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La resistance à la conquête et à la domination coloniale en Grande Comore: 1880-1940

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par said mohamed Said Hassani
Université Paris VII - DEA d'Histoire 2004
  

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CHAPITRE II.

LES SOURCES IMPRIMEES.

I. Présentation.

Les historiens de l'Afrique s'accordent pour dire que « les sources écrites sur ce continent sont rares sinon mal distribuées dans le temps et dans l'espace... ».28(*) Il en est de même pour les Comores dont la bibliographie habituellement présentée dans différents ouvrages et travaux sur les Comores, donne l'illusion que tout a été étudié sur l'histoire comorienne. En réalité, des thèmes comme les origines de la population comorienne, la société, les traditions, la religion, les problèmes politiques relatifs au contexte de la période suivant la seconde guerre mondiale, l'indépendance des Comores...sont les plus fréquemment traités. En revanche, on trouve très peu d'études sur le thème de la conquête et la résistance anticoloniale. Nous avons découvert au CERSOI, l'existence de répertoires bibliographie sur les Comores. Mais ces ouvrages ne couvrent pas suffisamment le domaine des Sciences Humaines.

Mais si les questions que nous nous posons dans la problématique, dépendent d'abord des sources archivistiques, elle n'en demeure pas moins des autres sources. C'est pourquoi une autre partie des sources est constituée par des ouvrages et documents qui orientent notre recherche. Pour ce qui concerne ce travail, nous présenterons une bibliographie sommaire qui sera complétée ultérieurement.

II. Bibliographie thématique.

A. Ouvrages généraux sur la colonisation.

AGERON (C.R.), La France coloniale ou parti colonial, PUF, 1978, 302 Pages.

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BESSIS S, L'occident et les autres, histoire d'une suprématie, La découverte, Paris, 2001.

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BLANCHARD P, Images et colonies, La découverte, Paris, 1993, 304 pages.

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BOUCHE D, Histoire de la colonisation française Tome II, Flux et reflux, Fayard, Paris, 1991, 607 pages.

BRUNET L, La France à Madagascar 1815-1895, Hachette, Paris, 1895, 367 pages.

BRUNSCHWIG H, La colonisation française, du pacte colonial à l'Union française, Calman - Levy, 1949.

BRUNSCHWIG H, Mythes et réalités de l'impérialisme colonial français, 1871-1914, Armand Colin, Paris, 1961.

COHEN W.B, Empereurs sans spectre, Berger Levrault, Paris, 1973, 304 pages.

COLOMBANI O, Mémoires coloniales, La Découverte, Paris, 1991.

DESCHAMPS H, La fin des empires coloniaux, PUF, coll. -que-sais-je, Paris 1969.

DESCHAMPS H, Les méthodes et les doctrines coloniales de la France, Armand Colin, Paris, 1953, 222 pages.

GEORGES B, D'une résistance à l'autre, Les presses du siècle, Paris, 1965.

GOGNACE J, L'expansion coloniale de la France sous la troisième République 1871-1914, Payot 1962.

GOMANE J.P, Les marins et l'Outre-Mer, Denoël, Paris, 1988, 287 pages.

GOURÉVITCH J..P, La France en Afrique cinq siècle de présence : vérités et mensonges, le pré aux clercs Paris février 2004, 432 pages.

GUEHENNO J, La France et les noirs, La Haye - Paris, 1973.

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HANOTAUX G & MARTINEAU A, Histoire des colonies françaises et de la France dans le monde, 6 vols, Henri Veyrier, 1985.

JULIEN Ch A, Les techniciens de la colonisation XIX-XX éme siècle, PUF 1947.

LABOURET H, Colonisation, colonialisme, décolonisation, Larose, Paris, 1952, 203 pages.

LABOURET H, Histoire des noires d'Afrique, PUF, Paris, collection Que sais-je ? 1950, 126 pages.

LIAUZU C, Violence et colonisation, Syllepse, Paris, 2003, 217 pages.

MARTIN J, L'Empire renaissant 1789-1871, Denoël, Paris, 1987, 330 pages.

MEYER J & TARRADE J & REY-GOLDZIGUER A & THOBIE J, Histoire de la France coloniale : des origines à 1914, Armand Colin, Paris, 1991.

OLIVIER A. & NOUSCHI A, La France de 1848 1914, Nathan, Paris, 1988, 254 pages.

PERVILLE G, De l'empire français à la décolonisation, Hachette, Paris, 1991.

PLUCHON P, Histoire de la décolonisation française, Tome I, Fayard, Paris, 1991, 1114 pages.

PRILLAUD N, La France colonisatrice, CID Editions, Nantes, 1983, 253 pages.

TACEL M, Histoire de la France coloniale : des origines à 1914, Armand colin, Paris 1991, 847 pages.

YACONO X, Histoire de la colonisation française, PUF, Paris, 1994, 127 pages.

B. Afrique et Océan Indien.

ALMEIDA-TOPOR (d' H°, L'Afrique au XX ème siècle, Armand Colin, Paris, 1999, 363 pages.

BERTIER P, L'Afrique, de préhistoire à l'époque contemporaine, Bordas, Paris - Montréal, 1966, 349 pages.

BOAHHEN A, Histoire générale de l'Afrique, L'Afrique sous domination coloniale 1880-1935, Présence Africaine/ EDICEF/ UNESCO, Paris, 1989, 544 pages.

BRUNSCHWING H, Le partage de l'Afrique Noire, Flammarion, Paris, 1971, 186 pages.

BRUNSCHWING H, l'Afrique noire. Aux temps de l'empire français, Denoël, Paris, 1988, 280 pages.

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CORNEVIN M & CORNEVIN R, Histoire de l'Afrique T 1 et 2, Payot 1979.

COQUERY-VIDROVITCH Catherine Afrique Noire, Permanences et ruptures l'Harmattan Paris 1994 449 pages.

COQUERY-VIDROVITCH C & GOREG O. & RAISON J.P. & DUQUENET B. Espace et Temps, l'Afrique Noire, Editions Magard, collection J. Dupaquier, Paris, 1984, 64 pages.

DAVIDSON B, Mère Afrique, PUF, Paris, 1965, 284 pages.

DESCHAMPS H, Histoire générale de l'Afrique noire, Tome 1 et 2, PUF Paris 1971.

DESCHAMPS H, Les institutions politiques de l'Afrique Noire, PUF, collection Que sais-je ? Paris 1976, 122 pages.

DESCHAMPS H, Histoire générale de l'Afrique noire, de Madagascar et des Archipels de 1800 à nos jours, PUF, Paris 1971, 720 pages.

DESCHAMPS H, Madagascar, PUF, Paris, 1976, 128 pages.

DESCHAMPS H, Les pirates à Madagascar au XVIeme et XVIIIeme siècle, Berger Levraut, Histoire d'Outre-Mer, 1949, 244 pages.

DESCHAMPS H, Madagascar Comores -terres australes, Berger Levrault, Paris, 1951, 192 Pages.

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D. Mémoires et Thèses

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ROBINEAU C, Approche sociologique des Comores, Thèse de droit, Paris, 1964.

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SALEH A, Histoire de Zanzibar et de la Grande Comore (1870-1970), thèse de 3eme cycle en Histoire, La Sorbonne, Paris, 1972.

b) Sur d'autres pays.

ADAMA B.D, Domination coloniale et problème domaniaux et fonciers à Dakar jusqu'en 1942, mémoire de maîtrise d'Histoire, ( sous la direction de MBODJ Mohamed), Université de Paris 7, 1984, 130 pages.

GERMONT Ch, Les Touaregs Iwellemmedan de la conquête à nos jours. Résistances et intégrations aux nouveaux espaces, mémoire de DEA d'histoire ( sous la direction de Coquery - Vidrovitch), Université de Paris VII, 1997, 126 pages.

GERVAIS R, Population et politiques agricoles dans le Moissi - (1919-1940), Thèse d'Histoire, Université de Paris VII, 1990, 3 tomes 518 pages.

POULLET S, Pouvoir et société au Lesotho au XIXè siècle. Le pouvoir traditionnel face au pouvoir colonial. 1824-1884, mémoire de Maîtrise d'Histoire, Université de Paris VII, 1989, 97 pages + annexes.

TENOUX H, La politique coloniale française en matière d'information. Au miroir de l'Agence Havas/France Presse, mémoire de DEA d'Histoire, Université de Paris VII, 1987, 44 pages.

THIAM M, La chefferie traditionnelle wolof face à la colonisation - les exemples de du Jolof et du Kajoor, Thèse de troisième cycle, Université de Paris 7, 1986, 387 pages.

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TARTY J.P. « La Grande Comores », in, La France des Îles N° 1, Paris, janvier février 1965.

TROISIEME PARTIE :

PRESENTATION DU PLAN.

CHAPITRE I.

PLAN PROVISOIRE DE LA THESE.

PREMIERE PARTIE .

LES GUERRES ET TROUBLES INTERNES : UN CONTEXTE PROPICE A LA CONQUÊTE COLONIALE  ET A LA MISE EN PLACE DU SYSTEME COLONIAL.

Chapitre I.

LA GRANDE COMORE ENTRE PIRATES, SULTANS ET PUISSANCES EUROPÉENNES.

I. Le temps de raids malgaches.

A. Les Malgaches, preneurs d'hommes...

B. ...et donneurs d'hommes.

II. Les guerres, un véritable sport sultanesque

A. Insécurité entre les sultanats.

B. La crise de succession au sein des sultanats.

III. Le Sultan Tibe, un titre convoité : la crise de succession entre M'safoumou et Said Ali.

A. Histoire des deux royaumes ennemis : Bambao et Itsandra.

B. La déchéance et la mort de M'safoumou, sultan d'Itsandra.

IV. Les interventions des puissances européennes en Grande Comore.

A. Brève présence anglaise.

B. La France au secours du sultan Said Ali.

Chapitre II.

LA CONQUÊTE COLONIALE : COLLABORATION, NÉGOCIATION ET REBELLION.

I. Le sultan Said Ali, sultan pro-français.

A. Said Ali, l'homme à travers ses «Mémoires ».

B. L'arrivée du Français Léon Humblot : heureux hasard pour le sultan ?

II. L'opposition du Sultan Hachimou et de ses alliés contre le sultan Said Ali et les étrangers au lendemain de la signature du traité de 1885.

A. La bataille de Zilimadjou : une démonstration des forces rebelles.

B. Le premier soulèvement du sultan Hachimou en 1887

C. Le retour de Hachimou: la deuxième affaire de Mbadjini et la mort du sultan en Juin 1889.

III. Le sultan Said Ali contre le résident M. Weber

A. Weber, premier résident français en Grande Comores : novembre 1886-décembre 1887.

B. Humblot, le résident bénévole : novembre 1889-juin 1896.

IV. Le bras de fer entre Said Ali et Léon Humblot.

A. Le traité du 6 novembre 1885, passé entre Said Ali et Léon Humblot.

B. Le sultan rebelle

C. La déchéance Said Ali en novembre 1893, dernier sultan de Ngazidja.

Chapitre III.

LA FRANCE À LA RENCONTRE DE NGAZIDJA : LE CHOC CULTUREL .

I. Une mission civilisatrice

A. La fin des hostilités internes et unification de la Grande Comore.

B. La suppression de l'esclavage.

II. La tradition comorienne en perte de vitesse.

A. La suppression des institutions traditionnelles de la Grande Comore.

B. L'administration coloniale, un nouvel ordre politique :

III.  Un système traditionnel en décadence.

A. Un ordre social menacé...

C. ...et un système économique perturbé.

DEXIEME PARTIE.

LA TERRE ET L'IMPÔT : LA NOUVELLE VOIE DE LA RESISTANCE.

Chapitre IV.

LA QUESTION FONCIÈRE : LE MECONTENTEMENT POPULAIRE.

I. Le règne de Humblot, le sultan blanc.

A. La création de la Société Humblot et la confiscation foncière.

B. L'administration coloniale contre la société Humblot.

II. Travailler au service des colons, pour s'acquitter des impôts.

A. Conditions particulières de l'engagement des travailleurs.

B. Instauration du code du travail.

III. La réserve indigène, une question épineuse.

A. L'administration coloniale tiraillée entre la Société et la colère généralisée de la population.

B. Le procès du sultan Said Ali contre la société Humblot

C. La mobilisation populaire contre L. Humblot.

Chapitre V.

LA FISCALITÉ, UNE SOURCE DE CONTESTATION A L'ORDRE COLONIAL.

I. L'instauration de l'impôt

A. Le traité de 1892 et l'instauration de l'impôt.

B. La perception de l'impôt. une tâche difficile.

II. Fraudes et contestations fiscales: émeutes et soulèvements.

A. Iconi, la ville rebelle.

B. L'insurrection du nord de Ngazidja en 1915.

C. La fièvre insurrectionnelle dans la province de Dimani en 1915.

TROISIEME PARTIE.

FORCES ET FAIBLESSES DE LA RESISTANCE GRANDE COMORIENNE.

Chapitre VI.

LES FORMES DE RÉPRESSION.

I. Les Démonstrations de la marine française.

A. Bombardements des villes rebelles : exemples d'Iconi et de Foumbouni.

B. Des interventions musclées, appuyées par des militaires français.

II. Les mesures de répression juridiques.

A. Le système des amendes et du travail forcé.

B. Des fréquentes condamnations

III. L'exil : décisions répressive extrême.

A. La déportation : une forme de répression redoutable.

B. Des destinations variées.

Chapitre VII.

LES LIMITES DE LA RÉSISTANCE COMORIENNE.

I. Les fragiles atouts de cette résistances

A. Gros plan sur quelques héros de la résistance

B. Les déportés de 1915.

II. Les faiblesses de la résistance.

A. La manque de sentiment d'unité nationale face à la domination coloniale.

B. Fragiles forces et moyens de contestation.

III. Une armée coloniale puissante.

A. Les collaborateurs locaux de la colonisation.

B. La suprématie technologique de l'armée coloniale française.

Chapitre VIII.

TYPOLOGIE DE LA RÉSISTANCE GRANDE COMORIENNE.

I. La résistance active.

A. Les attaques et « la guérilla »

B. Fuite et banditisme

II. La résistance pacifique

A. Les migrations.

B. L'indifférence ou la force de l'inertie.

III. Le rôle de l'Islam dans la résistance.

A. L'Islam, moteur de la vie quotidienne aux Comores.

B. La résistance dans l'imaginaire

CHAPITRE II.

EXTRAIT DE CHAPITRE REDIGÇ.

LA FISCALITÇ, UNE SOURCE DE CONTESTATION A L'ORDRE COLONIAL.

La domination coloniale ne s'est pas faite sans résistance. Malgré la détermination des Comoriens, la France l'emporte. Au stade suivant se trouve la contestation du system colonial avec au premier échelon les émeutes spontanées. Mouvements épidermiques et conséquences de la colonisation, ils se traduisent par le refus de payer l'impôt. La question fiscale est à la base d'un sentiment d'indifférence, d'inertie et de colère des Comoriens, vis à vis du nouveau régime. Elle est surtout à l'origine des soulèvements qui éclatent dans la première phase coloniale en Grande Comore et qui s'inscrivent dans le cadre des révoltes dites paysannes, et spontanées et surtout très localisés. Ces mouvements de résistance n'ont pas, certes, réussi à atteindre leurs objectifs qu'ils se proposaient, et les administrateurs ont eu tendance à les minimiser, ou à les passer sous silence. Mais il apparaît que les Comoriens ont compris que les Blancs sont déterminés à obtenir une main d'oeuvre à bon marché. Ils se sont aperçus que les exigences coloniales sont tout aussi écrasantes. Le soulèvement populaire est une réponse aux exigences immédiates et concrètes du nouvel ordre colonial. Ainsi à l'instar de la conquête du territoire, la fiscalité rencontre une résistance.

I. L'instauration de l'impôt.

A. Le traité de 1892 et l'instauration de l'impôt.

Les protestations comoriennes contre la signature des traités de 1885 et 1886 deviennent de plus en plus nombreuses. Les hostilités contre le sultan Said Ali et Léon Humblot s'accentuent et la tournure que prennent les événements force le sultan à quitter la Grande Comore en 1891. Les autres sultans se rebellent et demandent la déposition de Said Ali et le retour au système de rotation du titre tibe. La fuite de Said Ali plonge l'île dans une anarchie totale et livre le trône à de nombreux prétendants .Selon Jean Martin30(*), Léon Humblot compte dix neuf candidats qui se disputent le titre de Tibe. Mais ce sont des gens compromis dans les récents troubles, et qui, aux yeux des Français, ne sont pas dévoués à leurs intérêts dans l'île. Il est donc difficile de trouver un sujet à élever au rang de sultan tibe. Le climat de tension qui règne dans l'île implique une intervention militaire des Français. Le 11 août 1891, le capitaine Dubois débarque à Salimani avec un détachement de quarante hommes, accueillis avec joie par Humblot et les partisans de Said Ali. Une fois la situation maîtrisée, les sanctions répressives s'en suivent immédiatement. En exil, Said Ali prononce des condamnations à mort (les condamnés sont progressivement graciés et rejoignent l'île) et d'autres fauteurs de trouble sont déportés à Obock puis en Nouvelle-Calédonie. La rébellion s'effondre, le calme est rétabli et le sultan peut donc retourner en Grande Comore. C'est dans cette ambiance explosive qu'intervient la signature du traité de janvier 1892.

Le traité dit de protectorat est une étape dans l'acheminement vers l'annexion de Ngazidja. Il n'a jamais été franchement accepté par les sultans. Ces derniers suivent toujours une politique dont le but est de reprendre le terrain perdu. Ce traité de 15 articles est cosigné par la France et le sultan Said Ali, soucieux d'empêcher le retour des révoltes et d'assurer la paix, ainsi que le bonheur et la prospérité de ses sujets. Il abolit l'ancien régime et réorganise complètement l'île. Il instaure les douze provinces, gouvernées par huit Cadis, secondés par les chefs de village qui constituent l'administration indigène de Ngazidja. Said Ali est reconnu seul sultan, reconnaissance théorique, car en réalité il est réduit au titre de figurant. Un esclave dans son propre royaume. En 1887 déjà, les pouvoirs du sultan sont compromis. Dans ses correspondances, Léon Humblot fait allusion à la mésentente entre le résident Weber et le sultan. Il note : « Said Ali reproche au résident de lui avoir fait perdre son autorité dans l'Île en le traitant comme un esclave et non comme un sultan... »31(*) C'est au Résident que reviennent les pleins pouvoirs en toute légalité. Le traité instaure la justice et surtout lance les bases d'un nouvel ordre économique de l'île. Ayant ainsi mis fin provisoirement à toute opposition, la France entreprend de transformer l'île. C'est dans ce traité que sont posés les premiers principes de la fiscalité. « L'impôt est fixé à deux roupies et demi par habitant de douze à soixante ans. »32(*) Il est personnel et imposé à tous, indépendamment des revenus, il n'épousait pas forcement la conjoncture. Aucune étude n'est préalablement réalisée sur la situation financière des indigènes, comme le souligne Guillaume Pierre :

« ...Le procédé est commode, parce qu'il ne nécessite aucune enquête préalable sur la nature et l'importance de la fortune de chacun. Il est d'ailleurs assez équitable, parce que, chez les primitifs, les grandes inégalités de fortune sont rares... »33(*)

La nature de la contribution fiscale évolue, par souci de rentabilité surtout durant la guerre de 1914 -1918.34(*) La France restreint les subventions qu'elle accorde aux colonies et le poids de la Guerre se traduit par l'augmentation des impôts. La fiscalité devient une charge pour les Comoriens, ainsi « ...l'effort de guerre suscite bientôt des résistances surtout dans les colonies françaises où la pression était particulièrement forte... ».35(*) La seule possibilité de s'en acquitter pour la majorité moins fortunée des Comoriens, est de travailler la terre ou de s'engager chez les colons. L'impôt laisse sans recours paysans et éleveurs pauvres qui, faute de moyens, se voient contraints de se séparer de leur lopin de terre ou de leur unique vache. La société Humblot n'est pas à la hauteur de fournir du travail à tout les monde, et comme pour décupler le désarroi, elle n'offre qu'un salaire de misère. Humblot s'arrange également sur le plan administratif pour décourager les candidats à l'émigration qui ne s'engagent pas chez lui.36(*) En Outre, les terres cultivables sont accaparées par la société Humblot, ce qui complique encore plus la situation financière des contribuables. Le Gouverneur de Mayotte en est convaincu malgré la pression exercée sur les Comoriens : « ...Néanmoins, et outre les raisons ci-dessus, il est absolument certain que la situation des habitants de la Grande Comore est très misérable... »37(*). L'augmentation de l'impôt ne laisse pas indifférents les Comoriens qui ne tardent pas à réagir. Outre le souhait de voir l'impôt diminuer, ils exigent l'exemption des femmes. Mais cette exemption des femmes va multiplier l'impôt par trois. Ce qui ne modifie en rien la charge des contribuables.

« ...Il est en effet à remarquer que l'élévation de 5 francs à 15 francs de l'impôt personnel a été la conséquence de la suppression de l'impôt sur les femmes. Ces deux mesures successives et corollaires l'une de l'autre ont, en définitive, peu augmenté les impositions des Comoriens...»38(*)

Le but visé est de faire supporter toutes les dépenses du protectorat par le budget du sultanat, comme le prévoit l'article 9 du traité.39(*) C'est un moyen de créer de nouveaux besoins pour mettre au travail des populations désorientées par la destruction de leur système social. L'impôt est considéré comme l'instrument nécessaire de la mise en valeur de la colonie. Il apparaît comme le moyen de pression efficace pour livrer la main d'oeuvre indigène aux entreprises et plantations des colons. Perçu en argent, l'impôt intègre une part croissante de la population dans une économie monétaire. Les Comoriens ayant besoin de numéraire pour payer leur impôt, ils sont forcés de chercher un emploi salarié. Enfin, l'impôt permet aux autorités coloniales d'assurer la protection et la justice aux habitants de l'île, et de maintenir l'équilibre financier de l'Île. Pour atteindre ces résultats les autorités doivent avoir recours aux mesures fiscales en rapport avec les moeurs et les forces productives de la population. C'est en fonction de l'impôt qu'est apprécié le travail des autorités locales. Il devient un enjeu important sur le plan économique, mais aussi sur le plan politique. Car il doit prouver la soumission de la population à la colonisation en payant l'impôt et de surcroît, démontrer que les autorités coloniales ont en mains, le contrôle de la situation.

Mais la fiscalité nouvellement instituée, est aussi une source de dérives économiques et sociales. Coquerie - Vidrovitch considère l'impôt comme « un support de la monoculture qui   contribue à aggraver fâcheusement l'avenir économique en promouvant la culture. Il participe également à faire dangereusement baisser les cultures vivrières qui, entièrement délaissées aux mains des paysans, ne reçoit aucune amélioration technique. »40(*) En Grande Comore, la culture de la vanille se développe au détriment de la culture vivrière. En outre, les contribuables deviennent sensibles à l'extorsion sans compensations palpables, et d'autre part la vie de misère qu'ils mènent ne joue pas en faveur de l'impôt. Les fonctionnaires chargés de sa perception n'ont pas tardé à se heurter à d'énormes difficultés.

* 28 29 KI-ZERBO J, ( sous la direction), Histoire Générale de l'Afrique I. Méthodologie et Préhistoire Africaine, Présence Africaine/Edicef/Unesco, Paris, 1986.

* 30 MARTIN Jean, Comores : quatre île entre pirates et planteurs tome 2, Genèse vie et mort du protectorat (1875-1912), l'Harmattan, Paris, 1998.

* 31 CAOM, MAD Série Géographique Carton n° 406 dossier n° 1083. Lettre de Léon Humblot au ministre de la Marine et des Colonies, du 18/09/1887,

* 32 DUPLANTIER N, La Grande Comore, sa colonisation, Augustin Challamel, Paris 1904.

* 33 GUILLAUME P, Le monde colonial XIXe -XXe siècle, Armand Colin, Paris, 1994.

* 34 COQUERIE-VIDROVICTH C & MONIOT H, l'Afrique noire de 1800 à nos jours, PUF, Paris, 1974.

* 35 ALMEIDA-TOPOR (d' H°), L'Afrique au XX ème siècle, Armand Colin, Paris, 1999, 363 pages.

* 36 ATTOUMANI M, Les rapports entre Madagascar et les Comores : De la veille de la colonisation au lendemain du rattachement à la Grande île, mémoire de maîtrise d'histoire, Paris 1, 19802/1981.

* 37 CAOM MAD C412, D1106. Note du 8/12/1906, par le Gouverneur de Mayotte et Dépendances.

* 38 CAOM, Fond Ministériel, MAD, Série Géographique, C412, D1106.Note de janvier 1907,

* 39 Voir le traité de janvier 1892, en annexe.

* 40 COQUERIE-VIDROVICTH C & MONIOT H, l'Afrique noire de 1800 à nos jours, PUF, Paris, 1974.

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