INTRODUCTION
« Les politiques rizicoles décidées
par les Etats... n'ont pas eu l'effet désiré sur l'essor de la
production dont le niveau se situe très en deçà de ce
qu'il devrait être » (Roger-Estrade ,1993).
Si l'échec des politiques rizicoles, mises en oeuvre par
les Etats, en Afrique subsaharienne, permet une remise en cause de l'action
gouvernementale dans ce secteur, la recherche de nouvelles orientations est
opportune.
Comment sauvegarder les productions nationales face aux
importations et assainir les économies sans être induit au
protectionnisme stérile ?
Quel avenir pour la culture du riz au Togo, si une
réflexion appropriée n'intègre à sa
démarche, les éléments d'une amélioration
quantitative et qualitative de la production nationale ?
Cette étude, intitulée : ECONOMIE DE LA
CULTURE DU RIZ : CAS DU PERIMETRE IRRIGUE DE KOVIE, veut contribuer
à démêler l'écheveau.
C'est donc à partir de la définition des
caractéristiques techniques, socioculturelles et économiques de
la production sur le périmètre de KOVIE et de l'analyse des
données recueillies sur le terrain que transparaîtront :
- les forces et faiblesses de cette culture dans son
environnement politique et économique ;
- les possibilités de développement de la
riziculture.
Tour à tour, on présentera : la
problématique, les objectifs de l'étude, les hypothèses de
travail et la revue bibliographique ; ensuite le cadre institutionnel et
la méthodologie de l'étude seront décrits et enfin nous
présenterons et analyserons les résultats de l'étude.
PREMIERE PARTIE
PROBLEMATIQUE, OBJECTIFS ET HYPOTHESES
DE TRAVAIL,
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1 - PROBLEMATIQUE
« Presque inconnu il y a vingt ans sauf au
Sénégal, le riz prend une place sans cesse plus importante
dans la consommation des pays de l'Afrique de l'Ouest » (Roger-Estrade,
1993).
En effet, il n'est point besoin aujourd'hui de
démontrer la place principale qu'occupe le riz dans les habitudes
alimentaires dans nos pays en voie de développement. Longtemps
considéré comme un produit de luxe, le riz tend à devenir
la denrée de base, consommée par presque, toutes les classes
sociales. Face aux céréales traditionnelles que sont le
maïs, le sorgho le mil etc., la concurrence est ouverte et
favorisée par le mode de vie citadine.
Notons cependant, que si la consommation du riz dans les pays
africains ne cesse de croître, le produire suffisamment devient l'une des
préoccupations des gouvernants parce que l'auto-approvisionnement de
cette denrée est encore très problématique.
Aussi pouvons-nous lire : « le cas du riz est
un bon exemple de dépendance accrue de ce continent vis-à-vis de
l'extérieur » ou encore «dans les 25 dernières
années, l'Afrique est devenue un des principaux pôles
d'importation avec environ un quart des importations mondiales du
riz » (MENDEZ-DEL-VILLAL, 1989).
Les prévisions de la FAO concernant les pays de l'UEMOA
parmi lesquels se trouve le Togo, permettent de juger de l'importance des
besoins complémentaires auxquels l'Afrique doit faire face chaque
année, pour répondre aux demandes de sa population «la
production rizicole ne couvre qu'à peu près la moitié de
la consommation. » (FAO, 1994)
Si le bilan rizicole est déficitaire presque partout en
Afrique, qu'en est-il exactement de la production rizicole du Togo ?
Depuis 1970, le Togo fait partie des 16 pays de l'ADRAO
(Association pour le Développement de la Riziculture en Afrique de
l'Ouest) dont le principal objectif est d'aider les pays membres à
atteindre l'autosuffisance en riz, par le biais de la recherche dans le domaine
de la riziculture.
Malgré les plans de développement agricole
élaborés par les pouvoirs publics, notamment :
- L'appel au retour à la terre en
1973 ;
- La proclamation de l'année du paysan en
1975 ;
- La révolution verte en vue de
l'autosuffisance alimentaire en 1977... (TOKPA, 1996)
- L'exonération des taxes
douanières sur les équipements et matériels
destinés uniquement à l'agriculture ;
- La mise en place des services d'encadrement
technique des paysans ;
- L'aménagement des
périmètres rizicoles mis gratuitement à la disposition des
riziculteurs... (BAKAYOKO, 1998) ; la production rizicole
reste déficitaire.
L'examen des statistiques relatives à la culture du riz
au Togo, (tableaux 1 et 2, page 5) suggère les observations
suivantes :
- Les besoins de la population en riz
décortiqué n'ont cessé de croître depuis 1989. La
production durant cette période est restée insuffisante sauf en
1997.
- Bien que la consommation croisse durant cette
période, la production nationale est restée presque stationnaire.
Le Togo a donc multiplié les importations de riz avec une moyenne
annuelle de 2,163 milliards de F CFA avant la dévaluation du FCFA le 11
janvier 1994 contre 2,576 milliards après cette date.
Sachant que la dévaluation du F CFA était de 50
%, l'analyse du montant des importations montre une baisse significative des
importations, qui pourrait être mise au bénéfice de la
production nationale dont la compétitivité a été
rehaussée par ce fait, face aux riz importés d'Asie.
Cette analyse est avant tout, confortée par les
observations suivantes relatives aux pratiques d'avant dévaluation et
d'après. Avant le 11 janvier 1994, la production nationale était
instable ; 27 700 T*(*)
de paddy en 1989 contre 25 100 T en 1990 ; 39 300 en 1991 contre 25 300 T en
1992 etc. Après cette date, elle croît exceptionnellement.
La moyenne annuelle de production est actuellement de 66 000
T contre 30280 T de 1989 à 1994, soit une augmentation moyenne annuelle
de plus de 117 %.
Quelles sont donc les caractéristiques de l'agriculture
pratiquée sur les périmètres rizicoles au Togo ?
- Sommes-nous en train de passer d'une riziculture
traditionnelle à une riziculture modernisée au Togo ?
- Quels sont les systèmes de production en vigueur
dans les rizières togolaises ?
- Quels sont les fondements politiques, économiques et
techniques d'aménagement des rizières au Togo ?
Tableau 1 : EVOLUTION DES SUPERFICIES, DE LA
PRODUCTION DE PADDY, DES IMPORTATIONS DES VALEURS DOUANIERES, DES PRIX SUR LES
DIFFERENTS MARCHES ET DES BESOINS DE LA POPULATION
Années
Données
|
1989
|
1990
|
1991
|
1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
Superficie (ha)
|
19.900
|
19.200
|
24155
|
13650
|
28200
|
52725
|
41916
|
57442
|
31675
|
-
|
Production Paddy(T)
|
27700
|
25100
|
39300
|
25300
|
34000
|
50100
|
51200
|
76500
|
86200
|
-
|
Production riz
Décortiqué (T)
|
18005
|
16400
|
25563
|
16445
|
22100
|
32565
|
33280
|
49725
|
56030
|
-
|
Evolution des importations (T)
- riz paddy
- riz décortiqué
- riz semi- blanchi
- riz en brisure
|
12,4
644,2
23606,5
13271,2
|
69,9
193,5
9832,5
16719,8
|
9,1
65,8
14555,8
11179,9
|
282,3
610,3
13793,7
9407,3
|
326,5
57,1
16526,9
13307,2
|
-
-
-
-
|
52
253
2268
9430
|
11
375
19300
17529
|
16,3
79
31297,8
5384,9
|
-
-
-
-
|
Valeur Douane
(Milliard FCFA)
|
3,417
|
2,128
|
1,796
|
1,591
|
1,882
|
-
|
1,380
|
3,525
|
2,822
|
-
|
Evolution des Prix
(CFA / kg)
Marchés ruraux
- riz paddy
- riz décortiqué
Marchés de Conso
Riz décortiqué
|
80
173
215
|
68
131
-
|
-
-
-
|
93
140
-
|
66
139
-
|
99
179
285
|
116
204
326
|
147
244
357
|
140
256
405
|
-
-
407
|
Besoins de la population
En riz décortiqué (T)
|
34306
|
95301
|
40000
|
41000
|
46336
|
47336
|
48803
|
50316
|
51876
|
53484
|
|
Sources : Direction de la
Statistique et Direction générale des douanes
Tableau 2 : VARIATION EN POURCENTAGE DES
SUPERFICIES, DE LA PRODUCTION EN RIZ DECORTIQUE ET DES PRIX RURAUX
Années
|
Variation en pourcentage
|
|
Production du riz décortiqué
|
Prix ruraux
|
1989
|
(19.900 ha)
|
18.005T)
|
173 F CFA / kg)
|
1990
|
-3,5
|
-9
|
-24,3
|
1991
|
+26
|
+56
|
-
|
1992
|
-43,5
|
-35,7
|
+7
|
1993
|
+106,6
|
+34,4
|
-0,7
|
1994
|
+87
|
+47,4
|
+29
|
1995
|
-20,5
|
+2,2
|
+14
|
1996
|
+37
|
+49,4
|
+19,6
|
1997
|
-45
|
+12,7
|
+5
|
1998
|
-
|
-
|
-
|
|
Sources : Nos calculs à partir
des données de la DESA et de la Direction de la Statistique.
Figure 1 : HISTOGRAMME MONTRANT LA
VARIATION EN POURCENTAGE DES SUPERFICIES, DE LA PRODUCTION EN RIZ DECORTIQUE
ET DES PRIX RURAUX COMPAREE AUX DONNEES DE L'ANNEE 1989
Année de Base : 1989
: 19900 ha
: 18 005 Tonne
: 173 F cfa/Kg
La riziculture au Togo connaît un nouveau dynamisme. Il
importe de connaître les tenants et les aboutissants de cette
filière à travers l'étude de l'économie de la
culture du riz.
Telles sont les motivations qui sous-tendent notre
étude dans la zone rizicole irriguée de KOVIE.
1.2 - OBJECTIFS DE
L'ETUDE
Objectif général :
Contribuer à l'étude des systèmes
productifs rizicoles au Togo en vue de déterminer les facteurs
favorables et défavorables à la promotion de la culture du
riz.
Objectifs spécifiques :
- Déterminer la disponibilité,
l'accessibilité et l'efficience des facteurs de productions (terre, eau,
capital, main-d'oeuvre etc.)
- Analyser l'incidence du comportement des paysans ou des
organisations paysannes du milieu, sur le développement de la
riziculture.
- Déterminer l'impact de la politique agricole
actuellement en vigueur sur la culture du riz dans le périmètre
considéré.
- Déterminer les effets positifs ou négatifs de
la conjoncture économique actuelle sur la culture du riz.
- Déterminer le coût de production du riz dans
la zone d'étude.
- Comparer le coût de production du riz (de la zone
d'étude) au prix sur les marchés ruraux en vue de
l'évaluation de sa rentabilité.
- Déterminer le mécanisme de formation du prix
sur les marchés ruraux.
- Etudier le circuit de commercialisation du riz et ses
goulets d'étranglement.
* * DSAID : Direction des
Statistiques Agricoles de l'Informatique et de la Documentation. (ex) DESA.
|