elle
est l'attitude originaire face à la seconde que nous qualifierons
d'émergente.
CHAPITRE III : UNE POLITIQUE INITIALE RESTRICTIVE DE
L'ACCES AU JUGE COMMUNAUTAIRE
Cette attitude originaire du juge de N'djamena est le fruit
d'une interprétation rigoureuse et stricte (section II) de textes
énonçant des conditions de recevabilité dont la teneur
diffère selon les justiciables (section I).
SECTION I : UNE RIGUEUR TEXTUELLE DESEQUILIBREE.
La lecture des textes, traités et règles de
procédure de la Chambre judiciaire de la CEMAC, révèle de
façon implicite mais évidente un accès inégalitaire
au juge communautaire (paragraphe I) dont la manifestation la plus
éclatante est sans doute le caractère particulièrement
restrictif des conditions de recevabilité des requêtes des
particuliers (paragraphe II).
PARAGRAPHE I- UN ACCÈS
INÉGALITAIRE AU JUGE COMMUNAUTAIRE.
Au-delà de la distinction requérants
privilégiés-requérants ordinaires193(*), les règles de
recevabilité telles qu'elles découlent des textes
« législatifs » de la CEMAC laissent penser qu'il
est fort difficile pour les personnes privées de faire valoir leurs
droits et d'accéder au prétoire pour certains litiges (B) alors
que d'un autre côté se dégage une ouverture sans bornes du
prétoire pour les requérants institutionnels (A).
A- Un accès
quasi-illimité pour les requérants institutionnels.
Comme nous l'avons déjà signalé,
l'ouverture quasi-illimitée du prétoire communautaire aux Etats
et institutions communautaires découle de leur statut de gardien de la
légalité communautaire. En effet, cette qualité suppose
que ces requérants institutionnels sont affectés dans leurs
droits subjectifs par tout acte qui s'y rapporte. C'est cette
caractéristique substantielle que révèle le droit
communautaire européen et d'Afrique centrale en garantissant la
qualité pour agir aux Etats et institutions communautaires.
Toutefois, au regard de la logique d'intégration en
Afrique centrale, l'on se doute qu'ici plus qu'en Europe, cet accès
quasi- illimité des requérants institutionnels ou a contrario les
conditions restrictives imposées aux particuliers sont l'expression
d'une justice plus interétatique que supranationale. A regarder de
près,
« L'Etat reste donc en Afrique centrale
l'intelligence personnifiée de la collectivité dont parlait
Clausewitz. Il reste omniprésent, et n'est point contourné et
encore moins remplacé par des autorités fonctionnelles. On veut
pour preuve le fait que toutes les instances décisionnelles de la CEMAC
sont ni plus ni moins des organes interétatiques194(*) ».
C'est peut être ce qui pourrait expliquer la confiance
qu'ont les Etats et institutions de la CEMAC aux organes communautaires. Comme
l'écrit en effet le professeur Narcisse Mouelle Kombi,
« Les organismes d'intégration
régionale d'Afrique centrale ont été conçus et mis
en place en tant qu'associations d'Etats constituées par traité,
dotées d'une constitution et d'organes communs et possédant une
personnalité juridique distincte de celle des Etats membres. Ceux-ci
entendent demeurer des sujets souverains librement associés dans des
organismes interétatiques dont la qualification communautaire n'est ni
synonyme d'union ni prémice d'une fusion. De fait, le
« souverainisme » imprègne fortement les bases
structurantes de ces associations et se reflète dans le classicisme de
leur statut juridique195(*) ».
C'est ce souverainisme omniprésent qui pourrait
expliquer l'exclusion des particuliers de certaines procédures.
B- L'exclusion des
particuliers de certaines procédures.
L'accès à la justice communautaire apparait
comme une porte étroite pour les particuliers qui ne peuvent agir devant
le juge communautaire contre les Etats pourtant principaux débiteurs de
« l'immédiateté descendante » qu'ils tirent
de l'ordre juridique communautaire (1), ni saisir le juge de N'djamena
d'une question préjudicielle (2).
1- La fermeture du
recours en manquement
Il convient de prime abord de le repréciser : en
l'absence du règlement de procédure de la CJC et de jurisprudence
corrélative, nous ferons ici du droit prospectif en nous
référant aux règles et à la pratique de la CJCE.
L'ordre juridique communautaire réalise certes une
novation puisque les Etats n'en sont pas les seuls membres. Cependant la place
faite aux individus est incontestablement plus restreinte que celle des Etats.
Si en effet les personnes privées se trouvent dans une situation
comparable à celle des Etats en ce qui concerne l'accès à
la Cour lorsqu'il s'agit de procédures mettant en cause les institutions
communautaires, le droit communautaire refuse au contraire, de leur permettre
de faire constater par cette juridiction les violations du droit communautaire
lorsqu'elles sont le résultat d'actions étatiques. Or
pratiquement, l'immédiateté descendante du droit communautaire
pour les particuliers transite nécessairement par l'Etat qui en est le
cadre d'exercice. Les différentes violations du droit communautaire que
sont l'insuffisance des garanties de la primauté du droit communautaire
sur les droits internes, l'évanescence des conditions d'application, de
l'opposabilité, de l'invocabilité en droit interne des
règles de droit communautaire ou encore l'inexistence de
mécanisme de sanction des incompatibilités entre le droit sous
régional et les droits internes ont d'abord pour
« victimes » les particuliers, qui apparaissent donc
logiquement comme premiers intéressés de la protection de la
légalité communautaire. C'est d'ailleurs ce qu'a reconnu la CJCE
dans l'arrêt Van Gend en Loos. La juridiction européenne y
affirmait que « la vigilance des particuliers
intéressés à la sauvegarde de leurs droits entraine un
contrôle efficace qui s'ajoute à celui que les articles 169 et 170
confient à la diligence de la commission et des Etats membres196(*) ».
Si le juge européen malgré cette conclusion a
tout de même refusé l'accès des particuliers au recours en
manquement, c'est parce qu'il estimait que cette procédure ne
constituait pas une « protection juridictionnelle directe des
droits197(*) » des particuliers et investissait le juge
interne, juge de droit commun du droit communautaire, de la fonction de
sauvegarder les droits des justiciables198(*). Il existe pourtant des cas de figure dans lesquels
l'accès normal au juge national n'est pas possible. Il s'agit des actes
communautaires en vertu desquels une obligation ou interdiction est directement
applicable (en particulier les règlements), sans qu'un acte de
transposition national ne soit nécessaire. La seule possibilité
pour un particulier souhaitant invoquer ses droits contre une telle
interdiction est de recourir contre la sanction qui lui serait
éventuellement infligée par les autorités nationales en
cas de violation de la législation communautaire. Beaucoup estiment
qu'il n'est pas normal qu'un particulier soit amené à commettre
une infraction pour disposer d'un recours, puisqu'il ne dispose pas d'un droit
de recourir directement contre l'acte communautaire concerné. Cette
interprétation de la CJCE prive donc certains particuliers de tout moyen
de demander l'annulation de dispositions de portée
générale qui les concernent pourtant directement. C'est
pourquoi cette question fait débat parmi les juristes depuis un certain
temps. Certains prônent un assouplissement des conditions de recours
direct des particuliers à la Cour de justice, d'autres soutiennent que
la Communauté dispose, en principe, d'un système de recours
complet qui garantit la protection juridictionnelle effective, sous la forme
d'un recours direct, ou d'un recours devant les tribunaux nationaux qui peuvent
- ou même doivent - faire un renvoi préjudiciel à la Cour
de justice199(*).
De plus, ce qui est vrai en Europe pour le juge national ne l'est
cependant pas toujours dans les pays centrafricains où
l'indépendance de la justice reste à construire et a
été souvent décriée. Il semble donc fort opportun
d'offrir aux particuliers un moyen supplémentaire de se protéger
et de protéger ses droits en plus d'un juge national qui a
déjà du mal à requérir l'éclairage de la
juridiction communautaire à travers la procédure
préjudicielle.
2- L'absence de renvois
préjudiciels à l'initiative des justiciables.
De façon générale, la communauté
ne met pas en oeuvre elle-même les mesures qu'elle prend : elle
laisse cette tâche aux autorités nationales. Par
conséquent, les intérêts des administrés ne sont pas
affectés par l'acte communautaire, mais plutôt par les mesures
nationales prises pour son exécution et à propos de la
légalité desquelles il leur appartient de saisir les juges
nationaux200(*). Si un
doute apparait à propos de la légalité de la mesure
communautaire dont l'exécution est en cause, le juge national peut et
dans certains cas doit interroger sur ce point le juge de N'djamena par la voie
du renvoi préjudiciel prévu à l'article 26 de la
Convention CJC. A la lecture de l'article 26 suscité, il appert
clairement que le déclenchement de la procédure est
incontestablement le fait de la juridiction nationale et non des parties au
litige. Certes,
« les parties au lige principal en attente
devant la juridiction nationale qui a décidé le renvoi ne sont
pas absolument exclues de l'instance devant la Cour de justice. Elles ont le
droit de déposer devant la Cour des mémoires exposant leur point
de vue. Mais, pas plus que les parties litigantes ne peuvent porter directement
une question d'interprétation devant la Cour de justice, elles ne sont
en droit de poser dans leurs mémoires une question différente de
celle dont a été saisie la Cour par la juridiction nationale.
C'est donc la juridiction nationale qui seule peut saisir la Cour de justice,
c'est encore la juridiction nationale seule qui détermine le contenu de
la question posée201(*) ».
En définitive, c'est bien la volonté du juge
interne qui sera déterminante dans la procédure de renvoi :
l'initiative de son déclenchement et la délimitation juridique de
l'objet du renvoi sont réservées aux juridictions nationales.
En effet, même si la jurisprudence de la CJCE a
favorisé l'accès des citoyens à une protection juridique
communautaire, celle-ci demeure décentralisée : les tribunaux
nationaux sont le passage obligé des particuliers qui entendent faire
prévaloir des règles communautaires par le biais du renvoi
préjudiciel. De plus, note Olivier Costa,
« Le recours préjudiciel fait, lui aussi,
l'objet d'utilisations stratégiques. Lorsque les règles
communautaires semblent plus favorables que les règles nationales, des
personnes privées peuvent introduire un recours devant une juridiction
nationale et demander qu'elle forme un renvoi préjudiciel. Même si
ce dernier ne suscite pas une intervention directe de la Cour de Justice dans
l'affaire, c'est un moyen pour les plaignants d'espérer que
d'éventuels manquements au droit communautaire seront
dénoncés 202(*) ».
En l'absence d'une question préjudicielle pour le
particulier, celui-ci reste soumis au juge national dans une procédure
qui n'est pas essentiellement destinée à assurer, au profit des
personnes privées, le respect du droit communautaire par les Etats
membres. Le résultat est là :
« Tandis qu'il est utile pour la CJCE, victime
du succès de la procédure préjudicielle, d'instaurer un
véritable dialogue avec les juridictions de renvoi afin de pouvoir
écarter certaines questions sans grand intérêt et de se
consacrer de façon plus efficace aux autres, la tendance est inverse au
sein de la CEMAC où les juridictions nationales s'abstiennent de
recourir à l'expertise de la Cour 203(*)».
Pour le docteur Jean Kenfack, cet état de fait traduit
une méfiance des juges nationaux tout comme des opérateurs
économiques à l'égard des actes juridiques communautaires
d'intégration :
« Une exploration de l'Afrique en
général et de l'Afrique Centrale et Occidentale en particulier
révèle une certaine apathie dans l'utilisation des normes
juridiques produites au niveau communautaire dans le solutionnement des
problèmes posés. Pourtant, le développement d'un droit est
tributaire d'un large recours aux différents mécanismes qu'il
offre pour régir les situations saisies par l'ordre juridique dont il
contribue à la réalisation. Que les sujets de droit tardent
à saisir ce facteur de sécurité juridique et de
prévisibilité est déplorable. Sans doute auraient-ils
été encouragés à le faire si l'activité des
juges n'accusait pas des déficits sur ce point. Cette timidité
des utilisateurs privilégiés de ce dispositif normatif
confère à ce dernier un statut marginal dans le règlement
des questions litigieuses. Il apparaît donc indispensable de rechercher
les moyens d'améliorer la côte de ce droit et partant, de susciter
un engagement plus vif de ses utilisateurs204(*)».
Cette mise à l'écart du droit communautaire dans
le traitement de nombre des questions auxquelles il devrait s'appliquer est un
fait frappant qui s'explique par
« L'attitude négative du juge national
(qui) se dégage à travers la mauvaise connaissance et
l'utilisation maladroite des actes juridiques mis à sa disposition par
cet ordre juridique ...En ce qui concerne le déficit de connaissance par
le juge du droit communautaire, il convient de relever que cet état de
fait s'explique par les lacunes relatives à la publicité de ces
actes juridiques, mais aussi par la paresse du juge205(*)».
C'est sans doute au regard de cette réticence des juges
nationaux à faire recours à la procédure
préjudicielle que l'article 27 de la Convention CJC dispose que
« Si, à la requête du
Président de la Commission, de toute Institution, organe ou Institutions
spécialisées de la Communauté ou de toute personne
physique ou morale, la Cour constate que dans un Etat membre, l'inobservation
des règles de procédure du recours préjudiciel donne lieu
à des interprétations erronées du traité de la
CEMAC et des conventions subséquentes, des statuts des Institutions,
organes et Institutions spécialisées de la Communauté ou
d'autres textes pertinents, elle rend un arrêt donnant les
interprétations exactes. Ces interprétations s'imposent à
toutes les autorités administratives et juridictionnelles de l'Etat
concerné ».
Cette disposition véritablement révolutionnaire
ne produira son plein effet que si le règlement de procédure
à venir de la CJC n'institue pas des conditions de recevabilité
aussi restrictives que pour les autres voies de droit.
PARAGRAPHE II- DES CONDITIONS
DE RECEVABILITÉ DES REQUÊTES RESTRICTIVES POUR LES
PARTICULIERS.
La limitation de l'accès des particuliers au
prétoire communautaire pose selon la grande majorité des auteurs,
le problème d'un système politique qui, bien que fondé sur
la règle de droit, n'assure pas la soumission des activités de
ses institutions législatives et exécutives à un
contrôle juridictionnel ou, du moins, le fait dans des conditions
excessivement restrictives206(*). En pareil cas, en l'absence de possibilité
de recours direct, le droit au juge n'est plus assuré au regard tant de
délais pour lesquels les textes ne prévoient aucune possible
dérogation (A), que pour certaines conditions pratiquement dissuasives
(B).
A- Inexistence de
« délais raisonnables »
Le délai étant écoulé, la
forclusion est opposée strictement et sévèrement comme
moyen d'ordre public. Ce jeu de couperet ne peut choquer ; la fonction du
délai inclut pareille automaticité pourvu que sa mécanique
comprenne aussi la clarté et la rationalité207(*). En effet, une fois
expiré le délai critique d'un acte, l'irrecevabilité du
recours retentit sur tous actes ultérieurs autres mais qui ne feraient
que le répéter, donc seulement le confirmer. Par là, on
évite certes la renaissance d'anciens débats et on sanctionne une
sorte d'acquiescement social à une mesure qui n'avait pas
été attaquée en son temps. Mais comme le note le
professeur Bernard Pacteau, « il y'a tout de même ici le
danger d'un excessif verrouillage du contentieux par constitution d'une chaine
d'incontestabilité ; le juge ne peut y être
insensible208(*) ». C'est conscient de cette
réalité que le juge européen a décidé que le
moyen tiré de la prescription n'est pas un moyen d'ordre public
susceptible d'être invoqué d'office par le juge209(*).
Sans contester l'importance de l'intérêt des
délais dans la procédure contentieuse, notamment en ce qui
concerne la consolidation des situations juridiques, il semble utile de les
rationnaliser et d'éviter tout automatisme qui ne serait pas
préjudiciable. Or devant la CJC, la quasi-totalité des
délais prescrits le sont dans un style qui ne laisse pas imaginer un
possible assouplissement ou ne le prescrit pas expressément. Il n'existe
pas en effet dans l'ordre juridique communautaire CEMAC une disposition comme
celle de l'alinéa 5 de l'article 7 du Statut du tribunal administratif
des Nations unies qui donne au tribunal le droit de suspendre l'application des
dispositions relatives aux délais « dans tout cas
particulier ». D'une façon générale, les
juridictions administratives internationales hésitent à
écarter des requêtes pour forclusion, même lorsqu'elles ont
estimé devoir d'office examiner les questions de délais210(*). Le Tribunal administratif
de l'OIT n'a pas hésité à écarter la forclusion
d'un recours en affirmant que le retard était
« manifestement dû à la force majeure211(*) ». Dans le
domaine similaire du contentieux de la fonction publique communautaire, le juge
de la CEMAC a eu du mal à affirmer une nouvelle computation des
délais suite à un nouveau recours administratif
préalable212(*).
Cette position du juge communautaire est tirée de la
pratique des juridictions internes. En effet,
« devant les juridictions administratives
internes, la durée prescrite par le législateur pour
l'accomplissement des actes a un caractère impératif. Ils ne
peuvent se négocier et s'imposent aux juges tout comme aux parties et
apparaissent de ce fait comme un couperet. C'est pourquoi, l'irrespect
entraîne des sanctions. En droit camerounais tout comme en droit
gabonais, cette règle est affirmée213(*) ».
L'on ne saurait toutefois ignorer que le temps intègre
aussi la justice comme étant un instrument de sa politique processuelle.
De l'assignation au jugement s'écoule un temps qui rythme tous les actes
devant permettre aux parties d'assurer, à armes égales leur
défense et de réunir les preuves devant permettre au juge d'avoir
une connaissance claire des faits en cause. C'est pourquoi nous proposons ici
à la suite du professeur Pacteau quelques situations dans lesquelles les
règles relatives aux délais pourraient connaitre des
assouplissements : en cas de recours précontentieux même
exercé sans obligation, en cas de saisine d'une juridiction
incompétente pourvu qu'elle ait lieu elle-même à temps et
en cas de demande d'aide juridictionnelle214(*). La Cour de Luxembourg n'a d'ailleurs pas
hésité à introduire le principe du délai
raisonnable figurant à l'article 6 alinéa 1 de la Convention
européenne des droits de l'homme dans sa jurisprudence215(*). La CJC gagnerait à
suivre cet exemple afin de rationnaliser une procédure dissuasive pour
les particuliers.
B- Le caractère
dissuasif des critères de recevabilité relatifs aux
particuliers
Le principal critère dissuasif ici reste les frais de
procédure qui peuvent parfois se révéler fort
onéreux (1). Par ailleurs on peut relever des limites dans le
contentieux de la fonction publique communautaire comparativement à la
procédure devant les autres juridictions administratives internationales
(2).
1- Les charges
pécuniaires
« La gratuité de la procédure est
un trait caractéristique de la justice moderne dans un pays
démocratique où cette justice est conçue comme un service
public dont les justiciables sont les usagers et que l'Etat prend à sa
charge. Les magistrats sont rémunérés comme des agents de
la fonction publique. Les services judiciaires fonctionnent sur des
crédits ouverts au budget de l'Etat. Le temps des épices est bien
révolu216(*). »
Ces mots du professeur Gazier sont également vrais en
ce qui concerne une communauté comme la CEMAC qui se veut de
« droit ». Ce principe de gratuité n'exclut
toutefois pas que certains frais puissent rester à la charge des
justiciables surtout s'ils ont perdu le procès. C'est cette logique qui
est suivie devant la CJCE où la procédure est gratuite, sauf
travaux exceptionnels comme certaines traductions. Quant aux dépens, le
juge européen statue chaque fois que sa décision met fin à
l'instance. En principe la partie qui succombe est condamnée aux
dépens, mais la Cour peut condamner un plaideur, même gagnant,
à des frais frustratoires ou vexatoires. Tout ce que l'on peut regretter
c'est le système allemand et italien adopté selon lequel la
partie qui succombe paie les frais d'avocat de la partie adverse.
Cette gratuité n'existe devant la CJC qu'en
matière sociale c'est-à-dire essentiellement le Contentieux de la
fonction publique communautaire et pour les institutions et organes de la CEMAC
et enfin en cas de renvoi217(*). Pour les autres recours, le requérant est
tenu à peine d'irrecevabilité de consigner au greffe une somme de
cent mille francs sinon il ne sera donné aucune suite à
l'instance218(*). De
plus, les parties doivent supporter les frais des investigations
ordonnées dans le cadre de l'instruction219(*). Cette charge
pécuniaire du procès peut s'avérer dissuasive pour les
particuliers dans un contexte où l'assistance judiciaire demeure un voeu
pieu220(*).
Plus dissuasive et sujette à suspicion nous
apparaissent les dispositions des Règles de procédure de la
Chambre judiciaire relatives à la récusation. L'article 84 de ce
texte dispose en effet « Si la demande est rejetée, le
requérant peut, en cas de mauvaise foi, être condamné au
paiement d'une amende de 50 000 à 100 000 francs CFA et
éventuellement des dommages intérêts ». Si
cette disposition devait être reprise dans le règlement de
procédure de l'actuelle CJC, elle nous semble de nature à
refréner tout désir des particuliers à demander une
récusation du juge, leur bonne foi pouvant toujours être remise en
cause. Cette réserve est valable également pour le contentieux de
la fonction publique communautaire.
2- Les limites du
contentieux de la fonction publique communautaire.
La procédure relative au contentieux de la fonction
publique internationale, note le professeur Suzanne Bastid, répond de
façon générale à trois préoccupations
essentielles : éviter que les recours ne gênent le
fonctionnement de l'administration, faciliter l'accès à la
juridiction par l'absence des formes et des frais, assurer le règlement
rapide des affaires à la fois dans l'intérêt de
l'administration et du requérant221(*). C'est dans cette logique que sont
aménagées les règles relatives à la
recevabilité des requêtes des fonctionnaires internationaux et par
rapport auxquelles le contentieux de la fonction publique communautaire nous
semble limité.
D'abord s'agissant des exigences de forme, aucune
formalité particulière n'est exigée devant le tribunal.
Ensuite le fonctionnaire est autorisé à se faire
représenter par un conseil ou un autre fonctionnaire de l'organisation.
Aux Nations unies par exemple, a été établi devant le TANU
un système permettant au requérant d'utiliser gratuitement les
services d'un collègue compétent s'il le désire. Il s'agit
selon le professeur Bastid d'une sorte d'assistance judiciaire
particulièrement nécessaire au siège où les
honoraires des hommes de loi sont très élevés222(*).
Au problème lié à la
représentation du fonctionnaire devant la juridiction communautaire, on
peut évoquer celui que soulève le recours administratif
préalable. Tout d'abord, il y'a la question du pouvoir du
président de la Commission à l'issue de la procédure. En
effet, celui-ci prend une décision que le Règlement portant
statut des fonctionnaires du Secrétariat exécutif de la CEMAC ne
lui fait pas obligation de motiver. Ce qui est regrettable car ce dernier non
seulement n'est pas obligé de suivre l'avis du Comité consultatif
de discipline, mais en plus n'est même pas tenu de justifier sa position.
Ce qui est de nature à faire perdre tout son sens et son objet au
recours administratif préalable. Il semble nécessaire d'instituer
une obligation pour le Président de la Commission de motiver sa
décision dans le cadre de cette procédure car comme
l'écrit fort justement monsieur Jean Kenfack,
« L'insertion de la motivation de l'acte dans
l'instrumentum conduit son auteur à évaluer soigneusement le but
qu'il poursuit, le droit applicable et la situation concrète
régie par l'acte. L'influence de la motivation sur le contenu de l'acte
est donc réelle. Par ailleurs, la motivation de l'acte unilatéral
en permet le contrôle des motifs. Elle facilite donc la recherche par le
juge de l'inexistence légale ou matérielle des motifs des actes
considérés. A titre de droit comparé, le nombre des cas
d'ouverture de recours pour excès de pouvoir contre les actes des
organes communautaires pour défaut de motifs est notable dans le cadre
des Communautés Européennes. En effet, la motivation dans l'ordre
juridique communautaire ou d'intégration, permet de préciser en
termes pratiques, la position des sujets de droit par rapport à une
règle posée par un acte donné. A ce titre, elle
prête son concours à l'ordre juridique pour «mieux faire
respecter le but des manifestations de volonté et leur adaptation aux
circonstances»223(*) ».
Par ailleurs, le renvoi au président de la Commission
peut poser un autre problème du moment que rien ne l'empêche de
substituer sa propre décision à celle du Comité
consultatif de discipline. Sur ce point nous partageons les conclusions d'un
auteur qui sur cette question soutient que :
« Il serait plus juste que le Secrétaire
Exécutif, saisi de la question, prenne une décision allant dans
le même sens à moins que le comité ne se soit fondé
sur une base illégale pour prendre sa décision. C'est pour cela
que nous pensons qu'il serait nécessaire, à certains
égards, que la décision du comité consultatif de
discipline plutôt que d'être envoyée directement devant le
Secrétaire Exécutif, soit aussi notifiée à l'agent
qui l'examine aussi et réagit par ses dernières conclusions.
Lesquelles doivent être remises au Secrétaire Exécutif pour
que ce dernier en tienne compte dans sa décision finale comme cela se
passe dans d'autres cieux224(*) ».
Devant la CJC, on note qu'il n'existe pas de régime
particulier pour le contentieux de la fonction publique communautaire en ce qui
concerne les exigences de forme de la requête. De même, le
fonctionnaire de la CEMAC reste astreint à l'obligation de
représentation processuelle alors même que comme nous l'avons
déjà relevé il n'existe pas d'assistance judiciaire. Cela
pourrait s'expliquer par le peu de conscience que la CJC a de sa nature de
juridiction administrative internationale alors qu'une part importante du
contentieux qui lui est soumis y est relative. La conscience de cet état
de choses devrait le rendre plus souple dans l'interprétation des
conditions de recevabilité.
SECTION II : UNE RIGIDE INTERPRETATION PRETORIENNE DES
CONDITIONS DE RECEVABILITE.
Il est juste que l'exercice du procès soit
canalisé. La fonction disciplinaire des règles de
recevabilité en impose aussi la mise en oeuvre stricte, voire
mécanique. C'est en tout cas ce que pense le juge de N'djamena pour qui
la méconnaissance des règles de recevabilité est par
principe d'ordre public, invocable à tout instant et opposable d'office
(paragraphe I) et face auxquelles il ne dispose d'aucune marge de manoeuvre
(paragraphe II).
PARAGRAPHE I- L'AFFIRMATION DU
CARACTÈRE D'ORDRE PUBLIC DES CRITÈRES DE RECEVABILITÉ.
Concept polysémique,
« le contenu de la notion d'ordre public n'est
pas délimité d'une façon précise ; l'ordre
public a un caractère exceptionnel et résiduel quant à sa
fonction, restreint quant à ses effets et relatif quant à sa
nature. Il est par conséquent une notion à contenu judiciaire
faisant office de soupape de sûreté, lorsque l'application rigide
d'une norme aboutirait à un résultat qui ne peut être admis
au regard des principes fondamentaux d'un ordre juridique
déterminé. Sur le plan technique, l'ordre public se
concrétise donc comme une exception à la règle. Telle
semble être son essence. (...) Il est vrai cependant que la notion
d'ordre public est parfois également utilisée pour
désigner des dispositions impératives auxquelles il n'est pas
possible de déroger. Dans ce cas, le contenu et la portée de
l'interdiction que ces normes édictent sont connus à l'avance, de
sorte qu'il serait préférable d'éviter d'utiliser les
termes d'ordre public pour leur préférer ceux de principes
impératifs225(*) ».
C'est cette seconde conception que retient le juge
communautaire en affirmant l'indisponibilité des conditions de
recevabilité (A) et en n'offrant aucune chance de régularisation
(B).
A-
L'indisponibilité des conditions de recevabilité des
requêtes
Le principe général du procès
international, écrit le professeur Carlo Santulli, est bien la
disponibilité des moyens de recevabilité. Il est rare en effet
qu'une condition spéciale de recevabilité soit soulevée
d'office par une juridiction internationale. La condition n'est indisponible
que si elle est définie comme un élément de la fonction
dévolue. Pour l'éminent auteur, sont seules indisponibles de
façon classique les conditions générales de
recevabilité qui garantissent la fonction juridictionnelle :
existence du différend, possibilité d'appliquer le droit,
caractère obligatoire de la décision226(*).
Mais comme nous l'avons déjà
précisé, la juridiction communautaire n'est pas
véritablement une juridiction internationale au sens classique du terme,
mais apparaît plutôt comme une juridiction interne : la
juridiction interne de la Communauté. Les règles applicables
devant elle se rapprochent donc plutôt de celles en vigueur devant les
juridictions administratives internes. Sur ce plan, le principe est que les
règles de recevabilité des recours sont d'ordre public, ce qui
emporte les mêmes conséquences que le caractère d'ordre
public des règles de compétence : possibilité pour
les parties d'invoquer en tout état de la procédure
l'irrecevabilité du recours, obligation pour le juge d'examiner d'office
le cas échéant la question de recevabilité, obligation
encore pour le juge de relever le cas échéant et en tout
état de procédure d'office l'irrecevabilité du recours,
c'est-à-dire de lui opposer une fin de non recevoir227(*). C'est bien cette logique
que suit le juge de N'djamena qui a à plusieurs occasions
réaffirmé le caractère d'ordre public des règles de
recevabilité qui ne souffrent d'aucune exception228(*).
Surtout le juge communautaire réaffirme
l'indisponibilité des conditions de recevabilité des
requêtes en soulevant d'office des moyens non évoqués par
le défendeur pour déclarer irrecevable le recours. C'est le cas
par exemple de l'inobservation des délais dans l'affaire
Dieudonné Nang Eko et autres c/ ISTA alors que l'Institut s'était
limité à proposer ses arguments au fond sans objection sur la
recevabilité de la requête229(*). Cette approche logique sur le plan du contentieux
de la légalité ou de la responsabilité extracontractuelle
de la Communauté, car le juge est gardien de la légalité
communautaire et préserve celle-ci indépendamment de la
volonté des bénéficiaires de la règle
édictée, nous semble critiquable en ce qui concerne le
contentieux de la fonction publique communautaire où la règle
tirée de la pratique des juridictions administratives internationales
reste la disponibilité des règles de recevabilité. Ainsi,
dans une affaire Desplanque, le Tribunal administratif de la SDN a
déclaré que les délais étaient stipulés
« en faveur de la partie défenderesse »,
qu'ils ne « tenaient pas à l'ordre public
interne » de la Société et que la partie
défenderesse pouvait « renoncer » à
se prévaloir de l'inobservation des délais230(*). De même dans
l'affaire Kathryn Bernstein c/ UNESCO sus citée, le TAOIT en
écartant la forclusion pour cas de force majeure, remarquait que
l'organisation n'invoquait pas l'irrecevabilité du recours231(*).
Certes les règlements de procédure de ces
différentes juridictions ne sont pas rédigées de
façon identique et le juge communautaire ne dispose pas de la même
marge et du même pouvoir que les juges administratifs internationaux,
mais la Cour de N'djamena contrairement à celle du Luxembourg n'a pas su
tiré profit des rares vides textuels pour faciliter l'accès
à son prétoire au fonctionnaire communautaire. C'est que encore
une fois, la CJC a du mal à se départir de sa rigueur en tant
que juge de la légalité communautaire stricto sensu lorsqu'il
opère comme juge administratif international, fonction qui requiert
davantage de souplesse dans une perspective de protection et de
préservation des droits du fonctionnaire communautaire. Cela nous semble
d'autant plus critiquable que la souplesse n'est pas antinomique de la
légalité. Le juge tout en s'assurant que les règles
procédurales sont observées, devrait dans le même moment
veiller à ce que celles-ci ne constituent pas un obstacle à
l'accès au juge. L'intégration de cette double attitude dans son
raisonnement l'amènerait sans doute à excuser certains
« errements procéduraux ».
B- L'absence
d' « irrégularités excusables »
Le concept d' « irrégularités
excusables » renvoie directement à l'idée de
régularisation. Cette idée n'est pas elle-même contraire au
principe d'indisponibilité des règles de procédure mais
contribue plutôt à rendre plus effectif et efficace l'office du
juge dans l'ordre juridique communautaire. Il faut tout de même s'assurer
que le procès dûment rationnalisé, ne s'en trouve pas
rationné. La théorie de la recevabilité se doit
d'être raisonnable dans ses principes comme dans ses techniques et dans
son maniement concret. « La route du prétoire ne peut
être sans discipline ; elle se doit au moins d'être sans
pièges »232(*). C'est pour éviter ces écueils et
pièges qu'est instituée la régularisation des
« irrégularités excusables ».
Stricto sensu, la régularisation vise la
possibilité de satisfaire après-coup une condition de
recevabilité qui n'était pas remplie au moment où elle
aurait dû l'être. Elle ne se confond donc pas avec la
possibilité de ne pas déclarer irrecevable une demande, une
conclusion, un moyen ou une pièce qui ne satisfait pas certaines
conditions de détail, les irrégularités excusables,
indépendamment de leur régularisation, ex post233(*). Pour le professeur
Santulli,
« la possibilité de procéder
à une régularisation et éventuellement l'obligation pour
la juridiction de la rechercher, en effet, dépend de
l'appréciation de la discipline du justiciable et donc, en
définitive, du caractère « excusable » de
l'irrecevabilité. S'agissant, en particulier, des détails de
forme et de procédure pouvant affecter la recevabilité des
pièces, le principe général met à la charge des
justiciables une obligation de diligence pour obtenir une connaissance exacte
du droit du procès. Parce que c'est une obligation de diligence, elle
implique l' « ignorance excusable » de certaines
conditions, et donc la possibilité de les régulariser ou, le cas
échéant, de passer outre
l'irrégularité234(*) ».
Or la CJC ou tout au moins la Chambre judiciaire de la Cour
dans son ancienne formule, à travers la rigueur et la stricte
interprétation des conditions de recevabilité dont elle a fait
preuve jusqu'ici ne laissait que très peu de place à
« l'ignorance excusable » dont parle le professeur
Santulli. Bien au contraire, dans une espèce où le but de la
règle avait été atteint sans que le requérant n'ait
expressément usé des formes prescrites par les textes, le juge de
la CEMAC dans un formalisme excessif n'hésite pas à
déclarer le recours irrecevable235(*). Le caractère excessif du formalisme
découle de l'interprétation que donne le juge de la règle
formulée dans le texte. Il se limite tout d'abord à
l'intitulé du recours du demandeur qui confond manifestement recours
hiérarchique et recours administratif préalable ; et ensuite
refuse de se prononcer sur l'argumentation du requérant qui
démontre bien qu'en l'espèce si le recours n'est pas formellement
celui exigé par les textes, il n'en remplit pas moins la fonction.
Pourtant, le juge sans remettre en cause la nature d'ordre public des
règles de recevabilité, pourrait faire preuve d'un peu plus de
souplesse en examinant d'office les règles de recevabilité et en
rejetant le recours si les conditions de recevabilité n'étaient
pas remplies, mais seulement après avoir invité le
requérant à régulariser la requête lorsque les
conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible
d'être couverte après l'expiration du délai du recours,
à l'exemple du juge administratif français236(*).
En effet, sans qu'il y soit tenu juridiquement, il est devenu
courant que le juge administratif français au cas où la
requête est irrégulière ou incomplète, parce qu'elle
n'est pas motivée, du fait que le ministère d'avocat est
nécessaire et fait défaut, parce que la décision
attaquée n'y est pas jointe, en raison de ce qu'elle a un
caractère collectif ou que son auteur n'est pas
régulièrement autorisé à ester en justice, invite
le requérant à la régulariser237(*). Cette faculté de
sauvetage qui compense l'accroissement des règles de recevabilité
s'avère précieuse pour les plaideurs inexpérimentés
et c'est sans nul doute pourquoi le Conseil d'Etat français, au nom de
« ses obligations dans la conduite de
l'instruction » a astreint les juges à inviter les
requérants à régularisation avant de leur opposer une
irrecevabilité238(*). Au besoin, le juge d'appel, après avoir
reproché aux premiers juges de ne pas avoir formulé une demande
de régularisation y procédait lui-même239(*). Si cette sollicitude envers
les requérants n'existe pas devant la CJC, c'est peut être parce
que ses juges sont issus d'ordres juridiques nationaux où la
jurisprudence ne fait pas montre de faveur envers le plaideur
inexpérimenté, et reproduisent ainsi au niveau communautaire les
rigueurs des droits nationaux.
Il s'agit là pourtant de notre point de vue, d'une
exigence du procès équitable et d'une bonne administration de la
justice qui ne préjudicierait ni aux intérêts du
défendeur, ni au bon déroulement du procès. En effet, il
n'est point question de faire ici un plaidoyer pour un « libertinage
processuel » mais seulement d'humaniser les règles de
recevabilité en intégrant les réalités
sociologiques pour sauver les recours entachés d' « erreurs
excusables » d'un requérant pourtant diligent. Pour cela nous
proposerons comme en droit administratif français de distinguer selon la
nature de « l'erreur ». D'abord, le juge communautaire
d'Afrique centrale sanctionnerait avec la rigueur jusqu'ici observée les
« irrégularités insusceptibles de
régularisation », c'est-à-dire celles qui par leur
nature ou leur fonction s'opposent à ce qu'elles puissent être
corrigées : pas de régularisation possible en matière
de délai, en cas de violation de l'obligation de préalables
procéduraux, et en cas de recours contre un acte qui est
précisément insusceptible de recours. Ensuite, il admettrait la
possibilité de régularisation jusqu'à expiration du
délai de recours des recours non motivés, ou
rédigés dans une langue autre que celles retenues devant la Cour.
Enfin plus nombreuses seraient les possibilités de régularisation
après l'expiration du délai de recours et ce, parce qu'elles sont
propres à rendre les plus grands services non seulement au
requérant mais dans certains cas aussi au défendeur. L'on
pourrait citer à titre illustratif la capacité d'agir en justice
à son nom et pour le compte d'autrui, l'obligation du ministère
d'avocat, en cas d'erreurs purement matérielles telles que l'omission de
signature, ou la non production de la décision attaquée. Dans
tous les cas pour ne pas préjudicier au défendeur, la
régularisation ne doit être possible que lorsque
l'irrecevabilité est soulevée d'office par le juge et pas
lorsqu'elle est soulevée en défense.
En consacrant de cette manière la possibilité de
régularisation dans le contentieux communautaire, le juge de N'djamena
affirmerait sa capacité à interpréter de façon
dynamique et souveraine des règles de recevabilité dont on a
l'impression parfois qu'elles sont hors de sa portée.
PARAGRAPHE II- UNE RETICENCE
AVEREE À TEMPÉRER LES RÈGLES DE RECEVABILITÉ DES
REQUÊTES
L'utilisation des méthodes les plus classiques
d'interprétation stricte, telles que l'appel au sens clair et le recours
au sens technique, est à elle seule significative de la prudence du juge
communautaire à l'égard des limites formellement imposées
par les Etats membres à la recevabilité des recours des
particuliers, personnes physiques ou morales. Comme le relève le
professeur Denys Simon, « cette rigueur, que le juge confesse par
son impuissance à tempérer, résulte d'une rédaction
dont la précision poussée jusqu'à
l'inélégance, n'a d'autre justification que la volonté
délibérée des auteurs du traité de couper court
à toute tentative d'application compréhensive ».
Cette impuissance du juge à tenter une application compréhensive
s'illustre par une absence de la prise en compte des réalités
sociologiques communautaires dans son raisonnement (B) mais surtout la
difficulté qu'il éprouve à justifier en droit certaines
décisions (A).
A- Une faible motivation
des décisions.
Par motivation, il faut entendre
« l'exposé, dans le jugement, des motifs de fait et de
droit qui justifient le dispositif et non l'ensemble des raisons, des mobiles
qui, dans l'esprit des juges, dans le cours de la discussion du
délibéré, les poussent à prendre le
jugement »240(*). Il s'agit là d'une obligation qui
« est pour le juge aussi naturelle que celle consistant à
respirer l'air environnant »241(*). Cette obligation s'impose plus nettement encore aux
juridictions communautaires et la CJCE l'a clairement liée à une
protection juridictionnelle effective et n'a pas hésité à
affirmer que l'obligation de motivation constituait un principe
général du droit communautaire. Cette volonté de motiver
s'illustre par la longueur des décisions de la Cour dont le plus long
arrêt comporte quelques six cent trente deux attendus et trois cent
quatre-vingt sept pages, et du TPICE avec cinq mille cent trente trois attendus
dans l'affaire des ciments242(*).
L'on est bien loin de la pratique de la CJC avec des
arrêts de deux à dix pages où le juge se contente
d'affirmer laconiquement que « attendu que cette demande est
recevable en la forme » sans autres précisions de droit
ou de fait sur la base juridique de cette affirmation243(*). Plusieurs explications
pourraient être avancées pour justifier cette attitude du juge
communautaire. D'abord sur le fond, le juge se veut l'interprète
fidèle de la loi. Le style et l'étendue de la motivation doivent
ainsi être rapprochés du légicentrisme. Le juge est soumis
à la loi, d'où « des décisions courtes,
économes de motifs, exempts de développements pathétiques,
écrites dans un style ferme et concis, requis par une démarche
essentiellement technique »244(*). En cela la faible motivation des décisions
de la CJC est la meilleure preuve de son incapacité à avoir une
quelconque emprise sur des règles de recevabilité immuables. Une
autre explication de ce manque de motivation peut être tirée du
statut de juge unique du juge de N'djamena. En effet, le soin pris par une
juridiction à motiver ses arrêts, la longueur de cette motivation
sont parfois une précaution dans et contre la perspective d'un pourvoi,
un souci de convaincre la juridiction supérieure du bien fondé de
celle-ci et aussi, plus formellement le souci d'éviter l'annulation pour
l'obligation de motiver ses décisions. Si cet argument peut expliquer
les longues motivations du TPICE, elle n'est pas pertinente pour la CJCE ou
plus loin la Cour internationale de justice dont les arrêts sont
abondamment motivés.
En réalité, la motivation de la décision
vise trois buts que la CJC manque en ne se livrant pas à cet exercice.
Le premier de ces buts est la légitimation de l'arrêt. En effet,
la motivation a pour fonction primordiale la justification juridique de la
décision, du dispositif. La Cour doit faire comprendre aux parties en
litige la solution retenue. La motivation de la décision qui se prononce
sur son litige a donc d'abord pour fonction de persuader le requérant
que son dossier a été examiné dans toutes ses composantes.
Or l'examen des rapports des juges rapporteurs et de la décision
finalement rendue par la CJC montre que la Cour n'examine pas
systématiquement tous les points soulevés par les parties, ce qui
est acceptable, mais surtout ne s'en explique pas. Ce qui peut susciter une
incompréhension, un sentiment d'injustice et donner l'impression d'une
justice aux ordres des institutions communautaires ou des Etats. Ce sentiment
est renforcé lorsque le juge donne l'impression de balbutier et
d'hésiter en motivant ses décisions par les mauvais articles ou
des articles qui n'édictent pas précisément ce qu'il
affirme comme s'y trouvant245(*).
Ensuite et c'est là le deuxième but, la
décision de justice est également destinée au juge
lui-même. En motivant sa décision, le juge s'assure lui-même
qu'elle est l'aboutissement d'un raisonnement rigoureux et non le
résultat hâtif d'un examen trop sommaire de l'affaire246(*). Ainsi s'expliquerait le
fait que le juge de la CEMAC consacre autant de solutions contradictoires sur
le recours administratif préalable par exemple247(*). Peut être une
motivation plus abondante lui aurait permis de remarquer la
contrariété des deux raisonnements, à moins qu'elle ne
ressorte tout simplement les subtilités qui distinguent les deux
affaires et qui l'ont poussé à opter pour des solutions
opposées.
Le troisième but de la motivation découle
directement de cette dernière idée. La motivation tend aussi
à garantir la cohérence du corpus jurisprudentiel, à
inscrire l'arrêt à prononcer dans la suite des
précédents jurisprudentiels. Sur ce point précis, la
contrariété de certaines positions du juge de N'djamena pousse
à penser que celui-ci adopte ce que le professeur Christophe Soulard
nomme les « motivations/justifications »248(*), c'est-à-dire qu'il
motive après coup des décisions qu'il a déjà
arrêtées. Mais même dans ce cas, il devrait garder le
reflexe du syllogisme juridique car les parties ne sont pas les seules
destinataires des décisions. La jurisprudence de la CJC est
créatrice de normes et ces normes sont énoncées au moins
autant dans les motifs que dans le dispositif qu'elles rendent.
Ce qui est vrai en ce qui concerne les motivations avec la
CJCE l'est encore plus avec la CJC : la construction communautaire ne peut
se permettre des décisions faiblement motivées, notamment lorsque
les particuliers sont parties au litige.
« D'une part, cela a été
signalé, la jurisprudence varie dans bien des domaines, ce qui rend
moins légitimes les renvois à une jurisprudence
antérieure. D'autre part, les juridictions communautaires n'ont
peut-être pas encore atteint ce stade du langage commun avec les juges
nationaux et les parties intéressées (surtout les particuliers),
qui les dispenserait d'une motivation substantielle, et ainsi d'un surcroit de
légitimité249(*) ».
L'obligation de motiver ses décisions est d'autant plus
impérative pour la CJC qu'elle est récente ;
« la nécessité, pour une juridiction
récente, d'asseoir sa légitimité, peut la conduire
à recourir à des motivations particulièrement
élaborées250(*) ». Paradoxe de la juridiction
communautaire de la CEMAC, juridiction récente, qui non seulement ne
motive pas assez ses décisions, mais en plus semble oublier le contexte
sociologique dans lequel il se déploie.
B- L'ignorance des réalités
sociologiques communautaires.
Selon le professeur François Rangeon
« un droit peut être effectivement
appliqué sans pour autant être efficace, c'est à dire
produire l'effet recherché : le respect méticuleux des
procédures judiciaires peut par exemple avoir pour objet et pour effet
de ralentir le cours de la justice et de rendre les sanctions inefficaces, mais
il permet aussi d'assurer la protection des droits individuels. En sens
inverse, l'efficacité est souvent un argument ou un alibi justifiant la
non application du droit. (...) Inversement, l'effectivité recouvre un
domaine plus large que l'efficacité. Les effets réels d'une loi
sont souvent indépendants des effets escomptés. Une loi
effectivement appliquée peut ainsi être inefficace au regard des
intentions du législateur. L'excès de formalisme dans
l'application de certaines règles conduit parfois à des
résultats inverses de ceux recherchés par le
législateur »251(*).
Ainsi, l'effectivité et l'efficacité du droit
communautaire, par conséquent l'attitude de la Cour, restent tributaires
des réalités sociologiques. Or en faisant preuve d'une telle
rigueur interprétative alors même que son prétoire n'est
pas particulièrement encombré, le juge communautaire semble faire
fi de la réalité du comportement des citoyens communautaires et
accroît ainsi l'ineffectivité du droit communautaire.
En effet, si le modèle référentiel de
justice communautaire européenne a servi de source d'inspiration pour la
mise en place de la CJC, l'on doit déplorer, que les traits essentiels
du modèle européen aient été intégrés
au modèle CEMAC sans être accompagnés des adaptations
locales252(*). Le juge
dans le contrôle de l'application effective de la règle de droit
aurait pu et aurait dû même, faciliter l'accès à son
prétoire à travers un assouplissement des règles de
recevabilité. La seule connaissance de l'existence d'une règle de
droit ne suffit pas. Il est nécessaire d'avoir la capacité
d'appréhender les réalisations que ces règles ont entre
elles, ou de déterminer les normes qui sont susceptibles de s'appliquer
à une situation concrète donnée. Or l'existence même
du droit communautaire est méconnue par la plupart des ressortissants
des Etats d'Afrique centrale. Les raisons de cette méconnaissance ne
sont pas seulement juridiques, mais sont également techniques et
sociologiques et tiennent en grande partie aux limites des citoyens à
assimiler une juridicisation mouvante de la société sujette
à une « prolifération normative
cancéreuse »253(*).
La conscience de cette méconnaissance des règles
communautaires par le juge de N'djamena devrait l'inciter à
tempérer la rigueur textuelle des conditions de recevabilité
à travers par exemple l'admission d'irrégularités
excusables susceptibles de régularisation. En effet,
« les actes juridiques communautaires ont pour
caractéristique déterminante d'être soucieux
d'effectivité. Or on sait que la traduction de ce souci en termes
concrets passe nécessairement par la ponction de tous les
éléments nocifs à l'application effective de cet arsenal
normatif. L'essor des actes juridiques communautaires en dépend. Il est
clair que ce dessein ne peut être réalisé que si toutes les
énergies sont mobilisées et déployées vers
l'apurement des sources d'érosion. En effet, l'érosion peut
résulter de l'acheminement défectueux de l'acte de chacune des
Communautés vers les destinataires. Certes, la maxime «nul n'est
sensé ignorer la loi» demeure valable comme le souligne un
auteur : «un système de droit positif qui accepterait que
quiconque soit invocable à se prévaloir de ce qu'il ne
connaissait pas le contenu d'une ou de plusieurs de ses prescriptions pour
échapper aux obligations mises à sa charge et éviterait de
subir les conséquences de leur inexécution» participerait
à sa propre ruine. Seulement, il faut souligner qu'une connaissance
effective de l'acte conforte la position du sujet de droit et surtout du
justiciable en ce sens qu'elle développe ses capacités à
actionner les mécanismes visant à faire respecter ses droits. Une
défaillance sur ce point peut contribuer à l'érosion du
dispositif juridique mis en place. L'affaiblissement peut également
découler d'un engagement mou ou d'un appui déficient des sujets
de droit au système mis sur pied 254(*)».
Par son impuissance à tempérer les règles
de recevabilité et surtout leur stricte application, le juge de la CEMAC
semble adopter une politique restrictive d'accès à son
prétoire qui n'était déjà pas très couru.
Cet état de fait s'explique par l'idée que :
« les mécanismes juridictionnels de
l'Etat de droit laissent les populations d'autant plus indifférentes
qu'elles en ignorent la signification et même souvent l'existence.
L'analphabétisme, l'insuffisance des services judiciaires, les
dépenses et les tracasseries sont autant d'handicaps pour l'accès
au juge. L'incompréhension des textes légaux, la
brièveté des délais de recours, la multiplication et la
complexification des conditions de recevabilité des recours. La lenteur
des procédures qui décourage les plaignants et les pousse
à renoncer à leurs droits ou à rechercher une solution
rapide et équitable dans la justice traditionnelle255(*)».
C'est peut être consciente des risques d'une telle
démarche dans la construction de la « Communauté de
droit » proclamée, que le juge de N'djamena adopte une
attitude de plus en plus libérale dans l'interprétation des
règles de recevabilité des requêtes.
CHAPITRE IV : LA TENDANCE NAISSANTE A UNE LIBERALISATION
DE L'ACCES AU JUGE COMMUNAUTAIRE.
Comme nous l'avons précisé
précédemment, la tendance du juge communautaire de CEMAC à
une ouverture de son prétoire n'est pas constante et définitive.
Au contraire, elle alterne avec la première tendance restrictive
d'accès au juge. Reste que le juge de N'djamena à travers
certaines décisions laisse percevoir une volonté encore
embryonnaire mais certaine d'assouplir les règles de recevabilité
rigoureusement édictées par les textes (section I), même si
la Cour devrait à notre sens pousser plus loin cette démarche
(section II).
SECTION I : LA « PRUDENTE HARDIESSE »
DU JUGE CEMAC DANS L'EXAMEN DE LA RECEVABILITE DES REQUETES.
Le juge communautaire fait preuve d'une prudence toute
particulière chaque fois qu'il lui faut se prononcer sur les conditions
de sa saisine et l'étendue de ses pouvoirs juridictionnels,
particulièrement lorsque les modalités des recours contentieux
ont fait l'objet d'une définition précise par les dispositions
détaillées de l'instrument conventionnel ou des règles de
procédure. Cette politique jurisprudentielle d'autolimitation
(paragraphe II) que les auteurs anglo-saxons qualifient ordinairement de
« self-restraint » ou de « judicial
caution »256(*) se manifeste d'ailleurs aussi bien dans la
définition des conditions de recevabilité que dans la
délimitation de l'objet du recours ou dans la délimitation de la
portée des décisions juridictionnelles. On note toutefois une
certaine audace de la Cour dans la protection des droits des particuliers
(paragraphe I)
PARAGRAPHE I- L'AFFIRMATION
D'UNE CERTAINE VOLONTÉ DE RENFORCER LA PROTECTION DES DROITS DES
PARTICULIERS.
Le juge européen a eu à plusieurs reprises
l'occasion d'affirmer la place des droits de l'homme au sein de l'ordre
juridique communautaire. Il a notamment affirmé dans l'arrêt Nold
que « les instruments internationaux concernant la protection des
droits de l'homme peuvent également fournir des indications dont il
convient de tenir compte dans le cadre du droit
communautaire 257(*)». Sans aller aussi loin et de façon
aussi explicite, la CJC semble suivre cette voie notamment pour ce qui est du
droit au procès équitable, plus précisément
l'accès au juge à travers une interprétation
téléologique de certaines conditions de recevabilité (A)
et la prise en compte des exigences d'une bonne administration de la justice
(B).
A- Une
interprétation finaliste de certaines conditions de
recevabilité.
La méthode téléologique est cette
technique d'interprétation caractérisée par le recours aux
objectifs fondamentaux des textes et surtout des Traités communautaires.
Avec cette méthode, les dispositions d'un texte même vagues
peuvent avoir un sens si elles sont replacées dans une perspective
finaliste qui les a sous-tendues258(*). Même si elle n'est pas la méthode la
plus utilisée par la CJC, la méthode d'interprétation
téléologique utilisée parfois par la Cour place au coeur
de son raisonnement l'objet et le but du texte. Il y a là un certain
risque de subjectivisme de l'interprète et tout le problème
consistera évidemment à déterminer avec un maximum de
rigueur, la nature du but à prendre en considération. Dans les
cas où il se livre à cette démarche, le juge de la CJC
opte pour un objet et un but conçus comme des objectifs à
atteindre, et donc susceptibles de progrès et d'extension.
Dans l'affaire Assiga Ahanda Jean Baptiste c/ La BEAC, le juge
de N'djamena adopte une interprétation originale de l'article 16 des
Règles de procédure de la Chambre judiciaire :
« Il est à relever que l'article 16 de
l'Acte additionnel N° 04/00/CEMAC-041-CCE-CJ-02 portant règlement
de procédure de la Chambre judiciaire de la Cour de justice de la CEMAC
exige du requérant à peine d'irrecevabilité d'indiquer
dans sa requête entre autres les noms, prénoms et adresses des
parties ;
Mais si l'adresse de la défenderesse
n'apparaît pas tant dans la requête introductive d'instance que
dans son mémoire, il y a cependant lieu de relever que les indications
exigées à peine d'irrecevabilité ont pour but
d'éviter toute confusion et surtout de pouvoir contacter la partie en
cause qui n'est autre que la BEAC en l'espèce, la seule évocation
de la Banque des Etats de l'Afrique centrale (BEAC) ou de son Gouverneur suffit
pour contacter l'unique institut d'émission de la
sous-région259(*) ».
Cette position de la Cour tout en étant fort logique et
louable tranche pourtant nettement avec ses positions
précédentes260(*) où au nom du caractère d'ordre public
des règles de recevabilité, elle a refusé tout
aménagement ou assouplissement. Peut être le juge a-t-il plus
évité la raideur que véritablement fait preuve de
souplesse. Mais l'on ne peut nier que le juge communautaire tout en
préservant la légalité opte pour une approche nouvelle en
recherchant le but de la règle pour éviter la lecture formaliste
et littérale du texte que suggère la BEAC, partie
défenderesse.
Plus ambigüe par contre est l'attitude du juge en
matière de recours administratif préalable dans le contentieux de
la fonction publique communautaire. En effet, alors que le juge a
déjà identifié le but de ce recours261(*), il refuse d'admettre
l'inutilité d'un tel recours alors que le résultat est
déjà connu à l'avance. Dans l'espèce Okombi Gilbert
c/ CEMAC262(*), le
requérant a saisi la Chambre judiciaire d'un recours en contentieux de
la fonction publique communautaire contre le Secrétaire exécutif
de la CEMAC. Répondant au défendeur qui excipe une exception
d'irrecevabilité pour non respect du recours administratif
préalable de l'article 113 du Règlement portant statut des
fonctionnaires du Secrétariat exécutif de la CEMAC, le
requérant fait remarquer que le même texte oblige le
Secrétaire exécutif à recueillir l'avis du Comité
consultatif de discipline ; Comité également saisi dans le
cadre du recours administratif de l'article 113. Or constate sieur Okombi, en
dépit de nombreux recours hiérarchiques adressés au
Secrétaire exécutif, ce dernier n'a pas jugé utile de se
plier aux prescriptions de l'article 109 et de saisir le Comité
consultatif de discipline dont il n'est d'ailleurs pas tenu de suivre les avis.
Le demandeur constate donc la position intransigeante du Secrétaire
exécutif qui rend sans objet une procédure précontentieuse
dont le résultat est connu à l'avance. Refusant de confronter les
obligations découlant des articles 109 et 113 dans la perspective
finaliste de la règle du recours administratif préalable telle
qu'elle l'avait précédemment formulée, la Cour opte pour
un formalisme rigoureux en exigeant dans tous les cas l'application de
l'article 113. Pourtant la Cour ne pourrait nier le rapprochement des articles
113 et 109 du Règlement portant statut des fonctionnaires du
Secrétariat exécutif de la CEMAC puisqu'elle-même les
confond263(*).
L'interprétation téléologique que tente
la Cour dans certains cas ne peut véritablement conduire à une
application rationnelle des règles de recevabilité que si elle
est systématisée et non, comme la jurisprudence de la Chambre
judiciaire en donne l'impression, appliquée à la carte. Il y va
de l'intérêt d'une bonne administration de la justice.
B- La prise en compte des
exigences d'une bonne administration de la justice
Le concept de bonne administration de la justice est difficile
à définir264(*). Il n'est appréhendé qu'à
partir des éléments qui le composent : égalité
des parties à l'instance, protection des droits du défendeur et
du demandeur, des tiers ainsi que la protection de la situation qui fait
l'objet du litige. Sur ce point, la pratique de la CJC est loin d'être
celle que décrit le professeur Mouangue Kobila :
« à la différence du juge communautaire
européen qui s'inspire du droit international, des droits nationaux et
de la logique, le juge communautaire en zone CEMAC s'est jusqu'ici
exclusivement inspiré de la logique265(*) ». Ce jugement
nous semble un peu sévère car la Cour de N'djamena
conformément à l'article 28 des Règles de procédure
de la Chambre judiciaire, veille au déroulement loyal de la
procédure en intégrant le procès équitable aux
principes généraux du droit communautaire (1) et une absence de
sanction d'abus de procédure (2).
1- Le procès
équitable comme principe général du droit
communautaire.
La CJCE l'a systématisé dans son arrêt ERT
du 18 juin 1991 :
« Selon une jurisprudence constante, les droits
fondamentaux font partie intégrante des principes généraux
du droit dont la Cour assure le respect. A cet effet, la Cour s'inspire des
traditions constitutionnelles communes aux Etats membres ainsi que des
indications fournies par les instruments internationaux concernant la
protection des droits de l'homme auxquels les Etats membres ont
coopéré ou adhéré ».
Dans son arrêt, la juridiction communautaire
européenne rappelle que les particuliers bénéficient d'une
protection juridictionnelle effective des droits qu'ils tirent de l'ordre
juridique communautaire. Ce droit à la protection fait partie des
principes généraux de droit découlant des traditions
constitutionnelles communes aux Etats membres. Elle indique également
que le traité comporte un système complet de voies de recours et
de procédures destiné à assurer le contrôle de
légalité des actes des institutions, en le confiant au juge
communautaire266(*). Les
droits fondamentaux forment donc un élément de la
légalité communautaire même si les instruments
internationaux qui les énoncent ne sont pas incorporés
directement dans l'ordre juridique communautaire et ne lient pas, comme tels,
la Communauté. Sans être allé aussi loin dans sa
jurisprudence, la CJC « statue en tenant compte du droit positif
communautaire et les principes généraux de droit communs aux
Etats membres » comme le prescrit l'article 28 de la Convention
CJC.
Tous les Etats membres étant parties aux principaux
instruments internationaux régionaux de promotion et de protection des
droits de l'homme, la Cour devrait les intégrer à son
raisonnement en particulier les règles du procès
équitable. Relativement aux règles de recevabilité des
recours, cela implique pour le juge de N'djamena de les aménager
conformément au droit à la justice, c'est-à-dire permettre
à toute personne qui y a un intérêt légitime et qui
présente la qualité éventuellement requise
d'accéder à son prétoire pour qu'il statue sur ses
prétentions. Le juge communautaire intègre de façon
rassurante cette problématique à sa démarche comme le
notent le docteur Edouard Gnimpieba Tounang et madame Zulandice Zankia à
propos de l'affaire Gozzo Samuel c/ CEBEVIRHA :
« Cette jurisprudence rassure également
l'observateur et les justiciables quant à la capacité du juge de
la CEMAC à garantir leurs droits, dans un environnement marqué
par le souci constant des autorités sous-régionales à
protéger radicalement les finances communautaires, bien souvent au
détriment des intérêts des justiciables. Enfin, la
jurisprudence Gozzo confirme l'indépendance du juge de la CEMAC et sa
capacité à protéger les justiciables devient
progressivement une réalité dans notre région, et porte la
marque d'une nouvelle ère en zone CEMAC : le choix de faire du
droit communautaire le principal instrument du mouvement d'intégration,
porteur d'une certaine sécurité juridique pour tous les acteurs
de cette aventure commune 267(*)».
Tout en restant réservé sur cette
indépendance du juge de la CEMAC268(*), l'on ne peut nier une véritable
volonté du juge de libéraliser le droit communautaire en se
montrant patient avec les justiciables même dans des hypothèses
où on aurait pu déceler des abus.
2- L'absence de sanction d'abus de
procédure.
Le juge de N'djamena marque sa volonté d'ouvrir son
prétoire non seulement en s'abstenant de sanctionner d'éventuels
abus du droit d'ester en justice, mais aussi en admettant le plus largement
possible l'intervention des tiers.
Visées par des dispositions spéciales,
l'irrecevabilité des procédures abusives est admise selon le
professeur Carlo Santulli, même sans texte et relève des principes
généraux du procès international. Toutefois, et c'est le
cas devant la CJC, si la jurisprudence admet l'hypothèse, en revanche
elle n'en fait à peu près jamais application269(*). En effet, la juridiction
communautaire n'évoque, ni même n'envisage, l'argument du
caractère abusif des actions sous l'angle de la multiplication des
procédures ; même pas comme c'est le cas devant certaines
juridictions internationales, face à l'accumulation de demandes
identiques et de demandes jugées
« futiles » 270(*). Pourtant la patience du juge communautaire de la
CEMAC aurait pu être mise à rude épreuve dans le long
feuilleton judiciaire qu'a constitué l'affaire Tasha Loweh Lawrence
où le requérant a usé de quasiment tous les incidents de
procédure admissibles devant la Chambre judiciaire : requête
aux fins de sursis à exécution et désignation d'un
administrateur judiciaire, requête en référé,
recours en récusation du président de la Chambre, exception
d'irrecevabilité d'intervention forcée, requête en
intervention forcée aux fins de déclaration de jugement commun,
recours en annulation, recours en interprétation et en rectification,
recours en révision, recours en indemnisation ; soit plus d'une
douzaine de décisions en tant que demandeur. Loin de se montrer
agacé et de sanctionner ce qui aurait pu pour certains recours
apparaitre comme abusifs, le juge de N'djamena a toujours accueilli ces
multiples demandes et les a examinées, de façon peut-être
contestable, mais certaine. L'abus n'est ainsi reconnu ni en raison d'un
acharnement procédural, ni d'un comportement contradictoire.
Cette disponibilité du juge de la CEMAC à
accueillir les justiciables s'illustre également par la large admission
devant son prétoire des interventions forcées ou volontaires.
Pratiquement toujours, la CJC a accueilli favorablement les requêtes en
intervention. Cette action du juge en faveur d'un éclairage et de la
protection des tiers participe assurément de la recherche d'une bonne
administration de la justice.
Dans l'affaire Tasha L. Lawrence c/ Amity Bank dont l'objet
portait sur l'intervention d'irrecevabilité de l'intervention
forcée décidée par le juge rapporteur, la partie
défenderesse contestait une telle intervention sur la base de l'article
72 des Règles de procédure qui n'admet l'intervention
provoquée qu'à la seule initiative des parties. En effet, aucune
disposition des textes n'autorise, ni ne fait obligation à la CJC
d'informer les tiers susceptibles d'avoir un intérêt dans un
litige pour lequel elle est saisie. La Cour va justifier la démarche du
juge rapporteur en affirmant que : « Le principe de
contradiction impose qu'une personne intéressée soit
appelée à l'instance lorsque l'issue de la procédure est
susceptible d'emporter effet sur ses droits271(*) ». La Cour adopte
donc une démarche visant à protéger les droits des
justiciables dans l'intérêt d'une bonne administration de la
justice. Cette attitude du juge communautaire qui ne se contente pas de laisser
à la charge des tiers l'obligation de s'informer des procédures
devant la CJC, mais qui au contraire va au devant d'eux, peut s'avérer
nécessaire dans un contexte marqué par une méconnaissance
du droit communautaire. Le seul regret que l'on peut avoir est que la Cour ne
fasse pas toujours preuve d'une telle hardiesse, mais se montre parfois par
trop prudente.
PARAGRAPHE II- L'AUTOLIMITATION
DU JUGE COMMUNAUTAIRE, EXPRESSION D'UNE PRUDENCE.
La politique interprétative développée
par la CJC à l'égard des conditions de recevabilité des
recours, montre que le juge communautaire sait s'en tenir à une stricte
application des règles et à la limitation de ses pouvoirs. Cette
limitation peut s'expliquer par une certaine pusillanimité des juges
tant à l'égard des Etats membres (A) que des autres institutions
communautaires (B).
A- Une grande prise en
considération du « seuil de tolérance » des
Etats membres de la CEMAC
Il est certain que le juge communautaire, quelle que soit
l'étendue de ses pouvoirs juridictionnels, ne peut user de la marge
d'appréciation dont il dispose dans l'interprétation des textes
sans être particulièrement attentif au degré de
réception de sa jurisprudence par les Etats membres272(*). Le juge de la CEMAC est
particulièrement attentif aux réactions des Etats à ses
énoncés. Cela peut s'expliquer par la nature même de la
Communauté qu'est la CEMAC : « elle n'est pas fusion
mais addition des acteurs. Elle participe à une simple juxtaposition des
souverainetés273(*) ». En effet, l'utilisation du concept
d'intégration semble quelque peu malaisée en Afrique au point
où on se demande si certaines institutions qui portent la
dénomination visée ont été effectivement mises sur
pied pour réaliser un tel objectif. La question est d'autant plus
intéressante qu'on ne saurait reprocher à une structure de
n'avoir pas atteint un objectif pour lequel elle n'avait pas réellement
été créée274(*). La principale conséquence est que les
institutions communautaires, au rang desquels la CJC, apparaissent comme des
« agences créées par les Etats uniquement dans le
but d'accroitre l'efficacité des marchandages interétatiques et
(...) l'autonomie des responsables politiques nationaux composant
l'arène politique nationale275(*) ». La CJC comme toutes les autres
institutions communautaires reste donc sensible aux desiderata des Etats
qu'elle souhaite ménager.
Comme son homologue européen,
« Le juge communautaire a toujours su
« jusqu'où il pouvait aller trop loin » ;
plutôt que de courir le risque d'une résistance ouverte ou d'une
inexécution pratique de ses décisions, il semble que la Cour ait
préféré user d'une stratégie plus subtile, en
s'abstenant volontairement d'utiliser à plein les ressources de
l'interprétation quand l'enjeu de l'espèce et les observations
présentées par les Etats membres au cours de la procédure
révélaient, de la part des gouvernements nationaux, une
volonté affirmée de ne pas se laisser imposer une
interprétation indûment extensive et a fortiori une modification
subreptice des règles en vigueur 276(*)».
Si ceci est vrai pour le juge européen qui est
originaire de systèmes nationaux où il existe une culture
certaine de l'indépendance du juge, elle l'est davantage encore pour le
juge communautaire d'Afrique Centrale issu de systèmes où
l'indépendance de la justice est encore en chantier. C'est sans nul
doute pourquoi il se montre encore plus sensible au jugement que les Etats
portent sur son travail d'autant plus qu'il sait ne pas être à
l'abri d'une non reconduction de son mandat.
L'affaire Dakayi Kamga a clairement montré le
rôle et l'importance des Etats dans la désignation des
fonctionnaires communautaires. Les Etats disposent d'un véritable
pouvoir discrétionnaire et ne semblent même pas être tenus
de se conformer aux voeux et institutions et organes de la communauté.
En optant pour la formule du mandat renouvelable, et pas un mandat unique, le
législateur CEMAC qui se trouve être les Etats membres, a
privé les membres de la Cour d'une chance supplémentaire
d'être véritablement indépendants et a mis entre les mains
des Etats un moyen supplémentaire de pression sur ceux-ci. C'est parce
qu'il est conscient de la présence de ces Etats au sein des institutions
communautaires que le juge de la CEMAC évite également
d'empiéter sur leurs compétences.
B- Le respect scrupuleux
du pouvoir discrétionnaire des institutions communautaires.
Deux affaires nous semblent assez révélatrices
de la volonté du juge communautaire de préserver ce qu'il
considère comme le pouvoir discrétionnaire des institutions
communautaires et plus précisément des organes politiques.
D'abord l'affaire Okombi Gilbert où le juge se refuse à imposer
des obligations procédurales au Secrétaire exécutif
(Président de la Commission) dans l'exercice de son pouvoir
disciplinaire à l'égard des fonctionnaires communautaires.
Ensuite, et de façon plus marquée, l'affaire Thomas Dakayi Kamga
c/ CEMAC où le juge a refusé à voir une faute dans une
nomination effectuée par le Président de la Conférence des
chefs d'Etats. On pourrait voir dans cette attitude du juge de N'djamena une
volonté de préserver l'équilibre institutionnel
établi dans le système communautaire.
Cette attitude n'est pas propre au juge de la CJC et le juge
européen a marqué sa volonté d'autolimitation à
l'égard des choix de politique économique effectués par
l'administration communautaire. Dans ces cas, le juge borne son examen à
la vérification de l'exactitude matérielle des faits et au
contrôle de la qualification juridique opérée par le
Conseil ou la Commission :
« s'agissant de l'évolution d'une
situation économique complexe, la Commission et le Comité de
gestion jouissent à cet égard d'un large pouvoir
d'appréciation(...) En contrôlant la légalité de
l'exercice d'une telle compétence, le juge doit se limiter à
examiner si elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste ou de
détournement de pouvoir, ou si cette autorité n'a pas
manifestement dépassé les limites de son pouvoir
d'appréciation277(*) ».
La différence encore une fois entre les deux
juridictions se trouve dans la motivation et le dialogue avec les justiciables.
Alors que la juridiction européenne justifie son autolimitation et
informe ainsi le justiciable des limites de son contrôle, le juge de la
CEMAC en gardant le silence entretient un flou qui est générateur
de suspicion sans rassurer les justiciables.
On conçoit dans ces conditions qu'il soit fort
difficile pour les requérants non institutionnels de faire valoir leurs
droits compte tenu de la prudence dont fait preuve la CJC, alors même que
l'édification de la Communauté de droit exige une politique
jurisprudentielle plus libérale de l'appréciation de la
recevabilité des requêtes.
SECTION II- POUR UNE POLITIQUE JURISPRUDENTIELLE PLUS LIBERALE
DE LA COUR DANS L'APPRECIATION DE LA RECEVABILITE DES REQUETES
La libéralisation souhaitée des conditions de
recevabilité des requêtes devant la CJC, sans induire une
violation systématique de ces règles, permettraient un plus grand
accès au juge, condition de l'effectivité du droit communautaire
(paragraphe I). Le juge de N'djamena dispose pour cela de nombreux moyens
textuels et non textuels (paragraphe II).
PARAGRAPHE I- L'ACCÈS AU
JUGE, CONDITION NÉCESSAIRE À L'EFFECTIVITÉ DE LA
RÈGLE COMMUNAUTAIRE
Pour le docteur Joseph Djeukou,
« Le constat de l'existence d'un pouvoir
communautaire s'impose d'une façon générale dans tous les
domaines d'intervention des institutions de la CEMAC ; ce pouvoir
s'exprime par le biais d'une diversité d'actes juridiques ou de normes
édictés. Les difficultés de l'intégration
économique dans la sous- région de l'Afrique centrale ne peuvent
donc « être imputées à une inertie
décisionnelle ou législative ». La recherche d'une plus
grande efficacité du processus d'intégration doit être
faite plutôt au niveau de l'effectivité des normes
édictées par le pouvoir communautaire »278(*).
La Cour de justice communautaire de la CEMAC en raison de sa
nature spécifique (A) a un rôle déterminant à jouer
dans cette Communauté de droit qui à la différence des
Etats souffre d'une réelle légitimité démocratique
(B).
A- La nature
spécifique de la juridiction communautaire.
Aux termes de l'article 22 de la Convention CJC, celle-ci a
une triple fonction : juridictionnelle, consultative et d'administration
des arbitrages. La fonction judiciaire est elle-même divisée en
quatre fonctions d'après le professeur Guy Isaac : justice
administrative, justice constitutionnelle, justice internationale et justice
régulatrice279(*). La première mission répond au souci
de protéger les divers sujets de droit contre les agissements
illégaux ou dommageables des institutions communautaires. Ensuite, la
mission constitutionnelle de la CJC consiste à délimiter et
défendre les compétences respectives des Etats membres et de la
Communauté tout en préservant l'équilibre des pouvoirs
à l'intérieur de celle-ci entre les institutions, organes et
institutions spécialisées. Trancher les différends entre
Etats membres sur l'interprétation ou l'application du droit
communautaire ou les différends en connexité avec l'objet des
traités, dès lors que les Etats décideraient de les lui
soumettre en vertu d'un compromis, telle est la fonction de justice
internationale de la Cour. Quant à la fonction régulatrice enfin,
son objet est d'assurer l'unité d'interprétation et d'application
du droit communautaire dans l'ensemble des Etats membres280(*). Si cette dernière
fonction est assurée par le jeu du renvoi préjudiciel, les autres
fonctions exigent une saisine de la Cour qui ne peut s'autosaisir par des
requérants (1). Ensuite la place centrale de la Cour dans la protection
de l'ordre juridique communautaire exige qu'elle apporte des précisions
sur les questions fondamentales (2).
1- Le rôle
constitutionnel de la CJC
« La notion de constitution, écrit
le docteur jean Kenfack, peut être appliquée aux
traités fondateurs des Communautés étudiées et de
l'OHADA. Quand bien même ces traités ne comporteraient pas de
dénomination particulière, à l'instar de celles
généralement utilisées dans nombre d'organisations
internationales telles «charte constitutive», «statut» ou
encore «chartes», ils sont bel et bien des actes constitutifs. A ce
titre, leur objet est de créer un corps stable, doté de
structures et de compétences de caractère permanent. Il en
découle une «diversification des structures et des
pouvoirs281(*) » ».
Dans son célèbre arrêt Costa c/ ENEL du 15
juillet 1964282(*), la
CJCE a refusé d'assimiler le traité instituant la
Communauté européenne à une convention internationale
classique. Elle va même à plusieurs reprises le qualifier
juridiquement : une première fois dans son avis du 26 avril 1977
où elle recourra à la notion de « constitution
interne », et à différentes reprises, notamment en
1986 et 1991 où elle posera à la suite d'un raisonnement
très élaboré le principe selon lequel le traité
forme « la charte constitutionnelle d'une communauté de
droit »283(*). Le traité constitutif de la CEMAC ainsi
érigé en constitution fait du juge communautaire un juge
constitutionnel et la « Communauté de droit »
proclamée véhicule des principes fonctionnels.
« Juridiquement, tout d'abord, le principe
qu'exprime la notion de communauté de droit est que les actes des
institutions ne peuvent échapper au contrôle de conformité
avec le droit primaire284(*) ». Or le juge communautaire ne peut
s'autosaisir. Il ne peut exercer ses pouvoirs que si un requérant le lui
demande. Il en résulte donc qu'un acte illégal de la
Communauté ou d'un Etat que ceux-ci sont d'accord, tacitement ou
explicitement, pour appliquer échappe à la censure du juge
communautaire puisque personne ne l'en saisit. Une parfaite illustration est le
cas de la situation que le juge Georges Taty déplore : pratiquement
aucun renvoi préjudiciel en interprétation des juridictions
nationales à la juridiction communautaire285(*). Cette dernière,
devant le risque de voir se multiplier les poches de non droit ou de violation
systématique du droit communautaire, devrait se montrer plus souple dans
l'examen des conditions de recevabilité afin de pouvoir se saisir des
questions de droit particulièrement importantes.
Ensuite, l'idée de « communauté de
droit » induit une idée d'autolimitation en amont et de
sanction par le juge en aval. Comme le souligne le professeur Pierre-Yves
Monjal,
« C'est bien le citoyen-justiciable, ensuite,
qui est au centre des enjeux de la communauté de droit. (...) Autrement
dit, la communauté de droit donne aux requérants-citoyens des
Etats membres de nouvelles fonctions leur permettant de compléter le
contrôle politique traditionnel, et de limiter ou encadrer l'action de
l'Etat286(*) ».
Cette fonction du requérant-citoyen, qui est
« constitutionnellement » protégée dans le
traité constitutif, ne peut être remplie de façon efficace
et effective que par un accès au prétoire communautaire. Le juge
de N'djamena dans cette perspective devra donc se montrer plus libéral
dans l'examen de la recevabilité des requêtes afin de faciliter ce
contrôle démocratique, mais aussi parce que l'occasion serait
ainsi donnée à la Cour d'affiner sa jurisprudence.
2- L'importance de la
jurisprudence dans l'élaboration du droit communautaire.
Analysant la capacité intégrative de la CJC dans
son ancienne formule, le docteur Guy Mvele affirme que :
« Sa capacité ou sa « non
capacité » à structurer de façon originelle les
comportements des acteurs sous régionaux tient au fait qu'elle n'exerce
que trois types de fonctions, qui sont d'ailleurs des « fonctions
manifestes » car se (sic) sont celles pour lesquelles elle a
été créée : la fonction juridictionnelle, la
fonction consultative et la fonction de contrôle budgétaire des
comptes de la CEMAC (article 3 de la convention régissant la Cour). On
voit bien par là que, dépourvue de la fonction, même
« latente » d'édiction des actes juridiques
communautaires, c'est-à-dire la fonction législative, la Cour
n'appartient pas au groupe d'institutions qui initient l'intégration en
Afrique centrale. Par ce fait même, en tant qu'institution communautaire,
elle ne structure pas les comportements des acteurs au premier degré et
peut donc être considéré comme organe
« semi-intégrateur » au sein de la
CEMAC287(*) ».
L'auteur se rapproche d'une approche classique de la fonction
du juge telle que développée par Montesquieu pour qui les
décisions du juge ne doivent jamais être
qu' « un texte précis de la loi ; les juges ne
sont... que la bouche qui prononce les paroles de la loi ; des être
inanimés qui n'en peuvent modérer ni la force ni la
rigueur »288(*). Mais ces approches, comme l'écrit fort
justement le professeur Monjal,
« sont désormais surannées. Le
juge communautaire est en fait un tiers institutionnel qui exerce une
véritable fonction de jurisdictio et non de simple legisdictio. Il est
clairement admis que la (CJC), comme la plupart des juridictions nationales,
exerce une activité éminemment normative. La mission
interprétative de la Cour, (...) amène en réalité
le juge (de N'djamena) à oeuvrer davantage dans le sens d'une
création que dans celui d'une simple lecture du droit adapté au
cas d'espèce. Même si la Cour révèle ce qui est
contenu dans la règle préexistante, la décision, le
jugement et la jurisprudence seront néanmoins autant
d'éléments créant une nouvelle norme 289(*)».
Cette importance avérée et confirmée de
la jurisprudence dans l'élaboration du droit communautaire entraine deux
conséquences interdépendantes. D'abord que le juge communautaire
de la CEMAC dispose du pouvoir de contrôler l'application du droit
communautaire et donc d'en combler les lacunes notamment relatives aux
règles de recevabilité, d'en étendre la portée et
d'en promouvoir le développement continu. Cela passe comme nous l'avons
déjà précisé par une systématisation de la
méthode téléologique ou finaliste d'interprétation
dont elle a quelques fois fait usage. Ensuite, que le juge communautaire ne
peut véritablement jouer son rôle de jurisdictio que s'il
est saisi des litiges qui lui fournissent l'occasion de préciser le sens
et la portée objectifs des textes communautaires. En effet, toute
entreprise de construction communautaire ou d'intégration doit reposer
sur des supports juridiques aptes à cristalliser le projet qui la
sous-tend dans son contexte d'édification. La réalisation de cet
objectif passe par la conception des actes de base et de types d'actes du droit
dérivé, susceptibles de procurer la prévisibilité
et la sécurité des relations sociales à régir par
le projet visé290(*).
Le juge de N'djamena se trouve ainsi dans une situation
inédite : assouplir les règles de recevabilité afin
d'être saisi davantage de recours qui lui permettent d'élaborer sa
jurisprudence sur les débats de la Communauté. Le peu de
consistance et d'impact dans l'édification communautaire de la
jurisprudence communautaire que l'on observe actuellement est l'expression de
la rigueur des règles de recevabilité, en partie au moins, en
même temps qu'il traduit le déficit démocratique de la
CEMAC.
B- La compensation du
déficit démocratique de la Communauté.
La Communauté telle qu'elle est issue du Traité
révisé de Yaoundé du 25 juin 2008 apparait d'abord comme
une communauté d'Etats en ce sens que peu de place est accordée
aux individus et citoyens dans l'édification communautaire. Les citoyens
sont faiblement mobilisés par la CEMAC en raison de la nature
essentiellement régulatoire de ses politiques. Ils participent par
ailleurs peu, pour ne pas dire pas du tout au système politique de la
Communauté ; les élections du Parlement communautaire restant une
simple projection. D'autres formes de participation existent, notamment lorsque
les citoyens sont membres d'associations, de syndicats, de lobbies ou d'ONG,
comme c'est le cas dans l'Union européenne. Mais comme l'écrit
monsieur Guy Mvele,
« ce régionalisme presque réduit
à une coopération entre Etats se manifeste par la non
reconnaissance qui est faite aux autres acteurs de l'intégration que
peuvent être les associations ou les organisations non gouvernementales.
En effet, il n'existe pas au sein de la CEMAC un organe de type Conseil
économique et social des Nations Unies (ECOSOC) qui sert de plateforme
pour recevoir le point de vue des organisations non gouvernementales291(*) ».
Pour reprendre et paraphraser Olivier Costa, la CEMAC se
présente comme un système politique qui peine à nouer des
relations avec ses citoyens, aussi bien par les « inputs »
(participation, consultations, « opinion publique ») que par les
« outputs » (politiques publiques, redistribution)292(*). Or l'intégration ne
peut être réussie que si elle dépasse les Etats pour
rapprocher les peuples, que si au delà de l'objectif d'une
intégration de marché, se bâtit une « CEMAC du
citoyen ». Sur ce point, la « citoyenneté
judiciaire293(*)
» pourrait contribuer à réduire le déficit
démocratique de la Communauté.
La construction de cette « CEMAC du
citoyen » n'est possible que si
« l'immédiateté descendante » des
règles communautaires est complétée par une
« immédiateté ascendante » du citoyen vers la
Communauté. L'existence de la CJC est justement le signe et la garantie
du rôle du droit dans l'ordre juridique communautaire et s'avère
être un vecteur fondamental du renforcement de la
« Communauté de droit ». L'une des missions de la
Cour en accordant la possibilité aux particuliers, personnes physiques
ou morales, de s'exprimer devant elle est de leur permettre de faire connaitre
leur point de vue sur les normes du droit communautaire et ainsi de donner un
« visage plus humain » à la Communauté. La
position de la Cour est d'autant plus forte que, contrairement à la
situation des Etats où le législateur est le représentant
direct de la volonté du peuple, la législation dans le cadre
communautaire émane non du Parlement communautaire, mais d'organes
nommés, la Conférence des Chefs d'Etats, le Conseil des ministres
de l'UEAC, le Comité ministériel de l'UMAC et la Commission dont
la représentation démocratique n'est pas supérieure
à la sienne294(*). Cette action est d'autant plus importante en
l'absence d'un médiateur comme dans le système de l'UE295(*).
La CJC se présente ensuite non pas comme un simple
organe judiciaire, ni même seulement une autorité judiciaire mais
comme un véritable « pouvoir judiciaire »296(*). D'un pouvoir judiciaire, la
Cour possède d'abord les moyens. Seule interprète en dernier
ressort des textes communautaires, elle possède un pouvoir
suprême. Institution au même titre que l'UEAC, l'UMAC, la Cour des
comptes et le Parlement communautaire, et donc bénéficiant en
principe de l'indépendance organique, elle incarne un pouvoir autonome.
Mais surtout, ses décisions s'imposent irrévocablement, elle
possède un « pouvoir souverain ». A constituer un
véritable « pouvoir judiciaire », la Cour dispose
ensuite d'un titre incontestable. Elle n'est pas seulement un juge auquel il
appartient spécialement d'assurer en vertu de l'article 48 du
Traité, le respect du droit dans l'interprétation et dans
l'application du Traité, mais aussi une institution à laquelle il
incombe en vertu des articles 2 et 10 du Traité et comme les autres
institutions à assurer la réalisation des tâches
confiées à la Communauté. Il lui reste seulement de
s'approprier ses attributions de juge, dépositaire suprême de
l'intérêt communautaire, en montrant comme son homologue
européen qu'elle avait la volonté d'exercer pleinement ces
responsabilités. Comme la CJCE donc, la Cour devrait ouvrir son
prétoire aux justiciables afin d'affiner et exercer pleinement son
pouvoir. La Cour de N'djamena, on l'a dit, en a les moyens.
PARAGRAPHE II- LES MOYENS
À LA DISPOSITION DU JUGE POUR UNE OUVERTURE DU PRÉTOIRE
COMMUNAUTAIRE.
L'enjeu d'une politique jurisprudentielle plus libérale
dans l'examen de la recevabilité est pour le juge de la CJC une
extension de la portée réelle de sa fonction (A). Le juge de
N'djamena dispose pour cela de plusieurs « armes
tactiques » dont n'a pas hésité à user le juge
de Luxembourg (B).
A- L'extension de la
portée réelle de sa fonction.
A la lecture du Traité instituant la CEMAC et de la
Convention CJC, il appert clairement que les auteurs de ces textes ont entendu
confier à la Cour de justice la responsabilité de garantir que la
mise en oeuvre de leur projet commun s'effectuerait en conformité avec
les dispositions conventionnelles. La juridiction communautaire, compte tenu de
l'étendue des fonctions judiciaires qui lui sont imparties, pourrait
à partir d'une interprétation constructive de ses
compétences contentieuses et notamment des conditions de
recevabilité, étendre le contrôle de la régulation
de l'ensemble du système normatif établi par les traités,
de façon à assurer le respect de la « charte
constitutive » aussi bien par les institutions (1) que par les Etats
membres (2).
1- Le contrôle des
actions des institutions communautaires.
Le Traité instituant la CEMAC et la Convention
régissant la CJC ont instauré un système de contrôle
juridictionnel perfectionné à l'égard des actes
adoptés par les organes d'action établis par les
« chartes constitutives ». Les Etats fondateurs ont en
effet entendu imposer aux institutions dans leur activité juridique un
strict respect du droit, sanctionné par une série de voies de
droit permettant la saisine de la Cour de justice, aussi bien au titre du
contentieux de la légalité qu'à celui de la
responsabilité. Tirant les conséquences de cette volonté
manifeste des Etats membres, le juge communautaire devrait s'employer à
donner leur pleine efficacité aux compétences qui lui sont
attribuées, à travers une interprétation libérale
des conditions de recevabilité.
En premier lieu, la Cour devrait élargir, pour autant
que des stipulations délibérément restrictives ne le lui
interdisent pas, les critères fixés pour la mise en oeuvre du
contrôle de la légalité des actes à travers une
conception extensive de la notion d'acte attaquable. A ce propos, la CJC
pourrait s'inspirer du raisonnement du juge de Luxembourg dans l'affaire AETR
pour le recours en annulation :
« ce recours tend à assurer, (...) le
respect du droit dans l'interprétation et l'application du traité
(...) Il serait contraire à cet objectif d'interpréter
restrictivement les conditions de recevabilité du recours en limitant sa
portée aux seules catégories d'actes visés par l'article
189 (...).Le recours en annulation doit être ouvert à
l'égard de toutes les dispositions prises par les institutions, quelles
qu'en soient la nature ou la forme qui visent à produire des effets de
droit297(*) ».
Cet attendu que le professeur Denys Simon qualifie de
« principe », vise selon lui à rejeter
l'argumentation du Conseil, tendant à limiter la notion d'acte
susceptible de recours au sens de l'article 173 aux seuls actes
énumérés par l'article 189 exception faite des
recommandations et avis, et à dénier par conséquent la
qualité d'acte attaquable à sa délibération qui
faisait l'objet du litige. La solution de la Cour est d'autant plus importante
qu'elle écarte en même temps l'argument subsidiaire
présenté par le Conseil, selon lequel « dans le cas
d'un litige entre institutions, la recevabilité devrait être
appréciée d'une manière particulièrement
rigoureuse298(*) ».
En second lieu, la CJC devrait accueillir plus
libéralement les requérants à travers une
interprétation plus souple de l'intérêt à agir,
surtout pour les requérants non destinataires de l'acte. S'agissant par
exemple des entreprises ; une entreprise placée en situation de
concurrence avec le destinataire de l'acte devrait pouvoir agir contre l'acte
visé299(*). Ainsi
sans aller à l'encontre de la volonté explicite des Etats
membres, la Cour devrait se montrer favorable à une
interprétation extensive des conditions de recevabilité des
recours, de façon à renforcer son contrôle sur les actes
adoptés par les institutions communautaires et sur le comportement des
Etats membres.
2- Le contrôle du
comportement des Etats membres
Le docteur Jean Kenfack explique l'échec des
organisations d'intégration africaines par l'effritement de leur ordre
juridique dû à la « vulnérabilité des
institutions et de facteurs d'affaiblissement des actes juridiques
communautaires et d'intégration. Cette situation est
générale en Afrique, mais le cas de l'Afrique Centrale est plus
caractéristique de la propension des sujets du droit communautaire ou de
l'intégration économique à se soustraire à la
contrainte des actes juridiques 300(*)».
S'il est vrai que la CJC s'est toujours
préoccupée de ne pas empiéter sur les compétences
du juge interne et sur l'autonomie institutionnelle des Etats membres, par une
interprétation indûment extensive de sa propre fonction, le souci
de garantir le respect par les instruments communautaires devrait la conduire
à donner leur plein effet aux moyens contentieux dont elle dispose pour
soumettre à son contrôle, fût-ce de façon indirecte
l'action des Etats membres dans l'application des normes communes. Sur ce plan,
l'introduction dans l'ordre juridique communautaire du recours en manquement
constitue une véritable avancée. Mais ce recours ne peut produire
son plein effet que si la Cour interprète largement, mais
rigoureusement, les conditions de recevabilité en élargissant par
exemple la définition de l'objet même du manquement dans un sens
favorable à une extension de son contrôle.
La CJCE s'est efforcée de compenser les insuffisances
de ce contrôle juridictionnel direct par le jeu combiné de l'effet
direct et du recours préjudiciel en interprétation permettant,
grâce à la collaboration du juge national et du juge
communautaire, de sanctionner indirectement l'inobservation par les Etats
membres des règles communes301(*). Ainsi, tout en insistant sur l'autonomie de deux
voies de droit permettant de censurer la violation par les Etats de leurs
obligations, le juge communautaire européen met l'accent sur leur
complémentarité qui assure, grâce à un
véritable concours d'actions judiciaires, un contrôle
renforcé du respect par les autorités nationales des obligations
imposées par l'application des traités.
Le véritable contrôle du comportement des Etats
membres appelle du juge CEMAC une politique jurisprudentielle double :
devant son prétoire un assouplissement des conditions de
recevabilité du recours en manquement et des autres voies susceptibles
de lui permettre de contrôler le comportement des Etats membres en aval,
mais déjà en amont inciter les juges nationaux à assouplir
les conditions de recevabilité des actions fondées sur le droit
communautaire et de se reconnaitre compétent pour statuer sur de telles
actions302(*). C'est
là l'une des stratégies jurisprudentielles du juge de
Luxembourg.
B- Les « armes
tactiques » du juge : La stratégie jurisprudentielle de
la CJCE.
Antérieure à la CJC, la CJCE revêt un
intérêt certain pour l'étude de la juridiction
communautaire de N'djamena non pas seulement parce qu'elle a servi de
modèle aux concepteurs de la CJC, mais également parce que sa
jurisprudence révèle un rôle prépondérant
dans l'édification de la Communauté qu'il est à souhaiter
pour les pays d'Afrique centrale.
La Cour de justice des Communautés européennes,
comme la Cour de justice communautaire de la CEMAC, est compétente pour
appliquer et interpréter les traités et les actes pris par les
institutions communautaires. A cet égard, elle fait preuve d'un
dynamisme particulier s'efforçant de donner aux dispositions de droit
communautaire un maximum d'effet. En recourant à des méthodes
d'interprétation positive, fondées sur les finalités des
traités, elle participe d'une manière constructive au
développement du processus d'intégration européenne. Il
s'agit toujours pour la juridiction communautaire européenne de faire
prévaloir la logique permanente de la construction communautaire sur les
défaillances contingentes de la volonté politique, de donner la
priorité à l'intention globale et objective des Etats sur leurs
réticences conjoncturelles, d'assurer la réalisation effective
des finalités incluses dans le système des traités
malgré la carence des institutions communautaires ou des gouvernements
nationaux. La même démarche se trouve dans l'effort entrepris par
la CJCE pour développer une « jurisprudence
valorisée303(*) », destinée à compenser
le déficit démocratique des communautés, en
renforçant la protection des justiciables. L'accroissement des garanties
juridictionnelles des sujets de l'ordre juridique communautaire apparait en
effet, comme la seconde ligne de force de la stratégie jurisprudentielle
mise en oeuvre par le juge. L'extension des conditions et des effets de
l'applicabilité directe, la portée reconnue aux mécanismes
de renvoi préjudiciels, l'élargissement de la recevabilité
des recours en annulation, l'introduction dans le contentieux communautaire des
principes tels que la sécurité juridique ou la confiance
légitime, se présentent comme autant d'illustrations d'une
politique interprétative cohérente, orientée vers
l'amélioration de la protection des droits des particuliers à
l'égard des actes communautaires comme des mesures nationales304(*).
Le rappel de l'existence d'un ordre juridique propre
apparaît ainsi comme le premier élément du raisonnement qui
a amené le juge communautaire européen à
l'élargissement des conditions de recevabilité des particuliers.
L'assimilation du traité à une constitution a été
la conséquence des développements considérables, dans le
système des sources du droit communautaire des « principes
généraux du droit » et, tout particulièrement
parmi eux, des droits fondamentaux destinés à protéger les
personnes. L'on sait en effet qu'aujourd'hui, grâce à la
jurisprudence de la CJCE, dont l'action s'est trouvée, d'une certaine
façon, entérinée par les traités de Maastricht et
d'Amsterdam, il existe dans le système juridique communautaire une
protection des droits de la personne aussi complète que celle que l'on
peut trouver dans n'importe quel Etat membre de l'Union européenne ou
dans la convention européenne des droits de l'homme305(*). En effet les traités
communautaires n'énoncent pas un éventuel droit au juge au niveau
national. C'est par le détour des principes généraux du
droit que la CJCE a forgé sa propre jurisprudence sur le droit au juge,
instrument de mise en oeuvre effective et uniforme du droit communautaire. Dans
l'arrêt Simmenthal, la Cour souligne que l'obligation de faire
prévaloir l'effectivité de la norme communautaire pèse sur
tout juge qui « a, en tant que organe d'un Etat membre, pour
mission de protéger les droits conférés aux particuliers
par le droit communautaire »306(*). En vertu du partage de compétences qui
existe entre la Communauté et ses Etats membres, ces derniers jouissent
d'une grande liberté quant à l'organisation de leur
système procédural et contentieux. Toutefois, selon une
jurisprudence communautaire bien établie, d'une part, pour la mise en
oeuvre des droits fondés sur le droit communautaire, les Etats membres
doivent mettre en place des procédures qui ne soient pas moins
favorables que celles visant à la sauvegarde des droits fondés
sur des dispositions nationales, c'est le principe du traitement
national ; d'autre part, en vertu du principe d'effectivité, ces
procédures ne doivent pas être de nature à rendre
« pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice
de ces droits que les juridictions nationales ont l'obligation de
sauvegarder307(*) ». Cette dernière formule
montre toute l'importance que la Cour de justice attache à
l'accès à la justice nationale en tant que moyen d'assurer le
respect du droit communautaire308(*).
Devant son prétoire, la Cour de justice des
communautés européennes suit le même raisonnement en
affirmant clairement que « les instruments internationaux
concernant la protection des droits de l'homme peuvent également fournir
des indications dont il convient de tenir compte dans le cadre du droit
communautaire309(*) ». On ne s'étonnera pas alors que
le juge Puissochet, après avoir affirmé en 1996 que
« tout se passe comme si la convention européenne des
droits de l'homme était l'une des sources formelles du droit
communautaire », puisse aujourd'hui énoncer sans ambages
que la Cour de justice des communautés « applique
directement la convention européenne des droits de
l'homme310(*) ».
L'une des principales « armes » du juge
communautaire est également la motivation. On sait l'importance de la
motivation d'exposition pour emporter la conviction quant à la
cohérence rationnelle et à la certitude juridique d'une
décision de justice. Or à cet égard, affirme le professeur
Denys Simon,
« la rédaction des arrêts de la
Cour de Luxembourg constitue un modèle du genre : l'abandon du
style discursif au profit de la forme syllogistique confère aux
sentences de la Cour la majestueuse rigueur des déductions logiques,
faisant apparaître l'interprétation comme la seule
légitime ; l'appel fréquent au raisonnement par
enthymème, c'est-à-dire au syllogisme dont la majeure est
sous-entendue, permet au juge de masquer sa part de création incluse
dans la détermination des prémisses de sa déduction, et de
faire apparaître sa démarche comme un enchainement
nécessaire des syllogismes irréfutables. En outre, la Cour
n'hésite pas à faire appel au « raisonnement par
accumulation » pour renforcer la valeur convaincante de sa
démonstration, en particulier dans les hypothèses où la
multiplication des arguments permet de pallier leur relative faiblesse
intrinsèque311(*) ».
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
« Il est indéniable qu'un tribunal dit le
droit mais ne légifère pas. Dans la pratique toutefois, il est
extrêmement difficile de faire le départ. Sans doute les juges
disent le droit, mais ils n'obéissent pas à des automatismes. On
ne peut nier dans leurs activités judiciaires un certain pouvoir
créateur. Ce qui ne leur est pas permis, c'est de créer le droit
indépendamment d'un système, d'une institution ou d'une norme
juridique existants. Ce qui leur est permis, c'est d'énoncer ce qu'on
peut logiquement déduire de la raison d'être d'un système
juridique, d'une institution ou d'une norme juridique312(*) ».
Cette affirmation du juge Tanaka montre bien la limite dans
laquelle doit se mouvoir le juge communautaire dans l'interprétation des
règles de recevabilité relatives aux requêtes. Si jusqu'ici
la CJC a fait preuve d'une prudence dans l'examen des conditions de
recevabilité notamment concernant les particuliers, la tendance
émergente d'une politique interprétative que nous qualifions de
constructive, doit être saluée et encouragée. La
juridiction communautaire de N'djamena sans violer systématiquement les
règles de recevabilité et ouvrir la porte à un laxisme
procédural, doit rejeter comme sa consoeur européenne, la
thèse de la prévalence absolue des textes à travers une
interprétation littérale, privilégier l'intention globale
et médiate découlant de la logique interne du système.
C'est la logique de la « Communauté de droit »
proclamée.
CONCLUSION GENERALE
« S'interroger sur les conditions d'accès
au juge constitutionnel, juge des normes, c'est bien davantage qu'exposer de
simples techniques procédurales. C'est mesurer l'efficacité du
conseil constitutionnel313(*) ». Adaptés au contexte
communautaire et à la CJC dont la nature constitutionnelle a
été démontrée, ces mots de Pascal Jan nous
permettent d'évaluer l'accès à la justice communautaire
tel qu'il résulte des textes et de la pratique juridictionnelle de la
Communauté. A cet égard, l'accès au juge communautaire est
dominé par une double logique : d'abord un accès
quasi-illimité pour les requérants institutionnels, en raison de
leur qualité qui laisse présumer à tout moment un
intérêt pour la défense de la légalité
communautaire, même si on l'a vu ce n'est pas toujours vrai au regard des
égoïsmes nationaux et peut traduire un certain
inter-étatisme dans la démarche communautaire centrafricaine.
Ensuite, un accès plus restrictif et encadré des particuliers,
personnes physiques ou morales, à la juridiction communautaire. Cela
découle d'abord des textes rédigés dans un style qui
laisse peu de marge d'appréciation au juge. Or comme le relève le
professeur Denys Simon, « la marge de liberté dont dispose
le juge est directement conditionnée par le degré
d'indétermination des normes applicables : ce sont en
définitive les obscurités, les contradictions et les lacunes du
texte conventionnel qui fournissent au juge l'occasion de mettre en oeuvre une
politique interprétative autonome 314(*)».
C'est justement là la seconde cause de cette fermeture
du prétoire communautaire aux particuliers : le juge communautaire
de la CEMAC n'a pas toujours voulu, pu ou su donner une interprétation
maximale aux critères textuels de recevabilité des recours
lorsque ceux-ci sont apparus flous, obscurs ou contradictoires. Bien au
contraire, il a contribué parfois à rationner la justice
communautaire par une démarche balbutiante et hésitante se
traduisant par des décisions contradictoires de nature à troubler
les citoyens déjà peu au fait du droit communautaire.
Heureusement, l'on note une véritable tendance du juge de N'djamena,
à adopter une méthode évolutive et une
interprétation finaliste de certaines conditions de recevabilité.
Cette démarche amorcée par la Chambre judiciaire de l'ancienne
formule de la Cour de justice si elle était confirmée par la CJC
contribuerait, à n'en pas douter, à combler le déficit
démocratique d'une Communauté.
De manière générale, les conditions de
recevabilité devant la CJC se rapprochent en bien des points de celles
applicables devant les juridictions administratives de la plupart des Etats
membres. En effet, à l'exception notable de la Guinée
Equatoriale, les Etats membres de la CEMAC ont hérité de la
puissance colonisatrice française l'essentiel des règles
procédurales dans le contentieux administratif interne, qu'ils n'ont pas
hésité à transposer avec quelques adaptations
nécessaires à la juridiction communautaire. Sur ce point, il sera
particulièrement intéressant d'observer le comportement du juge
de N'djamena face aux voies de droit nouvelles, recours en carence et en
manquement, qui n'ont pas leur pendant en droit interne et que le juge devra
découvrir en même temps que les justiciables, requérants
institutionnels.
Notre principale hypothèse selon laquelle les juges
communautaires, ressortissants de pays membres, auront tendance à
reproduire au niveau communautaire les travers de la justice interne se trouve
en partie confirmée. Le juge communautaire d'Afrique Centrale fait
montre dans certaines circonstances d'une prudence qui frise la
pusillanimité dans l'application des règles de
recevabilité. De plus, on note devant le juge de N'djamena comme dans
les ordres juridiques internes une rigueur se traduisant par l'absence de
possible régularisation ou de délais raisonnables. Mais il
convient de relativiser ce postulat de départ par la hardiesse dont a
fait preuve le juge dans certains cas pour préserver l'ordre juridique
communautaire.
Les résultats de cette étude doivent être
toutefois être nuancés par deux principales réserves.
D'abord, la nature hybride de ce travail entre le projeté et l'existant.
En effet, l'absence de règlement de procédure de la nouvelle
juridiction et d'une jurisprudence sur certains points nous ont conduit
à nous appuyer sur les textes de la Chambre judiciaire, mais aussi
à faire abondamment recours à la jurisprudence communautaire
européenne en ce qui concerne les voies de droit nouvelles. Rien
n'empêche la Cour dans sa jurisprudence à venir à adopter
une démarche davantage libérale des critères de
recevabilité des requêtes. Ensuite, l'on ne saurait se faire une
idée exacte et complète de l'accès à la justice
communautaire et de son efficacité qu'en tenant compte de l'existence de
l'ensemble juridictionnel auquel collaborent les juges nationaux et la CJC. En
effet, le système judiciaire communautaire n'a ni pour but, ni pour
effet de soumettre à la Cour de justice communautaire tous les litiges
mettant en jeu le droit communautaire. Au contraire, celle-ci n'exerce selon le
professeur Isaac qu'une « compétence
d'attribution 315(*)» et les juridictions nationales sont
érigées en instances de droit commun pour l'application du droit
communautaire. Au surplus, cette compétence est réduite au strict
minimum compatible avec l'autonomie de la Communauté : en dehors
des recours en annulation et en carence contre les institutions, des recours en
manquement contre les Etas et enfin des recours en responsabilité
extracontractuelle de la Communauté attribuée à la Cour,
c'est l'ensemble du contentieux entre particuliers, entre les particuliers et
les Etats membres et même, en matière contractuelle, entre les
particuliers et la Communauté elle-même qui relève des
juridictions nationales. Il nous semble donc utile qu'une recherche soit
menée de façon plus générale sur l'accès
à la justice communautaire dans le système juridictionnel de la
CEMAC.
En définitive, si jusqu'ici l'intégration en
zone CEMAC a surtout été marquée par le succès de
l'intégration monétaire au détriment des autres aspects,
pour le juriste c'est surtout la dynamique normative, l'aspect évolutif
du droit communautaire qui retient l'attention car elle permet
d'appréhender de façon globale et réelle les contraintes
du processus d'intégration. Cette intégration par le droit,
qu'évoque l'expression même de « Communauté de
droit » n'est possible que si le « pouvoir
judiciaire » qu'incarne la CJC joue véritablement son
rôle. Cela passe par une ouverture de son prétoire à
travers la lecture et une interprétation rigoureuse mais libérale
des conditions de recevabilité des requêtes. Il est donc heureux
que la CJC opte pour une méthode évolutive et une
interprétation finaliste des critères de recevabilité des
recours. En effet, dans un contexte international marqué par la prise en
compte des droits de l'homme dans l'évolution du droit, la CJC ne
saurait, ne pourrait s'inscrire dans une dynamique limitative et exclusive du
droit à l'accès au juge alors même que les Etats membres
vont, sous la pression de la « Communauté
internationale », dans le sens contraire. Comme l'écrit fort
à propos le professeur Zoller, « le droit doit être
le miroir de la volonté générale, et non celui de la
volonté des juges316(*) ».
ANNEXES
ANNEXE II
TABLEAU RECAPITULATIF DE L'ISSUE DES REQUETES DEVANT LA
CHAMBRE JUDICIAIRE DE LA COUR DE JUSTICE DE LA CEMAC.
13 DECEMBRE 2001- 19 JUIN 2008.
Nature du recours
|
Désistement
|
Incompétence
|
Irrecevabilité
|
Recevabilité
|
Total
|
Demande d'avis
|
|
|
|
05
|
05
|
Requête aux fins de sursis à exécution
|
|
02
|
|
04
|
06
|
Requête en référé
|
01
|
|
01
|
|
02
|
Requête en récusation
|
|
|
|
01
|
01
|
Exception de procédure
|
|
|
|
02
|
02
|
Requête aux fins d'intervention
|
|
|
|
03
|
03
|
Requête en annulation
|
01
|
01
|
02
|
01
|
05
|
Demande de paiement d'honoraires
|
01
|
|
|
|
01
|
Recours en révision
|
|
|
02
|
|
02
|
Requête aux fins de réparation ou d'indemnisation
|
|
|
02
|
05
|
07
|
Recours en interprétation et en rectification
|
|
|
|
01
|
01
|
Recours en contentieux de la fonction publique communautaire
|
|
|
01
|
|
|
Total.
|
03
|
03
|
08
|
22
|
36
|
ANNEXE III
TABLEAU RECAPITULATIF DES CAUSES D'IRRECEVABILITE DES
REQUETES DEVANT LA CHAMBRE JUDICIAIRE DE LA COUR DE JUSTICE DE LA CEMAC.
13 DECEMBRE 2001-19 JUIN 2008.
|
Requête en référé
|
Recours en contentieux de la fonction publique
|
Recours en révision
|
Recours en annulation
|
Total
|
Absence de connexité de mesures urgentes et action
principale
|
01
|
|
|
|
01
|
Défaut de recours administratif préalable
|
|
03
|
|
|
03
|
Autorité de la chose jugée
|
|
|
01
|
|
01
|
Non respect des délais prescrits
|
|
|
01
|
01
|
02
|
Non établissement de la fausseté des
pièces
|
|
|
01
|
|
01
|
Total
|
01
|
03
|
03
|
01
|
08
|
BIBLIOGRAPHIE
I- Ouvrages, dictionnaires et
encyclopédies.
- Borchadt (K.D.) L'ABC du droit communautaire,
Bruxelles, documentation européenne, Commission européenne, 2000,
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édition, 1997, 407p.
- Boulouis (J.), Darmon (M.) Contentieux
communautaire, Paris, Précis Dalloz, 1997, 467p.
- Cartou (L). L'Union européenne, Paris,
Précis Dalloz, 1994, 648p.
- Cerexhe (E.) Le Droit européen Les objectifs les
institutions, Bruxelles, Bruylant, Nauwelaerts, 1989, 531p.
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Paris, Montchrestien, 8ème édition, 1999, 1315p.
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contentieux administratif, Encyclopédie juridique,
20ème année, tome III, Dalloz, 2003.
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Paris, Armand Colin, 5ème édition, 1997, 328p.
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Répertoire de droit communautaire, Paris, Dalloz,
Encyclopédie juridique, vol. II, 2003.
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Luxembourg, collection perspectives européennes, 6ème
édition revue et mise à jour, 1993, 241p.
- Manin (P.) Les communautés européennes
L'Union européenne, Paris, Pedone, Etudes internationales, N°
6, 5ème édition, 1999, 471p.
- Masclet (J.C) Les grands arrêts de droit
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édition mise à jour, 1995, 127p.
- Monjal (P. Y.) Les normes de droit communautaire,
Paris, PUF, Que sais-je ?, 126p.
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communautés européennes, Paris, PUF, Que
sais-je ?, 1998, 127p.
- Odent (B.), Truchet (D.) La justice administrative,
Paris, PUF, 2004, 172p.
- Pacteau (B.) Traité de contentieux
administratif, Paris, PUF, collection droit fondamental, 2008, 646p.
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Paris, PUF, Que sais-je ? 2ème édition
corrigée, 1998, 127p.
- Ruiz Fabri (H.) et Sorel (J.M.) (dir.) La motivation des
décisions des juridictions internationales, Paris, Pedone,
collection contentieux international, 2008, 285p.
- Salmon (J.) (dir.) Dictionnaire de droit international
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- Santulli (C.) Droit du contentieux international,
Paris, Montchrestien, 2005, 584p.
- Simon (D.) L'interprétation judiciaire des
traités d'organisations internationales. Morphologie des conventions et
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II- Articles
- Bastid (S.) « Les tribunaux administratifs
internationaux et leur jurisprudence », RCADI, tome II, Leyde,
1958, pp.343-517.
- Boumakani (B.) « Les juridictions communautaires
en Afrique noire francophone : La cour commune de justice et d'arbitrage
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les juridictions communautaires : entre réalité et discours
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http://www.afsp.msh-paris.fr/archives/archivesgroupes/archives_europe/160301/Costa.pdf
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- De Schutter (O.) « Le tiers à l'instance
devant la Cour de justice de l'Union européenne », H. Ruiz
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- Djeukou (J.) « La CEMAC, rétrospective et
perspectives : réflexions sur l'évolution récente du
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- Dutheil de La Rochère (J.) « droit au
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jurisprudence communautaire », Juridis périodique,
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théoriques : Incertitudes sur le tiers et désordres de la
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l'urgence », H. Ruiz Fabri (dir.) Le contentieux de l'urgence et
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regards croisés, Paris, Pedone, collection contentieux
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Université de Yaoundé II, Faculté des sciences juridiques
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http://www.rtdh.eu/pdf/2001797.pdf
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lesquelles un particulier peut demander l'annulation d'un règlement
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http://www.libres.org/francais/dossiers/concurrence/concurrence_weber_p20.htm
(consultation le 03 février 2010)
- Witenberg (J.C.) « La recevabilité des
réclamations devant les juridictions internationales »,
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- Zoller (E.) « Procès équitable et
due process of law », Recueil Dalloz, N° 8,
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III- Thèses, mémoires et Rapports de
stage
- Chamegueu (G.M.) Le contrôle juridictionnel des
activités de la CEMAC, mémoire de DEA en Droit international
public, Université de Douala, Faculté des sciences juridiques et
politiques, disponible sur
http://www.memoireonline.com/08/09/2487/Le-controle-juridictionnel-des-activites-de-la-CEMAC.html
(consultation le 20 août 2009).
- Fandjip (O.) Les juridictions administratives et le
temps : cas du Cameroun et du Gabon, Mémoire de DEA en Droit
communautaire et comparé CEMAC, Université de Dschang, 2006-2007,
disponible sur
http://www.memoireonline.com/10/09/2798/les-juridictions-administratives-et-le-temps-cas-du-Cameroun-et-du-Gabon.html
(consultation 03 février 2010)
- Kenfack (J.) Les actes juridiques des communautés
et organisations d'intégration en Afrique centrale et orientale,
Thèse de doctorat, Yaoundé, Université de Yaoundé
II, 2003, 418p.
- Mihia Nana (A.) Le contrôle de la
légalité des actes déférés à la
censure de la Cour de justice de la CEMAC, RSA, Yaoundé, IRIC,
2007-2008, 64p.
- Tekebeng (T.) L'intervention devant la Cour de justice
de la CEMAC, RSA, Yaoundé, IRIC, 2007-2008, 50p.
- Zankia (Z.) Le contentieux de la fonction publique
communautaire de la CEMAC, Mémoire de DEA en droit communautaire
comparé CEMAC, Université de Dschang, 2008, disponible sur
http://www.memoireonline.com/12/09/3011/Le-contentieux-de-la-fonction-publique-communautaire-de-la-CEMAC.html
(consultation 03 février 2010).
IV- Textes Conventionnels
- Acte additionnel N° 4/00/CEMAC-041-CCE-CJ-02 du 14
décembre 2000 portant Règles de procédure de la Chambre
judiciaire de la CEMAC.
- Convention régissant la Cour de justice
Communautaire
- Règlement N° 8/99/UEAC-007-CM-02 du 18
août 1999 portant statut des fonctionnaires du Secrétariat
Exécutif de la Communauté Economique et Monétaire de
l'Afrique Centrale (CEMAC)
- Traité révisé de la Communauté
Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) du 25 juin
2008.
V- Jurisprudence
Ø Chambre Judiciaire de la
Cour de justice de la CEMAC
- Avis N° 004/2003 Demande d'avis du Directeur de l'ISSEA
sur l'interprétation à donner à l'article 21 point e de
l'annexe II du statut de l'ISSEA fixant le régime des prestations
familiales accordées aux personnels de l'ISSEA.
- Arrêt N° 001/R/CJ/CEMAC/CJ/02 du 15/01/2002, aff.
Tasha L. Lawrence c/ COBAC, Amity Bank (Requête en
référé aux fins d'interdiction d'augmentation du capital
de Amity Bank Cameroon).
- Arrêt N° 02/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 06/02/2002,
aff. M. Tasha L. Lawrence c/ M. Jean Mongo Antchouin (Président)
(récusation du président Jean Antchouin).
- Arrêt N° 004/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 16 mai 2002,
aff. Tasha L. Lawrence c/ Amity Bank Cameroon S.A (Exception
d'irrecevabilité de l'intervention forcée de l'Amity Bank
formée par Tasha L. Lawrence)
- Arrêt N° 003/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 16 mai 2002,
aff. COBAC c/ Tasha L. Lawrence (Exception de procédure soulevée
par la COBAC).
- Arrêt N° 005/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 06/06/2002,
aff. Amity Bank Cameroon SA. c/ Tasha L. Lawrence (Requête aux fins
d'intervention volontaire de Amity Bank dans les procédures engages par
Tasha Loweh Lawrence contre la COBAC et autres).
- Arrêt N° 006/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 06 juin 2002,
aff. Tasha L. Lawrence c/ Anomah Ngu Victor et Sanda Oumarou (Requête en
intervention forcée aux fins de déclaration de jugement
commun)
- Arrêt N° 007/CJ/CEMAC/CJ/02 du 11/07/2002, aff.
AFISCO c/ CEBEVIRHA (Recours en annulation).
- Arrêt N° 001/CJ/CEMAC/CJ/03 du 20/02/2003, aff.
Gozzo Samuel Aaron c/ CEBEVIRHA (Requête aux fins d'indemnisation)
- Avis N° 001/2003 du 21 février 2003 Demande
d'avis du Directeur General de l'ISTA sur les modalités d'application de
la résolution du Conseil d'administration de l'ISTA relative à la
fixation des indemnités de fonction des cadres de cet organisme ;
Avis N° 004/2003 du 7 juillet 2003 Demande d'avis du Directeur de l'ISSEA
sur l'interprétation à donner à l'article 21 point e de
l'annexe II du statut de l'ISSEA fixant le régime des prestations
familiales accordées aux personnes de l'ISSEA
- Avis N° 002/2003 du 9 avril 2003 Demande d'avis du
Gouverneur de la BEAC sur l'avant projet de règlement CEMAC relatif aux
systèmes, moyens et incidents de paiement, Avis N 003/2003 du 9 avril
2003 Demande d'avis du Gouverneur de la BEAC sur l'avant-projet de
règlement relatif à la prévention et à la
répression du blanchiment des capitaux et du financement du
terrorisme.
- Avis N° 003/2003 du 09 avril 2003 Demande d'avis du
Gouverneur de la BEAC sur l'Avant projet de Règlement relatif à
la répression et à la répression du blanchiment des
capitaux et du financement du terrorisme.
- Arrêt N° 002/CJ/CEMAC/CJ/03 du 03/07/2003, aff.
Tasha Loweh Lawrence c/ Décision COBAC D-2000/22 et Amity Bank Cameroon
PLC, Sanda Oumarou, Anomah Ngu Victor (sursis à exécution de la
décision COBAC-2000 et de désignation d'un administrateur
judiciaire)
- Arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/03 du 03/07/2003,
aff. Tasha Loweh Lawrence c/ Décision COBAC d-2000/22 Amity Bank
Cameroon PLC, Sanda Oumarou, Anomah Ngu Victor (Recours en annulation de la
décision COBAC D-2000/22).
- Arrêt N° 004/CJ/CEMAC/CJ/03 du 17 juillet 2003,
aff. Thomas Dakayi Kamga c/ CEMAC (Requête aux fins d'indemnisation).
- Arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/04 du 16/12/2004, aff.
Tasha Loweh Lawrence c/ Arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/03 et
Société Amity Bank Cameroun PLC (Recours en révision).
- Arrêt N° 002/CJ/CEMAC/CJ/04 du 16
décembre 2004, aff. recours en interprétation et en rectification
de Tasha Loweh Lawrence c/ arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/03 et
Société Amity Bank Cameroon PLC
- Avis N° 001/2005 du 24 mars 2005 Demande d'avis du
Directeur General de l'ISSEA sur l'interprétation de l'article 72 du
statut de l'ISSEA, relative au remboursement des frais de scolarité des
enfants à charge des fonctionnaires inscrits dans les
établissements scolaires du pays d'affectation, et émanant de cet
organe de la CEMAC
- Arrêt N° 001/CJ/CEMAC/CJ/05 du 07 avril 2005,
aff. Tasha Loweh Lawrence c/ CEMAC représentée par son
Secrétaire exécutif (recours en indemnisation)
- Arrêt N° 002/CJ/CEMAC/CJ/07 du 1er
février 2007, aff. société Price Waterhouse (FIDAFRICA) c/
Décision COBAC N° D-2006/132 (Requête aux fins de sursis
à exécution de ladite décision).
- Arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/07 du 1er
février 2007, aff. société Price Waterhouse (FIDAFRICA) c/
Décision COBAC N° D-2006/113 (Requête aux fins de sursis
à exécution de ladite décision)
- Arrêt N° 004/CJ/CEMAC/CJ/07 du 22 mars 2007, aff.
Dieudonné Nang Eko et autres c/ ISTA (Recours en annulation des statuts
révisés de l'ISTA)
- Arrêt N° 005/CJ/CEMAC/CJ/07 du 10/05/2007, aff.
USTC et Syndicat des douaniers centrafricains c/ l'Etat Centrafricain
(Requête aux fins de sursis à exécution du décret
N° 06.289 du 02 septembre 2006 du Chef de l'Etat Centrafricain).
- Arrêt N° 006/CJ/CEMAC/CJ/07 du 24/05/2007, aff.
Tasha Loweh Lawrence c/ Arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/04 CEMAC et
Société Amity Bank Cameroon PLC (Intervenante)
- Arrêt N° 007/CJ/CEMAC/CJ/07 du 31 mai 2007, aff.
Assiga Ahanda Jean-Baptiste C/ La BEAC (Requête aux fins de sursis
à exécution des décisions N° PSC/879/YA du 13/12/2006
et N° PSC/888/YA du 14/12/2006).
- Arrêt N° 008/ADD/CJ/CEMAC/CJ/07 du 13/06/2007,
aff. Guerezebanga Gabriel Gaétan c/ La BDEAC (Recours contre la
Résolution N° 299/CA/92/03 du Conseil d'administration de la
BDEAC).
- Arrêt N° 010/CJ/CEMAC/CJ/07 du 21 juin 2007, aff.
Galbert Abessolo Etoua c/ La CEMAC (Recours en indemnité).
- Arrêt N° 012/CJ/CEMAC/CJ/07 du 07/12/2007, aff.
Assiga Ahanda Jean-Baptiste c/ La BEAC (Requête aux fins d'annulation des
décisions N° PSC/879/YA du 13/12/2006 et N° PSC/888/YA du
14/12/2006).
- Arrêt N° 011/CJ/CEMAC/CJ/07 du 07/12/2007, aff.
Guerezebanga Gabriel Gaétan c/ La BDEAC (Recours contre la
Résolution N° 299/CA/92/03 du 24/06/07 du Conseil d'administration
de la BDEAC).
- Arrêt N° 001/CJ/CEMAC/CJ/08 du 19 juin 2008, aff.
Balla Magloire c/ Ecole Inter-Etats des douanes de la CEMAC (Requête en
référé aux fins d'évacuation sanitaire).
- Arrêt N° 001/ADD/CJ/CEMAC/CJ/01 du 13/12 2001,
aff. Tasha L Lawrence c/ COBAC (Requêtes aux fins de sursis à
exécution de la décision COBAC D-2000/22 et de désignation
d'un administrateur judiciaire)
Ø Cour de Justice des Communautés
Européennes
- 23 avril 1956, Groupement des industries
sidérurgiques luxembourgeoises, aff. 7 et 9/54
- 10 décembre 1957, Usines à tubes de la Sarre,
aff. 1/57 et 14/57
- 15 décembre 1961, Fives little cail, aff. 19/60
- 14 décembre 1962, Producteurs de fruits et
légumes, aff. 16 et 17/62.
- 5 février 1963, Van Gend en Loos, aff. 6/62.
- 5 décembre 1963, société E. Henricot,
aff. 23/63.
- 15 juillet 1964, Costa c/ ENEL, aff. 6/64
- 2 décembre 1964, A. Merlini, aff. 11/1
- 31 mars 1965, Dalmas, aff. 21/64
- 31 mars 1965, G. Rauch, aff. 16/64.
- 13 juillet 1965, Lemmerz Werke, aff. 111/63
- 15 décembre 1966, Serio, aff. 62/65
- 19 décembre 1968, Salgoil, aff. 13/68
- 12 février 1970, Commission c/ Italie, aff. 31/69
- 5 mai 1970, Commission c/ Royaume de Belgique, aff.
77/69
- 18 novembre 1970, Commission c/ Italie, aff. 8/70
- 22 janvier 1971, Balkan Import GmbH, aff. 55/75
- 31 mars 1971, Commission c/ Conseil, aff. 22/70
- 6 juillet 1971, Pays Bas, aff. 59/70.
- 8 mars 1972 Nordgetreide, aff. 42/71
- 13 novembre 1973, Werhahn c/ Conseil, aff. Jointes 63
à 69/72
- 14 mai 1974, Nold c/ Commission, aff. 4/73
- 14 mai 1975, C.N.T.A., aff. 74/74
- 16 décembre 1976, Rewe et Comet, aff. 33/76 et
45/76
- 3 mai 1978, Toepfer, aff. 112/77
- 6 mars 1979, Simmenthal, aff. 92/78
- 10 janvier 1980, Bellintani c/ Commission, aff. 116/78
- 27 mars 1980, Denkavit Italiana, aff. 611/79
- Ord. 4 février 1981, aff. AM et S. Europe Limited c/
Commission des Communautés européennes, aff. 155/7
- Ord.17 septembre 1981, Oberthür, aff. 24/79
- 18 mai 1982, AM et s Europe Limited c/ Commission des
Communautés européennes, aff. 155/7
- 9 novembre 1983, San Giorgio, aff. 199/82
- Ord., 3 juillet 1986, France c/ Parlement, aff. 358/85
- 14 novembre 1989, Grèce c/ Commission, aff. 30/88
- 22 mai 1990, Parlement c/ Conseil, aff. 70/88
- Ord. 13 juin 1991, Sunzest, aff. C-50/90
- 24 novembre 1992, J. Bruckl, aff. C-15/91 et C-108/91
- 29 juin 1993, Gouvernement de Gibraltar c/ Conseil, aff.
C-298/89.
- 29 juin 1994, Fiskano, aff. C-135/92.
- 9 août 1994 France c/ Commission, aff.
C-327/91
- Ord. Présidentielle, 30 avril 1997, Morcia Irme c/
Commission, C-89/97
- 10 mars 1998, RFA c/ Conseil, aff. C122-9/95.
- 17 décembre 1998, Banstahgewebe GmbH c/ Commission,
aff. C-185/95P
Ø Autres Juridictions
v Cour Internationale de Justice
- 18 juillet 1966, Affaire du Sud ouest africain
(2ème phase).
v Tribunal administratif de l'Organisation International du
Travail
- Jugement N° 21, Kathryn Bernstein c/ UNESCO
- 11 octobre 1966, jugement N° 17, Jurado c/ OIT
v Tribunal de Première Instance des Communautés
Européennes.
- Ord. 06 février 1992, Cl. Castelleti e.a, T-29/91
v Conseil d'Etat (France)
- 26 juin 1959, syndicat chrétien de l'éducation
surveillée
- 8 mars 1963, amicale des membres des tribunaux
administratifs
- 29 décembre 2000, caisse primaire d'assurance-maladie
de Grenoble
VI- Cours et autres documents
- Mouangue Kobila (J.) Droit institutionnel de la
CEMAC, cours polycopié de première année de doctorat,
FSJP/ Universités de Douala et de Dschang, Douala/Dschang,
novembre-décembre 2005, disponible dans les bibliothèques
doctorales de Douala et de Dschang,
TABLE DES MATIERES
DEDICACE
i
REMERCIEMENTS
ii
LISTE DES ACRONYMES ET ABREVIATIONS
iii
LISTE DES ANNEXES
v
SOMMAIRE
vi
RESUME
vii
ABSTRACT
viii
INTRODUCTION GENERALE
1
I- CONTEXTE ET OBJET DE L'ETUDE
2
II- CLARIFICATIONS CONCEPTUELLES
5
1- Recevabilité
5
2- Requête
6
III- INTERET DE L'ETUDE
7
IV- REVUE DE LA LITTERATURE
8
V- DELIMITATION SPATIO-TEMPORELLE
10
VI- PROBLEMATIQUE
10
VII- HYPOTHESES
11
VIII- METHODE DE TRAVAIL
11
IX- ESQUISSE DE PLAN
12
PREMIERE PARTIE : LA RECEVABILITE, UNE
EXIGENCE POUR L'EXAMEN AU FOND DE LA REQUETE PAR LE JUGE DE LA CEMAC
13
CHAPITRE I : LES CONDITIONS DE
RECEVABILITE
15
SECTION I : LES CONDITIONS RELATIVES
AU REQUERANT.
15
Paragraphe I- les conditions objectives
15
A- La détermination nationale de la
capacité pour agir en justice
16
1- La capacité des personnes physiques
16
2- La capacité des personnes morales
17
B- La qualité pour agir
18
1- La qualité pour agir à titre
principal
18
2- La qualité pour agir au nom
d'autrui
20
Paragraphe II : la condition
subjective : L'intérêt à agir
21
A- L'intérêt du demandeur
22
1- Les requérants
privilégiés : la qualité donnant intérêt
à agir
22
2- Les requérants ordinaires
23
B- L'intérêt à intervenir
25
1- L'intervention volontaire
25
2- L'intervention forcée
27
SECTION II : LES CONDITIONS RELATIVES
A LA REQUETE.
28
Paragraphe I- les conditions matérielles
28
A- Les préalables procéduraux
28
1- Le recours administratif préalable dans
le contentieux de la fonction publique communautaire
28
2- Les phases
« précontentieuses » des recours en carence et en
manquement
30
B- Les conditions relatives à l'objet du
recours
32
1- Les voies de droit visant les institutions
communautaires.
32
2- La voie de droit visant les Etats : le
recours en manquement.
35
3- Les procédures urgentes et
particulières.
35
Paragraphe II - Les conditions formelles
38
A- La présentation de la requête
38
1- Le contenu de la requête
38
2- La forme de la requête
39
B - L'existence d'un différend non
éteint
40
1- Les délais d'action
40
2- L'actualité de la
réclamation
41
CHAPITRE II : L'EXAMEN DE LA
RECEVABILITE
43
SECTION I : LE REGIME DE LA
RECEVABILITE DES REQUETES.
43
Paragraphe I- Le statut procédural de la
recevabilité.
43
A- La préliminarité de la
recevabilité de la requête.
43
1- Recevabilité et compétence
43
2- Recevabilité de la requête et
fond du litige
44
B- Le moment de l'appréciation de la
recevabilité de la requête
45
Paragraphe II- L'initiative du moyen de
recevabilité de la requête.
46
A- Le principe de la présentation par le
défendeur
46
B- L'invocation d'office par le juge.
48
SECTION II : LE JUGEMENT SUR LA
RECEVABILITE DE LA REQUETE.
48
Paragraphe I- L'instruction de la
recevabilité.
49
A- Les caractères généraux
de la procédure d'instruction.
49
B- L'office du juge rapporteur
51
Paragraphe II- L'effet de la décision sur la
recevabilité de la requête
53
A- La décision de recevabilité de la
requête.
53
B- La décision
d'irrecevabilité.
53
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
55
DEUXIEME PARTIE : LA RECEVABILITE DES
REQUETES, UN INSTRUMENT AU SERVICE DE LA POLITIQUE JURISPRUDENTIELLE DE LA COUR
DE JUSTICE COMMUNAUTAIRE.
56
CHAPITRE III : UNE POLITIQUE INITIALE
RESTRICTIVE DE L'ACCES AU JUGE COMMUNAUTAIRE
58
SECTION I : UNE RIGUEUR TEXTUELLE
DESEQUILIBREE.
58
Paragraphe I- Un accès inégalitaire
au juge communautaire.
58
A- Un accès quasi-illimité pour les
requérants institutionnels.
58
B- L'exclusion des particuliers de certaines
procédures.
59
1- La fermeture du recours en manquement
59
2- L'absence de renvois préjudiciels
à l'initiative des justiciables.
61
Paragraphe II- Des conditions de
recevabilité des requêtes restrictives pour les particuliers.
64
A- Inexistence de « délais
raisonnables »
64
B- Le caractère dissuasif des
critères de recevabilité relatifs aux particuliers
66
1- Les charges pécuniaires
66
2- Les limites du contentieux de la fonction
publique communautaire.
67
SECTION II : UNE RIGIDE INTERPRETATION
PRETORIENNE DES CONDITIONS DE RECEVABILITE.
69
Paragraphe I- L'affirmation du caractère
d'ordre public des critères de recevabilité.
69
A- L'indisponibilité des conditions de
recevabilité des requêtes
70
B- L'absence
d' « irrégularités excusables »
71
Paragraphe II- Une reticence qverée à
tempérer les règles de recevabilité des requêtes
74
A- Une faible motivation des
décisions.
74
CHAPITRE IV : LA TENDANCE NAISSANTE A
UNE LIBERALISATION DE L'ACCES AU JUGE COMMUNAUTAIRE.
80
SECTION I : LA « PRUDENTE
HARDIESSE » DU JUGE CEMAC DANS L'EXAMEN DE LA RECEVABILITE DES
REQUETES.
80
Paragraphe I- L'affirmation d'une certaine
volonté de renforcer la protection des droits des particuliers.
80
A- Une interprétation finaliste de
certaines conditions de recevabilité.
81
B- La prise en compte des exigences d'une bonne
administration de la justice
83
1- Le procès équitable comme
principe général du droit communautaire.
83
Paragraphe II- L'autolimitation du juge
communautaire, expression d'une prudence.
86
A- Une grande prise en considération du
« seuil de tolérance » des Etats membres de la
CEMAC
86
B- Le respect scrupuleux du pouvoir
discrétionnaire des institutions communautaires.
87
SECTION II- POUR UNE POLITIQUE
JURISPRUDENTIELLE PLUS LIBERALE DE LA COUR DANS L'APPRECIATION DE LA
RECEVABILITE DES REQUETES
88
Paragraphe I- L'accès au juge, condition
nécessaire à l'effectivité de la règle
communautaire
89
A- La nature spécifique de la juridiction
communautaire.
89
1- Le rôle constitutionnel de la CJC
90
2- L'importance de la jurisprudence dans
l'élaboration du droit communautaire.
91
B- La compensation du déficit
démocratique de la Communauté.
93
Paragraphe II- Les moyens à la disposition
du juge pour une ouverture du prétoire communautaire.
94
A- L'extension de la portée réelle
de sa fonction.
95
1- Le contrôle des actions des institutions
communautaires.
95
2- Le contrôle du comportement des Etats
membres
96
B- Les « armes tactiques » du
juge : La stratégie jurisprudentielle de la CJCE.
97
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
101
CONCLUSION GENERALE
102
ANNEXES
106
BIBLIOGRAPHIE
121
TABLE DES MATIERES
131
* 1 Préambule de la
Convention régissant la Cour de justice Communautaire.
* 2 J.V. Louis L'ordre
juridique communautaire, Luxembourg, collection perspectives
européennes, 6ème édition revue et mise
à jour, 1993, p.52.
* 3 Sauf précisions
contraires, les expressions « Traité instituant la
CEMAC », « Traité » et
« Traité révisé » renverront au
Traité révisé du 25 juin 2008 à Yaoundé.
* 4 Articles 2, 20, 23 et 24
Convention CJC.
* 5 Article 22 Convention
CJC.
* 6 J.L. Mouton et C.
Soulard, La Cour de justice des communautés européennes,
Paris, PUF, Que sais je ?, 1998, p.5.
* 7 Voir G. Isaac Droit
communautaire général, Paris, Armand Colin,
5ème édition, 1997,p.220 ; B. Boumakani
« Les juridictions communautaires en Afrique noire francophone :
La cour commune de justice et d'arbitrage de l'O.H.A.D.A., les cours de justice
de l'U.E.M.O.A. et de la C.E.M.A.C. », Annales de la faculté
des sciences juridiques et politiques de l'Université de Dschang,
Yaoundé, Presses universitaires d'Afrique, tome 3, 1999, p.70. ; J.
Mouangue Kobila, Droit institutionnel de la CEMAC, cours
polycopié de première année de doctorat, FSJP/
Universités de Douala et de Dschang, Douala/Dschang,
novembre-décembre 2005, disponible dans les bibliothèques
doctorales de Douala et de Dschang, p. 22.
* 8 Mouton et Soulard voient
la principale originalité de la juridiction communautaire dans son
exclusivité c'est-à-dire que les litiges sur lesquels elle est
spécialement compétente sont soustraits à la
compétence des juridictions nationales et les Etats ne peuvent pas
soumettre de tels litiges à d'autres juridictions. Mouton et Soulard Op.
Cit. p.5.
* 9 L. Cartou L'Union
européenne, Paris, Précis Dalloz, 1994, pp. 164-165.
* 10 Mouangue Kobila Op.
Cit. p.20.
* 11 J. Rideau Le droit
de l'Union Européenne, Paris, PUF, Que sais je ?
2ème édition corrigée, 1998, p.6. ; Louis
Op. Cit. p.52.
* 12 Au sens large et exact
du terme, le terme « juge communautaire » renvoie non
seulement à la CJC, mais aussi aux organes à compétence
juridictionnelle crées par les textes communautaires tels la COBAC, et
l'ensemble des juridictions des Etats membres qui selon une expression souvent
employée sont les juges de droit commun du droit communautaire. Au sens
strict, et c'est le sens dont nous userons dans le cadre du présent
travail, l'expression renvoie spécifiquement au juge de la CJC.
* 13 J.C. Witenberg
« La recevabilité des réclamations devant les
juridictions internationales », RCADI, Vol 41, 1932-III, pp.
17-19.
* 14 J. Salmon (dir.)
Dictionnaire de droit international public, Bruxelles, Bruylant, AUF,
2001, p.474.
* 15 C. Santulli Droit du
contentieux international, Paris, Montchrestien, 2005, pp. 145-146.
* 16 Cité par Salmon
(dir.) Op. Cit. p.932.
* 17 Ibid.
* 18 Ibid. p.986.
* 19 Avis N° 001/2003
du 21 février 2003 Demande d'avis du Directeur General de l'ISTA sur les
modalités d'application de la résolution du Conseil
d'administration de l'ISTA relative à la fixation des indemnités
de fonction des cadres de cet organisme ; Avis N° 004/2003 du 7
juillet 2003 Demande d'avis du Directeur de l'ISSEA sur l'interprétation
à donner à l'article 21 point e de l'annexe II du statut de
l'ISSEA fixant le régime des prestations familiales accordées aux
personnels de l'ISSEA.
* 20 Avis N° 002/2003
du 9 avril 2003 Demande d'avis du Gouverneur de la BEAC sur l'avant projet de
règlement CEMAC relatif aux systèmes, moyens et incidents de
paiement, Avis N 003/2003 du 9 avril 2003 Demande d'avis du Gouverneur de la
BEAC sur l'avant-projet de règlement relatif à la
prévention et à la répression du blanchiment des capitaux
et du financement du terrorisme.
* 21 Avis N° 001/2005
du 24 mars 2005 Demande d'avis du Directeur General de l'ISSEA sur
l'interprétation de l'article 72 du statut de l'ISSEA, relative au
remboursement des frais de scolarité des enfants à charge des
fonctionnaires inscrits dans les établissements scolaires du pays
d'affectation, et émanant de cet organe de la CEMAC.
* 22 G.M. Chamegueu Le
contrôle juridictionnel des activités de la CEMAC, mémoire
de DEA en Droit international public, Université de Douala,
Faculté des sciences juridiques et politiques, disponible sur
http://www.memoireonline.com/08/09/2487/Le-contrle-juridictionnel-des-activites-de-la-CEMAC.html
(consultation le 20 août 2009).
* 23 Op. Cit.
* 24 Op. Cit.
* 25 Op. Cit.
* 26 Ibid.
* 27 P. Jan
« l'accès au juge constitutionnel francais :
modalités et procédures », Revue du Droit
public, N° 2, tome 117, Paris, LGDJ, 2001, p. 448.
* 28 R. Kovar « Le
droit des personnes privées à obtenir devant la Cour des
communautés le respect du droit communautaire par les Etats
membres », AFDI, 1966, p. 511.
* 29 C. Santulli Op. Cit.
pp. 185-251.
* 30 Deux
compréhensions possibles de cet alinéa : soit que
l'indépendance proclamée des juges ne doit pas leur faire perdre
de vue l'intérêt de la Communauté, soit au contraire que
l'intérêt de la Communauté fonde et exige
l'indépendance accordée aux membres de la Cour dans l'exercice de
leurs fonctions.
* 31 H. Muir-Watt
« La fonction subversive du droit comparé »,
Revue internationale de droit comparé, N° 3,
juillet-septembre 2000, Paris, Société de législation
comparée, p. 506
* 32 Ibid.
* 33 Santulli Op. Cit.
p.188.
* 34 Ibid. p.189.
* 35 Ibid. p.203.
* 36 Ibid. pp.203-251.
* 37 Voir infra
Deuxième partie, chapitre IV, section II, paragraphe I,A.
* 38 Voir G. Chamegueu Op.
Cit. ; A. Mihia Nana Le contrôle de la légalité des
actes déférés à la censure de la Cour de justice de
la CEMAC, RSA, Yaoundé, IRIC,2007-2008, p.14.
* 39 R. Chapus Droit du
contentieux administratif, Paris, Montchrestien, 8ème
édition, 1999, p.385. ; G. Pelissier « recours pour
excès de pouvoir (conditions de recevabilité) », F.
Gazier, R. Drago (dir.) Répertoire de contentieux administratif,
Encyclopédie juridique, 20ème année, tome III,
Dalloz, 2003.
* 40 Chapus op. Cit.
p.386.
* 41 CJ/CJ CEMAC,
Arrêt N° 007/CJ/CEMAC/CJ/07 du 31 mai 2007, Assiga Ahanda
Jean-Baptiste C/ La BEAC.
* 42 Santulli Op. Cit.
p.294.
* 43 Pelissier Op. Cit.
p.20.
* 44 Voir Isaac Op. Cit.
pp.256-257 ; J. D. Mouton et C. Soulard La CJCE, Paris, PUF, Que
sais-je ?,1998, pp32-33 ; P. Manin Les communautés
européennes L'Union européenne, Paris, Pedone, Etudes
internationales, N° 6, 5ème édition, 1999,
pp.379-385 ; E. Cerexhe Le Droit européen Les objectifs les
institutions, Bruxelles, Bruylant, Nauwelaerts, 1989, pp.200-201.
* 45 Manin Op. Cit.
p.379.
* 46 CJCE, 8 mars 1972
Nordgetreide, aff. 42/71 ; 24 novembre 1992, J. Bruckl, aff. C-15/91 et
c-108/91.
* 47 Manin Op. Cit.
p.380.
* 48 CJCE, 3 mai 1978,
Toepfer, aff. 112/77 ; 14 décembre 1962, Producteurs de fruits et
légumes, aff. 16 et 17/62. Voir Mouton et Soulard Op. Cit. pp.32-33.
* 49 CJCE, 29 juin 1993,
Gouvernement de Gibraltar c/ Conseil, aff. C-298/89.
* 50 Manin Op. Cit.
pp.380-381.
* 51 Article 8 RPCJ.
* 52 Conclusions de l'Avocat
général Roemer, CJCE, 2 décembre 1964, A. Merlini, aff.
11/1.
* 53 CJCE (ord.) 17
septembre 1981, Oberthür, aff. 24/79.
* 54 T. Tekebeng
L'intervention devant la Cour de justice de la CEMAC, RSA,
Yaoundé, IRIC, 2007-2008, p.24.
* 55 Il nous semble en effet
incorrect de qualifier tout intervenant de partie ; il y'a comme nous le
démontrons des intervenants parties et des intervenants qui ne sont pas
parties.
* 56 Voir CJ/CJ CEMAC,
Arrêt N° 001/ADD/CJ/CEMAC/CJ/01 du 13/12 2001, aff. Tasha L Lawrence
c/ COBAC.
* 57 O. De Schutter
« Le tiers à l'instance devant la Cour de justice de l'Union
européenne », H. Ruiz Fabri et J.M. Sorel (dir.) Le tiers
à l'instance devant les juridictions internationales, Paris, Pedone,
collection contentieux international, 2005, p.86.
* 58 Article 9 RPCJ.
* 59 B. Pacteau
Traité de contentieux administratif, Paris, PUF, collection droit
fondamental, 2008, p.174.
* 60 Santulli Op. Cit.
p.216.
* 61 Ibid. p.237.
* 62 C'est la qualification
la plus usuelle et la plus répandue. Voir Mouton et Soulard Op. Cit.
p.31 ; Manin Op. Cit. p.391.
* 63 Isaac Op. Cit.
p.253.
* 64 J. Boulouis, M. Darmon
Contentieux communautaire, Paris, Précis Dalloz, 1997, p.74.
* 65 Ibid.
* 66 Pelissier Op. Cit.
p.27.
* 67 CJCE, 22 mai 1990,
Parlement c/ Conseil, aff. 70/88.
* 68 Isaac Op. Cit.
p.255.
* 69 Pacteau Op. Cit.
pp.174-175.
* 70 R. Chapus Droit du
contentieux administratif, Paris, Montchrestien, 8ème
édition, 1999, p.408.
* 71 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 003/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 16/05/2002, aff. COBAC c/ Tasha
L. Lawrence.
* 72 R. Mehdi « Le
juge communautaire et l'urgence », H. Ruiz Fabri (dir.) Le
contentieux de l'urgence et l'urgence dans le contentieux devant les
juridictions internationales : regards croisés, Paris, Pedone,
collection contentieux international, 2001, p.71.
* 73 CJCE (Ord.
Présidentielle), 30 avril 1997, Morcia Irme c/ Commission, C-89/97.
* 74 G. Cornu Vocabulaire
juridique cité par Tekebeng Op. Cit p.2.
* 75 De Schutter Op. Cit.
p.86.
* 76 Le professeur Jouannet
apporte une autre distinction entre l'amicus curiae et le tiers
à l'instance : « Tous ont un
intérêt à l'instance qui les implique d'une manière
ou d'une autre dans la résolution du différend, mais il y'a ceux
dont l'intérêt est juridique. Les premiers sont témoins ou
amicus curiae lorsqu'ils attestent d'un intérêt de cette nature.
Les seconds font partie des intervenants potentiels au sens juridique
du terme ». E. Jouannet « Quelques perspectives
théoriques : Incertitudes sur le tiers et désordres de la
justice internationale », Le tiers à l'instance devant les
juridictions internationales Op. Cit. p.759.
* 77 CJCE (ord.), 4
février 1981, aff. AM et s Europe Limited c/ Commission des
Communautés européennes, aff. 155/7 et arrêt du 18 mai
1982.
* 78 Tekebeng Op. Cit.
p.33.
* 79 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 005/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 6 juin 2002 Op. Cit.
* 80 Santulli Op. Cit.
p.300.
* 81 CJCE (ord.), 3 juillet
1986, France c/ Parlement, aff. 358/85.
* 82 Pacteau Op. Cit.
p.282.
* 83 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 006/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 06 juin 2002, Tasha L. Lawrence
c/ Anomah Ngu Victor et Sanda Oumarou.
* 84 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 004/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 16/05/2002, Tasha L. Lawrence c/
Amity Bank Cameroon S.A.
* 85 Désormais le
Président de la Commission.
* 86 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 01/CJ/CEMAC/CJ/06 du 20 juin 2006, aff. Mokamanede John
Wilfrid c/ Ecole Inter-Etats des Douanes de la CEMAC.
* 87 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 001/CEMAC/CJ/04 du 18 mars 2004, aff. Galbert A. Etoua c/
CEMAC ; voir aussi arrêt N° 009/CJ/CEMAC/CJ/07 du 14 juin 2007,
aff. Madame Jeanne Lucie Lacot c/ L'EIED ; arrêt N°
002/CJ/CEMAC/CJ/05 du 9 juin 2005, aff. Okombi Gilbert c/ CEMAC.
* 88 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/05 du 16 décembre 2005, aff. Asngar
Miayo c/ EIED ; arrêt N° 01/CJ/CEMAC/CJ/06 du 20 juin 2006,
aff. Mokamanede John Wilfrid c/ EIED Op. Cit.
* 89 Pacteau Op. Cit.
p.201.
* 90 Aff. Madame Jeanne
Lucie Lacot c/ L'EIED Op. Cit.
* 91 Op. Cit.
* 92 Voir aussi aff.
Mokamanede Op. Cit.
* 93 Aff. Madame Jeanne
Lucie Lacot Op. Cit.
* 94 Voir infra
deuxième parie, chapitre III, section II, paragraphe II, A.
* 95 CJCE, 6 juillet 1971,
Pays Bas, aff. 59/70.
* 96 Voir J. Boulouis
Droit institutionnel de l'Union européenne, Paris, Montchrestien,
6ème édition, 1997, pp.359-360 ; Mouton et
Soulard Op. Cit. p.38 ; Manin Op. Cit. p.393 ; Isaac Op. Cit.
pp.258-259 ; Boulouis, Darmon Op. Cit. pp 227-228, 230-232.
* 97 CJCE, 12 février
1970, Commission c/ Italie, aff. 31/69.
* 98 Isaac Op. Cit.
pp.282-287 ; Boulouis, Darmon Op Cit. pp 274-281 ; Cerexhe Op. Cit.
pp197, 205-206 ; Manin Op. Cit. pp 363-366 ; Mouton et Soulard Op.
Cit. pp44-45.
* 99 J. Kenfack Les actes
juridiques des communautés et organisations d'intégration en
Afrique centrale et orientale, Thèse de doctorat, Yaoundé,
Université de Yaoundé II, 2003, p.297.
* 100 Ibid.
pp.105-113,207.
* 101 CJCE, 10
décembre 1957, Usines à tubes de la Sarre, aff. 1/57 ; 29
juin 1994, Fiskano, aff. C-135/92.
* 102 CJCE, 5
décembre 1963, société E. Henricot, aff. 23/63.
* 103 CJCE, 31 mai 1971,
Commission c/ Conseil, aff. 22/70.
* 104 CJCE, 9 août
1994 ; France c/ Commission, aff. C-327/91 ; 10 mars 1998, RFA c/
Conseil, aff. C122-9/95.
* 105 CJCE, 14 novembre
1989, Grèce c/ Commission, aff. 30/88.
* 106 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 0001/CJ/CEMAC/CJ/07 du 1er février 2007,
Société anonyme des Brasseries du Cameroun c/ La
République du Tchad.
* 107 Manin Op. Cit. p.373.
Sur le recours en annulation, voir Manin Op. Cit. pp 372-381 ; Rideau Op.
Cit. pp.103-104 ; Mouton et Soulard Op. Cit. pp.30-31 ; Cerexhe Op.
Cit. pp.199 ; 316-317 ; Boulouis, Darmon Op. Cit. pp 169-224 ;
Isaac Op. Cit. pp 169-224 ; R. Kovar
« Recommandations », R. Kovar, Poillot-Peruzzeto (dir.),
Répertoire de droit communautaire, Paris, Dalloz,
Encyclopédie juridique, vol. II, 2003, paragraphe 59 ; A. Rainaud
« CJCE, arrêt du 3 septembre 2002, Yassin Abdullam Kadi et Al
Barakaat International foundation c/ Conseil et Commission », P.
Weckel (dir.) « Chronique de jurisprudence
internationale », RGDIP, Paris, Pedone, Tome CXII-2008, pp928-940.
* 108 Manin Op. Cit.
p.389.
* 109 Kovar Op. Cit.
paragraphe 60.
* 110 Boulouis Op. Cit.
p.360 ; voir également sur le recours en carence Manin Op. Cit.
pp.389-391 ; Mouton et Soulard Op. Cit. pp.37-38 ; Isaac Op. Cit.
pp.239-240, 250 ; R. Kovar « Le droit des personnes
privées à obtenir devant la Cour des communautés le
respect du droit communautaire par les Etats membres », AFDI, Paris,
pp. 513-515.
* 111 La juridiction
compétente pour les litiges contractuels est celle
désignée par les parties dans le contrat.
* 112 CJCE, 13 novembre
1973, Werhahn c/ Conseil, aff. Jointes 63 à 69/72.
* 113 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 001/CJ/CEMAC/CJ/05 du 07 avril 2005, Tasha Loweh Lawrence
c/ CEMAC représentée par son Secrétaire
exécutif.
* 114 Elle rejoint la
position du docteur Kenfack qui pense que l'action doit être
intentée contre la Communauté à condition que le dommage
allégué soit le fait d'un de ses organes ou de ses agents dans
l'exercice de ses fonctions. Kenfack Op. Cit. p.300.
* 115 M. Waelbroeck et O.
Speltdoorn « Responsabilité de la
Communauté », Répertoire de droit communautaire
0p. Cit. p.4.
* 116 Mouton et Soulard Op.
Cit. p242.
* 117 Kenfack Op. Cit.
p.301.
* 118 Manin Op. Cit.
p.362.
* 119 CJCE, 5 mai 1970,
Commission c/ Royaume de Belgique, aff. 77/69 ; 18 novembre 1970,
Commission c/ Italie, aff. 8/70.
* 120 Voir sur le recours
en manquement Rideau Op. Cit. p.88 ; Manin Op. Cit pp.361-362 ;
Cerexhe Op. Cit. pp 199-200; Isaac Op. Cit. pp.240-241, 279-281; Boulouis,
Darmon Op. Cit. pp.263-295.
* 121 CJCE, 6 mars 1979,
Simmenthal, aff. 92/78.
* 122 CJCE, 31 mars 1965,
Dalmas, aff. 21/64
* 123 CJCE, 10
décembre 1957, Usines à tubes de la Sarre, aff. 1/57 et 14/57.
* 124 CJCE, 31 mars 1965,
G. Rauch, aff. 16/64.
* 125 Isaac Op. Cit.
p.261.
* 126 Mouton et Soulard Op.
Cit. p.36
* 127 Isaac Op. Cit.
p.261.
* 128 Mouton et Soulard Op.
Cit. p.36.
* 129 Article 59 RPCJ.
* 130 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 001/R/CJ/CEMAC/CJ/02 du 15/01/2002, Tasha L. Lawrence c/
COBAC, Amity Bank.
* 131 CJCE, 10 janvier
1980, Bellintani c/ Commission, aff. 116/78.
* 132 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 006/CJ/CEMAC/CJ/07 du 24/05/2007, Tasha Loweh Lawrence c/
Arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/04 CEMAC et Société Amity
Bank Cameroon PLC.
* 133 « Tierce
opposition », Répertoire de droit communautaire Op.
Cit. p.1.
* 134 Ibid. p.2.
* 135 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 11/CJ/CEMAC/CJ/07 du 07/12/2007, aff. Guerezebanga Gabriel
Gaétan c/ La BDEAC.
* 136 CJCE, 15
décembre 1961, Fives little cail, aff. 19/60.
* 137 CJCE, 13 juillet
1965, Lemmerz Werke, aff. 111/63.
* 138 CJCE, 15
décembre 1966, Serio, aff. 62/65.
* 139 CJCE, 14 mai 1975,
C.N.T.A., aff. 74/74.
* 140 Isaac Op. Cit.
p234.
* 141 Article 20
RPCJ ; CJ/CJ CEMAC arrêt N° 004/CJ/CEMAC/CJ/07 du 22 mars 2007,
aff. Dieudonné Nang Eko et autres c/ ISTA.
* 142 CJ/CJ CEMAC
arrêt N° 002/CJ/CEMAC/CJ/07 du 1er février 2007,
société Price Waterhouse (FIDAFRICA) c/ Décision COBAC
N° D-2006/132 ; arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/07 du
1er février 2007, société Price Waterhouse
(FIDAFRICA) c/ Décision COBAC N° D-2006/113 ; arrêt
N° 007/CJ/CEMAC/CJ/07 du 31 mai 2007, aff. Assiga Ahanda Jean-Baptiste c/
La BEAC.
* 143 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 004/CJ/CEMAC/CJ/03 du 17 juillet 2003, aff. Thomas Dakayi
Kamga c/ CEMAC.
* 144 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 004/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 16 mai 2002, aff. Tasha L.
Lawrence c/ Amity Bank Cameroon S.A ; CJ/CJ CEMAC, arrêt N°
002/CJ/CEMAC/CJ/04 du 16 décembre 2004, recours en
interprétation et en rectification de Tasha Loweh Lawrence c/
arrêt N° 003/CJ/CEMAC/CJ/03 et Société Amity Bank
Cameroon PLC.
* 145 Pacteau Op. Cit.
p.215.
* 146 Santulli Op. Cit.
p256.
* 147 Pacteau Op. Cit. pp
189-190.
* 148 Ibid.
* 149 Ibid. p283.
* 150 Ibid. p.284.
* 151 CJ/CJ CEMAC
arrêt N° 006/CJ/CEMAC/CJ/07 du 24 mai 2007 Op. Cit.
* 152 Santulli Op. Cit.
p.146.
* 153 CJ/CJ CEMAC, aff.
Société anonyme des Brasseries du Cameroun Op. Cit.
* 154 Santulli Op. Cit.
p.145.
* 155 Chapus Op. Cit.
p.338.
* 156 Witenberg Op. Cit.
pp.12-13.
* 157 Mouton et Soulard Op.
Cit. p.74.
* 158 Chapus Op. Cit.
pp.339-340.
* 159 Voir infra,
deuxième partie, chapitre III, section II, Paragraphe I.
* 160 Chapus Op. Cit.
p.338.
* 161 Pacteau Op. Cit.
p.267
* 162 Ibid.
* 163 Witenberg Op. Cit.
p.107.
* 164 Ibid. p.115.
* 165 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 001/R/CJ/CEMAC/CJ/02 du 15 janvier 2002 Tasha L. Lawrence
c/ COBAC ; arrêt N° 003/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 16 mai 2002,
Tasha L. Lawrence c/ Amity Bank Cameroon S.A. ; arrêt N°
001/CJ/CEMAC/CJ/04 du 18 mars 2004, Galbert A. Etoua c/ CEMAC.
* 166 Salmon (dir.) Op.
Cit. p.474.
* 167Ibid. p.505.
* 168 Witenberg Op. Cit.
p109.
* 169 CPJI, Certains
intérêts allemands en Haute-Silésie polonaise, arrêt
du 25 août 1925, cité par Salmon Op. Cit. p.505.
* 170 Pacteau Op. Cit.
p.169.
* 171 CJ/CJ CEMAC, aff.
Dieudonné Nang Op. Cit.
* 172 CJCE (ord.), 13 juin
1991, Sunzest, aff. C-50/90.
* 173 CJ/CJ CEMAC, aff.
Madame Jeanne Lucie Lacot Op. Cit. ; TPICE (ord.), 06 février 1992,
Cl. Castelleti e.a, T-29/91.
* 174 Voir Mouton et
soulard Op. Cit. p.264 ; Boulouis, Darmon Op. Cit. p.113 ; Manin Op.
Cit. p406.
* 175 Chapus Op. Cit.
p729.
* 176 Ibid. p.731.
* 177 Ibid.
* 178 Articles 25 et 27
RPCJ.
* 179 Chapus Op. Cit.
pp.734-735.
* 180 E. Zoller
« Procès équitable et due process of law »,
Recueil Dalloz, N° 8, 7281ème, 22 février
2007, p.522.
* 181 Cité par F.
Sudre (dir.) « Droit communautaire des droits
fondamentaux », Chronique de la jurisprudence de la Cour de
justice des communautés européennes, 2000, disponible sur
http://www.rtdh.eu/pdf/2001797.pdf
(consultation le 3 février 2010).
* 182 Ibid.
* 183 Ibid.
* 184 Pacteau Op. Cit. pp.
298-299.
* 185 Rapport du juge
rapporteur Antoine Marradas dans l'aff. Thomas Dakayi Kamga c/ CEMAC ;
voir pour comparaison Rapport d'audience du juge rapporteur Dadjo Goni dans
l'aff. Tasha L. Lawrence c/ Décision COBAC D-2000/22, Amity Bank
Cameroon (partie intervenante) Sanda Oumarou et V. Anomah Ngu (parties
intervenantes forcées) ; Rapport d'audience du juge rapporteur
Dadjo Goni sur le recours en révision de l'arrêt N°
003/CJ/CEMAC/CJ/03 du 03 juillet 2003.
* 186 Boulouis, Darmon Op.
Cit. p.98.
* 187 Article 64 RPCJ.
* 188 Witenberg Op. Cit.
p.127.
* 189 Ibid. p.128.
* 190 Pour un exposé
du débat sur le double degré de juridiction dans l'ancienne Cour
et la possibilité d'appel contre les décisions de la Chambre
judiciaire, voir Kobila Mouangue Op. Cit. pp25-27.
* 191 Gazier Op. Cit.
p.16.
* 192 D. Simon
L'interprétation judiciaire des traités d'organisations
internationales. Morphologie des conventions et fonction juridictionnelle,
Paris, Pedone, publications de la Revue générale de droit
international public, nouvelle série N° 37, 1981, pp.750-751.
* 193 Voir supra,
première partie, chapitre I, section I, paragraphe II, A.
* 194 G. Mvelle
« La CEMAC à la recherche d'une introuvable nature
théorique », Revue africaine d'études politiques et
stratégiques, N° 6, Université de Yaoundé II,
Faculté des sciences juridiques et politiques, 2009, p.73.
* 195 N. Mouelle Kombi
« L'intégration régionale en Afrique centrale entre
interétatisme et supranationalisme », H. Ben Hammouda, B.
Bekolo-Ebe et Touna Mama (dir.), L'intégration régionale en
Afrique centrale : bilan et perspectives, Paris, Karthala, 2003,
p.209.
* 196 CJCE, 5
février 1963, aff. 6/62.
* 197 Ibid.
* 198 CJCE, 19
décembre 1968, Salgoil, aff. 13/68.
* 199 S. de Gasquet
« Le citoyen européen face à la justice
communautaire » disponible sur
http://www.robert-schuman.eu/question_europe.php?num=sy-121 (consultation le 26
décembre 2009).
* 200 J. Dutheil de La
Rochère « droit au juge, accès à la justice
européenne », Pouvoirs 2001/1, N° 96, p.138.
* 201 R. Kovar
« Le droit des personnes privées à obtenir devant la
Cour des communautés le respect du droit communautaire par les Etats
membres », AFDI, 1966, p.531.
* 202 O. Costa
« L'intervention des citoyens devant les juridictions
communautaires : entre réalité et discours de
légitimation », communication à la journée
d'études « Droit et politique dans l'Union
européenne », 16 mars 2001, disponible sur
http://www.afsp.msh-paris.fr/archives/archivesgroupes/archives_europe/160301/Costa.pdf
(consultation 3 février 2010).
* 203 Chamegueu Op. Cit.
* 204 Kenfack Op. Cit.
p.382.
* 205 Ibid. p.385.
* 206 O. Costa Op. Cit.
* 207 Pacteau Op. Cit.
p.211.
* 208 Ibid. p.312.
* 209 Manin Op. Cit.
p.408.
* 210 S. Bastid
« Les tribunaux administratifs internationaux et leur
jurisprudence », RCADI, tome II, Leyde, 1958, p.427.
* 211 TAOIT, jugement
N° 21, Kathryn Bernstein c/ UNESCO.
* 212 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 010/CJ/CEMAC/CJ/07 du 21 juin 2007, aff. Galbert Abessolo
Etoua c/ La CEMAC.
* 213 O. Fandjip Les
juridictions administratives et le temps : cas du Cameroun et du
Gabon, Mémoire de DEA en Droit communautaire et comparé
CEMAC, Université de Dschang, 2006-2007, disponible sur
http://www.memoireonline.com/10/09/2798/les-juridictions-administratives-et-le-tempscas-du-Cameroun-et-du-Gabon.html
(consultation 03 février 2010).
* 214 Pacteau Op. Cit.
pp237-239.
* 215 CJCE, 17
décembre 1998, Banstahgewebe GmbH c/ Commission, aff. C-185/95P.
* 216 Gazier Op. Cit.
p.6.
* 217 Article 23 RPCJ.
* 218 Articles 20 à
23 RPCJ.
* 219 Article 30 RPCJ.
* 220 Mihia Op. Cit, note
31.
* 221 Bastid Op. Cit
p.420.
* 222 Ibid. p.428.
* 223 Kenfack Op. Cit.
pp.202-203.
* 224 Z. Zankia Le
contentieux de la fonction publique communautaire de la CEMAC, Mémoire
de DEA en droit communautaire comparé CEMAC, Université de
Dschang, 2008, disponible sur
http://www.memoireonline.com/12/09/3011/Le-contentieux-de-la-fonction-publique-communautaire-de-la-CEMAC.html
(consultation 03 février 2010).
* 225 F. Hubeau
« Ordre public », Répertoire de droit
communautaire Op. Cit. p1.
* 226 Santulli Op. Cit.
pp.198-199.
* 227 Chapus Op. Cit.
p372.
* 228 CJ/CJ CEMAC, aff.
Galbert A. Etoua Op. Cit.; aff. Asngar Miayo c/ EIED Op. Cit.; aff. Okombi
Gilbert c/ CEMAC Op. Cit.
* 229 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 004/CJ/CEMAC/CJ/07 du 02 mars 2007.
* 230 Jugement N° 19
cité par Bastid Op. Cit. p.427.
* 231 TAOIT, jugement
N° 21 Op. Cit.
* 232 Pacteau Op. Cit.
p.170.
* 233 Santulli Op. Cit.
p.193.
* 234 Ibid.
* 235 Aff. Okombi Gilbert
Op. Cit. ; voir infra, chapitre IV, section I, paragraphe I, A.
* 236 Pelissier Op. Cit.
p.4.
* 237 Gazier Op. Cit.
p.3.
* 238 Conseil d'Etat, 26
juin 1959, syndicat chrétien de l'éducation surveillée,
cité par Pacteau Op. Cit. p. 267.
* 239 Conseil d'Etat, 29
décembre 2000, caisse primaire d'assurance-maladie de Grenoble, Ibid.
* 240 D. Ritleng,
« Commentaire de l'article de Philippe Maddalon », H. Ruiz
Fabri et J.M Sorel (dir.) La motivation des décisions des
juridictions internationales, Paris, Pedone, collection contentieux
international, 2008, p.157.
* 241 B. Genevois
« Remarques d'un praticien du contentieux administratif »,
Les motivations des décisions des juridictions internationales
Op. Cit. p.225.
* 242 CJCE, 16
décembre 1975, Sniker unie, aff. 40 à 48, 50,54 à 56, 111,
113 et 114/73 ; TPICE, 15 mars 2000 ; voir Ritleng Op. Cit. Note
16.
* 243 Aff. Guerezebanga Op.
Cit.; aff. Tasha L. Lawrence c/ Amity Bank du 16 mai 2002 Op. Cit.; aff. Tasha
Loweh Lawrence c/ Decision COBAC D-2000/22 et Amity Bank Cameroon PLC, Sanda
Oumarou, Anomah Ngu Victor Op. Cit.
* 244 F.
Zénati-Castaing « la motivation des décisions de
justice et les sources du droit », cité par Genevois Op.
Cit.
* 245 CJ/CJ CEMAC, aff.
Société Price Waterhouse Op. Cit.; aff. COBAC du 16 mai 2002 Op.
Cit.
* 246 C. Soulard
« Remarques d'un praticien du contentieux judiciaire »,
Les motivations des décisions des juridictions internationales
Op. Cit. p.241.
* 247 Voir supra, chapitre
I, section II, paragraphe I, A (1).
* 248 Soulard Op. Cit.
p.242.
* 249 P. Maddalon
« La motivation des décisions des juridictions
communautaires », Les motivations des décisions des
juridictions internationales Op. Cit. p.159.
* 250 Soulard Op. Cit.
p.246.
* 251 F. Rangeon
« Réflexions sur l'effectivité du droit »,
Les usages sociaux du droit, Centre de recherches administratives et
politiques de Picardie, 1989, p.131.
* 252 Chamegueu Op. Cit.
* 253 Ibid.
* 254 Kenfack Op. Cit.
pp.367-368.
* 255 Chamegueu Op. Cit.
* 256 Simon Op. Cit.
p.725.
* 257 CJCE, 14 mai 1974,
Nold c/ Commission, aff. 4/73.
* 258 Zankia Op. Cit.
* 259 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 007/CJ/CEMAC/CJ/07 du 31 mai 2007.
* 260 CJ/CJ CEMAC, aff.
Galbert Etoua c/ CEMAC Op. Cit. ; aff. Dieudonné Nang Eko et autres
Op. Cit.
* 261 Voir supra,
première partie, chapitre I, section II, paragraphe I, A (1).
* 262 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 002/CJ/CEMAC/CJ/05 du 9 juin 2005.
* 263 CJ/CJ CEMAC, aff.
Madame Jeanne Lucie Lacot c/ EIED Op. Cit.
* 264 Tekebeng Op. Cit.
p.32.
* 265 Mouangue Kobila Op.
Cit. p.49.
* 266 A.P.
Weber « Les conditions dans lesquelles un particulier peut
demander l'annulation d'un règlement communautaire »,
disponible sur
http://www.libres.org/francais/dossiers/concurrence/concurrence_weber_p20.htm
(consultation le 03 février 2010).
* 267 « Revue de
jurisprudence communautaire », Juridis périodique,
N° 75, juillet-août-septembre 2008, p.38.
* 268 Voir infra paragraphe
II, A.
* 269 Santulli Op. Cit.
p.261.
* 270 TAOIT, 11 octobre
1966, jugement N° 17, Jurado c/ OIT.
* 271 CJ/CJ CEMAC,
arrêt N° 004/ADD/CJ/CEMAC/CJ/02 du 16 mai 2002.
* 272 Simon Op. Cit.
p.759.
* 273 Mouelle Kombi Op.
Cit. p.218.
* 274 Kenfack Op. Cit.
p.12.
* 275 Lequesne cité
par Mvele Op. Cit. p.71.
* 276 Simon Op. Cit.
p.760.
* 277 CJCE, 22 janvier
1971, Balkan Import GmbH, aff. 55/75.
* 278 J. Djeukou
« La CEMAC, rétrospective et perspectives :
réflexions sur l'évolution récente du droit communautaire
de l'Afrique centrale », Juridis périodique, N°
47, juillet-août-septembre 2001, p.114.
* 279 Isaac Op. Cit.
pp.221-222.
* 280 Ibid.
* 281 Kenfack Op. Cit.
p61.
* 282 Aff. 6/64.
* 283 P. Y. Monjal Les
normes de droit communautaire, Paris, PUF, Que sais-je ?, p.17.
* 284 Ibid. p.22.
* 285 Mihia Op. Cit.
p.21.
* 286 P. Y. Monjal Op. Cit.
p.23.
* 287 Mvele Op. Cit.
p.76.
* 288 Cité par
Monjal Op. Cit. p.144.
* 289 Ibid. p.114 ;
voir dans le même sens Boulouis Op. Cit. pp.233-235 ; Mouangue
Kobila Op. Cit. p.49.
* 290 Kenfack Op. Cit
p.95.
* 291 Mvele Op. Cit.
p.70.
* 292 Costa Op. Cit.
p.2.
* 293 Ibid.
* 294 Isaac Op. Cit.
p.223.
* 295 Le Médiateur
européen peut être saisi en cas de mauvaise administration
imputable aux institutions communautaires (sauf la Cour de justice et le
Tribunal de première instance dans l'exercice de leur fonction
juridictionnelle). Il en est ainsi en cas, par exemple,
d'irrégularités administratives, d'inéquité, de
discrimination, abus de pouvoir, d'absence ou de refus d'information, de
retards injustifiés... Le médiateur fait une enquête et
négocie pour régler le litige à l'amiable. Les limites
à son rôle sont qu'il n'intervient pas sur des affaires
examinées par des tribunaux et qu'il n'a pas de pouvoir de
décision. Il peut être saisi par l'intermédiaire d'un
député européen ou directement par lettre précisant
le motif de la plainte et l'identité du plaignant qui peut rester
confidentielle. Il existe un formulaire préétabli.
* 296 Isaac Op. Cit.
p.222.
* 297 CJCE, 31 mars 1971,
Commission c/ Conseil, aff. 22/70.
* 298 Simon Op. Cit. Note
77, p.740.
* 299 Voir CJCE, 23 avril
1956, Groupement des industries sidérurgiques luxembourgeoises, aff. 7
et 9/54
* 300 Kenfack Op. Cit
p.366.
* 301 Simon Op. Cit.
pp.747-748.
* 302 Chamegueu Op. Cit.
* 303 Simon Op. Cit.
p.767.
* 304 Ibid.
* 305 P. Manin
« L'influence du droit international sur la jurisprudence
communautaire », Droit international et droit communautaire.
Perspectives actuelles, SFDI, colloque de Bordeaux, Paris, Pedone, 1999,
p.160.
* 306 Cité par
Dutheil de la Rochère Op. Cit. p.129.
* 307 CJCE, 16
décembre 1976, Rewe et Comet, aff. 33/76 et 45/76 ; 27 mars 1980,
Denkavit Italiana, aff. 611/79 ; 9 novembre 1983, San Giorgio, aff.
199/82.
* 308 Dutheil de la
Rochère Op. Cit. p.129.
* 309 Aff. Nold c/
Commission Op. Cit.
* 310 F. Sudre
« L'apport du Droit international et européen à la
protection communautaire des droits fondamentaux », Droit
international et droit communautaire. Perspectives actuelles, Op. Cit.
p.160.
* 311 Simon Op. Cit.
pp.768-769.
* 312 Opinion dissidente du
juge Tanaka dans l'affaire du Sud ouest africain (2ème
phase), CIJ, arrêt du 18 juillet 1966, Recueil CIJ 1966, p.277.
* 313 Jan Op. Cit.
p.448.
* 314 Simon Op. Cit.
p.764.
* 315 Isaac Op. Cit.
p.224.
* 316 Zoller Op. Cit.
p.523.
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