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Le droit de propriété au sénégal

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par Mamadou CAMARA
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master 1 en droit privé option affaires 2008
  

Disponible en mode multipage

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    PLAN :

    Introduction :......................................................................................................3

    CHAPITRE 1 : Le régime juridique de la propriété au Sénégal...................................6

    Section 1 : Absence d'une législation interne en matière de droit de propriété................6

    Para 1 : Application du code civil français à la propriété...........................................6

    A- Concernant l'accession à la propriété......................................................6

    B- Mais aussi l'acquisition et la protection de la propriété................................7

    Para 2 : Mais aussi aux droits réels démembrés de la propriété...............................8

    A- Concernant l'usufruit.............................................................................9

    B- Et la servitude.....................................................................................10

    Section 2 : Existence d'une législation d'inspiration française....................................11

    Para 1 : Dans le domaine foncier des terrains.......................................................12

    A- Le décret foncier de 1932.....................................................................12

    B- Et les textes fonciers d'après indépendance.............................................13

    Para 2 : Dans la propriété mobilière incorporelle...................................................15

    A- Les textes nationaux............................................................................15

    B- Les textes internationaux......................................................................16

    CHAPITRE 2 : Nécessité de rénover la législation sénégalaise en matière de droit de propriété...........................................................................................................18

    Section 1 : les insuffisances du régime juridique de la propriété au Sénégal.................18

    Para 1 : Violation de la règle de la territorialité de la loi.......................................18

    A- Application d'une loi étrangère.............................................................18

    B- Une inadaptation pour l'essentiel des dispositions du code civil français aux réalités sénégalaises..........................................................................................19

    Para 2 : Situation des lois et décrets d'application du code civil français au Sénégal...20

    A- Non prise en compte de ces lois et décrets d'application au Sénégal...........20

    B- Entrainant une insuffisance dans l'application du code civil.....................21

    Section 2 : Propositions de solutions................................................................22

    Para 1 : Modernisation des textes.................................................................22

    A- Modernisation des dispositions du décret de 1932.................................22

    B- Prise en compte de la notion de possession.........................................23

    Para 2 : codification du droit de propriété.........................................................24

    A- Codification dans un même texte.......................................................24

    B- Codification selon les matières...........................................................25

    CONCLUSION :...........................................................................................27

    BIBLIOGRAPHIE :........................................................................................28

    INTRODUCTION :

    Le droit de propriété constitue l'une des formes les plus anciennes de rapport de droit entre les choses et les hommes. Et il a été traditionnellement conçu comme attribuant à son titulaire les pouvoirs les plus étendus, les plus complets. Mais c'est aussi un droit qui a été des plus contestés et remis en question quant à son fondement, son attribution, son étendue et ses modalités. Tout le monde connaît le mot de PROUDHON « la propriété c'est le vol », depuis lors les doctrines socialistes et surtout marxistes n'ont pas cessé de préconiser l'effacement de la propriété privée et individuelle au profit de la propriété collective étatique.

    Ainsi dans notre sujet, il nous ait soumis une réflexion sur le droit de propriété, mais au Sénégal. En effet notre pays a une particularité dans ce domaine et résidant dans le fait que l'essentiel des dispositions sur le droit de propriété au Sénégal sont soit originaires de la France soit d'inspiration française. C'est ainsi que pour avoir une définition du droit de propriété il faudra recourir au code civil français qui dans son article 544 dispose que « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on a fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. » Après l'indépendance du Sénégal, l'application de certaines lois françaises dans notre pays trouvait leur justification à travers l'article 91 de la constitution de 1963 qui disposait que « les lois et règlements actuellement en vigueur, lorsqu'ils ne sont pas contraires à la présente constitution, resteront en vigueur tant qu'ils n'auront pas été modifiés ou abrogés. »

    Ainsi avec l'étude d'un tel sujet qui concerne un domaine très important dans notre droit puisque englobant à la fois la propriété mobilière corporelle et incorporelle ainsi que la propriété immobilière foncière et non foncière, et pour une meilleure lisibilité de notre travail, il nous semble important de faire fi de certaines notions qui sont relatives à la propriété mais qui ne constituent pas à notre avis des éléments primordiaux dans notre travail.

    Il en est ainsi du droit d'usage et d'habitation qui est régi par l'article 625 du code civil français qui dispose que « les droits d'usage et d'habitation s'établissent et se perdent de la même manière que l'usufruit. » Ainsi ce droit a quasiment les mêmes caractères que l'usufruit à la seule différence que le droit d'usage et d'habitation nécessite le versement d'une caution et des états et inventaires.

    Il y a aussi l'emphytéose qui est une notion qui, à la différence du droit d'usage et d'habitation, est organisée au Sénégal par le code du domaine de l'Etat et il constitue selon ce texte un bail sur le domaine privé immobilier de l'Etat et qui confère un véritable droit réel de quasi-propriété. En effet sa durée peut atteindre 99 ans.

    Nous avons en outre l'expropriation pour cause d'utilité publique qui en quelque sorte constitue une limite au droit du propriétaire et elle est elle aussi régie par une loi sénégalaise en l'occurrence celle du 2 Juillet 1976.

    Enfin il y a la copropriété des immeubles bâtis qui a un régime organisé au Sénégal par la loi 88-04 du 16 Juin 1988 portant statut de la copropriété des immeubles bâtis. Cependant il est important de noter que cette loi sénégalaise est la même que celle française du 10 Juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

    Ainsi dans l'étude du droit de propriété au Sénégal ce qui attire le plus notre attention c'est la reprise pour l'essentiel du droit français. Il conviendra donc dans notre travail de faire l'état des lieux de la propriété en général au Sénégal, en montrant ses ressemblances avec le droit français qui il faut le dire sont nombreuses puisque dans la plupart des cas on a repris tout simplement le code civil français, mais aussi en mettant l'accent sur leur différence qui n'est pas énorme.

    Il faudra aussi s'interroger sur l'efficacité de la législation sénégalaise actuellement applicable en matière de propriété surtout que certains textes datent d'il y a très longtemps. Et pour finir nous allons nous interroger sur la question de savoir s'il ne faut pas rénover notre législation en matière de droit de propriété et au cas échéant quelles sont les propositions de solutions à faire ?

    Au regard de ces interrogations soulevées si dessus, nous pouvons dire que l'étude d'un tel sujet présente des intérêts surtout pratiques non négligeables. En effet comme nous le soulignions antérieurement l'application de la législation française pouvait s'expliquer au moment de l'indépendance avec cet article 91 de la constitution de 1963. Mais aujourd'hui avec la disparition de cet article dans la constitution actuelle, cette application de la législation française n'a plus de base légale, et l'étude du sujet nous permettra de nous en rendre compte. Aussi cette étude nous permettra de voir la difficile adaptation du droit français de la propriété dans notre pays, une inadaptation qui est source on peut le dire de l'insuffisance dans l'application des dispositions du droit de propriété. Et nous pouvons prendre l'exemple de la propriété foncière de la collectivité léboue. Même si il y a eu des conventions avec l'Etat français durant la période coloniale pour l'octroie de ces terres comme celle du 23 Juin 1905, cette propriété collective des terres constitue une approche africaine de voir la propriété et il faut noter que cette propriété léboue existe jusqu'à présent malgré le fait qu'elle ne repose sur aucune disposition actuelle de notre droit de propriété.

    Ainsi afin de mieux faire apparaître l'intérêt d'un tel sujet et d'apporter aussi des solutions aux multiples insuffisances qui auront été notées dans notre droit de propriété, il s'agira de voir dans un premier temps le régime juridique de la propriété au Sénégal (CHAPITRE 1). Ensuite nous allons nous appesantir sur la nécessité de rénover notre législation actuelle en matière de droit de propriété, nécessité commandée par les nombreuses lacunes du régime juridique de la propriété au Sénégal (CHAPITRE 2).

    CHAPITRE 1 : Le régime juridique de la propriété au Sénégal :

    Le régime juridique de la propriété au Sénégal est d'une particularité remarquable. En effet pour l'essentiel on a une absence totale d'une législation interne en matière de droit de propriété (section 1). Cependant dans certains domaines, le Sénégal a quand même légiféré mais en s'inspirant de la législation française (section 2).

    Section 1 : Absence d'une législation interne en matière de droit de propriété :

    Le droit de propriété au Sénégal est donc marqué par une absence remarquable d'une législation contrairement à la France qui constitue notre référence en matière de droit. Ainsi pour combler cette lacune on a eu recours au code civil français qui applicable en matière de droit de propriété au Sénégal (Para 1) mais aussi aux droits réels démembrés de la propriété (Para 2).

    Paragraphe 1 : Application du code civil français à la propriété :

    Le code civil français s'applique ainsi en matière de droit de propriété au Sénégal et pour nous en rendre compte nous allons examiner d'abord l'accession à la propriété (A) ensuite la délimitation et la protection de la propriété (B).

    A- Droit d'accession à la propriété :

    Aux termes de l'article 546 du code civil français toujours applicable au Sénégal « la propriété d'une chose, soit mobilière soit immobilière, donne droit sur tout ce qu'elle produit et sur ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement soit artificiellement. » Ainsi au regard de cet article on se rend compte que l'accession peut toucher aussi bien les choses mobilières que les choses immobilières.

    Concernant l'accession relative aux choses immobilières il faut noter comme le cote civil1(*) que la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous. En effet le droit de propriété serait illusoire si on ne pouvait pas utiliser son fonds pour y planter ou y construire, faute de disposition de l'espace aérien qui le surplombe ou du tréfonds. En effet le propriétaire peut faire « toutes les constructions et fouilles qu'il jugera à propos et tirer de ces fouilles tous les produits qu'elles peuvent fournir »2(*). La propriété du dessus et du tréfonds subit cependant d'importantes restrictions pour des raisons d'intérêt général.

    Ainsi il faut noter qu'au Sénégal l'étendue des droits du propriétaire est limitée par les dispositions du code minier et pétrolier. L'article 3 du code minier3(*) dispose que «  toutes les substances minérales utiles contenues dans le sous-sol de la République du Sénégal sont propriétés de l'Etat. » Donc « aucune personne physique ou morale ; y compris les propriétaires du sol, ne peut rechercher ou extraire des substances minérales utiles sur l'étendue du territoire national en dehors des dispositions du présent code. » De son côté le code pétrolier4(*) dans son article 3 dispose que «  tous les gisements ou accumulations naturelles d'hydrocarbures existant dans le sol ou le sous-sol de la République du Sénégal sont la propriété de l'Etat. » Ainsi la aussi aucune personne même le propriétaire ne peut entreprendre des opérations pétrolières sans l'autorisation de l'Etat 3.

    Concernant l'accession des constructions, plantations et ouvrages, il faut signaler que l'article 553 du code civil dispose qu'ils «  sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le contraire n'est prouvé, sans préjudice de la propriété qu'un tiers pourrait avoir acquise ou pourrait acquérir par prescription, soit d'un souterrain sous le bâtiment d'autrui, soit de toute autre partie du bâtiment. »

    En ce qui concerne le droit d'accession des choses mobilières qui pose moins de problèmes, il faut dire que pour l'essentiel le propriétaire d'une chose à qui est unie une chose mobilière accessoire peut, le plus souvent invoquer l'article 2279 du code civil repris par l'article 262 du code des obligations civiles et commerciales en vertu duquel la possession d'une chose mobilière vaut titre.

    A côté de l'accession à la propriété dont les règles applicables au Sénégal sont d'origine française, on peut aussi s'interroger sur les règles de délimitation et de protection de la propriété.

    B- Délimitation et protection de la propriété :

    La délimitation de la propriété est facile à déterminer lorsque la chose sur laquelle porte le droit de propriété est un meuble car un meuble est séparé matériellement des autres objets.

    En revanche les limites matérielles de l'immeuble ; objet du droit de propriété est beaucoup plus difficile à déterminer ; au moins lorsqu'il s'agit d'un fonds de terre. En effet les fonds de terre ne sont pas naturellement séparés les uns des autres ; on en marque artificiellement les limites par le bornage. Selon l'article 646 du code civil encore applicable au Sénégal «  tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës. Le bornage se fait à frais communs. » Ainsi donc pour qu'il y ait bornage ; il faut qu'il y ait contiguïté entre les deux terrains à borner ; tel n'est pas le cas par exemple de deux terrains séparés par un cours d'eau naturel ; navigable et flottable. 4 Notons qu'en général les parties procèdent à un bornage amiable. Cependant si l'une des parties refuse ; ne voulant pas supporter les frais ou sachant qu'il empiète sur le fonds voisin ; l'autre intentera contre elle une action en bornage. Cette dernière a pour objet de déterminer les limites de la propriété d'après les titres des parties. Cette action constitue une action réelle immobilière. C'est ainsi une action pétitoire ; même quand la propriété n'est contestée5. Mais elle ne se confond pas avec l'action en revendication. Dans l'action en bornage chacune des parties y est à la fois demanderesse et défenderesse et doit y établir son droit.

    Après que les limites du terrain aient été fixées le propriétaire peut s'il le désire procéder à la clôture de son héritage1. Cependant le code civil apporte quelques restrictions au droit de se clore et elles situent au niveau de l'article 682 qui dispose que « le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a pas aucune issue sur la voie publique ; peut réclamer un passage sur les fonds de ses voisins pour l'exploitation de son héritage ; à la charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner. » Notons qu'il y a des cas où la clôture est obligatoire surtout dans les villes et faubourgs.

    Concernant la protection de la propriété surtout la propriété immobilière ; elle a été consacré au Sénégal ; il faut le noter ; par le décret du 26 Juillet 1932 portant réorganisation du régime de la propriété foncière qui dans son article 20 a admis l'existence des actions tendant à revendiquer des droits réels. Cette action qui sanctionne le droit de propriété est l'action en revendication qui est une action réelle obéissant aux règles générales des actions en justice. Lorsqu'elle a pour objet un immeuble ; elle est de la compétence du tribunal régional de la situation de l'immeuble. L'action en revendication diffère cependant des autres actions sur un point particulier : elle est imprescriptible 2 ; alors qu'aux termes de l'article 2263 du code civil touts les actions réelles se prescrivent par trente ans. En effet la perpétuité du droit de propriété entraine nécessairement la perpétuité de l'action qui sanctionne ce droit. Aussi la jurisprudence ne fait aucune différence entre l'action en revendication mobilière ou immobilière : l'une et l'autre sont imprescriptibles. Notons que la revendication d'un bien meuble est en principe difficile du fait de l'article 2279 du code civil repris par l'article 262 du code des obligations civiles et commerciales et qui dispose qu'en fait de meuble possession vaut titre. Pourvu seulement que le possesseur soit de bonne foi.

    La revendication lorsqu'elle aboutit ; oblige le possesseur à restituer la chose au propriétaire. Mais s'il s'agit d'un meuble acquis de bonne foi dans un marché ou chez un commerçant vendant des choses semblables ; le propriétaire doit rembourser à l'acquéreur le prix versé par celui-ci 3. L'application du code civil français à la propriété au Sénégal s'élargit jusqu'aux droits réels démembrés de la propriété.

    Paragraphe 2 : Application du code civil aux droits réels démembrés de la propriété :

    Le droit de propriété confère à son titulaire les pouvoirs les plus étendus. Cependant les autres droits réels principaux ne donnent à leur titulaire qu'un pouvoir restreint ; ils ne confèrent que certains des attributs du droit de propriété ; ainsi on les nomme « démembrements du droit de propriété ». Les règles qui les organisent au Sénégal sont issues du code civil français et pour nous en rendre compte nous allons examiner d'abord l'usufruit (A) ensuite nous verrons les servitudes (B).

    A- L'usufruit :

    Selon l'article 578 du code civil toujours applicable au Sénégal « l'usufruit est de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance. »

    En ce qui concerne les modes de constitution de l'usufruit, la loi dispose que l'usufruit naît tantôt de la loi, tantôt par la volonté de l'homme 1. L'usufruit est institué par la loi dans les quatre situations suivantes : d'abord le conjoint survivant recueille l'usufruit d'une quote-part des biens du prédécédé lorsqu'il est en concours avec des descendants, ascendants ou des collatéraux privilégiés 2.

    Ensuite les ascendants, venant à la succession d'un descendant sans postérité, ont, en présence du conjoint survivant gratifié par le défunt, droit à une réserve en usufruit 3. En outre les père et mère ont la puissance légale des biens de leurs enfants mineurs jusqu'à ce qu'ils aient atteints l'âge de seize ans accomplis4. Enfin la prestation compensatoire après divorce, lorsqu'elle est constituée en capital, peut revêtir la forme, à défaut du versement d'une somme d'argent, de l'abandon de biens en nature, meubles ou immeubles, mais pour l'usufruit seulement, le jugement opérant cession forcée en faveur du créancier 5. Signalons que l'usufruit peut être établi non seulement sur un droit de propriété mais aussi sur les droits qui confèrent à un moindre degré des avantages de même ordre notamment sur un bail à ferme 6.

    Concernant les droits de l'usufruitier, l'article 582 du code civil dispose que « l'usufruitier a le droit de jouir de toute espèce de fruits soit naturels, soit industriels, soit civils, que peut produire l'objet dont il a usufruit. » En effet l'usufruitier bénéficie de deux prérogatives du droit de propriété, l'usus et le fructus. Ainsi il acquiert les fruits par nature c'est-à-dire ce que donne la chose périodiquement et sans altération sensible de la substance. L'usufruitier acquiert aussi les fruits civils au jour le jour ; les fruits naturels et industriels pour la perception. Il faut par ailleurs noter que l'usufruitier peut en vertus de l'article 595 du code civil vendre à céder son droit à titre gratuit. L'usufruitier dispose enfin de certaines actions qui viennent sanctionner son droit et assurer son efficacité. Pour faire reconnaitre son droit d'usufruit, il a une action pétitoire, l'action confessoire d'usufruit, qu'il peut intenter contre tous même contre le propriétaire1. Cette action ressemble à l'action en revendication, elle est toute fois prescriptible. Il peut aussi exercer les actions personnelles, par exemple en dommages-intérêts, qui découlent de son droit et ont pour but de le sanctionner. Pour ce qui est de ses obligations à l'égard du nu- propriétaire, l'usufruitier ne peut modifier la destination de la chose et il doit se conformer à l'exploitation antérieure. Il doit en outre se comporter en bon père de famille, sa responsabilité est appréciée in-abstracto. Enfin il supporte les choses usufructuaires et les réparations d'entretien2.

    En ce qui concerne les causes d'extinction de l'usufruit, elles ont été énumérées dans l'article 617 du code civil, il s'agit entre autre du décès de l'usufruitier, par l'arrivée du terme, par la prescription extinction, par la perte totale de la chose sur laquelle l'usufruit est établi et par la consolidation ou la réunion sur la même tête des deux qualités d'usufruitier et de propriétaire. Signalons cependant que l'article 619 dispose que si le titulaire de l'usufruit est une personne morale, le droit ne peut durer que trente ans. L'usufruit finirait plutôt si la personne morale venait à disparaitre.

    Avec l'extinction, l'usufruitier doit restituer la chose en principe dans l'état ou il l'a reçue, à défaut il devra des dommages-intérêts sauf si la chose a péri par cas fortuit ou a été endommagée sans sa faute ou même en cas d'incendie, seulement par cas fortuit. Il n'a droit à aucune indemnité pour les améliorations et les constructions, la jurisprudence lui permet cependant de réclamer la plus-value apportée au fonds par les grosses réparations.

    L'usufruit ainsi analysé, nous pouvons maintenant nous interroger sur la situation des servitudes au Sénégal.

    B- Les servitudes

    En vertu de l'article 637 du code civil encore applicable au Sénégal «  une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire » Par ailleurs il a été jugé3 que les servitudes ne sont pas affectées par les mutations de propriété des immeubles au profit ou à la charge desquels elles sont établies ; elles les suivent en quelques mains qu'ils passent et, pourvu qu'elles aient été transcrites lors d'une première vente, s'imposent aux propriétaires successifs, bien que leurs actes d'acquisitions n'en fassent pas mention.

    La constitution des servitudes continues et apparentes se fait par titre ou par la possession de trente ans4. L'article 691 ajoute que « les servitudes continues non apparentes, ne peuvent s'établir que par titre. » Le titre ainsi évoqué dans ces dispositions peut être constitué par un contrat ou un testament. En effet toute servitude est susceptible d'être établie par la volonté de l'homme manifestée dans un acte juridique .La validité du titre constitutif, qu'il s'agisse des règles de fond ou de forme est fonction de la nature de l'acte : contrat ou testament. La capacité requise chez le constituant est celle de consentir une aliénation immobilière. Comme tout acte juridique l'acte constitutif d'une servitude doit respecter les principes d'ordre public. Serait illicite par exemple, une servitude qui poserait directement ou indirectement une inaliénabilité perpétuelle d'un immeuble ou qui contreviendrait aux règles d'urbanisme. Il faut noter que l'article 693 du code civil établit un mode de constitution de servitude que l'on appelle la « destination du bon père de famille ». En effet selon cet article « il y'a destination du bon père de famille que lorsqu'il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c'est par lui que les choses ont été mises dans l'état duquel résulte la servitude. » Concernant la constitution de servitude par la prescription trentenaire visée à l'article 690 du code civil, il faut signaler qu'elle n'est applicable dans la législation sénégalaise. En effet l'article 21 du décret du 26 Juillet 1932 1 exclut toute possibilité d'acquisition d'un droit réel immobilier par prescription et par tout moyen autre que les formes requises par ce texte.

    Concernant les droits et les obligations des parties à la servitude, l'article 701 du code civil par exemple dispose que « Le propriétaire du fonds débiteur de la servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage ou à le rendre plus commode » Retenons que les droits et obligations des partis sont souvent définis par le titre consécutif.

    Concernant la protection de son droit le titulaire d'une servitude dispose d'une action pétitoire pour protéger son droit réel contre tout empiétement, c'est l'action confessoire de servitude. Elle permet au propriétaire du fonds dominant d'obtenir même la destruction des ouvrages qui, effectués sur le fonds servant, s'opposent à l'exercice de la servitude.

    Pour ce qui est des modes d'extinction des servitudes il faut relever la particularité qui réside dans le fait que les articles 703 à 710 du code civil qui organisent cette extinction ne s'appliquent pas au Sénégal. En effet comme pour l'article 690 concernant l'acquisition, les servitudes ne se perdent en droit foncier sénégalais que dans les mêmes formes que leur acquisition prévue à l'article 21 du décret foncier de 1932.

    Au regard de ce qui précède nous nous rendons compte qu'il existe quand même une législation au Sénégal en matière de propriété mais qui est pour l'essentiel d'inspiration française.

    Section 2 : Existence d'une législation d'inspiration française :

    Malgré l'absence de législation en matière de propriété au Sénégal, le législateur a quand même légiféré dans certains domaines, même s'il s'est inspiré à cette occasion du modèle français et il en est ainsi du domaine foncier des terrains (Paragraphe 1) mais aussi de la propriété mobilière incorporelle (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Domaine foncier des terrains :

    La législation foncière au Sénégal est marquée par deux séries de textes, l'une est constituée par le décret de 1932 institué par le colonisateur français et qui est toujours applicable au Sénégal (A), l'autre est constituée d'un ensemble de textes adoptés après l'indépendance qui tendent tous à la réglementation de la propriété foncière (B).

    A- Le décret foncier de 1932 :

    Le président KEBA MBAYE disait qu'en Afrique « la terre est une création divine, comme le ciel, comme l'air comme les mers .Elle est à Dieu, aux dieux et aux ancêtres1» et cette citation était pour illustrer qu'en Afrique la propriété privée des terres était inconcevable. Avec la colonisation le législateur français a voulu amener les indigènes à une conception européenne de la propriété et d'instaurer un système foncier en tout point semblable à celui en vigueur en France. C'est dans ce sens que les dispositions du code civil avaient été introduites au Sénégal par un arrêté du 5 Novembre 1830 pour l'application entre autres du régime foncier de la France qui repose sur l'inscription et la transcription. Mais ce système n'a pas eu le succès escompté d'où l'introduction d'un autre système par un décret du 24 Juillet 1906 repris par celui du 26 Juillet 1932. Ce décret du 26 Juillet 1932 portant réorganisation du régime foncier a eu comme principale conséquence la consolidation de l'immatriculation à la suite du décret de 1906. Il faut noter que cette immatriculation a été reprise du système australien de l'acte Torrens. L'immatriculation peut être définie comme « une garantie instituée au bénéfice des titulaires des droits réels sur les immeubles et consistant en une publicité par l'inscription des dits droits et de leurs modifications au livre foncier en vue de l'établissement de titres intangibles »

    L'article 84 et 85 du décret foncier de 1932 nous parle de ceux qui peuvent requérir l'immatriculation et la particularité ici réside dans le fait qu'une personne physique pouvait requérir l'immatriculation ce qui n'est plus le cas aujourd'hui comme nous allons le voir ultérieurement. Et son l'article 86 dispose que « sont seul susceptibles d'immatriculation sur les livres fonciers les fonds de terres bâtis ou non bâtis ».

    Concernant les effets de l'immatriculation il faut remarquer avec DARESTE1 que « le trait essentiel du régime de l'immatriculation est l'établissement d'un titre définitif qui est désormais le point de départ unique de tous les droits réels existant sur l'immeuble. » Ainsi le titre est inattaquable par toute autre personne et ce principe a été posé par l'article 21 du décret foncier de 1932 et développé par les articles suivants. En effet toute revendication qui mettrait en cause le droit de propriété lui-même est irrecevable1. Il n'y a qu'une seule exception c'est lorsqu'une partie du domaine public a été comprise, par erreur, dans une immatriculation faite au profit d'un particulier. Ainsi selon l'article 123 du décret foncier « les personnes dont les droits auraient été lésés par suite d'une immatriculation ne peuvent se pourvoir par voie d'action réelle, mais seulement, en cas de dol, par voie d'action personnelle en indemnité. » Signalons qu'en ce jour plusieurs dispositions de ce décret foncier de 1932 ont été remplacées par des nouvelles et il en est ainsi des articles 42 à 45 qui ont été abrogés par la loi 76- 60 du 12 Juin 1976 portant troisième partie du code des obligations civiles et commerciales. Il en est également ainsi de son article 131 mais qui au lieu d'être abrogé a été précisé par les articles 379 à 389 du code des obligations civiles et commerciales portant sur les immeubles immatriculés.

    De par sa vieillesse et du fait que le principal système qu'il a mis en place à savoir l'immatriculation n'était pas obligatoire et était dans l'ensemble, soit délaissée soit ignorée, il a fallu trouver un système mieux adapté. C'est ce qui a poussé le législateur sénégalais à instituer de nouvelles législations foncières après l'indépendance même s'il faut le signaler ces législations ne se sont pas substituées au décret foncier de 1932 qui reste donc toujours applicable.

    B- Les législations foncières d'après indépendance :

    Après l'accession à l'indépendance la terre relève au Sénégal soit du domaine national2, soit du domaine de l'Etat3.

    Le domaine national qui est régi par la loi sur le domaine national comprend les terres non immatriculées. Avant 1964 il y avait des terres régies par le système du code civil de l'inscription et de la transcription, les terres immatriculées, les terres auxquelles s'appliquent les règles coutumières et le domaine public. La loi du 17 Juin 1964 institue désormais un seul mode d'appropriation des terres : l'immatriculation. Notons que contrairement au décret de 1932, l'article 3 de la loi 1964 dispose que « les terres du domaine national ne peuvent être immatriculées qu'au nom de l'Etat... » Donc un particulier ne peut pas obtenir l'immatriculation d'un fonds à son nom. Par ailleurs il faut savoir que sur le domaine national, il n'existe pas de droit de propriété mais seulement un droit d'usage et de mise en valeur. Le domaine national est géré par les collectivités locales à l'exclusion du domaine classé confié à l'administration forestière. Le décret 72- 1288 du 27 Octobre 1972 relatif aux conditions d'affectation et de désaffectation des terres du domaine national comprises dans les communautés rurales, confère aux conseils ruraux l'aménagement des zones de terroirs c'est-à-dire des zones de culture, de parcours du bétail et de campements.

    En ce qui concerne le domaine de l'Etat, il se compose de l'ensemble des terres immatriculées au nom de l'Etat et il est constitué du domaine public inaliénable et imprescriptible et le domaine privé louable et aliénable.

    Les autorisations privatives d'occupation du domaine public doivent être expressément autorisées par l'administration mais également donner lieu au paiement d'une redevance. Les occupations privatives se font soit par décision unilatérale de l'administration compétente soit par contrat. La décision unilatérale peut prendre la forme d'une permission de voirie ou d'une autorisation d'occuper. Et elles sont régies respectivement par les articles 12 et 13 du code du domaine de l'Etat. Pour l'essentiel il faut dire qu'elles sont accordées à titre personnel, précaire et révocable et que leur retrait ne donne lieu au paiement d'aucune indemnité.

    Concernant les autorisations contractuelles, elles sont régies par l'article 16 du code du domaine de l'Etat qui dispose que « les autorisations contractuelles sont accordées de gré à gré ou par adjudications pour une durée déterminée ou non... »

    Le domaine privé de l'Etat comprend les biens meubles et immeubles immatriculés au nom de l'Etat et ils font l'objet d'une possibilité d'aliénation. L'entrée d'un bien dans le domaine privé de l'Etat se fait par des procédures variées, il s'agit de :

    - L'immatriculation d'un terrain du domaine national ;

    - L'expropriation pour cause d'utilité publique d'un bien appartenant à un particulier1 ;

    - La préemption ;

    - La confiscation des biens et droits immobiliers et mobiliers suite à des condamnations pénales ;

    - L'acquisition de biens vacants et sans maîtres ;

    - La nationalisation ;

    - La réquisition.

    Le domaine privé immobilier est essentiellement utilisé par l'Etat et par les établissements publics administratifs. Il est mis gratuitement à la disposition des services publics pour leur permettre d'assurer leur fonctionnement.

    Sur le domaine privé immobilier non affecté, le code du domaine de l'Etat a prévu plusieurs utilisations : autorisation d'occuper, concession du droit de superficie, bail ordinaire ou emphytéotique, vente. Les autorisations d'occuper sont faites à titre précaire et révocable. La concession du droit de superficie concerne les terrains situés dans une zone résidentielle dotée d'un plan d'urbanisme de détails. Le bail ordinaire permet au locataire de bénéficier d'un droit d'utilisation du domaine privé pendant une durée maximale de dix-huit ans. Notons ici que la mise en valeur est une condition résolutoire.

    La vente de terrain à mettre en valeur est subordonnée à une autorisation législative lorsqu'elle est destinée à des particuliers. Un décret suffit si l'acquéreur est un établissement public ou une société à participation publique dont l'objet est le développement de l'habitat.

    Notons enfin qu'en ce qui concerne le droit d'accession relatif aux cours d'eau, le code du domaine de l'Etat dans son article 5 dispose que les intérieurs, les rivages de la mer, les cours d'eau navigable, flottables, les cours d'eau ni navigables ni flottables dans certaines conditions, les lacs, étangs et mares permanentes, les eaux de surface et les nappes aquifères et souterraines font partie du domaine public naturel.

    Signalons qu'à côté de la propriété foncière, le Sénégal a aussi légiféré en matière de propriété mobilière incorporelle.

    Paragraphe 2 : Propriété mobilière incorporelle :

    La législation en matière de propriété mobilière incorporelle a une particularité qu'il convient de souligner. En effet les dispositions applicables dans cette matière sont régies à la fois par des textes nationaux (A) mais aussi pour une grande partie par des textes d'origine internationale (B).

    A- Les textes nationaux :

    Au plan national et concernant la propriété incorporelle, la législation sénégalaise s'est surtout penchée sur la propriété littéraire et artistique. En effet dés 1961, il y avait un projet de loi relatif au droit d'auteur, projet qui restera longtemps en gestation avant d'aboutir douze ans plus tard à la fameuse loi 73-52 du 4 Décembre 1972 relative à la protection des droits d'auteur. Il faut signaler qu'entre temps la loi 72-40 du 26 Mai 1972 avait créé le bureau sénégalais du droit d'auteur qui a été déclaré établissement public à caractère professionnel. Notons que l'influence du système français est très forte dans ce domaine. En effet de même que les lois françaises du 11 Mars 1957 et du 3 Juillet 1985 qui sont aujourd'hui remplacées par le code de la propriété intellectuelle de 1992, la législation sénégalaise protège d'une manière particulière la propriété littéraire et artistique.

    Ainsi tout auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit du simple fait de sa création d'un certain nombre de prérogatives d'ordre patrimonial et extrapatrimonial. Ce sont ces prérogatives qui constituent le droit d'auteur ou la protection littéraire et artistique. L'objet du droit d'auteur est la protection des créations originales de la littérature et des arts.

    La spécificité du droit d'auteur réside dans le fait que l'auteur bénéficie de ce droit indépendamment de l'accomplissement de certaines formalités en atteste l'article 1 alinéa 1 de la loi de 1973 relative à la protection du droit d'auteur qui dispose que « l'auteur de toute oeuvre originale de l'esprit (littéraire, scientifique ou artistique) jouit sur son oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle et opposable à tous. » il faut souligner que cette disposition est la même que celle de l'article premier du code la propriété intellectuelle française de 1992.

    La spécificité de la loi sénégalaise par rapport à celle de la France réside dans son article 1 qui dans l'énumération des oeuvres de l'esprit cite dans son troisième alinéa «  le folklore et les oeuvres inspirées du folklore... » et dans le même sens l'article 9 alinéa 1 de la loi de 1973 dispose que « le folklore s'entend de l'ensemble des productions littéraires et artistiques créés par des auteurs présumés de nationalité sénégalaise, transmises de génération à génération et constituant l'un des éléments fondamentaux du patrimoine culturel traditionnel sénégalais. » Et selon l'alinéa 4 du même article toute exploitation lucrative de ce folklore est subordonnée à l'autorisation du bureau sénégalais des droits d'auteur.

    En ce qui concerne la durée de protection l'article 40 de la loi de 1973 dispose que « le droit d'auteur dure pendant toute la vie de l'auteur et pendant les 50 années civiles à compter de la fin de l'année de son décès. »Pour ce qui est du contentieux il faut signaler qu'en droit sénégalais aussi bien l'auteur, ses ayants-droit que le bureau sénégalais des droits d'auteur peuvent saisir le juge d'instruction connaissant de la contrefaçon ou le président du tribunal 1. Enfin il faut surtout noter l'absence dans la loi de 1973 sur la protection du droit d'auteur, de dispositions relatives aux droits voisins à la propriété littéraire et artistique tels que les droits des artistes interprètes, les producteurs de phonogrammes, de vidéogrammes etc. Mais aussi il y a une absence de dispositions relatives à la propriété industrielle. Cependant ces manquements sont comblés au niveau du Sénégal par le fait que d'autres textes s'appliquent en matière de propriété incorporelle et ces textes sont pour l'essentiel des textes internationaux.

    B- Les textes internationaux :

    Sur le plan communautaire, il y a l'accord de Bangui de 1999 de l'organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) qui découle de la convention de Libreville de 1962 qui avait créé l'office africaine et malgache de la propriété industrielle (OAMPI) révisée par l'accord de Bangui de 1977 qui est entré en vigueur le 8 février 1982. Cet accord de 1999 qui est applicable au Sénégal, puisque notre pays est un membre fondateur de l'OAPI, complète les insuffisances de la loi de 1973. En effet l'accord de Bangui s'est largement appesanti sur la propriété industrielle et les droits voisins qui n'ont pas été mentionnés dans la loi sénégalaise.

    Pour ce qui est de la propriété industrielle, il faut remarquer que contrairement au droit d'auteur, le bénéfice de la protection ici est subordonné à des formalités de dépôt. Ainsi la protection de brevets d'invention, selon l'annexe 1 de l'accord de Bangui, est subordonnée à la procédure de dépôt organisée par son article 14. Notons qu'au niveau de l'OAPI les dépôts sont centralisés au niveau de Yaoundé. Par ailleurs une différence d'avec les droits d'auteur peut être soulevée au niveau de la durée de protection, en effet l'article 9 de l'annexe 1 dispose que « le brevet expire au terme de la vingtième année civile à compter de la date de dépôt de la demande... »

    En ce qui concerne les droits voisins l'annexe 7 de l'accord de Bangui de 1999 dans sa deuxième partie du titre 1 y est revenue comblant ainsi les lacunes de la législation interne sénégalaise.

    Sur le plan international il y a des conventions, accords et traités relatifs aux droits d'auteur, droits voisins et propriété industrielle qui sont aussi applicables au Sénégal. En effet l'article 3 de l'accord de Bangui de 1999 en son alinéa 2 dispose que les nationaux peuvent revendiquer l'application à leur profit des dispositions de certaines conventions, accords et traités. Il en est ainsi de la convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques du 9 Septembre 1886 plusieurs fois révisée. Cette convention donc applicable au Sénégal est revenue sur tous les aspects de la propriété littéraire et artistique, la propriété industrielle et les droits voisins. Signalons que cette convention comporte des dispositions pas trop contraignantes pour les Etats membres en atteste par exemple son article 19 qui dispose que « les dispositions de la présente convention n'empêchent pas de revendiquer l'application des dispositions plus larges qui seraient édictées par la législation d'un pays de l'union. » Ainsi la coexistence entre les dispositions nationales et celles de la convention de Berne ne pose pas de problème.

    Aussi l'accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce institué par l'OMC a été cité par l'article 3 de l'accord de Bangui. Ainsi ses dispositions s'appliquent aussi au Sénégal. Et cet accord contrairement à la convention de Berne exige que les législations des Etats membres comportent des procédures telles que celles qui y sont énoncées1. Cet accord est beaucoup plus contraignant que la convention de Berne.

    Le traité de l'organisation mondiale de la propriété intellectuelle est aussi applicable dans notre pays puisque le Sénégal est membre de cette organisation.

    L'ensemble de la législation sénégalaise relative au droit de propriété ainsi analysé, et compte tenu du fait que presque toutes les dispositions sont soit originaires de la France ou d'inspiration française, il est possible de nous interroger maintenant sur la rénovation de la législation sénégalaise en matière de droit de propriété qui se présente comme une nécessité.

    CHAPITRE 2 : Nécessité de rénover la législation sénégalaise en matière de droit de propriété :

    Pour mieux nous rendre compte de la nécessité de rénover la législation en matière de propriété dans notre pays, nous allons d'abord mettre l'accent sur les insuffisances du régime juridique de la propriété au Sénégal (Section 1). Mais aussi il sera pertinent de nous appesantir sur les propositions de solutions à faire pour une meilleure efficacité de notre législation en matière de propriété (Section 2).

    Section 1 : Insuffisances du régime juridique de la propriété au Sénégal :

    Du fait que presque toutes les dispositions applicables au Sénégal en matière de propriété sont d'origine française, il est ainsi possible de se rendre compte de la violation de la règle de la territorialité des lois (Paragraphe 1). Aussi une seconde insuffisance sera notée à la suite de l'examen de la situation des lois et décrets d'application du code civil français au Sénégal (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Violation de la règle de la territorialité des lois :

    Cette violation s'exprime comme nous l'avons souligné antérieurement, par l'application d'une loi étrangère (A) qui il faut le dire n'est pas toujours adaptée aux réalités sénégalaises (B).

    A- Application d'une loi étrangère :

    En vertu de l'article 91 de la constitution sénégalaise de 1963 « les lois et règlements actuellement en vigueur, lorsqu'ils ne sont pas contraires à la présente constitution, resteront en vigueur tant qu'ils n'auront pas été modifiés ou abrogés. » Signalons que pendant la période coloniale le code civil français a été rendu applicable au Sénégal par l'arrêté gubernatorial du 15 Novembre 1830 et est resté en vigueur jusqu'à l'indépendance. Ainsi le code civil français qui n'est pas contraire à la constitution de 1963 et qui n'a pas été abrogé continue donc de s'appliquer au Sénégal mais pour l'essentiel en ce qui concerne les dispositions relatives au droit de propriété. En effet après l'indépendance, le Sénégal s'est doté d'un code des obligations civiles et commerciales, cependant la plus grande lacune de ce code réside dans le fait qu'il y a une absence totale de dispositions consacrées au droit de propriété surtout la propriété immobilière.

    Cette solution du maintien de l'application du code civil français pour ses dispositions relatives au droit de propriété après l'indépendance du Sénégal, constitue une décision discutable du fait notamment du principe de la souveraineté nationale du Sénégal et de la règle de territorialité de la législation nationale française. En effet selon l'article 1 alinéa 1 du code civil français « les lois sont exécutoires dans tout le territoire français, en vertu de la promulgation qui en est faite par le roi (le président de la république). » Au regard de cet article nous pouvons affirmer que le code civil français a un domaine d'application spatial délimité par le législateur français et qui est constitué du territoire français et des territoires d'outre-mer. Et même dans ces territoires d'outre-mer les dispositions législatives modifiant une loi applicable dans ce territoire n'y sont applicables que lorsqu'elles ont été étendues à ce territoire d'outre-mer par une disposition expresse1. Ainsi donc si l'application du code civil français s'expliquait pendant la période coloniale, puisque la colonie était administrée par l'Etat colonisateur, il n'en est plus le cas aujourd'hui. En effet comme nous le soulignions antérieurement la souveraineté de l'Etat du Sénégal devrait s'opposer à l'application d'un code étranger aux problèmes soulevés dans notre pays. Surtout que les dispositions du code civil français ne sont pas toujours adaptées aux réalités sénégalaises ou sont méconnues de la population malgré l'adage selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi. »

    B- Inadaptation pour l'essentiel des dispositions du code civil français aux réalités sénégalaises :

    Les dispositions du code civil français applicables au Sénégal en l'occurrence le droit de propriété sont pour l'essentiel inadaptées aux réalités sénégalaises. En effet sur le plan de la culture la France et le Sénégal et plus généralement l'Afrique et l'Europe sont marqués dans ce domaine par une différence notoire. Pour nous en rendre compte nous allons-nous interroger sur l'effectivité de l'application des dispositions du code civil français au Sénégal.

    Ainsi pour ce qui est de l'usufruit c'est-à-dire le droit de jouir et de disposer des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance, nous pouvons affirmer que c'est une notion qui n'est pas très effective dans son application dans notre pays. En effet en dehors de l'usufruit accordé aux parents sur les biens de leurs enfants mineurs, qui par ailleurs peut se justifier au Sénégal par l'autorité parentale qui est très forte dans notre pays, les autres formes d'usufruits sont quasiment inexistantes. Ainsi les autres formes légales d'usufruit et celles conventionnelles ne sont presque pas connues au Sénégal.

    La cause de cette ineffectivité de la notion d'usufruit au Sénégal peut s'expliquer par l'utilité qu'on lui prête parfois en France et qu'elle ne remplit pas au Sénégal. En effet en France dans une succession sans dispositions à cause de mort, si tous les enfants sont ceux des deux époux, le conjoint survivant recueille à son choix soit l'usufruit de la totalité des biens existants soit la pleine propriété du quart de ces biens. Si au contraire un ou plusieurs enfants ne sont pas issus des deux époux, le conjoint survivant recueille la pleine propriété du quart des biens1. Ainsi donc en droit français l'usufruit joue un rôle très important en matière de succession et permet d'éviter certains conflits pouvant naître entre les auteurs du de cujus.

    En revanche au Sénégal cette règle du droit français concernant le rôle de l'usufruit en matière de succession ne peut pas prospérer du fait que pour l'essentiel au Sénégal le régime de la succession est organisé par le droit musulman qui a des règles différentes par rapport à celles françaises.

    Par ailleurs cette ineffectivité peut être constatée en examinant le contentieux en matière de droit de propriété au Sénégal. En effet il est rare voir impossible de trouver des décisions rendues par nos cours et tribunaux et concernant une affaire relative à l'usufruit. Pour l'essentiel les décisions sur le droit de propriété au Sénégal sont relatives à la propriété foncière qui est organisée par des lois d'origine sénégalaise. Ainsi les autres dispositions françaises en matière de droit de propriété et applicables au Sénégal à savoir le droit d'accession, la servitude, etc. subissent presque tous le même sort que l'usufruit. A côté de cette violation de la règle de la territorialité entrainant une ineffectivité de certaines règles en matière de droit de propriété, une seconde insuffisance sera notée à l'examen des lois et décrets d'application du code civil français au Sénégal.

    Paragraphe 2 : Situation des lois et décrets d'application du code civil français au Sénégal :

    Dans la pratique chaque texte de loi est accompagné par des lois et décrets d'application qui éclaircissent certaines dispositions et limitent certains droits accordés par la loi. Ainsi ces lois et décrets d'application participent pour une bonne application des textes de loi. Cependant dans notre pays, où certaines dispositions du code civil français sont applicables, il y a une absence de prise en compte des lois et décrets d'application du code civil (A). Et cette situation a entrainé une insuffisance dans l'application du code civil au Sénégal (B).

    A- Non prise en compte des lois et décrets d'application du code civil au Sénégal :

    Même durant la période coloniale, certains textes français modifiant le code civil de 1804 n'étaient pas applicables au Sénégal du fait que cette application était subordonnée à une déclaration sous forme d'arrêté gubernatorial. C'est le cas notamment de la loi du 20 Août 1881 qui n'a été déclarée applicable qu'à Madagascar et en Somalie.

    Après l'indépendance les textes modifiant le code civil ne sont pas applicables dans notre pays malgré le fait qu'il y soit toujours admis pour régir le droit de propriété. Et cela est expliqué comme nous l'annoncions antérieurement par le principe de la souveraineté nationale du Sénégal et de la règle de la territorialité de la législation nationale française.

    Ainsi de nombreuses lois et décrets d'application du code civil instaurés par la France pour une bonne application du code civil n'ont pas d'effets dans notre pays. En effet il en est ainsi de nombreuses lois françaises relatives à la limitation du droit de propriété comme les lois limitant la propriété du dessus ou du dessous. C'est le cas notamment de la loi du 8 Juillet 1941 ou celle du 9 Janvier 1985 qui toutes réduisent le droit de propriété du dessus pour des raisons d'intérêt général. Il en est également ainsi du droit d'accession à la propriété des eaux qui contient beaucoup de textes de lois limitant ce droit, notamment le code rural français1. Cependant concernant cette accession à la propriété des eaux, nous l'avons tantôt signalé, au Sénégal il est régi par des règles contenues dans le code du domaine de l'Etat mais pour l'essentiel ce texte ne contient pas de limitation à la propriété des eaux et cela du fait que les eaux au Sénégal font principalement partie du domaine de l'Etat. Signalons aussi que la propriété du dessus et surtout du dessous ont des textes de lois les organisant au Sénégal notamment le code minier et le code pétrolier. Ainsi donc malgré le fait que ces lois et décrets d'application du code civil ne soit pas applicables au Sénégal, notre pays a essayé de pallier à cette insuffisance en adoptant ses propres lois et décrets d'application, ce qui est source d'une insuffisance dans l'application du code civil.

    B- Insuffisances dans l'application du code civil :

    Cette inapplication des lois et décrets d'application du code civil français combinée à l'inadaptation de ce code civil français aux réalités sénégalaises font que ses dispositions applicables au Sénégal à savoir celles relatives au droit de propriété sont d'une application insuffisante dans notre pays. En effet pour une bonne efficacité, un texte de loi a besoin d'être précisé par des lois et décrets d'application ce qui n'est pas le cas comme nous le soulignions du code civil français du moins dans son application au Sénégal. Ainsi pour pallier à cette insuffisance le Sénégal a eu recours à l'adoption d'autres textes de lois pour surtout limiter des droits conférés par le code civil. Il en est ainsi de la loi 2003-36 du 24 Novembre 2003 portant code minier et de la loi 98-5 du 5Janvier 1998 portant code pétrolier. Toutes ces lois contiennent comme nous le rappelions antérieurement des dispositions relatives à la limitation du droit à la propriété du dessous.

    Cependant nous pouvons constater la particularité du régime sénégalais en matière de droit de propriété. En effet ces lois sénégalaises citées plus haut contiennent des limitations à des principes non édictés par le législateur sénégalais. En effet les règles relatives à la propriété du dessous sont régies au Sénégal par l'article 552 du code civil français. Mais tout ceci démontre s'il en était encore besoin de l'insuffisance dans l'application des dispositions du code civil et plus généralement du droit de la propriété au Sénégal. En effet malgré le fait que c'est la législation française qui s'applique dans notre pays relativement à ce domaine, les populations font le plus souvent usage de leur droit coutumier dans l'exercice des droits de propriété. C'est pour cette raison que des normes comme l'usufruit et la servitude instaurées par le code civil français ne trouvent pas échos au niveau du Sénégal. En effet malgré le fait que pendant la colonisation on a voulu imposer aux africains une autre conception de la propriété ceux-ci gardent toujours leur conception traditionnelle du droit de propriété, surtout en ce qui concerne le droit de la propriété immobilière où jusqu'à présent cette tendance à la sacralisation de la terre est toujours existante dans notre société.

    Ainsi donc au regard de ces multiples problèmes liés à l'application du code civil et plus généralement au droit de propriété au Sénégal, il nous ait semblé pertinent de réfléchir sur les problèmes ainsi posés et d'apporter des propositions de solutions.

    Section 2 : Propositions de solutions :

    A l'examen des nombreux problèmes soulevés tout au long de notre travail et qui sont relatifs à l'application du droit de propriété au Sénégal, il nous ait semblé impérieux que les textes applicables dans notre pays en matière de propriété soient modernisés (Paragraphe 1) mais aussi pour que les populations aient une meilleure connaissance de ces textes, leur codification devient incontournable (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Modernisation des textes :

    La question de la modernisation des textes se pose essentiellement dans notre pays en matière de propriété foncière des terrains. En effet le décret de 1932 doit être mis en adéquation avec d'autres textes pris postérieurement à son adoption et l'extirper de certains termes désuets (A). Mais aussi pour une plus grande efficacité dans l'application du droit de propriété au Sénégal la notion de possession doit être prise en compte (B).

    A- Modernisation du décret de 1932 :

    Tout d'abord et, ne serait ce que pour une simple question de dignité les « indigènes », « colonie », « droit coutumier local » etc. doivent disparaître de notre législation. En second lieu les autorités administratives visées dans ce texte, comme le gouverneur général, le lieutenant gouverneur, l'inspecteur des colonies etc. n'étant plus que de très lointains souvenirs, pas toujours agréables d'ailleurs, leur remplacement par les autorités actuelles est une exigence. Et plus fondamentalement, aux termes de l'article 67 de notre constitution, la propriété est désormais du domaine de la loi au lieu du décret et des textes d'application des décrets et arrêtés.

    Par ailleurs depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 1964 relative au domaine national, les articles 84 à 129 du décret foncier de 1932 ont perdu pratiquement tout intérêt de droit privé pratique. En effet ces articles organisent la procédure d'immatriculation au profit des particuliers alors que l'article 3 de la loi de 1964 sur le domaine national dispose que « les terres du domaine national ne peuvent être immatriculées qu'au nom de l'Etat. » il en est de même des dispositions pénales contenues dans le décret de 1932 et qui ont été toutes remplacées par de nouvelles dispositions contenues dans le code pénal sénégalais.

    Dans le fonds et pour une plus grande efficacité des dispositions du décret de 1932, des innovations doivent intervenir surtout concernant la lenteur des procédures organisées par ce texte. Il en est ainsi de la procédure d'immatriculation qui est très longue du fait principalement de la durée de l'affichage des placards reproduisant l'avis d'immatriculation au greffe du tribunal régional qui est de trois mois. Or avec l'avènement de la loi sur le domaine national aucune opposition ne devrait être recevable du fait que seul l'Etat peut requérir l'immatriculation, et que tous les droits coutumiers que l'on pourrait faire valoir sur ces terrains ont été supprimés. Ainsi toute cette phase pourrait être supprimée de la procédure d'immatriculation sans inconvénients majeurs.

    Une autre amélioration des dispositions du décret de 1932 doit provenir de la délivrance du duplicata des titres fonciers. En effet aucune inscription ne pouvant être faite sans la présentation de la copie du titre foncier ou du certificat d'inscription pour des raisons de sécurité, leur perte peut constituer un frein à l'accomplissement de formalités. D'où la nécessité de faire preuve de diligence dans la délivrance des duplicatas, mais en ayant à l'esprit la nécessité de sécuriser les transactions, en faisant en sorte qu'il n y ait pas en circulation un duplicata et un original, afin de minimiser les transactions frauduleuses.

    A côté du décret foncier de 1932, la notion de possession doit aussi être prise en compte pour une plus grande efficacité dans l'application du droit de propriété.

    B- Prise en compte de la notion de possession :

    Selon l'article 550 du code civil français toujours applicable dans notre pays « le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire, en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore le vice.

    Il cesse d'être de bonne foi du moment où ces vices lui sont connus. » Et partant de là la jurisprudence française a reconnu à celui dont la propriété est établie dans les conditions prescrites par l'article 550 ainsi cité, le droit aux fruits sans être tenu de prouver sa bonne foi1.

    Cependant au Sénégal la jurisprudence estime que la propriété immobilière au sénégalaise étant soumise aux formalités de publicité au livre foncier, ne peut en conséquence invoquer sa bonne foi l'acquéreur d'un terrain immatriculé qui procède par acte sous seing privé avec une personne non indiquée au livre foncier comme propriétaire2. Cette jurisprudence qui colle à la lettre du décret foncier du 26 Juillet 1932 exclut des immeubles immatriculés la notion de possesseur de bonne foi, surtout lorsqu'il est en conflit avec le propriétaire inscrit au livre foncier. En effet l'article 21 du décret de 1932 exclut toute possibilité d'acquisition d'un droit réel immobilier par prescription et par tout autre moyen autre que les formes requises par ce texte.

    Ainsi en dehors de la propriété mobilière où l'article 262 du code des obligations civiles et commerciales dispose qu'en fait de meuble possession vaut titre, pourvu seulement que le possesseur soit de bonne foi, la possession n'est pas acceptée au Sénégal en matière de propriété surtout immobilière. Cependant pour une bonne application du droit de propriété, il faut une prise en compte de cette notion de possession. Comme en droit français notre législation se doit d'organiser la possession afin que celle-ci puisse jouer son rôle en matière de propriété, rôle qui n'est pas des moindres. Ainsi la possession doit permettre d'acquérir la propriété par la prescription. En effet la personne ayant possédé pendant de nombreuses années un fonds en vertu d'un titre dont il ignorait les vices ne doit pas pouvoir être traité comme un usurpateur. Et cela ne sera possible qu'avec la prise en compte de la notion de possession dans notre droit de propriété immobilière.

    A la suite de ces solutions pour une modernisation des textes au Sénégal en matière de propriété et afin que les populations puissent en avoir une meilleure connaissance, leur codification s'avère nécessaire.

    Paragraphe 2 : Codification du droit de propriété :

    Pour une meilleure connaissance et application des dispositions du droit de propriété, et en vertu de la souveraineté de la République du Sénégal, la codification de ce droit est devenu impérieux. Et cette codification peut se faire soit en codifiant l'ensemble du droit de propriété dans un même texte (A) soit le codifiant selon les matières (B).

    A- Codification dans un même texte :

    La codification pourrait être définie comme un essai de clarification et de lisibilité des règles de droit, en vue de les communiquer au public. La codification a pour objectif de réorganiser l'ensemble des règles d'un grand domaine du droit. Elle a donc un rôle de structuration de cette matière. Elle permet au passage d'éviter, et au besoin de repérer, les incohérences du système juridique ainsi construit.

    Au regard de ces intérêts qui s'attachent à la codification, il est d'une nécessité impérieuse de regrouper le droit de la propriété au Sénégal dans un code. Dans notre pays le regroupement de toute la législation sur le droit de propriété dans un même code constituera une mesure de souveraineté dans la mesure où comme nous l'avons souligné antérieurement, l'essentiel de ces dispositions sur la propriété sont d'origine française. Par ailleurs cette codification peut dans un certain sens regrouper l'ensemble des règles sur le droit de propriété dans un même code. Dans ce cas ce code pourra contenir l'ensemble des règles sur la propriété mobilière corporelle et incorporelle, sur la propriété immobilière foncière et non foncière. Dans tous les cas il faudra que ce code tienne compte des insuffisances notées actuellement au niveau de l'application du droit de propriété au Sénégal et y apporté des solutions adéquates. En effet il ne servira à rien de recopier tout simplement ce qui est là en ce moment en sachant qu'il y a dans tous les domaines du droit de propriété des lacunes à combler comme nous l'avons, tout au long de notre travail, essayé de démontrer. Ainsi ce code servira à corriger les imperfections notées actuellement mais aussi à moderniser les textes de lois. Et pour réaliser ces objectifs le code doit dans son élaboration regrouper l'ensemble des experts sur tous les domaines du droit de propriété et si possible qu'ils soient tous des experts nationaux afin que les normes qui figureront dans ce code soient des normes qui tiennent compte des réalités sénégalaises afin que les populations puissent s'y retrouver. En effet cela constitue un gage d'une bonne application des lois dans un pays. Cependant la codification de l'ensemble du droit de propriété dans un même code peut constituer une opération très pondéreuse, en effet le droit de propriété constitue un domaine assez large et le regroupement de tous ses aspects dans un code n'est pas chose aisée. Mais pallier à ces difficultés on pourrait opter pour une codification selon les matières.

    B- Codification selon les matières :

    Cette codification selon les matières constitue selon notre avis la meilleure démarche puisque le droit de propriété constitue un domaine très large. Aussi chacune des catégories le constituant a un domaine très large. Ainsi on pourrait procéder par exemple en codifiant les règles relatives à la propriété mobilière corporelle et à la propriété immobilière non foncière dans un même texte, les règles relatives à la propriété foncière des terrains et les règles relatives à la propriété mobilière incorporelle dans deux autres.

    Pour respecter la règle du parallélisme des formes et vu l'importance de chaque matière, ce procédé semble être le plus prudent. Ainsi pour la codification de la propriété mobilière corporelle et celle immobilière non foncière, on pourrait en se basant sur les dispositions du code civil encore applicable dans notre pays, rédiger ce code mais en prenant en compte les réalités sénégalaises mais aussi en prenant les règles relatives à ces matières et contenues dans le code des obligations civiles et commerciales qui il faut le dire se résume à son article 262 sur la possession des meubles.

    En ce qui concerne la propriété foncière des terrains qui constitue un domaine très large et très important dans notre pays, le code à mettre en place devra contenir les dispositions du décret foncier de 1932 mais après son toilettage et les dispositions de la loi sur le domaine national et celle contenues dans le code du domaine de l'Etat. Ainsi leur regroupement dans un même texte permettra de corriger certaines contradictions existantes entre ces textes comme le cas souligné antérieurement entre le décret de 1932 et la loi sur le domaine national. Signalons aussi que cette codification devra aussi tenir compte des dispositions contenues dans le code des obligations civiles et commerciales (articles 379 à 381) et relatif aux contrats sur les droits réels portant sur les immeubles immatriculés.

    Enfin l'adoption d'un code englobant l'ensemble des droits sur les oeuvres de l'esprit s'avère impérieuse. Par ailleurs ce texte à adopter dans ce domaine doit englober aussi bien la propriété littéraire et artistique, la propriété industrielle, mais aussi les droits voisins. Cependant concernant ce domaine il faut signaler que le Sénégal est membre de beaucoup d'organisations au niveau international et que ces organisations ont adopté des textes que notre pays se doit de respecter.

    Conclusion :

    Ainsi donc nous voila au terme de notre travail consistant à présenter le droit de propriété au Sénégal qui il faut le dire et comme on a eu à le constater, présente une certaine particularité. En effet l'ensemble des textes applicables dans notre pays sont soit originaires de la France ou d'inspiration française, ce qui est comme nous l'avons souligné tout au long de notre travail, une violation à la fois du principe de la souveraineté nationale du Sénégal et de la règle de la territorialité de la législation française.

    En plus de ces lacunes soulevées si dessus, la législation sénégalaise en matière de propriété présente beaucoup d'insuffisances à tous les niveaux mais surtout dans le domaine foncier des terrains. Pour l'essentiel l'ensemble de ces insuffisances ont été soulevés dans notre travail et des propositions de solutions ont été émises pour notamment rendre la législation en matière de propriété au Sénégal plus efficace pour une meilleure application de ses dispositions dans notre pays.

    Ce qui est à nos yeux le plus important pour arriver à un tel résultat c'est de prendre en compte dans le droit de propriété les réalités sénégalaises et éviter d'aller copier tout simplement la législation d'un autre pays qui a une manière différente de voir la propriété. Partant de là la codification de ce droit de propriété s'avère nécessaire puisqu'il permettra une meilleure accessibilité de ce droit et par la même occasion une meilleure application de ses dispositions. Cependant au regard de l'importance de ce domaine que constitue le droit de propriété, une codification selon les matières constitue à notre avis la meilleure démarche à adopter.

    Bibliographie :

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    - P.D.DELESTRAINT : Droit civil- Sûretés- privilèges et hypothèques- Publicité foncière- 5e édition Dalloz.

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    - F.X.TESTER :L'indivision- Collection connaissance du droit- Dalloz.

    - A.WEILL- F.TERRE- P.SIMLER : Droit civil- les biens- 3e édition 1985- Précis Dalloz.

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    - F.ZENATI- T.REVET : Les biens- 2e édition refondue- PUF collection droit fondamental.

    2 : Articles :

    - S.DIEME (conservateur de la propriété et de droits fonciers) : « La nécessité de rénover la législation foncière »- Dans la revue trimestrielle de l'amicale des inspecteurs des impôts et des domaines- édition spéciale 2000.

    - A.DIOP : L'évolution de la propriété immobilière au Sénégal- Revue juridique et politique 1970, p. 699 à 712.

    - PH.JESTAZ : Prescription et possession en droit français des biens- Dalloz 1984, chron p. 27.

    - K.MBAYE : Le régime des terres au Sénégal, dans « le droit de la terre en Afrique (au Sud du Sahara) » étude préparée à la requête de l'UNESCO- Paris édition GP Maisonneuve et Larose 1971.

    - M.SOW (inspecteur principal des impôts et domaines) : Le problème de l'expropriation pour cause d'utilité publique- Dans la revue trimestrielle de l'amicale des inspecteurs et des domaines- édition spéciale 2000.

    * 1 Article 552 al 1 code civil

    * 2 Article 552 al2 et 3 code civil

    * 3 Loi 2003-36 du 24 novembre 2003portant code minier

    * 4 Loi 9805 du 05 janvier 1998 portant code pétrolier






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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille