La question de la protection des droits de l'homme dans les rapports euro-méditerranéens( Télécharger le fichier original )par Marine GOUVERS Faculté de droit de Poitiers - Master de recherche droit public fondamental 2008 |
CHAPITRE II. SOLUTIONS ENVISAGEABLESI. Le perfectionnement du processus en cours Certaines modifications des politiques de l'Union pourraient contribuer à redonner de l'élan au processus de Barcelone dans le domaine des droits de l'homme. Il s'agirait d'abord d'aménager le processus de Barcelone en lui-même (A) et ensuite d'approfondir la politique européenne de voisinage nouvellement instaurée (B). A. Les aménagements possibles du partenariatLa politisation de la question des droits de l'homme est la difficulté majeure que rencontre la Communauté européenne dans sa politique de promotion. Les intérêts en jeu des uns s'opposent à ceux des autres et les obligations juridiques auxquelles les parties doivent se soumettre sont au final éludées. L'un des moyens de remédier à ce problème serait d'exploiter ce qu'Elena Fierro appelle le potentiel positif de la clause droits de l'homme des accords bilatéraux: la clause droits de l'homme est une illustration de la responsabilité pesant sur la CE de protéger et de promouvoir ces droits urbi et orbi207. Autrement dit, la politique de la Communauté doit être active et non pas juste réactive et doit entraîner l'adoption de mesures positives telles que la mise en place d'un dialogue systématique, la possibilité de suspendre l'aide et de prendre des mesures de sanctions208. Ce n'est que si la Communauté se sent obligée d'intervenir activement dans le domaine des droits de l'homme que la situation peut évoluer. Présentement son action est décousue, manque de cohérence et de coordination réduisant son impact sur la situation des droits de l'homme. Ainsi, les actions menées individuellement par les Etats de l'Union dans le cadre de leurs politiques étrangères respectives doivent aller de paire avec les politiques européennes sans les concurrencer. En parallèle, impliquer davantage le Parlement européen, sensible aux questions sociales et au respect des droits de l'homme, permettrait de donner une impulsion certaine au partenariat dans ce domaine. Il s'agirait entre autres de le doter du pouvoir d'initier le processus de sanction en cas de violation des droits de l'homme par un pays membre. Afin de mettre en place une politique européenne crédible sur le terrain des droits de l'homme, insistance doit être mise sur la nécessité d'adopter des politiques transparentes et cohérentes. Ceci est conditionné par l'obtention d'informations sur la situation des droits de 207 Elena Fierro, op. cit.p. 239. 208 Dorothée Schmid, op. cit. p. 46. l'homme dans chacun des Etats du partenariat209. Renforcer les sources d'information de l'Union sur le terrain lui assure un meilleur contrôle de son action et la surveillance des droits de l'homme est une condition pré-requise à la mise en oeuvre de l'article 2 des accords d'association210. La cohérence de la politique de la Communauté passe par une implication plus judicieuse de la société civile: le processus décisionnel relatif aux droits de l'homme du partenariat devrait engager davantage les ONG nationales et régionales du pourtour oriental et méridional méditerranéen. Les informations dont elles disposent sont précieuses et elles ont un rôle décisif à jouer dans la diffusion des informations au Parlement sur la situation des droits de l'homme dans les pays partenaires puisqu'elles sont en contact étroit avec les besoin spécifiques et les problèmes concrets en matière de droits de l'homme dans leur propre pays211. Ainsi, la Communauté devrait s'investir pour assurer les libertés de la société civile, son pluralisme et son indépendance en limitant les actions répressives des gouvernements autoritaires à leur encontre. Les ONG du Nord et du Sud devraient pouvoir accéder et s'exprimer dans le cadre des réunions des Conseils d'association et contribuer au développement des stratégies de promotion des droits de l'homme. Enfin, la promotion des droits de l'homme dans le cadre du partenariat devrait se fonder sur des considérations pragmatiques: le partenariat euro-méditerranéen manque d'un programme commun relatif aux droits de l'homme. Aucune charte des droits de l'homme n'a abouti jusqu'à présent, aucun projet pragmatique n'a été mis en place au niveau régional et aucune instance commune n'a été établie afin de promouvoir les droits de l'homme exclusivement dans la région méditerranéenne. La politique européenne de voisinage a développé de nouveaux mécanismes permettant une approche plus concrète de la question des droits de l'homme dans le partenariat. Cette approche, qui contribuer à assurer le futur du partenariat n'est pas libre doit être approfondie et éclaircie. B. L'ajustement de la politique européenne de voisinage La question de la mise en pratique de la conditionnalité de l'aide avec les partenaires méditerranéens a été posée de façon beaucoup plus empirique par la PEV que par le 209 Idem 210 Frederik Thuesen, « Le rôle des droits de l'Homme dans la politique méditerranéenne de l'UE: La mise en oeuvre de l'article 2 », publié par le réseau euro-méditerranéen des droits de l'homme, 2000p. 26. 211 Idem. partenariat lui-même. Là où le partenariat a échoué, la PEV a pour ambition de réussir. Mais pour contribuer à redonner de l'élan au partenariat, cette politique doit être appliquée avec chacun de ses membres, aujourd'hui quatre d'entre eux n'ont pas adopté de plans d'action (l'Algérie, le Liban, la Syrie et la Turquie). La plus grande avancée de la PEV est son insistance sur la conditionnalité de l'aide attribuée, ce que le partenariat euro-méditerranéen semble avoir esquivé. Cependant, l'approche positive qu'elle adopte n'est pas à l'abri des critiques, en effet, il est reproché à la Communauté d'établir les plans d'action de manière relativement unilatérale tandis que la «conditionnalité positive implique que l'Etat récipiendaire ait l'opportunité d'exprimer ses besoins et ses désirs afin qu'ils soient pris en compte dans le but d'initier une interaction dynamique. Une fois que les conditions ont été négociées, elles devraient être succédées par la poursuite d'un dialogue constant concernant leur contenu et les moyens de le mettre en application>>212. Or les priorités d'action définies dans les plans reflètent entre autres et surtout les préoccupations européennes relatives à l'immigration illégale ou l'amélioration du cadre légal pour les investissements de l'Union à défaut de celle de ses voisins213. Si le respect des droits de l'homme est au coeur de cette politique, il est regrettable que les documents de la PEV fassent référence indifféremment à la démocratie, l'Etat de droit et la l'objectif de libéralisation sans les distinguer ni les définir214. De plus, les plans d'action sont supposés établir des objectifs à atteindre, conditionnant l'attribution de l'aide aux résultats obtenus mais «ni ces derniers ni les documents de la Commission n'établissent un clair échelonnage pour le contrôle des progrès ou de potentiels revers>>215. Les plans d'action euxmêmes manquent de précision et de transparence. Kristina Kausch insiste sur la nécessité de préciser les objectifs de démocratisation des plans d'action et de les inscrire dans un cadre très concret et précis: pour chacun des objectifs et mesures intégrés dans les chapitres relatifs à la démocratisation, les informations concernant les différentes étapes et les mécanismes, les plannings et échéances, les acteurs, le budget et les critères mesurables pour évaluer les progrès réalisés doivent être clairement fixés216. Des références concrètes devraient être 212 Dorothée Schmid, op. cit.p. 45. 213 Jérôme Boniface, « La politique européenne de voisinage, entre élargissement et politique étrangère », disponible sur le site de l'institut européen de l'administration publique: http://www.eipa.eu 214 Reprendre de l'élan, Rapport annuel EuroMesco 2006, op. cit, p. 67. 215Idem. 216 Kristina Kausch, op. cit.p.11. développées en fonction de listes d'indicateurs officiels déterminés par la Commission fixant des paliers d'évolution auxquels devraient correspondre les <<récompenses» promises par la Communauté. Chacun de ces paliers, de ces récompenses devraient être publiés afin de garantir la transparence du processus, la crédibilité du traitement et pour maximiser l'effet d'annonce de chaque projet. Les résultats obtenus, qu'ils soient positifs ou négatifs devraient être rendus publics, les progrès et échecs clairement identifiés. La conditionnalité négative est totalement exclue de la politique de voisinage, des articles tels que les articles 2 des accords bilatéraux du partenariat sont absents des plans d'action. Dorothée Schmid suggère que les mesures négatives devraient être autorisées, mais précisément définies et encadrées par des conditions d'application déterminées217. Il s'agit de mettre en application dans les relations établies par la PEV l'équilibre entre la conditionnalité positive et la conditionnalité négative dont parle Carlos Santiso, cet équilibre peut être atteint si la Communauté respecte les critères établis pour définir les réussites et les échecs des partenaires et si elle en tire des conclusions proportionnelles, mais effectives. Il est possible à travers la PEV de faire de la promotion des droits de l'homme une entreprise allant au delà des déclarations d'intention et des projets idéaux mais irréalisables, une entreprise aussi mesurée et mesurable que les progrès économiques si des critères bien déterminés sont préalablement établis, si la connaissance de la situation des droits de l'homme est optimale et si les menaces et les solutions sont identifiées. Un autre facteur entre en compte dans la perspective d'une amélioration de la situation des droits de l'homme, il s'agit du facteur économique: plus florissante est l'économie d'un Etat, meilleures sont ses chances de protéger les droits de l'homme. Cet autre facteur économique a été pris en considération par une récente initiative se voulant être le relais du partenariat euro-méditerranéen, il s'agit du <<processus de Barcelone: l'Union pour la Méditerranée». II. Le processus de Barcelone : une Union pour la Méditerranée <<Le processus de Barcelone: une Union pour la Méditerranéen» (UPM)218 est un moyen de renforcer le cadre de la coopération multilatérale du partenariat euro-méditerranéen. 217 Dorothée Schmid, op. cit. p. 45. 218 L'appellation officielle de la nouvelle union est "le
processus de Barcelone: une Union pour la Ayant conscience des limites et de la paralysie du partenariat, les initiateurs de l'UPM ont souhaité relancer le processus en insistant sur son aspect économique. Des innovations d'ordre institutionnel ont été proposées et doivent contribuer à sortir le partenariat du marasme politique ayant éprouvé le partenariat euro-méditerranéen (A). En parallèle, la politique des droits de l'homme a été repensée de manière délétère et vise à détacher l'Union européenne de ses responsabilités (B). |
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