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ECOLE NATIONALE D'ADMINISTRATION SECTION
DIPLOMATIE
26èmePROMOTION
PROJET TUTORE
Pour l'obtention du diplôme de l'Ecole
Nationale d'Administration
Corps de Conseiller des Affaires Etrangères
THEME :
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LA VALORISATION DES PARCS NATIONAUX
ET LES POLITIQUES DE COOPERATION
CULTURELLE ET SCIENTIFIQUE
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Présenté et soutenu publiquement par :
Monsieur Stéphane ANGO
Tuteur académique :
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Tuteur de stage :
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Eustache MANDJOUHOU YOLLA
Enseignant à l'E.N.A Norbert ASSOUMOU
NDONG
Chef de Division de la Coopération
Scientifique et Culturelle
Libreville, juillet 2008
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Dédicace
Je dédie ce travail à mes parents et à
toutes les personnes de bonne volonté qui ont contribué à
la réalisation de ce mémoire.
Introduction générale
Le Gabon est un pays situé au Centre Ouest de
l'Afrique, dont la forêt recouvre 80% de la superficie totale du pays, ce
qui représente vingt (20) millions d'hectares. C'est un pays de
forêt par excellence. C'est donc naturellement que l'économie
gabonaise qui « au début du 20ème siècle,
basée sur une extraction à faible échelle des produits
ligueux et non ligueux de la forêt, est passée à une
économie d'extraction mécanisée du bois d'oeuvre, qui
visait le chargement des grumes d'Okoumé sur des bateaux de
manière brute destinée aux usines de contre-plaqué
outremer » (Chris Wilks et al, 2003, p.72). Peu après
l'indépendance du pays en 1960, « le pétrole supplanta le
bois économiquement et le Gabon passa d'une économie d'extraction
du bois à un économie d'extraction du pétrole. »
(Chris Wilks et al, 2003, p.73).
Le Gabon est un pays ayant longtemps basé son
économie principalement, sur les devises que lui procure l'exploitation
de ses ressources minières en général et
pétrolières en particulier. En effet, « le pétrole
pèse lourd dans l'économie nationale. Il compte en chiffres
arrondis pour 40% du PIB, 80% de la valeur des exportations, 60% des recettes
budgétaires de l'Etat » (Roland Pourtier, 2004, p. 40).
La forte dépendance de cette économie
vis-à-vis des ressources minières est une faiblesse structurelle
importante, caractérisée par le faible développement du
tissu économique et une dépendance accrue vis-à-vis des
ressources naturelles non renouvelables. Cette priorité accordée
aux seules richesses de son sous-sol a entraîné la marginalisation
des autres richesses. Et ce, d'autant plus que « la rente
pétrolière a ainsi entamé son déclin depuis 1997
pour atteindre 13 millions de tonnes en 2005. La menace d'un épuisement
de pétrole s'est faite plus pressante, entraînant une baisse
régulière de 5% par an. Dès lors, bien que la hausse du
prix du pétrole permet aux recettes d'augmenter, l'exploitation de
nouveaux champs pétroliers et les efforts pour optimiser la
récupération des champs existants ne parviennent pas à
compenser la baisse de production des champs principaux » (Park Haejin,
2007, p.75).
Au regard de cette situation, une diversification de
l'économie aurait pour but le passage d'une économie de rente
à une économie diversifiée plus forte et
indépendante où la production et la créativité sont
des éléments importants.
Les autorités du pays en accord avec les conclusions du
DSCRP (Document de Stratégie de croissance et de Réduction de la
Pauvreté) ont décidé d'axer cette diversification de
l'économie vers une meilleure mise en valeur du potentiel du pays dont
les moteurs de la croissance devraient être :
· La forêt et l'environnement ;
· Les mines et les hydrocarbures ;
· Le tourisme ;
· L'agriculture et l'élevage ;
· La pêche et l'aquaculture.
Grâce au potentiel forestier d'envergure dont dispose le
pays, le secteur environnement connaît un regain
d'intérêt.
A l'occasion du sommet de la terre en 2002 (sommet mondial du
développement durable organisé par les Nations Unies) qui s'est
tenu à Johannesburg en Afrique du Sud, et qui avait
réuni une centaine de chefs d'Etat, le Gabon, par la
voix de son Président Omar Bongo Ondimba, a annoncé la
création de treize parcs nationaux, recouvrant chacune des neuf
provinces gabonaises. Ces treize sites, riches en biodiversité, ont
été créés à la suite d'études
menées par divers organismes de défense de l'environnement tels
que le WCS Gabon, La Direction de la Faune et de la Chasse (DFC) et WWF (Fonds
mondial pour la nature).
Avec cette décision, pour l'instant le Gabon est le
seul à avoir été fidèle à l'engagement pris
dans le cadre du processus de Yaoundé par les présidents des
Etats de l'Afrique Centrale de protéger au moins 10% de leur territoire
avec des parcs nationaux. Corollairement, cela a eu pour effet de hisser le
Gabon parmi les pays qui se préoccupent de la protection de la nature au
plus haut point. « Dans de telles proportions, seul le Costa Rica peut se
targuer d'un pourcentage de territoire protégé aussi
élevé. Les autorités politiques de San José ont en
effet été les premières au monde à promouvoir des
projets d'écotourisme » (Jean Hervouët, 2007, p.80)
Au regard de cette décision historique, notre attention
a été retenue par « la valorisation des parcs
nationaux et les politiques de coopération culturelle et scientifique
», c'est ainsi que se libelle le sujet qui fait l'objet de ce
mémoire.
Il nous semble opportun de nous intéresser aux
motivations d'une telle prise de position. Et in fine, l'intérêt
que le pays pourrait tirer aussi bien du point de vue national qu'international
de cette stratégie.
Il convient de noter que concomitamment à cette
décision de création des parcs nationaux, les autorités
ont misé sur l'écotourisme. C'est un type de tourisme dit
écologiquement durable. « Contrairement aux industries extractives
du bois, des mines et du pétrole basées sur des ressources
limitées car elles sont difficiles ou impossibles à renouveler,
le tourisme peut, moyennant un certain nombre de conditions durer
indéfiniment ». (Manuelle Prunier, 2006, p.34).
De plus, ce choix est motivé par un environnement
international favorable. « Le choix de l'écotourisme pour le Gabon
s'explique par la passion pour la nature qui anime les milliards de touristes
répartis à travers le monde. Car la nature dans le pays offre un
spectacle touristique inimaginable, capable de les séduire par des
effets qui entraînent l'activité économique du pays »
déclarait (Medhi Teale, ex Haut Commissaire gabonais au tourisme lors
d'une conférence de presse à Libreville en janvier 2002).
Au surplus, au cours d'un séminaire atelier
régional consacré à l'écotourisme, Monsieur
Francesco Frangialli, Secrétaire Général de l'Organisation
Mondiale du Tourisme (OMT), aura mentionné qu'en 1990,
l'écotourisme avait attiré 25 millions de touristes dans le monde
entier. Quinze ans plus tard, ce chiffre est monté à 808
millions, soit un taux de croissance annuel moyen de 65% ! (...).
Ce secteur connaît aujourd'hui, tous pays confondus le plus
forte croissance mondiale dans l'activité touristique (Jean
Hervouët, 2007, p. 80).
Cet environnement favorable s'explique par le fait que, «
les touristes commencent à se lasser des vacances dans des paradis
artificiels et de plus en plus nombreux sont ceux qui partent
à la recherche d'expériences authentiques et
enrichissantes, quitte à devoir payer plus cher, faire davantage
d'efforts et vivre moins confortablement » (Manuelle Prunier, 2006, p.
23).
La création des parcs nationaux procède d'une
justification qui s'établirait aussi bien sur le plan économique
que sur le plan environnemental et du point de vue national et international.
Le Gabon jouit d'un potentiel touristique disponible qui est extraordinaire :
« coté nature, le Gabon peut prétendre proposer à des
futurs touristes des paysages variés et spectaculaires (littoral
océanique, forêts denses de plaine ou de basse montagne, cours
d'eau de tous types et même vastes savanes herbacées ou
arbustives) peuplés de presque tout ce que l'Afrique Centrale compte de
grands mammifères (des éléphants aux baleines en passant
par les gorilles et les antilopes) et d'oiseaux migrateurs ou non (...) sans
s'étendre sur les reptiles (notamment les tortues marines) et les
insectes qui sont des sources encore sous exploitées de
découvertes touristiques. Côté culture, la quarantaine
d'ethnies qui compose la population gabonaise propose au reste du monde un
foisonnement d'expressions orales, musicales et plastiques qui n'ont
été découvertes que tardivement en Occident et qui sont
par conséquent encore bien préservées de l'acculturation
ailleurs constatée » (Romain Calaque, 2006, p. 5).
La stratégie des autorités vise la
préservation de la biodiversité évoquée
précédemment ainsi que, la confortation de l'économie du
pays qui passe par la diversification de cette dernière afin de stimuler
une croissance durable. « L'écotourisme est le fondement principal
de la nouvelle politique d'industrie touristique de l'Etat » (M.L.
Ropivia, 2004, p. 56).
Le secteur assurera la prospérité future en
apportant une nouvelle source de revenus. Il peut créer des emplois en
créant des entreprises touristiques. « C'est également une
chance de développement économique dans un monde rural dont
l'agriculture disparaît inexorablement et dont les centres urbains, avec
la fin du pétrole, n'ont plus rien à attendre de la
décentralisation industrielle » (Bernadin MINKO MVE, 2006, pp. 9
1-92).
Le thème de la 62ème Assemblée
Générale de l'ONU qui portait sur les changements climatiques a
permis à notre pays de réitérer son engagement à la
préservation de la nature de par son choix sur la création des
parcs nationaux qui devraient contribuer aux efforts de maîtrise du
réchauffement climatique et par la même occasion participer
à la réduction des gaz à effet de serre responsables du
changement climatique.
Il nous revient à terme de nous interroger su les
objectifs poursuivis par une telle politique. A n'en point douter, il s'agit
là, de rechercher une alternative à la simple exploitation de nos
ressources naturelles qui se font de manière brute en
général, en mettant l'accent sur la préservation de
l'écosystème.
L'atout dont dispose le pays, de par la richesse de sa
biodiversité doit contribuer à la diversification des ressources
et à la création de revenus additionnels au profit des
populations les plus déshéritées (Muriel Devey, Jeune
Afrique n°2418, p. 70). Le développement des parcs nationaux vise
à dynamiser le tourisme qui est un secteur dont le poids
économique reste très minime.
La récente inscription en 2007 du parc de la Lopé
Okanda au patrimoine mondial de l'humanité consacre et magnifie la
richesse de la biodiversité et de la culture du réseau des
parcs
nationaux. Avec cette distinction, la «
Lopé-Okanda rejoint le petit cercle des sites classés au
patrimoine mondial de l'humanité pour la qualité de sa nature et
de sa culture, au même titre que le parc national de Tongariro en
Nouvelle-Zélande, le Machu Picchu au Pérou et le parc du
Drakensberg en Afrique du Sud ». C'est une grande réussite a
déclaré Allen Putney, Vice- Président du Patrimoine
Mondial de la Commission Mondiale pour les Aires Protégées
(UICN)1. Il s'agira dans cette initiative de faire en sorte que le
Gabon devienne la « Mecque de la nature » qui attirera des
pèlerins venus des quatre coins du monde pour constater qu'il y a de
pareils trésors su la planète.
Il n'en demeure pas moins que cette initiative aura un impact
aussi bien local qu'international. « C'est une initiative dont les
répercussions imposeront certainement des sacrifices à court et
à moyen terme, mais elle nous aidera à réaliser notre
ambition de léguer ces merveilles de la nature aux
générations futures » (Omar Bongo Ondimba, cité par
Jeune Afrique n°2418, p. 62).
Après avoir planté le décor concernant
les motifs et l'intérêt de l'initiative de la création du
réseau des parcs nationaux à travers le pays, il nous semble
opportun de relever quels peuvent être les freins qui pourraient entraver
la mise en oeuvre de cette initiative en faveur du développement
durable.
Il faut noter que l'écotourisme est le secteur
d'activité sur la base duquel doit reposer le développement des
parcs nationaux. Il s'avère toutefois que, le département du
tourisme qui a en charge la promotion de l'écotourisme, autour des parcs
nationaux est un domaine dont « le bilan économique n'a pas
toujours été déterminant sur le plan national même
si son taux de croissance n'est pas réellement connu faute
d'études statistiques fiables » (Stéphanie NKOGHE, 2006,
pp.48-49).
Ainsi, « la part du tourisme dans l'économie
nationale est quasiment insignifiante. Elle ne participe qu'à environ 3%
du P.I.B » (Aurel NGUEMA citée par Stéphanie NKOGHE, 2006,
p. 49). Un certain nombre de difficultés obèrent effectivement le
décollage du tourisme au Gabon. Il s'agit notamment « du paradoxe,
potentialités touristiques en province, ressources humaines à
Libreville » (Stéphanie NKOGHE, 2006, p. 49), il résulte de
ce constat un déficit d'implication des ressources humaines dans
l'activité touristique provinciale et pourtant les provinces du Gabon
concentrent d'énormes potentialités naturelles et culturelles qui
ne peuvent qu'intéresser le tourisme (Stéphanie NKOGHE, 2006, p.
49).
Entre autres difficultés, on peut citer le transport,
qui est « la principale raison de ce lent démarrage »
(Mylène Remy, 2004, p.46). Les difficultés sont également
le fait des pluies torrentielles, « celles-ci constituent pour le
réseau routier un handicap majeur, à tel point que des sites
magnifiques restent souvent hors d'atteinte par des lignes
régulières d'autocars et que l'entretien de routes
bitumées y est difficile » (Mylène Rémy, 2004, p.
46).
Le travail que nous nous proposons de mener ne se focalisera
pas sur la description du réseau des parcs nationaux car ce travail a
déjà été effectué par des
spécialistes des sciences dites « dures » à travers
trois ouvrages de références sur les parcs nationaux du Gabon, il
s'agit en
1 Union Mondial pour la Nature
l'occurrence de : « AKANDA et PONGARA », «
IVINDO et MWAGNA » et « LOANGO, MAYUMBA et le BAS OGOOUE ». Ces
trois ouvrages ont fort bien décrit les forces naturelles qui ont mis en
place les paysages, les éléments principaux de l'histoire humaine
les ayant façonnés. Ces ouvrages ont aussi essayé de
parler autant que faire se peut des aspects écologiques se rapportant
à ces parcs, ainsi que du répertoriage de certaines
espèces endémiques2. L'objet de ce travail ne portera
donc pas sur les aspects sus - cités, car nous ne disposons ni de
l'expertise ni du temps nécessaire pour abattre un tel travail. C'est
pourquoi nous avons choisi d'axer ce travail sur les politiques de valorisation
des parcs nationaux.
Il s'agira notamment, en parlant de développement
durable, de voir comment la législation intègre les
préoccupations écologiques dans la conduite des activités
économiques et aussi d'étudier la réorientation de la
coopération gabonaise suite à la création des parcs
nationaux.
Pour y arriver nous avons délibérément
opté dans une première partie de montrer l'évolution de la
législation en matière de protection de l'environnement, ensuite
nous essayerons d'éprouver cette législation à
l'épreuve des faits tel qu'ils se déroulent dans nos parcs
nationaux.
Dans une seconde partie, nous essayerons de voir quelle
politique de coopération mettre en oeuvre aussi sur le plan scientifique
que culturelle pour que le pays tire effectivement avantage du réseau de
parcs nationaux que regorge la Patrie.
2 Se dit d'un organisme dont la distribution géographique
est limitée à une certaine région.
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