4)
Construction des concepts
« C'est un fait amusant, parfois affligeant,
mais toujours paradoxal que les sociologues et anthropologues n'ont
guère su utiliser d'une manière collective les symboles
linguistiques ; ils ont la triste réputation de ne pas s'entendre
sur les termes. C'est donc peut être surtout au plan macrosociologique
que le vocabulaire devient le plus hésitant : les termes se
mêlent ou glissent sous nos doigts, la confusion est maîtresse
» (Roger, (G), 1968, P14).
Cette phrase exprime toute la nécessité de
définir les concepts que nous employons. Même si Marcel Mauss
pense qu'il s'agit de définition provisoire, E. Durkheim nous recommande
d'en faire une première tâche afin d'éviter les confusions
et de dire clairement aux autres ce qui est en question. Mais, quelle est la
portée sociologique de ce débat qui ressemble fort à une
polémique familiale entre Durkheim et son neveu Mauss ?
Définir les concepts dans une recherche revient à asseoir ses
bases scientifiques à savoir son universalité, sa
spécificité et son originalité. En effet, n'est-ce pas
dans les mots qu'il utilise que le sociologue se singularise par rapport
à l'économiste, au psychologue ou au juriste ? N'est-ce pas
aussi dans la conceptualisation qu'on reconnaît l'ancrage sociologique et
l'originalité d'un débutant en recherche ?
Pour se conformer à cette exigence, nous
définissons les concepts ci-après : automédication,
communication, déterminants sociologiques, information
vétérinaire, innovation technique, médecine
vétérinaire, prestataires de services vétérinaires,
sphères de relation, stratégie d'information et de communication,
système de représentations sociales et utilisation rationnelle
des médicaments/trypanocides.
a)
Automédication
C'est le choix et la prise de médicament sans avis
médical selon le Petit Larousse illustré (1992). Ce concept a
reçu plusieurs définitions dans le domaine de la santé
humaine. Elles mettent en exergue les différentes conceptions de
l'automédication. Mais, nous nous appuyons sur la définition
donnée par Roger Zerbo (2002) pour élaborer une acception qui
soit applicable à la santé animale. Prenant acte des
définitions usuelles en sociologie et anthropologie de la santé,
ce dernier dira que
l'automédication « caractérise une situation
dans laquelle une personne entreprend d'acquérir un médicament
pharmaceutique et de se faire un traitement médical sans aviser un
spécialiste en la matière » (Zerbo, 2002, P22-23).
L'existence d'un mal vécu ou son soupçon et l'assistance
médicale sont au fondement de son acception. D'où en dernier
ressort, il pense que c'est « une forme autonome de soin
où le patient devient lui-même son propre médecin, une
thérapie présomptive sans assistance
médicale » (Zerbo, 2002, p 23).
Appliquer à notre contexte, le concept
« d'assistance médicale » est à
relativiser. Est-ce qu'une personne qui va acheter son médicament en
pharmacie avec ou sans ordonnance n'est pas assistée
médicalement ? Est-ce qu'une personne qui se soigne lui-même
en demandant conseil et aide d'un quelconque spécialiste en la
matière n'est pas médicalement assistée ? Est-ce
qu'un spécialiste de la santé qui vend des médicaments ou
effectue des traitements non conformes aux règles et lois en vigueur
dans le pays ne pose-t-il pas un acte d'automédication ? Nous
pensons qu'il faut prendre en compte et au sérieux sa dimension
juridique et institutionnelle dans la mesure où ce fait
d'automédication est présent aussi bien du côté des
demandeurs de médicaments et de soins que de celui des fournisseurs.
C'est pourquoi, nous dirons tout simplement que l'automédication est un
acte de choix et de prise de médicament avec ou sans assistance
médicale par une personne malade ou soupçonnée
l'être. C'est un acte de choix et de prise de médicament
médicalement et socialement assisté ou pas, accompli par un
éleveur pour prévenir ou guérir son bovin malade de la TAA
ou soupçonné l'être.
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