Chapitre 3 : Le processus d'élaboration des
projets au MINEP
Le capital ne manque pas. Ce qui manque, c'est la
vision.
MINTZBERG, Henry
Face aux exigences de résultat imposées par les
bailleurs de fonds internationaux et à la demande de bien=être
formulée par les populations, le besoin de performance de
l'Administration passe par la conception et la mise en oeuvre de projets. Le
montage de projet exige une rigueur pratique et une connaissance scientifique
ou improvisation, précipitation et connaissance isolée sont
à proscrire. Bailleurs de fonds et autres partenaires attendent un
retour à leur mobilisation. Le ministère doit satisfaire ces
attentes avec efficacité. Ce qui revient à dire qu'il doit
apporter des solutions concrètes. D'où la nécessité
d'opérer un cadrage des problèmes et de les intégrer dans
son cahier de charge (I), d'affiner les solutions à mettre en oeuvre
(II).
I) De la programmation à
l'identification
La programmation se comprend comme la phase durant laquelle
les grands axes d'intervention du MINEP sont définis. Elle
dépasse et anticipe chaque projet mais va l'inspirer et le motiver. A ce
stade, le projet n'est ni né, ni conçu, mais son cadre est
à installer (identification des secteurs et définition des
objectifs). Dans les administrations publiques camerounaises, la programmation
découle du Document Stratégique de Réduction de la
Pauvreté (DSRP). Ce dernier définit l'ensemble des axes
d'intervention prioritaires et oriente les stratégies sectorielles et
ministérielles visant à améliorer les conditions de vie
des populations.
1. Le point de départ du PEP :
Identification des problèmes
environnementaux et voies de recours
Un projet a pour objectif de résoudre un problème,
ce qui suppose qu'au préalable il soit identifié. Ce travail peut
être effectué par :
· la population locale et les organisations de la
société civile nationale,
· les ONG internationales,
· les pouvoirs publics.
Au rang des problèmes identifiés figure la
détérioration de l'environnement (pollution,
désertification, ...) causée par les activités
anthropiques telles que l'agriculture, la pêche, l'élevage,
l'industrie, etc. Il peut également arriver que cette
détérioration ait des effets néfastes sur l'état de
santé des populations. Ces dernières, directement
affectées par les modifications de leur environnement, sont
confrontées à des situations dramatiques conduisant les
populations à éprouver de réelles difficultés
à satisfaire leurs besoins primaires (se nourrir, se vêtir, se
loger, se soigner, ...). La détérioration de l'environnement
appauvrit. Le lien environnement/richesse ou
détérioration/appauvrissement est davantage accentué dans
nos contrées où la survie des populations est intimement
liée aux ressources naturelles.
C'est le cas du projet « Sahel vert
», initié pour pallier aux problèmes causés par
l'avancée du désert sur les populations dans la région de
l'Extrême=Nord du Cameroun. Elle a eu entre autres conséquences de
priver les populations des ressources naturelles nécessaires à
leur alimentation. Elles ont sollicité l'intervention des pouvoirs
publics afin de résoudre cette situation problématique. Ce projet
s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies
sur la lutte contre Désertification.
Le Ministère peut procéder lui=même
à l'identification des problèmes et mener des actions pour les
résorber. Il peut s'agir de corrections ou d'anticipations.
Les partenaires au développement peuvent également
préparer des projets et les soumettre au MINEP pour approbation.
La question du financement joue un rôle important dans
ce processus. En effet, l'offre de financement détermine
l'identification des projets. Lorsque dans le cadre d'une convention ou d'un
Accord des fonds sont disponibles, le ministère tente de trouver des
moyens pour parvenir à capter les ressources.
2. Les structures de pilotage
La réalisation de la programmation met en
corrélation plusieurs acteurs. La réussite de cette étape
réside dans la synergie entre ces différents acteurs. La DEPC est
chargée de conduire ce processus. Mais de l'aveu du chef de cette
Division, la réalité est toute autre. Il a soulevé quatre
causes principales :
· une absence de définition cohérente des
attributions,
· une très faible circulation de l'information,
· l'absence d'une culture du compte rendu.
Cette situation dénote de l'incohérence dans la
définition des tâches et des modalités de
coopération entre les acteurs du PEP. Nous avons pu vérifier
cette insuffisance lors de la préparation du CDMT 2009-2013. Il s'est
d'abord posé un problème dans la définition du responsable
chargé de coordonner l'activité. La réalisation a
été confiée à un responsable d'un autre service.
Pourtant, l'article 56 du décret n°2005/117 du 14 avril 2005
portant organisation du MINEP stipule que la DEPC est chargée de :
« l'identification et de la préparation des programmes
». Cet exemple met en
lumière que l'attribution des tâches dépend
plus de la discrétion du Ministre. Un enquêté disait
à cet effet que : « les textes sont là encore faut=il
qu'on les applique ».
Pourtant, quotidiennement, le Ministre regroupe son staff
(Directeurs et assimilés, responsables de projets, points focaux, etc.)
pour faire donner les instructions relatives au fonctionnement du
département ministériel. En dehors de ces rencontres, les
différents acteurs majeurs du PEP sont peu souvent en relations. Ils ne
communiquent pas horizontalement sur l'avancée des projets. Cette
insuffisance pose des problèmes à l'organe en charge de la
coordination (DEPC) qui d'après l'article 56 du décret
n°2004/320 du 8 décembre 2004 portant organisation du gouvernement
est chargée « de la préparation des accords et
conventions ainsi que du suivi de leur exécution en liaison avec les
directions techniques et administrations concernées ».
Ceci suppose qu'elle est sensée suivre les
activités des directions techniques relatives à la mise en oeuvre
des conventions : les projets. Ce problème revêt une importance
particulière dans la mesure où il n'existe pas de service
d'archives organisé. La diffusion des informations dépend des
affinités qui existent entre eux. Un enquêté disait
à ce sujet : » les responsables de projets et les points focaux
ont leurs informations dans leurs mallettes ».
Néanmoins, le MINEP parvient néanmoins à
conduire sa programmation. Au terme de cette étape, un programme pour
une durée minimale de trois (03) ans est conçu. Il revient au
MINEP de procéder à une identification des projets. Cette phase
qui dure en moyenne deux à trois mois abouti à la conception des
fiches projet. Elle sert de déclencheur pour la phase suivante.
3. La Fiche d'Information de
Projet
Au terme de la programmation, une fiche d'information de
projet (FIP) est préparée pour chaque projet. Une FIP est un
document de 2 à 4 pages qui fournit des informations
générales sur le projet. Elle contient les informations
clés sur l'idée de projet et sur le coût estimé le
plus probable du projet.
Elle est composée de 03 parties :
· Les informations générales
· La justification
· le montage institutionnel et financier
Les FIP utilisées par le MINEP sont mises à sa
disposition par le MINEPAT. La DEPC s'assure de leur conformité avec le
programme prédéfinit. A ce titre le Chef de Division invite les
différents responsables des directions porteuses des projets inscrits
dans le programme, à repréciser ou à affiner les
informations à y intégrer. Ce travail, de l'aveu du Chef de
Division « est très sensible dans la mesure où ses
fiches sont destinées au Bailleurs de Fonds et à l'organe qui
prépare le budget de l'Etat ».
Les informations générales portent sur
l'intitulé du projet. Il est déterminé
par le responsable de projet ou le point focal et annonce l'objectif du projet.
À titre d'exemple nous pouvons citer « OPERATION ZERO
DECHETS PLASTIQUES » qui est le nom d'un projet inscrit dans le
programme 2009 - 2013. A la suite de l'intitulé du projet, vient le nom
du Promoteur de projet. Il s'agit de préciser quelle est la direction
technique qui porte le projet. On constate que le promoteur est
dépersonnalisé. Il ne s'agit pas d'une personne ou du point focal
mais du service auquel appartient le responsable du projet. L'exemple
susmentionné est logé au sein de la Direction des Normes et du
Contrôle (DNC) et on inscrira MINEP/DNC.
Une autre information générale porte sur la
classification du projet. Il s'agit de déterminer sa
référence à la nomenclature budgétaire. La
classification concerne également le secteur du projet en
général : le champ est l'environnement, le sous champ de
l'exemple que nous avons pris est « Déchets ». Il
faut également faire le lien entre le projet et le DSRP. Dans le cas
d'espèce, il s'agit de la réduction de la pauvreté
urbaine. La classification du projet doit faire ressortir la nature du
projet :
· Etudes / Recherche
· Appui institutionnel / Assistance technique
· Formation
· Construction
· Réhabilitation / Entretien / Extension
· Achat d'équipements
· Projet Intégré
La FIP présente également l'état
d'avancement du projet. Il peut s'agir :
· d'une idée de projet,
· d'un projet en préparation,
· d'un projet en cours d'élaboration. Dans ce cas il
faudra préciser son code dans le CDMT et le code de la convention.
La fiche présente également les personnes sur
lesquelles le projet aura un impact. C'est un élément important
pour l'obtention de financement en interne comme en externe. On définit
les bénéficiaires directs et indirects du projet de même
que les zones d'interventions directes et indirectes.
La deuxième partie de la FIP est la justification du
projet. Elle présente les objectifs du projet, les résultats
attendus de la mise en oeuvre du projet, de même qu'une description
sommaire et la planification physique prévisionnelle.
On définit deux types d'objectifs : les objectifs
globaux et les objectifs spécifiques. Pour le Projet de
Renforcement des Capacités Environnementales et Sociales pour le Secteur
de l'Énergie (PRECESSE), l'objectif global qui a
été retenu est de « mettre les investissements dans le
domaine de l'énergie et des hydrocarbures en conformité avec les
normes et pratiques internationales en matière de gestion des diligences
environnementales et sociales », les objectifs spécifiques qui
en découlent sont :
· assurer la préparation de grands projets
d'infrastructures dans du secteur de l'Energie et leur gestion, en
conformité avec les normes et pratiques nationales et internationales en
matière de gestion des diligences environnementales et sociales,
· assurer la consolidation des droits sociaux et de
l'intégration économique des populations vulnérables
affectées par les grands projets d'infrastructures.
Définir des objectifs appelle des résultats. La
FIP les présente. Il s'agit de la situation améliorée
à laquelle le projet doit conduire.
La FIP doit également comporter un descriptif du
projet qui présente le contexte et les externalités, du projet.
La programmation physique vient clôturer ce moment. Elle s'appuie sur la
classification du projet et présente le type d'activité selon un
chronogramme.
Programmation physique
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|
2008
|
2009
|
2010
|
2011
|
2012
|
2013
|
Etudes / Recherche
|
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X
|
X
|
X
|
X
|
X
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Travaux
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X
|
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|
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Achat d'équipements
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X
|
X
|
X
|
X
|
|
|
Formation
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X
|
X
|
X
|
X
|
X
|
X
|
Appui institutionnel/ assistance
technique
|
X
|
X
|
X
|
X
|
X
|
X
|
|
LE MONTAGE INSTITUTIONNEL ET FINANCIER
Le montage institutionnel consiste à présenter
les institutions qui interviennent dans le projet. Le MINEP est le maître
d'ouvrage et le maître d'oeuvre des projets qu'il met en oeuvre. Il est
assisté sur le plan technique et financier par des partenaires. Dans le
cadre du PRECESSE le montage institutionnel est le suivant :
Montage institutionnel
|
Maître(s) d'ouvrage : MINEP
|
Maître(s) d'oeuvre : MINEP
|
Partenaires
techniques : MINDAF, MINSANTE, MINEE,
MINCULTURE, MINAS et ONG
financiers : Banque Mondiale,
|
Service(s) responsable(s) : Unité de
Coordination du Projet
|
Agence(s) d'exécution :
Unité de Coordination du Projet
|
|
Le montage financier
Il donne des précisions sur la répartition des
coûts inhérents au projet selon le type d'activité et
présente une ébauche du plan de financement selon la source du
financement. Il peut s'agir de ressources internes et de ressources externes.
Il présente également la contribution de l'Etat qui peut
être directe à travers un allègement fiscal ou un
participation en nature. Cette partie de la FIP compte aussi un état du
financement qui précise si le projet à déjà un
accord de financement et quel est le montant du financement à
rechercher.
Exemple : PRECESSE programmation 2009=2013.
Montage financier (Montant en milliers de
FCFA)
|
Coût total estimé du projet : 8 000 000
|
Répartition des coûts
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2008
|
2009
|
2010
|
2011
|
2012
|
2013
|
Études
|
240 000
|
750 000
|
650 000
|
500 000
|
300 000
|
200 000
|
Investissements
|
|
650 000
|
330 000
|
400 000
|
400 000
|
400 000
|
Fonctionnement
|
|
435 000
|
435 000
|
435 000
|
435 000
|
435 000
|
Charges récurrentes
|
|
435 000
|
435 000
|
435 000
|
435 000
|
435 000
|
Plan de financement
|
Sources Internes
|
Sources externes
|
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2008
|
2009
|
2010
|
|
2008
|
2009
|
2010
|
Fonds Propres État
|
48 000
|
48 000
|
48 000
|
Subventions
|
|
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Fonds PPTE multilatéral
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PRETS
|
8000 000
|
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Fonds C2D
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Contributions de l'Etat
= Contributions globales :
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2008
|
2009
|
2010
|
Contributions Directes
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Taxes
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|
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Expropriations
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Nature
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État du financement
= Financement acquis : 8 000 000 000 = Financement à
rechercher :
|
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Source : notre enquête, septembre 2008
La FIP fait également ressortir la durée du
projet à travers un calendrier succinct. Il fait ressortir la date de
début et la date de fin du projet, de même que les périodes
d'évaluation à mi=parcours.
COMMENTAIRES
La FIP offre la possibilité de faire des remarques
complémentaires sur le projet, d'ajouter des informations importantes
que les rubriques de la FIP ne couvrent pas. Exemple : PRECESSE
AUTRES COMMENTAIRES
La contre partie financière de l'Etat pour
ses projets est très attendue car sera indispensable pour mener à
bien les activités des sous composantes;
Projet transversal impliquant les acteurs d'autres
départements ministériels et les organismes du secteur de
l'énergie'
|
|
Les projets identifiés sont validés en fonction
de leur adéquation au programme. Mais cette opération ne
s'effectue pas au MINEP. Elle est effectuée dans un espace de
décision qui est premièrement le MINEPAT et ensuite
l'Assemblée Nationale. Les Bailleurs de Fonds jouent également un
rôle important dans la mesure où l'Etat ne paie en
général que des contre partie. A ce jour, exception faite du
« Projet Sahel vert9 », les projets du MINEP sont en
majorité financés par les Bailleurs de Fonds. La FIP peut servir
d'outil d'aide à la décision.
Lors des conférences budgétaires sectorielles,
les projets sont évalués par les responsables du MINEPAT et par
les députés de l'Assemblée Nationale. Celles=ci permettent
aux départements ministériels de défendre leurs budgets et
par conséquent sa programmation. Le MINEP est représenté
à cette occasion par le Ministre en personne accompagné de
quelques uns de ses collaborateurs, parmi lesquels, le Chef de Division des
Etudes, des Projets et de la Coopération. Si les projets sont
validés, les termes de référence des études de
faisabilité peuvent être élaborés.
9 Seul projet financé en totalité par
le Gouvernement camerounais.
II)Formulation/Etude de faisabilit
La formulation est un ensemble
d'investigations à caractère analytique menées pour guider
le décideur dans sa prise de décision. Son objectif est
d'orienter la décision en déterminant le périmètre
du projet et sa faisabilité. En d'autres termes, il s'agit d'affiner la
pertinence du projet, d'établir ce qui sera et ce qui ne sera pas inclus
dans les objectifs dudit projet, de déterminer si l'organisation est en
mesure de mener le projet à son terme. Ceci se fait à travers
l'évaluation des compétences et des ressources et l'estimation
des fonds nécessaires. Cette phase mobilise de nouveaux acteurs et des
moyens matériels et financiers plus importants. Elle est
organisée autour des études détaillées, des
études techniques et alimente le document de projet.
1. Les études
détaillées
Avant la mise en oeuvre d'un projet, il est nécessaire
de faire une étude plus approfondie des besoins pour déterminer
les préalables, l'opportunité stratégique et le
périmètre du projet. Cette étude affine les objectifs,
permet de faire ressortir les risques qu'il y aurait à mettre le projet
en oeuvre ou pas.
En collaboration avec ses partenaires, le MINEP étudie
la viabilité du projet et propose une planification (planning et budget)
précise et détaillée. Cela implique de faire des
recherches supplémentaires sur les personnes affectées par le
problème et sur la façon dont elles sont affectées. Il
faut également examiner les risques encourus par le projet et la
manière dont les mesures de performance doivent être
effectuées. Pour déterminer les études à
réaliser, les responsables de projets désignés par le
Ministre, organisent des ateliers participatifs auxquels sont conviés
différents acteurs susceptibles d'intervenir ou d'influencer le
projet.
Dans le cadre du « Projet de mise en place de la
stratégie d'information environnementale », le MINEP a
organisé un atelier du 27 au 30 juillet 2008, à Douala. Il a
rassemblé des responsables du ministère, d'autres
départements ministériels concernés et la
société civile nationale et internationale.
Il avait pour objectif de réaliser la première
concertation entre tous les acteurs dans le domaine de l'environnement. Il
devait aboutir à :
· un état des lieux,
· l'identification des secteurs prioritaires,
· des activités à confier aux consultants,
· la rédaction des Termes de
références (TDR) des études techniques à
réaliser.
Concernant l'Etat des lieux, les différentes parties
prenantes émettent leur avis sur la problématique de
l'information environnementale, les problèmes, les avancées
réalisées. À titre d'exemple, une relecture du cadre
réglementaire a été effectuée, la question de la
propriété des informations tirées de la recherche a
été discutée. Les secteurs prioritaires dans ce cas furent
:
· la dissémination de l'information
environnementale,
· la sécurisation des informations
collectées,
· le système de motivation des chercheurs,
· la valorisation du savoir faire locale.
Pour intervenir dans les secteurs prioritaires
identifiés, des études ont été proposées par
les différents groupes de travail constitués et un planning a
été réalisé pour leur réalisation. De
même, les groupes de travail proposent des axes de recherche et
budgétisent les dites études. Ensuite, les travaux des
différents sous groupes sont
présentés en plénière et sont
discutés. Des remarques sont soulevées et intégrées
dans le travail.
Lorsque les études sont identifiées, les Termes
de Référence des études (TDR) sont
réalisées. Ce travail s'effectue dans les groupes de travail. De
plus, les profils des consultants à recruter sont
ébauchés. A la suite de ce travail, des consultants sont choisis
pour harmoniser les conclusions et affiner les TDR des études. Cette
étape se poursuit par le lancement des appels d'offres relatifs au
recrutement des consultants devant réaliser les études
techniques.
Une fois les appels d'offres lancés, le responsable du
projet et son équipe procèdent au dépouillement des
offres. La sélection des consultants répond à des
critères qu'il est difficile de percevoir. Cette situation trouble
commence depuis l'atelier. En effet, certains participants aux ateliers tentent
de « tailler » le profil du consultant à leur « mesure
» ou à celle de quelqu'un qui leur ait proche et l'imposent. Et
l'impression qui se dégage tient au fait que « les consultants
sont choisis avant l'atelier »de l'avis d'un participant issu d'un
autre département ministériel. Ainsi, l'objectivité de la
sélection des consultants peut être remise en cause.
2. Les études techniques
Une fois les consultants sélectionnés, ils
conduisent les études selon les TDR et rendent compte au chef de projet.
Dans le cadre des projets, les études sont des processus
externalisés. Ils mettent en action des partenaires ou des
sous=traitants (Bureaux d'études, experts, etc.). Cette situation
découle de l'absence de compétences internes. Elle dénote
également de l'inactivité de la cellule des études du
MINEP.
Dans le cadre d'un « Projet Ramsar
» qui vise la restauration de la partie camerounaise du Lac Tchad, des
études relatives à l'aménagement dudit lac doivent
être menées. Elles nécessitent des qualifications (en
génie civil par exemple) dont le
ministère ne dispose pas. D'où la
nécessité de recourir à des bureaux d'étude ou
autres consultants. Ceux=ci devront produire un plan d'aménagement local
(PAL)10. A cet effet, ils devront :
· procéder à l'analyse générale
de l'état actuel de la zone,
· définir les problèmes à
résoudre, les étapes et les coûts,
· bâtir un plan d'aménagement des zones en
vigueur,
· La description des modalités pratiques du
déroulement de l'étude.
Il est conseillé de faire une consultation
auprès de la population et des autorités. A la suite des
consultations, il reviendra aux consultants de réaliser les plans
directeurs qui vont permettre de coordonner et d'assurer la cohérence de
l'aménagement. Au terme de ce travail, Un rapport devra être
livré par le consultant, il devra expliciter les orientations, la
démarche, justifier les choix et les décisions. Ce document fera
également ressortir les besoins en matériel, l'estimation des
coûts et le calendrier de réalisation.
Dans le cadre du PRECESSE, une autre approche a
été adoptée par le chef de projet. Il a opté pour
une analyse diagnostic qui a mobilisé des cadres de certaines
administrations techniques :
· le Ministère des Domaines et des Affaires
Foncières (MINDAF), parce que les projets d'investissement sur
l'énergie (barrages hydroélectriques) nécessitent des
sites d'implantation. Il intervient pour mettre à disposition des
espaces pour leur implantation.
· Ministère de la Culture (MINCULT) parce que ces
projets peuvent causer la destruction du patrimoine culturel des zones
d'implantation,
10 Terme générique utilisé pour
désigner l'ensemble des documents de l'aménagement.
· le Ministère de l'Eau et de l'Energie
(MINEE), parce qu'il est l'Administration technique en charge des questions
énergétiques,
· Le Ministère des Affaires Sociales (MINAS)
parce que les travaux pour la construction des installations peuvent avoir des
conséquences néfastes sur les populations
(déguerpissement, déplacement, etc.).
Des représentants de la société civile
ont également été conviés à ce diagnostic.
Ils ont permis de faire remonter les sollicitations et les aspirations des
populations. La société civile internationale y a
également occupé une place importante. Ceci dans la mesure
où, elle contribue au financement du projet. L'ex=Coordonnateur du
PRECESSE affirmait que dans la réalité, le Bailleur de Fonds
tente de contrôler le projet. Concernant les études, il est
également à noter que certains partenaires persistent dans
l'utilisation de méthodes qui ont montrées leurs limites.
Certains Bailleurs de Fonds préparent des projets et les proposent au
ministère pour approbation et exécution. La tactique pour le
ministère consiste à trouver un consensus afin de les adapter au
contexte national et de réduire leurs effets négatifs.
La phase de formulation est un moment capital d'un projet.
Elle précise les orientations du projet, définit les
activités à conduire, les moyens (humains, matériels et
financiers) à mobiliser, pour la suite harmonieuse du projet. Elle
mobilise également un ensemble d'acteurs.
III) Structure et Processus d'élaboration des
projets
Manager par projet, implique la mise en place d'une
organisation spécifique. Au MINEP, l'organigramme prévoit une
Division qui doit assurer la coordination des programmes et projets.
Différents services interviennent dans le processus. Bien qu'autonomes,
ces services sont appelés à oeuvrer ensemble dans le processus
d'élaboration des projets.
1. Rôle dans le processus
D'après l'article 2 du décret portant
création du MINEP, le Ministre « est chargé de
l'élaboration, de la mise en oeuvre et de l'évaluation de la
politique du Gouvernement en matière d'environnement ». Il
représente le sommet de la pyramide hiérarchique et influence le
PEP. Il dispose du pouvoir d'orienter les axes d'intervention du
Ministère, de désigner les responsables de projets. Compte tenu
de la lourdeur de sa tâche, il délègue cette tâche
à certains de ses collaborateurs.
En principe, cette tâche revient au Chef de Division de
la DEPC. Cette organisation participe du souci d'harmoniser les engagements
internationaux pris par le Cameroun et les actions y relatives. En effet, les
projets conçus et réalisés par le MINEP, sont le plus
souvent liés à la mise en oeuvre de ces engagements. A cet effet,
la DEPC procède à la préparation des projets, en synergie
avec les différentes directions techniques.
Les directions techniques produisent des informations utiles
aux projets. Elles sont en contact avec les populations qui subissent les
effets de la dégradation de l'environnement et fournissent les
informations qui vont alimenter l'identification des
problèmes à résoudre. Elles travaillent en
collaboration avec les services déconcentrés du
Ministère.
Les services déconcentrés joue un rôle
capital dans le PEP. Ils participent à la collecte des informations sur
les problèmes identifiés, remontent les sollicitations des
citoyens et veillent. Il en est de même de certains acteurs externes.
Pour concevoir les projets, le MINEP fait appel à
plusieurs acteurs au rang desquels figurent les ONG. Les autorités
administratives locales, les ONG et les populations jouent un rôle
fondamental dans le processus d'élaboration des projets. Ces
dernières contribuent à travers un processus participatif
à l'élaboration des projets et peuvent apporter un appui
technique, matériel et financier. En effet, ils fournissent les
informations nécessaires à l'identification des problèmes
à résoudre en tirant la sonnette d'alarme pour signifier les
situations critiques. Par exemple, des populations peuvent écrire au
Ministre pour lui signifier que des éléphants dévastent
leurs exploitations agricoles. Cette correspondance est confiée par le
Ministre à un directeur technique à l'instar du DEPC.
Après analyse, on peut se rendre compte que les éléphants
ont dévié de leur ligne de migration habituelle, ce qui signifie
que leur parcours traditionnel est défectueux en ressources. Dans ce cas
une mission est dépêchée sur le terrain afin d'analyser la
situation. Le problème peut se poser à cause de la pénurie
d'eau. Constat peut être fait que le circuit hydrologique est
dégradé. D'où un projet pour restaurer la zone.
2. La cohésion entre les différentes
unités : la limite du système
Lorsqu'une organisation adopte le management par projets,
elle opte également pour un management hors hiérarchie. Le
fonctionnement par projet nécessite la mise en place d'une organisation
spécifique non permanente qui va se superposer à la structure
habituelle. Il s'agit d'une collaboration d'experts de métiers
différents. HONGLA=
MOMHA (1993) précise que « La collaboration
est l'aptitude à mettre en relation les compétences des hommes et
des groupes, et les forces tant à l'intérieur qu'à
l'extérieur de son service, de façon à s'assurer leur
compréhension et leur coopération dans l'analyse et la solution
des problèmes qui se posent au travail ». Le manque de
coopération entre ces derniers peut être à l'origine de
dysfonctionnements.
Au MINEP, la coordination entre les services souffre de
l'absence d'un cadre qui fixe précise les obligations des uns
vis=à=vis des autres, ce qui conduit à une sorte d'anarchie.
Pourtant, comme le dit A. PAYETTE (1992), « Diriger », c'est
faire respecter des normes, des valeurs définies par soi=même ou
par d'autres. La question normative revêt une grande importance car tout
rôle d'autorité comporte nécessairement une fonction
normative plus ou moins importante.
Une entrevue avec un cadre du ministère, a
révélé qu'il existe un réel problème en ce
qui concerne la coordination. Les directions fonctionnent en vase clos et les
responsables de services ne collaborent pas entre eux. Ils ne communiquent sur
leurs projets qu'à des moments critiques comme lors de la
réalisation du Cadre des Dépenses à Moyen Terme (CDMT). Et
même à ce moment, les informations diffusées sont
incomplètes. Un cadre affirmait qu' « il arrive même que
les subordonnées du chef de projet ne connaissent pas l'intitulé
du projet ». De plus, aucune pression n'est exercée sur les
chefs de projet, aucune sanction n'est appliquée. Chaque responsable de
direction ou de projet conserve jalousement les informations qu'il a en sa
possession. Un responsable justifiait cette pratique par le fait qu'il «
existe une mentalité de torpillage, si on s'ouvre aux gens ils
torpillent le projet».
Cette situation conduit à une instabilité des
équipes de projet. Le projet APREN est édifiant à ce sujet
car il a connu trois coordonnateurs en l'espace de quatre mois. Ces changements
relèvent de la discrétion du Ministre. Ils créent des
tensions et des frustrations entre les employés et influent
négativement sur les équipes de travail.
Ce qui dénote des dysfonctionnements dans la gestion
des ressources humaines au sein de l'administration en général et
dans le management des projets en général. De l'avis de certains
cadres ces dysfonctionnements relèvent de la prédominance du
politique sur l'administratif. Evoquant la collaboration entre le Ministre et
le SG, un enquêté soulignait l'impuissance de ce dernier : «
il ne peut rien, il est étouffé par le Ministre
».
Au cours d'un séminaire à l'Institut
Supérieur de Management Public de Yaoundé en 1993, les
Secrétaires Généraux, ont posé eux=mêmes un
diagnostic sans complaisance, duquel nous pouvons relever deux faits :
· L'activisme, l'inexpérience et l'ignorance des
rouages de l'Administration par certains Secrétaires
Généraux,
· La déresponsabilisation du Secrétaire
Général à travers la pratique des « ponts
aériens » et des circuits parallèles.
Le dernier constat est conforté par ABOUEM à
TCHOYI, ancien Secrétaire Général de la Présidence
de la République lorsqu'il observe que beaucoup de Ministres
«versent dans l'informel en établissant des relations non
conformes à la réglementation. Certains vont même encore
plus loin, en déresponsabilisant le Secrétaire
Général, ce qui introduit dans l'organisation des zones de non
droit». Parfois, la ligne hiérarchique est méconnue. Au
MINEP, cette situation se traduit par l'existence de ponts
aériens. Ils consistent à transgresser la ligne
hiérarchique en s'adressant directement à un de ses subalternes
sans en référer à son supérieur hiérarchique
immédiat. Il en est de même lorsque qu'un subalterne omet son
supérieur hiérarchique immédiat pour s'adresser à
un autre compte tenu de leurs affinités.
Point focal 2
Point focal 1
Graphique 5 : Circuit de communication entre les
responsables de projets
Le Ministre
DEPC
Relevons que le fonctionnement bureaucratique ralenti et
complique significativement le partage des informations. Prenons une situation
où le Chef de la DEPC sous instruction du Ministre doit préparer
un dossier relatif à la coopération entre le Cameroun et le Japon
sur le plan environnemental. Pour ce faire, il doit disposer d'informations
relatives aux projets portés par le MINEP et financés par le
Japon. Parce qu'il ne dispose pas de ces informations (à moins
d'être le responsable du projet), il doit saisir le ou les responsables
desdits projets. La pratique veut qu'il adresse une correspondance au Ministre
afin que celui=ci instruise les détenteurs d'information de les mettre
à sa disposition. Ce qui entraîne une perte de temps qui peut
être préjudiciable au suivi de la coopération. Ce manque de
suivi conduit à des situations dramatiques. Au moment de notre
enquête, le Programme des Nations Unies pour le développement
(PNUD), sollicitait le rapport d'un projet arrivé à terme en
2007. Au mois de février 2008 le rapport n'était pas
disponible.
Au terme de cette présentation, nous pouvons retenir
que le MINEP a un rôle important à jouer dans le
développement économique et humain du Cameroun. Les missions qui
lui sont assignées sont d'une importance capitale.
Nous avons vu que de grands engagements ont été
pris par le gouvernement camerounais. Mais au=delà du discours
politique, des actions doivent être menées. L'allocation des
ressources (humaines, matérielles et financières) est un outil
efficace pour évaluer la volonté politique. Il a
été démontré que le ministère ne dispose pas
de moyens suffisants et que ceux=ci ne sont pas utilisés de façon
efficiente ou rationnelle.
En résumé, grandes sont les ambitions,
insuffisants sont les moyens. Tout ceci, nous amène à nous
interroger sur la sincérité de la volonté politique. Car,
au=delà du discours, doivent suivre les actes. Et pour agir
efficacement, il faut se donner les moyens de sa politique.
Le souci de performance, d'efficacité, qui se
manifeste, au niveau managérial par l'élaboration et la mise en
oeuvre de projets est=il influencé par le système global qu'est
le MINEP ? Dans la suite de cette étude, il s'agira d'analyser la phase
de conception des projets. Il ressort de notre enquête que les
appréhensions qui ont été soulevées durant la
présentation du MINEP, sont toujours présentes. Les mêmes
dysfonctionnements s'observent durant la préparation des projets. Le
système global qu'est le MINEP, influence le fonctionnement par projets.
Le PEP est un sous=système du système qu'est le MINEP. Par
conséquent, les dysfonctionnements constatés ont des
répercussions sur le PEP. Les acteurs exploitent les failles du
système et développent des stratégies de résistance
pour maintenir les choses dans leur état actuel.
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