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Processus d'élaboration des projets dans l'Administration Camerounaise : Le cas du Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature (MINEP)

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par Charles Menye
Université Catholique d'Afrique Centrale (UCAC) - Master en développment et management des projets 2009
  

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Chapitre 4 : Les voies d'amélioration du PEP au MINEP

« Ce n'est pas parce que les choses sont di((iciles que nous n'osons pas, c'est parce que nous n'osons pas qu'elles sont di((iciles. »

SENEQUE

Bien que la gestion par la performance soit devenue une exigence dans l'approche managériale des opérateurs en charge des affaires publiques, il faut relever que cette orientation reste un projet à conduire avec beaucoup d'humilité et de circonspection. Cette nouvelle orientation devra surmonter des obstacles de natures diverses et connaître une maturation progressive en fonction des succès et des échecs

rencontrés. Une approche processus suppose une remise en question permanente en
vue d'une amélioration continue. L'amélioration de la qualité (réduction des non=qualités

et amélioration des processus de travail) du PEP demande une réflexion associant le sommet hiérarchique du ministère et les principaux acteurs du processus afin de définir des objectifs atteignables et acceptés de tous.

I. Les difficultés structurelles à surmonter

Le pilotage vers l'amélioration de la performance en management des projets au MINEP appelle une préparation adéquate qui favoriserait des aménagements institutionnels adaptés au contexte, ainsi qu'un toilettage du dispositif normatif régissant la conduite des projets. Ce changement de cap sur le plan structurel devra s'accompagner d'une mutation d'approche sur le plan culturel. Le point départ de ce changement sera d'introduire le long terme dans la politique managériale. Ceci revient à déterminer les orientations et objectifs généraux visés.

1. La définition d'une vision

La vision est un point de repère qu'un organisme se fixe dans l'avenir, en dehors de toute contingence liée à son passé et à son présent. Elle est généralement envisagée comme un levier fondamental pour le développement. HAMEL et PRAHALAD (1994) soulignent que le principe fondamental de la vision consiste, à se fixer des ambitions démesurées pour le futur par rapport à l'état actuel de ses ressources.

En matière de Management par projets, il est essentiel que les relations entre la vision, la stratégie et les projets soient clairs. Le risque est de privilégier le (trop) court terme, d'initier trop, ou de «mauvais » projets, de revenir en cours de route sur des décisions déjà prises, ou de ne pas mobiliser les ressources indispensables au succès. Or, seul le développement d'une vision et d'une stratégie claire et partagée par le plus grand nombre, est de nature à donner la cohérence indispensable à la multiplicité des actions à orchestrer.

2. Respect des attributions et du rôle des structures

S'agissant de la mutation vers la performance, l'organigramme du ministère laisse une place de choix au Ministre pour la conduite du processus. Il se positionne comme le responsable du management des projets au MINEP. A ce titre, il lui revient d'impulser les réformes nécessaires devant conduire à l'amélioration du PEP. Comme le précisait un de nos enquêtés « une volonté réelle du Ministre suffit à changer les choses ». Il doit jouer le rôle de catalyseur de l'ensemble de son administration. En effet, tous ces axes de réforme ne sauraient prospérer sans une réelle détermination des autorités à l'échelon stratégique et sans une adhésion progressive de l'ensemble des acteurs à la culture de la performance. De même, dans un ministère aussi important que celui de l'Environnement, la capacité de coordination devrait être renforcée et la

démarche de responsabilisation développée pour permettre de décongestionner le centre.

A la suite de cette décongestion, le SG reprendrait sa place dans le fonctionnement harmonieux des services. Nous avons fait le constat qu'il n'existe pas de cadre régissant le PEP au MINEP. Il revient donc au SG de concevoir et de s'assurer de l'application d'un document de référence (Manuel de procédure, Manuel d'exécution, etc.) qui guiderait le PEP au MINEP. Ce document devrait déterminer les différents acteurs du processus. Les critères devant conduire à l'accession à un poste de responsabilité dans les projets. Il s'agit de définir les profils des équipes de projets. Il devra également préciser les rapports entre les chefs de projets et la cellule de coordination (DEPC).

La contre partie des responsabilités doit être l'obligation de rendre compte de cette responsabilité. La notion de « compte rendu » ici est essentiellement positive car elle n'est pas liée à la recherche de la faute. Elle permet à l'autorité hiérarchique de suivre l'exécution des missions confiées aux collaborateurs en même temps qu'elle permet aussi de trouver rapidement des solutions aux difficultés éventuellement rencontrées dans la mise en oeuvre des missions assignées. Il s'agit donc pour le SG de définir la périodicité des comptes rendus attendus des chefs de projets et les informations qu'ils doivent contenir.

Ainsi, comme le dit NDONG SOUMHET (2003) dans un article intitulé « Pour une nouvelle compréhension de la notion de responsabilité appliquée à la gestion des affaires publiques », « La prise en compte des difficultés rencontrées dans la poursuite des objectifs assignés est ici incontestable et renvoie indubitablement à d'autres préoccupations que celles du contrôle de régularité. Il est donc impérieux que l'accountability s'intègre davantage dans la culture administrative dans la mesure où toute administration est censée avoir un devoir général de «redevabilité» envers son mandant qu'est le pouvoir politique et,

partant, le peuple qui est la source ultime de la légitimité. » Après la définition du cadre réglementaire encadrant le PEP, il revient à l'Administration de suivre son application effective.

Il ne s'agira pas d'écrire à nouveau des très beaux textes, mais surtout de pouvoir en assurer la saine application dans le sens de la mise en oeuvre effective du mode de gestion axé vers les résultats. Cette fonction revient à l'IG qui assure le contrôle des services.

Dans le même esprit, l'urgence semble être aujourd'hui à la redynamisation de la DDPE afin qu'elle se spécialise dans la définition des stratégies et dans le suivi de leur mise en oeuvre aux fins d'aider à la décision, l'obligation de résultats devenant saillante dans les organisations.

3. Une nouvelle approche pour la gestion des ressources humaines

La performance d'une administration dépend essentiellement de la qualité de ses agents. Elle appelle un renouvellement d'approche en terme de constitution et d'utilisation des ressources humaines. Le recrutement de ces derniers doit donc se faire avec la plus grande rigueur et la plus grande objectivité. La formation permanente et la formation continue revêtent aussi importance capitale dans la qualité des interventions du ministère.

La qualité des acteurs impliqués dans le PEP est liée au recrutement des agents de l'Etat en général. Des recrutements par voie de concours peuvent être organisés pour le recrutement des professionnels. Il s'entend que ces concours doivent définir les profils recherchés par le Ministère. L'hypothèse de la subjectivité des concours peut être soulevée, mais l'avantage de ces recrutements ciblés est d'avoir des profils bien ciblés. Le concours lui - même doit être aménagé de telle sorte qu'il permette de

mesurer les capacités intellectuelles des candidats mais aussi « leurs vertus et leurs talents ». L'objectif étant d'éviter de recruter dans l'Administration des individualités qui n'ont ni le goût, ni le sens du service public.

Concernant le personnel déjà recruté, il est nécessaire de renforcer ses capacités. Confrontés au quotidien à des exigences d'adaptation de leurs techniques de management des projets, les cadres du ministère doivent subir des programmes de recyclage appropriés et approfondis en rapport avec les enjeux ainsi que les grandes orientations stratégiques.

De nouveaux axes stratégiques doivent être explorés aux fins d'accompagner de la meilleure manière la démarche de gestion par la performance la gestion des ressources humaines proprement. Il est vrai que la fonction publique camerounaise demeure une administration de carrière et que le fonctionnaire reste placé en son sein dans une situation légale et réglementaire. Mais, il faut privilégier l'objectivité dans les nominations en y intégrant, en plus de la compétence, la probité, le sens élevé de l'intérêt général ainsi que la culture du résultat.

Par ailleurs, le management par objectifs qui implique une démarche prévisionnelle dans le cadre des dispositifs de planification stratégique devra être en phase avec le mode de gestion des ressources humaines appelées à mettre en oeuvre les actions au quotidien. L'occasion est ainsi ouverte au MINEP d'expérimenter des démarches innovantes comme la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) par laquelle les organisations recherchent l'adéquation, qualitative et quantitative, à moyen terme, de leurs besoins et ressources en personnel. Une démarche embryonnaire de cette nature a été expérimentée au sein de l'Administration fiscale camerounaise dans le cadre de son plan de modernisation horizon 2010 de se préparer à la mise en oeuvre des projections macroéconomiques prévues par le Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté (DSRP).

Cette expérience devra connaître un approfondissement des techniques de prévision et une bonne maîtrise du fichier du personnel. Les pistes à explorer dans ce contexte sont à la fois quantitatives et qualitatives afin d'assurer une mise en cohérence entre les missions et les effectifs permettant de les accomplir avec efficacité, et efficience. Selon PARINI (2004), « on ne peut développer une culture de la performance et de résultat que si chaque agent, chaque fonctionnaire se sent responsabilisé et motivé pour améliorer sa propre prestation, le résultat collectif n'étant jamais que l'addition des résultats individuels ».

Compte tenu du lien étroit qui existe entre le management au niveau ministériel et le management des projets au sein de l'administration étudiée, les différentes réformes envisagées vont impulser une dynamique qui aura pour conséquence de pallier aux insuffisances constatées dans le PEP.

II. Recentrage de la coordination inter-acteurs du PEP

Dans un contexte marqué par les exigences des populations (en vue d'une amélioration des conditions de vie) et des Bailleurs de Fonds (pour une gestion efficace des financements octroyés pour parvenir au redressement économique), la rigueur doit s'ériger en dogme dans la mise en oeuvre des actions du Gouvernement MINEP.

Pour arriver à un système optimal de pilotage des performances, les opérateurs du PEP doivent se sentir sous pression et sous contrôle permanant. A cet effet, le premier axe se situe au niveau de la réhabilitation des acteurs clés du PEP. Pour garantir son succès, ce projet d'amélioration des processus nécessite un engagement

fort de la haute hiérarchie du ministère, et le déroulement d'une évaluation préliminaire. Les constats de cette évaluation pourront se traduire en un plan d'action.

Concernant le PEP l'amélioration vise à atteindre les objectifs stratégiques suivants :

· amélioration de la qualité des services

· Amélioration de la satisfaction des bénéficiaires et des partenaires

· Maintien du professionnalisme, en particulier en cas de changement d'équipe de projet ou dirigeante.

L'objectif est d'anticiper et d'être prêt à implémenter des solutions efficaces et innovantes. Une organisation dans une telle démarche, va se doter d'un système de mesure pour s'assurer que les processus mis en oeuvre augmentent bien la qualité de ses services. Pour cela, tous les acteurs doivent être mobilisés et impliqués. La coordination des actions est essentielle, d'où la nécessité de corriger les insuffisances du système de communication interne et d'améliorer la politique de gestion des ressources humaines.

1. La redéfinition de la politique de Communication interne

Les analyses précédentes ont fait ressortir que le processus d'élaboration des projets au MINEP souffre d'une défaillance de la coordination entre les responsables de projets et la direction en charge de coordonner les projets (DEPC). Les questions relatives aux ponts aériens, à la rétention d'informations, et la désinformation ont été soulevées par les différents acteurs.

Dans le souci de pallier à ces insuffisances, de promouvoir l'efficacité dans le management des projets, les circuits d'information et de communication doivent être

révisés. A cet effet, le ministère doit élaborer une politique de communication interne propre. Celle=ci devra assurer la fluidité des rapports entre les intervenants. Précisément, certains réaménagements doivent être apportés concernant la communication horizontale.

Graphique 6 : Circuit de communication entre les responsables de projets

(révisé)

Point focal 2

Point focal 1

Le Ministre

DEPC

Ce schéma présente la coopération entre les acteurs principaux du PEP en mettant l'accent sur la coopération entre les points focaux, la DEPC et le Ministre.

Les recoupements effectués ressortent que cette mutation n'est possible que si le top management s'investit réellement La mise en place du « Manuel d'exécution des projets» précisant les attributions et les responsabilités des intervenants dans le PEP est une priorité. Ce manuel devra préciser les modalités de collaboration entre les

chefs de projet et la DEPC d'une part, entre la DEPC et le Ministre d'autre part. Il pourra notamment définir les livrables (rapports d'activités, compte rendu, ...) attendus des responsables de projets et leur périodicité (mensuelle, trimestrielle, etc.). Le rôle de la hiérarchie (Ministre, SG, IG) serait de s'assurer que ces modalités sont respectées par chacun.

Encadré 1: Proposition de plan de rapport de projet

Résumé :

Avancement,

Commentaires généraux : faits saillants,

Objectifs du mois à venir.

Gestion du projet : Aspect contractuel.

Problèmes administratifs et techniques.

Tableau des évolutions.

Planning des tableaux des coûts.

Bilan technique : Bilan du réalisé.

Exposé des problèmes éventuels rencontrés et de toutes les informations permettant d'assurer une cohérence de communication entre tous les destinataires.

 

Après un inventaire des outils de communication interne utilisés par le MINEP, il ressort que la communication descendante et la communication ascendante fonctionnent. Le PEP pourrait être enrichi par l'utilisation d'outils de communication électronique (messagerie électronique, formule intranet - forum de discussion).

Pour parvenir à une efficacité maximale du PEP, il faut dépasser les problèmes structurels et communicationnels et résoudre les problèmes qui ont une origine sociologique.

2. Faire reculer les pesanteurs sociologiques

Les modifications qui ont été proposées jusqu'ici sont structurelles et institutionnelles. Elles doivent être renforcées par des interrogations sociologiques. En effet, le management au MINEP est fortement marqué par la composante sociologique.

Les entretiens font apparaître qu'il existe une catégorie du personnel du MINEP qui était considérée comme des « privilégiés ». Ils jouissent d'un statut particulier qui leur attribue un pouvoir dont l'origine est à chercher dans les faveurs que la haute hiérarchie leur confère. Dans le PEP, la perception du favoritisme se manifeste dans le mode de sélection des responsables de projets et la pratique des ponts aériens évoqués plus haut.

Le mode de désignation des responsables de projets n'obéit pas à des critères objectifs. Ils ne sont pas définis dans la mesure où le Ministre dispose d'un pouvoir discrétionnaire. Comme nous l'avons préalablement évoqué le Ministre à des objectifs politiques à satisfaire. Il doit consolider sa base électorale. Le problème réside dans la compétence des chefs de projets et celle=ci ne leur est pas reconnu par les cadres qui leurs sont affectés. La perception qu'il existe un favoritisme a une incidence sur le moral et la motivation du personnel. Diverses opinions ont été exprimées lors des discussions sur les manifestations du favoritisme au MINEP. Concernant la désignation des responsables, les raisons11 suivantes ont été évoquées :

· Imméritées,

· Obtenues grâce à un processus injuste.

Notons néanmoins que la manifestation d'une préférence n'équivaut pas automatiquement à du favoritisme. Un responsable « préféré » nommé s'il est

11 Elles ont été soulevées par les cadres du MINEP

méritant ne signifie pas systématiquement favoritisme. La nomination d'un responsable doit tenir compte de ses compétences. Si elle est mise de côté, les conséquences sur le moral et la productivité des autres acteurs peuvent être néfastes.

Cette situation amène les responsables de l'Administration à établir des équilibres dans les nominations des responsables. La solution repose sur l'harmonisation des intérêts politiques et les objectifs de performance du ministère. Les acteurs du PEP doivent donc permettre de satisfaire les exigences suivantes :

· être politiquement rentables,

· être professionnellement compétents

Cette insuffisance peut être palliée par la mise en place d'une planification de la gestion des ressources humaines. La gestion des ressources humaines doit avoir un lien avec la planification des activités.

Il importe de définir des valeurs et d'impliquer les acteurs du PEP. Le sommet hiérarchique est une fois de plus interpellé pour la conduite de cette réforme. Cette situation ne sera pas facile à corriger car certains des acteurs clés trouvent un intérêt dans l'opacité qui caractérise la situation actuelle. Néanmoins la possibilité de trouver un équilibre entre les intérêts individuels et la compétence est envisageable par la définition d'une « zone grise»12. Il est légitime qu'un responsable veuille constituer une équipe qui lui convienne mais, il lui revient de choisir parmi ses préférés ceux qui disposent de compétences requises. Une solution serait de définir les profils de poste dans l'Administration publique et plus précisément pour les responsables de projets qui ont très souvent une variante technique qui échappe parfois aux responsables qui gèrent les projets.

12 Grise parce qu'elle se situe au croisement entre le favoritisme et la recherche de compétence.

Une liste de valeurs ne suffit pas à modifier le comportement si bien ancré dans les pratiques. La mise en place de processus et de systèmes peut s'avérer nécessaire pour limiter les dérives et créer un climat de travail positif, maintenir la crédibilité des responsables. L'ouverture des postes à concurrence et la création des profils de poste pourraient donner plus de crédibilité aux responsables de projets. En effet, l'absence de pratiques justes et transparentes crée cynisme et une méfiance entre les acteurs. Le processus doit être clair sans pour autant être très strict de peur de compliquer la situation.

L'IG et le SG ont un grand rôle à jouer dans ce processus. Ils doivent exercer leurs rôles avec rigueur, intégrité et impartialité. Leur autonomie, leurs ressources humaines et matérielles doivent donc être impérativement renforcées.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon