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Quartier de résidence et délinquance

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par Mohamed OUATTARA
Université de Lausanne.Suisse - Master en droit,option criminologie et sécurité 2008
  

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V- LA VICTIMISATION

Dans cette seconde partie, nous essayerons de voir l'influence que chacune de nos nouvelles variables (lien affectif, dégradation du quartier et cohésion sociale) aura sur la victimisation, nous utiliserons les tableaux croisés. Il s'agira pour nous de mettre en relation chacune de ces trois variables le fait d'avoir été victime. La victimisation devient donc dans cette partie la variable dépendante.

Ensuite nous procéderons à des analyses multivariées pour voir lequel des facteurs soit individuels ou environnementaux a le plus d'influence sur les différentes sortes de victimisation dont nous disposons dans notre sondage.

Il est à noter qu'au niveau de la victimisation, nous disposons uniquement de la prévalence dernière année et la victimisation comprend quatre groupes. Il est à signaler aussi que nous ne représenterons dans nos tableaux que les résultats qui sont significatifs.

5.1-Lien entre le lien affectif et la victimisation

Tableau 33

 

Lien affectif en deux catégories

 
 

Fort lien (N=2493)

Faible lien affectif (N=1097)

 

Le fait d'avoir été volé de quelque chose

jamais été victime

1972

79.1%

808

73.7%

X²= 12.560

p-value=0.000

G=0.231

Phi=0.059

Victime au moins une fois

521

20.9%

289

26.3%

Total

100%

100%

Ce tableau se lit des la manière suivante : 26.3% des jeunes affirmant qu'ils ont un faible lien affectif avec leur quartier ont au cours de la dernière année précédent le sondage été victime d'un vol notamment du vol d'un livre, d'argent, de téléphone portable, affaires de sports, vélo, etc... , contre 20.9% pour ceux qui estiment avoir des liens affectifs avec leur lieu de résidence.

Il y a donc une relation statistique entre le lien affectif et le fait d'avoir été volé.

5.2-Lien entre la dégradation du quartier et la victimisation

Tableau 34

 

Dégradation du quartier en deux catégories

 
 

Faible dégradation (N=3531)

Forte dégradation (N=60)

 

Être obligé de donner de l'argent ou autres choses

Jamais été victime

3457

97.9%

52

86.7%

X²= 34.289

Fischer Test=0.000

G=0.760

Phi=0.098

Victime au moins une fois

74

2.1%

8

13.3%

 

Total

100%

100%

 

Avoir été frappé ou blessé violemment

Jamais été victime

3457

97.9%

51

84.5%

X²= 44.306

Fischer Test=0.000

G=0.787

Phi=0.112

Victime au moins une fois

74

2.1%

9

15.5%

Total

100%

100%

Le fait d'avoir été volé de quelque chose

Jamais été victime

2744

77.7%

38

63,9%

X²= 6.496

P. V=0.078

G=0.279

Phi=0.030

Victime au moins une fois

787

22.3%

22

36.1%

Total

100%

100%

Dans ce tableau, nous voyons que notre variable indépendante a des relations statistiques avec le fait d'avoir été obligé de donner de l'argent ou autres choses, le fait d'avoir été frappé violemment et le fait d'avoir été volé de quelque chose. Que se soit par la p-value ou le test de Fischer, il y a des liens entre variable indépendante et celle dépendante.

En ce qui concerne le fait d'avoir été forcé de donner de l'argent ou autres choses, les jeunes des quartiers fortement dégradés sont plus victimes (13.3% contre 2.1% pour les autres) et la relation est faible.

Pour le fait d'avoir été frappé violemment, 2.1% de ceux qui ont un quartier faiblement dégradés, en ont été victimes contre 15.5% pour les jeunes des quartiers dégradés avec toujours une relation faible.

Concernant le fait d'avoir été volé de quelque chose, nous obtenons les résultats suivants : 22.3% des jeunes vivant dans un quartier faiblement dégradés en ont été victimes contre 36.1% pour ceux vivant dans un quartier fortement dégradés.

Comme nous l'avons signifié pour la délinquance, ces pourcentages pourraient être autres si nous n'obtenions pas cet écart aussi considérables entre ceux vivant dans les quartiers dégradés et ceux dans des quartiers non dégradés.

Cependant, la plupart des auteurs dans la littérature affirment l'existence d'un lien entre la victimisation et la dégradation d'un quartier. Généralement ces quartiers laissés à l'abandon, permettent à des délinquants de s'installer et de pouvoir mener à leur aise leurs activités. Les populations sont alors victimes de nombreux actes de victimisation, ce qui pousse la plupart à quitter ces quartiers. (Shaw et Mckay, 1962).

Aux Etats-Unis par exemple, la dégradation d'un quartier peut déclencher assez rapidement un exode massif parmi les classes moyennes (Cusson, 1989) pour ne pas prendre le risque d'être victimes de ces délinquants qui s'y installent.

5.3-Cohésion sociale et victimisation

Tableau 35 :

 

Cohésion sociale en trois catégories

 
 
 

Forte cohésion (N=1342)

Moyenne cohésion (N=1056)

Faible cohésion (N=1116)

 

Être obligé de donner de l'argent ou autres choses

Jamais été victime

1322

98.5%

1032

97.7%

1081

96.9%

X²= 7.383

P. V=0.025

G=0.250

Phi=0.046

Victime au moins une fois

20

1.5%

24

2.3%

35

3.1%

Total

100%

100%

100%

Le fait d'avoir été volé de quelque chose

Jamais été victime

1070

79.7%

817

77.4%

828

74.2%

X²= 10.378

P. V=0.006

G=0.105

Phi=0.055

Victime au moins une fois

272

20.3%

239

22.6%

288

25.8%

Total

100%

100%

100%

Maltraitance à l'école

Jamais été victime

1184

88.2%

946

89.6%

947

84.9%

X²= 11.416

P. V=0.003

G=0.094

Phi=0.057

Victime au moins une fois

158

11.8%

110

10.4%

169

15.1%

Total

100%

100%

100%

A la lecture de ce tableau, nous constatons l'existence d'un lien statistique significatif entre la cohésion sociale et le fait d'avoir été obligé de donner de l'argent ou autres choses, le fait d'avoir été dépossédé de quelque chose et la maltraitance à l'école.

Concernant le fait d'avoir été obligé de donner de l'argent ou autre chose, la force de la relation est nulle à faible. 3.1% des jeunes qui vivent dans un quartier où il y a une faible cohésion sociale ont au moins été obligé une fois de donner de l'argent ou autre chose contre 2.3% pour les jeunes des quartiers à moyenne cohésion sociale et 1.5% pour les jeunes des quartiers à forte cohésion sociale.

Pour le fait d'avoir été dépossédé de quelque chose, 25.8% de ceux qui estiment que leur lieu de résidence connaît une faible cohésion sociale en ont été au moins une fois victimes contre 22.6% (pour la moyenne cohésion) et 20.3% (pour la forte cohésion).

Pour ce qui est de la maltraitance à l'école, nous constatons que 15.1% de ceux qui ont une faible cohésion sociale dans leur quartier en ont été déjà victimes. Pour la forte cohésion sociale, ils sont 11.8% à avoir été victime contre 10.4% pour la moyenne cohésion. Nous remarquerons que ceux qui vivent dans les quartiers ou il y a une moyenne cohésion sociale, sont moins victimes que ceux vivant dans un quartier avec une forte cohésion sociale même si les différences de pourcentage ne sont pas énormes.

Ces résultats vont dans le même sens que ceux de Ludemann et Sascha (2007) qui montrent en effet que les incivilités, les contacts avec les voisins et le capital social général ont des effets positifs sur la victimisation.

5.4-les facteurs individuels comme le sexe, l'âge, l'ethnie, la situation familiale, l'entente au sein de la famille et la situation de l'emploi des parents ont plus d'influence sur la victimisation des jeunes que les facteurs de type spatial et environnemental

Dans cette partie, nous nous intéresserons à l'influence que peuvent avoir les facteurs individuels sur la victimisation subie par les jeunes. Et voir si ces facteurs ont plus d'influence sur leur victimisation par rapport aux facteurs de type spatial et environnemental.

Comme nous l'avons signifié précédemment, la victimisation concerne quatre variables que nous allons prendre séparément pour voir lequel de facteurs individuel ou environnemental a le plus d'influence sur chacun.

5.4.1-Être obligé de donner de l'argent ou autres choses

Tableau 36 :

 

B

S. E

Wald

Df

Sig

Exp (B)

Sexe

.777

.266

8.504

1

.004

2.175

Entente avec la mère

1.197

.431

7.726

1

.005

3.310

Dégradation du quartier

1.286

.497

6.683

1

.010

3.617

Lieu naissance du père

.613

.250

5.995

1

.014

1.846

Entente avec le père

.807

.395

4.170

1

.041

2.242

Nagelkerke R Square : 0.064

A la lecture de ce tableau, nous constatons que la variable qui a le plus d'influence sur notre variable dépendante est le sexe. Il s'agit d'une variable de type individuel.

Au vu de la valeur de l'odd's ratio, nous pouvons interpréter le résultat de manière suivante : les garçons ont un risque deux fois plus élevés d'être obligés de donner de l'argent ou autre chose que les filles

Il faut cependant relativiser ce résultat en ce sens que le Nagelkerke indique que ce modèle n'explique que 6.4% de la variance.

5.4.2-Avoir été frappé ou blessé violemment

Tableau 37 :

 

B

S. E

Wald

Df

Sig

Exp (B)

Dégradation du quartier

1.525

.481

10.039

1

.002

4.595

Entente avec le père

.959

.341

7.908

1

.005

2.608

Lien naissance du père

.575

.246

5.473

1

.019

1.777

Entente avec la mère

.858

.415

4.267

1

.039

2.359

Nagelkerke R Square : 0.074

La variable ayant le plus d'influence sur notre variable dépendante est également la dégradation du quartier. Les jeunes des quartiers fortement dégradés ont un risque quatre fois plus élevés d'être frappé ou blessé violemment que ceux des quartiers faiblement dégradés.

Cette interprétation doit encore une fois être relativisée, en effet, le Nagelkerke indique que le modèle explique seulement 7.4% de la variance.

5.4.3-Le fait d'avoir été dépossédé de quelque chose

Tableau 38 :

 

B

S. E

Wald

Df

Sig

Exp (B)

Dégradation du quartier

.596

.313

3.637

1

.000

1.815

Lieu de naissance de la mère

.286

.092

9.659

1

.002

1.331

Lien affectif

.247

.093

7.086

1

.008

1.281

Entente avec le père

.405

.176

5.310

1

.021

1.500

Nagelkerke R Square : 0.117

Dans ce tableau, nous constatons une fois encore que c'est la dégradation du quartier qui a le plus d'influence sur notre variable dépendante. Les jeunes des quartiers fortement dégradés ont un risque plus élevés d'en être victime que ceux des quartiers faiblement dégradés. Le nagelkerke explique le modèle a 11.7% de la variance.

5.4.4-La maltraitance à l'école

Tableau 39 :

 

B

S. E

Wald

Df

Sig

Exp (B)

Entente avec le père

.730

.195

13.974

1

.000

2.075

Entente avec la mère

.687

.248

7.683

1

.006

1.987

Travail du père

.456

.240

3.608

1

.058

1.578

Nagelkerke R Square : 0.025

Concernant la maltraitance à l'école, c'est l'entente au sein de la famille notamment l'entente envers le père qui a le plus d'influence. Il s'agit d'un facteur de type individuel et les jeunes qui ne s'entendent pas avec leur père ou l'homme avec lequel ils vivent ont un risque deux fois plus élevés d'en être victime que ceux qui s'entendent avec leur père ou l'homme avec lequel ils vivent. Le nagelkerke n'explique cependant que 2.5% de la variance.

5.4.5- Synthèse

Concernant la victimisation, nous obtenons de résultats à peu près similaires à ceux de la délinquance. En effet, si au niveau de la délinquance, les facteurs propres aux individus étaient ceux qui augmentaient le risque de la réalisation de la délinquance. En ce qui concerne la victimisation, on a aussi bien des facteurs environnementaux et individuelles qui agissent sur les quatres types de victimisation défini dans notre sondage.

Cela pourrait venir du fait que dans un quartier dégradé, les jeunes délinquants sont non seulement acteurs de délinquance mais sont aussi dans une bonne partie des cas eux-mêmes victimes de ces actes. Ces quartiers devenus dégradés, ils sont la cible d'individus tels que des délinquants, des prostituées, des consommateurs et vendeurs de drogues. Pour ce qui en est des vendeurs de drogues, ils ont très souvent victimes de délinquance, de même que les consommateurs. (Aebi, 2006).

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway