L'innovation risque de déstabiliser les
rapports sociaux dans une société donnée. Souvent on se
préoccupe rarement des traces laissées par les ONGs surtout leurs
impacts sur l'environnement communautaire. D'autres facteurs interviennent pour
empêcher les changements, il s'agit des expériences non
réussies laissées par les projets et les ONGs, abandonnées
par leurs promoteurs pour des raisons que la communauté ne comprend pas.
Ces échecs affectent l'organisation interne de la communauté et
créent ensuite un climat de méfiance vis-à-vis de nouveaux
intervenants. Il faut remarquer aussi que les zones d'intervention sont
rarement vierges d'actions antérieures.
11 Henri de LAULANIE, Le Riz à Madagascar, un
développement en dialogue avec les paysans, édition Karthala, 38
pages, 2003
12 INSTAT, Agriculture, pauvreté rurale et politique
économiques, 107pages, 2003
2.5.5 Logiques des acteurs locaux et stratégies
paysannes 2.5.5.1 Stratégies en fonction de la taille de
l'exploitation
« Une stratégie paysanne traduit le
comportement économique d'un agent qui ajuste à des contraintes
comme la disponibilité en facteur de production, la gestion du risque et
à des opportunités de milieu ou de marché qui l'incitent
à se spécialiser ou à diversifier ses activités
(RAKOTO-RAMIARANTSOA Hervé, 1995)13
La stratégie paysanne varie en fonction de la
situation socio-économique de chaque ménage. On peut classer les
ménages ruraux en trois catégories distinctes : micro producteurs
en situation précaire, producteurs semi spécialisés,
producteurs spécialisés
Les micros producteurs en situation précaire
ne disposent que des moyens financiers très limités surtout en
termes de capital, facteurs de production. La taille de l'exploitation rizicole
de cette typologie de ménage reste en dessous d'un hectare, avec un
rendement très bas qui se situe entre 0.8 et 1,2 tonne de paddy par
hectare. Les ménages en situation précaire optent souvent pour
une stratégie de diversification de leurs activités
(activités extra- agricoles et agriculture)
La deuxième catégorie de ménage
correspond au micro producteur qui cherche à maintenir une certaine
autosuffisance en riz. Ils produisent du riz pour couvrir leur besoin de
consommation propre. Ces ménages qui se trouvent dans cette
catégorie diversifient leurs productions vivrières afin de tirer
des revenus supplémentaires en sus des revenus qu'ils puissent gagner de
la vente du riz. Ce type de stratégie privilégie la gestion du
risque par la diversification des activités.
La troisième catégorie des
ménages développe des stratégies plus agressives que les
deux autres. Les producteurs semi spécialisés disposent des
potentiels sur le plan technique et économique pour intensifier ses
activités agricoles. Les ménages constituant cette
catégorie disposent à la fois des superficies rizicoles et des
moyens de production plus conséquents que les deux catégories
susmentionnées. Le niveau d'équipement et la taille de
l'exploitation permettent à ces ménages d'obtenir
beaucoup
13 Hervé Rakoto-RAMIARANTSOA, 1995 - Chair de la
Terre, oeil de l'eau ... paysanneries et Recompositions de campagne en Imerina
(Madagascar) - Editions ORSTOM, Collection « à travers champs
», 1995, 93 pages
plus de rendement. Les rendements supérieurs
réalisés par ces ménages leur permettent d'assurer
l'autosuffisance et de tirer profit des revenus de la vente du surplus de
production.
2.5.5.2 Intensifier et limiter les risques
Avant d'adopter une nouvelle technique culturale comme
la riziculture intensive, le
paysan souhaite minimiser les risques d'ordre
financier et économique à court terme. La notion de risque est
souvent difficile à évaluer et à prévoir pour la
production, c'est pourquoi le recours au capital a été longtemps
banni par le paysan.
Pour augmenter la production et éviter
l'endettement, le paysan recourt souvent à l'extensification quand les
terres sont abondantes.
La notion de compétitivité
économique ne constitue pas le premier souci des paysans. Dans la
plupart des cas le paysan applique la technique moins intensive impliquant des
risques financiers et monétaire moindres. Le paysan ne se harde pas
à exploiter totalement leur potentiel productif.
2.5.5.3 Stratégies de contournement des
risques
Le comportement du paysan ne se détermine pas au
hasard. Les comportements des
paysans obéissent à des logiques. La
logique paysanne est influencée par l'environnement interne et externe
du système de production. Face au risque climatique, la stratégie
paysanne a un caractère anti-aléatoire qui se manifeste par la
réticence à des voies d'intensification dans le cas où le
marché n'est pas suffisamment sécurisé. Les paysans
préfèrent repousser tardivement l'intensification tant qu'ils
peuvent pratiquer l'extensification.
2.5.5.4 Arbitrage entre le court et le long
terme
Les propositions techniques n'intéressent pas
nécessairement les producteurs. La
technique qui intéresse le paysan est celle
qui répond d'abord aux problèmes immédiats. Il existe de
contradiction apparente dans le temps entre l'objectif de production à
court terme et à long terme. Dans ce cas, le court terme constitue un
enjeu immédiat et vital pour le paysan. Dans la plupart des cas il
privilégie le court terme par rapport au moyen et long terme. Certaine
action de développement ne permet de concilier l'intérêt de
court et celui du long terme. Les problèmes de maintien de la
fertilité du sol et la lutte contre l'érosion apparaissent comme
importants pour les agronomes cependant moins importants pour les
producteurs.
2.5.5.5 Justification du maintien du système de
production domestique
En général, les paysans changent de
système de production quand les conditions leur permettent de le faire.
Les paysans n'adoptent pas les techniques d'intensification dans la mesure
où ils existent des solutions qui leur permettent de satisfaire les
objectifs de production qu'ils se fixent. Le maintien du système de
production domestique est justifié du fait que le paysan ne dispose que
de faible surface (taille de l'exploitation modeste) pour assurer
l'autosubsistance, les ménages tendent à minimiser les
dépenses monétaires, le recours à une force de travail
extérieure est à éviter, en conséquence il n' y
aura pas de surplus disponible ou s'il y en a il suffit d'une mauvaise
année de récolte pour redresser la situation de
l'exploitant.
Ce chapitre nous a permis d'identifier les
principales faiblesses liées à l'adoption de technique SRI : du
point de vu technique, économiques, et sociaux culturelles. Le chapitre
suivant traitera des opportunités liées à la promotion de
la technique comme la satisfaction de la demande locale et exportation vers
d'autres marchés ;...