Introduction : présentation de l'étude
Les travaux de recherche présentés dans ce
mémoire ont été effectués au sein du laboratoire
LEMEL (Laboratoire d'Etude et Modélisation des Environnements
Littoraux). Il est rattaché à la « Faculté de Science
et Science de l'Ingénieur » de l'Université de Bretagne Sud.
C'est un groupe pluridisciplinaire (géologues, biologistes,
mathématiciens, statisticiens...) qui s'attache à
modéliser les écosystèmes à l'interface terre/mer.
Il passe pour cela par l'intermédiaire de SIG (Système
d'Information Géographique) afin d'acquérir, de consulter et de
gérer l'information géographique.
Ce mémoire de stage présente
l'élaboration d'une carte de la profondeur au toit du socle rocheux
à l'ouest de l'île aux Moines et une carte localisant les
crépidules au nord ouest de l'île de Bailleron (golfe du
Morbihan). Une image 3D au du toit du substratum fournit un outil pour
comprendre comment se répartissent les corps sédimentaires dans
l'espace. Localiser les zones à présence de crédidules
permet de lutter contre cet envahisseur. La connaissance, des profondeurs au
toit du substratum* ou la quantité de
crépidules**, en tout point d'une zone, nécessite :
- d'une part, de nombreuses données de mesure
géophysiques, bathymétriques
et sédimentologique que l'on rapporte à des
coordonnées géographiques précises (latitude /
longitude)
- d'autre part, un outil d'interpolation permettant de calculer,
à partir des
données de mesure, les profondeurs en tout point de la
zone : il s'agit alors d'une estimation mathématique de cette
profondeur.
Il existe de nombreuses techniques d'interpolation
définies comme :
- des méthodes d'interpolation déterministes
- des approches statistiques ou géostatistiques
(stochastique)
Elles ont toutes leurs avantages et inconvénients. Mais
dans tous les cas, le principe reste le même : une valeur est
estimée pour des sites non échantillonnés, sur la base
d'observations existantes.
Le premier chapitre du rapport recense différentes
approches déterministes pour interpoler un ensemble de données.
Une description très générale en est fournit.
Le deuxième chapitre, propose une analyse des
techniques géostatistiques et des conditions de leur mise en oeuvre. Les
fondements mathématiques ainsi que leurs démonstrations sont
examinées. Le krigeage et l'analyse variographique, une étape
préalable du krigeage, sont analysés et commentés. Elles
s'appuient sur une synthèse bibliographique.
Les chapitres III à VI présentent une
application des méthodes géostatistiques pour aboutir un
modèle numérique de terrain au toit du substratum. Ils
fournissent également des conseils sur la nature de l'information qu'il
est nécessaire de recueillir pour utiliser efficacement ces
méthodes. Ils préconisent une démarche à suivre
pour interpréter les résultats. Ils mettent en évidence
les avantages et les limites des méthodes géostatistiques.
Le dernier chapitre dévoilera une application des
méthodes d'analyse spatiale concernant uniquement la position
géographique des objets, et des méthodes non stochastiques
présentées
* Substratum : base (souvent un socle rocheux ou cristallin) sur
laquelle repose les sédiments. ** Crépidule : mollusque
gastéropode
en première partie. Elles ont pour objectif d'identifier
des zones géographiques occupées par les crépidules.
Chapitre I : Différents outils de cartographie
1/ Interpolation spatiale
L'interpolation spatiale est une procédure qui consiste
à estimer la valeur d'un attribut pour des sites non
échantillonnés. Dans le contexte de ce stage, nous utilisons
l'interpolation spatiale pour mettre en oeuvre des algorithmes
mathématiques ou probabilistes afin d'estimer la profondeur de la roche
entre les points d'échantillonnages.
Il existe de nombreuses méthodes d'interpolation parmi
lesquels il faut faire un choix. Nous distinguerons deux familles :
- les méthodes d'interpolation classiques basées
sur des algorithmes purement déterministes.
- Les méthodes d'estimation géostatistiques qui
s'appuient sur une modélisation probabiliste du phénomène
étudié.
Les méthodes s'appliquent à des variables
régionalisées, c'est-à-dire des fonctions
numériques qui prennent leurs valeurs dans des régions
délimitées de l'espace appelées champ. Dans notre cas, la
variable régionalisée est la profondeur au toit du substratum. Le
champ est la zone d'étude décrite dans le chapitre III.
1.1/ Forme générale de l'interpolation
linéaire
Pour estimer la valeur ponctuelle en un site, nous utilisons
des combinaisons linéaires pondérées. La distance entre
les lieux d'observations a une influence sur ce que l'on observe. Autrement
dit, les valeurs dans deux localités voisines sont souvent plus
semblables que dans deux localités éloignées. Les poids
doivent donc tenir compte non seulement de la disposition des observations les
unes par rapport aux autres, mais aussi de la distance entre le site à
estimer et les sites observés.
1.1.1/ Méthodes d'interpolation par
partitionnement de l'espace 1.1.1.1/ Polygones de Thiessen
La méthode consiste à partitionner l'espace
géographique en polygones, puis à attribuer une valeur à
chacun des polygones. Elle permet de déterminer un zonage où la
valeur de la variable à prédire est à priori la même
que celle du site d'observation*.
Supposons que l'on désire estimer la valeur en un point
S0 du champ (cf. figure 1.1). Ce point appartient
nécessairement à l'un des polygones d'influence des sites
d'observations.
Un polygone d'influence pour l'observation C s'obtient en
traçant les médiatrices des segments joignant C aux sites
voisins.
* site d'observation : donnée source connue et
localisée
On attribue à S0 et à tout point
appartenant au même polygone, la valeur du site ayant ce polygone
d'influence. Sur la figure 1.1, la valeur estimée au point
S0 sera identique à celle du site C.
Médiatrice
Angle droit
C
S0
A
B
Figure 1.1
La méthode de Thiessen peut s'améliorer tout en
gardant le même principe. L'idée de Sibson est de construire un
polygone de Thiessen autour du site à estimer. Dans un deuxième
temps calculer les surfaces d'intersection (P(S0,i)) entre le polygone
précèdent et ceux des sites voisins. Enfin, Sibson propose une
estimation de S0 à l'aide d'une combinaison linéaire des
valeurs des sites voisins (Z(S0)) pondéré par les
surfaces P(S0,i).
Notons, n : nombre d'observation
P(S0) : surface du polygone de Thiessen en
S0
P(S0,i) : surface de l'intersection du polygone de
l'observation i et celle de S0
Alors,
à
S 0
Z ( )
|
n
?=
i
|
1
|
P S i
( , )
0 Z P ()
S 0
|
()
S 0
|
La méthode de Sibson a les propriétés
suivantes : - l'estimation en S0 est unique
à
- l'estimation est exacte : ? i = 1 ... n Z(
S i ) = Z(S i ) .
1.1.1.2/ Triangulation
La méthode d'interpolation par triangulation consiste
à diviser le champ en triangles disjoints, dont les sommets sont les
sites échantillonnés, puis à interpoler à
l'intérieur de chaque triangle.
La construction des triangles n'est pas unique,
différentes approches sont donc proposées.
Triangulation de Delaunay
On peut à partir du diagramme de Thiessen, en
construire le dual. C'est à dire construire un nouveau
diagramme où cette fois, on relie par un segment toutes les paires de
sites dont les régions de Thiessen correspondantes sont adjacentes (les
points séparés par une arête de Thiessen).
|
Polygone de Thiessen
Polygone de Delaunay
|
Figure 1.2
On observe que la triangulation de Delaunay opère
seulement dans l'enveloppe convexe des sites d'observations et ne recouvre donc
pas entièrement le champ.
Interpolation linéaire
Supposons que le point S à estimer se trouve
à l'intérieur du triangle formé par les sites
S1,S2, S3 (figure 1.3).
L'estimation de la valeur de la variable régionalisée au point S
par interpolation linéaire s'écrit :
+
+
S S S
123
à
Z S
( )
S SS
1 2
Z S
( )
3
SSS
1 3
Z S
( )
2
S SS
2 3
Z S
( )
1
où |.| désigne la surface et Z(.) la valeur prise
en (.).
|S2SS3|
|S1SS2|
S
|S1SS3|
S3
S1
S2
Figure 1.3
L'interpolation linéaire a les propriétés
suivantes : - l'estimation en S0 est unique
à
- l'estimation est exacte : ? i = 1 ... n Z(
S i ) = Z(S i )
- la triangulation ne permet pas d'extrapoler les valeurs
au-delà de l'enveloppe convexe des sites d'observation.
1.1.2 / Méthodes d'interpolation
barycentriques
Les méthodes d'interpolations précédentes
ne considèrent, pour estimer la valeur d'un site S0, que les
sites d'observation immédiatement voisins. Elles ignorent par
conséquent une grande partie de l'information disponible. Les
méthodes barycentriques permettent de prendre en compte un nombre plus
important de données.
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