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La protection de l'enfant vidomegon au Bénin : mythe ou réalité ?

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par Hospice Bienvenu HOUNYOTON
Université catholique de Lyon / UPMF Grenoble - Master 2 recherche 2009
  

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2- Evolution de la pratique Vì?ómåg?'n au Bénin

À propos de l'évolution du Vì?ómåg?'n, nous notons trois grandes phases, qui reflètent chacune la représentation temporelle sociale et la vision de protection de l'enfant au sein de la société. Selon chacune de ces phases d'évolution, l'accent sur mis sur la surprotection ou la protection tout court de l'enfant.

La première grande époque marquant l'évolution de la pratique Vì?ómåg?'n, remonte à l'époque coloniale où l'instruction va faciliter son développement. Ce fut la première révolution où le Vì?ómåg?'n sortira du cadre traditionnel familial villageois pour les pôles urbains. En effet, au temps colonial, des milliers d'enfants issus de ménages ruraux, ont été placés chez la poignée de cadres travaillant dans l'administration coloniale et dans ses structures de démembrement au niveau cantonal. Ces cadres avaient été sollicités par les parents ou proches de la famille restés au village, pour la garde d'un ou plusieurs enfants, qui vont être scolarisés, ou suivre une formation qualifiante pour exercer un métier dans la société. Placer son enfant au temps colonial, auprès d'un cadre modèle, c'est un privilège et la garantie d'un avenir meilleur pour ce dernier. D'ailleurs, les premiers cadres dahoméens ont été pour leur grande majorité d'anciens enfants placés c'est-à-dire des Vì?ómåg?'n. Joseph GNONLONFOUN, ancien ministre des droits de l'homme, reconnaît le bien que cette pratique lui a apportée. Il affirmait dans une émission que lui, « qui est un enfant issu d'une famille modeste, a eu la chance d'avoir reçu une instruction qui a lui permis de réaliser ses rêves d'enfants et de satisfaire ses besoins grâce à cette pratique ancestrale très originelle de Vì?ómåg?'n41(*) ». Il reconnaîtra de façon plus précise que « le fait d'avoir été un enfant placé, lui a permis de forger ses aptitudes et de devenir un homme épanoui 42(*)». Ce fut le cas pour des milliers d'enfants qui vont migrer vers les centres urbains pour y être scolarisés et éduqués pour leur propre bonheur. Cette tendance nationale amorcée va progressivement s'accentuer et connaîtra une hausse aux indépendances avant de se généraliser plus davantage pendant la période révolutionnaire.

Cette période symbolise la démocratisation et la généralisation de la pratique au service de l'enfant notamment de l'enfant issu d'un milieu pauvre et défavorisé. Avec la modernisation du pays et la construction des grands centres de formation dans les milieux urbains, des enfants de milieux ruraux vont pouvoir se former en s'appuyant sur la solidarité et plus singulièrement sur le Vì?ómåg?'n perçu à notre avis comme un système qui participe de la solidarité nationale, de la protection de l'enfant et de l'obligation des uns et des autres envers les enfants. La campagne de scolarisation de tous les enfants annoncée par le gouvernement révolutionnaire qui assurait fournitures, alimentation et bourses aux enfants, généralisera une pratique qui jusque-là était réservée aux personnes qui ont des parents vivants en ville. À partir de cette politique de scolarisation massive des enfants, certains ménages accueilleront au minimum trois enfants qui pour la plupart ne sont pas issus de leur famille d'origine. Ces ménages ont contribué à l'essor sans précédent du Vì?ómåg?'n. Le Vì?ómåg?'n a un avantage pour les différentes parties concernées à savoir les enfants, la famille d'accueil et les parents géniteurs.

Pour le tuteur, le fait d'accepter un Vì?ómåg?'n au sein de sa famille est une opportunité formidable, car ce dernier l'aide à accomplir ses tâches ménagères contre l'assurance et la garantie d'une scolarisation et d'une bonne éducation. Il lui permet de bénéficier de l'aide précieuse de la famille d'origine de l'enfant. Cette aide est généralement constituée de denrées alimentaires plus chères dans les centres urbains. Pour les parents de l'enfant, le fait d'avoir un enfant « akowé 43(*)», est une chance et un gage d'une vieillesse épanouie et assurée. Un enfant  « akowé », dans l'imaginaire collectif est le symbole de la réussite sociale. C'est pour quoi, les parents s'évertueront à en avoir un à travers l'opportunité que leur offre le système traditionnel du Vì?ómåg?'n. Concernant l'enfant placé, la pratique constitue pour lui une chance énorme, car il reçoit une éducation et une scolarisation qui le préparent à la vie. Il a droit à une scolarisation, à un logement à une alimentation et le droit à une famille qui l'élève dans la dignité et le respect de ses droits fondamentaux élémentaires. Ces différents avantages ainsi énumérés ajoutés à la volonté du pouvoir central de garantir la scolarisation à tous les enfants du pays, ont favorisé la généralisation et le succès observés de la pratique dans les années 70 et 80. D'autres motifs expliqueront l'essor de cette pratique notamment la concurrence entre les familles, les collectivités et les régions, qui ont beaucoup oeuvré pour que leurs enfants profitent de cette aubaine. Toutes les régions du pays en ont profité à cette époque et se sont battues pour trouver une famille d'accueil à leurs enfants en ville. Riches ou pauvres, analphabètes ou instruits, la motivation était la même et la mobilisation générale. Aucun ménage, aucune famille n'échappait à cette période au phénomène qui prend donc une ampleur très considérable. Jusque-là, le placement d'enfant se déroule dans un esprit d'entraide, de solidarité ou d'échanges culturels c'est-à-dire entre les différents peuples. Il respecte les droits de l'enfant avec des contraintes aussi bien pour les tuteurs, les parents et les enfants placés ou confiés.

Mais avec le renouveau démocratique, les moeurs changent, les mentalités évoluent également et la pratique va être progressivement détournée de son esprit originel. L'esprit originel de solidarité va être pervertie avec au final, l'avènement d'une nouvelle perception de l'enfant. L'enfant, notamment le Vì?ómåg?'n à partir des années 90, ne va plus être perçu comme un trésor, une personne à socialiser avant tout et ses droits progressivement vont être violés. Le placement d'enfant revêt alors un aspect plus économique que d'entraide sociale. Plusieurs raisons expliquent cette situation. Nous pouvons citer en autres, la crise économique des années 80, la naissance des familles nucléaires et l'éclatement de l'esprit communautaire. Tous ces facteurs ont contribué à la nouvelle évolution du Vì?ómåg?'n que nous aborderons dans notre deuxième partie à travers le terme plus consacré de « phénomène Vì?ómåg?'n », devenu une problématique de droit de l'homme et particulièrement de l'enfant béninois.

Malgré cela, il faudra retenir que le Vì?ómåg?'n reste un phénomène social culturellement ancré dont la vision de base est la protection de l'enfant. C'est ce que nous démontrerons dans notre deuxième section avec comme arguments l'originalité et la vision traditionnelle de la protection de l'enfant au Bénin.

* 41 GNONLONFOUN J.,  « La problématique des vidomègons et du trafic des enfants au Bénin : Regard sur une pratique sociale pervertie », Aide et Action Bénin, Cotonou, Mars 2005, P3.

* 42 GNONLONFOUN J.,  ibid.

* 43 Le terme akowé désigne le lettré de l'administration publique de l'État au Bénin. Alain Kisito METODJO, dans son ouvrage « Devenir maire en Afrique : Décentralisation et notabilités locales au Bénin) », paru aux Editions L'Harmattan en 2008, précisera dans les pages 19 et 20, que le mot doit son origine à la langue yoruba et désigne l'évolué c'est-à-dire l'occidentalisé. Un Akowé, c'est l'évolué qui est allé à l'école du blanc qui jouit d'un certain statut et privilège au sein de la société.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe