CHAPÎTRE II- LES EXIGENCES
FONDAMENTALES, INDISPENSABLES AU PROGRÈS SOCIAL
Pour que se réalise un progrès social et
intégral au service de l'être humain et dans le respect de sa
dignité, certaines dispositions psychologique, spirituelle et morale
sont indispensables.
L'être humain pour lequel ce progrès se
réalise, doit avoir la forte conviction qu'il peut et qu'il doit oeuvrer
à améliorer ses propres conditions de vie pour son propre
épanouissement et celui de toute la société. Il faut donc
une prise de conscience de la nécessité du progrès social
et économique, pour que ce progrès soit réalisable,
en ayant comme référence la loi de Dieu, afin que ce ne soit pas
un sursaut d'orgueil qui le sépare de Dieu.
Dans le cas ici traité, qui concerne l'homme bo, il
faut que les Bwa prennent conscience du progrès qui doit s'opérer
d'abord dans leurs mentalités pour qu'enfin ils puissent traduire
concrètement cette conviction dans leurs manières de vivre et
d'agir.
L'agir du bo chrétien doit traduire avant tout, sa foi
chrétienne, sa conception de l'être humain et de la
création. Une prise de conscience de la misère est le premier pas
à tout engagement pour la promotion humaine. Car on ne peut chercher
à evoluer si on ne prend pas conscience de son retard par rapport au
niveau des autres.
L'imaginaire de l'homme bo, sa vision du monde et sa
conception de la vie et de la mort sont entre autres les causes du
sous-développement.
Aujourd'hui, il existe dans nos sociétés des
genres de comportements et de pratiques qui ne favorisent nullement pas le
progrès social. Beaucoup de pratiques rendent les tentatives de
développement très problématiques et peuvent même
les vouer d'avance à l'échec.
D'où l'impérative mission pour les nouvelles
générations d'oeuvrer à faire évoluer ces
mentalités vers le bien, pour vaincre le drame de la misère et de
la pauvreté chez les Bwa. Et les nouvelles générations de
fidèles chrétiens qui sont plus ou moins de cette mission doivent
être les premiers acteurs afin d'entraîner avec eux toutes les
couches sociales au développement.
II-1 LES CONFLITS SOCIAUX ET LEURS
IMPACTS SUR LE DÉVELOPPEMENT
Les conflits entre communautés villageoises se soldent
très souvent par une haine à mort et une destruction
réciproque entre groupes sociaux. Car une idée trop
poussée de la communauté villageoise ou de l'ethnocentrisme
créé également un individualisme exacerbé, limitant
la solidarité à l'unique clan dont on veut préserver les
secrets et les traditions par tous les moyens, même au détriment
des autres clans que l'on cherche à anéantir.
Des conflits entre communautés claniques datant de plus
d'un demi-siècle continuent de faire encore des victimes dans nos
villages.
Certains projets d'aide au développement sont
refusés et orientés vers d'autres zones parce que les groupements
de villages qui étaient les bénéficiaires n'arrivent pas
à s'entendre.
Plusieurs projets de constructions d'établissement
scolaires dans le Bwatun ont échoué par le fait que les villages
qui étaient désignés comme les bénéficiaires
directs entretiennent encore de vieux conflits animés par des
perturbateurs sociaux toujours aux argueux, toujours prêts à
réveiller les vieux démons et établissant un blocage dans
les tentatives de réconciliation. Plus d'un établissement
scolaire financé par les ONG de la place ont été
construits dans des carrefours en pleine brousse. Car les
bénéficiaires entretiennent de vieux conflits claniques, et
chaque partie refuse que l'établissement porte tout simplement le nom de
l'un ou l'autre des villages.
Ce sont là des attitudes qui ne favorisent en aucune
manière ni la communion, ni la paix, ni le développement d'une
zone.
L'Eglise est davantage attendue chez les Bwa, à
être sans cesse le signe de la réconciliation et
l'éveilleuse de consciences. Elle est invitée à être
le signe et le lieu de la nouvelle unité, à être le nouveau
« Do » symbole de l'unité des bwa, pour que le
progrès social soit possible. C'est le défi que les pasteurs
d'aujourd'hui doivent impérativement relever, résoudre ces
conflits entre villages pour qu'un progrès social soit possible.
Comment développer un peuple aussi parsemé de
rivalités? Comment faire progresser des gens qui ne veulent pas
avancer?
Il faut donc convertir les mentalités,
réconcilier l'homme bo avec lui-même pour prétendre
à un quelconque progrès économique.
Telle devra être la mission de l'Eglise au Bwatun,
rendre l'évangile présent dans les coeurs des Bwa pour
créer, au delà des communautés villageoises et claniques,
une communauté d'enfants de Dieu, réconciliés et
rassemblés dans/autour le Christ. L'Evangile sauve l'homme bo, dans la
mesure où il arrivera à rassembler les Bwa, hommes et les femmes,
au delà des différences claniques. Et l'Evangile ne sera Bonne
Nouvelle pour les Bwa que dans la mesure où il aura recréé
ce peuple en le délivrant de tout ce qui est obstacle à son
unité.
En éclairant l'homme bo sur sa réalité
sociopolitique et culturelle, l'Evangile lui permettra de quitter les champs du
fatalisme, qui le rend toujours démissionnaire face aux formes de
misère, pour enfin les pousser à l'action dans
l'abnégation et dans l'incitation à la créativité
dans une responsabilité personnelle et collective.
Avant tout, l'homme bo a soif de Dieu, comme l'exprimait
Mère Teresa que « la première pauvreté des peuples
est de ne pas connaître le Christ. Les gens ont faim de Dieu. Les gens
ont soif d'amour. En sommes-nous conscients ? Le savons-nous ? Avons-nous des
yeux pour le voir ?... Nous devons ouvrir les yeux et voir » disait-elle.
D'où la nécessité de l'inculturation, mettre la Parole de
Dieu au coeur, au centre et au sommet de la vie de l'homme bo pour que le
progrès social soit possible. Etablir le lien entre la vie de foi et le
vivre quotidien est la condition sine qua nom à tout éventuel
progrès social chez les Bwa aujourd'hui.
|