La responsabilité civile des organisateurs de loteries commerciales( Télécharger le fichier original )par Roger LANOU Université de Ouagadougou - Maà®trise en droit des affaires 2003 |
§2 Les préjudices réparés dans les autres fondements : les préjudices contractuelsL'article 1149 du Code civil exige la réparation de la perte éprouvée et du gain manqué (A). Dans la pratique cependant, les condamnations prononcées contre les organisateurs de loteries publicitaires sur le fondement de l'inexécution d'une obligation contractuelle, sont des condamnations à l'exécution du contrat, indépendamment de tout préjudice subi (B). A. La perte éprouvée et le gain manqué130(*)La perte éprouvée ou damnum emergens est constituée de tout ce qui a indûment appauvri la victime. Dans le cas de la responsabilité de l'organisateur de loteries publicitaires, seront considérées comme une perte éprouvée, les dépenses faites par le prospect et ayant pour but de faire entrer celui-ci en possession du lot promis. Le gain manqué ou lucrum cessans consiste en des avantages et profits que l'agissement du cocontractant (la société organisatrice de loteries publicitaires) a empêché de se réaliser. Le gain manqué ne constitue pas une diminution du patrimoine mais plutôt l'impossibilité de l'augmenter. Il -le gain manqué- s'appréciera donc en référence au profit que le créancier entendait tirer de la prestation de son débiteur. Le prospect pourra par exemple faire valoir comme gain manqué les projets qu'il aurait fait et qui n'ont pas pu se réaliser du fait de l'inexécution. Il en sera de même pour les projets qu'aurait délaissé le prospect du fait de sa conviction d'être désormais "riche". Dans la pratique cependant, les condamnations rencontrées le plus souvent, sinon toujours, sont des condamnations à l'exécution de l'obligation. B. La condamnation à l'exécution de l'obligationIl est très rare de voir apparaître dans les décisions -fondées sur la responsabilité contractuelle- des condamnations en dommages et intérêts avec des catégorisations de préjudice en gain manqué et perte éprouvée. Les juges se contentent de condamner la société organisatrice de loteries publicitaires, reconnue coupable, à exécuter la prestation promise c'est-à-dire délivrer la somme "attribuée" au prospect. Il ne pourrait d'ailleurs en être autrement, du moins, s'il est à considérer que la sanction "normale" de l'inexécution d'une obligation est la condamnation à exécuter cette obligation131(*). Il s'agit donc ici plutôt d'une condamnation en nature132(*) que de la réparation d'un préjudice. En effet, selon M. De GOUTTES, « le principal avantage du recours à la responsabilité contractuelle est de permettre un renforcement de la protection de la victime [...] le consommateur lésé peut réclamer à l'annonceur l'exécution complète de ses promesses alléchantes, indépendamment du préjudice subi »133(*). Mais encore faudra-t'il pour cela accepter l'existence véritable d'une responsabilité dite "contractuelle"134(*). Le juge, après avoir retenu parmi les faits allégués par la victime ceux réellement constitutifs du préjudice, doit procéder à la détermination du « prix du dommage »135(*)que devra payer l'organisateur de loteries publicitaires. * 130 Article 1149 du Code civil. * 131 Civ. 2ème, 9 mai 1972, JCP 1972, IV, 164. * 132 Pour l'étude de cette question, voir infra p. 42. * 133 De GOUTTES, Conclusions ss. Cass. Ch. mixte 6 sept. 2002, www.courdecassation.fr, II, B. * 134 A propos de ce débat doctrinal, voir A. ZOMA, Responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle : Unité ou dualité ? Mémoire de maîtrise, UFR/SJP, Ouagadougou, 2002. * 135 T. IVAINER, op. cit., p. 7 |
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