Musique Numérique( Télécharger le fichier original )par Pierre-Louis Gatineau ISCOM-Paris - Master 1 Communication 2009 |
AnnexesAnnexe n°1 :- Interview de Jean Pelletier, directeur de la communication - chargé des relations extérieures de la Société civile pour l'Administration des Droits des Artistes et Musiciens Interprètes (ADAMI), mars 2009. Présentation de l'intervenant : Jean PELLETIER, né le 11 juin 1 952, ancien élève de l'institut d'études politiques de Paris et titulaire d'une Maîtrise de Lettres à l'Université de Nancy2. Enseignant à l'Université d'Évry Val d'Essonne au département "Administration de la musique et du spectacle vivant", Directeur des Relations Extérieures de l'ADAM I (Société civile pour l'administration des droits des artistes et musiciens interprètes). Présentation du mémoire : Je réalise un mémoire qui porte sur les nouvelles pratiques de consommation des oeuvres culturelles en France. Les modèles commerciaux qui régissent la situation de l'industrie musicale sont manifestement en crise. Cette crise serait liée à l'essor de nouvelles technologies et de l'Internet qui conduisent à redéfinir les pratiques de diffusion et d'échanges des oeuvres musicales. L'entrecroisement d'enjeux économiques, culturels, idéologiques et politiques entraînerait des conflits entres les différents acteurs de l'industrie musicale et son public. Tous ces constats m'amènent à une première conclusion : Le système est actuellement dans une impasse. 1 - Partagez vous ce constat ? Tout à fait, finalement ce problème
dépasse de loin celui de la création, c'est liées aux technologiques numériques qui remettent en question les pratiques sociales et culturelles. 2- Quelle est la position de l'ADAMI concernant les initiatives législatives du gouvernement (DADVSI & HADOPI) ? L'ADAMI a eu plusieurs visions sur ce phénomène. Pendant le débat de la loi DADVSI, l'ADAMI et ses partenaires ont proposé le concept de la « Licence Globale » (dont les bases juridiques ont été élaborées à l'ADAMI) Par la suite un partenariat s'est créé avec d'autres sociétés et plus particulièrement l'alliance « Public Artiste ». Si l'amendement de la « Licence Globale » avait été retenu à l'époque, au regard du nombre d'abonnements ADSL aujourd'hui, cela représenterait 1,4 milliards d'euros par an ! En ne voulant pas adapter le code de la propriété intellectuelle, la filière de l'industrie musicale dont le chiffre d'affaire annuel est d'environ 600 millions d'euros, est passée à côté d'une formidable occasion de compenser ses pertes... En adoptant cette position, l'ADAMI s'est coupée de son milieu naturel, mise à l'index de la SACEM, SACD, producteurs et acteurs de la création qui étaient tous opposés à la « Licence Globale ». Face à cette situation, la « petite » ADAMI a choisi de réintégrer son milieu naturel en adoptant une stratégie de retrait, tout en continuant de soutenir ses positions initiales. Vis-à-vis du projet HADOPI, l'ADAMI restera neutre lors du vote, mais dénonce le manque d'utilité et de faisabilité du projet. Finalement cette cause ne nous intéresse guère car à aucun moment elle n'envisage la moindre rémunération pour les artistes interprètes et tous les amendements qui ont été présentés aussi bien au Sénat qu'à l'assemblée ont systématiquement été rejetés. Le droit n'est plus du tout adapté à la réalité, il en est même contradictoire. Je me suis demandé pendant les débats DADVSI, comment on avait pu en arriver là... Je me suis rendu compte que dans les sociétés de gestion, les maisons de disques, « les majors », tous les décisionnaires et dirigeants se faisaient imprimer leurs mails par leurs secrétaires ! C'est une image bien sûr mais cela souligne à quel point ceux qui décident de l'avenir du monde sont littéralement « arriérés » face aux nouvelles technologies, ça fait froid dans le dos... 3- Finalement, le business model de l'industrie musicale, basé sur une économie de support, semble largement menacé, non pas essentiellement par les échanges illégaux mais surtout par la mort du CDROM. Partagez vous ce constat ? Bien entendu, l'économie de support est en train de disparaître et c'est bien cela qui constitue un épisode périlleux dans l'histoire de l'industrie du disque. Son manque de réactivité lui a déjà coûté des centaines de millions d'euros ! Notez que dans un sens, le fichier MP3 est lui aussi un support car il faut le stocker. Ce n'est pas en basant son offre commerciale sur le téléchargement payant de titres que l'industrie va réellement réajuster son économie. La solution c'est le streaming ! C'est un peu comme l'eau qui coule du robinet, on n'est pas obligé d'y mettre un jeton chaque fois que l'on veut un verre d'eau ! C'est cela que l'industrie doit comprendre. Des solutions allant dans ce sens on déjà été proposées, on y arrivera quoi qu'il arrive, c'est dommage d'avoir perdu tout ce temps... Que pensez-vous des campagnes de communication menées par l'Etat et l'industrie ? Croyez-vous qu'elles ont un impact, qu'elles génèrent la prise de conscience escomptée auprès du public ? C'est trop tard, beaucoup trop tard... ces lois, ces campagnes, cette logique auraient eu leurs intérêts il y a dix ans... Ce n'est pas le bon angle. La première fois que j'ai expérimenté le P2P il y a quelques années, j'ai eu froid dans le dos. Cela m'a donné l'impression de me réveiller au milieu des rayons de la FNAC seul, en pleine nuit, personne, pas de vigile, je peux prendre ce que je veux... c'est l'effet que cela m'a fait à l'époque. Bref, ces campagnes suivent un axe de répression du piratage mais on est déjà plus dans le piratage ! Quand j'entendais les parlementaires à l'assemblée parler sans cesse de P2P j'ai réalisé à quel point ils étaient dépassés par les événements. On légifère contre le téléchargement et le stockage illégal alors que la musique devient aussi volatile qu'un courant d'air avec le streaming... il n'y a plus de piratage... Ce n'est pas la bonne méthode. Sur ce sujet le gouvernement n'a eu de cesse depuis plusieurs années de stigmatiser les gens, de créer des clivages, d'éloigner l'artiste de son public, sous l'influence des producteurs bien entendu... Dans le triptyque artistes-producteurs-publics, les producteurs devraient comprendre qu'ils ne sont pas les maîtres du monde ! Sans création que vont- ils produire ? Et sans public qui écoutera la création ? Le producteur a un rôle loin d'être négligeable mais il faudrait qu'il cesse de se mettre constamment au devant de la scène et de passer pour une victime sans qui rien n'existerait... Quand on voit la manière dont-ils traitent les associations de consommateur et font pression sur les artistes interprètes... Et « jaimelesartistes.fr » ? Propagande ! C'est comme la liste des 1 00.000 artistes de la SACEM ! Madame Albanel n'a pas tous les artistes avec elle, certains sont bâillonnés par leurs producteurs pieds et poings liés financièrement... et puis il faut aussi comprendre que de nombreux artistes ne sont pas de cette époque et ils ont très légitimement la sensation de se faire voler... |
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