Section 2 : Les politiques sectorielles
A la faveur du second sommet de la terre qui s'est tenu en
juin 1997, dans le cadre d'une session extraordinaire des Nations Unies, il a
été unanimement reconnu que le bilan était loin de
répondre aux multiples attentes, qui si elles avaient été
correctement suivies auraient permis d'atténuer, un tant soit peu, les
menaces qui pèsent sur l'écosystème. Les gouvernements
n'avaient pas tenu les engagements pris à Rio. « En effet, les
trois conventions qui avaient été adoptées en 1992 ainsi
que « l'agenda 21 » qui devait constituer le programme de
développement durable pour le troisième millénaire n'ont
pas été mis en oeuvre. Restent donc les politiques sectorielles,
certes moins ambitieuses, mais qui peuvent avoir une valeur programmatique.
»
De ces politiques sectorielles nous pouvons en envisager deux :
il s'agit des échanges dette/ nature et de l'éco-business.
A- Les échanges dette/nature
L'échange dette/nature est un mécanisme de
conversion de dette qui ouvre de nouvelles perspectives en matière de
protection de l'environnement. C'est un instrument au service du redressement
économique des Etats endettés comme des politiques publiques
environnementales. L'échange dette/nature vise une meilleure protection
du milieu naturel des pays en développement, tout en travaillant
à la réduction de leur dette. (Josepha Laroche, 2000, pp439-
440)
Dans ce mécanisme une ONG qui a préalablement
obtenu l'accord d'un Etat débiteur, fait la démarche
auprès d'un Etat débiteur pour racheter sa dette en devises pour
un prix inférieur à sa valeur nominale dans le but d'obtenir en
contrepartie le décaissement par ce pays d'un montant en monnaie locale
supérieur au prix de la créance. Le montant obtenu est ensuite
utilisé pour la mise en oeuvre d'un programme de protection de
l'environnement. Ce procédé permet au pays débiteur non
seulement de racheter sa dette à moindre coût mais qu'en plus, cet
argent est réinvesti dans le pays sous forme de projet de protection de
l'environnement. Ce procédé est intéressant pour tous les
partenaires. Les ONG gagnent en notoriété et
bénéficient de fonds supplémentaires pour mener à
bien les activités de protection de l'environnement. Le créditeur
dispose d'une opportunité de se débarrasser de créances
qui risqueraient de ne jamais être recouvrées.
Bien qu'apparente, la simplicité de ce
procédé se révèle toutefois complexe du fait du
nombre des intervenants qui sont cinq au minimum :
-l'investisseur, il s'agit de l'organisme qui finance
l'acquisition de la dette à convertir, ici c'est l'ONG environnementale
;
-le créancier, une banque privée membre du club de
Londres ou des créanciers publics, partie au club de Paris ;
-le pays débiteur par l'intermédiaire de son
ministère des finances ;
-le bénéficiaire ultime de la conversion de dette,
une société locale ou une ONG du sud.
Le problème qui se pose est que ce mécanisme
lorsqu'on le rapporte au volume de conversion de dette qui a été
révisé jusque là, sa proportion reste très
marginale, car les pays débiteurs préfèrent le plus
souvent avoir recours au principe de conversion de dette dit classique pour
attirer les investissements étrangers vers les secteurs productifs ou
alors contribuer à des programmes de privatisation et non pas de
faciliter l'activité d'ONG sur leur territoire.
Parmi les pays ayant bénéficié du
mécanisme de l'échange dette/nature entre 1987 et 1989 au nombre
des organes impliqués il y avait non seulement des ONG traditionnelles
mais aussi de deux gouvernements : les Pays-Bas et la Suède.
Entre autres problèmes, on note le fait que les pays en
développement sont très peu enclin à accepter les
conditions de ce type d'accord qui induisent par ailleurs des ingérences
et des atteintes à la souveraineté. Les pays créditeurs
quant à eux craignent de perdre leur influence d'où leur
hésitation à transférer d'importantes
responsabilités aux ONG pour la réalisation des programmes de
protection de l'environnement. Enfin, les gouvernements
bénéficiaires des pays en développement tardent
eux-mêmes à se mettre en conformité avec les obligations
contractuelles qui leur permettraient de bénéficier de la
conversion de leur dette en investissements pour la protection de
l'environnement.
Notre pays a récemment bénéficié
du mécanisme d'échange dette/nature. Cela a été
possible grâce au soutien de l'ONG WWF et de la facilitation du PFBC
(Programme des Forêts du Bassin du Congo). Le bénéficiaire
à terme étant l'Agence Nationale des Parcs Nationaux). En effet,
déclarant que le monde devait aider le Gabon à préserver
ses forêts, le président Sarkozy a annoncé que la France
convertirait en aide une partie de la dette gabonaise à son
égard, soit 50 millions d'euros sur les sommes dues au club de Paris.
» (Gabon, automne 2007, p.6)
Tel que l'accord de conversion de dette a été
conclu, nous constatons qu'il ne répond pas vraiment au mécanisme
d'échange dette/nature que nous avons préalablement
décrit. Toutes les conditions ne sont pas remplies pour que cette
transaction soit qualifiée d'échange dette/nature. L'investisseur
ici n'est pas une ONG qui rachète une partie de la dette, c'est
plutôt la France qui a décidé unilatéralement de la
conversion de la dette gabonaise. Elle s'est servie d'une ONG en l'occurrence
le WWF.
De plus, la conjoncture économique gabonaise
étant particulièrement favorable du fait du choc pétrolier
actuel, avec un baril avoisinant les 140 dollars, l'Etat avait donc
suffisamment de fonds pour rembourser sa dette par anticipation qui
s'élevait à 1,6 milliards d'euros. Or le mécanisme tel que
nous l'avons décrit se met surtout en branle lorsque le pays
débiteur connaît une conjoncture difficile, à tel point
qu'il éprouve des difficultés à rembourser sa dette. C'est
à cette occasion que le créditeur use du mécanisme pour se
débarrasser de créances qui risqueraient de ne jamais être
recouvrées.
Il ressort que le mécanisme d'échange
dette/nature ne constitue pas un moyen de résoudre la crise de
l'endettement, mais doit être considéré comme une technique
de protection de l'environnement.
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