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Demande du riz importé, demande et offre du riz produit localement au Togo: une étude économétrique( Télécharger le fichier original )par Tchabletienne KOMBATE Université de Lomé (Ecole Supérieure d'Agronomie) - Ingénieur Agroéconomiste 2008 |
3.3. Analyse de la production et de la consommation de riz au Togo3.3.1 Production du riz au TogoA. Systèmes de production du riz au Togo Le riz est produit dans toutes les régions du Togo dans des exploitations pour la plus part individuelle. Ces exploitations sont à majorité multi culturales avec le nombre de cultures qui varie non seulement d'une région à l'autre, mais aussi d'une année à l'autre en fonction de l'influence de la conjoncture sur les décisions des producteurs. B Facteurs déterminants de la production du riz au Togo La production quantitative du riz au Togo est influencée comme dans la plupart des pays africains par plusieurs facteurs parmi lesquels : les facteurs techniques et naturels, les facteurs économiques et les facteurs institutionnels semblent être les plus importants. - Facteurs techniques et naturels Les facteurs techniques et naturels sont subdivisés aux facteurs liés aux conditions agroclimatiques et météorologiques, aux matériels végétaux utilisés, aux superficies utilisées, aux conduites de la culture et aux manipulations du paddy après la récolte. Il est admis que les conditions agroclimatiques et météorologiques jouent un rôle très important dans la production agricole dans la mesure où la croissance et le développement des cultures en sont tributaires. L'un des facteurs agroclimatique et météorologique de la production du riz est le niveau de pluviométrie avant ou pendant le semis ou pendant la récolte. En effet, la pluie joue généralement un rôle important dans la production du riz. Ces conditions conditionnent l'existence de différentes zones de production de riz au Togo. Ainsi, trois types de rizicultures sont pratiqués au Togo en fonction des zones agroclimatiques avec cependant un poids et des potentialités très différentes :
Le tableau 3.1 ci-dessous montre que le Togo a une potentialité estimée à 1128,5 ha de superficies irrigables en 1996 alors que seulement 364 le sont actuellement, ce qui représente 32,25 % de toutes les superficies irrigables. La situation d'aménagement de ces superficies irrigables n'a pas évolué jusqu'à aujourd'hui. Actuellement, seul un projet de réhabilitation et d'aménagement de 660 ha pour l'intensification de la production du riz dans la vallée du Zio, a été décidé et couvrira la période 2005 à 2010. D'un montant de cinq milliards de francs CFA ; ce projet est financé par le Fond Saoudien de Développement (FSD) et la Banque Arabe pour le Développement Economique en Afrique (BADEA). Bien que son lancement officiel ait été effectif en 2007, mais les travaux n'ont pas encore débuté et à ce jour aucune action allant dans le sens de l'avancement de ce projet n'est encore entreprise.
Le potentiel de bas-fond tel qu'identifié par les images du satellite Spot serait au minimum de 50000 hectares (SOFRECO, 1996). Selon Agbogbli et Tétévi (2004), des démarrages des projets d'aménagement de nouveaux sites de productions ont été retardés par la crise sociopolitique que connaît le Togo. Il s'agit des projets suivants : projet basse vallée du Mono, projets OTI et Kpendjal, etc. Tableau 3.1 : Situation des surfaces irriguées et irrigables en hectare
Source : SOFRECO, 1996 Le matériel végétal utilisé est un élément essentiel dans la production en ce sens qu'il détermine en grande partie le rendement de la culture et la qualité organoleptique. Il faut cependant reconnaître qu'en ce qui concerne le riz, la variété de semences utilisées pour la production conditionne pour une part non négligeable la demande des consommateurs. Dans la vallée du Zio où la riziculture irriguée est essentiellement pratiquée, les variétés utilisées sont IR841 et TGR1. Selon Agbogbli et Tétévi (op. cit.) ces deux variétés sont les plus appréciées par les consommateurs. Les riziculteurs togolais utilisent généralement des semences soit prélevées directement sur la production de la campagne précédente, soit achetée auprès des producteurs de semence. Ces derniers se procurent des semences de base à Sotouboua, les multiplient et les vendent aux producteurs entre 250 et 300 F CFA le kilogramme. Les riziculteurs utilisent 60 à 80 kg de semences pour une pépinière d'un hectare. Les produits des semences améliorées sont alors utilisés pendant 3 campagnes avant d'être remplacés (Djélé, 2005). La conduite des cultures après le semis constitue aussi un élément essentiel pour la production qualitative du riz. Le taux de protéines dans les grains après la récolte dépend de l'assimilation des fertilisants azotés pendant la culture. Il est connu que les apports fractionnés d'azote permettent à la plante de mieux l'assimiler. C'est ainsi qu'un même apport azoté fractionné fournira à la récolte un meilleur taux de protéines qu'un apport non fractionné qui coûte cependant moins cher en terme de travail. Selon Yankam (2004), les coûts additionnels engendrés par les apports fractionnés ne sont pas toujours compensés et redistribués par le marché. Il paraît donc plus économique pour les producteurs de faire que des apports azotés non fractionnés, ce qui pourrait expliquer l'utilisation dans les rizicultures uniquement que des engrais composés, surtout le NPK pour la fertilisation. Cependant, les apports d'engrais ne se font pas en quantité suffisante. Il y'a une disparité lorsque l'on remonte vers le nord du pays. En effet, bien que les superficies rizicoles soient plus grandes dans ces régions du Nord, elles ne bénéficient pas généralement d'un certain nombre d'appuis techniques, financiers et d'aucun aménagement. Cette réalité combinée au fait que la pauvreté sévit plus au Nord5(*), les riziculteurs ont du mal à faire face aux dépenses d'exploitations. Tout ceci explique d'ailleurs le faible rendement observé dans les régions du Nord. - Facteurs économiques et institutionnels Ces facteurs sont constitués essentiellement par les prix au producteur et les prix des facteurs de production. L'évolution des prix au producteur est donnée par la figure 3.3 ci-dessous. L'évolution du prix réel au producteur s'est faite selon deux (2) périodes ; celle avant et après dévaluation. Entre 1980 à 1993, les prix réels au producteur ont connu une baisse moyenne de 2,9 % par an, alors que pendant cette même période, la production a connu une hausse de 7 % en moyenne par an (figure 3.4). C'est dire que l'offre de riz paddy n'a pas subi la même évolution que celle du prix réel au producteur. Après la dévaluation ces prix réels ont connu une faible augmentation, soit 0,8 % en moyenne par an. Mais l'augmentation des prix n'a pas permis une hausse considérable de la production du riz paddy. Figure 3.3 : Évolution du prix réel au producteur du riz paddy de 1980 à 2006 Source : À partir des données de la DSID, 2007 La décision des riziculteurs est déterminée par le rapport coût/bénéfice. Les coûts sont liés à l'acquisition des semences, des intrants de production, à la main d'oeuvre et à la location de la terre. La majorité des riziculteurs cultivent des terres louées, ils représentent près de 73 % dans la vallée du Zio (Djélé, 2005). Les contrats de location ne sont pas toujours signés prédisposant les locataires à une insécurité foncière ; limitant ainsi les investissements et l'adoption des nouvelles technologies de production. Les locations sont payées soit en nature ou soit en espèces. Dans la vallée du Zio par exemple les frais de location sont de 25000 FCFA/ha ou 1 sac de riz blanc de 100Kg pour un hectare (Djélé, op.cit.). Les intrants dans la riziculture sont essentiellement constitués par les engrais, les herbicides et les insecticides. Ces intrants sont utilisés en grande partie dans la région maritime avec une moyenne à Kovié de 250 kg/ha d'engrais ; soit 150 kg/ha de NPK et 100 kg/ha d'urée (Meertens, 2001). ACCP/Care International recommandait dans la vallée du Zio 300 kg/ha de NPK (6 sacs) et 150 kg/ha urée (3 sacs) pour un rendement de 3,5 tonnes de riz blanc/ha. Bien que ces recommandations permettent d'augmenter les rendements de riz,, la situation économique des riziculteurs ne permet pas de les respecter. Ceci est démontré par le faible niveau d'engrais qu'utilisent en moyenne les riziculteurs dans la vallée du Zio. Au Togo le prix des engrais vivriers était subventionné par l'État jusqu'en 2006. Il convient également de préciser que les situations économiques de la plupart sinon de presque tous les riziculteurs constituent un frein à l'augmentation de la production. Ceux-ci sont dans une situation d'endettement, situation qui ne leur permet plus d'accéder à d'autres crédits. Les dépenses pour un hectare de riz dans la vallée du Zio sont estimées à 640250 FCFA par l'ITRA/CRAL (Ani et al, 2001). Une dépense à laquelle ne peut faire un riziculteur moyen sauf s'il n'a accès aux crédits ce qui est très difficile dans la mesure où la filière riz au Togo est laissée pour compte et ne reçoit aucune attention, sinon quelques-unes, mais de façon très timide. Bien que le riz soit devenu une denrée d'enjeux importants en Afrique de l'Ouest, au Togo il semble que les autorités gouvernementales n'ont pas encore compris le grand enjeu que cette denrée représente aujourd'hui et représentera dans un proche avenir. Dans tous les cas, la riziculture togolaise est laissée pour compte et aucune action n'est alors entreprise jusqu'à aujourd'hui pour relancer la production. N'ayant pas accès aux crédits comme c'est le cas dans la filière coton les riziculteurs sont pour la plupart dans une situation de précarité. Cependant, une certaine attention est portée sur la riziculture dans la vallée du Zio ; elle reçoit des crédits de la part de l'OSAT et des ONG. Il paraît alors évident que la réhabilitation et l'aménagement des exploitations rizicoles les plus importantes dans les autres régions ne sont pas encore à l'ordre du jour bien que ce soit ces régions qui fournissent la plus grande partie de la production. Selon Agbogbli et Tétévi (op. cit.), les opérations de joint-venture entre l'OSAT et les producteurs de la vallée du Zio sont l'une des initiatives en cours pour promouvoir la production nationale de riz au Togo. L'OSAT est une structure créée au sein du département chargé de l'agriculture par décret n° 97/117/PR du 20 aout 1997 avec pour mission de réguler les prix des denrées alimentaires de base et d'assurer l'autosuffisance alimentaire. Cette structure a mis en place le financement de la production du maïs et riz, afin de garantir les besoins en céréales nécessaires à la constitution de son stock de sécurité destinée à la régulation des prix en période de soudure. Le tableau suivant montre l'évolution des financements de l'OSAT aux riziculteurs de la vallée du Zio. Tableau 3.2 : Évolution des montants des crédits octroyés par l'OSAT dans le périmètre
Source : OSAT, 2007 Djélé (2005) en analysant les actions de l'OSAT affirme que les actions de cette structure ne sont plus appréciées par les riziculteurs. Ces derniers pensent que l'OSAT, au lieu de se limiter à sa mission qui est de constituer des stocks de sécurité et de les libérer au moment de soudure pour régulariser les prix de marché, vend plutôt son riz mis en stock au même moment. Il est devenu pour les producteurs un concurrent sur le marché. C. Évolutions de la production Comme la plupart des pays africains, le Togo occupe une position relativement marginale dans la production de riz en Afrique de l'Ouest. En effet, la production de riz au Togo ne représentait que 3,25 % de la production totale de riz en Afrique de l'Ouest en 2006 comme le montre le tableau suivant. Tableau 3.3. Évolution des superficies cultivées et de la production dans la zone UEMOA en 2006
Source : FAOstat cité par Abiassi et Eclou (2006) L'évolution des superficies rizicoles au Togo est montrée par la figure 3.3 ci-dessous. De 1981 à 1993, ces superficies ont évolué en dent de scie entre 18000 à 28200 ha. En 1994, elles ont atteint leur premier pic (52725 ha). Évaluées à 57442 ha en 1996 les superficies rizicoles sont estimées aujourd'hui à 35000 ha (2006), soit une diminution de 39 %. Bien que cette diminution ait été compensée par une faible augmentation des rendements,6(*) elle reste préjudiciable à l'économie rizicole au Togo puisque pendant cette période, les productions ont connu une chute de 13 %. Figure 3.4 : Évolution des superficies cultivées de riz au Togo de 1980 à 2006 Source : À partir des données de la DSID, 2007 L'évolution de la production de riz au Togo est représentée par la figure 3.4 ci-après. Cette figure montre l'évolution de la production du riz paddy et celle du riz décortiqué. Cette figure montre que la production rizicole au Togo n'a amorcé sa véritable augmentation qu'à partir de 1992 pour atteindre son pic de 86700 tonnes de riz paddy en 1998. Après cette date la production a connu une baisse pour revenir à 62307 en 2000. Depuis lors, elle amorce une augmentation timide. Figure 3.5 : Évolution de la production du riz paddy et décortiquée au Togo de 1990 à 2005 Source : À partir des données de la DSID, 2007 * 5 Au Togo les paysans sont plus pauvres au Nord qu'au Sud, il en est d'ailleurs de même pour toute la population * 6 Les rendements de riz sont passés de 1.4t/ha en 1996 à 2.75t/ha en 2003. |
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