CHAPITRE II
Avantages et Inconvénients de la Titrisation des
prêts
bancaires. Esquisse Méthodologie de
recherche
2.1 Implications de la titrisation : avantages et
inconvénients de la titrisation pour ses acteurs
Avantages (et inconvénients) pour les
investisseurs
ROSE (1998) déclare que la technique
financière offre aux investisseurs la
possibilité d'investir dans de nouveaux produits, de
bénéficier de structures de paiement mieux adaptées
à leurs besoins, et d'obtenir un meilleur rendement pour un niveau de
notation donné. BRI et PRAET (2005) prolonge que
l'intérêt pour les investisseurs réside dans la
diversification des investissements et l'émergence de nouveaux profils
de risque rendement plus attractifs, l'objectif principal de la structuration
en tranches étant de créer au moins une tranche dont la notation
est supérieure à la notation du panier d'actifs. La titrisation
donne aux investisseurs l'opportunité de mieux gérer le risque de
leurs portefeuilles d'investissement, grâce à un plus grand
accès aux nouvelles classes d'actifs plus souples en matière de
risque et de rendement.
MITCHELL (2004) et BRI et PRAET
(2005) expliquent que le découplage des risques à
savoir la sortie du panier d'actifs sous-jacent du patrimoine du cédant
offre d'autres avantages aux investisseurs : les paiements aux
investisseurs sont affectés uniquement par la performance du panier de
crédits transférés. En dehors des défauts
enregistrés par le panier (défaillance des débiteurs du
panier d'actifs), aucun autre facteur par exemple la mauvaise performance
managériale du cédant ou sa faillite n'affecte ces paiements. Les
titres émis ont des caractéristiques bien définies et
avec des prévisions de rendement nettement plus fiables que les
prévisions financières du cédant. Par conséquent,
le risque de crédit du panier d'actifs est souvent plus faible que le
risque de crédit du cédant. Deux éléments, les
caractéristiques spécifiques de ces titres avec des distributions
de rendement plus prévisibles et le nombre nettement plus limité
de problèmes de gouvernance du FCC contrairement au cédant,
justifient cette amélioration du risque. HALL, STUART,
COUSSERAND, KOEPPEN-MERTE et NAKATA (2004) affaiblit cette
argumentation par la mise en évidence de nouveaux risques
inhérents à la titrisation d'où la nécessité
de bien cerner, outre le risque de crédit du panier, la totalité
des risques :
1. Risques attachés à la structuration
de l'émission
La structuration en tranches de l'émission contraint
les émetteurs et les agences de notation à imaginer une structure
qui équilibre bien les conflits d'intérêts entre les
investisseurs. La détention de la tranche « equity »
par les cédants contribue à cet équilibre mais peut
constituer elle-même une importante source de conflits potentiels.
2. Risques attachés au portefeuille
sous-jacent
Il y a en trois principalement :
- Le risque de paiements anticipés justifiés par
l'amélioration de la situation financière de certains emprunteurs
ou par les avantages qu'ils cherchent à tirer de l'évolution des
taux d'intérêts ou par l'avènement de produits
structurés plus attractifs. Les paiements anticipés
réduisent la durée de vie moyenne du portefeuille et
déstabilisent les cash-flows futures, exposant les investisseurs
à une incertitude considérable sur ces cash-flows futures.
Plusieurs moyens permettent cependant de contenir le risque de paiements
anticipés : la discrimination des droits des tranches dans les flux
de remboursement, la prévision d'une tranche entièrement
immunisée contre les paiements anticipés.
- Le portefeuille sous-jacent peut incorporer aussi des
risques de taux et de change : risque de taux d'intérêts
et/ou de taux de change en présence de différence de taux
d'intérêts (fixe contre variable) ou de différence de
devises entre les actifs cédés au SPV et les titres (dettes)
émis par le SPV.
- Le risque de liquidité peut être aussi
important car le gestionnaire doit être en mesure de payer à bonne
date les échéances aux investisseurs quelles que soient les
difficultés conjoncturelles. Il doit pouvoir honorer les engagements
pris vis-à-vis des investisseurs quelle que soit la conjoncture.
3. Risques exogènes et risques de tierces
parties
La performance satisfaisante d'une transaction de financement
structuré nécessite au préalable que différentes
parties prenantes remplissent leurs engagements respectifs.
Problématique de la qualité du cédant, de l'arrangeur, du
gestionnaire et du dépositaire.
FENDER et MITCHELL (2005) renforce cette
argumentation en ajoutant que le financement structuré crée des
risques sans rapport avec un défaut sur le panier d'actifs mais qui
n'ont pas moins de répercutions sur le risque de crédit des
tranches. DeMarzo et Duffie (1999), cité par MITCHELL
(2004), objecte également que le prêteur a
intérêt à sélectionner et à vendre les
prêts de mauvaise qualité. L , Akerlof (1970),
cité par MITCHELL, ' / . S'il
décide de céder certains de ses actifs, il peut naturellement se
poser un problème de sélection adverse. Etant donné que la
dette ou le capital de toute entreprise représente en
réalité des titres adossés, l'intuition du
théorème de Modigliani Miller
s'applique. Leland et Pyle (1977), cité par
MITCHELL (2004), montre que le montant de fonds propres qu'un
promoteur accepte d'injecter dans son projet est interprété comme
un indicateur de la qualité du projet. Plus la qualité du projet
est élevée, plus sera élevé le capital investi par
le promoteur, et plus le projet sera valorisé par le marché.
Duffee et Zhou (2001) complète que la titrisation des
prêts bancaires réduit l'intérêt du prêteur de
bien suivre les crédits de mauvaise qualité, le prêteur
ayant acheté une protection pour les prêts de basse
qualité. Morrison (2002) note la motivation accrue
pour le prêteur de provoquer plus rapidement les défauts de
paiement, étant donné qu'il s'est débarrassé du
risque de crédit. Selon Kiff et al (2002), cité
par MITCHELL (2004), l'impact de la
titrisation sur les problèmes d'asymétrie d'information
s'applique seulement aux prêts bancaires et non au marché
obligataire dont les informations sont quasiment du domaine public.
BRI et PRAET (2005) précise que '
' ' ' ' . Dans le même ordre d'idée, la titrisation
par la création de plusieurs tranches satisfait mieux la segmentation du
marché caractérisée par le fait que les investisseurs
n'ont pas les mêmes préférences de risques. Les
caractéristiques de libellé et les flux de trésorerie sont
plus adaptés aux besoins spécifiques de catégories
particulières d'investisseurs. Gorton et Pennacchi
(1990), cité par MITCHELL (2004), confirme que sur un
marché avec certains investisseurs informés et d'autres sans
information, il est intéressant de créer plusieurs tranches de
titres. Les premiers sont supposés être en mesure de suivre le
rendement des titres alors que les seconds ne peuvent le faire. Boot et
Thakor (1993), cité par Mitchell (2004),
emploie une intuition similaire à celle de Gorton et
Pennacchi (1990) pour affirmer que, dans un marché
caractérisé par une asymétrie d'information entre
investisseurs, il est judicieux pour les entreprises de diviser leurs
cash-flows en titres senior et en titres subordonnés,
plus profitable pour la firme d'émettre de multiples
catégories de titres les uns sans risque pour les investisseurs moins
informés et les autres plus risqués et plus attractifs pour les
investisseurs potentiellement mieux informés ou en mesure de mobiliser
l'information. A la suite de ROSS (1976),
Gaur et al (2003), rapportés par MITCHELL
(2004), décrit à l'aide d'un algorithme comment
un cédant ou un arrangeur peut tirer parti des marchés financiers
incomplets par la création de nouvelles tranches de titres
adossés à un panier d'actifs. MITCHELL (2004)
approuve que l'asymétrie d'information, entre cédant et
investisseurs, ou, entre différents groupes d'investisseurs, facilite
la constitution du panier d'actifs et la classification des droits sur les
cash-flows en tranches. Plus le problème de sélection adverse
est accentué, plus il y a de chances de créer de la valeur
à travers la titrisation avec émission de plusieurs tranches. Les
investisseurs moins informés achètent les tranches de dette sans
risques et les plus informés achètent les tranches
risquées. Elle affirme que la
titrisation crée de la valeur pour cédants, arrangeurs et
investisseurs car elle élargit et complète le marché en
offrant aux investisseurs des titres avec des cash-flows taillés sur
leurs besoins. Duffie et Garleanu (2001), rapporté par
MITCHELL (2004), signale que la titrisation peut
améliorer la liquidité de plusieurs types d'actifs en augmentant
le nombre d'acquéreurs potentiels : cela réduit en effet les
coûts de transaction et améliore la liquidité des
tranches. Morrison (2002) indique que la titrisation
possède l'avantage, comparativement au marché secondaire des
crédits bancaires, de faciliter la gestion de la diversification du
portefeuille. Puisque les titres sont plus facilement échangeables. La
titrisation aide à compléter, à élargir les
marchés limités. DeMarzo et Duffie (1999)
analyse le problème d'asymétrie d'information dans le contexte de
la titrisation par un intermédiaire financier qui désire lever
des fonds, par exemple pour acquérir des actifs plus rentables, à
travers la vente de titres adossés à un actif ou à un
panier d'actifs. Au moment où il vend les titres, il détient
sûrement des informations privées sur les cash-flows attendus du
panier d'actifs. Il peut donc exister un problème de sélection
adverse similaire à celui analysé par Leland et Pyle
(1977).
DeMarzo et Duffie (1999) analyse
une situation où l'émetteur est informé au sujet
de la valeur des actifs alors que les investisseurs ne sont pas
informés. Par analogie aux résultats de Leland et Pyle
(1977), une conséquence du problème de sélection
adverse est que la quantité ou le nombre de titres émis servira
comme un signal au sujet des cash-flows des actifs sous-jacents. Le
cédant vend une faible proportion de titres si la qualité des
actifs est élevée.
En plus, DeMarzo et Duffie (1999) montre que
la conception du titre peut impacter le problème d'asymétrie
d'information, l'aggraver ou l'atténuer. Par exemple, il est possible
pour le cédant d'offrir des titres de dette sans risques si les
cash-flows venant des actifs sont connus par les investisseurs pour
excéder toujours un certain niveau minimum. Toutefois, l'émission
de tels titres pourrait nécessiter que le cédant conserve une
certaine proportion des cash-flows des actifs sous-jacents. Et cette
proportion pourrait être supérieure à ce que désire
garder le cédant qui est ainsi coincé entre son désir de
vendre les titres pour lever les fonds et la faible liquidité (prix
faible) de ces titres due au problème de sélection adverse avec
émission d'une quantité de titres assez
élevée. BRI et PRAET (2005) nuance que, si les
avantages liés à la diversification tirés de la
titrisation sont indéniables, ils sont illusoires si les mêmes
noms de débiteurs se retrouvent fréquemment au sein des paniers
d'actifs cédés et conseille la consolidation des expositions par
débiteur dupliqué tous paniers d'actifs confondus.
Lorsqu'il y a plusieurs tranches de titres, les investisseurs
moins informés sont susceptibles d'acquérir les tranches seniors
et les investisseurs mieux informés seront disposés à
acquérir les tranches juniors. Mais dans ces conditions, lorsque
la performance des actifs devient décevante, lequel des deux groupes
d'investisseurs pourrait le mieux gérer les actifs? Riddough
(1997), cité par MITCHELL (2004), a abordé cette
question: le fait que les détenteurs des titres juniors sont plus
informés signifie qu'idéalement ils sont mieux indiqués
que les autres pour restructurer le portefeuille en cas de performance
médiocre. Toutefois un conflit d'intérêt apparaît
ici entre les deux groupes. Comme les détenteurs d'actions prennent en
général plus de risque que les détenteurs d'obligations,
ils peuvent contre toute attente s'entêter à poursuivre des
actions qui retardent la liquidation du panier même quand cette
liquidation constituerait l'option la plus efficiente. De même, quand les
actifs sous-jacents sont aussi des titres négociables sur le
marché financier, les détenteurs d'actions peuvent avoir tendance
à remplacer les actifs peu performants par des titres plus
risqués mais avec de hauts rendements. Ces deux types d'actions ne
correspondent pas aux attentes des détenteurs d'obligation. Le conflit
d'intérêt créé en confiant la gestion du panier
d'actifs aux détenteurs des titres junior, investisseurs
informés, conduit à un problème de gouvernance. Il est
similaire au conflit d'intérêts entre actionnaires et
créanciers d'entreprise. Mais si à long terme, au niveau d'une
entreprise, les intérêts des actionnaires et des créanciers
peuvent concorder, il n'en est pas de même pour les titres qui ont une
durée de vie plus limitée et dont les actifs sous-jacents sont
très souvent à revenus fixes, difficiles à
améliorer par la gestion. La nécessité de gérer
apparaît seulement en cas de défaut de paiement ou de paiements
anticipés à réinvestir. Dans la pratique, de très
strictes limitations contractuelles sont imposées au sujet des actions
du gestionnaire. Afin de prévenir et d'équilibrer les risques,
les clauses, rapporte FENDER et MITCHELL (2005),
définissent de plus en plus :
· les seuils de remboursement
anticipé (surdimensionnement des garanties et obligation de
couvrir les paiements d'intérêts). En cas de franchissement du
seuil, les flux sont réorientés afin de protéger les
détenteurs de tranches supérieures.
· la préservation de la « marge
nette », écart entre le rendement du lot d'actifs sur
une période donnée, et les versements contractuels aux porteurs
des différentes tranches, est devenue une caractéristique
clé. L'on tend désormais à verser cette
« marge nette » dans un compte de
réserves, plutôt que la distribuer immédiatement aux
détenteurs des tranches inférieures, différant ainsi les
versements et protégeant mieux les résultats des titres de rang
supérieur.
Avantages pour les institutions financières
non bancaires
Les institutions financières non bancaires y prennent
une part de plus en plus active, car ce mécanisme, par le
démantèlement du cycle de crédit et en dissociant des
fonctions globalement dévolues jusque-là aux
établissements de crédit, leur ouvre un marché.
Pour MITCHELL (2004), la segmentation du
marché joue un rôle important dans la rentabilisation de
l'opération de titrisation pour l'arrangeur qui en profite pour
pratiquer une discrimination de prix. L'arrangeur tire parti aussi d'autres
types d'avantages comparatifs par rapport à ses concurrents, par exemple
un avantage de coût dans l'acquisition des actifs sous-jacents.
Oldfield (2000) cité par Mitchell (2004)
expose qu'un arrangeur peut profiter de la création de
plusieurs tranches seulement s'il possède un avantage comparatif, par
exemple : meilleur prix d'acquisition des actifs, meilleur coût de
mise en place de la titrisation ou un accès privilégié aux
informations concernant les préférences des clients. Dans la
mesure où d'autres intermédiaires peuvent acquérir des
actifs identiques et avoir même accès aux mêmes clients,
les profits potentiels à tirer de la segmentation sont rapidement
ramenés à zéro. Ces arguments suggèrent que les
actifs peu standardisés se prêtent plus aisément à
la concrétisation des opportunités de la segmentation du
marché que les actifs homogènes. Sinon, en cas d'actifs
standardisés dans le panier, la source principale de profit proviendrait
alors des relations d'affaires étroites avec les clients et de la
maîtrise par l'arrangeur de leurs attentes spécifiques.
.
Avantages et inconvénients pour les banques
GENSSE ET TOPSACALIAN (2001) soutient que
« le recours à la titrisation est un moyen pour la banque de
diversifier et d'accroître ses possibilités de
refinancement ». La titrisation est une nouvelle source de
refinancement des crédits que les banques incluent dans leur
schéma pour le financement des projets. La banque qui a recours à
la titrisation a accès ipso facto à un groupe beaucoup plus vaste
de créanciers sur les marchés financiers, ce qui ne peut
être que bénéfique. En outre, expliquent-ils, étant
donné que les investisseurs institutionnels sont tenus de limiter leurs
investissements sur un même établissement, un important
émetteur sur le marché obligataire peut aussi utiliser la
titrisation comme financement structuré ; le fonds commun de
créances créé à cet effet est un émetteur
nouveau qui n'entre pas dans les limites de risques le concernant.
JAFFEUX (1997) et ensuite MITCHELL (2004)
montrent que la titrisation permet d'abaisser le coût du crédit.
L'amélioration du risque de crédit du panier
d'actifs permet au cédant d'accéder à des sources de
financement moins onéreuses. L'opération de titrisation inclut
toujours, en raison du transfert de risques vers les porteurs de parts, un
système de garanties tel qu'il améliore la notation du
cédant. Ce qui induit en effet un abaissement du coût du
crédit comparé aux financements de type émission de titres
ou emprunt obligataire. Comme l'agence de notation analyse les débiteurs
liés aux parts émises, l'établissement cède en
général les créances les mieux notées afin
d'obtenir un coût de refinancement inférieur à ce qu'il
aurait pu obtenir sur le marché obligataire qui prend en compte la
totalité des risques de l'établissement . ROSE
(1998) critique l'élimination des actifs à faible risque
du bilan des banques ce qui serait loin d'améliorer leur
solvabilité. Mais Demartini et Pansard (2005) ruine
cette argumentation en ajoutant que le nouvel accord de Bâle par une
meilleure différenciation des risques, devrait contribuer à
réduire l'intérêt de l'arbitrage sur fonds propres
réglementaires et limiter la cession des actifs peu risqués.
L'abaissement du coût de refinancement découle aussi du fait que
les actifs titrisés deviennent isolés du cédant. Une fois
les actifs cédés au FCC, les détenteurs de titres n'ont
plus qu'à se préoccuper du risque de crédit de celui-ci.
Ainsi pour les banques, la titrisation de leurs créances est sans aucun
doute un moyen d'accéder au marché à des conditions
favorables si la notation du fonds commun de créances est bonne.
Contraignant les banques à s'améliorer et à
améliorer leur rating, la titrisation leur permettra par là
même de diminuer leur coût de refinancement. De plus, le
rechargement du fonds commun de créances, grâce ainsi à
l'allongement de la durée de vie moyenne du fonds, peut encore
réduire les coûts de la titrisation. JAFFEUX
(1997) complète que la titrisation assure une meilleure
transparence de la qualité des prêts. Car le rating avec
ses multiples analyses de crédit, le suivi régulier des risques
de crédit et le rehaussement contribuent sûrement à
améliorer la transparence de la qualité des prêts,
caractéristique qui fait défaut dans le système classique
de prêts. BRI et PRAET (2005) confirme que la
titrisation permet aux intermédiaires financiers qui en prennent
l'initiative de réduire leurs exigences de fonds propres, de
réduire leur coût de refinancement, d'accéder à de
nouvelles sources de refinancement et de gérer les actifs.
JAFFEUX (1997) relativise l'économie de fonds propres
et montre qu'il y a une disproportion entre cette économie et le montant
de crédits à titriser, l'impact de la sortie d'une créance
sur l'amélioration du ratio Cooke étant fonction de la
pondération appliquée à la créance
cédée. Ainsi, citant LEIBUNDGTUT (1993) puis GRANIER et
JAFFEUX (1997), elle montre, sur la base du ratio minimum de fonds
propres durs (tier1) de 4%, qu'il faut titriser 25 milliards de créances
pondérées à 100% pour disposer d'une économie de
fonds propres d'un milliard, et 50 milliards de créances
pondérées à 50% pour une économie
de fonds propres d'un milliard. Demartini et Pansard (2005)
remarque que le nouvel accord de Bâle a
réduit l'intérêt même de l'arbitrage sur fonds
propres réglementaires (Regulatory Capital Arbitrage) par l'introduction
d'une meilleure différenciation des risques. Ainsi, les prêts aux
entreprises bien notées, ont vu leur coût en fonds propres
diminuer, ce qui pourrait réduire l'incitation pour les banques
à titriser ce type de créances et aboutir à de profondes
modifications dans la composition des portefeuilles d'actifs
cédés.
JAFFEUX (1997) explique la capacité de
la titrisation à assurer une meilleure allocation des actifs
détenus par la banque. Puisque la
déconsolidation des actifs permet à celle-ci de
transférer sur les fonds communs de créances les risques
liés à une immobilisation de créances, risques à
priori supportés par les fonds propres. La titrisation offre ici un
double avantage : la résolution du problème de
l'improductivité des créances détenues à l'actif
des bilans et la disparition du risque de défaillance des
débiteurs qui sera alors supporté par les souscripteurs de parts,
ou plus exactement par les garanties mises en place. Pour les actifs tels ceux
adossés à l'immobilier, c'est un avantage certain. D'ailleurs,
l'auteur conclut que plus les établissements de crédit sont sous
capitalisés, plus ils devront recourir à la titrisation. Ceci
concerne particulièrement, outre les banques commerciales
détenant des crédits longs, les banques de l'habitat, les banques
de développement, et dans une moindre mesure, nos institutions de micro
finance de l'UEMOA, si elles sont créées sous forme de
société de capitaux et gérées sainement. Plus
récemment, GENSSE et TOPSACALIAN (2001) décrit
que la titrisation a la capacité d'améliorer globalement la
gestion des risques bancaires et de conforter les trois principaux ratios
suivis par les banques en vue de s'assurer de la solvabilité et de la
liquidité de leurs établissements : le ratio de fonds
propres et de capitaux permanents, le ratio de liquidité et le ratio
de risques. En cas de titrisation en effet :
* Le ratio de liquidité est
amélioré, puisqu'elle occasionne une entrée de
liquidité pour la banque et permet en outre une disparition de son bilan
des engagements à terme qui auront été
cédés.
* Le ratio de risques ou de
solvabilité est amélioré puisque le fait de céder
certaines créances permet à la banque de réduire son
assiette de risques.
* Le ration de fonds propres, le plus suivi
actuellement, est amélioré car la créance
cédée n'est plus soumise à un provisionnement quelconque
au niveau des fonds propres.
En outre, ROSE (1998) met en exergue
l'effet « coup de fouet » par lequel
les banques disposent, à travers la titrisation, d'un instrument
supplémentaire de diversification des risques de taux face à la
recrudescence inattendue des remboursements anticipés. En effet, si les
crédits titrisés sont à taux fixes, les emprunteurs ont
tout intérêt à rembourser leur crédit par
anticipation et à contracter un nouveau prêt lorsque le taux du
marché tombe suffisamment au-dessous du niveau établi à
l'origine, pour pouvoir couvrir les frais liés à la
renégociation du prêt. La recrudescence inattendue des
remboursements anticipés aura alors pour effet de réduire la
valeur des titres adossés aux créances cédées.
Ainsi la sensibilité des obligations adossées à des
crédits hypothécaires aux fluctuations des taux est plus
importante que celle des obligations classiques à taux fixes. Cette
sensibilité accrue est appelée effet
« coup de fouet ». Techniquement, les obligations
adossées se comportent comme si elles avaient une duration
négative. Ainsi elles permettent aux banques, souvent endettées
à taux variables, de bénéficier d'un instrument
supplémentaire de couverture de risques de taux. En effet, les
obligations adossées peuvent faire l'objet d'une «double
titrisation ». Leur démembrement en émettant des
titres conférant le droit aux intérêts et des titres
conférant le droit au remboursement du capital et la possibilité
offerte aux emprunteurs de rembourser leur crédit par anticipation
expliquent l' effet «coup de fouet» ou
sensibilité accrue des obligations adossées aux fluctuations des
taux d'intérêt du marché. Ces titres offrent donc de
nouvelles possibilités de couverture ou de diversification des risques
de taux.
JAFFEUX (1997) atteste que la titrisation
améliore la rotation des actifs et la rentabilité des capitaux
investis : « La titrisation
provoque justement un phénomène inverse au ratio Cooke, puisqu'il
s'agit d'un effet de levier qui accroît la rentabilité des fonds
propres. Le démantèlement permet non seulement d'accroître
la liquidité et de créer de nouveaux titres plus ou moins
standardisés, mais aussi de créer plus de valeur que celle
générée par les activités de crédit
classiques. L'objectif principal de l'émetteur est de percevoir des
intérêts et des honoraires d'un montant supérieur au
coût de la mise en place du prêt, du service de celui-ci et du
rehaussement du crédit, et de dégager ainsi un
bénéfice ». La titrisation permet aux banques de sortir
du schéma classique de la stricte proportionnalité du capital aux
actifs, schéma selon lequel le développement de la distribution
du crédit est conditionné par un accroissement proportionnel des
fonds propres. La sortie de créances induit une réduction des
besoins en fonds propres et se traduit par une augmentation du taux de
rentabilité financière et un meilleur taux de solvabilité.
Le rapport entre le résultat net et les capitaux propres
s'améliore si ceux-ci sont réduits pour être ajustés
à la contraction de l'actif liée à la cession des
créances ce qui équivaut à une nette amélioration
de la rentabilité financière.
Améliorant l'offre de titres et apparaissant comme un
moyen de diversification de leurs portefeuilles, la titrisation
permet une spécialisation par fonction des acteurs du
système financier, les établissements financiers
ayant la possibilité de concentrer leurs moyens sur les fonctions pour
lesquelles ils bénéficient d'un avantage concurrentiel, par
exemple la production des prêts pour les banques.
Les banques participant en plusieurs qualités à
la titrisation (prêteur, organe de gestion, dépositaire ou tiers
procurant un rehaussement de crédit) peuvent accroître et
diversifier leurs revenus de commissions et d'intérêts. En
transférant leurs actifs, elles peuvent maintenir leur volume de
prêts ou investir leurs produits dans d'autres activités,
évitant ainsi une concentration de leur risque de crédit. Pour
les banques, le principal avantage de la titrisation résulte du
transfert, vers d'autres parties, des risques liés aux prêts, ce
qui libère des fonds propres pour des crédits qu'elles ne
seraient pas, sinon, en mesure d'octroyer. La conversion de créances non
liquides en fonds disponibles améliore leur situation en termes de
financement et de liquidité.
Comité de Bâle (1992) critique
la perte de contrôle des banques et leur dépendance
vis-à-vis des agences de notations et d'autres intervenants. Les
institutions financières non bancaires y prennent une part active et
importante, car le mécanisme de la titrisation, en dissociant des
fonctions globalement dévolues jusque-là aux
établissements de crédit, leur ouvre un marché. Ces
structures peuvent créer un flux de crédit direct d'investisseur
final à emprunteur, réduisant par là le rôle des
banques dans l'intermédiation. Et s'interroge sur les
conséquences, pour la profession bancaire, de la concurrence de
participants non bancaires qui peuvent encourir les mêmes risques sans
faire nécessairement l'objet d'un contrôle adéquat.
Demartini et Pansard (2005) signale que
« l'existence d'une épargne bancaire abondante, qui fournit
aux banques les ressources nécessaires au financement de leur politique
de crédit, ne favorise guère le recours à la
titrisation ». Ceci pourrait constituer une explication plausible de
la situation de l'UMOA caractérisée par la surliquidité
bancaire et la non rémunération des avoirs en comptes courants.
En effet « la trésorerie nette dégagée par le
système bancaire demeure excédentaire de 841 milliards (contre
831 milliards un an auparavant) dont 25% en caisse, le reliquat étant
détenu en comptes auprès de l'Institut d'émission et chez
les correspondants » (Rapport annuel 2006, Commission
Bancaire). JAFFEUX (1997) établit le dilemme
Gain et Coût de la titrisation et nuance que pour la rentabilité
de l'opération de titrisation, l'écart de taux entre les parts
des FCC et les obligations classiques est fondamental. Les spreads
différencient les FCC émetteurs. Si en plus
l'écart de taux est réduit, le gain né d'une
opération de titrisation sera sans doute plus faible alors que les
coûts récurrents de l'opération, en France par exemple,
étaient pour partie fixe :
- les frais de constitution évalués dans une
fourchette de 0,1% à 0,25% de l'encours de créances
cédées ;
- la commission d'arrangeur comprise entre 0,15% et 0,35% de
l'encours ;
- la commission de garantie et de placement des titres entre
0,25% et 0,50% du montant des parts émises
- les frais de gestion liés au fonctionnement du fonds
commun de créances entre 0,15% et 0,30% de l'encours des créances
cédées.
- La rémunération des agences de notation.
- Sans oublier que la titrisation n'est pas une
opération simple, ce qui oblige les établissements de
crédit à se doter d'une équipe de titrisation pour
prétendre pratiquer cette activité.
MITCHELL (2004) prolonge que les marges sur
les actifs inclus dans le panier doivent être assez élevées
par rapport aux marges versées aux investisseurs pour permettre aux
arrangeurs et autres tierces parties de gagner des commissions pour couvrir les
frais de mise en place. De confortables marges pour une classe
particulière d'actifs améliorent l'opportunité pour les
arrangeurs de créer des titres adossés à cette classe
d'actifs. L'auteur complète que, si les marchés de titrisation ou
de transfert du risque de crédit poussent les prêteurs à
céder souvent les crédits de mauvaise qualité ou à
acquérir des protections contre ces risques de crédit et si
l'évaluation sur ces marchés concerne en priorité les
actifs de mauvaise qualité, des prix élevés
pourraient imposer aux prêteurs disposant d'actifs de grande
qualité une grosse perte en cas de cession de tels actifs.
JAFFEUX (1997) relève que
« la titrisation se heurte souvent à une inadaptation du
système informatique donc sur la difficulté à
établir l'étude du risque spécifique de
portefeuille ». L'agence de notation, qui doit
réaliser un audit du bilan de l'établissement de crédit
cédant les créances pour analyser le risque de crédit que
ce dernier n'a pas toujours mesuré, peut être bloqué,
l'établissement de crédit ne disposant pas souvent d'historiques
sur les impayés, les remboursements anticipés, les pertes de
créances ou les taux de provisionnement. Par conséquent, la
titrisation nécessite souvent une modernisation préalable des
opérations logistiques et du système d'information. Un outil
informatique adapté sera un apport essentiel.
En outre le risque inhérent à la
détention de créances pourrait s'accentuer aussi en raison d'une
gestion internationale des créances détenues sur des tiers dont
il sera peut-être parfois malaisé de déterminer la
qualité de signature. Puis, l'auteur dénonce le
fardeau fiscal pouvant découler de l'accélération de
l'enregistrement des revenus dans les livres du cédant. Les revenus
résultant de la vente de créances bancaires doivent en effet
être comptabilisés au cours de l'année où
l'opération de titrisation a eu lieu. Cela peut représenter un
énorme fardeau fiscal en raison de l'impossibilité
d'échelonner les paiements d'impôts sur plusieurs années.
« Seules les établissements de crédit encourant des
pertes opérationnelles nettes importantes au cours d'une année
pourront considérer avantageuse l'actualisation des revenus futurs
à cette même année ». Il est à noter
cependant que ce risque disparaît si la banque ne fait pas une
titrisation ponctuelle mais a adopté la technique et la pratique
régulièrement à travers un programme renouvelé de
titrisation. En d'autres termes, l'inconvénient du fardeau fiscal n'est
pas significatif si la banque a pour métier la production de prêts
de qualité et leur titrisation systématique. ROSE (1998)
relève un lien étroit entre la complexité de la
titrisation et l'augmentation du coût des contraintes
réglementaires. En effet, des problèmes d'ordre
réglementaire peuvent être soulevés si les autorités
de surveillance ou la banque elle-même estime qu'elle doit continuer
à supporter une partie du risque de crédit au delà de sa
participation au « rehaussement du crédit » afin de
préserver sa réputation et permettre la réalisation dans
de bonnes conditions de futures opérations de titrisation. Le risque de
réputation s'accroît lorsque la défaillance finale n'a pu
être anticipée ni couverte. Plusieurs préoccupations sont
alors apparues, notamment la crainte que le risque de crédit reste
supporté par le cédant si le transfert de créances ne
correspond pas à une cession véritable et le danger, pour une
banque, d'une détérioration de la qualité de ses actifs si
elle titrise ses meilleurs avoirs. On suppute qu'un programme permanent de
titrisation requiert un portefeuille de prêts en expansion, ce qui
pourrait conduire un établissement à assouplir ses
critères d'octroi pour s'assurer le volume nécessaire de
prêts. En réalité, Il convient plutôt de souligner
que les établissements ayant un programme permanent de titrisation ont
tout intérêt à maintenir la qualité de leur
portefeuille de prêts. Toute détérioration affecterait leur
réputation et leur note ainsi que les exigences de fonds propres
imposées par les autorités prudentielles.
Mais effectivement si le processus de titrisation n'est pas
mené de manière prudente, l'initiateur peut se voir
confronté à des risques qui n'auront pas été
couverts par des fonds propres. Si les risques opérationnels et
juridiques sont inhérents à toute activité bancaire, ils
sont d'autant plus grands que les opérations sont complexes. Le
principal risque pour une banque résulte de l'absence de cession
véritable, la forçant ainsi à endosser une partie ou la
totalité des pertes au cas où les actifs cédés
deviendraient improductifs. Même lorsqu'une banque a constitué un
lot de créances et l'a effectivement transféré, elle peut
néanmoins se trouver exposée à des pressions morales pour
racheter les titres s'ils deviennent improductifs. Plusieurs
éléments pourraient renforcer ce genre de pressions: la
complexité des montages, les fonctions que le vendeur continue
généralement d'exercer en rapport avec l'opération
à l'issue de la titrisation, et surtout le fait que l'identité du
vendeur des actifs sous-jacents est parfaitement connue, ce qui peut
créer des liens, au moins moraux, avec l'acheteur qui pourraient le
contraindre à soutenir l'opération pour défendre sa
réputation.
Avantages et inconvénients pour les
actionnaires des banques
JAFFEUX (1997) considère aussi que la
titrisation est plus intéressante que l'octroi de ressources par
augmentation de capital, plus lourd et plus coûteux avec l'effet de
dilution qu'il peut engendrer:
L'auteur distingue bien
l'augmentation du capital de la banque (émission de
nouvelles actions) qui renforce le haut du bilan de l'établissement et
son fonds de roulement, les ressources étant utilisées pour le
financement d'immobilisations (prêts, créances, actifs), et
la cession de créances par titrisation, qui
allège plutôt le bas du bilan et accroît les ressources du
long terme de la banque tout en limitant le risque de liquidité. C'est
un avantage indéniable qui permet à la banque de se conformer
facilement aux normes des ratios prudentiels COOKE précise l'auteur qui
soutient «que conçues afin de limiter l'effet de levier des fonds
propres des établissements de crédit, le respect de ces normes
conduit à réduire malheureusement les financements
accordés » aux tiers et à l'économie et
constitue sans doute un frein à la croissance économique de nos
Etats. La titrisation réduisant le dénominateur et
améliorant le ratio Cooke, l'établissement de crédit
dispose par cette technique d'une action qui lui permet d'agir sur son encours
de risque. La titrisation sert ici à alléger le bilan de la
banque, pour en améliorer la liquidité, en sortir les
créances douteuses ou réduire les obligations de
l'établissement en matière de ratio de solvabilité
jugées, à tort ou à raison, trop coûteuses. La
titrisation facilite donc le respect du ratio de solvabilité.
L'établissement de crédit qui cède un risque sur actif
est libéré des contraintes de couverture de ce risque par fonds
propres. La titrisation est un outil efficace pour la gestion des états
financiers des banques. En effet, plutôt que d'inscrire une nouvelle
dette au bilan, la banque peut soustraire de celui-ci la valeur des actifs
titrisés, améliorant ainsi la proportion de ses fonds propres par
rapport à ses dettes. La titrisation, rapporte Comité de
Bâle (1992), accroît le risque moyen sur les fonds propres
et les actions des banques en encourageant les banques à céder
leurs actifs de meilleure qualité pour assurer la réussite du
placement des TAA. Les exigences des investisseurs et des agences de notation
les y incitent, en effet. Ce qui peut être à la base de conflits
d'intérêt avec les actionnaires.
Avantages et inconvénients pour les
emprunteurs
Comité de Bâle (1992)
déclare que la titrisation offre aux emprunteurs d'importants
avantages (elle améliore, en général, la liquidité
des marchés du crédit, accroît l'offre de crédit et
abaisse le coût des emprunts) mais nuance cette argumentation en
ajoutant qu'une diminution de la place des banques pourrait également
affaiblir la relation entre prêteurs et emprunteurs, surtout dans nos
pays où les banques jouent un rôle prépondérant dans
l'économie. Pour Gorton et Pennacchi (1995) et
Morrison (2002), le prêteur achète une protection
contre le risque de crédit à l'insu de l'emprunteur et contre les
souhaits de celui-ci. Ainsi réalisées, ces acquisitions de
protection contre le risque de crédit, transferts de risques ou cessions
de crédits, peuvent envoyer un signal négatif au sujet de la
qualité de l'emprunteur ou l'empêcher d'obtenir les
bénéfices de la certification bancaire. En l'absence d'un
marché de transfert du risque de crédit, les emprunteurs
bénéficient d'une certification bancaire, puisque les banques les
suivent et les obligent à choisir les meilleurs projets
d'investissement. La certification bancaire permet aux emprunteurs de combiner
émissions obligataires moins onéreuses et prêts
bancaires.
Morrison (2002) critique la motivation accrue
pour le prêteur de provoquer plus rapidement les défauts de
paiement, étant donné qu'il s'est débarrassé du
risque de crédit. Un prêteur qui a acquis une protection contre le
risque de crédit à travers la titrisation a moins
d'intérêt à bien suivre et accompagner son emprunteur.
L'auteur prolonge le problème du relâchement du
suivi régulier de l'emprunteur par le prêteur, une fois le risque
de crédit transféré. Outre le bénéfice de
la certification bancaire, les emprunteurs considèrent leurs
crédits comme des transactions privées et ne souhaitent aucune
publicité sur leur structure financière ni sur leur endettement.
De même, en cas de restructuration, l'emprunteur préfère
traiter avec une contrepartie clairement identifiée qu'avec un grand
nombre de détenteurs de sa dette, attitude rapportée par
Caouette et al (1998) cité par Morrison
(2002). L'introduction de la titrisation ou de tout autre instrument de
transfert du risque de crédit permettant aux banques d'acheter une
protection contre le risque de crédit, peut réduire la motivation
des banques à suivre et à encadrer rigoureusement les
emprunteurs. Considérant que le management des prêts accompli par
les banques est irremplaçable, les emprunteurs risquent
- d'éviter l'emprunt bancaire,
- d'émettre des obligations pourries à haut
rendement
- ou d'opter pour des projets économiques de moindre
qualité.
Cela ralentirait la croissance économique et
réduirait le bien-être social.
Pour qu'une banque continue à fournir des services
d'évaluation de prêt, une fois qu'elle a vendu ce prêt,
Gorton et Pennacchi (1995) suggère que le contrat de
vente l'y contraigne: ou la banque fournit une garantie implicite, ou elle
conserve une portion du prêt. Des tests empiriques confirment que les
banques qui cèdent des prêts doivent convaincre les
acquéreurs sur leur engagement à continuer à bien suivre
et à bien soutenir les emprunteurs, et que la meilleure façon
d'accomplir ceci est de conserver une portion du prêt cédé.
En plus, plus le prêt est risqué, plus élevée doit
être la portion retenue par la banque. Kiff et al (2002)
confirme que le problème est résolu ou atténué par
certaines caractéristiques particulières des instruments de
transfert du risque de crédit.
Incidences sur le système
financier :
JAFFEUX (1997) remarque que cette technique
présente l'intérêt d'un refinancement des banques, non plus
par la banque centrale (abandon du réescompte), mais par le
marché des capitaux. L'établissement de crédit substituant
des créances inscrites au bilan à des titres financiers
ajuste ainsi au mieux ses besoins de trésorerie grâce à la
cession des créances. S'inspirant de FLAVEN (1997),
l'auteur ajoute que « la titrisation des prêts bancaires permet
de corriger aussi la structure des émissions du marché
obligataire dominé en général par les émissions
publiques, le secteur public absorbant une bonne partie des liquidités
qui échappent de ce fait aux banques en quête de financement, donc
à l'économie ainsi évincée ». Ce
problème est perceptible sinon réel dans l'UMOA où les
émissions publiques sont fréquentes et dominantes. ROSS
(1976) cité par MITCHELL (2004) est le premier auteur qui a
démontré que la création de plusieurs tranches de droits
sur des actifs existant peut améliorer l'efficience en enrichissant et
en élargissant les marchés financiers Si les arrangeurs sont en
mesure d'identifier les sources des lacunes des marchés pour certains
groupes d'investisseurs, alors l'émission des instruments de financement
structuré peut être bénéfique , étant
donné que les investisseurs peuvent ainsi obtenir des avantages de
diversification en ajoutant ces tranches à leurs portefeuilles. Par
conséquent, lorsque les marchés sont incomplets, la
création de nouveaux types de titres aide améliorer la
maturité et l'efficience desdits marchés. BRI et PRAET
(2005) approuve que la titrisation élargit les émissions
de titres et contribue à l'expansion de la finance directe ou
désintermédiation. Toutefois, ceci aura tendance à
accroître la dépendance du système financier
vis-à-vis des marchés. Une diminution de la place des banques
pourrait également affaiblir la relation entre prêteurs et
emprunteurs, surtout dans nos pays où elles jouent un rôle
prépondérant dans l'économie. Demartini et Pansard
(2005) confirme que la titrisation améliore l'offre de titres
et permet d'atténuer les déséquilibres ou écarts
persistants entre l'offre et la demande de titres. La titrisation est
susceptible d'améliorer la qualité et la structure de
l'épargne, transformant une bonne partie de l'épargne liquide en
épargne longue à même de financer l'économie tout en
améliorant la liquidité des marchés de crédit. Elle
accroît l'offre en drainant notamment des capitaux étrangers et
abaisse le coût des emprunts ce qui représentent d'importants
avantages pour les emprunteurs, pour les projets d'investissement et la
croissance économique de l'Union. Par son effet positif sur l'offre de
titres, la titrisation peut relancer significativement la croissance et
constituer un remède efficace à la récession et à
la pauvreté. BRI et PRAET (2005) complète que
la titrisation transforme sans doute le risque de crédit. Cette division
des risques facilite le transfert du risque de crédit et contribue
à l'efficience des marchés. Il en résulte une
amélioration de la liquidité et de la dispersion du risque de
crédit. La titrisation par conséquent améliore la
stabilité financière. La titrisation améliore la
liquidité des actifs autrement illiquides et conduit à la
création d'instruments avec des niveaux de risque et de rendement
adaptés aux besoins des investisseurs, quelles que soient leurs
contraintes et préférences. Elle représente un
progrès vers des marchés financiers dotés d'une meilleure
confrontation de l'offre et de la demande, de l'efficience accrue dans la
formation des prix et d'une meilleure distribution du risque de crédit.
Elle améliore aussi la capacité des intervenants à
gérer activement les risques financiers si bien que ceux-ci sont mieux
disperses et plus facilement absorbés suggérant que tout choc
sera anéanti à travers une multitude de participants.
BRI et PRAET (2005) prolonge que les marchés
d'instruments structurés de dette intéressent les banquiers
centraux. Avec la titrisation, les modèles et méthodologies
d'analyse et de mesure du risque de crédit s'améliorent
constamment avec par exemple l'estimation et l'incorporation des
corrélations de défaut au sein des débiteurs du panier
sous-jacent. Les banquiers centraux peuvent donc extraire de précieuses
informations de ces analyses et des prix des instruments structurés pour
améliorer leurs efforts de surveillance. Au contraire, JAFFEUX
(1997) attire notre attention sur « l'effet pervers de la
titrisation qui reporte le risque sur le marché et prévient qu'il
peut en résulter la détention de créances de
qualité fort moyenne à haut rendement, l'équivalent des
fameux junks bonds ». L'établissement de
crédit ne prêterait pas véritablement attention aux
crédits octroyés dans la mesure où, à priori, il
aurait l'intention de les titriser. Surtout qu'à condition d'y mettre le
prix, on peut en théorie titriser n'importe quel produit. La
titrisation, mutualisation des risques conduirait donc à une
élévation du niveau général de ceux-ci. Cet
argument justifie à lui seul qu'on s'entoure de garanties
significatives. CALVET (2002) objecte que la titrisation
représente une possibilité de cession pour les crédits de
toute nature, à l'exception des crédits douteux. La
problématique de l'identification et de la répartition des
risques au sein de la sphère financière fait l'objet d'une
attention croissante de la part de l'ensemble de la communauté
financière. Les régulateurs, qu'ils soient de marché ou
prudentiels, sont soucieux de limiter les transferts de risques en direction
d'institutions ou d'individus peu à même de les évaluer et,
le cas échéant, de les assumer. Le phénomène de la
titrisation, qui consiste à transférer au marché des
risques cantonnés jusque-là au sein de la sphère bancaire,
entrent dans le cadre de cette problématique générale.
L'un des avantages de la titrisation, à savoir la transformation de
prêts non liquides en titres négociables, peut aboutir à un
accroissement de la volatilité du prix des actifs, même si les
rehaussements de crédit atténuent ce mouvement. AGLIETTA
2 (2001) renforce que la volatilité peut être
accentuée par des facteurs étrangers aux variations de la note de
crédit de l'emprunteur, les marchés financiers étant
autoréférentiels. En outre, si les banques disposent surtout
d'actifs dont le prix de marché est facile à établir, il
se pourrait, dans certaines circonstances, qu'on tende à leur appliquer
le critère de valeur de liquidation et non d'exploitation. La
valorisation des banques par le marché peut donc leur être
préjudiciable et périlleuse. Comme la titrisation autorise
l'octroi de prêts en dehors des contraintes de fonds propres, elle
pourrait amener le système bancaire à être
sous-capitalisé, rendant ainsi l'ensemble du système financier
plus vulnérable, à l'échelle nationale et internationale.
Lorsque le système bancaire dispose d'une large base de fonds propres,
il peut absorber les pertes sur prêts; plus cette base est
étroite, plus les pertes doivent être partagées par
d'autres intervenants. Ce risque est marqué dans nos pays où les
banques sont et demeurent les principaux intermédiaires financiers. Si
les transferts et la titrisation d'actifs peuvent améliorer l'efficience
du système financier et l'offre de crédit en donnant aux
emprunteurs un accès direct aux investisseurs finals, ils peuvent, en
revanche, restreindre l'action des banques dans l'intermédiation
financière. Dans la mesure où ce phénomène pourrait
réduire la part des actifs et engagements financiers détenus par
les établissements bancaires, la mise en oeuvre de la politique
monétaire pourrait être rendue plus difficile dans les pays
où l'institut d'émission s'appuie sur des réserves
obligatoires variables. D'aucuns pensent que la titrisation soumettrait la
Banque Centrale à la remorque des marchés financiers. L'analyse
empirique de Estrella (2002) montre que du fait de la
titrisation des prêts immobiliers aux Etats-Unis les agrégats
macroéconomiques sont devenus insensibles à la politique
monétaire. Bernanke et Gertler (1995) expose aussi que
la titrisation anéantit l'impact que la politique monétaire est
supposée avoir sur la capacité des banques à se refinancer
et à octroyer des crédits. Toutefois, Stanton
(2002) avertit que cette conclusion n'est pas applicable à
toute activité de titrisation. Il y a des raisons de suspecter que
l'impact des titrisations de prêts non immobiliers pourrait être
différent. Par exemple, Stanton (1998) et
Minton et al (1999) montrent des banques et industries
titriser davantage en pleines récessions alors que la titrisation des
prêts hypothécaires chute dans le même temps.
AGLIETTA 2 (2001) reconnaît que la titrisation modifie
les canaux de transmission de la politique monétaire. Plus les
marchés financiers étendent leur emprise sur l'économie,
plus la stabilité financière est un bien commun qui dépend
d'une régulation prudentielle exigeante : éviter la
sous-évaluation des risques parmi les intermédiaires financiers.
Or l'infinie diversité des moyens de décomposer et de recomposer
les risques qui caractérise la titrisation rend ce travail très
difficile. Les dérèglements de la liquidité peuvent
provenir de l'inflation ou tout aussi bien de l'instabilité
financière. BRI et PRAET (2005) relève que la
titrisation peut conduire à des situations où certains
investisseurs sont plus exposés, générant une exposition
inattendue au risque de défaut puis dénonce la forte
dépendance des opérations de titrisation par rapport à la
notation financière et au rôle prépondérant
joué par les agences de notation, ce qui peut avoir des
conséquences au plan de la stabilité financière. Il est
donc légitime pour la Banque Centrale de suivre le fonctionnement des
marchés d'instrument structurés et de canaliser ses impacts sur
la stabilité financière. Si par le passé l'attention des
Banques Centrales dans le domaine de la stabilité financière se
focalisait sur les banques et autres institutions de dépôts,
l'intervention de participants non bancaires signifie que les problèmes
systémiques ne proviendront plus seulement du secteur bancaire. Les
désordres lorsqu'ils surviennent peuvent être plus difficiles
à détecter et à résoudre. Avec la titrisation,
plusieurs intervenants non bancaires sont plus étroitement
impliqués dans la gestion des risques de crédit et du
marché que par le passé. Ceci change les besoins d'information.
Le transfert du risque de crédit sur le marché complique la
surveillance de l'évolution du risque de crédit à travers
le développement du marché. Surtout si l'activité de
certains intervenants n'est réglementée et suivie comme celle des
banques. Les Banques Centrales et autres autorités peuvent être
concernées par l'amélioration de la transparence du financement
structuré. AGLIETTA 2 (2001) conclut
que dans un tel contexte la politique monétaire doit avoir des objectifs
élargis et que les banques centrales doivent actualiser leur rôle
de prêteur en dernier ressort. BRI et PRAET (2005) 'vec
la recherche accrue de la liquidité du marché, les banques
centrales peuvent réorienter leurs traditionnelles approches pour
garantir la stabilité financière en facilitant le fonctionnement
régulier des marchés. Pour ROSE (1998), la
question de fond réside dans l'incidence ou l'impact possible de la
titrisation sur la structure des systèmes financiers. Si les
activités de crédit ne sont plus réservées aux
banques, la possibilité de «démanteler» le cycle de
crédit aura sans doute comme effet d'accélérer la
reconfiguration des frontières institutionnelles et les
définitions institutionnelles actuelles perdront en grande partie leur
substance. La titrisation, si elle atténue le risque de crédit
pour le cédant, crée de nouveaux risques même en dehors de
toute asymétrie d'information entre intervenants. : risque de
contrepartie (la titrisation fait intervenir plusieurs participants, ce qui
démultiplie le risque de contrepartie, le risque qu'une partie à
l'opération de titrisation ne remplisse convenablement ses
obligations.), risque de marché (risque de taux d'intérêt
ou de taux de change essentiellement) et risque juridique (la complexité
des opérations de titrisation est telle que le contrat peut ne pas
couvrir tous les risques potentiels.) C'est pourquoi Merritt et al
(2001), Tolk (2001), Kessler et Levenstein (2001), O'Kane et McAdie
(2001) recommandent une rédaction minutieuse du contrat de
titrisation et une bonne et solide compréhension de la dynamique de la
titrisation.
Si la titrisation des prêts bancaires peut
compléter la gamme des produits disponibles sur les marchés et
contribuer à une meilleure dispersion du risque de crédit, elle
soulève alors un certain nombre de questions, avec des implications
potentielles sur la stabilité financière. Les titres
structurés posent des défis particuliers. Leur montage
spécifique complique l'évaluation du risque, ce qui, à son
tour, peut amener les investisseurs, dans un souci de « diligence
raisonnable » à s'appuyer davantage sur la notation et
à y accorder une confiance excessive alors qu'elle ne mesure pas
parfaitement le risque de crédit. Le risque de modèle constitue
une préoccupation, étroitement liée à la
complexité des instruments structurés et à la
sensibilité du risque de chaque tranche aux hypothèses
divergentes sur lesquelles se fondent les notations. Les instruments
structurés peuvent exposer certains investisseurs à des risques
non voulus, à des pertes inattendues (PI), ce qui remet
en cause la pertinence des mandats de gestion imposant des critères de
note et cadres analogues. Ces mandats définissent-ils vraiment des
niveaux maximums de risque pour des portefeuilles autorisés à
comporter des produits structurés ? Par ailleurs, la
répercussion d'une mauvaise évaluation d'un paramètre du
modèle, tel la corrélation de défaut,
peut être amplifiée par des problèmes de gouvernance :
les détenteurs de la tranche inférieure, en général
le cédant ou l'arrangeur, pourraient favoriser les lots d'actifs,
composés de signatures présentant une forte corrélation de
défaut, aux dépens des souscripteurs de la tranche
supérieure.
Prenant conscience de ces problèmes, les investisseurs
avertis ne s'appuient plus exclusivement sur la notation pour décider de
souscrire des produits structurés, mais ont tendance à la
considérer comme une simple composante d'un problème plus vaste
de gestion du risque. Selon CSFM (2005) et BCE (2004), les
investisseurs qui n'ont pas la capacité d'analyser les instruments
structurés affirment qu'ils évitent d'y recourir.
Néanmoins, dans la mesure où les marchés financiers
d'instruments structurés s'élargissent au point d'attirer des
petits investisseurs ou des établissements moins
spécialisés, le risque de pertes non anticipées ou pertes
inattendues (PNA, PI) demeure réel.
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